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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 22 mars 2001

• 0905

[Traduction]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien est maintenant ouverte. Nous nous réunissons aujourd'hui à la suite d'une motion conjointe de Mme Gagnon, M. Sauvageau et M. Harvard, qui a été approuvée par le comité et qui vise à ce que nous entendions des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ainsi que du ministère du Patrimoine canadien au cours d'une rencontre sur le contenu culturel de l'accord de libre-échange des Amériques.

Avant de donner la parole aux témoins, je demande aux membres du comité de bien vouloir rester une dizaine de minutes après la réunion officielle. Nous avons quelques questions d'ordre administratif à régler.

Nous avons une motion de Mme Gagnon sur laquelle nous devons nous prononcer et nous devons aussi parler brièvement du mandat pour notre étude sur la radiodiffusion—afin non pas de l'approuver aujourd'hui, mais d'en prendre connaissance—ainsi que de la liste des témoins relativement au projet de loi dont nous serons bientôt saisis, laquelle liste doit être examinée et discutée.

Il y a donc trois ou quatre points dont nous devons discuter. Si vous voulez bien m'accorder 10 minutes après la réunion, je propose que nous mettions fin à notre audience à 10 h 45 pour ensuite siéger à huis clos pendant 15 minutes.

Madame Gagnon.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Avant que les fonctionnaires fassent leur exposé sur la ZLEA, j'aimerais savoir pourquoi la motion visant à recevoir la ministre ici, à ce comité, a été rejetée. Je n'étais pas ici la semaine dernière.

Le président: On ne va pas refaire la discussion. Il y a eu une discussion d'au moins une demi-heure. À la fin—et je pense que votre collègue était là—il y a eu un consensus entre M. Sauvageau et M. Harvard et tous les membres en vue d'écouter les officiels. On pourra revenir sur la discussion, mais je pense que ça a été fait. Je ne pense pas qu'on doive refaire cette discussion aujourd'hui. On a dit que la ministre n'avait aucun pouvoir sur les négociations en cours, que ces négociations étaient sous l'égide du ministre Pettigrew. En fait, c'est M. Sauvageau lui-même qui a suggéré qu'on entende des officiels qui sont responsables de la négociation.

Mme Christiane Gagnon: Oui, parce qu'on savait qu'on n'avait pas le choix. Ce que je veux dire, c'est qu'on sait que les députés ministériels du comité ne voulaient pas que la ministre vienne ici. Il faut aussi dire cela.

Le président: Ce n'était pas ça du tout, madame Gagnon. Écoutez, il y a eu une discussion et vous n'étiez pas là. Vous avez été dûment représentée par les membres de votre parti et la discussion a été très ouverte.

Mme Christiane Gagnon: Oui, mais je sais comment ça s'est passé.

Le président: Je ne pense pas qu'on va refaire la discussion aujourd'hui. Il y a eu une résolution qui a été acceptée à l'unanimité par tous les partis et je pense qu'on va travailler là-dessus, parce qu'on ne peut pas refaire le passé. C'est fait, c'est fait. Il y a eu un vote. Il y a eu une discussion qui a duré pratiquement une demi-heure et, à la fin, il y a eu un consensus. Il n'était pas question d'empêcher la ministre de venir ou de dire qu'elle ne voulait pas venir. La ministre a dit clairement qu'elle n'était responsable d'aucune négociation sur la ZLEA, que c'était le ministre Pettigrew qui s'en chargeait. À la fin, une résolution a été présentée. En fait, la suggestion d'écouter les officiels est venue de M. Sauvageau lui-même.

[Traduction]

Je voudrais maintenant donner la parole aux fonctionnaires. Le principal porte-parole voudrait-il bien nous présenter ses collègues? Nous aimerions vous entendre pendant une quinzaine de minutes, après quoi nous pourrons passer aux questions.

M. Don Stephenson (directeur général, Direction générale de la politique commerciale II, Services, Investissement et Propriété intellectuelle, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président.

Je suis Don Stephenson. Je suis directeur général de la Politique commerciale II. La direction générale a notamment la responsabilité des services, des investissements et de la propriété intellectuelle.

Mon collègue Claude Carrière est directeur général de la Politique commerciale I, nous sommes le numéro II, mais nous n'en sommes que plus déterminés. La direction générale de la Politique commerciale I a la responsabilité du commerce des biens. Claude est aussi le négociateur en chef du Canada pour l'ALEA et pour la plupart des discussions commerciales régionales et bilatérales auxquelles participe le Canada.

• 0910

Michael Brock est directeur des Affaires interaméricaines. Il est au nombre de ceux qui préparent le sommet à Québec.

Cathy Dickson est directrice de la Politique commerciale sur l'information et la technologie, et elle s'occupe entre autres de commerce et de culture.

Janette Mark est directrice de la Politique du commerce et de l'investissement au ministère du Patrimoine canadien et Artur Wilczynski est conseiller principal en politiques, Relations internationales, ministère du Patrimoine canadien.

Mesdames et messieurs les membres du comité, comme le préavis a été très court pour la rencontre d'aujourd'hui, nous n'avons pas eu le temps de vous préparer un document en bonne et due forme. Nous pourrons toutefois vous en faire parvenir un ou nous pourrions peut-être répondre à certaines des questions auxquelles nous n'aurons pas pu donner de réponse complète au cours de notre discussion d'aujourd'hui. Pour l'instant, donc, nous allons former une espèce d'équipe de relais pour vous présenter notre exposé.

Comme l'ALEA est maintenant inextricablement lié au sommet de Québec, le sommet des Amériques qui doit avoir lieu à Québec à la fin avril, nous avons cru bon de demander à notre collègue qui participe à la préparation du sommet de nous donner un bref aperçu des préparatifs et de nous expliquer où se situe l'ALEA dans le contexte des discussions de Québec. Parmi le public, on a bien souvent l'impression que le sommet de Québec ne portera que sur l'ALEA. Il est loin d'en être ainsi; il s'agit plutôt d'un point parmi bien d'autres à l'ordre du jour du sommet.

J'inviterais mon collègue, M. Carrière, à faire le point sur les négociations relatives à l'ALEA. Sur quoi porteront vraisemblablement les discussions à Québec et, avant Québec, à Buenos Aires, quand les ministres du Commerce se réuniront pour discuter de la ZLEA? Quel sera vraisemblablement le résultat de ces discussions? Où en sommes-nous?

Enfin, j'essaierai, avec l'aide de mes collègues, de vous décrire la place qu'occupent la culture et la diversité culturelle dans l'ALEA et, de manière plus générale, dans les négociations commerciales du Canada.

Si le comité est d'accord, je demanderais à Michael de commencer par nous présenter un aperçu du sommet.

M. Michael Brock (directeur, Direction des affaires interaméricaines, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président, et merci à vous, Don.

Il est important de considérer l'ALEA comme étant partie intégrante du Sommet des Amériques, cette tribune de discussion générale qui vise à accroître la consultation et la collaboration entre les pays de l'hémisphère dans la plupart des secteurs d'activités gouvernementales. Comme la plupart de vous le savent déjà, il s'agit d'un processus qui a débuté à Miami en 1994, quand les leaders de l'hémisphère se sont réunis, essentiellement après qu'ils se sont rendu compte qu'ils partageaient tous une nouvelle vision fondée sur les valeurs démocratiques. Après plusieurs décennies marquées par de longues périodes de gouvernements instables et de dictatures, les gouvernements de tous les pays de l'hémisphère, à l'exception d'un seul, étaient acquis aux valeurs démocratiques.

Les gouvernements assemblés au sommet de Miami ont formulé cette vision de même que leur vision d'une plus grande intégration économique, attribuable là encore à un changement d'orientation, les économies de l'hémisphère ayant jusque là été surtout fermées. Ayant traversé des périodes difficiles, les pays de l'hémisphère étaient décidés à travailler ensemble dans leur intérêt réciproque afin d'assurer le mieux-être de leur population respective.

Les leaders en sont arrivés à un plan d'action à très large assise, où ils déclaraient leur intention de collaborer sur une multitude de questions et de problèmes touchant l'hémisphère—comme le renforcement de la démocratie et du respect des droits de la personne, l'élimination de la pauvreté, la lutte contre la corruption et les drogues illicites, entre autres—de même que leur adhésion à la création d'une zone de libre-échange des Amériques et leur détermination à créer cette zone.

Le processus de collaboration et d'intégration s'est poursuivi au deuxième sommet qui a eu lieu à Santiago, au Chili. Les leaders ont insisté beaucoup à ce sommet sur l'éducation comme étant un pilier fondamental de l'intégration économique et du renforcement de la démocratie.

• 0915

Ces deux sommets ont engendré une série de processus ministériels sectoriels sur diverses préoccupations. Ainsi, les ministres du Travail ont commencé à se rencontrer régulièrement, de même que les ministres de la Justice, des Transports, de l'Énergie, des Finances, de la Défense et de l'Éducation, afin de se pencher sur ces dossiers et de mettre au point des mécanismes de collaboration pour s'attaquer aux questions touchant l'hémisphère.

C'est alors que le premier ministre du Canada avait offert de tenir le prochain sommet à Québec, si bien que depuis un an environ, les préparatifs vont bon train pour essayer de déterminer comment le processus pourra se poursuivre le mois prochain à Québec.

Quand les ministres des Affaires étrangères ont discuté de l'ordre du jour et des thèmes du sommet de Québec, ils ont reconnu l'importance de souligner la cohérence des travaux dans le cadre du sommet. Ils ont insisté sur le fait que le renforcement de la démocratie et l'intégration économique devraient demeurer au coeur du processus, mais qu'il y avait aussi un besoin manifeste de s'intéresser de près à certaines questions qui préoccupent bon nombre de citoyens.

C'est ce qui a conduit à l'élaboration des trois thèmes du sommet, que certains d'entre vous connaissent peut-être. Le premier est le renforcement de la démocratie. Les discussions à ce chapitre porteront sur la façon de renforcer les institutions, sur les mesures à prendre pour lutter contre les drogues illicites; sur l'accroissement de la transparence, sur la participation accrue de la société civile au processus; et sur un certain nombre d'autres questions liées à la sécurité et à la violence qui préoccupent les populations de l'hémisphère.

Le deuxième thème est la création de la prospérité. Ce thème a été élaboré de manière à tenir compte du fait que la prospérité n'est pas qu'affaire de libre-échange. Elle est aussi affaire de disparités, de lutte contre la pauvreté, de problèmes découlant de catastrophes naturelles—qui ont un impact économique considérable pour bien des pays, notamment des Antilles et d'Amérique centrale—et de questions liées au travail et à l'environnement. Les ministres se rencontrent pour discuter de ces questions en vue d'en arriver à une démarche multilatérale de collaboration à l'échelle de l'hémisphère.

Le troisième thème est la réalisation du potentiel humain. Ce thème part du principe de l'importance cruciale de l'éducation, de la santé et de l'égalité des sexes, qui sont à la base même de la création de la prospérité dans l'hémisphère. En outre, la situation des peuples indigènes, celle des enfants et les questions liées à la diversité culturelle suscitent un intérêt renouvelé.

