37e LÉGISLATURE,
1re SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 14 mars 2002
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Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)) |
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Mme Carole Taylor (présidente, Conseil d'administration, Société Radio-Canada) |
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Le président |
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Mr. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.) |
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Le président |
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M. Robert Rabinovitch (président-directeur général, Société Radio-Canada) |
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Le président |
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M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne) |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Jim Abbott |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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Mme Carole Taylor |
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Le président |
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Mme Carole Taylor |
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M. Jim Abbott |
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Le président |
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Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
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M. Robert Rabinovitch |
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Mme Christiane Gagnon |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Michel Tremblay (vice-président, Stratégie et développement commercial, Société Radio-Canada) |
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Mme Christiane Gagnon |
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M. Robert Rabinovitch |
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Mme Christiane Gagnon |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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M. Dennis Mills (Toronto--Danforth, Lib.) |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Dennis Mills |
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Le président |
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M. Roger Gallaway (Sarnia--Lambton, Lib.) |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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Mr. Clifford Lincoln |
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M. Mauril Bélanger |
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Mme Carole Taylor |
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M. Mauril Bélanger |
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Mme Carole Taylor |
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Le président |
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Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD) |
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M. Robert Rabinovitch |
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Mme Wendy Lill |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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M. Grant McNally (Dewdney--Alouette, PC/RD) |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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M. Grant McNally |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président: |
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M. Michel Tremblay |
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Le président |
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Mme Christiane Gagnon |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Michel Tremblay |
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Le président |
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Mme Christiane Gagnon |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Roger Gallaway |
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M. Clifford Lincoln |
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Mme Wendy Lill |
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Mme Carole Taylor |
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Mme Wendy Lill |
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Mme Carole Taylor |
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Le président |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Clifford Lincoln |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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M. Michel Tremblay |
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M. Grant McNally |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Grant McNally |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Grant McNally |
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Mme Carole Taylor |
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M. Grant McNally |
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Le président |
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M. Guy St-Julien (Abitibi--Baie-James--Nunavik, Lib.) |
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M. Robert Rabinovitch |
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M. Guy St-Julien |
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Le président |
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M. Jim Abbott |
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M. Robert Rabinovitch |
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Le président |
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Mme Carole Taylor |
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Le président |
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M. Michel Tremblay |
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Le président |
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Mme Christiane Gagnon |
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Mme Carole Taylor |
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Le président |
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Mme Christiane Gagnon |
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Le président |
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M. Roger Gallaway |
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Le président |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 14 mars 2002
[Enregistrement électronique]
[Énregistrement électronique]
* * *
(0905)
[Traduction]
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)):
Je voudrais déclarer ouverte la réunion du Comité permanent du patrimoine canadien qui poursuit aujourd'hui l'examen du système canadien de radiodiffusion.
Nous sommes particulièrement heureux de recevoir aujourd'hui la Société Radio-Canada. Il est inutile de rappeler que Radio-Canada a été notre premier radiodiffuseur, tant à la radio qu'à la télévision. Ce radiodiffuseur est présent dans le tissu social de notre pays depuis plusieurs décennies. Je pense qu'il occupe une place particulière dans le coeur et la tête des Canadiens, et à mon point de vue, dans ceux de l'élite aussi.
J'ai souri à la définition de l'«élite», parce que durant notre voyage dans l'Ouest, nous allions d'aéroport en aéroport. Nous tous, membres du Comité, nous efforcions de contourner les files d'attente et lorsque nous nous approchions des comptoirs de lignes aériennes nous espérions non seulement faire partie de l'élite, mais de «l'élite supérieure». Il faut donc prendre cette définition avec un grain de sel.
Quoi qu'il en soit, il est évident que votre place à titre de radiodiffuseur public national est essentielle pour les Canadiens et qu'elle mérite que l'on s'y attarde. Nous devons en arriver à une décision au sujet de la poursuite de votre engagement et de la forme qu'il devra prendre.
Nous sommes donc très heureux de vous entendre aujourd'hui.
Accueillons Mme Carole Taylor, présidente du Conseil d'administration et M. Robert Rabinovitch, président et chef de la direction.
[Français]
ainsi que M. Michel Tremblay, vice-président, Stratégie et développement commercial.
[Traduction]
Vous avez la parole, madame Taylor.
Mme Carole Taylor (présidente, Conseil d'administration, Société Radio-Canada):
Je vous remercie, monsieur le président et Mesdames et Messieurs les membres du Comité. C'est avec plaisir que nous avons accepté l'invitation à nous présenter devant vous aujourd'hui pour participer à cet important examen.
J'amorcerai notre exposé en vous félicitant de vous être déplacés aux quatre coins du pays pour visiter diverses installations de radiodiffusion. Je suis convaincue que pour bien comprendre la politique, vous devez la voir en action sur le terrain et constater par vous-même ce qui va et ce qui va moins bien. Je sais que pour chacun d'entre vous ce voyage a exigé des efforts supplémentaires, mais je suis convaincue qu'il vous aidera certainement à prendre des décisions plus éclairées, au bout du compte. Je tiens à vous féliciter pour cela.
Je suis accompagnée aujourd'hui d'une personne que vous connaissez sans doute très bien, Robert Rabinovitch, le président et chef de la direction de la Société. J'ai également le plaisir de vous présenter Michel Tremblay, vice-président, Stratégie et Développement commercial.
[Français]
Je vais commencer notre présentation sur une note personnelle en vous laissant entrevoir ce qui m'a amenée à la CBC/Radio-Canada et les raisons pour lesquelles j'ai accepté la présidence du conseil d'administration l'an dernier.
[Traduction]
J'ai été pendant longtemps journaliste dans le Centre du Canada, tant pour Radio-Canada que pour CTV. J'ai eu la chance de couvrir ce que j'estime être certains des événements les plus importants à être survenus dans notre pays et ailleurs dans le monde. J'ai ensuite déménagé à Vancouver, il y a quelque 27 ans, mais je suis demeurée active dans le monde de la radiodiffusion en plus de participer à la vie politique à l'échelon municipal et de faire des affaires sur la scène locale et nationale.
Ce déménagement dans l'Ouest du pays m'a permis de voir le Canada sous un angle différent. Il m'a permis de mieux saisir la vitalité et la diversité des régions et l'importance qu'elles ont dans notre pays. J'ai aussi acquis une compréhension beaucoup plus intime de la valeur que les Canadiens accordent à CBC/Radio-Canada et au caractère unique de la culture canadienne. J'ai la conviction que Radio-Canada a contribué plus que toute autre institution culturelle à la définition de l'identité canadienne. Les chiffres à cet égard sont éloquents: 36 millions de dollars par année versés en honoraires aux artistes; 64 millions de dollars par année versés directement aux producteurs indépendants, soit 100 millions de dollars en tout consacrés au soutien de notre communauté culturelle.
En outre, j'ai vu et entendu des Canadiens me dire à quel point la gamme des services offerts par Radio-Canada est importante pour eux. En anglais comme en français, nos émissions de nouvelles fixent la norme en matière de journalisme et d'information dans ce pays. Regardez cette carte du Canada. Chaque symbole indique un endroit où des journalistes à plein temps de Radio-Canada font part aux Canadiens, en anglais et en français, à la radio comme à la télévision, des nouvelles sur lesquelles ils comptent. Chaque jour, ces journalistes s'assurent que Radio-Canada assume sa responsabilité de plus important organe de presse au Canada, diffusant des nouvelles en provenance de toutes les régions du pays à l'ensemble des Canadiens.
Alors, que fait Radio-Canada pour les Canadiens? Permettez-moi de vous en donner quelques exemples. Pensons à Ben Heppner. Cet artiste donne des concerts à guichets fermés partout dans le monde. La semaine dernière, il a obtenu un prix Grammy. Les Canadiens l'ont entendu pour la première fois... sur les ondes de Radio-Canada. C'était il y a 23 ans lorsqu'il a remporté un concours destiné aux jeunes interprètes. Voilà comment la Radio de Radio-Canada met en valeur le talent canadien!
Le duo hip hop Snakeye vient de Oakville, en Ontario. Pendant 10 dures années, ce duo est plutôt passé inaperçu. Les deux artistes n'ont pas encore produit de disque, mais maintenant la société Universal s'intéresse à eux. Savez-vous pourquoi? La maison de disque a entendu leur musique sur notre site Internet Radio 3. Voilà un autre aspect de nos activités. Nous procurons aux jeunes musiciens canadiens une vitrine pour diffuser leur musique et nous leur donnons ainsi un peu de visibilité. Radio-Canada procure aussi aux Canadiens, et à d'autres, un moyen d'entendre les artistes de la relève avant même qu'ils ne soient officiellement découverts.
Un radiodiffuseur public devrait-il aider les Canadiens à améliorer leur qualité de vie? Emma Bourassa est professeur d'anglais à Kamloops et elle utilise les reportages diffusés pendant l'émission Canada Now comme outils pédagogiques dans l'enseignement de l'anglais et de la culture canadienne.
Par l'entremise de notre site Web Know Canada, nous aidons les nouveaux Canadiens à se trouver de meilleurs emplois et à se bâtir une vie meilleure en utilisant nos nouvelles comme outil d'apprentissage de l'anglais. C'est vrai. À Vancouver, j'ai un ami maintenant avocat éminent. Enfant, il a immigré d'Italie au Canada et il m'a dit qu'il bénissait Radio-Canada tous les jours, puisqu'il s'en est servi pour apprendre la langue anglaise.
Les services offerts par Radio-Canada sont essentiels à de nombreux Canadiens. Prenons Denis Desgagné, un francophone de Regina. Isolé au milieu d'un océan anglophone, Denis et sa jeune famille conservent malgré tout leurs racines bien vivantes grâce à la Radio et à la Télévision françaises de Radio-Canada. Leur histoire est aussi celle d'un grand nombre de Canadiens partout au pays.
Au cours de votre récente tournée dans l'Ouest du pays, certains d'entre vous ont rencontré Chris Haynes, ingénieur à l'enregistrement. C'est un homme qui possède beaucoup de talent, qui, après des études aux États-Unis, est revenu au pays pour se trouver un emploi à Radio-Canada, à Regina, où il savait qu'il allait pouvoir travailler à des productions à la fine pointe.
Je pourrais aussi vous parler de Danielle Dussault. Avec son mari Steve, elle vivait en Corée lorsque l'horreur des événements du 11 septembre dernier a frappé. Dans leur désarroi, vers qui se sont-ils tournés? Comme des millions d'autres Canadiens, ils se sont branchés sur Radio-Canada pour obtenir un point de vue authentiquement canadien sur ces événements tragiques.
Personnellement, le 11 septembre a été réellement un moment de grande prise de conscience, une prise de conscience de ce que cela signifie pour moi d'être Canadienne et aussi de ce que signifie être un radiodiffuseur public canadien. Aux quatre coins du pays, les gens se sont tournés en masse vers Radio-Canada--vers la Radio et la Télévision anglaises et françaises--pour voir quelle était la résonance de cette tragédie internationale dans notre système de valeurs. Pour comprendre ce qu'elle signifiait pour nos politiques d'immigration ou notre sécurité à la frontière. Les gens voulaient voir notre Premier ministre, nos politiciens, nos analystes. Ce fut vraiment un moment important, et je pense que les Canadiens ont été à même de comprendre ce que représente la radiodiffusion publique sous son meilleur jour.
(0910)
[Français]
C'était un moment très spécial pour Radio-Canada.
Vous avez là des exemples concrets qui expliquent pourquoi je suis fière d'appartenir à Radio-Canada et de participer au maintien de cette pépinière de talents canadiens où se rassemblent les meilleurs créateurs, techniciens, réalisateurs, metteurs en scène, auteurs, journalistes et artistes de spectacle. Tous sont attirés par Radio-Canada, par sa manière typiquement canadienne de faire les choses et, bien sûr, par son excellence.
(0915)
[Traduction]
Combien de Canadiens se sont éveillés à la préservation de l'environnement en regardant l'émission The Nature of Things ou les reportages scientifiques de Découverte? Combien d'entre eux ont été inspirés par l'acharnement des jeunes athlètes canadiens auxquels ils peuvent s'identifier grâce aux émissions sportives de Radio-Canada? Combien d'entre eux ont suivi les grands événements de l'actualité canadienne -- référendums, élections, Fête du Canada -- en écoutant les nouvelles de Radio-Canada?
Qui d'autre que Radio-Canada pourrait faire vivre à des millions de Canadiens un retour vers le XIXe siècle à Terre-Neuve pour voir une histoire authentiquement canadienne comme Random Passage? Qui d'autre que Radio-Canada prendrait le risque d'offrir aux Canadiens de tout le pays une émission relatant l'histoire de leur propre sang et de leur propre chair, l'histoire de leurs ancêtres qui ont bâti ce pays, comme nous l'avons fait dans la série épique Le Canada: une histoire populaire?
À un moment où se dressent de grands défis pour la radiodiffusion provenant de la diversité des plates-formes technologiques et du choix quasiment illimité de chaînes, il est vital que le Canada en tant que nation se dote de politiques et prenne des mesures en vue de réserver une place à la radiodiffusion publique canadienne indépendante. Je sens monter une nouvelle flambée de fierté au pays doublée d'une préoccupation grandissante pour la souveraineté du Canada. Sur cette toile de fond, CBC/Radio-Canada se dresse comme une institution nationale vouée à défendre nos valeurs, nos athlètes, nos artistes et nos interprètes, et jusqu'à notre identité propre en tant que Canadiens. Ainsi, Radio-Canada demeure-t-elle importante pour le Canada? À notre avis, Radio-Canada est plus importante aujourd'hui que jamais auparavant.
[Français]
Radio-Canada demeure-t-elle importante pour le Canada? À notre avis, Radio-Canada est plus importante aujourd'hui que jamais auparavant.
[Traduction]
J'invite maintenant Robert à vous parler de ce thème. Par la suite, je répondrai avec plaisir à vos question.
Robert.
Le président:
Merci beaucoup, madame Taylor.
Puis-je demander votre indulgence durant une petite minute, monsieur Rabinovitch, j'ai oublié un élément important pour le déroulement du comité, et nous devons faire une pause.
Le comité du budget se réunit cet après-midi et nous devons adopter une proposition visant à approuver nos déplacements dans les Maritimes et à Terre-Neuve. Voici la proposition. Elle ne comporte que quatre lignes, vous pouvez donc en prendre connaissance vous-mêmes. Je vous en fais lecture:
«En rapport avec l'examen de l'état du système canadien de radiodiffusion, que le Comité approuve un budget de voyage au montant de 132 680 $ pour des déplacements à destination de St. John's, Halifax, Charlottetown, Moncton et Montréal entre le 21 et le 26 avril»--le sais que des membres du Comité m'ont déjà fait part de leur non disponibilité pour ces dates en raison d'un conflit d'horaire, mais les dates ne sont pas aussi importantes que l'argent, donc, je poursuis--«en vue de tenir des audiences publiques et de faire des visites, et que le président présente ce budget au Sous-comité du budget du Comité de liaison»--qui se réunit justement cet après-midi, après notre propre réunion.
M. Gallaway présente la proposition.
(La proposition est adoptée.)
Le président: Merci beaucoup.
Mr. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.):
Monsieur le président, pour le compte rendu, je dois m'abstenir de voter étant donné que je fais partie du comité qui va examiner la requête.
Le président:
Moi aussi. J'espère que nous aurons deux votes.
Merci beaucoup, monsieur Rabinovitch. Je suis désolé de vous faire passer des graves préoccupations que vous avez à de basses considérations matérielles, mais c'est la vie.
Monsieur Rabinovitch.
M. Robert Rabinovitch (président-directeur général, Société Radio-Canada):
L'argent est le nerf de la guerre.
[Français]
Merci, monsieur le président. Merci, Carole.
Je tiens tout d'abord à vous remercier de nouveau, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, de nous donner la possibilité de nous présenter devant vous et de participer à cet examen.
(0920)
[Traduction]
En préambule à mes remarques, je vais vous lire une citation qui va, je le pense, au coeur même de l'examen que vous avez le mandat d'effectuer: «La seule chose qui importe vraiment en matière de radiodiffusion, c'est le contenu: tout le reste n'est que gestion courante.» Comme ces propos arrivent à point nommé! Pourtant, ils ont été prononcés pour la première fois il y a 37 ans, au moment où le Comité sur la radiodiffusion a remis son rapport au secrétaire d'État en septembre 1965. Et aujourd'hui encore, ils n'ont rien perdu de leur actualité. La seule chose qui importe vraiment, c'est le contenu.
Depuis cette déclaration, au demeurant fort simple, la Loi sur la radiodiffusion de 1968 a été adoptée, de nouveaux règlements régissant le contenu canadien à la radio et à la télévision ont été passés, la Loi sur la radiodiffusion a été modifiée en 1991, et au cours des cinq dernières années seulement, un milliard de dollars de fonds publics ont été dépensés pour bâtir, aider et renforcer le secteur de la production indépendante au Canada. Toutes ces mesures visaient à assurer non seulement la production d'émissions canadiennes, mais aussi leur diffusion.
Cette politique a connu, à n'en pas douter, une part de succès. Certains éléments du système canadien de radiodiffusion sont aujourd'hui plus dynamiques qu'ils ne l'étaient il y a 10 ans lorsque la Loi actuelle a pris effet. Le secteur de la radio privée, notamment, est aujourd'hui plus rentable qu'il ne l'a été au cours des dix dernières années et les ventes des stations privées ont établi des profits records.
[Français]
CBC/Radio-Canada est aussi devenue une organisation très différente de ce qu'elle était il y a 10 ans. Elle rejoint aujourd'hui les Canadiens sur une multitude de plateformes allant de la radio et la télévision traditionnelle aux chaînes spécialisées et aux nouveaux médias. Non seulement ses services radio sont-ils accessibles à un plus grand nombre de Canadiens dans les deux langues officielles, mais elle attire aussi des auditoires records.
Les grilles horaires de la télévision de Radio-Canada sont foncièrement canadiennes. Nous sommes aussi propriétaires à part entière, ou avec des partenaires, de cinq chaînes de télévision spécialisées nationales diffusant en anglais et en français ainsi que de Galaxie, un service audionumérique payant.
L'Internet n'existait même pas lorsque la loi actuelle est entrée en vigueur. Les services Internet de CBC/Radio-Canada figurent aujourd'hui parmi les meilleurs au Canada et sont reconnus à l'échelle internationale pour leur grande qualité.
[Traduction]
Avec tous ces services, notre objectif consiste à offrir aux Canadiens une programmation dans la forme et au moment qui leur conviennent, qu'il s'agisse de services d'information sans fil, d'émissions pour les jeunes sur Internet ou de musique non commerciale. Nous desservons les Canadiens en leur offrant des histoires canadiennes et des points de vue canadiens.
Cependant, malgré nos succès et ceux du secteur privé, des problèmes graves persistent au sein du système canadien de radiodiffusion. Si certains aspects fonctionnent bien, d'autres ne fonctionnent pas du tout, aussi faut-il se préparer aux changements radicaux qui sont sur le point de survenir. Cela vaut autant pour Radio-Canada que pour les radiodiffuseurs privés.
Depuis 1996, la télévision canadienne a bénéficié de l'injection d'une quantité appréciable de fonds publics atteignant presque le milliard de dollars, grâce au FCT, et de millions de dollars additionnels sous la forme de crédits d'impôt provinciaux et fédéraux. Si l'objectif consiste simplement à faire produire de nouvelles émissions canadiennes en grand nombre, alors le mode de financement remplit bien son rôle.
Toutefois, malgré tous les investissements publics réalisés dans la télévision canadienne au cours de la dernière décennie et en dépit de l'offre accrue d'émissions canadiennes, l'auditoire des émissions canadiennes, en français comme en anglais, n'a tout simplement pas augmenté, peu importe le moment de la journée considéré et assurément pas aux heures de grande écoute.
[Français]
En fait, même à la télévision française, l'auditoire des émissions canadiennes, s'il demeure important, a diminué de 10 p. 100 aux heures de grande écoute au cours des 10 dernières années. Malgré tout, les 20 émissions les plus écoutées à la télévision française sont toutes canadiennes.
[Traduction]
En ce qui concerne la télévision anglaise, on ne peut nier l'attrait qu'exercent les émissions produites aux États-Unis. Celles-ci sont en effet bien faites et divertissantes. On ne saurait non plus faire abstraction des impératifs financiers qui poussent les télédiffuseurs privés à être prodigues de contenu américain aux heures de grande écoute.
Il serait vain de penser qu'on peut et même qu'on devrait pouvoir forcer les Canadiens à regarder des émissions canadiennes. Alors, où est le problème? Le problème tient au fait que si nous n'arrivons pas à inciter davantage de Canadiens à regarder des émissions produites ici, les Canadiens pourraient ne plus être en mesure de savoir clairement ce qu'est le Canada et quelle est leur place au sein de ce pays.
Au bout du compte, pourquoi les Canadiens ne regardent-ils pas davantage d'émissions canadiennes? La fragmentation du marché joue un rôle important dans ce phénomène. Au cours des 10 dernières années, on a assisté au Canada à une explosion du nombre de chaînes spécialisées. Si cette explosion est intéressante pour les consommateurs, la fragmentation du marché qu'elle engendre a eu pour effet d'étaler l'auditoire sur un nombre accru de chaînes. Nous avons ouvert nos frontières à plusieurs services américains comme A&E, CNN et MSNBC qui ne produisent pas d'émissions canadiennes et n'ont aucune responsabilité à l'égard de notre système de radiodiffusion. Il en résulte que les nouvelles émissions produites au pays représentent une très faible proportion de l'ensemble de la programmation offerte aux Canadiens. Rien d'étonnant, à ce compte-là, que le temps d'écoute consacré aux émissions canadiennes n'ait pas augmenté!