Il s'agit là d'une nouvelle piste de réflexion dans le cadre du processus du sommet. On s'entend de plus en plus sur l'importance de la discussion et de la coopération sur la question de la diversité culturelle. La diversité culturelle est considérée comme un facteur de cohésion sociale et de dynamisme économique dont les 34 pays de l'hémisphère doivent commencer à discuter sérieusement.

À Québec, les leaders entérineront un plan d'action relativement à tous ces thèmes et donneront à leurs ministres respectifs le mandat de trouver des moyens concrets de faire avancer les choses.

Je m'arrête là, monsieur le président, et je cède la parole à mon collègue.

[Français]

M. Claude Carrière (directeur général, Direction générale de la politique commerciale I, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Je vous remercie, monsieur le président.

Membres du comité, comme Michael vous l'a expliqué, le projet de la Zone de libre-échange est un processus qui découle du Sommet des Amériques et qui est intégré aux différentes initiatives du sommet.

Le projet de négociation d'une zone de libre-échange est un projet extrêmement ambitieux qui regroupe 34 pays. Si l'accord était conclu, il créerait une zone de libre-échange de 800 millions de personnes dont plus de la moitié se trouvent au sud des États-Unis. Ce sont des jeunes en pleine croissance qui nous offriraient un marché très intéressant pour nos exportateurs. Dans le cadre du processus du sommet, cela permettrait au Canada de participer au développement de l'hémisphère.

• 0920

Je vous explique brièvement le calendrier des négociations et le processus suivi dans la négociation de la Zone de libre-échange.

La négociation a été lancée à Santiago en avril 1998 sur la recommandation des ministres du commerce. Elle regroupe neuf tables de négociation sous la direction d'un comité de coordination et de négociation qui se rapporte au ministre. Le ministre Pettigrew a présidé la première réunion ministérielle après le lancement des négociations. Cette réunion a eu lieu à Toronto en octobre 1999. Le Canada s'est appliqué à mettre en place les fondements de la négociation et les structures administratives pour faire en sorte que la négociation puisse progresser.

Les ministres ont donné instruction à leurs négociateurs à Toronto de commencer à développer des textes de chapitres pour les neuf secteurs identifiés. Depuis octobre 1999, c'est ce que les négociateurs ont fait. Ils ont développé des projets de chapitres qui seront présentés aux ministres du Commerce à Buenos Aires le 7 avril. C'est un premier jet, un brouillon. C'est la première fois que l'on développe ce genre de texte avec un aussi grand nombre de participants.

Le calendrier de la négociation vise une conclusion d'ici 2005. Nous sommes donc encore, en 2001, dans la première moitié du processus de négociation. Le texte qui sera présenté aux ministres représente une première tentative de comparaison des positions des différents pays sur différentes questions.

Nous nous attendons à ce que les ministres, à Buenos Aires, donnent instruction à leurs négociateurs de tenter de préciser les textes, de rapprocher les positions et de réduire les différences entre les pays d'ici leur prochaine réunion en 2002. Nous pensons également que les ministres vont se pencher sur deux questions qui nous tiennent à coeur, notamment celle de générer plus de transparence dans le processus collectif de négociation.

Le Canada a tenté de présenter et de publier le maximum d'information possible sur la position canadienne de négociation, mais les textes collectifs sont la propriété de la collectivité. Nous tenterons de persuader nos partenaires, à Buenos Aires le 7 avril, de rendre publics les textes en même temps que la déclaration ministérielle qui s'inscrira dans le contexte du sommet.

Nous tenterons également de renforcer le processus de consultation avec la société civile. En 1998, la ZLEA a créé, pour la première fois, un comité de participation de la société civile dans un processus de négociation. C'est une expérience qui s'est avérée décevante parce que plusieurs pays se méfient des objectifs de la société civile dans la négociation. Nous pensons que, depuis trois ans, il y a un peu moins de méfiance. Nous tenterons de renforcer le rôle de ce comité-là, encore là pour augmenter la transparence de la négociation au plan collectif et, également, pour promouvoir des ateliers de discussion avec la société civile un peu partout dans l'hémisphère, pour démystifier un peu ce qui se produit dans la négociation.

• 0925

La Zone de libre-échange fait également face à d'énormes défis. Vous savez que parmi les 34 participants, on a le plus puissant et le plus faible, le plus grand et le plus petit, le plus riche et le plus pauvre. Il y a naturellement les États-Unis, et on peut choisir certaines îles des Antilles comme antipode. Une des préoccupations de la majorité des pays est la question des petites économies. Comment les grands aideront-ils ces petites économies à s'adapter au libre-échange et à en tirer avantage? C'est le premier défi.

Le deuxième est la position des deux grands partenaires du processus, les États-Unis et le Brésil, en particulier. Depuis plusieurs années, le gouvernement américain perd beaucoup de leadership dans l'hémisphère, et plusieurs pays attendaient et attendent toujours que les États-Unis démontrent qu'ils sont vraiment engagés dans la négociation d'un accord et qu'ils sont prêts à ouvrir leur marché. Ce qui intéresse la plupart des pays, c'est un meilleur accès au marché américain.

La nouvelle administration, qui est toujours en formation, a déjà commencé à démontrer beaucoup plus d'intérêt, beaucoup plus d'engagement politique quant à la création de la Zone de libre-échange. Il est possible qu'à la réunion à Buenos Aires et également au sommet, un peu plus de momentum soit donné au processus de négociation.

Le Brésil, par contre, n'a jamais été très enthousiaste. Il est un peu méfiant à l'égard du processus. Il est plutôt craintif par rapport à la capacité des institutions américaines de profiter du marché brésilien et n'est pas convaincu que les États-Unis lui ouvriraient leur marché dans les secteurs qui l'intéressent.

Le Brésil cherche également à renforcer son industrie. L'économie brésilienne n'est ouverte au marché international que depuis très peu de temps. Jusqu'à la fin des années 1980 et au début des années 1990, le Brésil avait une économie plutôt autarcique, fermée au commerce international. Depuis le début des années 1990, les Brésiliens ont commencé à s'ouvrir, mais ils ont besoin de temps pour s'adapter aux marchés internationaux. Il reste à voir ce qui découlera d'une entente possible entre les Américains et les Brésiliens sur le calendrier possible des négociations.

C'est à peu près tout. Je peux vous assurer que l'accord sur la Zone de libre-échange ne sera pas signé à Québec au mois d'avril. Il reste au moins trois ans de négociations assez difficiles avant qu'on puisse penser qu'on peut arriver au but.

Je voudrais vous remercier, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Stephenson, y en a-t-il d'autres qui voudraient prendre la parole, ou sommes-nous prêts à passer aux questions?

M. Don Stephenson: Il y a moi. Je voudrais prendre quelques instants pour vous expliquer de manière générale la façon dont nous abordons la culture dans le cadre de l'ALEA et des négociations commerciales.

La position du Canada relativement au commerce et à la culture repose sur deux principes fondamentaux. Premièrement, le commerce est extrêmement important pour le Canada. Nous en dépendons plus qu'aucun autre de nos principaux partenaires commerciaux pour notre prospérité économique. Notre dépendance est quatre fois celle des États-Unis et trois fois celle du Japon. Le commerce représente environ 45 p. 100 de notre PIB et environ un emploi sur trois. Ainsi, le commerce est un principe important de la politique canadienne en matière de commerce et de culture.

Le second principe est que les produits et les services d'ordre culturel ne sont pas simplement des biens et des services comme les autres. Le Canada considère que l'expression culturelle n'est pas simplement une activité économique. Elle joue un rôle capital dans la création d'une identité canadienne—ou plutôt des identités canadiennes. Tout pays doit être en mesure de produire, de préserver et de distribuer ses produits et services culturels, et ce pour des raisons qui dépassent les strictes considérations économiques.

• 0930

Dans ses négociations commerciales, le Canada part depuis longtemps du principe que la culture mérite un traitement différent. Aussi il a toujours cherché à exclure les industries culturelles des mesures de discipline prévues par les accords commerciaux. C'est ce qu'il a fait dans le cas de l'Accord de libre-échange canado-américain. Il a aussi préserver cette distinction relative aux industries culturelles dans l'ALENA, et il a fait incorporer des exclusions semblables dans les Accords de libre-échange Canada-Chili et Canada-Israël.

Étant donné la convergence et l'évolution technologiques dans le domaine la production culturelle d'une part et l'effet accru de la mondialisation d'autre part, le ministre du Commerce international a demandé au Groupe de consultation sectorielle sur le commerce extérieur—industrie culturelle—ou le GCSCE culturel, dans notre jargon—de se pencher sur la question de savoir comment le Canada devrait traiter la culture dans les discussions sur le commerce international.

Le Groupe de consultation sectorielle a produit un rapport et des recommandations où il incite le Canada à poursuivre la conclusion d'un nouvel accord international qui énoncerait clairement le droit des pays de préserver leur identité culturelle. Cet accord établirait également des règles claires quant aux mesures qu'ils seraient autorisés à prendre dans ce sens. Le Groupe de consultation a recommandé que, jusqu'à ce qu'un accord international de ce genre soit conclu, le Canada évite de prendre quelque nouvel engagement qui limiterait sa marge de manoeuvre pour ce qui est de réaliser les objectifs de sa politique culturelle.

Le Canada a entrepris des démarches vigoureuses pour faire reconnaître la nécessité d'un nouvel instrument international. Janette Mark pourrait peut-être vous décrire ces démarches, qui ont été entreprises en étroite collaboration avec le gouvernement du Québec. Du point de vue de la politique commerciale, nous tentons également de sensibiliser la communauté internationale. Aux rencontres de ministres ou de dirigeants, nous tentons de faire en sorte que les déclarations reconnaissent l'importance de la diversité culturelle.

La position du gouvernement du Canada relativement au commerce et à la culture est la suivante: nous ne prendrons aucun engagement qui limiterait notre capacité de poursuivre nos objectifs en matière de diversité culturelle et nous ferons la promotion d'un nouvel instrument international sur la diversité culturelle. Les moyens à prendre dépendront des circonstances propres à chaque négociation.

Pour ce qui est de l'AGCS, avant le début de la réunion, je vous ai fait remettre une trousse d'information expliquant la position initiale du Canada relativement à l'AGCS, que le ministre Pettigrew a annoncée la semaine dernière. Le document, intitulé «Proposition initiale du Canada en vue des négociations» a été déposé à Genève comme étant la position du Canada en vue des négociations.

Vous constaterez que la position du Canada sur la culture est exprimée de façon extrêmement claire. On y dit pratiquement ce que je viens de dire, à savoir que nous ne prendrons aucun engagement qui restreindrait notre marge de manoeuvre, et que nous travaillerons à obtenir un instrument international sur la diversité culturelle.

Si vous examinez les objectifs énoncés à la page quatre, la dernière déclaration se lit comme suit:

    Le Canada ne souscrira à aucun engagement qui restreindrait notre capacité à atteindre nos objectifs en matière de politique culturelle, tant qu'un nouvel instrument international ne sera pas établi pouvant expressément garantir le droit des membres à promouvoir et préserver leur diversité culturelle.

C'est la position que nous avons adoptée en ce qui concerne l'AGCS.

• 0935

L'AGCS est structurée de façon telle que tout est exclu à moins d'y être inscrit. Donc chaque pays doit préciser les secteurs qu'il souhaite libéraliser, et comment. Par conséquent, en ce qui concerne l'AGCS, exclure les industries culturelles consiste simplement à ne pas les inscrire dans notre liste d'engagements. C'est ce qu'on appelle un processus ascendant. Par contre, l'ALENA est un processus descendant: c'est-à-dire que tout est inclus à moins de préciser les secteurs qui sont exclus.

Pour l'ALEA, cela n'est pas clair. En ce qui concerne en particulier le secteur des services, les 34 pays ne se sont pas encore entendus sur la structure à adopter—à savoir s'il s'agira d'une structure ascendante, comme dans le cas de l'ALENA au chapitre des services, ou d'une structure descendante, comme dans le cas de l'AGCS. S'il s'agit d'un processus descendant, nous procéderons par exclusion, comme nous l'avons fait dans le cadre de l'accord Canada-Chili ou l'accord Canada-Israël. S'il s'agit d'un processus ascendant, comme dans l'AGCS, nous procéderons en n'inscrivant pas les engagements en matière culturelle.

C'est la réponse fondamentale, bien que dans le cadre de tous ces accords, il existe d'autres questions importantes dont il faut s'occuper en matière de culture et d'autres aspects liés à la culture. Par exemple, des discussions sont en cours à propos de règles en matière de subsides—le genre de subsides que les gouvernements peuvent offrir aux industries, et la mesure dans laquelle elles peuvent perturber le commerce.

Les règles sur lesquelles nous pourrions nous entendre en matière de subsides auraient d'importantes répercussions sur le secteur culturel. C'est pourquoi nous devons en tenir compte dans le cadre de ces discussions et nous assurer d'exclure ce secteur.

De plus, les mesures touchant d'autres secteurs de l'économie peuvent également avoir des répercussions sur le secteur culturel. Par exemple, lorsque nous discutons des télécommunications et des liens entre les télécommunications et la radiodiffusion, cela doit être précisé. En ce qui concerne nos discussions sur la transmission du commerce électronique, il faut établir une claire distinction entre le commerce et le contenu afin d'éviter toute répercussion involontaire sur le secteur culturel.

Essentiellement, c'est ainsi que nous exclurions la culture, en ne prenant aucun engagement dans le cadre de ces accords qui restreindrait la marge de manoeuvre du Canada en matière culturelle.

[Français]

Comme je l'ai dit plus tôt, le Canada essaie aussi, dans toutes ses discussions sur le commerce international, d'aider l'effort d'information par rapport à la diversité culturelle. Dans la ZLEA, le Canada a proposé un texte de préambule pour l'entente qui souligne l'importance de la diversité culturelle. La proposition canadienne pour le préambule de l'accord de ZLEA se lit comme suit:

    À reconnaître que les pays doivent conserver la capacité de préserver, développer et mettre en oeuvre leurs politiques culturelles respectives dans le but de renforcer la diversité culturelle étant donné le rôle essentiel que les produits et les services culturels jouent dans l'identité et la pluralité de la société ainsi que dans la vie des personnes;

[Traduction]

Je conclurai en disant que la position du Canada sur la diversité culturelle en ce qui concerne les discussions commerciales et le préambule de l'ALEA bénéficie de l'appui solide du secteur culturel et des industries culturelles, y compris la Coalition pour la diversité culturelle.

Notre position se fonde sur des consultations avec le secteur culturel. Il s'agissait entre autres de consultations mixtes au printemps 2000, de la part des responsables du ministère du Patrimoine canadien et du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, qui s'appuyaient sur le rapport du GCSCE. À peu près au même moment, d'autres consultations ont eu lieu avec le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Par conséquent, notre position bénéficie de l'appui solide des principaux intéressés.

Je vous remercie, monsieur le président. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

• 0940

Le président: Je vous remercie.

Nous avons un peu plus d'une heure pour les questions. Comme je l'ai indiqué aux députés, je vous serais reconnaissant de rester après 10 h 45, pour nous permettre de régler certaines questions et de nous occuper entre autres d'une motion dont nous sommes saisis.

Je cède la parole à...

M. Don Stephenson: Monsieur le président, si vous me le permettez, mon collègue responsable des négociations commerciales régionales doit partir vers 10 h. Par conséquent, si les membres du comité ont des questions concernant spécifiquement la ZLEA et d'autres aspects que la culture, je les invite à les poser avant qu'il nous quitte.

[Français]

Le président: Si vous avez des questions pour M. Carrière, veuillez les lui poser avant 10 heures, s'il vous plaît.

[Traduction]

Nous commencerons par Mme Gallant.

Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, AC): Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Carrière a indiqué que l'on aurait des discussions sur la façon de favoriser l'entrée des pays pauvres dans l'économie mondiale. Quelle garantie les Canadiens ont-ils que nos intérêts demeureront prioritaires et ne seront pas sacrifiés dans le cadre des négociations? Dans quelle mesure capitulerons-nous pour permettre aux pays pauvres de se hisser à notre niveau?

M. Claude Carrière: Nous ne capitulerons pas. Notre travail, mon travail consiste à promouvoir les intérêts du Canada. Nous estimons que cela consiste entre autres à ouvrir les marchés en développement aux biens, aux services et aux investissements canadiens de manière à ce que nous puissions participer à leur développement. Nous considérons que cela créera de la richesse dans ces pays de même qu'au Canada, qui leur permettra d'accroître leur niveau de développement. Mais nous reconnaissons également qu'ils doivent s'adapter et que cette ouverture doit être adaptée à la capacité d'ouverture de leurs marchés. Nous avons indiqué que nous sommes prêts à négocier, dans certaines circonstances, des périodes plus longues d'élimination progressive des tarifs, dans certains secteurs au cours des négociations.

Nous avons également travaillé avec les institutions régionales—la Banque de développement interaméricaine, l'OEA, et la Commission économique des Nations Unies pour l'Amérique latine et les Caraïbes—afin d'offrir aux petites économies une aide technique et leur permettre de renforcer leur capacité afin de les aider à négocier, de commencer à planifier leur adaptation à un marché libéralisé et à profiter de l'accès qu'ils auront à de grands marchés comme ceux des États-Unis et du Canada, et à planifier en prévision de la concurrence accrue sur leurs propres marchés de la part des produits, services et investissements du Canada.

En résumé, nous considérons qu'un accroissement et une libéralisation du commerce dans leur économie favorisera leur développement, mais nous reconnaissons que cela devra se faire à un rythme qui leur convient.

Mme Cheryl Gallant: Vous avez indiqué que les périodes d'élimination progressive seront plus longues. Voulez-vous dire que ces périodes plus longues de l'élimination progressive des tarifs s'appliqueront aux pays émergents, ou est-ce que ce serait égal? Nous ne réduirions pas les tarifs plus rapidement que les autres pays?

M. Claude Carrière: Le point de départ est légèrement différent. Dans l'ensemble, environ 95 % de nos importations provenant de pays qui ne font pas partie de l'ALENA sont déjà exemptes de droits de douane lorsqu'elles entrent au Canada alors que c'est probablement l'inverse en ce qui concerne la plupart de nos exportations auxquelles des tarifs sont imposés dans ces pays. Ils ont donc plus d'efforts à faire que nous sur le plan de la libéralisation.

Nous avons indiqué que nous envisageons trois types d'élimination progressive des obstacles ou des tarifs. Selon l'exemple classique, nous considérons qu'une proportion importante de nos exportations devrait bénéficier d'un accès immédiat à ces marchés. Nous reconnaissons que dans certains cas il faudrait prévoir une période mitoyenne—cinq ans par exemple—pour réduire les tarifs. Dans les cas où il existe une vulnérabilité aux importations, nous envisageons une période d'élimination progressive de 10 ans.

Nous reconnaissons que dans certains cas, certains pays voudront une période d'élimination progressive plus longue, et certains négocieront très fermement pour allonger cette période, mais ils devront compenser en accélérant la période d'élimination progressive dans d'autres secteurs, et il est à espérer dans le nôtre.

• 0945

Nous allons également tenir compte de notre propre vulnérabilité aux importations dans certains secteurs, y compris certains secteurs agricoles et industriels—par exemple les textiles et les vêtements, certains produits agricoles, certains produits de base soumis à la régulation de l'offre. Nous en tiendrons compte dans les négociations, et lors de nos consultations étroites avec les principaux intéressés.

Mme Cheryl Gallant: Je vous remercie, Monsieur Carrière.

Le président: Madame Gagnon.

[Français]

Mme Christiane Gagnon: Il me fait plaisir de vous rencontrer ce matin.

En ce qui concerne la diversité culturelle, on a plusieurs inquiétudes quant aux différents discours que tiennent le gouvernement et ses représentants officiels. Entre la volonté d'écrire, dans des textes, des citations précises quant à l'engagement du gouvernement canadien par rapport à la protection de la diversité culturelle... À titre d'exemple, les fonctionnaires nous ont dit que l'on n'avait pas exclu la culture des accords de services parce que l'on ne voulait pas embarrasser le gouvernement américain. Ne voyez-vous pas dans cela une façon d'exclure la culture de tout engagement commercial? N'est-ce pas un mauvais message à livrer aux États-Unis, qui sont assez frileux quant à cet engagement? On a vu dans l'ALENA et dans l'ALE les résultats que cela a donnés.

M. Don Stephenson: Quant aux discussions de culture dans l'AGCS, la position du gouvernement canadien est extrêmement claire. C'est dans le document que j'ai distribué. Nous ne prendrons aucun engagement. La position canadienne veut que ça procède, comme je l'ai expliqué, par des engagements actifs.

Par rapport à d'autres ententes, et même dans l'AGCS, le Canada ne défend à aucun pays de vouloir ce qu'il veut. Si les États-Unis veulent des engagements d'autres pays dans le secteur culturel, c'est à eux de décider de cela et de le demander. C'est au Canada de prendre ses décisions pour lui-même. La structure des ententes permet très certainement au Canada de procéder ainsi. La position du Canada est claire. On ne veut pas prendre d'engagements. Je ne peux pas l'expliquer mieux que ça.

Mme Christiane Gagnon: J'ai une deuxième question. Si vous ne prenez pas d'engagements plus clairs que ça, c'est un mauvais message à envoyer aux Américains. Ça, c'est une chose. Deuxièmement, je pensais que le Canada pouvait être un leader quant à la fragilité, justement, de reconnaître et d'exclure la diversité culturelle. Quelles démarches ont été faites auprès d'autres pays comme le Chili, les pays d'Amérique latine, pour que la diversité culturelle ne fasse pas partie des accords qui sont en train de se négocier à l'OMC ou à la ZLEA?