L'expérience de Radio-Canada confirme que si on leur en donne l'occasion, nombre de Canadiens regarderont des émissions canadiennes originales de qualité supérieure. Notre expérience démontre aussi que le public canadien n'acceptera pas d'emblée des produits de piètre facture simplement parce qu'ils sont d'origine canadienne.
(0925)
[Français]
Comme Mme Taylor l'a mentionné, l'émission A People's History--Le Canada: Une histoire populaire, une production de plus de 25 millions de dollars qui a rejoint plus de 16 millions de Canadiens, Random Passage, une autre production de plus de 16 millions de dollars qui a maintenu une moyenne de 1,2 million de téléspectateurs, et Music Hall, avec 1,7 million de téléspectateurs sur le marché francophone seulement, démontrent qu'un grand nombre de Canadiens sont attirés par des émissions canadiennes de qualité.
En fait, la télévision de CBC/Radio-Canada offre plus du tiers de toutes les émissions canadiennes aux heures de grande écoute, tant sur les marchés français qu'anglais.
[Traduction]
Analysons les grilles-horaires aux heures de grande écoute, c'est-à-dire de 19 heures à 23 heures. C'est au cours de cette période de la journée que la plupart des Canadiens regardent la télévision et c'est également à ce moment que les réseaux américains diffusent leurs meilleures émissions, celles qui sont le plus populaires. En achetant des émissions américaines diffusées aux heures de grande écoute, les radiodiffuseurs privés canadiens sont en mesure d'utiliser la substitution simultanée pour élargir leur auditoire de manière spectaculaire, et générer ainsi des recettes publicitaires importantes. Le calcul est simple à faire: les télédiffuseurs privés peuvent acquérir des séries américaines coûtant entre 3 et 14 millions de dollars par épisode pour aussi peu que 100 000 $ l'épisode et réaliser de 300 000 à 400 000 $ en recettes publicitaires en les présentant au Canada. Faut-il s'étonner dans ces conditions que leurs grilles renferment une aussi forte proportion de contenu américain?
Il va de soi que les réseaux privés canadiens comme CanWest Global et CTV doivent se concentrer sur le rendement à procurer à leurs investisseurs et qu'ils ne peuvent renoncer aux émissions américaines les plus rentables en faveur d'une programmation canadienne moins lucrative. Je me permets d'insister à nouveau sur le fait que les émissions canadiennes de qualité sont plus coûteuses à produire et qu'elles rapportent moins en publicité. Chaque épisode de l'émission Da Vinci's Inquest, par exemple, coûte 1 million de dollars à produire mais rapporte moins de 100 000 $ en recettes publicitaires.
Et je tiens à être très clair sur ce point: il n'y a rien de mal à vouloir rentabiliser ses activités. Les radiodiffuseurs privés doivent satisfaire leurs actionnaires en procurant à leur investissement un rendement raisonnable. D'un point de vue commercial ou financier, c'est une démarche rationnelle à laquelle on ne peut échapper.
Le partenariat entre les secteurs privé et public mis de l'avant dans les Lois sur la radiodiffusion de 1968 et de 1991 est à la base même de notre système de radiodiffusion. Chaque acteur au sein de ce système devrait être autorisé à faire ce qu'il fait le mieux dans l'intérêt public. En contrepartie, la politique gouvernementale doit fournir à chacun les outils nécessaires pour répondre à ses besoins.
Certains radiodiffuseurs ont demandé que les exigences de contenu canadien soient allégées ou modifiées, ou que les publi-reportages soient considérés comme du contenu canadien. Nous sommes ouverts à ce que le gouvernement entreprenne, avec le concours de tous les radiodiffuseurs, un examen en profondeur de la réglementation sur le contenu canadien. Nous sommes cependant convaincus qu'il ne peut y avoir de demi-mesures: il faudra procéder à un examen exhaustif. Cet exercice devrait viser à encourager tous les intervenants du secteur à contribuer au système dans ce qu'ils font de mieux et reconnaître l'apport de chacun. La démarche exigera une pensée créatrice rompant avec les carcans habituels.
Il n'est pas réaliste de penser que Radio-Canada, ou tout autre radiodiffuseur à lui seul, pourra convaincre les Canadiens de cesser de regarder des émissions américaines. Ce serait même mal. Nous pouvons cependant affirmer que l'existence d'un radiodiffuseur public national fort et dynamique est le moyen le plus efficace à notre disposition pour nous assurer que les Canadiens qui le désirent bénéficient d'une solution de rechange canadienne de qualité supérieure. Nous sommes capables de prendre des risques et de consacrer les ressources nécessaires à la création d'émissions canadiennes, ce que les radiodiffuseurs privés ne peuvent tout simplement pas se permettre de faire.
Considérons, pour un instant, la contribution positive de la télévision de CBC/Radio-Canada -- elle crée un espace télévisuel canadien sûr où vos enfants peuvent regarder des émissions distrayantes sans violence et sans publicité jour après jour; elle assure une couverture complète des élections dans toutes les provinces canadiennes; elle met en ondes des émissions innovatrices et jugées risquées, comme A People's History -- Le Canada: Une histoire populaire et La vie, La vie; elle diffuse des émissions traitant des différentes régions du pays et des pages de leur histoire, comme Random Passage; elle couvre le sport amateur l'année durant et culmine avec une présentation complète de haut calibre des Jeux olympiques aux heures de grande écoute; elle offre des plateformes importantes pour les artistes et les interprètes canadiens telles que Opening Night et Les Beaux Dimanches.
(0930)
Regardez maintenant la grille-horaire de la Télévision anglaise aux heures de grande écoute. Le contenu canadien y figure en rouge. Ces grands blocs rouges sont le contenu canadien diffusé à Radio-Canada. Les blocs bleus sont les émissions américaines diffusées en simultané. Si Radio-Canada ne présente pas d'émissions canadiennes, qui donc le fera? Pourquoi, dites-moi, les télévisions privées renverseraient-elles la vapeur et pourquoi iraient-elles à l'encontre de tous les principes de rentabilité économique pour le faire?
Comme je l'ai déjà mentionné, il nous est impossible de forcer les Canadiens à regarder davantage d'émissions canadiennes. Personne ne le peut et personne ne le voudrait. Cependant, Radio-Canada est le seul radiodiffuseur capable de garantir qu'il y aura des émissions canadiennes de qualité supérieure à toute heure du jour, tous les jours de la semaine et, en particulier, pendant les heures de grande écoute, soit au moment où la plupart des Canadiens regardent la télévision.
Voici donc le message que nous aimerions vous transmettre: sans Radio-Canada, la fragmentation du marché et les coûts liés aux émissions canadiennes viendront éroder davantage l'auditoire. À la longue, ce phénomène d'érosion affaiblira l'influence qu'exerce la Loi sur la radiodiffusion et nuira aux politiques culturelles canadiennes.
Dans le mémoire que nous avons présenté, nous formulons un certain nombre de recommandations pour nous assurer que Radio-Canada continuera de jouer un rôle crucial dans la protection et l'enrichissement de la culture et de l'identité canadiennes.
Il est nécessaire plus que jamais de pouvoir compter sur une voix canadienne distinctive. Le rôle de Radio-Canada au sein du système canadien de radiodiffusion doit être reconfirmé et il faut lui donner les outils et la marge de manoeuvre dont elle a besoin pour s'acquitter de son mandat et servir de manière appropriée le système canadien de radiodiffusion.
Nous recommandons également un examen et unrééquilibrage de la politique publique et des mécanismes de financement afin d'appuyer davantage les radiodiffuseurs qui s'engagent véritablement et concrètement à produire des émissions canadiennes.
Finalement, nous recommandons que le mode actuel d'approbation du financement de Radio-Canada soit remplacé par un système de financement pluriannuel plus prévisible, qui procurera à Radio-Canada la marge de manoeuvre dont elle a besoin dans la gestion de ses activités. Il est renversant de constater qu'il s'écoule environ trois ans avant qu'une émission passe de l'étape de la conception à celle de la réalisation et de la diffusion, et si on ne peut avoir l'assurance d'obtenir du financement durant une certaine période de temps, il est très difficile de prendre des engagements qui devraient déboucher sur la mise en ondes de nouvelles émissions.
[Français]
CBC/Radio-Canada a traversé des périodes difficiles au cours des 10 dernières années. Malgré tout, elle continue à offrir aux Canadiens ce qu'il se fait de mieux dans le domaine de la télévision, de la radio et d'Internet, en anglais comme en français.
[Traduction]
Comme ce fut le cas en 1991, notre secteur est à un point tournant. La révolution numérique en cours transformera nos méthodes de gestion du contenu. Déjà, les frontières traditionnelles entre les services de radio, de télévision, Internet, dans les deux langues, s'estompent rapidement.
Vous avez d'ailleurs pu le constater de visu lors de votre visite pancanadienne. Vous avez pu voir l'intégration de RDI et des nouvelles de Radio-Canada au Centre de l'information à Montréal. Vous avez constaté l'intégration des services des nouvelles radio et télévision à Winnipeg. Vous avez vu les relations étroites entre les différentes plates-formes au sein des installations de CTV à Toronto et les nouveaux projets de service et l'enthousiasme des jeunes concepteurs d'émissions que vous avez rencontrés à Vancouver avec Radio 3 et ZTV.
À l'intérieur d'une période de 12 heures, le 27 février, un de nos jeunes reporters bilingues à Regina, Neil Herland, a produit deux versions séparées du même reportage en anglais et en français, pour la radio, pour la télévision ainsi que pour Internet.
Le travail des correspondants à l'étranger de CBC/Radio-Canada en est un autre exemple. Chaque jour, de partout dans le monde, et ces derniers temps de l'Afghanistan et de l'Inde nos reporters viennent donner une lecture canadienne de l'actualité internationale. Aucun autre radiodiffuseur ne possède une équipe de journalistes d'aussi fort calibre travaillant indifféremment en anglais en français, à la radio comme à la télévision, ce qui couvre nos quatre services médias. Voilà tout le pouvoir de la convergence. Et cette convergence porte sur le contenu de la programmation.
Et ce n'est là que le commencement. L'arrivée sur le marché des magnétoscopes personnels risque fort de changer les habitudes d'écoute et de miner les mécanismes de financement de la télévision. De plus, les services de transmission à bande large et de films à la carte vont avoir des répercussions énormes sur notre industrie. Comme l'a dit avec tant de justesse Lord Denning: «Le changement est inéluctable. Survivre, là est la question.»
CBC/Radio-Canada offre aux Canadiens des quatre coins du pays un lieu d'apprentissage et d'échanges en français ou en anglais sur les ondes de ses chaînes de radio et de télévision. Un lieu où leur voix peut se faire entendre haut et fort sur Internet. Un modèle de radiodiffusion publique envié dans tous les pays.
[Français]
Tout le monde parle de convergence, mais CBC/Radio-Canada pratique cela depuis longtemps. Juste cette semaine, Radio-Canada a annoncé le retour au secteur public d'un grand nom de la radiodiffusion parce qu'on lui offrait la chance de travailler en radio et en télévision. Il s'agit, bien sûr, de Simon Durivage, qui partagera désormais son temps entre les deux services, comme son collègue Bernard Derome le fait depuis un bon moment déjà.
Il ne fait pas de doute dans notre esprit que CBC/Radio-Canada est un élément vital du système canadien de radiodiffusion et est appelée à jouer un rôle encore plus important dans l'avenir.
Mesdames et messieurs du comité, la tâche qui vous attend est colossale. Vos recommandations seront déterminantes pour le système canadien de radiodiffusion de l'avenir. Votre travail est donc d'une importance vitale.
Monsieur le président, nous répondrons maintenant avec plaisir à vos questions.
(0935)
Le président:
Merci beaucoup, monsieur Rabinovitch et madame Taylor.
Monsieur Abbott.
[Traduction]
M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne):
Merci.
Merci aux témoins. Vous nous avez présenté un exposé très convaincant.
Si vous vous rappelez, monsieur Rabinovitch, je vous avais écrit concernant le financement de la Société Radio-Canada. Je pense que notre Comité manquerait à ses devoirs s'il ne jetait pas un coup d'oeil sur les aspects financiers des intérêts des contribuables canadiens dans la Société Radio-Canada. Dans votre réponse, vous me disiez ceci:
J'espère que ces renseignements vous permettront de mieux comprendre les rouages financiers de Radio-Canada. Toutefois, je serai heureux de vous faire un exposé plus détaillé ou de comparaître devant le Comité à une autre occasion avec notre directeur financier et nos vérificateurs afin de passer en revue les états financiers de Radio-Canada. |
Notre Comité n'a pas eu l'occasion d'aborder cette question. Nous avons eu une réunion hier qui a été consacrée à rendre hommage à notre doyen chez les parlementaires, Herb Gray. J'en ai discuté brièvement avec le président. Je suppose que le Comité voudra fixer une date pour cette réunion.
Je ne parle pas au nom du Comité. Je pense que ce serait une bonne idée toutefois de fixer une réunion. Je ne voudrais pas que vous pensiez que, de notre point de vue à l'Alliance canadienne, nous ne nous intéressons pas aux finances de Radio-Canada. Bien au contraire. Nous pensons seulement qu'il vaudrait mieux attendre une autre occasion.
Ma première question porte sur les pages 7 et 8 du mémoire que vous nous avez présenté aujourd'hui: «... chaque acteur au sein de ce système devrait être autorisé à faire ce qu'il fait le mieux dans l'intérêt public.» Et dans le haut de la page 8: «Nous sommes capables de prendre des risques et de consacrer les ressources nécessaires à la création d'émissions canadiennes, ce que les radiodiffuseurs privés ne peuvent tout simplement pas se permettre de faire.»
Vous êtes peut-être au courant que je me suis adressé à la Chambre des communes hier et que j'ai demandé, étant donné la situation, pourquoi Radio-Canada pourrait bien vouloir produire une émission comme The House. C'est une possibilité offerte à la population canadienne qui désire obtenir autre chose que ce que lui offrent les manipuleurs de médias et conseillers en image, et qui permet de comprendre les rouages de la politique.
Je sais qu'aucun d'entre vous n'est directement concerné par le contenu des émissions, mais vous pouvez certainement nous expliquer pourquoi Radio-Canada s'intéresse à une émission comme celle-là.
M. Robert Rabinovitch:
Tout d'abord, si vous permettez, comme je l'ai mentionné dans ma lettre, nous produisons de nombreux rapports, diffusons beaucoup de renseignements détaillés et nous sommes fiers de le faire.
Nous rendons des comptes à nos actionnaires. Vous représentez nos actionnaires, c'est-à-dire la population canadienne. Au moment qui conviendra aux membres du Comité, nous sommes tout à fait disposés à venir témoigner pour débattre du financement de Radio-Canada, par comparaison avec les autres radiodiffuseurs, et dans la mesure où vous le jugerez opportun.
Pour ce qui est de l'émission The House, je pense que le plus important consiste à examiner la radio et le contenu de nos émissions radiophoniques. En ce moment, nos émissions de radio atteignent des sommets sans précédent pour ce qui est de l'auditoire. Je suis partisan de l'approche qui veut que lorsque les choses vont bien, le moment est bien choisi pour faire le point, examiner le contenu des émissions et évaluer s'il y a lieu d'apporter des changements pour le futur.
Par ailleurs, un de nos vétérans de la grille du samedi, Arthur Black, prend sa retraite. Cette retraite est l'occasion de réévaluer complètement l'horaire de diffusion. Il est certain qu'il y a des lacunes dans cet horaire. Il y a effectivement des lacune en ce qui concerne l'auditoire que nous rejoignons. Nous entretenons certaines inquiétudes, mais le moment est bien choisi pour procéder à cette réévaluation.
Je peux vous assurer que nous n'éliminerons pas une émission sans bonne raison. Pour le moment, nous sommes à évaluer la situation. Nous examinons toutes les émissions et tentons de déterminer ce qui mérite d'être conservé. Nous prenons très au sérieux notre rôle qui consiste à permettre aux politiciens de faire valoir la position qu'ils adoptent, comme dans l'émission quotidienne Newsworld de Don Newman. Une émission de ce genre, sous une forme ou une autre, y compris peut-être The House, parce qu'aucune décision n'a encore été prise, continuera d'exister.
(0940)
M. Jim Abbott:
C'est encourageant de vous entendre parler de cette façon. Je souscris au vieil adage de Yogi Berra: «Tant qu'il n'y a pas de problème, il est inutile d'intervenir.»
L'autre point que j'aimerais soulever a trait à une émission que j'ai vue l'autre soir sur CTV, lorsque les patineurs Salé et Pelletier ont été accueillis à leur retour au Canada. Ce sont des héros très modestes. Nous sommes tous exceptionnellement fiers d'eux. Je confesse que j'ai essuyé une larme patriotique lorsque le réseau a montré que le frère de David est en Bosnie actuellement au sein des Forces canadiennes.
J'ai éprouvé un fort sentiment de fierté à l'idée de faire partie de cette nation, et j'ai ressenti à quel point les familles se tiennent dans la vie des Canadiens. Je remets en question certaines de vos affirmations comme quoi, si ce n'était de Radio-Canada, certaines choses n'existeraient pas.
Je pense aux patineurs Salé et Pelletier et à l'excellente couverture que Radio-Canada a faite des Jeux olympiques. Je m'insurge contre le fait que, sans aucun doute, le secteur privé n'a pas les moyens de concurrencer Radio-Canada pour obtenir les droits de radiodiffusion pour les Olympiques. Je considère qu'il s'agit d'une très mauvaise utilisation des fonds publics.
J'aimerais poser une question. Au Canada, vous disposez d'un parc de véhicules et de camions. Pour la télévision, vous avez quatre grosses stations mobiles dont une à Toronto, à Winnipeg, à Edmonton et à Vancouver. Pour la radio, il y a huit camions aux quatre coins du pays. D'après ce que je comprends, il y a un protocole d'échanges entre Radio-Canada et Dome pour les camions de télévision, et huit camions de stations mobiles sont parfois utilisés à la place de camions ou de studios commerciaux. Pourquoi Radio-Canada, du moins en apparence, voudrait-elle sembler être en concurrence avec le secteur privé?
M. Robert Rabinovitch:
Tout d'abord, pour ce qui est des Jeux olympiques, parce que je pense que c'est important--d'autant plus que je travaillais dans le secteur privé et que je siégeais au conseil de TSN et de NetStar, qui s'est jointe à Radio-Canada pour présenter une proposition en vue de la radiodiffusion des Jeux olympiques--Radio-Canada n'a pas payé plus pour obtenir les droits de radiodiffusion que ce que le secteur privé avait offert. Le CIO a choisi Radio-Canada pour la qualité de sa production. C'est la raison pour laquelle TSN s'est jointe à Radio-Canada pour présenter sa soumission. Nous avons remporté cette soumission en raison de la qualité de notre production au cours des années, et non à cause du montant de la soumission. De la même manière, nous avons perdu les droits pour l'émission sur les patineurs Salé et Pelletier la semaine dernière en raison du montant de la soumission. Nous avons perdu par un facteur du simple au double. Nous ne pensons pas qu'il soit équitable pour le secteur public de soumissionner à des prix aussi élevés pour un produit de ce genre.
Pour ce qui est des camions commerciaux, c'est un sujet intéressant aussi, parce que Dome faisait partie de NetStar lorsque je siégeais au conseil, aussi j'ai pu voir l'autre côté de la médaille. Permettez-moi seulement de dire que Radio-Canada n'achète pas de camions pour concurrencer le secteur privé; la Société achète des stations mobiles surtout pour pouvoir produire des émissions qui nécessitent ce type d'équipement. En fait, bien franchement, nous utilisons aussi parfois nos stations mobiles comme des studios ou des postes de commande. Mais il y a des moments où les stations mobiles sont sous-utilisées. C'est une question de synchronisation; en fonction du moment où l'on a besoin d'elles. Mais il arrive parfois que l'on dispose de temps excédentaire dans nos stations mobiles. J'ai accepté dans le cadre de mon mandat, et mon conseil d'administration a approuvé ce mandat, que nous devrions gérer Radio-Canada sur une base aussi commerciale que possible. Et dans la mesure où nous possédons des actifs, je pense qu'il est de notre responsabilité de générer des recettes avec ces actifs, et non de couper l'herbe sous le pied du secteur privé.
Je pense que si vous parlez à des représentants de Dome, vous constaterez que notre soumission n'était pas inférieure à la leur. Il arrive souvent que ce soit une question de disponibilité, et de l'endroit où se trouve la station mobile, et du taux d'utilisation.
Nous nous efforçons, avec l'accord du gouvernement, de faire fructifier nos actifs, dans la mesure du possible afin de puiser moins librement dans les fonds publics. Dans les journaux aujourd'hui, un article mentionne que nous avons donné en location le huitième étage du Toronto Broadcasting Centre. Cette location nous rapportera 5 millions de dollars par année. Nous forçons les gens à se serrer un peu, mais c'est la bonne façon de faire. Nous prenons un actif et nous essayons de le rentabiliser. Nous adoptons la même approche avec les stations mobiles. Nous ne coupons pas les prix par rapport au secteur privé, et il nous arrive de perdre des contrats parce que nos prix sont trop élevés, mais nous envisageons de louer nos équipements lorsque nous pensons que nous pouvons en tirer des revenus.