M. Don Stephenson: Je ne sais pas comment la diversité culturelle ou la culture pourraient être plus exclues dans la position canadienne.

Mme Christiane Gagnon: Je ne parle pas de les exclure davantage, mais on peut tout de même influencer les autres pays quant à l'importance de cette question. On sait que si les États-Unis, par exemple, vont négocier avec d'autres pays en monnayant certains autres produits, ça pourrait aussi avoir un impact sur notre volonté à nous d'exclure les produits culturels. Les produits culturels comprennent aussi l'éducation, la diversité culturelle, entre autres.

• 0950

M. Don Stephenson: Comme je l'ai expliqué plus tôt, et Janette pourra peut-être fournir certains détails, le Canada fait un effort énorme pour promouvoir l'importance de la diversité culturelle. Le réseau des ministres de la Culture qui a été établi par Mme Copps et les efforts que l'on fait, dans nos négociations sur le commerce international, pour souligner l'importance de la diversité culturelle vont, je pense, exactement dans le sens de votre question.

Mme Christiane Gagnon: En plus de cela, je voudrais savoir quels efforts et quelles sommes d'argent sont investis. Quelle forme prennent ces échanges? Mme Mark pourrait peut-être répondre.

C'est important de savoir quel effort on fait. On peut le dire. On peut l'écrire sur papier, mais on a différents sons de cloche, notamment de M. Manley, qui, dans un discours au Royal Institute for International Affairs, dit:

    Nous sommes entrés dans une ère où la culture humaine est mondiale. Les idées et l'information circulent aussi facilement le long de ces synapses que les actions ou les monnaies s'échangent.

Je vois, dans ces propos-là, où se situent vraiment la culture, la diversité culturelle, l'exclusion. Il faut aussi qu'il y ait des sons de cloche clairs de la part de nos représentants du gouvernement.

Madame Mark, pouvez-vous me décrire les efforts qui sont faits par Patrimoine Canada puisque la ministre n'est pas ici? On me dit que Patrimoine n'est pas impliqué, qu'il s'agit du Commerce international. Quel effort est-ce que Patrimoine Canada fait pour influencer le discours?

[Traduction]

M. Artur Wilczynski (conseiller principal en politiques, Relations internationales, ministère du Patrimoine canadien): Merci beaucoup, Madame Gagnon. Je tâcherai de répondre au nom de mon collègue.

Patrimoine canadien a travaillé en collaboration avec ses principaux partenaires de l'hémisphère pour mieux faire connaître les objectifs du Canada en matière de préservation et de promotion de la diversité culturelle. Nous avons travaillé plus particulièrement avec le bureau culturel de l'Organisation des États américains. Nous avons également rencontré les principaux responsables de la Banque interaméricaine de développement pour amorcer un dialogue sur la diversité culturelle au sein de l'hémisphère.

Nous considérons le sommet des Amériques comme un important moyen d'approfondir le dialogue au sein de l'hémisphère sur la diversité culturelle, et nous espérons que certains des résultats du sommet faciliteront une discussion plus approfondie de la diversité culturelle avec nos partenaires de l'hémisphère. Nous escomptons tenir des activités telles que des colloques de spécialistes, peut-être même une réunion de ministres sur la culture dans l'hémisphère afin de donner suite à certaines des préoccupations que vous avez soulevées.

Nous espérons que les discussions qui découleront du sommet des Amériques à Québec, que les éléments sur lesquels les dirigeants pourront s'entendre orienteront les hauts fonctionnaires et les ministres quant à la façon de procéder à cet égard.

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Avant de poser une question, j'aimerais dire, avec tout le respect que je lui dois, que la députée de l'opposition voit des risques là où il n'y en a pas. Je pense que la position du Canada en ce qui concerne la culture et la diversité culturelle est tout à fait claire et précise. L'objectif, tel qu'il est énoncé dans l'AGCS, ne peut pas être à mon avis plus clair que cela. Le Canada par ailleurs ne prendra aucun engagement qui restreint notre capacité à atteindre notre objectif en matière de politiques culturelles. J'estime qu'on ne peut pas être plus clair.

Si on tentait d'attaquer ou de compromettre notre souveraineté culturelle ou notre capacité d'appuyer la diversité culturelle, alors je m'attendrais à ce que le gouvernement fasse preuve d'un certain leadership. N'êtes-vous pas d'accord, Monsieur Stephenson?

M. Don Stephenson: Oui, tout à fait. Comme je l'ai indiqué dans ma réponse à la question précédente, certains demanderont, comme cela a déjà été le cas, dans le cadre des négociations de l'AGCS par exemple, l'accès aux industries culturelles du Canada. La position du Canada est très claire à ce sujet et demeurera claire tout au long des négociations.

M. John Harvard: Je ne sais pas si c'est vous ou quelqu'un d'autre qui a parlé des neuf tables de discussions sectorielles qui auront lieu à Buenos Aires dans quelques jours. Ces tables porteront-elles sur la culture, directement ou indirectement?

M. Claude Carrière: Aucune ne traite directement de la culture bien que certaines pourraient avoir un lien direct avec la culture, comme l'a mentionné M. Stephenson.

• 0955

Notre position dans le cadre de l'ALEA sera identique à celle que nous avons annoncée dans le cas de l'AGCS la semaine dernière: nous ne prendrons aucun engagement qui restreindra notre capacité à poursuivre notre politique.

M. John Harvard: Mais vous n'attendez rien de substantiel en matière culturelle à Buenos Aires.

M. Claude Carrière: Non.

M. John Harvard: Pourriez-vous nous donner une idée de certains de ces nouveaux instruments culturels internationaux auxquels vous avez fait allusion? De quoi s'agit-il au juste?

M. Don Stephenson: Tout d'abord, le groupe de consultation sectoriel sur le commerce extérieur chargé des industries culturelles qui travaille auprès du ministre du Commerce international est en train de formuler ses propres recommandations concernant un instrument international possible sur la diversité culturelle. Par ailleurs, il existe un groupe de travail qui relève du réseau des ministres de la Culture établi par le ministre Copps qui s'occupe également de préparer des propositions et des recommandations à l'intention des ministres concernant la nature d'un tel instrument.

Donc, il reste à voir, et certainement à discuter et à décider des caractéristiques que devrait présenter un instrument international en matière de diversité culturelle. Selon la réponse du gouvernement au comité permanent des Affaires étrangères et du Commerce international, cet instrument établirait des règles de base claires pour permettre au Canada et aux autres pays de conserver leurs politiques et de promouvoir leur culture tout en respectant les règles du système commercial international et en assurant des marchés pour les exportations culturelles. Selon la description qui en a été donnée cet instrument reconnaîtrait le rôle particulier des biens et services culturels et le droit des gouvernements de préserver et promouvoir la diversité culturelle.

Quant à la structure exacte d'un tel instrument, comme je l'ai dit, nous ne faisons que commencer à débattre de sa teneur, mais je suppose que d'une part il tâcherait d'établir les principes de la diversité culturelle et l'importance de la diversité culturelle dans la société et d'autre part il établirait de façon très précise les mesures que les gouvernements peuvent prendre—et cela devrait être approuvé à l'échelle internationale—pour préserver leur culture.

M. John Harvard: Une autre chose, monsieur le président, et corrigez-moi si je me trompe. À la fin des années 80, nous avons d'abord eu l'Accord de libre-échange avec les États-Unis. J'ignore s'il est exact de dire que l'Accord de libre-échange avec les États-Unis a été englobé dans l'ALENA. Si j'ai raison, l'Accord de libre-échange avec les États-Unis a été englobé dans l'ALENA. Si nous finissons par adopter un accord sur la ZLEA, va-t-il alors englober l'ALENA?

M. Don Stephenson: Ce serait une question dont il faudrait décider dans le cadre de la négociation même. D'après ce que je crois comprendre, si l'accord sur la ZLEA ne prévoyait rien à ce sujet et qu'il y avait chevauchement des obligations prévues par les deux accords différents, l'accord le plus récent s'appliquerait. Mais il est fort probable que dans le cadre de la négociation même, les parties à l'accord décideront de l'accord qui à leur avis devrait s'appliquer. On pourrait prendre ces dispositions chapitre par chapitre ou article par article dans l'accord. On pourrait indiquer que dans le cas de tel ou tel article, ce sera l'ALEA ou l'ALENA qui s'appliquera, par voie d'entente. Ou on pourrait simplement recourir à une disposition générale. C'est-à-dire que dans l'ALEA on pourrait décider de déclarer qu'en ce qui concerne tous les échanges commerciaux entre les parties à l'ALENA, c'est l'ALENA qui s'appliquera.

M. John Harvard: Cela signifie-t-il que si le Canada voulait modifier certains aspects de l'ALENA, il pourrait le faire dans le cadre du processus de l'ALEA? C'est une hypothèse, je suppose.

M. Claude Carrière: Oui, tout à fait. Pour compléter ce que M. Stephenson vient de dire, en ce qui concerne la coexistence de l'ALEA ou de l'ALENA, ou de l'accord qui prévaudrait dans certains secteurs, essentiellement c'est le Canada qui déciderait de l'entente qui prévaudrait dans un secteur en particulier. Par ailleurs pour que tout changement soit apporté à une partie quelconque de l'ALENA par le biais de l'ALEA, il faudrait obtenir l'accord des autres partenaires, ce qui reviendrait donc au même. Les États-Unis et le Mexique devraient en décider également. En l'absence de consensus ou d'entente, ce serait alors l'ALENA qui prévaudrait.

• 1000

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): J'aimerais enchaîner sur ce qu'a dit M. Harvey. Ce n'est pas vraiment une question concernant la culture mais qui concerne plutôt l'ALENA et l'ALEA.

Le ministre du Commerce international a déjà comparu devant nous—peut-être ne s'agissait-il pas de ce comité mais plutôt du Comité du commerce international—et a déclaré qu'il ne voulait pas répéter le chapitre 11 dans l'ALEA. Est-ce toujours notre position?

M. Claude Carrière: Oui, le ministre a indiqué clairement que nous chercherons à préciser le chapitre 11, et nous sommes en train de le faire. En fait, mon collègue M. Stephenson est le responsable de cette initiative.

M. Sarmite Bulte: C'est une très bonne chose à savoir.

Pour revenir au nouvel instrument international sur la diversité culturelle, monsieur Stephenson, vous vous occupez de l'aspect relatif au commerce international. Les responsables du commerce international sont encore en train d'examiner le rapport de février 1999 du Groupe de consultation sectorielle. Cela remonte à deux ans. Ce n'est pas comme si ce rapport venait d'être publié hier ou il y a quelques mois.

J'aimerais que Mme Mark nous indique ce que le ministère est en train de faire à ce sujet. Je crois comprendre que c'est notre propre ministre du Patrimoine canadien qui a pris les devant en ce qui concerne cet instrument. Vous pourriez peut-être répondre rapidement à cette question.

Le président: Monsieur Carrière, excusez-moi.

[Français]

Pouvez-vous rester encore deux minutes?

M. Claude Carrière: Oui.

Mme Christiane Gagnon: M. Lanctôt aimerait aussi poser une question.

Le président: ...

[Note de la rédaction: Inaudible]

[Traduction]

Mme Sarmite Bulte: Je poserai mes questions après que mes collègues auront posé les leurs. Je ne suis pas pressée.

Le président: Merci, madame Bulte.

[Français]

Il y a deux questions pour M. Carrière.

[Traduction]

Madame Lill, pourquoi ne posez-vous pas vos questions? Nous demanderons aussi à M. Lanctôt de poser les siennes. M. Carrière pourra alors répondre à tous et prendre congé.

Mme Wendy Lill (Darmouth, NPD): Merci.

Je suis très inquiet de constater que les États-Unis ont exprimé très clairement leur position de négociation et que celle-ci prévoit l'inclusion à part entière du secteur culturel dans l'ALEA. Ils veulent que tous les services et fournisseurs de services soient inclus au chapitre des services, et ils veulent une application étendue des dispositions relatives à la nation la plus favorisée et au traitement national. Ce sont des dispositions qui ont des répercussions considérables.

Je trouve aussi très intéressante l'idée d'avoir un instrument distinct. Nous savons très bien qu'un instrument distinct ne donnera rien si le présent gouvernement décide d'accepter certaines des ententes qui sont sur la table. Par conséquent, j'aimerais savoir si le Canada va autoriser l'application générale à tous les services de la règle de la nation la plus favorisée? Cela signifierait clairement que nous ne pourrions plus entreprendre des projets de coproduction avec certains pays à moins que l'on accepte de le faire dans les mêmes conditions qu'avec les États-Unis. Le Canada est-il disposé à permettre l'application d'une telle règle?

Le président: Avez-vous d'autres questions pour M. Carrière?

Mme Wendy Lill: J'en ai une autre. Le Canada propose-t-il les mêmes règles de transparence pour les règlements gouvernementaux dans le secteur de services dans le cadre de l'ALEA que dans le cadre des négociations de l'AGCS? Propose-t-il que tous les règlements qui régissent les services aient le minimum d'effet commercial restrictif?

Simplement à titre d'observation, c'est très bien de parler de la diversité culturelle, mais comme nous le savons, on constate à l'heure actuelle une fusion importante de la diversité culturelle et de la diversité commerciale. Des sociétés comme Nike Nation, Benetton et Michael Jordan Inc. sont toutes en train de faire leur entrée dans le secteur culturel. Elles considèrent qu'elles créent de la culture. Nous savons qu'il sera très difficile de séparer les deux.

Quelle garantie avons-nous que nous posséderons le pouvoir et la légitimité dont nous avons besoin pour nous assurer de ne pas être bousculés à chacune de ces petites réunions régionales telles que celle qui aura lieu à Québec? J'ai besoin de plus de garanties à cet égard.

• 1005

Le président: Monsieur Carrière, pouvez-vous accepter une autre question?

M. Claude Carrière: Bien sûr.

Le président: Monsieur Hearn, en toute justice, c'était votre tour.

M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Ce n'est pas grave.

Le président: M. Lanctôt peut poser une question maintenant.

[Français]

Monsieur Lanctôt, vous pouvez poser votre question maintenant, s'il vous plaît.

M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur Carrière, j'aimerais savoir si, lorsqu'on parle de culture, cela inclut le sport.

Je m'explique. Il y a des questions très importantes liées au sport. On peut parler du dopage sportif, ainsi que du financement des athlètes et des salaires. Il y a les entraîneurs extérieurs qui viennent et le financement de l'éducation, parce que cette question du dopage doit passer par l'éducation. Est-ce qu'il y a une partie relative au sport dans la négociation de la ZLEA?

[Traduction]

M. Claude Carrière: Je vous remercie.

Pour répondre à Mme Lill, les États-Unis sont libres de présenter leur position comme bon leur semble.

Nous avons annoncé notre position dans le cadre de l'AGCS, et ce sera la position que nous adopterons dans le cadre des négociations sur la ZLEA également. Le gouvernement ne prendra aucun engagement dans les secteurs qu'il a désignés. M. Stephenson peut vous fournir plus de précisions, mais je crois que nous avons indiqué assez clairement que nous n'étions pas disposés à prendre des engagements dans ces secteurs. Nous n'avons fait aucune proposition dans le cadre de la ZLEA dans le secteur des services car nous attendions que soit formulée notre position générale concernant l'AGCS, et notre position de négociation sur les services dans le cadre de la ZLEA sera conforme à la position que nous avons adoptée dans le cadre de l'OMC et de l'AGCS.

[Français]

En ce qui concerne votre question sur...

[Traduction]

Le président: Monsieur Carrière, vous pourriez peut-être aussi répondre brièvement à la question de Mme Lill concernant la juxtaposition du commerce et de la culture des grands conglomérats comme Nike et Michael Jordan Inc.

M. Claude Carrière: Je ne suis malheureusement pas en mesure de me prononcer là-dessus, monsieur le président, mon collègue pourrait peut-être...

Le président: Vous pourriez peut-être répondre à la question de M. Lanctôt, puis nous y reviendrons.

[Français]

M. Claude Carrière: Dans la négociation sur la Zone de libre-échange, que je sache, aucun pays n'a fait de proposition dans le domaine du dopage. Je ne pense pas que cela relève réellement du commerce.

C'est une question qui est traitée dans d'autres instances, aux Nations Unies ou au Comité international olympique. Il y a peut-être même quelque chose dans le cadre du sommet, mais pas dans la Zone de libre-échange.

Le président: Et pour le sport?

M. Claude Carrière: Je ne vois pas vraiment...

M. Robert Lanctôt: Pour que vous compreniez bien, je vais vous donner un exemple. On va prendre le sport en général. Ça peut être le sport professionnel. On peut vouloir mettre de l'argent pour soutenir une équipe professionnelle quelconque. Est-ce que cela pourrait être considéré comme du dumping? Il y a plusieurs choses. On peut parler du paiement des athlètes ou de la formation des entraîneurs. Ça peut être très large et ça peut certainement faire partie...

M. Claude Carrière: On peut étudier la question, mais que je sache, ça n'en fait pas vraiment partie. Il ne semble pas y avoir quoi que ce soit dans la négociation, en ce moment, qui traite de ce genre de question.

M. Robert Lanctôt: On pourrait perdre des équipes, par exemple. Ne serait-il pas bon de protéger un peu cet élément?

M. Claude Carrière: C'est une question qui relève d'une compétence autre que la mienne.

[Traduction]

Le président: Si ce n'est pas inclus, de toute évidence cela n'est pas touché par l'accord commercial. N'est-ce pas?

M. John Harvard: Il faut décider si l'on adopte une démarche ascendante ou descendante.

M. Don Stephenson: C'est exact. Il faut décider, dans les négociations sur la ZLEA, si l'on veut partir du principe que tout est exclu d'emblée sauf ce qui est inscrit comme inclus, ou du principe de tout inclure d'emblée sauf ce qui est inscrit comme exclu comme dans le cas de l'ALENA. Mais comme mon collègue, je n'ai jamais entendu de discussion...

[Français]

sur la question de traitement des sports dans les ententes de commerce international. C'est peut-être une question à étudier.

• 1010

[Traduction]

Le président: Très bien, je vais redonner la parole à Madame Bulte.

[Français]

Monsieur Carrière, je vous remercie de nous avoir donné du temps.

[Traduction]

Mme Wendy Lill: Excusez-moi un instant, je m'excuse...

M. Don Stephenson: Pourrais-je ajouter un commentaire en réponse à votre question?

Mme Wendy Lill: Oui. Je n'ai pas obtenu de réponse à la deuxième question sur les règles de transparence et sur la volonté de causer le moins possible de restrictions du commerce.

M. Don Stephenson: Pour ce qui est de conserver les exceptions à la NPF pour les coproductions cinématographiques et télévisuelles, notre position est que nous souhaitons conserver cette exemption dans tout nouvel accord, y compris l'ALEA.

Mme Wendy Lill: Bon, et au sujet de la dernière question que j'ai posée, proposons-nous pour l'ALEA les mêmes règles de transparence dans la réglementation gouvernementale des services sur lesquels nous avons insisté dans les négociations de l'AGCS, et proposons-nous que tous les règlements touchant les services causent le moins possible de restrictions au commerce?

M. Don Stephenson: Pour ce qui est de la transparence, oui, nous visons les mêmes objectifs de transparence pour l'ALEA que pour tout autre accord. Je pense que l'un des objectifs les plus importants dans toute négociation commerciale, quel que soit le contexte, que ce soit bilatéral, régional ou multilatéral, c'est de rendre les règles plus transparentes.

L'un des principaux obstacles qui nuisent aux exportateurs canadiens, que ce soit dans le secteur des biens, des services ou de quoi que ce soit d'autre, c'est le fait que la plupart des pays sont loin d'être aussi transparents que le Canada pour ce qui est des règles et règlements qui s'appliquent. C'est l'un des objectifs fondamentaux, non seulement d'obtenir un meilleur accès et des tarifs plus bas, mais aussi des règles plus claires.

Dans beaucoup de pays, c'est plus difficile de savoir quelles sont les règles, lesquelles sont appliquées de façon arbitraire et pas très transparente. C'est donc un objectif très important des négociations commerciales et c'est effectivement un objectif en vue de la ZLEA.

Quant à savoir exactement comment ces règles sont appliquées, que ce soit pour l'AGCS ou la ZLEA, c'est à négocier et les négociations se poursuivent. Quant au libellé des règles, à savoir si nous reprendrions exactement la formulation des autres accords, en disant par exemple que les règles doivent causer le moins de restrictions possible au commerce, je l'ignore, mais le principe de causer le moins de restrictions possible au commerce est certainement l'un des principes que le Canada doit défendre dans tout accord commercial.

Le président: Madame Bulte, Monsieur Hearn et ensuite Monsieur Harvey.

Mme Sarmite Bulte: Merci, Monsieur le président.

Il existe un nouvel instrument international sur la diversité culturelle. Je me demande donc si Mme Mark pourrait nous dire brièvement ce que le Ministère fait dans ce domaine. Mais auparavant, j'ai une question à poser à M. Stephenson.

Pendant les consultations que nous avons faites d'un bout à l'autre du pays sur la ZLEA, quand l'idée d'un nouvel instrument culturel a été soulevée et que l'on s'est servi de la ZLEA pour faire la promotion de cet instrument, l'une des réponses que nous avons reçue à l'époque est que la ZLEA n'était pas vraiment le contexte idoine.

Je suis content d'entendre M. Wilczynski dire qu'il y a eu des réunions à l'OEA et que le principal obstacle de la mise en place de cet instrument était que pour la plupart des 33 autres pays, le but principal de leurs négociations était d'avoir accès au marché des États-Unis, que toute la question de la culture n'était pas vraiment pertinente et que ce n'est pas vraiment parmi ces pays que nous trouverons des alliés ou des champions de notre cause, comme ce serait le cas en Europe, surtout en France. Je me demande si vous pourriez nous en dire un mot.