(0945)
Le président:
Madame Taylor.
Mme Carole Taylor:
Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose...
Le président:
Oui, allez-y.
Mme Carole Taylor:
... également au sujet de ce commentaire concernant les Jeux olympiques, parce que je pense qu'il s'agit d'une question que l'on entend de temps à autre à propos des Jeux olympiques ou du hockey: Pourquoi un radiodiffuseur public?
Si je peux ajouter, toujours au sujet des Jeux olympiques, un des autres atouts que nous avions était la capacité de diffuser tant en français qu'en anglais. Cela était important pour le CIO, qui y voyait un avantage de taille. Mais j'ajouterais aussi que nous faisons les choses différemment, souvent, des diffuseurs privés. Nous avons fait plus de direct que NBC. Et nous l'avons fait d'une manière différente. J'ai reçu beaucoup de lettres--je ne sais si c'est le cas de Robert--d'Américains qui étaient en mesure de regarder les Jeux olympiques à CBC. Nous étions en concurrence, sur le plan technique, avec l'un des réseaux privés les plus riches du monde, et pourtant, eux, au beau milieu des matchs de hockey, par exemple, pouvaient quitter la retransmission pour passer des spots publicitaires, et n'offraient pas le même genre de couverture que nous. Je dirais donc que dans des cas comme ceux-là, nous faisons simplement les choses différemment, et mieux, d'après nous. C'est une des raisons pour lesquelles nous sommes sur le marché.
Concernant le hockey, vous devez savoir que lorsque nous avons dû renouveler tout récemment ce contrat pour garder le hockey, à ce que je sache, il n'y avait personne d'autre qui était intéressé à le diffuser. Ce n'était pas une question de faire une meilleure offre: il n'y avait pas de concurrent. La raison est qu'il faut aussi diffuser les séries éliminatoires, et cela perturbe un horaire. Beaucoup de réseaux privés ne sont pas intéressés à exercer un droit de priorité sur un épisode d'ER pour diffuser un des nombreux bons matchs des séries. Nous le faisons parce que nous estimons que les séries du hockey font partie de la tradition canadienne.
Le président:
Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ):
Merci, monsieur le président.
Merci d'être ici aujourd'hui pour répondre à nos questions. J'aimerais que vous nous éclairiez sur ce que vous avez fait depuis que le vérificateur général a dit que, pour favoriser une culture permanente, il fallait qu'il y ait un climat propice et une gestion qui réponde à différents besoins des employés de Radio-Canada. À la suite de ce commentaire du vérificateur général, une enquête a été faite et le rapport Hay a été publié, rapport qui souligne des aspects très inquiétants de la gestion de Radio-Canada, de l'état d'esprit qui y règne. On dit qu'il y a du stress à Radio-Canada, que les employés trouvent qu'ils n'ont pas une bonne collaboration de la part de la direction, que la communication est nulle, qu'il y a des comportements à changer et que les employés sont très peu consultés ou pas du tout. On sait que dans un contexte de créateurs et de réalisateurs, il est important qu'il y ait un échange avec la direction. C'est assez inquiétant de voir que seulement 17 p. 100 des gens pensent que Radio-Canada corrigera cette situation.
Je ne peux pas énumérer tous les pans du rapport sur l'organisation, le manque de travail d'équipe, etc., mais depuis que ce constat a été fait, depuis que vous avez eu ce rapport, avez-vous pris des mesures pour corriger la situation qui prévalait ou qui prévaut encore à Radio-Canada? Ce sont les associations des réalisateurs qui nous ont fait part de ces différents paramètres à l'intérieur de Radio-Canada.
(0950)
M. Robert Rabinovitch:
Premièrement, je dois corriger un fait. Ce n'est pas le vérificateur général qui a fait cette enquête. C'est nous qui l'avons faite.
On a commencé à faire une enquête auprès de tous nos employés pour connaître exactement les raisons de ce que vous avez mentionné. On veut savoir ce qu'ils pensent de leurs administrateurs et de l'organisation. Cela nous a ouvert les yeux. Nous avons vraiment quelques problèmes de moral chez nos troupes, dans nos organisations. On ne parle pas assez. On n'explique pas. C'est nous qui avons pris l'initiative de faire cette enquête pour savoir ce qui se passait. On va faire une autre enquête tous les deux ans car je pense que c'est très important. Il s'agit d'une organisation de création, et les personnes qui y travaillent doivent avoir certaines assurances et un certain niveau de satisfaction. Il faut aussi savoir que dans toutes les organisations de création, il y a toujours des tensions. C'est inévitable. Mais il y a des choses que nous pouvons contrôler, en particulier la qualité de l'information et l'explication de ce qu'on fait. Dans le secteur anglais et dans le secteur français, nous faisons actuellement des réunions avec les groupes d'employés afin d'essayer de trouver des manières différentes de s'expliquer et de travailler dans ces conditions-là.
Mme Christiane Gagnon:
Maintenant que vous connaissez les problèmes, vous dites que vous allez vous y attarder pour trouver des solutions. Depuis un an que l'enquête est sur votre table, avez-vous établi un plan d'action précis pour améliorer l'état d'esprit à Radio-Canada afin que la création soit plus facile?
M. Robert Rabinovitch:
Oui, on a fait quelque chose. Comme je l'ai dit, on a commencé à tenir des réunions avec les groupes d'employés et à examiner tous nos systèmes de communication. Après chaque réunion du conseil d'administration, Mme Taylor et moi envoyons maintenant une lettre expliquant ce qui s'est passé à la réunion d'administration, car ce n'est pas une chose complètement séparée de l'organisation. On va continuer à faire des choses comme celles-là.
Michel.
M. Michel Tremblay (vice-président, Stratégie et développement commercial, Société Radio-Canada):
Madame Gagnon, j'aimerais aussi vous donner la perspective d'un cadre et vous assurer que devant les résultats du sondage qu'on a eu le courage d'entreprendre et de mettre dans les mains de nos employés, tous les responsables de secteur ont dû revoir les méthodes de communication et développer des plans spécifiques pour tenter d'arriver à mieux cerner les problématiques qui ont été révélées par le sondage et de les corriger.
D'autre part, on a aussi pris l'engagement de sonder nos employés régulièrement pour s'assurer que les initiatives que l'on prend génèrent effectivement des résultats.
Mme Christiane Gagnon:
Un des irritants qu'on semble voir, qui fait probablement partie de la frustration de plusieurs employées féminines, c'est la question salariale.
Présentement, la situation est assez tendue entre le syndicat et la direction, mais si vous faisiez une enquête auprès des femmes qui se sentent victimes de discrimination alors qu'elles font le même travail... Je ne parle pas de discrimination salariale, mais des espèces de bonis qu'on accorde à certains. Il y en a pour 8 millions de dollars. C'est beaucoup d'argent qu'on accorde selon des critères plus ou moins précis.
Est-ce que vous allez faire des efforts pour comprendre la situation que vivent les femmes à Radio-Canada présentement?
M. Robert Rabinovitch:
Comme vous le savez, nous sommes actuellement en négociation avec les syndicats sur toutes sortes de questions, et c'est tout à fait normal. Nous pensons qu'il n'y a pas de discrimination à la base. Il y a un système de rémunération additionnelle pour les étoiles qui est permis par la convention collective. Si on nous démontre qu'il existe une véritable situation d'iniquité, nous regarderons la situations et la corrigerons. La démonstration n'est pas encore faite, mais s'il y a véritablement de la discrimination, cela me cause des problèmes personnels et je peux vous assurer qu'on va faire les changements nécessaires.
(0955)
Mme Christiane Gagnon:
Tout comme la ministre du Patrimoine canadien, on a été interpellés par des statistiques. On parle des salaires de base et de 8 millions de dollars additionnels en attributions de temps ou d'argent selon la qualité des personnes. Ne pensez-vous pas que c'est aléatoire et que, finalement, ça peut être très discriminant quand on ne fait pas partie de la gang? Comme femmes, on sait ce que veut dire ne pas faire partie de la gang.
M. Robert Rabinovitch:
Je suis prêt à discuter de tous les chiffres avec vous quand on aura fini les négociations avec le syndicat. Aujourd'hui n'est pas le moment propice pour le faire. Franchement, on n'accepte pas les chiffres que le syndicat vous a envoyés et on pense pouvoir vous assurer qu'il n'y a pas de discrimination, mais si on trouve quelque chose, on va le changer immédiatement.
[Traduction]
Le président:
Monsieur Mills.
M. Dennis Mills (Toronto--Danforth, Lib.):
Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame Taylor, monsieur Tremblay, monsieur Rabinovitch, je vous souhaite la bienvenue.
Je voudrais commencer en élaborant sur le thème du rendement pour les investisseurs, que vous avez mentionné à quelques reprises dans votre exposé, monsieur Rabinovitch. Personnellement, je mesure le rendement pour les investisseurs, ou le bénéfice net, pour ainsi dire, de Radio-Canada, d'une manière totalement différente de celle utilisée par les diffuseurs privés. Je suis d'avis que pour vous, le bénéfice net devrait être votre capacité de préserver l'échelle des valeurs canadiennes, et les efforts que vous déployez constamment pour maintenir ces valeurs.
J'aimerais citer, à votre intention et à l'intention de votre équipe, des exemples où vous avez fait un travail formidable, selon moi, pour préserver l'échelle des valeurs canadiennes.
Je voudrais mentionner l'hommage à l'exploitation agricole familiale réalisé il y a deux ans, pour lequel vous avez même absorbé un passif supplémentaire pour faire en sorte que le travail se fasse correctement et avec professionnalisme.
Je voudrais mentionner également les championnats d'athlétisme qui ont eu lieu à Edmonton, et dont tous les journalistes sportifs de la presse écrite de Toronto avaient dit que ce serait un non-événement, que cela ne donnerait rien. Mais l'équipe des sports de Radio-Canada a tenu son cap, et à l'issue de la semaine de compétitions, on parlait d'une magnifique expérience sportive.
Et il y a eu bien sûr Salt Lake City.
Enfin, j'aimerais citer l'événement pour la paix dans le monde que vous allez accueillir cet été et auquel participeront 400 000 jeunes issus de 140 pays, avec Sa Sainteté le pape Jean-Paul II.
Ce sont là des exemples concrets pour moi, qui montrent que Radio-Canada préserve le système de valeurs.
Cela dit, je dois faire part de quelques préoccupations.
Je fais partie d'une équipe de vingt-huit députés issus de la région du Grand Toronto, et Radio-Canada a une présence énorme dans cette région. Or depuis quelques mois, il y a un message qui est véhiculé, surtout par les médias écrits, mais qui est également repris par la radio et la télévision, à savoir que le gouvernement fédéral n'est pas présent dans la RGT. Nous avons ainsi pu lire des éditoriaux, dans notre plus grand quotidien, le Toronto Star, dont les titres disaient «Les députés brillent par leur absence» ou «Aucune présence du gouvernement du Canada».
Lorsque je suis chez moi, j'écoute Metro Morning, une émission radiophonique de CBC. Or il est très rare de trouver la moindre présence du gouvernement du Canada dans cette émission. Et cela est en train de devenir presque une réalité dans l'esprit des gens. Le fait est que le gouvernement du Canada dépense annuellement 27 milliards de dollars dans la RGT, et pourtant on crée cette impression qu'il ne se passe rien.
Je sais que vous ne décidez pas du contenu des émissions. Toutefois, en ce qui a trait au maintien du système de valeurs canadiennes, pour reprendre l'argument de M. Abbott, je pense qu'il est vraiment important de renforcer constamment la présentation des activités du gouvernement du Canada à l'échelle du pays. Sinon, il y aura toujours cet écart.
Vous avez dit précédemment que vous estimez important de permettre aux parlementaires de faire connaître leur avis. On m'a demandé de m'exprimer au nom des vingt-huit parlementaires de la RGT, et je me demandais quel genre de mesure on pourrait mettre en oeuvre pour corriger cette perception erronée.
(1000)
M. Robert Rabinovitch:
Comme vous l'avez mentionné, c'est peut-être une bonne chose que je n'aie pas beaucoup d'influence sur le contenu des nouvelles. Je plaisante un peu. Parfois, ce sont les difficultés qui font les manchettes, et si les choses se passent plutôt bien, ce n'est pas un événement médiatique. C'est très difficile de diffuser de bonnes nouvelles, et très difficile de diffuser simplement des nouvelles qui ne retiennent pas l'attention des gens en raison de leurs préoccupations du moment.
Je ne réponds pas directement à votre question parce que je n'ai pas de réponse. Tout ce que je peux dire est que nous allons nous pencher là-dessus et faire en sorte que vous ayez des occasions de présenter vos arguments et que vos opinions soient entendues.
M. Dennis Mills:
Merci beaucoup.
Merci, monsieur le président.
Le président:
Monsieur Gallaway.
M. Roger Gallaway (Sarnia--Lambton, Lib.):
Madame Taylor, monsieur Rabinovitch, monsieur Tremblay, je vous souhaite la bienvenue.
Je voudrais commencer en parlant de la télévision de langue anglaise et citer un des plus récents groupes de défenseurs de la Télévision anglaise de Radio-Canada, et je fais bien sûr référence à l'émission The Royal Canadian Air Farce. Vendredi dernier, ce groupe--et je remercie une des personnes de Radio-Canada qui a fait le déplacement avec nous de nous avoir fourni une transcription--a dit: «Lorsqu'il s'agit de choisir le contenu de nos émissions, je préfère faire confiance à trente millions de Canadiens munis d'une télécommande qu'à quelques membres intéressés de la famille Asper».
Monsieur Rabinovitch, je vais vous mentionner une autre citation. Dans un texte qui a été publié dans le National Post le 27 février, vous avez écrit que les Asper et leur société «usent (ou abusent) des pages éditoriales de leurs journaux pour favoriser la réalisation des objectifs d'affaires de leurs stations de télévision».
Le classement Nielsen indique que CTV a une part d'écoute de 13,9 heures, que Global a une part d'écoute de 6,8 heures, alors que la Télévision anglaise Radio-Canada a une part d'environ 5 heures. Je me demande donc si ces trente millions de Canadiens munis d'une télécommande sont en train de dire à ce comité qu'il est vrai que vous ne pouvez obliger les Canadiens à regarder des émissions canadiennes et que les autres réseaux sont en train de vous dépasser.
M. Robert Rabinovitch:
Si tout ce que l'on veut, c'est obtenir de bonnes cotes d'écoute, nous pouvons faire comme tous les autres et diffuser des émissions américaines. Mais ce n'est pas notre mandat. Notre mandat consiste à raconter des histoires canadiennes et à réaliser des émissions canadiennes de qualité.
Mais l'argument le plus important que je veux invoquer est que les statistiques des dernières semaines--c'est-à-dire de cette année--ne concordent pas avec les chiffres que vous avez mentionnés. Ces dernières semaines, la part de CTV était de 11,2 p. 100, celle de CanWest Global, de 11,8 p. 100, et nous, nous étions à 9,7 p. 100. Nous sommes le seul diffuseur classique dont la part d'auditoire a augmenté au cours des deux dernières années, et ce à une époque où quarante nouvelles stations ont commencé à émettre. Tout le monde a pris des coups, mais nous avons commencé a offrir un choix vraiment différent à la Télévision de langue anglaise, un choix où l'on propose des émissions de qualité et des histoires canadiennes.
Je dois ajouter que je n'aime pas la course aux cotes d'écoute. Les cotes d'écoute sont un type de mesure, mais la portée en est un autre. Combien de gens différents atteignons-nous au fil du temps? C'est la raison pour laquelle diffuser des événements sportifs est tout aussi important que montrer la culture savante.
Nous abandonnons le jeudi soir, en matière de cotes d'écoute, parce que nous diffusons à ce moment-là Opening Night. Il s'agit d'une émission qui atteint un auditoire de 200 000 à 400 000 personnes, qui est un chiffre désastreux d'après les normes du secteur privé. Mais c'est un auditoire qui autrement ne tire rien de la télévision. Nous diffusons des dramatiques canadiennes de qualité et du ballet. Ainsi, plus de gens vont voir le Centre national des Arts en un jour dans notre émission qu'il n'y aura de gens dans les salles de spectacle du Centre durant une année entière.
Plus important encore, tenons compte des chiffres--et nous nous en tirons très bien sur le plan des chiffres--mais prêtons également attention à d'autres gens et à un service destiné à un public varié, qui est un service qu'il nous incombe d'offrir. Notre résultat essentiel, c'est le public.
(1005)
M. Roger Gallaway:
Vous avez dit également que Radio-Canada traite les téléspectateurs comme des citoyens et non comme des consommateurs. Et pourtant les indices Nielsen semblent indiquer encore une fois que tous les soirs, au moment du bulletin de nouvelles nationales, seulement 300 000 la Télévision anglaise de Radio-Canada, alors que 1,2 millions de personnes regardent le bulletin de nouvelles nationales de CTV. Comment expliquez-vous cela?
M. Robert Rabinovitch:
L'émission à laquelle vous faites référence n'est pas vraiment une émission nationale. Il s'agit du bulletin de nouvelles local de 18 heures. La cote de CTV est le total des cotes de toutes les stations que possède ce réseau à l'échelle du pays, comme notre propre cote. La nôtre est composée d'un service national offert depuis Vancouver durant une demi-heure, et d'un service local.
Je dois être très franc: ça ne marche pas. Nous devons nous pencher là-dessus. C'était un compromis que nous avons fait, essentiellement, à la demande de ce comité, et à la suite des discussions que nous avons eues avec ce comité au sujet de la mesure dans laquelle nous devrions fournir un service local. Je suis prêt à concéder que le secteur privé présente extrêmement bien les nouvelles locales. Cela va être très difficile pour nous, à moins de disposer de beaucoup d'argent--parce qu'en bout de ligne, c'est une question d'argent, ce sont quatorze émissions distinctes--cela va être très difficile pour nous de concurrencer le secteur privé.
Je retourne au premier principe de la loi. Cette loi dit que le système canadien de radiodiffusion est unique en son genre et qu'il représente un partenariat entre les secteurs public et privé, où l'un des partenaire fait une chose, et l'autre, autre chose. Mais je concède volontiers, monsieur, qu'à l'heure actuelle, même si j'estime que notre émission de nouvelles à 18 heures, et en particulier celle diffusée depuis Vancouver, est absolument superbe, l'auditoire manque encore. Il se peut qu'il n'y en aura jamais pour cette émission. Il se peut que les gens qui regardent CBC ne regardent pas l'émission à 18 heures, qu'il regardent plus tard, ou que leurs enfants regardent le matin. C'est peut-être un auditoire différent qui regarde à cette heure-là... je ne sais pas. Mais je sais qu'il faut travailler davantage là-dessus.
M. Roger Gallaway:
D'accord.
Vous avez cité Lord Denning--une citation très intéressante--au sujet de la survie. Nous avons entendu beaucoup de votre part ce matin, et nous avons entendu d'autres témoins dans le passé. Nous avons affaire à plusieurs facteurs. Les indices Nielsen laissent penser que depuis 1995, la Télévision anglaise de Radio-Canada a perdu environ 40 p. 100 de ses téléspectateurs. Vous avez indiqué que les choses sont en train de changer. C'est bien. Nous savons qu'en 1995-1996, on a ajouté un grand nombre de chaînes thématiques. Nous avons entendu ici qu'il existe au bas mot 600 000 antennes paraboliques dites «au noir» qui captent exclusivement des signaux provenant des États-Unis. Ce qui devient tout à fait clair est que le choix détermine le marché. La technologie détermine le marché. Nous sommes au seuil de l'univers choisir-payer.
Je voudrais vous demander, n'est-il pas possible que non seulement CBC, mais également CTV et Global, soient en train de se transformer petit à petit en de ce que nous appellerions des chaînes thématiques? Si c'est effectivement le cas, compte tenu du fait que vos gens nous ont dit qu'à Toronto, il en coûte 290 millions de dollars, à peu près, pour offrir le service en langue anglaise, n'y a-t-il pas un mode de financement pour Radio-Canada autre les affectations budgétaires? Qu'en pensez-vous?
M. Robert Rabinovitch:
Permettez-moi de commencer par les aspects généraux et de passer ensuite aux aspects particuliers.
En général, je pense que nos systèmes sont en train de changer énormément. C'est pourquoi j'ai indiqué que les travaux de ce comité sont extrêmement importants. Avec le nombre de chaînes que nous avons, les diffuseurs classiques deviennent à bien des égards de plus en plus spécialisés. Prenons Fox, aux États-Unis, qui vise un segment très précis de la population. Si on prend NBC, c'est un autre segment. Je crois que nous allons voir de plus en plus de ce genre de spécialisation.
Je crois que Radio-Canada a appris sa leçon dans les années 70. Il lui a fallu un certain temps pour s'établir, dans le monde de la télévision. Dans les années 70, nous avions le même problème avec la radio. Nous avions une radio qui avait baissé à 4 p. 100, qui acceptait des annonces publicitaires, qui était en concurrence avec le secteur privé et qui n'avait pas d'orientation précise. On avait le choix entre fermer la chaîne radiophonique ou la restructurer. Les responsables de l'époque se sont retirés de la publicité et ont restructuré la radio pour en faire le service que nous avons aujourd'hui, c'est-à-dire un service vraiment différent et un véritable complément à la radiodiffusion privée.