Par ailleurs, quand vous nous avez parlé de questions relatives à la culture, c'est avec plaisir que je vous ai entendu dire que vous suivez de près la question des subventions dans les télécommunications. Y a-t-il vraiment quelqu'un qui surveille cela? Je sais ce qui s'est passé après l'ALENA. Nous avons été pris par surprise par des problèmes dont nous ne pensions pas qu'ils nous toucheraient en dehors du champ de l'exclusion culturelle. J'ai trouvé très réconfortant d'entendre cela et j'espère que vous nous direz qu'il y a vraiment quelqu'un qui s'occupe de surveiller cet aspect, sur le front culturel.

M. Don Stephenson: Vous demandez si la ZLEA est bien le contexte approprié pour négocier un nouvel instrument international sur la diversité culturelle, et à ce sujet je voudrais préciser ce que j'ai dit tout à l'heure, à savoir que n'importe quel contexte est le bon quand il s'agit de promouvoir une plus grande sensibilisation à la question de la diversité culturelle.

C'est pourquoi dans toute discussion, que ce soit dans le contexte de la ZLEA ou du G-8, à chaque fois que nous sommes en présence de plus d'un ministre, nous faisons la promotion de la diversité culturelle et nous cherchons à l'inclure dans la discussion. Nous avons donc tenté de mettre cette question en discussion dans le contexte de l'OEA, durant les négociations sur la ZLEA.

• 1015

Quant à savoir si c'est le bon contexte pour négocier cet instrument, je suis d'accord avec je ne sais plus trop qui a dit que ce n'est probablement pas le bon contexte. Il y aurait peut-être des tribunes plus pertinentes, d'abord parce qu'elles réuniraient un plus grand nombre pays du monde et ensuite parce que l'on y aborderait les dossiers sous l'angle de la politique culturelle plutôt que commerciale.

Par ailleurs, il serait juste de dire que nous n'en sommes pas encore là. Nous en sommes toujours à l'étape de tenter de définir quelles seraient, du point du vue du Canada, la teneur et les modalités d'un instrument international. À moment-là, nous serons peut-être prêts à aborder la question ailleurs.

Quand à savoir qui surveille la situation, c'est Cathy. Cathy compte deux personnes de son équipe dont le travail est d'identifier et d'analyser les conséquences de toutes les discussions commerciales sur la culture.

Le président: Madame Mark.

Mme Janette Mark (directrice, Politique du commerce et de l'investissement, ministère du Patrimoine canadien): Je travaille beaucoup avec Cathy et je m'occupe moi aussi de tous ces dossiers.

Je pense que Don a indiqué la première étape de ce que fait le Ministère dans le dossier de l'instrument. Le rapport du groupe de consultation sectoriel nous a donné très peu d'indication sur les paramètres d'un éventuel instrument ou sur la tribune à laquelle il conviendrait de négocier. On a donc beaucoup travaillé depuis deux ans la question de savoir comment mieux sensibiliser la communauté internationale à la diversité culturelle et ce que le Canada considère comme une préoccupation fondamentale relativement à notre capacité de promouvoir et de préserver la diversité culturelle.

Le lien avec la politique commerciale est vraiment la deuxième étape, comme nous l'avons constaté dans nos discussions internationales. La diversité culturelle est une notion très vaste. C'est très difficile d'en arriver à une définition. Par exemple, chaque pays arrive à la table avec des préoccupations différentes, les différences étant particulièrement marquées entre les pays industrialisés et les pays en développement, selon la structure des États.

Le Ministère a donc beaucoup travaillé simplement pour lancer la discussion sur la scène internationale, mieux sensibiliser les intervenants, essayer de promouvoir la diversité culturelle comme objectif de politique légitime, afin que lorsque nous amorcerons des discussions sur les modalités précises d'un instrument de ce genre, on pourra plus rapidement en arriver aux dispositions précises d'un tel instrument ou aux attentes des autres pays à cet égard.

Quant aux activités spécifiques, nous considérons que toute rencontre est une bonne occasion de faire connaître le point de vue du Canada. Comme Don l'a dit, nous avons été actif dans le cadre du G-8, ainsi qu'à l'OEA, à l'UNESCO, dans nos relations bilatérales. Il y a toujours un briefing sur la diversité culturelle et nous essayons toujours de soulever la question dans nos négociations bilatérales.

L'année dernière, à Seattle, nous avons tenté d'inscrire dans la déclaration ministérielle de l'OMC la reconnaissance que la diversité culturelle est un objectif important de gouvernement et que les gouvernements ont le droit d'appliquer des politiques visant à promouvoir la diversité culturelle.

Nous nous efforçons donc actuellement d'opérer une sorte de contagion. Nous lançons l'idée sur la scène internationale.

L'étape suivante, à laquelle nous en sommes maintenant, consiste par exemple à utiliser le réseau international de la politique culturelle, dont Mme Copps fait partie, pour essayer d'amener les représentants des autres pays à se pencher sur les modalités précises d'un instrument éventuel, en se fondant sur leur propre expérience et leur propre cadre culturel national, parce que ce que nous considérons chez nous comme une politique culturelle ne l'est peut-être pas dans d'autres pays, ou bien leurs priorités peuvent être différentes. Il y a par exemple tout le domaine de la protection du patrimoine ou des antiquités, et d'autres questions ont été soulevées.

Si vous voulez, je peux maintenant demander à notre collègue de vous donner un peu plus de détails sur le groupe de travail, sur le réseau qui est actuellement chargé d'explorer les principaux points qui seraient visés par un instrument, ou bien nous pourrions revenir plus tard...

Mme Sarmite Bulte: Ce serait pour une autre réunion.

Mme Janette Mark: Il y a un autre groupe au ministère qui est chargé d'étudier l'instrument de façon plus générale dans le cadre d'une stratégie à long terme.

Mme Sarmite Bulte: Je sais que notre temps est limité, et je pense donc...

Le président: Je ne sais pas s'il serait possible de trouver du temps pour cela, parce que nous serons bientôt saisis de projets de loi. Mais vous serait-il possible de rédiger à notre intention un document sur la question que nous pourrions distribuer aux membres du comité? Si cela ne vous convient pas, nous pourrions aussi vous demander de revenir. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, nous allons commencer par faire cela.

Mme Janette Mark: Très bien.

Mme Sarmite Bulte: Parfait.

Le président: Merci.

Monsieur Hearn.

• 1020

M. Loyola Hearn: Merci beaucoup, monsieur le président.

Quand nous avons négocié l'ALENA, beaucoup des mêmes préoccupations qui sont exprimées aujourd'hui l'ont été à cette époque. Avons-nous souffert par la suite dans nos relations avec les États-Unis? Avons-nous tiré les leçons de nos erreurs, si nous avons fait des erreurs, et sinon, que craignons-nous maintenant, puisque nous avons déjà un accord commercial avec notre principal partenaire dans tout ce processus de négociation? C'est ma première question et je vais vous laisser y répondre.

M. Don Stephenson: Je suppose que l'on peut dire que nous avons beaucoup appris au fil des années et des accords au sujet des questions qui sont en jeu dans la culture et le commerce. Par exemple, nous avons maintenant, comme Janette l'a signalé à juste titre, une section de la politique commerciale au ministère du Patrimoine canadien, ce qui n'existait pas auparavant.

Nous avons l'expérience de l'application de l'ALENA, du GATT et d'autres accords de l'OMC sur lesquels nous pouvons maintenant fonder, à mon avis, une position de plus en plus éclairée relativement à la culture.

Nous avons aussi aujourd'hui une position gouvernementale très claire sur la diversité culturelle qui est fondée sur cette expérience. Et nous adoptons des approches différentes de celles du passé. Je dirais que nous avons peut-être des positions mieux informées sur la façon de s'y prendre pour préserver la diversité culturelle.

Cathy.

Mme Catherine Dickson (directrice, Politique commerciale sur l'information et la technologie, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): J'ajouterais que nous avons un groupe interministériel très étendu qui se penche sur les questions relatives à la réduction des coûts, ce à quoi Sarmite faisait allusion tout à l'heure, et je songe en particulier au commerce électronique.

Nous avons mis sur pied un groupe de travail intergouvernemental qui se penche sur toutes les questions et qui travaille avec les intervenants. Nous avons aussi des relations étroites avec les groupes consultatifs sectoriels.

La culture a lancé le mouvement qui a débouché sur le rapport, mais les spécialistes des technologies de l'information et des communications y travaillent également, de même que le Conseil canadien pour le commerce international. Nous travaillons avec tous ces groupes pour obtenir leurs points de vue également.

M. Loyola Hearn: J'allais dire que nous tous, mais peut-être ne devrais-je pas dire cela, mais la plupart d'entre nous convenons que l'accord de l'ALENA a été avantageux pour notre pays, pour les Canadiens qui ont assurément pu compter sur une extraordinaire croissance de l'emploi grâce à ces accords. Et il est indéniable que si nous pouvons établir les marchés que vous évoquez, cela ne fera que renforcer cet avantage.

Compte tenu de cela, l'une de mes préoccupations en vue du sommet à Québec, ce qui a sûrement un lien avec ce dont on parle, c'est le nombre de gens qui protestent—j'allais dire «vicieusement» contre le sommet. Cela me préoccupe énormément et, à la lumière de notre expérience passée et compte tenu des résultats qui me semblent globalement positifs, pourquoi les gens expriment-ils de telles inquiétudes? Quel est le raisonnement, sur quoi se fonde-t-on? Les craintes sont-elles légitimes, ou bien joue-t-on un autre jeu?

M. Don Stephenson: C'est une question extrêmement difficile.

Je pense que les gens réagissent de plus en plus à mesure que l'effet de la mondialisation croissante se fait sentir de plus en plus profondément dans la vie quotidienne.

Il est certain que des préoccupations tout à fait légitimes sont soulevées quant à la façon dont on doit gérer l'intégration économique de plus en plus poussée avec les États-Unis et tous les pays du monde, d'une part, tout en préservant d'autre part notre propre modèle social et politique.

De plus, les gens veulent que le Canada intègre ses valeurs sociales et politiques dans les positions commerciales qu'il défend face à d'autres pays, et ce sont des objectifs légitimes pour le Canada.

• 1025

Je pense qu'il est juste de dire qu'il y a beaucoup de mésinformation. D'après les sondages, environ les deux tiers des Canadiens pensent que l'ALENA a été bon pour le Canada. Environ les deux tiers des Canadiens pensent que le gouvernement a fait du bon travail, de façon générale, dans le domaine du commerce. C'est la note la plus élevée que les Canadiens aient donné au gouvernement actuel.

D'après les mêmes sondages, seulement 12 p. 100 des Canadiens peuvent faire le lien entre leur propre situation économique et le commerce extérieur, ce qui trahit une lacune. L'un de mes collègues américains m'a dit que, d'après un sondage fait aux États-Unis, zéro pour cent des Américains pouvaient décrire de façon même très sommaire le fonctionnement du système commercial mondial.

En fin de compte, les gens ne savent pas grand-chose sur le fonctionnement des accords commerciaux. Ils ne s'y intéressent pas tellement non plus. Ils s'intéressent à la culture, la santé, l'éducation, ils veulent savoir s'ils peuvent compter sur un approvisionnement sûr en eau potable ou en énergie, etc. Quand ils entendent soulever des préoccupations sur des questions de ce genre, ils s'inquiètent.

Je dirais que dans une grande mesure, il suffirait d'une meilleure information pour apaiser ces craintes. Jusqu'à un certain point, cela s'inscrit dans le véritable défi de vivre la mondialisation.

Le président: Monsieur Harvey et monsieur Murphy.

[Français]

M. André Harvey (Chicoutimi—Le Fjord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Il me fait plaisir d'entendre des commentaires sur les négociations qui s'amorcent et qui vont durer plusieurs années. En politique, comme vous le savez, on n'est pas en pastorale, n'est-ce pas? Il est donc tout fait normal que dans les partis politiques, on se demande parfois s'il n'y a pas beaucoup d'animation sociale qui se fait.

Depuis des semaines, le débat tourne autour du dépôt des documents. Je lis les textes ministériels et, en ce qui me concerne, le dépôt des documents canadiens est fait. Les Canadiens qui s'intéressent à la négociation de la Zone de libre-échange ont accès aux points de vue gouvernementaux. Serait-il possible que le gouvernement fédéral, avant que les propositions initiales de tous les gouvernements ne soient déposées, ce qui se fera le 7 avril, je crois, dépose les documents au nom du Mexique et de tous les autres pays qui vont participer aux négociations?

M. Don Stephenson: Je pense que mon collègue M. Carrière répondrait que les positions canadiennes ont été rendues publiques et sont sur notre site web, mais qu'on ne pourra rendre publique la position des autres pays qu'avec leur consentement. Il faut qu'on respecte les autres pays dans la négociation. Le Canada pousse fort pour que tous les pays participant à la négociation s'entendent pour rendre les textes publics. Mais jusqu'à ce qu'on ait leur approbation, on devra respecter leur volonté.

M. André Harvey: Normalement, le dépôt des propositions initiales sera fait bientôt. Est-ce que cela a forcément pour conséquence de rendre publiques les propositions initiales de négociation de tous les pays?

M. Don Stephenson: Si je comprends bien la question, si on rendait public le texte actuel, la position de chaque pays serait claire.

M. André Harvey: Lorsque le Canada va déposer ses propositions avant le début de la conférence—vous parliez plus tôt du 7 avril, je pense—tous les autres pays vont-ils aussi déposer leurs propositions initiales de négociation à ce moment-là?

M. Don Stephenson: Tous les pays ont présenté leurs propositions pour le texte de négociation. Le texte lui-même comporte une série de phrases entre parenthèses. Les parenthèses sont là pour indiquer que cela n'a pas encore fait l'objet d'une entente. Ce sont des parenthèses qui ne sont que la somme des propositions de tous les pays, et dans le cadre de la négociation, on essaie d'enlever les parenthèses.

• 1030

M. André Harvey: Je voudrais maintenant parler du volet culturel, monsieur le président. Vous savez qu'on a beaucoup de travail comme députés dans nos régions. Moi, je viens du Saguenay—Lac-St-Jean. On a plein de projets et on est ici pour défendre les intérêts des gens de notre région. Donc, on ne peut pas aller de façon pointue dans tous les créneaux.

Du côté du Québec, avec le Bloc québécois et plusieurs organismes qui ont commencé à faire des manifestations... Cela me fait plaisir de rencontrer des manifestants. On parle beaucoup du volet culturel. Avec les garanties que nous avons, quel est l'obstacle principal à la préservation de la diversité culturelle canadienne ou québécoise dans ce contexte? Quelle est la difficulté principale? Est-ce que vous envisagez des problèmes dans le cadre des négociations de la ZLEA par rapport au volet culturel?

J'ai l'impression qu'on a déjà la main faite dans le cadre des négociations reliées au libre-échange. Je pense que ça va se dérouler assez facilement et de façon constructive pour le pays. Est-ce que je me trompe? Donnez-moi un obstacle majeur à une entente sur la préservation de la diversité culturelle? S'il n'y en a pas, ça me rend heureux et je me dis qu'on fait du buildup et qu'on s'organise pour faire manifester les gens sur des concepts qui sont garantis dans des documents à déposer.

Je lis les textes du ministre et du premier ministre: il faut préserver la façon canadienne de faire les choses. Le ministre Pettigrew nous dit qu'on réaffirme notre position en ce qui touche à la diversité culturelle. C'est écrit. Voyez-vous un obstacle majeur, dans les négociations, à la préservation de la diversité culturelle? Non?

Merci.

[Traduction]

M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Stephenson et fait suite à celle de M. Hearn, puisqu'elle porte sur tout le domaine de la stratégie des communications.

À l'instar de M. Hearn, je suis de près l'ALENA. Si l'on peut négocier de façon satisfaisante et si le Canada peut protéger sa position sur la diversité culturelle, à long terme, je crois que c'est une bonne chose.

Vous avez dit que votre direction tente de démystifier le processus. Je conviens qu'il y a beaucoup de mésinformation. Il me semble, à lire les journaux et à parler aux gens, qu'ils ne savent pas ce qui se passe à Québec. Ils savent qu'il y aura de nombreux participants représentant beaucoup de pays, les médias leur disent qu'il y aura 30 000 manifestants, ils voient le premier ministre Landry qui joue lui aussi le jeu des médias, mais les gens ne savent pas vraiment ce qui se passe.

À qui incombe la responsabilité de mieux informer les Canadiens? J'ai lu le document d'information présenté par le ministre, et je vous le dis bien franchement, je le trouve plutôt faible. Vous parlez de publication dans la Gazette du Canada et de discussions avec les principaux intervenants. Les gens ici à Ottawa sont évidemment informés; ils s'intéressent vivement aux négociations. Mais je ne pense pas que le Canadien moyen là-bas, à Vancouver ou Charlottetown, ait la moindre idée de ce qui se passe à Québec, sinon qu'il y aura une grande manifestation. Y a-t-il une stratégie de communication? Qui en est responsable et est-elle bien appliquée?

M. Don Stephenson: Premièrement, je pense que nous pourrions mieux faire dans nos efforts de communications. D'autres intervenants dans le débat semblent beaucoup plus efficaces que le gouvernement pour ce qui est de communiquer leurs messages.

Vous avez mentionné spécifiquement nos efforts relativement à la position du Canada sur l'accord général sur le commerce des services. Il y a deux volets de cet effort dont je suis particulièrement fier. Le premier, c'était quand nous avons invité plus de 1 000 groupes de la société civile dans le cadre de nos consultations multi-intervenants dans chaque province. Quelque 350 représentants de divers groupes y ont participé. Je pense que ce fut un bon effort.

• 1035

J'attire également votre attention sur les deux sites Web très complets traitant de nos négociations sur le commerce et les services. Le site Web du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a une page sur les négociations commerciales où l'on donne tous les détails pertinents, y compris sur nos négociations dans le cadre du GATS et de la ZLEA. Il y a aussi un site Web appelé Services 2000, administré par nos collègues d'Industrie Canada. On y trouve aussi une liste très complète des documents qui exposent les positions du Canada sur le GATS.

Enfin, pour ce qui est des communications en vue du sommet, je vais demander à Michael de répondre.

M. Michael Brock: Ce que vous dites est un défi, comme Don Stephenson l'a dit. Les médias trouvent généralement plus facile et plus attrayant de faire des reportages sur les protestataires que d'examiner le fond de la question. C'était le cas l'année dernière, quand les manifestants ont voulu empêcher la tenue de l'assemblée générale de l'OEA à Windsor. Mais en fin de compte, je pense que le grand public a été en mesure d'apprendre que les ministres des Affaires étrangères discutaient entre eux des préoccupations des citoyens relativement à la démocratie dans certains pays. On a beaucoup fait pour aider le Pérou à rétablir la démocratie et pour renforcer le système. Les ministres ont discuté du trafic des stupéfiants, de la corruption, bref d'une foule de préoccupations.

La mondialisation suscite des défis aussi bien que d'extraordinaires occasions. Nous devons faire de notre mieux pour l'expliquer aux gens. La semaine dernière, les ministres Manley et Pettigrew ont comparu devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international pour dire clairement que ce sommet ne traite pas seulement du commerce, mais aussi de bien d'autres choses; ce sont des gouvernements armés de convictions qui se réunissent, qui travaillent ensemble, dans des dossiers d'intérêt commun comme la démocratie. Ces questions présentent maintenant des aspects transfrontaliers, contrairement à la situation passée, et le seul moyen de s'y attaquer, c'est de le faire ensemble avec cohérence.

D'un bout à l'autre du pays, partout dans l'hémisphère, en fait, il y a eu des consultations approfondies sur le sommet. Il s'agit maintenant de continuer dans la même veine, de continuer à établir les faits et à donner de l'information, de continuer à montrer aux Canadiens que les gouvernements visent à renforcer leurs institutions et leur coopération. Les défis de la mondialisation sont réels et exigent une telle action concertée.

Par exemple, pour s'attaquer au trafic de stupéfiants, problème épouvantable qui afflige les sociétés de tout l'hémisphère, les gens disent: «Il faut un réseau pour alimenter un réseau». Les gouvernements cherchent justement à s'attaquer à ces problèmes en se concertant au niveau gouvernemental, en mettant en place des réseaux de ministres dans ces divers domaines.

Le président: Monsieur Brock, pourriez-vous conclure? Il ne nous reste pas beaucoup de temps.

M. Michael Brock: Bien sûr.

Le président: Je vais donner la parole à Mme Gallant et à Mme Lill, qui m'ont demandé d'intervenir.

Madame Gallant.

Mme Cheryl Gallant: Quels ministères prendront l'initiative dans les dossiers qui mettent en cause l'Internet ou la ZLEA?

M. Don Stephenson: Eh bien, le ministère de l'Industrie jouera un rôle de chef de file pour le commerce électronique. Mais nous avons maintenant 28 groupes de travail dans divers secteurs dans le cadre de l'AGCS et d'autres négociations commerciales, et bien d'autres ministères ont des intérêts et des préoccupations dans ce domaine. Il est certain que notre ministère s'y intéresse, de même que le ministère du Patrimoine canadien, mais le chef de file sera Industrie Canada.

• 1040

Mme Catherine Dickson: Pour la ZLEA, le commerce électronique a fait l'objet de discussions au sein d'un groupe de travail conjoint des secteurs public et privé, et mon service et une section d'Industrie Canada se sont partagés la tâche de diriger le dossier.