La Télévision anglaise de Radio-Canada a commencé a se restructurer il y deux ans et demi ou trois ans. Une des choses dont j'avais été très heureux lorsque je suis arrivé à Radio-Canada était qu'il y avait déjà des gens qui travaillait là-dessus, qui travaillaient à ce que nous appelons la «transformation». Il s'agit de la concentration des activités de CBC dans certains domaines et de l'adoption d'une façon de travailler différente pour offrir des émissions différentes aux Canadiens. Je crois que nous avons été récompensés, monsieur, du fait que nos cotes n'ont pas diminué autant--après la chute libre qui a effectivement eu lieu, j'en conviens, au début--que dans le cas du secteur privé. Ces derniers temps, nos cotes ont plutôt bien résisté. Je pense que c'est parce que nous sommes de plus en plus spécialisés. Cela ne m'étonnerait pas du tout si les diffuseurs classiques se voyaient également obligés de repenser leur modèle.
(1010)
M. Roger Gallaway:
Une dernière question concernant les Olympiques, et j'ai entendu ce que vous aviez à dire à M. Abbott. Vous avez dit également, dans l'article en question du 27 février, que Radio-Canada avait obtenu les droits de diffusion des Jeux au Canada non pas en faisant une meilleure offre que d'autres réseaux, mais en offrant une couverture clairement supérieure à tout ce que pouvaient offrir les autres soumissionnaires canadiens.
Je dois dire que lorsque j'ai lu cela, j'ai été surpris. CTV nous a contactés, et nous avons visité son siège social à Toronto, où quelqu'un a affirmé catégoriquement que vous aviez fait une offre supérieure à la leur, que c'était uniquement une question d'argent. Je pense qu'il existe certainement une perception selon laquelle le CIO est un organisme qui accorde beaucoup d'importance à l'argent.
M. Robert Rabinovitch:
[
Note de la rédaction: Inaudible]
M. Roger Gallaway:
Donc, pourquoi CTV nous dirait-elle expressément que c'était uniquement une question d'argent?
Deuxièmement, je veut en savoir davantage sur la façon dont l'organisme olympique s'y prend... je veux dire, est-ce que Dick Pound dit «je suis l'arbitre en matière de bon goût au Canada, et Radio-Canada va obtenir la couverture des Jeux; nous ne sommes pas intéressés au côté pécuniaire»?
M. Robert Rabinovitch:
Lorsque j'ai dit précédemment qu'il ne s'agissait pas de l'argent, c'est que nous n'avions pas fait une offre supérieure à celle de l'autre réseau. Nous sommes allés avec TSN, et avec RDS du côté de la Télévision française de Radio-Canada, et avons soumis un bloc d'émissions et d'horaires qui nous a permis de l'emporter.
Je peux vous assurer que nous n'avons pas fait d'offre supérieure. Mais supposons un instant que les offres étaient égales. Tous les samedis, nous consacrons trois ou quatre heures de la programmation au sport amateur. Nous développons notre connaissance du sport amateur. Nous avons des gens comme Terry Leibel qui travaillent sur le sport amateur en permanence. Lorsqu'ils et elles travaillent pour un événement comme les Jeux olympiques, c'est naturel pour eux. Ils connaissent les participants, ils connaissent les vedettes, ils connaissent les personnes avec lesquelles ils travaillent, et ils savent à quoi s'attendre et quels ont été leurs résultats au fil d'une période donnée. Il en résulte une meilleure couverture.
Je crois que c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons battu également NBC. Aucun de ces réseaux n'investit dans le sport amateur. Pour les diffuseurs, il n'y a pas d'argent à faire dans le sport amateur. Il faut considérer les Jeux olympiques comme la pièce maîtresse, mais c'est l'aboutissement de quatre ans de collaboration avec les amateurs dans divers disciplines sportives, pour comprendre ces disciplines et pour travailleurs avec ces gens, et pour aboutir finalement à une expérience canadienne aux Jeux olympiques.
Mr. Clifford Lincoln:
Monsieur Gallaway, nous allons revenir à vous.
Monsieur Bélanger.
[Français]
M. Mauril Bélanger:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Premièrement, je dois admettre un parti pris pour CBC/Radio-Canada.
(1015)
[Français]
Puisque je suis natif d'un petit village du nord de l'Ontario, Radio-Canada a été pour moi très importante. Elle me branchait au reste de ma communauté canadienne-française par l'entremise de Bobino, de La Boîte à surprises, de La Poule aux oeufs d'or et, de temps en temps, des Couche-tard, lorsque les parents le permettaient. Mais il fallait se lever de bonne heure le samedi matin pour regarder Pépinot et Capucine.
[Traduction]
Deuxièmement, je voudrais signaler à ce comité que CBC a fait verser une larme à notre collègue Jim Abbot. Il s'agit d'un véritable moment fort canadien.
Des voix: Oh! oh!
M. Mauril Bélanger: En outre, je ne m'associe d'aucune manière à certains des commentaires qu'a formulés mon collègue, M. Gallaway, à savoir qu'il faudrait se départir de la Télévision anglaise de Radio-Canada. Je pense plutôt le contraire et que le gouvernement du Canada devrait renforcer son soutien à cette chaîne.
[Français]
Cela dit, on a reçu ce matin votre soumission au comité. Je n'ai pas eu le temps de la lire au complet, madame Taylor et monsieur Rabinovitch. Je vais la lire attentivement et, si j'ai des commentaires additionnels à transmettre au comité, je les lui transmettrai. Je ne suis pas membre régulier du comité. Je l'étais au moment où on vous avait demandé, monsieur Rabinovitch, de réviser votre position par rapport aux nouvelles régionales. Je n'ai pas changé d'idée. Si c'est effectivement une question de ressources, je pense que le gouvernement devrait songer sérieusement à ajouter des ressources pour que vous puissiez, au moins là où il n'y a pas d'alternatives évidentes, le faire et le faire convenablement.
Je voudrais vous faire remarquer qu'il y a une erreur à la page 24 de votre document, du côté français. C'est au troisième avant-dernier paragraphe, où vous dites:
|
Il en découle que les diffuseurs de télévision traditionnelle, spécialisée et payante de langue française--Radio-Canada et le radiodiffuseur éducatif Télé-Québec exceptés... |
Je pense qu'il y aurait une autre exception à ajouter: il s'agit de TFO. Je pense que vous devez reconnaître que TFO évite également l'achat de productions télévisuelles américaines. Je pense qu'il serait élégant de votre part de corriger cette erreur, si vous le voulez bien.
J'adresse maintenant une question à Mme Taylor. J'ai une marotte, et mes collègues du comité la connaissent. À chaque fois que j'entends cela à Radio-Canada, ça me frustre. C'est l'expression «Québec-Canada anglais». Régulièrement, si ce n'est quotidiennement, les gens des deux côtés, de Radio-Canada et de CBC, utilisent cette expression. Je ne sais pas s'ils y prennent un malin plaisir ou non, mais je les prends à utiliser cette expression «Québec-Canada anglais». Si on veut utiliser l'expression «Canada anglais», on devrait utiliser son pendant, «Canada français».
Je ne sais pas si vous avez la capacité, comme présidente du conseil, ou vous, monsieur Rabinovitch, comme président de Radio-Canada, d'insister auprès de vos employés pour qu'ils utilisent un vocabulaire qui respecte ce que vous êtes.
Mme Carole Taylor:
Comme vous le savez, je ne suis pas totalement bilingue et je m'en excuse. Je vous promets de travailler à améliorer mon français. Mes collègues francophones à Vancouver m'aident beaucoup.
Je pense aussi qu'il est très important pour moi de bien comprendre la culture francophone et de l'appuyer, et je le fais. Si cela est possible, je voudrais vous répondre en anglais. Ce sera peut-être un petit peu plus clair.
[Traduction]
La langue est un aspect très intéressant, très important, et peut-être même davantage, comme vous dites, dans ce contexte particulier.
Nous avons un rapport des ombudsmans. Nous avons un ombudsman francophone et un ombudsman anglophone, qui font connaître toutes les plaintes reçues au cours de l'année sur toutes sortes de questions. C'état très intéressant de prendre connaissance du rapport, parce que c'est ma première année dans ce processus. Les plaintes du côté francophone portaient massivement sur la langue et visaient à nous corriger, parce que, par exemple, un annonceur a utilisé un mot familier qui n'était pas considéré comme approprié. Il y a donc eu beaucoup de plaintes de ce genre auxquelles a donné suite l'ombudsman.
L'ombudsman m'a dit également que la plupart des plaintes portant sur le français et sur son usage provenaient de la Colombie-Britannique, ce qui est tout aussi intéressant. Mais il a dit que cela s'explique en partie par le fait qu'en Colombie-Britannique, la collectivité francophone est assez hétéroclite, et elle compte beaucoup d'immigrants, en plus des Québécois.
Je vous assure donc que c'est une priorité et que s'il s'agit d'une situation que vous avez remarquée et qui fait problème, il est important alors que notre ombudsman en soit vraiment au courant et qu'il soit en mesure de s'exprimer sur cette question.
M. Mauril Bélanger:
Je présume qu'on peut lui envoyer une copie de la transcription, monsieur le président. Mais ce qui est inquiétant au sujet de l'utilisation de cette expression est qu'elle nie l'existence de bon nombre de Canadiens. Elle ne reconnaît pas le fait qu'il y a des Canadiens français en dehors du Québec, ni le fait qu'il existe une collectivité de Canadiens anglais au Québec. J'estime que l'utilisation de cette expression ne rend pas un bon service au pays. Il se peut qu'elle soit due à l'habitude, mais j'ose espérer que certaines habitudes peuvent être corrigées.
Merci.
Mme Carole Taylor:
Nous ne sommes pas trop vieux pour apprendre.
M. Mauril Bélanger: Jamais.
Le président:
Je vais vous laisser reprendre votre souffle, madame Lill.
Mme Lill et M. McNally avaient une déclaration à faire à la Chambre.
Madame Lill.
(1020)
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD):
Merci.
Merci beaucoup pour votre exposé; c'était excellent, et j'ai bien aimé les questions qui ont été posées.
Je voudrais vous poser une question dans une optique qui, à mon avis, est souvent absente de nos délibérations, c'est-à-dire le point de vue des créateurs. J'ai une formation de scénariste, et j'ai commencé à écrire pour Radio-Canada à la fin des années 70. J'ai eu l'occasion de travailler comme pigiste à Winnipeg et de passer d'un travail «de rue» à des émissions comme Identities et Our Native Land. J'ai fait une série sur la migration des Autochtones vers les villes, puis je suis passée aux dramatiques et j'ai fait des dramatiques radio.
Tout cela pour dire que je connais par expérience l'importance que revêt Radio-Canada pour ceux qui veulent devenir scénaristes, en leur donnant l'occasion d'écrire, en leur offrant une tribune pour dire ce qu'ils et elles veulent dire. Dans mon cas, j'ai pu parler de la migration des Autochtones vers les villes. J'ai pu parler de femmes immigrantes du secteur de l'habillement faisant du piquetage devant un atelier de confection de Winnipeg. Par la suite, j'ai pu parler de l'explosion d'Halifax. Tous des sujets très canadiens que j'ai pu traiter à Radio-Canada. Je ne suis qu'un exemple parmi d'autres. Il y a des milliers d'auteurs, de musiciens et de poètes qui ont vécue la même expérience.
Cela dit, nous savons que c'est pour cela qu'il y a ce comité. Nous examinons la Loi sur la radiodiffusion et l'état de la radiodiffusion pour pouvoir continuer à présenter des histoires canadiennes, et pour faire en sorte qu'il y ait un milieu propice pour cela. Voilà notre tâche.
Une de vos recommandations a trait à la nécessité d'examiner et de rééquilibrer la politique et les mécanismes de financement, afin d'accroître le soutien aux diffuseurs qui sont vraiment engagés en faveur d'émissions canadiennes. J'ai besoin de savoir, et je crois que nous avons tous besoin de savoir, quels sont les obstacles auxquels vous faites face en ce moment précis et qui vous empêchent d'accomplir votre tâche, et qui empêchent des auteurs et des créateurs d'être découverts par le public canadien.
M. Robert Rabinovitch:
Michel veut peut-être ajouter quelques remarques.
Il y a des difficultés d'ordre général et des difficultés précises. Nous réaffirmons notre soutien vigoureux au Fonds canadien de télévision comme moyen servant à soutenir les producteurs indépendants et la qualité des émissions qu'ils sont en mesure de produire. Toutefois, nous sommes d'avis qu'il y a un problème d'équité en ce qui a trait à notre capacité s'accéder à certains fonds de ce programme. Il existe des difficultés très précises, dont nous avons discuté avec des gens. Je dois dire que ces progrès importants ont été réalisés l'année dernière, mais il reste encore du travail à faire.
En outre, nous nous inquiétons au sujet du financement général qui est offert pour des émissions. En tant qu'économiste, je ne suis pas sûr que nous nous y prenons de la bonne manière entre les allégements fiscaux et les subventions. Je crois qu'il pourrait y avoir d'autres moyens, qui devraient être pris en considération.
Sans accroître l'engagement total de fonds, je pense que nous pouvons augmenter le nombre d'émissions canadiennes. Le Fonds canadien de télévision a pris cette orientation au cours des dernières années, en définissant les activités qu'il était prêt à financer. Certaines des propositions qui ont été soumises par le secteur privé méritent d'être prises sérieusement en considération, en ce qui a trait à la façon d'utiliser les fonds publics dans le domaine de la culture, et à notre avis, ils devraient servir à l'amélioration et au développement de la culture canadienne et des auteurs canadiens.
Mon sentiment personnel est que parfois nous confondons une politique industrielle relative au domaine du film et du développement avec une politique en matière de culture. Je pense que la politique industrielle a été un très grand succès. Mais je crois que maintenant, nous devons réexaminer la façon dont nous soutenons notre politique en matière de culture et la façon de rentabiliser le plus possible nos investissements. C'est pourquoi nous serions en faveur d'une réévaluation des émissions, et toutes les idées devraient être examinées.
(1025)
Mme Wendy Lill:
Je trouve intéressant le commentaire sur la politique industrielle et la politique en matière de culture, parce qu'il ne fait pas de doute que nous voyons qu'il se crée un produit industriel en quantités énormes.
Vous avez parlé de la nécessité d'analyser le contenu de ce qui se crée. Une des questions que je voudrais que l'on pose est la suivante: Les Canadiens savent-ils qu'est-ce qu'ils regardent? Ont-ils une idée de l'endroit où sont produites certaines des émissions qu'ils regardent? Je ne suis pas sûre, et je ne sais pas si vous savez si les Canadiens sont au courant de ce qu'on entend par contenu canadien.
M. Robert Rabinovitch:
Je vous dirais que la plupart des Canadiens ne s'en préoccupent pas, et ils ne devraient pas s'en préoccuper non plus. Ce à quoi ils tiennent, ce sont les histoires canadiennes et les interprétations canadiennes. Ils savent que lorsqu'ils regardent Radio-Canada, il vont avoir de l'interprétation canadienne. L'émission
Nikita a été réalisée au Canada, mais elle n'avait rien de canadien. C'était une émission industrielle, et elle a connu un assez bon succès pendant un certain temps. Mais les gens qui regardaient cette émission ne se souciaient guère de l'endroit où elle avait été produite, et c'est très bien ainsi. Pour le public, le fait que de nombreux films américains soient tournés à Vancouver, Montréal ou à Toronto, en raison de notre dollar et de la qualité de nos techniciens, n'a pas d'importance. Ce que veut le public, ce sont des émissions de qualité.
Mais ce n'est là qu'une partie de l'histoire. C'est pourquoi j'appelle cela l'aspect industriel. Je pense que depuis les années 70, nous avons réussi à former des professionnels de grande qualité pour la production de films et d'émissions de télévision. Par contre, nous avons produit moins d'émissions canadiennes pour les Canadiens. À mon avis, Radio-Canada constitue l'exception, mais je ne pense pas que nous devrions être les seuls à produire de telles émissions. L'exportation est une question secondaire, et de loin.
Le président:
Monsieur McNally.
M. Grant McNally (Dewdney--Alouette, PC/RD):
Merci, monsieur le président.
Merci pour votre exposé
Plusieurs films présentés par Radio-Canada ont été tournés aux studios de Danny Virtue, dans ma ville natale de Mission, dans ma circonscription, dont Nothing Too Good for a Cowboy, Neon Rider et Bordertown.
Je partage votre avis concernant le besoin de diffuser des émissions authentiquement canadiennes, par opposition à cette autre définition du contenu canadien. Je pense que vous avez raison quand vous dites que les Canadiens veulent voir de plus en plus de ces émissions et qu'il y a un marché pour ces productions. Comme vous l'avait illustré, les émissions appartenant à cette catégorie sont regardées par les Canadiens, et par d'autres également.
J'aimerais vous poser une question au sujet des messages publicitaires. Nous avons entendu des témoignages selon lesquels Radio-Canada ressemble à biens des égards à n'importe quel autre diffuseur lorsqu'elle présente un assez bon nombre de messages publicitaires. Quel est votre opinion sur ce point? Je sais qu'il y a la contrainte du financement. Savez-vous combien il en coûterait si on retirait les messages publicitaires de l'ensemble des émissions?
M. Robert Rabinovitch:
Monsieur McNally, la question des messages publicitaires est délicate depuis longtemps. Parfois, une partie du secteur privé voudrait que nous quittions le domaine de la publicité, en raison de l'espace qui se créerait ainsi pour eux. Or nous ne pouvons survivre sans les messages publicitaires dans notre formule de financement actuelle, mais au cours des trois dernières années, nous avons essayé d'examiner nos divers genres d'émissions et nous nous sommes demandé s'il devait y avoir des messages publicitaires dans ce genre-ci et si nous pouvons nous permettre d'abandonner les messages publicitaires dans ce domaine.
Le premier domaine est celui des émissions pour les enfants. Nous avons augmenté de 35 p. 100 le temps d'antenne consacré à ces émissions, sachant fort bien que ce serait un succès sur le plan commercial. Le deuxième domaine est celui des nouvelles, où nous avons supprimé les messages publicitaires pour la première demi-heure, dans le cas du bulletin de 18 heures et du bulletin de 22 heures. Comme je l'ai remarqué, ce sont souvent les quarante premières minutes. Un autre segment où nous avons abandonné les messages publicitaire est celui des émissions culturelles du jeudi soir. C'est tout simplement peu sensé d'interrompre ces émissions avec de la publicité.
Nous faisons également des essais avec différents moyens permettant de réunir des fonds sans avoir à interrompre constamment des émissions avec des messages publicitaires. Nous essayons notamment les commandites, comme l'ont fait dans une certaine mesure nos amis de PBS. Ainsi, nous avons eu recours à des commandites pour Canada: A People's History (Le Canada: Une histoire populaire). Pour la sérieTrudeau, que j'espère vous pourrez voir ce soir, nous avons également recours à des commandites, et ce pour la première fois. Nous avons quatre commanditaires, et l'émission sera donc présentée d'une manière très différente.
Mais nous sommes allés aussi loin que nous pouvons en ce qui a trait à l'abandon des messages publicitaires. La mesure dans laquelle un radiodiffuseur public devrait accepter des messages publicitaires est une question de politique générale. Mon opinion personnelle est que nous devons couvrir les sports, et dans les sports, nous devons accepter les messages publicitaires. Il y a certains types d'émission où nous ne devrions peut-être pas en accepter. C'est une question de politique. Mais je peux vous dire qu'en ce moment, nous ne pouvons survivre sans les messages publicitaires.
(1030)
Le président:
M. Taylor voulait intervenir également.
Mme Carole Taylor:
Je tiens juste à faire le lien entre deux points de votre commentaire et de votre question. Vous avez dit quelque chose qui, d'après moi, est fondamental pour comprendre ce qui se passe dans la collectivité. Vous avez dit: «Ce que les gens pensent que nous faisons». À mon avis, il y a environ dix ans, CBC/Radio-Canada a perdu beaucoup de téléspectateurs parce qu'elle a tenu compte de sa conception de la commercialisation d'un système de radiodiffusion publique. La question était: «Pourquoi devrais-je utiliser l'argent des contribuables pour acheter une émission américaine?».
Ce qui s'est produit au sein de la corporation au cours des dix dernières années, en termes d'acceptation de notre position, de la prise de conscience que nous devons en fait adopter un autre point de vue et que nous devons nous positionner différemment des radiodiffuseurs privés, est remarquable. Sinon, pourquoi existons-nous? Dans ce contexte, comme Robert l'a dit, nous avons supprimé toutes les publicités des émissions pour les enfants. Nous avons diminué de moitié les émissions sur les actualités. Nous faisons marche à arrière et essayons d'utiliser des méthodes moins importunes afin que nous puissions nous différencier d'un réseau privé.
En outre, pour répondre à la question de Mme Lill, nous avons des émissions qui n'ont jamais été réalisées auparavant. Nous revenons aux émissions dramatiques. Nous avions arrêté, en partie pour des raisons budgétaires, mais nous nous étions égarés depuis quelques années. Nous sommes de retour. Random Passage, par exemple, qui est un livre terre-neuvien, un auteur terre-neuvien, un producteur terre-neuvien, des acteurs canadiens, a connu un énorme succès. Si vous voulez parler de cotes, il a attiré autant de téléspectateurs que Hockey Night in Canada. C'est une contribution merveilleuse, fantastique et riche au patrimoine canadien que nous avons réalisé. Les gens n'en ont pas connaissance.