Mme Cheryl Gallant: Dans quelle mesure y aura-t-il des discussions, s'il y en a, sur l'adoption d'une monnaie commune?

M. Don Stephenson: Il n'y en aura pas.

Mme Cheryl Gallant: Dans quelle mesure le Canada fera-t-il la promotion de notre industrie nucléaire comme moyen d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés dans le cadre du protocole de Kyoto?

M. Don Stephenson: Je crains de ne pouvoir répondre précisément à cette question. C'est le ministère des Ressources naturelles qui préparerait la position du Canada dans le domaine de l'énergie. Je ne suis pas au courant de cette position, à supposer qu'elle ait été mise au point.

Mme Cheryl Gallant: Il y a des pays d'Amérique du Sud qui réclament la légalisation du commerce des drogues illégales. Notre pays est-il le moindrement réceptif à cette éventualité?

M. Don Stephenson: Cela n'a pas été proposé dans le cadre de nos discussions commerciales. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ne serait pas chargé de faire des recommandations à cet égard.

Mme Cheryl Gallant: Merci.

La présidente: Mme Lill, et ensuite Mme Gagnon.

Mme Wendy Lill: Merci. J'ai seulement une dernière question à vous poser.

Je dois dire que je suis troublée quand j'entends le négociateur en chef pour la ZLEA me dire qu'il plaide l'incompétence sur la question de savoir où finit la culture et où commence le commence. Je trouve cela très inquiétant et j'espère que cela nous inquiète tous. Il me semble que c'est justement de cela qu'il était venu nous parler. Nous sommes le comité du patrimoine culturel et c'est là-dessus que nous voulons entendre des réponses, et non pas seulement des généralités sur notre réussite éclatante dans ce dossier.

Je répète la question: Quelle sont les menace à la diversité culturelle? Je pense que nous tentons de protéger la diversité culturelle en donnant des subventions aux industries culturelles. Nous imposons des règlements sur le contenu canadien. Nous avons un réseau public de radiodiffusion. Tout cela peut être menacé si la culture est mise en discussion à titre de service. Êtes-vous d'accord, oui ou non?

M. Don Stephenson: Je dirais que tout cela peut être protégé dans nos négociations commerciales et le sera.

Je voudrais me porter à la défense de mon collègue. J'ai passé une partie de ma carrière dans le domaine de la politique culturelle au gouvernement fédéral, ces trois dernières années à titre de directeur général responsable des industries culturelles à Patrimoine canadien. J'aurais autant de misère que lui à décider où il faut tracer la ligne entre la culture et le commerce, surtout que cette ligne ne cesse de fluctuer. D'aucuns diraient que les galeries marchandes dans nos banlieues font partie intégrante de notre culture.

Je peux vous dire que lorsque des entreprises multinationales comme Nikes ou des gestionnaires immobiliers produisent des biens culturels, puisqu'on les décrirait comme tels, ils sont visés par la politique du gouvernement du Canada quant à la protection de la diversité culturelle. Si nous nous lançons dans des considérations socioculturelles de portée générale, j'aurais la même difficulté que mon collègue à savoir exactement où finit la culture et où commence le commerce, puisqu'ils sont certainement inextricablement liés.

Mme Wendy Lill: Ce qui protège notre culture, je le répète, ce sont les subventions et les règles sur le contenu canadien, et cela serait menacé par le statut de la nation la plus favorisée, par le chapitre 11, par les règles sur les différends entre investisseurs et État, et par le traitement national. Toutes ces mesures et dispositions seront menaçantes, si la culture est perçue purement et simplement comme un service. Nous savons donc ce que nous devons faire à ce propos n'est-ce pas?

M. Don Stephenson: Absolument. Comme je l'ai dit, il faut prendre en compte divers aspects d'un accord commercial pour s'assurer d'éviter les effets que l'on juge indésirables en matière de culture. Ce n'est pas seulement l'absence d'engagement, ni une série d'exclusions, selon la structure de l'accord. Il faut aussi se préoccuper des engagements que l'on prend en matière de subventions. Il faut se préoccuper des engagements que l'on prend pour la protection des investissements, le chapitre 11. Il faut prendre en compte la totalité de l'accord. Je peux vous assurer que dans les services de Cathy et de Janette, c'est exactement ce que l'on fait.

• 1045

[Français]

Le président: On va terminer avec Mme Gagnon et M. Lanctôt. Madame Gagnon.

Mme Christiane Gagnon: Le député de Chicoutimi—Le Fjord vous posait des questions. Les élus du gouvernement semblent se contenter des textes, mais je pense qu'il faut aussi regarder le double langage des ministres porte-parole des Affaires étrangères ou du Commerce international.

Il y a toutes sortes de discours et je pense qu'il y a lieu de s'inquiéter.

Par exemple, le ministre des Affaires étrangères, pas plus tard que la semaine dernière, au Royal Institute for International Affairs de Londres, disait qu'avant tout, la mondialisation était le pouvoir d'inclure et de créer une interdépendance. Il ne s'agit pas seulement des économies, mais aussi des cultures, des concepts et des attentes humaines. À quel prix et comment cela va-t-il se faire? Il faut des balises. Je suis très inquiète, comme le disait Mme Lill tout à l'heure, quand on dit que la négociation d'accords commerciaux comme celui de la ZLEA n'est pas le moment de mettre des balises sur les services et de tenir un discours clair sur la signification de la protection culturelle.

Vous savez que dans les textes, on avait omis d'inclure la capacité de préserver les façons de faire des autres cultures. Est-ce que vous me comprenez bien? On avait dit qu'on ne voulait pas se mettre en position de demandeur face aux États-Unis. Telle a été la réponse des fonctionnaires. Je ne sais pas si c'était vous, monsieur Stephenson, qui aviez répondu à ça.

C'est très inquiétant de voir qu'entre les principes et la réalité, quand on veut payer au magasin ou demander le coût d'un produit, on nous dit que ce n'est pas le moment d'en parler. Il y a déjà des lieux de rencontre sur le commerce international.

Le président: Pouvez-vous arriver à votre question?

Mme Christiane Gagnon: On dit qu'on va parler des principes plus tard. Je pense qu'on devrait se donner une ligne de conduite. Je suis inquiète et vous n'avez pas calmé mes inquiétudes aujourd'hui.

J'aimerais savoir comment vous faites la distinction réelle entre ce qui se passe dans le commerce et les protections culturelles qu'il doit y avoir.

M. Don Stephenson: Je dois répéter que mes directives par rapport à ces négociations sont claires dans les documents qu'on a distribués. Mes directives sont très claires sur la question de la culture.

Par rapport à la distinction entre le commerce et la diversité culturelle, je pense que tous les produits économiques sur lesquels on pourra s'entendre pour dire qu'ils font partie de la culture, notamment les livres, les périodiques, les films et les émissions de télévision, seront protégés dans les négociations.

Mme Christiane Gagnon: Dans le fond, c'est tout le domaine de l'audiovisuel. C'est là que les États-Unis font de l'argent. Ils ne sont pas intéressés à ce que l'on fait dans les musées ou dans d'autres secteurs d'activité culturelle. On sait qu'il y a un envahissement de l'audivisuel américain, qui est très rentable pour les États-Unis. Donc, ils vont y aller dans des secteurs très... C'est là que cela se négocie.

Le président: Madame Gagnon, si vous voulez qu'on discute de votre motion, il faudra y aller. On ne peut pas tout faire à la fois.

Mme Christiane Gagnon: Oui, oui. Il y a eu quand même...

M. Don Stephenson: Je terminerai en disant que les États-Unis ont le droit de demander et que le Canada a le droit de refuser.

Le président: Monsieur Lanctôt, on termine avec vous.

M. Robert Lanctôt: J'aimerais parler de l'aspect qu'a abordé M. Hearn plus tôt, soit l'expérience qu'il a des problèmes existants de la diversité culturelle par rapport au commerce.

J'entends depuis tout à l'heure des réponses dans lesquelles on dit que oui, on sera là pour négocier, protéger, pour tel point spécifique et tout.

Je me demande pourquoi on ne met pas dans les négociations à venir de la ZLEA un principe global à respecter, qu'on parle de culture, de langue, d'éducation ou de santé. Je ne veux pas continuer cette énumération, mais oui, il est possible d'énumérer ces choses et de prévoir dès maintenant une clause à cet égard.

• 1050

Lorsqu'on devra déterminer si on est dans le domaine commercial ou dans celui de la diversité culturelle, on aura un moyen immédiat de régler la question, après avoir donné un principe général, à savoir que jamais on ne touchera à cela. On aura alors une tribune pour régler la question de savoir si on est dans le domaine commercial ou dans le domaine culturel. Pourquoi ne pas prévoir cela tout de suite dans la négociation de la ZLEA?

M. Don Stephenson: D'abord, par rapport à la ZLEA, le Canada met sur la table sa position sur l'importance de la diversité culturelle. C'est le langage proposé par le Canada pour le préambule de l'entente, et il le dit assez clairement. La position du Canada par rapport à la culture est extrêmement claire dans la proposition canadienne qui a été annoncée la semaine dernière et présentée à Genève, à l'OMC. Alors, le Canada est extrêmement clair.

Pour ce qui est de clarifier les définitions de la culture et du commerce, je pense que c'est surtout par les efforts en vue d'élaborer et d'établir un nouvel instrument sur la diversité culturelle qu'on va répondre à votre question et proposer un langage précis sur la définition qu'on devrait donner à la diversité culturelle et sur les mesures qui devraient être permises à tous les pays pour défendre leur diversité culturelle. C'est dans cette initiative-là.

M. Robert Lanctôt: On précise déjà cette définition dans cette négociation-ci, pour la ZLEA?

M. Don Stephenson: Dans la ZLEA, on ne va pas plus loin que le préambule, mais dans le travail qui se fait sur le nouvel instrument, on essaie de le préciser.

M. Robert Lanctôt: Très bien.

Le président: Avant qu'on se quitte,

[Traduction]

Monsieur Wilczynski, vous nous ferez parvenir un document sur ce que le ministère fait dans le dossier des négociations et sur les initiatives que vous avez prises?

M. Arthur Wilczynski: Oui, monsieur le président, nous allons faire parvenir aux membres du comité un mémoire sur les activités du réseau relativement à l'instrument et les activités du groupe de travail sur la mondialisation.

Le président: Et puis, monsieur Stephenson, si ce n'est pas trop demander, en rapport avec la question de M. Lanctôt, serait-il possible de savoir ce qui se passe dans le domaine du sport?

M. Don Stephenson: Bien sûr.

Le président: Je sais que le sport n'est pas mis en cause dans l'ALENA, et il n'est donc évidemment pas menacé. Mais je vous serais reconnaissant de nous dire exactement où nous en sommes dans ce dossier.

M. Don Stephenson: Bien sûr.

Le président: Je vous remercie beaucoup d'être venu. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants.

[Français]

Merci d'être venus.

[Traduction]

Nous poursuivons la séance à huis clos pour discuter de diverses questions.

[Note de la rédaction—La séance se poursuit à huis clos]

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