Je pense que notre plus gros problème est d'attirer à nouveau les gens vers Radio-Canada et de leur faire prendre conscience que Radio-Canada a changé. C'est différent. Comment pouvons-nous leur dire ce que nous réalisons en termes de publicité, d'émissions régionales ou de dramatiques s'ils ne branchent pas sur notre station pour regarder?
M. Grant McNally:
Nous comprenons que vous faites de votre mieux. Évidemment, nous, les membres du comité, nous regardons votre chaîne et nous observons certaines choses que tous les Canadiens n'ont sans doute pas encore remarqué pour l'instant. La solution réside peut-être en partie dans la persévérance. Je sais que beaucoup de téléspectateurs ont été perdus parce que les formats ont changé à plusieurs reprises et pour d'autres raisons. Cependant, une fois que le programme que vous mettez sur pied sera bien établi, je pense que cela sera utile.
La question de financement est primordiale bien sûr. M. Rabinovitch a fait allusion au modèle de la PBS. Vous avez parlé de sortir des sentiers battus, de rééquilibrer les outils de financement--je suppose et je dois peut-être vous poser la question--pour générer des recettes qui permettront de poursuivre vos efforts et de progresser dans ce domaine. Pourriez-vous nous parler de certains de vos accomplissements, des développements que vous envisagez et des éléments en dehors des sentiers battus qui aideront à éliminer certaines préoccupations du public concernant l'utilisation de l'argent des contribuables pour Radio-Canada même si elle restera toujours un radiodiffuseur public ? Je pense que c'est une question philosophique importante, mais comment en arrivons-nous à ce stade?
M. Robert Rabinovitch:
Votre question comprend de nombreuses parties. J'aimerais parler de la PBS à un moment donné et la démystifier ce service parrainé par les abonnés, parce que ce n'est pas le cas.
Cependant, pour en venir précisément à ce dont vous parliez, nous envisageons tous les moyens d'exploitation de la corporation, d'un point de vue commercial, aussi efficacement que possible, comme s'il s'agissait d'une corporation du secteur privé. Carole et moi-même avons tous les deux travaillé dans le secteur privé et nous avons siégé à de nombreux conseils d'administration. C'est pour cette raison que j'ai invoqué l'argument que si je travaillais dans le secteur privé à l'heure actuelle, j'adopterais exactement la même politique en ce qui concerne la programmation.
Nous parlons d'émissions que Radio-Canada a peut-être surdéveloppé, pour diverses raisons. Le Centre canadien de radiodiffusion, par exemple, est un édifice beaucoup plus grand que nécessaire. Il a été bâti lorsque la politique exigeait beaucoup de production interne. À l'heure actuelle, la politique gouvernementale fait beaucoup plus appel au secteur privé indépendant et il y a donc de l'espace. Nous avons consommé l'espace un peu comme une marchandise gratuite. Nous le gérerons de manière un peu plus serré.
Nous envisageons la possibilité d'une fusion à Ottawa qui nous permettrait de réduire considérablement l'espace que nous utilisons. À Edmonton, nous réduirons l'espace que nous utilisons d'environ--ne citez pas ces nombres comme s'ils étaient précis--150 000 pieds carré à 30 000 pieds carré. Nous déménagerons dans le centre-ville afin que Radio-Canada soit visible à Edmonton. À Vancouver, nous avons beaucoup de terrains autour de notre édifice. Nous étudions différentes possibilités de mettre en valeur cette propriété en collaboration avec des entrepreneurs privés afin de générer un rendement pour Radio-Canada. Nous voulons utiliser tous nos actifs afin de créer des fonds qui seront investis dans un seul domaine, à savoir la programmation.
Nous avons envisagé de vendre nos actifs de transmission. Malheureusement, comme vous le savez, il y a eu une fusion dans l'industrie des télécommunications. Nos offres ont finalement disparues, mais pas l'intérêt. Nous les vendrons un jour. Entre temps, nous les avons réparti au sein de la compagnie et nous les exploitons comme centre de profit. Nous offrons des services aux autres radiodiffuseurs sur le plan technique. En fait, nous essayons réellement d'établir une analyse de rentabilité afin d'être en mesure de les vendre un jour.
Nous voulons tirer profit au maximum de ces secteurs dans lesquels notre présence n'est pas indispensable et les autres peuvent faire mieux, afin que nous puissions nous concentrer sur nos services, et dans ce contexte, générer des encaisses. Nous savons qu'il y a une limite à ce que nous pouvons demander au gouvernement.
(1035)
Le président:
Avant la deuxième table ronde, je veux juste vous poser trois brèves questions. J'aborderai la question des émissions locales, parce que c'est une question importante qui nous a été posée, mais espérons que les membres en parleront dans le cadre des débats.
Je veux poser la question des chaînes spécialisées. Le CRTC n'a en effet pas autorisé CBC/Radio-Canada à se lancer sur ce marché et il y avait le système bizarre où vous deviez avoir un partenariat avant d'obtenir un créneau. Si vous aviez le choix, vous lanceriez-vous dans des chaînes spécialisées? Pourquoi? Cela vous aiderait-il à être plus compétitifs?
La deuxième question concerne le positionnement des plates-formes. Certains intervenants, y compris VisionTV, nous ont suggéré qu'en termes de positionnement du câble, les petits intervenants sont placés dans les plages pendant lesquelles ils ne peuvent pas être vus, lorsqu'il y a un positionnement de chaînes «publiques», y compris APTN, VisionTV, ainsi de suite--en tenant compte qu'APTN est privée--, y compris Radio-Canada, toute sorte d'affaires publiques, pourriez-vous dire.
Troisièmement, en ce qui concerne Cable Television Fund, Telefilm et l'Office national du film du Canada, voyez-vous un meilleur moyen de les fusionner à des fins d'efficacité culturelle et de répartition des fonds? De nombreuses personnes ont des questions sur le traitement des fonds, ce qui est très complexe. Qu'en pensez-vous?
M. Robert Rabinovitch:
Premièrement, en ce qui concerne les chaînes spécialisées, le CRTC critiquait vivement Radio-Canada dans les années 90 après lui avoir donné Newsworld et RDI et insistait pour que le modèle secteur public-secteur privé fasse un pas en avant et que nous adoptions des partenariats.
Je ne suis pas contre la proposition du CRTC. Je pense que nous devons faire preuve d'une extrême prudence en ce qui concerne les chaînes spécialisées. C'est un secteur dont je devrais discuter en long et en large avec mon conseil d'administration, parce que nous disposons de fonds limités, et si nous voulons éparpiller nos ressources, je pense que la qualité de notre produit sera affectée. Nous devons faire preuve d'une extrême prudence à cet égard avant que cela ne se produise.
En même temps, je pense que pour certains domaines, nous devrions peut-être avoir des chaînes spécialisées. ARTV est un exemple classique de chaîne spécialisée pour les chaînes françaises qui, d'après moi, connaît beaucoup de succès. C'est un partenariat. Country Canada est un partenariat avec Corus. Documentary Channel est un partenariat avec Corus et l'ONF.
Je peux concevoir des partenariats de cette nature. Je pense que Radio-Canada connaîtrait un succès, d'une manière ou d'une autre, si elle avait davantage de plates-formes pour mettre en vedette son contenu, parce qu'elle serait alors en mesure d'amortir les coûts de ce contenu sur plusieurs plates-formes. Cependant, je ne m'orienterai pas d'un seul coup vers les chaînes spécialisées.
Notre principale tâche est la production d'émissions. Nous avons besoin des chaînes nécessaires pour les diffuser à l'antenne. La question est de déterminer de combien de chaînes nous avons besoin. Je pense que nous sommes pratiquement au maximum à l'heure actuelle.
J'imagine que d'ici peu, vous observerez des modifications de la programmation des chaînes. Country Canada fera peut-être l'objet de changements radicaux. Il y aura peut-être des changements de propriétaires. Il y aura peut-être des possibilités de réaliser quelque chose avec certaines chaînes.
Je ne soutiens pas l'idée que Radio-Canada gère environ dix chaînes différentes, comme la BBC. Nous n'avons tout simplement pas les ressources nécessaires. Cela nous mettrait dans une position trop fragile et nos efforts seraient dispersés.
En ce qui concerne le positionnement des plates-formes, nous avons été institués par une loi du Parlement. Nous sommes le radiodiffuseur public indépendant. Historiquement, nous avons mis sur pied des partenariats avec le secteur privé. Je ne m'oppose pas à Vision, à APTN et aux autres chaînes qui essayent de créer ce qu'ils appellent un «espace vert». Nous sommes un espace vert et nous continuerons de l'être. Je pense que nous devons être traités indépendamment des chaînes spécialisées dont il est question. Je ne nie pas leur argument, mais je ne pense pas que nous en faisions partie intégrante.
Pour ce qui est du FCT, je pense qu'un jour, le gouvernement devrait examiner tous ces outils, y compris l'ONF, Radio-Canada, le FCT et Telefilm, et envisager la possibilité de rationalisation de tout le secteur. Nous avons parlé de contenu canadien; je peux aisément concevoir une étude des outils de la politique gouvernementale dans le domaine culturel.
(1040)
Le président:
Si vous avez des idées précises à cet égard à la suite des réflexions et des discussions avec votre conseil d'administration et si vous pouviez nous les faire parvenir, ce serait très utile.
M. Robert Rabinovitch: Merci.
Le président: Merci.
Nous commençons la deuxième table ronde. Monsieur Abbott.
Comme vous l'avez sans doute remarquer, monsieur Bélanger et moi-même aimons nous lancer des pointes de temps à autre. Je suppose que ce n'était pas du tout évident parce qu'il s'agissait du contenu d'un programme du réseau privé pour lequel je verse une larme patriotique.
Des voix: Oh, oh!
Le président:
Vous devez seulement verser des larmes pour une entreprise privée, et non pas une entreprise publique.
M. Jim Abbott:
C'est exact, surtout s'ils perdent de l'argent.
J'ai une question toute prête depuis votre discussion sur le déménagement dans le centre-ville d'Edmonton, par exemple. Je pense à un radiodiffuseur privé, qui a littéralement un mini-centre de production dans l'ancien édifice de la Compagnie de la Baie d'Hudson, qui est dans le centre-ville. Je ne parle absolument pas en leur nom, mais je remarque que c'est exactement le genre de choses qui finit par rendre les gens qui travaillent dans le secteur privé juste un peu bizarre. Ils ont une idée--ils ont cette exposition avenue Jasper--et maintenant Radio-Canada dit: «C'est une bonne idée; je pense que nous allons en faire autant». C'est au moins de cette manière que j'interprète votre commentaire. Ai-je raison d'en arriver à cette conclusion?
M. Robert Rabinovitch:
Vous avez raison en partie, mais les gens volent nos idées et nous volons leurs idées. Un des changements qui s'opère dans la radiodiffusion est l'idée que la production doit s'effectuer dans un milieu retiré et isolé au neuvième étage de l'édifice de CBC Toronto, comme vous l'avez vu, dans des milieux créés artificiellement. Je pense que la personne qui a lancé cette bataille est Moses Znaimer de City TV à Toronto.
Ouvrez les portes, faites rentrer le public pour qu'il voit ce que vous réalisez, pour qu'il voit qui sont vos stars et pour qu'il les voit en pleine action. C'est une des raisons pour lesquelles nous voulons le mettre sur pied, en particulier pour la radio sans visage. Nous découvrons à Winnipeg où il existe un studio ouvert au public que les gens nous rendent visite, nous font signe, disent bonjour et observent.
Je suppose que notre travail est semblable au vôtre. Nous devons faire preuve de notre valeur pour obtenir notre argent. Nous devons vous montrer ce que vous obtiendrez. Je pense que s'installer dans le centre-ville, où les gens peuvent vous voir, est important pour la corporation en termes de visibilité et de vision. Je volerai sans aucune honte, monsieur, l'idée de quelqu'un d'autre si elle est bonne.
Le président: Carole.
(1045)
Mme Carole Taylor:
Monsieur le président, si je peux approfondir un peu plus ce point, je pense que c'est une question extrêmement importante en ce qui concerne l'orientation que j'envisage pour CBC/Radio-Canada.
Tout cela provient en partie de la notion selon laquelle l'intégration des services est primordiale pour l'avenir de notre système de radiodiffusion. Je veux dire que nous ne pouvons absolument pas nous permettre de l'avoir. Je ne pense pas également que nous pouvons dire que nous avons une radio française, une télévision française, une radio anglaise et une télévision anglaise autonomes. Personne ne partage ni ne soutient les ressources, les idées, les talents et les installations. C'est très onéreux et cela n'est pas efficace en termes de radiodiffusion.
Je le dis en me basant sur mon expérience dans le secteur privé aussi. Lorsque je produisais W-5, il n'y avait aucune possibilité de communiquer avec le service d'actualités. Ce n'est pas seulement l'idée de Radio-Canada; c'est notre histoire et nos origines.
L'architecture est souvent fonctionnelle. Nous avons une architecture dans l'ensemble du pays où vous avez la radio dans un grand édifice totalement isolée de la télévision qui est située dans un autre édifice. À Vancouver, par exemple, nous avons un bâtiment linéaire très allongé, mais chaque section, chaque composante média est entièrement isolée des autres.
Si, en tant que conseil d'administration, notre orientation stratégique consiste à dire que nous devons commencer à travailler ensemble et à nous soutenir mutuellement, nous devons alors avoir l'architecture adéquate. Comment y arriver de manière responsable sur le plan financier?
Comme Robert l'a dit, dans de nombreux cas, nous avons trop d'espace ou des espaces mal conçus. Si nous réalisons une analyse de rentabilité prouvant que si nous pouvons vendre les bâtiments, réduire la superficie des édifices à une échelle qui nous convient, adopter une meilleure stratégie, et en même temps, nous investissons dans le nouvel équipement numérique dont nous avons besoin de toute manière, alors il s'agit d'une occasion exceptionnelle d'y arriver pour nous. En même temps, nous pouvons choisir un endroit au coeur de la communauté, plutôt que dans un parc industriel.
Cette politique est primordiale d'après moi. Nous devons être en mesure de montrer aux gens que nous agissons de manière responsable sur le plan financier. Nous ne bâtissons pas de nouveaux bâtiments parce que nous en avons envie. Nous réduisons la superficie de nos édifices pour qu'elle soit appropriée et nous procédons de manière plus rentable et plus efficace, afin d'obtenir un meilleur produit.
Vous remarquerez que huit de nos dix correspondants à l'étranger feront leurs émissions en français et en anglais pour la radio et la télévision. Cela fait partie de nos objectifs. La question des biens immobiliers et de l'architecture est une partie importante de la solution.
M. Jim Abbott:
Je me demande si nous sortons réellement des sentiers battus. Par exemple, Radio-Canada est à l'antenne. CTV, Global, CHUM, A-Channel et d'autres radiodiffuseurs sont à l'antenne. Cela les place essentiellement en position privilégiée pour le satellite et pour le câble.
En fait, bien plus de 80 p. 100 des Canadiens ont accès au câble ou au satellite. En réalité, presque tous les Canadiens ont accès à l'univers des cinq cent canaux par le biais du satellite, peu importe où ils se trouvent au Canada.
Si nous nous concentrons sur cette option pendant quelques secondes plutôt que de penser à ce qui est à l'antenne, je suis à la page 3 de votre exposé ce matin. Les membres du comité ont été exhorté à examiner la citation: «La seule chose qui importe vraiment en matière de radiodiffusion, c'est le contenu; tout le reste n'est que question courante.» [Note de la traduction: Textuel] En bas de la page, vous dites: «Toutes ces mesures visaient à assurer non seulement la production d'émissions canadiennes, mais aussi leur diffusion.» [Note de la traduction: Textuel]
Si nous pensons dans un contexte plus élargi, si nous pensons au satellite, nous avons les chaînes spécialisées qui sont absolument assoiffées de contenu canadien. En fait, ils sont à l'affût de toute sorte de contenu. Dans ce cas, pourquoi avons-nous besoin de Radio-Canada? Nous avons toutes ces chaînes, tous ces débouchés universels qui sont offerts à tous les Canadiens, moyennant de petits coûts. Pourquoi avons-nous besoin de Radio-Canada pour diffuser ces émissions si nous appliquons en fait ce que vous avez dit: «La seule chose qui importe vraiment en matière de radiodiffusion, c'est le contenu» [Textuel]? Si le contenu est suffisamment bon, pourquoi faut-il absolument le diffuser sur Radio-Canada à même les fonds publics?
(1050)
M. Robert Rabinovitch:
Les coûts principaux sont liés à la création du contenu, à l'élaboration des programmes. Nous avons besoin de la chaîne de Radio-Canada afin de nous assurer que nous pouvons diffuser les émissions à l'antenne. L'ONF paie très cher parce qu'il ne possède pas de système de diffusion. Il en avait un auparavant; il a disparu. De plus, à chaque fois qu'il diffusait un long métrage, il diffusait toujours un film avant et il s'agissait très souvent d'un film de l'ONF.
Je ne conseillerai pas au comité d'éliminer Radio-Canada comme radiodiffuseur et de la transformer en simple maison de diffusion. Nous avons le même argument qu'auparavant: si vous êtes CTV, CHUM ou un autre, si vous devez prendre le produit canadien que nous produisons et remplacer ER par ce produit, vous ne le ferez pas. Le produit canadien ne sera pas diffusé. Pour ce qui est de le diffuser sur une chaîne spécialisée, les chaînes spécialisées peuvent exister, mais leur part d'auditoire moyenne est très peu élevée. Elle est d'un demi pour cent environ et il n'y a pas réellement de choix pour ce qui est de la programmation.
L'autre aspect est l'association des éléments qui créent une chaîne, que ce soit les actualités,d'autres émissions, peu importe. Je pense que nous y arrivons également très bien; nous créons une autre solution viable pour les Canadiens. Cependant, à la fin de la journée, les coûts réels sont liés à la programmation.
Le président::
Monsieur Tremblay.
M. Michel Tremblay:
Je voudrais dire quelque chose, monsieur le président.
Monsieur Abbott, je pense que nous devons également tenir compte d'une réalité fondamentale. Il est exact qu'à l'heure actuelle, nous avons une offre immense par le biais des chaînes spécialisées, qui ont toutes des petites parts d'auditoire, mais l'essentiel est que sans les réseaux traditionnels importants du système de radiodiffusion qui peuvent se permettre une production à grande échelle, je crois que les chaînes spécialisées auront des problèmes. Une bonne partie de notre contenu qui est diffusé en avant-première sur Radio-Canada est diffusée sur les chaînes spécialisées la deuxième ou troisième fois.
Vous avez déjà mentionné le fait qu'elles sont assoiffées de contenu. Si vous éliminez les entités prédominantes, je questionnerais la viabilité des chaînes spécialisées à long terme, en particulier du point de vue de l'offre de contenu canadien.
[Français]
Le président:
Madame Gagnon.
Mme Christiane Gagnon:
Vous dites que vous jouez bien le rôle que devrait jouer une télévision publique et que vous offrez une programmation de qualité et des choix différents. Je pense que c'est là qu'on peut faire la différence entre une télévision publique et une télévision privée.
Mais quand je regarde les types d'émissions qu'on présente à Radio-Canada... Je ne fais pas un commentaire sur la qualité de nos artistes et des émissions, mais sur le choix des émissions. Je regarde des émissions comme La Fureur et L'Ecuyer qui ressemblent à d'autres émissions qui sont présentées dans le réseau privé. L'émission Les Poupées russes aurait bien pu se retrouver à Radio-Canada. L'émission Les Super Mamies est diffusée à Radio-Canada, et il y a Music Hall. Je suis une adepte du zapping et je passe d'une émission à l'autre. Je regarde même Da Vinci. Souvent, j'ai du mal à savoir si je suis à la télévision privée ou à la télévision publique. Vous dites que Da Vinci, que j'écoute, est une émission de qualité.
En quoi ces émissions sont-elles différentes des émissions de la télévision privée? Je ne vois pas vraiment la différence, parce que lorsque je passe d'une émission à l'autre, je me demande parfois si c'est Radio-Canada qui présente l'émission ou une station privée. Je sais que vous êtes obligés d'aller chercher des émissions plus populaires parce que vous vendez de la publicité. Quand vos cotes d'écoute sont meilleures, vous pouvez vendre votre publicité plus cher.
Donc, pour ma part, j'ai de la misère à dire que dans l'ensemble, Radio-Canada accomplit le mandat qui lui a été donné, celui d'être une télévision différente avec une programmation plus pointue. À ce moment-là, il faut peut-être oublier les cotes d'écoute de 40 ou 25 p. 100. Je trouve qu'avec la fragmentation des marchés, une cote d'écoute de 25 p. 100 est quand même assez bien au Québec. On parle de 9 p. 100 au Canada anglais. On comprend pourquoi la télévision d'État veut sa part du marché, mais j'ai un petit peu de misère face à cela.
Il y a un autre aspect de la question. Vous dites que les 20 émissions les plus écoutées à la télévision française de Radio-Canada sont toutes canadiennes. Contrairement à mon collègue Bélanger, je pense qu'il faut définir la production québécoise. C'est une production québécoise, et la production du Canada est différente. On pourrait aussi parler de la production que souhaiteraient avoir les francophones hors Québec, qui nous ont dit qu'ils étaient contents d'avoir de la production du Québec et de la France, mais qu'ils voudraient avoir les moyens de faire leur propre production pour parler de leurs propres histoires.
Si jamais vous accédez à la demande de M. Bélanger...
Le président: Madame Gagnon, vous êtes en train de faire un discours.
Mme Christiane Gagnon: Je le sais, mais il faut les faire, ces discours, parce qu'on se demande comment on va les faire passer.
(1055)
Répondez-moi sur la qualité de la programmation, puis j'aimerais vous entendre commenter ce qu'a dit M. Bélanger. Je pense qu'il y a une production du Québec. Le septième art a une culture spécifique au Québec et le septième art se retrouve aussi à la télévision. Ce serait encore une fois nous noyer dans... Quand vous parlez de diffusion ou d'auditoire, vous faites aussi une différence dans votre mémoire. Quand vous parlez de la diffusion, vous faites allusion à la diffusion en langue française et à la diffusion en langue anglaise.
M. Robert Rabinovitch:
Je vais essayer de vous répondre, et Michel vous donnera les chiffres précis sur les cotes d'écoute et sur les taux de programmation canadienne et du Québec sur chaque canal.
Vous avez raison de dire que la spécificité de Radio-Canada n'est pas aussi bien développée maintenant que la spécificité du côté anglais. Des changements s'en viennent, mais le marché au Québec est assez différent. Le rôle de la programmation populaire est important pour le développement de la culture québécoise.
Les services discrétionnaires se développent de plus en plus au Québec maintenant. Il y a une différence d'à peu près 10 ans entre le développement des services spécialisés au Québec et dans le reste du Canada. Cela veut dire les services français. Maintenant qu'il y a beaucoup plus de services spécialisés au Québec, Radio-Canada doit repenser la place qu'elle occupe sur la carte et elle est en train de le faire maintenant. Elle doit définir exactement le type de programmation qu'elle veut faire. On ne veut pas que le système français soit en tous points pareil au système anglais.
Le rôle de Radio-Canada dans le marché du Québec et dans le développement du talent au Québec est vraiment différent. C'est un rôle beaucoup plus précis, et il faut le protéger et le garder.
Michel.
M. Michel Tremblay:
Madame Gagnon, j'aimerais revenir sur les points que vous avez soulevés.
Premièrement, vous parliez des ressemblances entre nos émissions et les autres. Comme vous êtes déjà amateur de l'émission Da Vinci, je vous dirai que ce qui la distingue des productions dramatiques présentées sur d'autres réseaux, c'est qu'on ne cache pas le lieu où c'est produit: on sait qu'on est à Vancouver. Bien souvent, les scénarios tiennent compte des réalités locales et régionales du marché, et il y a une panoplie d'acteurs et de vedettes canadiens. Donc, je pense qu'il y a des éléments distinctifs très importants au niveau du contenu.
Parlons maintenant du côté du marché francophone. On peut peut-être sauter les détails de ce qui est présenté dans les grilles horaires des autres réseaux, mais je dirai que nous avons laissé passer des occasions de faire des offres sur Kamasutra et Sexe et Confidences, qui sont allés aux réseaux français concurrents. Mais passons sur ces points.
Je pense que l'élément distinctif fondamental est le suivant, et c'est très objectif. C'est qu'au niveau de l'offre, en périodes de haute écoute, les émissions canadiennes diffusées à notre réseau français de télévision sont de l'ordre de 90 p. 100, alors que sur les réseaux concurrents, ce pourcentage est de l'ordre de 53 p. 100 à TVA et de 45 p. 100 à TQS.
Compte tenu de cette offre, qui attire les auditeurs aux émissions canadiennes? À Radio-Canada, 92 p. 100 des heures d'écoute en soirée sont consacrées à des émissions canadiennes, par opposition à 61 p. 100 pour TVA et 39 p. 100 seulement pour TQS. C'est leur prérogative et c'est leur mix de programmes. Ils ont un rôle à jouer, et tout le monde est complémentaire. Je pense qu'il y a des différences fondamentales quant au tissu même de la programmation. Dans la programmation des autres réseaux, il y a une forte présence d'éléments qui ne sont pas proprement canadiens et qui ne reflètent pas la culture canadienne-française.
Je pense qu'une analyse exhaustive de la grille révélerait aussi ces différences fondamentales. C'est là qu'on se distingue: on est vraiment le foyer du contenu canadien.
(1100)
Le président:
Monsieur Mills.
Mme Christiane Gagnon:
C'est pour ça que j'ai parlé longtemps; je vois que vous vous détournez la figure assez rapidement.
[Traduction]
M. Dennis Mills:
Merci, monsieur le président.
Madame Taylor, monsieur Rabinovitch, pour ce qui est des «priorités de Radio-Canada»--et vous y avez fait allusion plus tôt--il y a «la mise en valeur des actifs pour accroître la flexibilité financière» [Note de la Traduction: Textuel ] J'aimerais en discuter avec vous pendant deux minutes.
Pour ce qui est de moi, je ne suis pas enthousiasmé par ce genre de fuite ou de réduction de votre présence actuelle dans l'ensemble du Canada. Je fais pression depuis deux ans pour que l'espace excédentaire dont vous disposez dans vos édifices soit vendu ou loué, vous essayez de trouver une solution pour mettre en valeur cet espace comme système de soutien économique à la corporation face au défi fiscal et également dans l'intérêt de la communauté et du pays.
J'ai déposé une demande spécifique à plusieurs reprises. Je ne pense pas vous l'avoir mentionné, monsieur Rabinovitch, la dernière fois que vous êtes venu, mais je l'ai mentionné à certains de vos collègues et ma demande est la suivante: en raison de l'explosion de l'industrie cinématographique au Canada à l'heure actuelle--il s'agit maintenant d'un secteur de plus de trois milliards de dollars--, pourquoi Radio-Canada ne pourrait-elle pas concevoir des rapports avec un établissement d'enseignement dans le cadre desquels elle utiliserait ses actifs, sa main-d'oeuvre qualifiée dans tous les aspects de la production, que ce soit la radio ou la télévision, et ne deviendrait-elle pas un établissement d'enseignement tel que la «CBC U»? Cela permettrait de s'assurer que nous formons une main-d'oeuvre qui peut compléter et soutenir les efforts afin d'offrir le contenu de cet univers multi-canaux vers lequel nous nous dirigeons.
Je porte cet argument à votre attention parce que dans ma propre collectivité, que je représente depuis 14 ans, j'ai mené une étude de toutes les personnes qui travaillait dans l'industrie cinématographique la première année et il y en avait environ un millier à cette époque-là. Il y en a maintenant bien plus de cinq milles rien que dans ma petite collectivité dans le centre-ville de Toronto, et ce qui est intéressant, est que la plupart d'entre eux ont travaillé pour Radio-Canada en tant que décorateurs, enregistreurs de sons ou cadreurs. En fait, ils se vantent que leur expérience à Radio-Canada est la base qui leur a permis de débuter leur carrière et de réaliser des grands métrages. Certains ont même gagné des oscars.
Plutôt que d'utiliser les centres régionaux dont vous disposez, pour lesquels étant donné l'état actuel de la technologie, il y a trop d'espaces, etc., pourquoi ne pourrions-nous pas faire preuve d'ingéniosité et étudier les possibilités de créer des recettes pour Radio-Canada en ayant recours aux atouts technologiques et aux employés de Radio-Canada? En fait, certains employés qui sont sur votre paie pourraient gagner un revenu additionnel en enseignant aux jeunes qui n'ont pas les mêmes possibilités que dans le passé lorsque le budget de Radio-Canada était beaucoup plus important. Beaucoup plus de gens ont eu l'occasion d'apprendre. Radio-Canada était un peu comme une centre de formation il y a de nombreuses années parce que nous n'accordions pas autant d'importance aux budgets. Cette possibilité n'existe plus, mais nous pouvons peut-être créer un environnement semblable qui engendrerait non seulement des retombées économiques pour Radio-Canada en misant sur les ressources actuelles, nous pourrions former une main-d'oeuvre qualifiée afin de nous assurer que nous produisons les meilleurs films cinématographiques du monde entier.
(1105)
M. Robert Rabinovitch:
Monsieur Mills, votre suggestion m'est très précieuse et est pleine de bon sens.
Parlons d'abord de réduction de la présence. Nous ne réduisons pas notre présence. Nous utilisons nos actifs de manière plus efficace. En fait, ce que M. Abbott suggérait est uniquement que nous imitions le secteur privé en nous installant dans le centre-ville et en améliorant notre présence.
Une des ententes que nous avons conclues à Regina est de bâtir un studio cinématographique sur nos terrains en collaboration avec la société de réalisation de film de Saskatchewan. Tel que vous l'avez dit, l'objectif est précisément de former les gens, de perfectionner leurs aptitudes dans ce domaine. Ils utiliseront environ 50 p. 100 de notre espace, parce que nous n'en avons tout simplement pas besoin et nous collaborerons également. Tout se fera conjointement.
Nous croyons fermement en un programme de mentorat. Comme vous le savez, nous avons rencontré de nombreuses difficultés au cours des cinq dernières années; nous avons licencié plutôt que d'embaucher. Récemment, nous avons embauché. Lorsque nous avons annoncé que nous voulions embauché cinq journalistes pour nos nouveaux bureaux à travers le Canada, nous avons reçu 4 000 demandes d'emploi de gens qui voulaient travailler dans ces régions. Il s'agissait de régions reculées, de plusieurs manières, mais elles représentaient le début d'une carrière.
Nous avons conclu une entente avec l'International Academy of Design & Technology à Toronto. Une des raisons pour lesquelles, ils voulaient être situés dans notre édifice est en raison de nos installations et de notre équipe.
Lorsque nous embauchons de nouvelles recrues, nous recherchons de plus en plus des personnes polyvalentes qui iront non d'une émission à l'autre, mais d'un service à l'autre, afin qu'ils puissent obtenir de l'expérience dans les domaines de la radio et de la télévision. Certains resteront et d'autres partiront. Je ne suis pas fâché quand j'entends parler de ces gens qui ont été formés à Radio-Canada et sont partis ailleurs ensuite pour faire autre chose et faire mieux. Cela fait partie de notre responsabilité.
Pour ce qui est du travail que nous réalisons à Vancouver... Je ne sais pas si le comité a eu l'occasion de se rendre à Vancouver, mais c'est extrêmement passionnant de visiter Radio 3. Je l'appelle «The Skunk Works», un groupe que nous avons protégé afin qu'il puisse créer et développer de nouvelles émissions, de nouvelles utilisations de l'Internet, de nouvelles manières d'attirer les jeunes; et à compter de la semaine prochaine, je crois, nous aurons maintenant une nouvelle émission télévisée, Zec, à la suite de cette initiative. De nouveau, c'est à Vancouver, mais cela donnera aux jeunes la possibilité de passer à l'antenne, de créer, d'expérimenter, de faire quelque chose de différent, et je pense que c'est vraiment le rôle de Radio-Canada, d'aider à créer la nouvelle génération.
Je pense qu'une des choses les plus graves qui se sont produites--et nous pouvons parler d'autres institutions qui ont eu la même expérience--est que lorsque vous traversez des périodes de compression, qui est touché en premier? C'est la prochaine génération et nous avons été gravement affecté. Cependant, nous essayons maintenant de plus en plus d'attirer ces personnes.
M. Bob Mills:
Bien, je suis ravi d'entendre cela et je me demande si vous pourriez envisager la possibilité de transformer ces paroles en plan d'activités pour que cela devienne presque un engagement officiel en matière d'éducation qui ferait partie de la mission globale de Radio-Canada, de voir si c'est possible ou non, dans le cadre duquel Radio-Canada conclurait éventuellement une entente de coentreprise avec un établissement d'enseignement--dans ma ville, il pourrait bien sûr s'agir de York University ou de University of Toronto, ou d'un des collèges communautaires, en plus d'une relation avec la DRHC--lorsque c'est une fonction bien particulière, lorsqu'il n'y a aucun frais de trésorerie pour Radio-Canada. En fait, ce serait une amélioration en termes de location de l'espace et de l'expertise.
Cela pourrait être quelque chose qui intéresserait les jeunes... pas officieusement, comme c'est le cas pour la plupart des corporations qui ont des programmes de mentorat, mais ils ont des flux. Je parle d'un établissement officiel qui serait un appendice de Radio-Canada.
Merci.
Monsieur Gallaway.
M. Roger Gallaway:
Merci, monsieur le président.
J'ai trouvé votre exposé très intéressant. Vous utilisez six exemples plutôt anecdotiques pour prouver pourquoi Radio-Canada est importante selon vous.
Je vous raconte une anecdote qui m'est arrivé hier soir. Je quittais un grand centre de l'hospitalité, le Hard Rock Cafe sur le marché. En même temps, un membre du cabinet se précipitait pour sortir et rentrer dans une voiture qui l'attendait, en disant: «Je dois rentrer. C'est l'heure de West Wing.» C'est un symbole remarquable de la culture canadienne.
Il y a donc un danger. Je comprends que l'anecdote est importante et c'est une illustration, mais en même temps, le comité envisage l'avenir--pas pour cette année ou l'année prochaine, ou si votre plan d'activités réussira cette année ou l'année prochaine: nous nous projetons peut-être dans dix ans. Nous devons observer les tendances et les indicateurs.
Un indicateur qui m'intéresse, M. Rabinovitch, est celui que vous avez mentionné dans un article qui dit que neuf Canadiens sur dix--je crois que ce sont les statistiques--considèrent Radio-Canada comme une institution culturelle primordiale. Je me demande quelle est cette étude; où est-elle; et qui l'a demandé? Pouvez-vous nous en parler? Ou peut-être accepteriez-vous de déposer une copie de cette étude sur le bureau du comité.
M. Dennis Mills: J'en ai une copie. Je ne l'ai pas ici; cependant, je peux l'obtenir.
M. Roger Gallaway: Malheureusement, monsieur Mills, je questionne M. Rabinovitch, pas vous.
(1110)
M. Robert Rabinovitch:
De nombreuses études ont été réalisées au fil des ans. Je ne suis pas certain de laquelle il s'agit en particulier. Je pense que celle-ci fut réalisée par l'organisme de sondage Compas.
M. Roger Gallaway:
Vous y avez fait allusion dans votre article; c'est la raison pour laquelle j'ai posé la question.
M. Robert Rabinovitch:
C'est exact, mais je pense que c'est l'étude qui fut réalisée par l'organisme de sondage Compas. Je sais que Friends of Canadian Broadcasting a mené plusieurs études. Il y a même une étude qui a été réalisée par Global sur
This Weekend, pour laquelle 75 p. 100 des gens ont répondu à un coupon de Global--sur 2 600--pour dire que Radio-Canada ne doit pas changer et doit être perfectionnée. C'est une étude biaisée par définition, en raison des choix des gens qui regardent l'émission--ce qui ne pose aucun problème.
Je pense que si vous observez attentivement les faits--et vous devrez peut-être faire votre propre recherche--, Radio-Canada est une des institutions qui, si je suis désabusé, je dis que les gens l'adorent, même s'ils ne la regardent pas.
M. Roger Gallaway:
D'accord.
M. Bélanger a fait une remarque, qu'il n'a pas rétracté mais que je rétracterai pour lui, à savoir que j'ai suggéré que vous devriez être privatisé. Je n'ai jamais dit cela, jamais.
Vous avez soulevé la question de PBS ce matin et j'ai soulevé la question de considérer d'autres moyens de financement pour Radio-Canada mis à part les fonds publics. J'aimerais connaître vos points de vue sur deux modèles: PBS et TVO--je ne sais pas exactement s'ils sont identiques--et votre expérience avec Newsworld et les frais de câble connexes.
M. Robert Rabinovitch:
En obtenant la licence pour Newsworld, nous nous engagions à ne recevoir aucun fonds à la suite de cette autorisation. En d'autres termes, cela ne coûterait absolument rien au contribuable. Nous avons respecté cet engagement. Je dois cependant ajouter que Newsworld ne pourrait survivre s'il ne faisait pas partie de la programmation régulière dont il tire profit. Le coût marginal qui sert au fonctionnement de Newsworld est totalement couvert par les revenus de la publicité et des abonnements, mais la programmation de base provient pour l'essentiel du service régulier et donc, indirectement, de l'autorisation reçue.
Pour des considérations personnelles et administratives, j'ai examiné d'autres modes de financement, mais ça revient toujours au même point: le coût de production. Il en coûte un million de dollars pour produire une heure de télévision de qualité, et c'est très difficile d'y arriver sans appui financier.
Quant au modèle PBS qu'on nous cite en exemple continuellement, on oublie que c'est le gouvernement fédéral qui fournit le plus gros de l'argent et aussi l'autorisation, sans parler des fonds considérables provenant des États, des universités et de certaines fondations, et on sait qu'au Canada ce système de fondations est inexistant.
Lorsqu'ils s'adressent au public pour faire une levée de fonds — nous regardons tous PBS, et cet appel de fonds nous frustre tous —ils vont chercher un total d'environ 350 millions de dollars par le biais de cette sollicitation de fonds publics. Je les ai rencontrés et je leur en ai parlé. Et, ce qui est bizarre, c'est que ça leur coûte 48¢ par dollar recueilli, ce qui en fait le mode de cueillette de fonds le plus inefficace qu'on puisse imaginer. À moins d'offrir des programmes spéciaux aux gens, vous ne réussirez pas à les faire regarder ce que vous voulez qu'ils regardent. Or, vous devez financer ces programmes spéciaux, et donc vous voilà pris dans des coûts de programmation qui bondissent. D'où, à 48¢ par dollar recueilli, si vous suivez la proportion canadienne classique de un contre dix, cela donnerait donc à peu près 35 millions de fonds recueillis, pour un total net d'environ 18 millions. On n'ira évidemment pas loin avec ça.
En fait, on ne peut pas y arriver pour pas cher. Il faut se fixer comme objectif une politique publique, et c'est à vous, les parlementaires, de décider si vous voulez l'entretenir. D'après nous, vous devriez le faire, car nous croyons faire partie du tissu culturel de la nation et nous croyons que le public partage cette opinion.
(1115)
M. Roger Gallaway:
Mais alors, comment procède TVO?
M. Robert Rabinovitch:
Je n'en connais pas les détails, mais TVO fonctionne sur une base beaucoup plus modeste. Elle dépend pour l'essentiel d'une subvention gouvernementale. De plus, on a conçu sa collecte de fonds et le nombre de ses adhérents dans une optique tout à fait différente. Elle a reçu de l'argent, mais, d'après moi, on l'a mise sur pied avant tout pour constituer un groupe de pression qui devait défendre ses intérêts.
M. Roger Gallaway:
Au fond, un peu comme des amis.
Merci.
M. Clifford Lincoln:
Madame Lill.
Mme Wendy Lill:
L'une des modifications apportées à la Loi sur la radiodiffusion de 1991 visait à renforcer l'engagement de la Société envers les régions. L'une des choses que nous tentons de faire dans cette étude, c'est de mesurer le succès de cette Loi, de nous demander si elle atteint les objectifs qu'on lui avait fixés: satisfaire aux exigences de la fonction publique; renforcer les tissus culturel, politique et économique du Canada; refléter et servir les besoins particuliers des régions.
Vous avez beaucoup parlé de votre programmation nationale et de l'importance des grands spectacles. Lorsque vous êtes venus nous voir l'an dernier, vous en parliez déjà, et ça semble être votre centre d'intérêt.
Il n'en demeure pas moins que les gens se préoccupent du fait que R-C n'est plus présente dans les régions. C'est un fait; si vous parlez à n'importe quel diffuseur privé, il vous dira qu'il vous bat à plates coutures sur le plan des nouvelles et de la télévision matinale, et qu'on peut voir leurs installations mobiles à chaque événement important. Ils considèrent que ce sont eux les vrais instigateurs et les vrais porte-parole des régions. Voilà qui n'est pas normal. La fonction de la radiotélévision publique a toujours consisté à aider les Canadiens à se parler entre eux dans les régions.
J'aimerais bien avoir votre réaction à ce sujet. Je connais votre entêtement à ce sujet, mais croyez-vous que vous atteignez les objectifs que la Loi sur la radiodiffusion a fixés à R-C en ce qui a trait à l'expression régionale?
Mme Carole Taylor:
Permettez-moi d'intervenir, si vous le voulez bien, et de relever ce point en premier tout en laissant à Robert le soin de vous dire s'il est entêté ou pas.
Il est tout à fait clair dans mon esprit que CBC/R-C doit absolument appuyer et refléter les régions. Si nous ne le faisons pas ou si nous le faisons mal, notre existence même sera menacée. C'est aussi simple que ça.
Quand vous parlez de l'appui que nous recevons du Parlement, précisons qu'il nous vient en réalité des Canadiens de tout le pays, qu'ils vivent à la campagne ou en ville, qu'ils habitent au nord, à l'est ou à l'ouest; ce sont les contribuables dont les dollars servent à créer les programmes. Et, bien honnêtement, s'ils regardent la télé et n'y voient pas le reflet de leurs collectivités ou de leurs événements locaux, ils ne l'appuieront pas. Je n'ai aucun doute là-dessus.
Au début, quand on m'a confié cette charge mes principes et mes opinions concernant la radiotélévision publique étaient tellement évidents que j'ai passé toute une journée avec Robert, en tête à tête, pour examiner cette question à fond, car si un président et une directrice générale devaient avoir là-dessus des directions opposées, ça n'aurait évidemment pas favorisé R-C, ça nous aurait certainement causé du tort et ça aurait entraîné une relation improductive et même destructrice. À la fin de cette journée, j'étais convaincue que Robert appuyait ce point de vue autant que moi. Par le passé, on a eu des problèmes à rendre l'argent productif, mais, en ce qui concerne l'avenir, je vous garantis, en tant que DG, que dans cinq ans, vous ne ferez pas la même présentation que celle d'aujourd'hui. Vous vous rendrez compte que c'est différent, vous constaterez que nous reflétons davantage les régions.
J'aimerais ajouter autre chose. La notion de régional ne consiste pas uniquement à couvrir les nouvelles et les événements locaux bien que cela en fasse évidemment partie. Et dans ce domaine, nous n'avons pas à concurrencer les chaînes privées, nous pouvons plutôt offrir un service local de nature différente. Est-il vraiment nécessaire de suivre toutes les ambulances et de rendre compte de tous les crimes commis qui souvent aboutissent chez les diffuseurs privés? Je n'ai aucune objection qu'ils s'en chargent; ils savent très bien ce qu'ils doivent faire et ils s'en tirent également très bien. Mais, à la base de toute question d'intérêt local, se trouvent des idées qu'il faut discuter et examiner. Voilà donc à mes yeux le rôle que la radiotélévision publique de R-C devrait monter en épingle et se réserver, de sorte que si vous souhaitez porter un regard différent ou plus scrutateur sur ces questions régionales ou locales, c'est elle que vous choisiriez.
En outre, je suis absolument convaincue que, mettons, nous autres, résidents de Vancouver, voulons savoir ce qui se passe à St. John's, à Québec, en Saskatchewan ou partout ailleurs, et connaître les principaux acteurs qui y évoluent. Par conséquent, selon moi, refléter la région ne se limite pas à l'image personnelle mais bien à l'image nationale. Et il ne fait aucun doute que si vous examiniez nos statistiques—nous pourrions décortiquer quelques-uns de ces chiffres pour vous—vous constateriez l'augmentation tout à fait sensible des présentations et des points de vue régionaux par le biais des quatre infocapsules de tout le réseau de R-C.
Si vous regardez du côté des dramatiques télévisées, Random Passage vient de St John's et Tom Stone, de Calgary. Maintenant, j'ignore si plusieurs parmi vous ont eu l'occasion de regarder Jinnah, un projet pilote que nous venons de lancer. On y voit une chronique judiciaire indo-canadienne qui se déroule dans les rues de Vancouver—le marché et les temples punjabis. Voilà un spectacle au petit écran que les Canadiens n'ont jamais vu.
(1120)
Mme Wendy Lill:
Je voudrais intervenir très brièvement. Je suis bien d'accord avec vous et je suis heureuse d'apprendre que dans cinq ans je n'aurai pas à poser cette question, mais où se trouve actuellement l'engagement dont vous parlez? J'aimerais savoir comment vous comptez réintroduire des programmes qui se penchent sur les affaires publiques locales à St John's, Halifax, Toronto, partout au pays, et dont on entend parler régulièrement. Où est cet engagement?
Mme Carole Taylor
L'engagement est déjà effectif. Les 30 minutes quotidiennes qui se rattachent à
Canada Now—ou qui le précèdent, parce que c'est ainsi qu'ils en ont décidé sur place—en est une partie non négligeable. Par contre,
Country Canada, par exemple, que nous diffusons de St John's en fait aussi partie.
Je vous dirais donc que vous n'avez pas à attendre cinq ans pour constater du progrès. Je vous affirme que nous en faisons déjà beaucoup, et vous avez notre parole que nous allons poursuivre dans ce sens. Nous invitons donc les gens à revenir voir par eux-mêmes.
Le président:
Permettez-moi d'interrompre un instant pour enchaîner sur ce que vous avez dit au cours de votre exposé, M. Rabinovitch. Si je vous ai bien compris, vous avez déclaré que selon vous l'émission
Canada Now n'est pas encore un franc succès et que jusqu'ici elle n'a pas encore pris son envol. Je me rappelle de votre témoignage lorsque cette affaire a commencé. Vous disiez que, d'une certaine façon, c'est le comité qui, en fait, avait soulevé ce point parce qu'il y avait eu un tel tollé, venant surtout des provinces atlantiques. Du reste, les émotions de collègues de cette région demeurent encore vives. Je me souviens qu'à l'époque on parlait de cette dichotomie entre la radiotélévision régionale (qui fait partie de la Loi) et locale (qui, elle, n'en fait pas partie). Tout ce que nous avons entendu, au cours de notre tournée, c'est local, local, local. Ça revient continuellement.
Comment concilier les deux, et que ferez-vous de Canada Now si elle n'a pas encore décollé dans un, deux ou trois ans? On retourne au format local ou quoi? Ou alors, vous faut-il plus de fonds pour réintroduire ce qu'il y avait auparavant?
M. Robert Rabinovitch:
Voilà une question très importante mais dont la réponse n'est pas facile à trouver parce que nous devons d'abord donner à
Canada Now plus de temps pour se développer. Rappelons-nous qu'il s'agit là d'un programme tout à fait unique. Il est basé à Vancouver mais il est repris cinq fois. Différemment de l'autre programme national qui passe simultanément (et qui, lui, n'est diffusé qu'une seule fois), il est donc repris cinq fois et change d'une région à l'autre au fur et à mesure qu'on le rediffuse. En toute logique, ça devrait marcher, mais hélas, la logique, ce n'est pas ce qui détermine la part d'auditoire.
Selon un adage qui s'applique aux nouvelles locales: «Donnez-moi du sang et je vous donne la primeur.» Ce n'est pas notre philosophie, et de toute façon nous réussirions mal. Nous ne disposons pas d'assez de camions pour suivre tous les événements à la trace. Peut-être devrions-nous avoir un vrai débat sur le sujet suivant: quelle est la responsabilité exacte d'un organisme envers les nouvelles locales, quand il reçoit une licence locale, par opposition à une licence nationale? J'ignore la réponse, mais je sais qu'elle est constituée d'un grand nombre de facteurs.
Je sais également que Carole a tout à fait raison d'affirmer que nous devons refléter les régions dans nos programmes nationaux. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons ouvert d'autres bureaux de nouvelles dans tout le pays, ainsi que des «bureaux de poche», comme nous les appelons. Ceci nous permet d'obtenir davantage de nouvelles de tous les coins du pays. Cet ensemble, c'est ce que nous appelons le journal télévisé national. Si vous le regardez, vous verrez beaucoup plus qu'auparavant un nombre croissant de reportages en provenance de toutes sortes d'endroits. S'il y a un problème dans un hôpital de Toronto, vous le verrez, mais s'il y en a un à Saskatoon, nous aimerions vous le montrer également. Je pense donc que, si vous examinez l'organisation de nos journaux télévisés, vous constaterez que nous avons changé radicalement.
Nous avons également mis sur pied autre chose. Nous avons institué un fonds pour venir en aide aux écrivains et aux concepteurs en région. Nous leur avons consacré un million de dollars annuellement pour les aider à créer leurs scénarios pour leur permettre de les remettre ensuite aux différents réseaux et les créer, de telle sorte que leurs histoires aient du succès.
Random Passage illustre parfaitement ce point. Quand ses concepteurs arrivèrent à nos bureaux de Terre-Neuve et soumirent une idée pour cette émission, Ron Crocker, le directeur, à l'époque, l'examina et leur répondit: «D'accord, mais comment je la vends?» Puis il ajouta: «Tenez, voici 15 000 $. Trouvez-vous un scénariste qui vous bâtisse l'émission, puis nous pourrons la soumettre au réseau et enfin la monter.» Donc, Random Passage est un exemple classique. C'est une histoire à la fois terre-neuvienne et irlandaise, produite par une équipe canadienne-française et tournée par une compagnie canadienne-française. Voilà un cas à part, et c'est le genre de chose que nous ferons de plus en plus.
Vous trouverez le même genre de situation dans The Last Chapter. C'est un mélange d'anglais et de français, c'est particulier et c'est régional à sa façon. Ce n'est pas une histoire qui oppose Toronto et Montréal, c'est plutôt l'histoire d'une bande de motards qui veulent s'emparer de l'Ontario.
(1125)
M. Clifford Lincoln:
M. Rabinovitch, avant de céder la parole à M. McNally, d'après vous, devrions-nous amender la Loi pour établir une distinction entre le régional et le local dans le but d'éviter cette confusion?
M. Robert Rabinovitch:
Je crois que vous devez examiner la question très attentivement, mais, si vous ajoutez le local et non pas le régional... Quant à moi, la Loi actuelle me satisfait pleinement. Nous avons la lourde responsabilité de refléter la région et d'y produire des programmes, mais, comme le faisait remarquer Carole, le local ne se limite pas aux nouvelles locales. Il nous faut trouver différentes façons de remplir ce mandat. Vous souhaiterez probablement examiner ce point. Vous ne voudrez peut-être pas confier cette responsabilité à la radiotélévision publique.
Monsieur Tremblay.
M. Michel Tremblay:
Permettez-moi de revenir sur le point soulevé par Mme Lill au sujet de ce qui se passe actuellement. Je crois qu'on devrait arrêter de voir ce que la télévision fait pour une région ou un marché donné. Nous devons plutôt considérer la totalité de nos service —ce qu'on retrouve à la radio et sur internet—car nos sites régionaux sont très vastes. C'est la somme générale de ces activités qui témoigne vraiment de notre degré d'implication dans le milieu.
Ainsi, concernant nos réseaux de radio, je dirais que la plus grande partie de leur programmation provient de la région, ce que l'on a parfois tendance à oublier. Quant à nos services de télévision, nous devrions trouver puis occuper le meilleur créneau par rapport à ceux de nos concurrents. Laissons ce qui est purement local aux chaînes privées. Notre mandat est différent, et nos services radio et internet complètent fort bien ce que nous faisons. Ceci nous offrira alors un vrai aperçu de notre contribution à la région.
Le président: Monsieur McNally.
M. Grant McNally:
Merci, monsieur le président.
Je voudrais poursuivre votre discussion concernant les bâtiments et l'idée de peut-être les vendre et déménager ailleurs.
Je ne partage pas le point de vue de M. Mills. Si vous êtes pris avec une bâtisse des années 70, ça ne me paraît pas très raisonnable de la garder si elle vous empêche de devenir plus flexible, créatif et innovateur. Dans toute organisation à succès, une approche par équipe imposerait une telle décision et créerait une culture d'entreprise dont feraient partie des facteurs clés.
On en a vu des exemples. On a eu l'occasion de se rendre à ZTV et de voir ce qui s'y faisait. Cela semble très prometteur. C'est du reste le cas de Radio 3. Ce genre de chose se produit à petite échelle. Je pense que ce serait très positif si on en faisait autant.
Je voudrais vous poser une question au sujet d'une de vos recommandations, aux pages 40 et 41 de votre exposé le plus long, concernant le fait de se départir de propriétés. Au sommet de la p. 41, on lit le commentaire suivant: «... R-C devrait être autorisé à conserver le produit de toute cession de biens personnels sans restriction.» Que se passe-t-il actuellement? Si vous vouliez vendre l'édifice de Vancouver, qui se situe dans une zone immobilière de choix, le produit de la vente ne devrait-il pas nécessairement être versé à R-C? Le gouvernement utilisera-t-il cet argent ou ira-t-il aux recettes générales? Que se passerait-il exactement dans ce cas? Est-ce pour ça que cette recommandation est présentée?
(1130)
M. Robert Rabinovitch:
Je dois avouer que le gouvernement s'est montré tout à fait généreux et d'un grand soutien, et il nous a encouragés dans ce sens. Cependant, le gouvernement se réserve lui-même des droits. Dans leur optique, ça se défend tout de même un peu. Après tout, ces sommes, au départ, appartenaient à l'État; il se réserve donc le droit de se les réapproprier.
En termes un peu cyniques, nous dirions: Pourquoi supporter la souffrance si la récompense doit nous échapper?
Le gouvernement comprend la situation, il l'a acceptée et nous a encouragés en nous permettant de garder les fonds. En réalité, il a été vraiment raisonnable. Il ne nous oblige même pas à dépenser cet argent. Une règle gouvernementale veut qu'une somme doit être dépensée sinon elle est perdue. Ils ont été très corrects, dans ce sens qu'ils nous ont permis de reporter ces sommes d'une année à l'autre.
Voici un exemple qui nous a réellement avantagés: la vente, il y a à peu près deux ans, de Newsworld International et de Trio pour un montant de 75 millions de dollars. Nous avons fait un profit de 68 millions de dollars sur cette transaction. Et, par-dessus le marché, nous avons négocié une entente de production avec les nouveaux propriétaires de Newsworld International. En fait, nous leur fournissons des produits pour lesquels nous recevons annuellement 6 millions de dollars US.
Au cours de discussions avec le Conseil du Trésor, on nous a permis de mettre ces fonds sous séquestre, d'y puiser au besoin et de les faire fructifier. Nous demandons qu'on nous dégage un peu plus de telles entraves et de transformer ce cas exceptionnel en principe général.
Si nous gérons la Société et travaillons en toute efficacité, et qu'en plus nous sommes capables de rapporter de l'argent, nous n'allons tout de même pas verser un dividende aux actionnaires. Nous espérons que le dividende qui reviendra aux actionnaires se concrétisera par une programmation de qualité. Nous aurons les moyens de nous lancer dans la programmation hat de gamme. Par conséquent, nous demandons un allégement des contrôles.
M. Grant McNally:
Ça me paraît logique. C'est l'un des domaines gouvernementaux pour lequel, comme vous l'avez expliqué, la règle «Tu dépenses l'argent ou tu le perds» entraîne des dépenses fort peu judicieuses ou bien qui se défendraient uniquement si on considère le long terme. Il faudrait plutôt épargner un peu d'argent pour enrichir les contenus ou faire autre chose. Vous nous dites que, dans le contexte actuel, cet état de fait vous limite.
M. Robert Rabinovitch:
C'est déjà arrivé, mais pas durant notre mandat et pas pendant que nous tentions très fort de susciter des fonds de l'intérieur.
M. Grant McNally:
Si, sur la recommandation du comité, le gouvernement procédait à ce changement, cela vous donnerait-il plus de flexibilité pour atteindre vos buts?
Mme Carole Taylor:
Il vous faut la permission du Conseil du Trésor pour y parvenir. C'est tout.
M. Grant McNally:
D'accord.
Merci.
[Français]
Je vais passer la parole à mon collègue qui se dit du Québec profond, monsieur St-Julien.
M. Guy St-Julien (Abitibi--Baie-James--Nunavik, Lib.):
Merci, monsieur le président.
C'est vrai que je représente ici le Québec profond, mais surtout la plus grande région des 10 provinces du Canada, Abitibi--Baie-James--Nunavik. Nos amis, les Inuits du Nunavik et les Cris du territoire de la Baie-James, de même que la population non autochtone font partie de ma circonscription.
En passant, je suis un amateur de la radio et de la télévision de Radio-Canada et j'apprécie que vous ayez ouvert un poste régional à Rouyn-Noranda. Ce poste est vraiment fantastique. Je suis amateur de RDI parce qu'il met en ondes d'excellents journalistes compétents dont Daniel Lessard, qu'on connaît très bien ici, est un bon exemple.
Parlons donc de Radio-Canada; vous avez Radio-Canada International, puis le service du Nord, CBC North. Je ne trouve pas drôle ce qui se passe actuellement; du point de vue politique, cela me brûle même si je suis capable de m'en sortir.
J'ai vérifié, en particulier, la situation des annonceurs-réalisateurs. Vous avez, à Radio-Canada International et au service du Nord, des annonceurs qui sont aussi réalisateurs. J'ai examiné leur échelle syndicale des salaires. Vous avez actuellement une convention, qui date de 1998 je pense, avec un ancien syndicat. Or, du côté du service nordique, les autochtones, les Inuits, les Cris et les non-autochtones ne touchent pas les mêmes salaires que les employés de Radio-Canada International et cela, à l'intérieur de la même boîte. L'échelle des salaires comporte une différence de 4 000 $ et plus actuellement. Je trouve que c'est pénible pour vos employés. Pourquoi cette différence-là, s'ils font le même travail et occupent un emploi similaire?
J'en arrive à ma deuxième question. J'espère que tout va très bien à Radio-Canada depuis que vous avez décrété qu'à travail égal, les femmes touchaient un salaire égal. On croit à ce principe. J'espère toutefois que vous allez aussi vérifier la différence de traitement qui existe entre les Inuits et les Cris et les employés de Radio-Canada International. Ce que je vous demande, c'est quand vous allez remédier à cette situation, cette année.
(1135)
M. Robert Rabinovitch:
Premièrement, je dois dire qu'il est difficile pour moi de discuter de ce sujet étant donné que nous sommes actuellement à négocier avec ces employés. Je dois donc m'en tenir à des propos généraux.
Comme vous le savez, notre service du Nord est très important. Il diffuse en huit langues autochtones. C'est un service précieux pour le Nord. Sans le service du Nord, on... Tout ce dont on a pu discuter sur les services en région s'applique au Nord.
Quant à Radio-Canada International, c'est un service assez différent. Il n'était pas vraiment intégré à Radio-Canada. C'était un service qu'on rendait au gouvernement à titre de contractuel. Alors, il est bien possible--je ne suis pas certain que ce soit exactement le cas--que ces personnes soient employées depuis longtemps et relèvent d'une échelle différente. Je ne connais pas exactement la situation, mais je sais que Radio-Canada International fonctionnait toujours indépendamment de Radio-Canada. Actuellement, nous sommes en train de l'intégrer à la société, ce qui veut dire qu'on va s'assurer que les salaires et les avantages soient les mêmes. C'est ainsi que ce sera organisé.
Cependant, je vais vérifier ce qu'il en est exactement de ce que vous dites.
M. Guy St-Julien:
Je vous remercie et vous dirai en terminant que j'apprécie vraiment que vous soyez en négociations. Il ne faudrait pas, à l'avenir, qu'il subsiste une grande différence pour les autochtones, à l'intérieur du même poste, que ce soit à Radio-Canada International ou au service nordique.
On va y veiller de près dans les prochains jours, monsieur Rabinovitch et madame Taylor. Je tiens à vous dire que je suis un ancien président de syndicat, celui des Métallos unis d'Amérique et que je crois à l'égalité, au principe voulant qu'à travail égal, on ait un salaire égal, tant pour la femme que pour les autochtones.
Merci beaucoup.
[Traduction]
Monsieur Abbott.
J'ai eu des conversations privées avec Mme Taylor et M. Rabinovitch, mais, pour que les choses soient claires, sur la base de renseignements sérieux que nous avons obtenus, l'Alliance canadienne croit qu'il existe un large appui pour R-C Radio 1, les réseaux tant français qu'anglais. Nous ne contestons absolument pas R-C Radio 1, à l'exception des points que j'ai soulevés au début.
Il me semble que, pendant qu'elle étudie la question, la direction doit être très prudente. Elle devrait examiner la courbe démographique de leurs auditeurs pour éviter de briser quelque chose qui fonctionne bien actuellement. De plus, nous appuyons à fond Newsworld et RDI parce que, une fois encore, ils rendent un service qui ne serait tout simplement pas facilement disponible de la part d'un diffuseur privé. En outre, d'après votre résultat net, ils ne coûtent absolument rien en bout de ligne. Je crois que ces deux services combinés rapportent environ 25 millions de dollars au résultat net, si je comprends bien vos chiffres que nous examinerons plus tard, j'espère.
Par contre, nous remettons en question les coûts de Radio 2, car nous pensons qu'il existe suffisamment de modèles, dans le monde anglophone du moins, qui montrent que les programmes de Radio 2 pourraient être probablement indépendants sous l'angle commercial.
Ceci dit, Radio Canada International est récemment passé sous le contrôle direct de R-C. Je crois que ce serait important que ce comité, si je peux me permettre de le demander, obtienne une explication simple—peut-être par écrit—précisant comment R-C voit RCI dans son champ d'action. J'ai l'impression que lorsque nous diffusons uniquement des programmes de radio nationaux, nous maintenons dans l'ignorance, par le fait même, une grande partie de notre auditoire international potentiel. Ils ne peuvent pas comprendre qui ou quoi pourrait bien être Stockwell Day ou autre chose du genre. Vous voyez ce que je veux dire: nous avons à la radio de R-C beaucoup de contenu qui est parfaitement compréhensible pour l'auditoire national, et je doute fort qu'avec la prise de contrôle de Radio Canada International par R-C vous soyez toujours en mesure de rendre le précieux service que RCI pourrait fournir.
Je vais terminer par une question. Considérons deux programmes: Da Vinci et Cold Squad. Ils sont du même genre. À quelques jurons près, on ne saurait les différencier. L'un est diffusé par R-C, l'autre par CTV. Je suppose que leurs coûts de production sont les mêmes, et je ne crois pas qu'on puisse les réduire. Ceci me ramène à la question que j'ai ressassée toute la journée: Quelle différence y a-t-il si on diffuse Da Vinci sur R-C, CTV, CHUM ou ailleurs? Même question pour Cold Squad? Concrètement, c'est quoi la différence? Dans l'optique où vous regardez ces programmes, à propos desquels vous dites: «Mais, on y voit Vancouver» ou quelque chose du genre—d'autres programmes ont montré Toronto ou Hamilton—quelle est la différence par rapport au canal qui le diffuse? Ces programmes coûtent un demi-milliard de dollars en subventions, ils sont disponibles sur les ondes et ils sont parfaitement agréables—bien que West Wing puisse les battre, je ne sais pas. Cependant, ils sont tout à fait agréables. Quelle est la différence si ces programmes occupent du temps d'antenne sur R-C?
(1140)
M. Robert Rabinovitch:
Vous avez soulevé plusieurs points que j'aimerais éclaircir pour vous, et j'ai l'impression qu'on va les aborder, surtout Radio 2 qui, à mon sens, constitue un service tout à fait différent qu'on ne pourrait pas retrouver dans le secteur privé.
On devrait également parler de RCI, et notamment pour savoir si elle a pour mandat de s'adresser aux Canadiens vivant à l'étranger ou aux étrangers à propos du Canada. Voilà deux mandats radicalement différents. La ligne de conduite que nous avons reçue du gouvernement à ce sujet n'est pas très claire et elle varie; raison de plus pour en débattre.
En outre, en considérant les modifications du milieu ambiant, et le fait, par exemple, que BBC abandonne les ondes courtes dans plusieurs villes et adopte la bande FM, on ne devrait pas, encore une fois, se laisser piéger par des modèles passés. On doit plutôt choisir pour l'avenir la formule la plus adéquate. Et donc, il est tout à fait légitime de démêler tous ces domaines et de les considérer ouverts à la discussion, et c'est précisément ce que nous devrions faire.
La situation que vous soulevez dans votre question est légitime elle aussi. R-C ne devrait pas être le seul télédiffuseur qui produise du contenu canadien. Mais, constatons que Cold Squad est le seul programme qu'on produit et qu'on diffuse à l'heure de grande écoute—je me demande même si c'est effectivement une heure de grande écoute.
Une voix: C'est le samedi soir.
M. Robert Rabinovitch: C'est donc un programme du samedi soir. Pourquoi? Parce qu'il n'y a aucun produit de remplacement à cette heure-là. Le problème, c'est qu'on ne montre pas le contenu canadien quand les Canadiens regardent la télé; il apparaît plutôt dans d'autres programmes. Mais, si on n'arrive pas à les vendre à l'étranger, ils disparaissent.
Da Vinci's Inquest est une émission sombre. J'ai demandé à des gens pourquoi on n'avait pas réussi à la vendre aux États-Unis. On m'a répondu qu'elle est trop sévère pour la télévision américain. Elle est unique en son genre; elle est différente de Cold Squad. Quand des acheteurs américains la regardent, ils disent que leurs auditoires n'aiment pas ce genre. Je dois vous dire que l'auditoire canadien l'aime effectivement, mais jusqu'à un certain point. Cette émission n'atteindra pas le chiffre de 2 millions d'auditeurs, mais elle va en chercher facilement 800 000. Ce programme a été conçu précisément pour le marché canadien. Si vous en regardez d'autres à contenu canadien, ils sont conçus pour le marché de l'exportation en bout de piste, sinon ils ne durent pas.
C'est pourquoi, quand vous assistez aux Gemini Awards, c'est une vraie farce parce que ce que vous constatez qu'on accorde des prix à des programmes qui ont été annulés tout simplement parce qu'on n'a pas réussi à les vendre à l'étranger. On ne crée pas nos spectacles dans le but de les vendre à l'étranger, mais plutôt de servir les auditoires canadiens.
(1145)
Mme Carole Taylor: Monsieur le président...
Le président: Oui, madame Taylor.
Mme Carole Taylor:
Vous avez soulevé le cas de RCI. Or, puisque cette question concerne en partie notre CA, je voudrais déclarer officiellement qu'avant ma nomination au CA, ce dernier avait déjà passé deux requêtes en vue de la dissolution de RCI. Pendant mon mandat, j'ai eu des discussions assez approfondies avec les cadres supérieurs concernant ce que RCI est, pourrait être et devrait être. Le CA en a conclu qu'en réalité RCI constituait un service précieux. Voici donc un changement par rapport aux directions antérieures. Ce faisant, nous avons décidé de l'intégrer davantage dans nos autres services, ce qui ne forme qu'une partie de notre stratégie globale. Nous pensions également que nous pourrions les appuyer dans ce qu'ils avaient l'intention de faire. En d'autres termes, plutôt que de toujours traiter RCI en orpheline, nous l'avons adoptée et accueillie au foyer.
J'ajouterai que vu l'efficacité de cette formule et l'appui qu'on leur apportait, ils ont réussi à rediffuser leurs programmes de fin de semaine qu'ils avaient réduits faute de fonds disponibles, et à ajouter deux langues, le russe et l'arabe, à cause de la situation internationale.
Et donc, mon impression, du moins en tant que membre du CA, c'est que notre décision était la bonne. Je crois que nous avons là une atmosphère d'appui qui fera naître à l'avenir un meilleur produit.
Le président:
Monsieur Tremblay.
M. Michel Tremblay:
Monsieur Abbott, tout d'abord, nous apprécions l'appui de l'Alliance pour Newsworld et RDI. Je voudrais simplement clarifier un point. Ces services ne dépendent pas du tout des autorisations. Leurs fonds proviennent uniquement des tarifs d'abonnement et de la publicité. Si je vous ai bien compris, vous avez parlé d'un surplus de 25 millions de dollars, ce qui n'est pas le cas. En règle générale, ces services fonctionnent sur la base du seuil de rentabilité, et ils peuvent entraîner un très léger surplus.
Je voudrais ajouter une autre remarque, encore plus importante. En fin de compte, pour rentrer dans leurs frais, ces budgets distincts ne sont conçus ou destinés qu'à couvrir les coûts marginaux. Ces services ne pourraient survivre sans la salle de nouvelles principale du réseau de télévision français ou anglais.
Le président:
Je regarde l'horloge et je m'aperçois qu'il ne nous reste que 12 minutes. J'ai trois demandes de questions, ce qui laisse quatre minutes pour les réponses et les questions de chacun des trois intervenants suivants. Alors, veuillez en tenir compte.
[Français]
Mme Christiane Gagnon:
C'est la teneur de mes questions et non pas la longueur de celles-ci que vous n'appréciez pas.
Des voix: Ah, ah!
Mme Christiane Gagnon: Je vous ai dit plus tôt que j'avais un peu de difficulté à saisir, de par votre programmation, si vous étiez vraiment des télédiffuseurs publics. Je vois aussi, à la page 44 du document, à la section qui porte sur la gestion et la vision de Radio-Canada, que vous voulez faire entrer à votre conseil d'administration des gens qui proviennent du secteur privé de la radiodiffusion, des distributeurs, des producteurs privés pour tirer parti de leur expérience. Vous dites qu'il s'agit de mentalités différentes, mais que vous voulez tout de même les avoir au sein de votre conseil d'administration.
Je pense qu'il y a peut-être là deux façons de regarder ce que devrait être une télévision. Je trouve un petit peu curieux qu'à titre de dirigeante à Radio-Canada, vous demandiez de faire entrer au sein de votre conseil d'administration des gens qui viennent du secteur privé. Vous dites que le secteur privé a une certaine mentalité, qu'il fait bien ce qu'il a à faire, et que Radio-Canada fait autre chose. Vous avez au sein de votre conseil d'administration des gens qui dirigent, qui donnent une orientation à votre boîte, qui est teintée de leur mentalité, de leurs valeurs et de leur culture. N'avez-vous pas l'impression que, si cette recommandation-là était approuvée, cela viendrait changer la mission et le mandat de Radio-Canada?
(1150)
[Traduction]
Mme Carole Taylor:
Si je peux me permettre, j'en profite pour en poser une puisqu'il s'agit d'une question du gouvernement.
La situation actuelle est manifestement trop restrictive. Alors, nous pensions qu'il serait utile, par exemple, d'avoir un rédacteur à la table du CA, peut-être quelqu'un qui, comme l'a suggéré Mme Lill, a déjà été ou est encore impliqué, d'une certaine façon, dans la radiodiffusion. Ceci est actuellement défendu. Prenez la BBC... Je parlais avec quelqu'un qui siégeait à leur CA, et ils discutaient de l'ensemble des compétences qui étaient réunies autour de la table. De nos jours, un CA efficace doit évidemment comporter toute une panoplie de gens compétents, y compris au plan financier, car il doit s'assurer que son comité de vérification fonctionne normalement et qu'il est capable de fournir un rapport au Vérificateur général.
Nous pensions également que la restriction voulant que toute personne qui fait partie de la radiodiffusion ne puisse devenir membre d'un CA est beaucoup trop limitative. Des lignes directrices précises concernant les conflits d'intérêt établiront que quelqu'un ne pourra pas siéger au CA ou participer à toute discussion si elle recoupait ses champs d'action. En règle générale, il ne faudrait pas affirmer que quiconque fait de la radiodiffusion n'a pas le droit de siéger au CA.
[Français]
Le président:
Madame Gagnon, il vous reste encore un peu de temps pour poser une autre question brève.
Mme Christiane Gagnon:
Encore? Je m'étais comme fermée. Je n'en ai pas préparé d'autres. Je vais laisser la chance à ma collègue de poser une autre question.
[Traduction]
Le président:
Madame Lill.
Le défi de l'étude est de déterminer comment protéger la diversité culturelle en pleine période de compression... Nous avons quelques organismes média qui contrôlent ce que nous voyons à l'écran de nos jours, par conséquent, je veux vous poser une question sur la concentration des médias et également sur la propriété étrangère, parce que nous avons entendu divers secteurs dire qu'il faut soulever la question des restrictions de la propriété étrangère dans la radiodiffusion. J'aimerais savoir quelle est d'après vous la position de Radio-Canada dans ce nouveau contexte de réduction de la propriété étrangère et multi-média et quelles sont d'après vous les menaces constituées par toute sorte de changement des restrictions de propriété étrangère.
M. Robert Rabinovitch:
C'est intéressant que vous me posiez cette question. Je donnais des conférences à Harvard pour Kennedy School et à ce que nous appelons les boursiers Neiman la semaine dernière. La question qu'il voulait me poser plus que toute autre portait sur la concentration canadienne. Les règles sur la concentration du Conseil fédéral des communications ont tout juste été rejetées par les tribunaux. Ils interjetteront peut-être un pourvoi devant la Cour Suprême, étant donné l'orientation politique du Conseil fédéral des communications. Il observe une période de concentration qui se développe rapidement aux États-Unis, et ils disent essentiellement qu'ils ne veulent pas répéter les erreurs du Canada. Ils ont étudié notre région. Ils ont observé des villes comme Vancouver. Je pense que c'est une région que le comité ne doit pas omettre d'examiner si vous avez l'occasion d'observer ce qui passe et ce que signifie ce type de concentration.
Du point de vue de Radio-Canada... il n'y aura pas de propriété étrangère à Radio-Canada. Je pense que notre rôle et notre responsabilité dans ce domaine sont encore plus important, parce que nous sommes une source d'informations autonomes et nous devons continuer à présenter les actualités au public. Les actualités peuvent également être subjectives, comme vous le savez, et il est important d'analyser du point de vue d'une autre source d'informations. Notre rôle devient encore plus important et nous devons le rehausser. Nous devons également faire encore plus attention en ce qui concerne la manière dont nous présentons les actualités, parce que les automatismes régulateurs n'existent peut-être pas dans le système.
Le président:
M. McNally.
Je souhaite approfondir ce que vous avez dit sur la possibilité de vendre vos programmes aux autres marchés, et bien que vous ne créez pas intentionnellement certaines émissions dans cet état d'esprit, cela peut se produire. La possibilité dans ce cas est que, dans d'autres régions du monde et sur d'autres marchés, les gens puissent juger qu'une production de Radio-Canada est très populaire. Nous n'avons simplement aucun moyen de le savoir.
Comment obtenez-vous le potentiel marketing en recherchant ces auditoires? Vous avez mentionné les 48 cents pour générer un dollar avec le modèle PBS. La recherche de ces nouveaux marchés entraînera évidemment des frais. Quel est le plan ou la stratégie dans ce domaine--simplement un petit volet?
M. Robert Rabinovitch:
J'aurais dû faire plus attention à ce que j'ai dit avant. J'ai dit est que beaucoup d'émissions qui sont produites dans le secteur privé ne durent pas si elles ne sont pas vendues à l'étranger. Ce n'est pas le cas pour nous: les émissions peuvent durer, si elles sont bonnes, sans être vendues à l'étranger. Cela ne veut pas dire que nous n'essayons pas de vendre les émissions à l'échelle internationale. Nous avons un bureau important dont le travail est de vendre les émissions à l'échelle internationale--de commercialiser nos émissions--avec une succursale à Londres. Nous assistons et collaborons aux conférences internationales comme tout le monde. Nous concluons des ventes.
L'autre chose que nous faisons, qui est très importante, et nous espérons le faire de plus en plus, est deux types d'entente. Nous concluons des ententes de coproduction avec d'autres organismes. Nous en réalisons deux très importantes qui seront diffusées l'an prochain sans doute, avec ITN, je crois, et peut-être une avec la BBC. Nous négocions par le biais de ce que vous pourriez appeler des contreparties--j'achète votre émission si vous achetez la mienne--parce que parfois, les gens ne peuvent pas se permettre de l'acheter, mais ils ont les émissions que nous aimons et nous avons les émissions qu'ils aiment.
Nous prêtons beaucoup d'attention à atteindre le plus d'exposition et d'argent possible de nos ventes d'émission en ayant recours aux divers moyens, ou coproductions, possibles. Je voulais simplement dire que ce n'est pas la première ou la principale priorité. De plus, elle ne prédomine pas, par conséquent, la prise de décisions concernant les acteurs, le scénario ou le tournage dans une ville que vous ne pouvez pas différencier du reste des États-Unis.
(1155)
Le président:
Monsieur Rabinovitch, puis-je vous poser deux dernières questions avant de lever la séance?
Le premier point, pour approfondir ce que disait Mme Lill, est la propriété étrangère. Nous avons entendu le témoignage de l’Association canadienne de télévision par câble, d'une part, selon laquelle nous devrions rehausser la propriété étrangère au niveau de l'infrastructure et garder notre contenu canadien dans les compagnies canadiennes. La question a été posée plusieurs fois, pouvez-vous séparer les deux? Ne s'influencent-ils pas mutuellement?
AOL-Time Warner comparaissait devant le comité mardi. Je leur ai demandé, si vous aviez la sélection optimale, voudriez-vous rehausser la propriété étrangère au niveau tant de l'infrastructure que du contenu? Ils ont répondu: quel serait votre choix?
Pourriez-vous nous dire que sont, d'après vous, l'interdépendance de l'infrastructure et le contenu? Ces deux aspects peuvent-ils vraiment être séparés afin que la propriété étrangère de l'un n'affecte pas l'autre?
M. Robert Rabinovitch:
Je dois commencer mes remarques en disant que ce n'est pas la position de Radio-Canada. Nous n'avons pas de position précise à cet égard. Il s'agit de mon opinion personnelle en qualité d'observateur de la scène. En fait, j'ai prononcé un discours sur ce sujet et c'est donc officiel.
Je pense qu'il existe deux types de convergence: la convergence du contenu et la convergence du matériel. La convergence du matériel est en cours et nous croyons qu'il est de même pour la convergence du contenu. Cependant, les deux vont-elles de pair? Je pense qu'il reste encore à prouver que le contrôle du matériel vous permettra en fait de mieux contrôler le contenu et vice-versa.
Je pense qu'AOL-Time Warner en est un exemple classique. AOL-Time Warner ne diffusera-t-il pas un film cinématographique sur ses systèmes parce qu'il a été produit par Universal? Bien sûr que non. Ils diffuseront n'importe quel film produit par n'importe qui et ils commercialiseront n'importe quel film produit par n'importe qui. Ont-ils mieux réussi à vendre Harry Potter parce qu'ils disposent d'un nombre beaucoup plus élevé de débouchés et de moyens d'y arriver? Il n'existe pas de preuves qu'ils y ont effectivement mieux réussi.
Par conséquent, je pense qu'il n'est pas encore prouvé que la convergence entre la technologie et le contenu est réelle et financièrement viable. Cependant, comme vous le savez, nous avons des compagnies dans ce pays--trois au moins--qui ont fortement misé sur cela. Ils parient l'argent des actionnaires et ils pensent que c'est logique. Nous devons attendre et voir ce qui se passe.
Je pense que c'est effectivement un rôle bien réel et je pense que nous le prouvons, entre la radio et la télévision, entre le français et l'anglais, ce qui implique que nous devrions considérer de nouveaux systèmes de gestion du contenu.
Le président:
Voilà une dernière question pour approfondir la référence à votre discours à Harvard.
Si la tendance se poursuit au Canada, pourriez-vous concevoir que, dans dix, cinq ou vingt-cinq ans, les radiodiffuseurs privés qui sont maintenant regroupés en conglomérats--trois ou quatre d'entre eux--deviendront peut-être un ou deux, ou juste un seul, et il y aura alors un grand radiodiffuseur privé et un grand radiodiffuseur public? Cela justifie-t-il également encore davantage la présence d'un radiodiffuseur public?
M. Robert Rabinovitch:
Je suppose que si vous considérez uniquement le point de vue de Radio-Canada, je dirais oui, cela justifie encore davantage la présence d'un radiodiffuseur public. Cependant, j'ai un gros problème avec l'orientation que vous prenez. Je pense que ce serait une grave erreur de restreindre les systèmes divergents offerts aux Canadiens par le biais de la propriété.
(1200)
Le président:
Monsieur Abbott veut poser une brève question.
M. Jim Abbott:
Juste une dernière question. Maintenant que nous avons la biographie finale de Pierre Elliott Trudeau qui sera diffusée sous peu par Radio-Canada, combien de temps devrons-nous attendre avant de pouvoir voir celle de Brian Mulroney?
Des voix: Oh, oh.
Le président:
Nous aurons peut-être celle de Preston Manning ou de Stockwell Day.
Monsieur Gallaway m'a demandé de pouvoir poser une brève question avant que nous ne levions la séance.
M. Roger Gallaway:
Je voulais simplement soulever une question.
Madame Taylor, vous avez mentionné le terme «chasseur d'ambulances» pour parler des actualités. Je vis dans une région à forte densité de population au Canada, le sud-ouest de l'Ontario. Toute la question des chasseurs d'ambulance par opposition aux actualités régionales... Je sais que l'auditoire des actualités régionales de Radio-Canada est pathétique dans la région où je vis. Je dirais que pour ce qui est du personnel des actualités de Radio-Canada dans la région, ils sont probablement protégés par une loi sur les espèces en péril. Il n'y en a aucun. Cependant, CTV est présent partout. Ils couvrent toute la région; ils ont des gens au travail.
Quand les actualités locales se sont-elles des actualités régionales? Quand les actualités locales deviennent-elles... Qu'est qu'une région? C'est la question que je vous pose.
J'ai pris le temps de regarder les actualités régionales de Radio-Canada pour Windsor récemment et j'ai beaucoup appris sur certains événements dans une maison de soins infirmiers de cette région. Je ne sais pas en quoi cela constituait une actualité régionale. Je ne sais pas très bien comment vous définissez ce qu'est une région et ce que sont les actualités régionales, plutôt que la chasse aux ambulances locales.
Mme Carole Taylor:
Je devrais commencer par dire que je ne suis pas une initiée des actualités de Radio-Canada. Je pense qu'une de mes valeurs sera d'essayer de préserver mon sens de la présence dans la communauté et de transmettre cette perspective. Je ne m'immisce pas vraiment dans la discussion sur la différence entre local et régional. Je pense qu'il s'agit en quelque sorte de jouer avec les mots. Je sais simplement qu'en tant que téléspectatrice ou auditrice, peu importe où je suis, je veux entendre les informations qui signifient quelque chose pour moi, que vous les appeliez locales ou régionales, et je veux également avoir la perspective nationale. Ce n'est pas un argument auquel je pense beaucoup ou sur lequel je m'attarde. Je veux que les choses soient bien faites.
Pour ce qui est de nos téléspectateurs, la question des compressions au cours de ces dernières années nous a sans aucun doute affecté sur le terrain. Les compressions se sont faites ressentir à ce niveau. Étant donné que nous n'avions pas beaucoup de camions ou de reporters sur le terrain pour couvrir les événements, les collectivités l'ont ressenti et étaient très en colère. Nous rebâtissons notre réseau peu à peu. Si quelqu'un pense qu'il est possible de le faire rapidement, ce n'est pas le cas. Lorsque ce type de rapport ou de confiance est détruit, il faut beaucoup de temps pour le rebâtir. Par conséquent, c'est le processus que nous suivons à l'heure actuelle.
Je suis absolument convaincue que nous avons un rôle à jouer qui est différent des radiodiffuseurs privés et nous sommes déterminés à réussir.
Le président:
Sur ces mots, je pense que nous lèverons la séance. Nous avons dépassé le temps imparti, ce qui est significatif.
Votre témoignage a été très instructif et très stimulant pour nous tous. Nous apprécions votre présence devant le comité. Merci beaucoup d'être venue.
Mme Carole Taylor: Merci, monsieur le président.
Le président: La séance est levée.