HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 11 avril 2002
¿ | 0905 |
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)) |
M. David McLennan (président-directeur général, Bell ExpressVu) |
¿ | 0910 |
M. Chris Frank (vice-président, Programmation et affaires réglementaires, Bell ExpressVu) |
¿ | 0915 |
M. Ian Gavaghan (vice-président, avocat général, Bell Express Vu) |
¿ | 0920 |
M. David McLennan |
Le président |
M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne) |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
¿ | 0925 |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
¿ | 0930 |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Ian Gavaghan |
M. Jim Abbott |
M. Ian Gavaghan |
M. Jim Abbott |
M. Ian Gavaghan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
Le président |
M. David McLennan |
M. Ian Gavaghan |
Le président |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
M. David McLennan |
¿ | 0935 |
Mme Christiane Gagnon |
M. Ian Gavaghan |
Mme Christiane Gagnon |
Le président |
Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.) |
M. David McLennan |
Mme Sarmite Bulte |
M. Ian Gavaghan |
Mme Sarmite Bulte |
M. Ian Gavaghan |
Mme Sarmite Bulte |
M. David McLennan |
¿ | 0940 |
Mme Sarmite Bulte |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
Mme Sarmite Bulte |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
Mme Sarmite Bulte |
M. Chris Frank |
Mme Sarmite Bulte |
Le président |
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.) |
¿ | 0945 |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
M. Tony Tirabassi |
Le président |
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD) |
¿ | 0950 |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
Mme Wendy Lill |
¿ | 0955 |
M. Chris Frank |
Le président |
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or--Cape Breton, Lib.) |
M. David McLennan |
M. Ian Gavaghan |
M. David McLennan |
M. Rodger Cuzner |
M. David McLennan |
À | 1000 |
M. Rodger Cuzner |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
Le président |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
À | 1005 |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Jim Abbott |
M. David McLennan |
M. Ian Gavaghan |
M. Chris Frank |
À | 1010 |
Le président |
Mme Gagnon |
Le président |
M. Roger Gallaway (Sarnia--Lambton, Lib.) |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
À | 1015 |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Ian Gavaghan |
M. Roger Gallaway |
M. David McLennan |
M. Roger Gallaway |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
M. David McLennan |
Mme Christiane Gagnon |
Le président |
M. David McLennan |
M. Chris Frank |
À | 1020 |
M. Clifford Lincoln |
M. Chris Frank |
Le président |
M. David McLennan |
Le président |
Paul Bush (vice-président, développement corporatif, Télésat Canada) |
À | 1025 |
À | 1030 |
À | 1035 |
Le président |
M. Jim Abbott |
À | 1040 |
M. Paul Bush |
M. Jim Abbott |
M. Paul Bush |
M. Jim Abbott |
M. Paul Bush |
M. Jim Abbott |
M. Paul Bush |
M. Jim Abbott |
M. Paul Bush |
M. Jim Abbott |
M. Paul Bush |
À | 1045 |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
M. Paul Bush |
M. Bob Power (directeur, Affaires réglementaires, Télésat Canada) |
Mme Christiane Gagnon |
M. Paul Bush |
À | 1050 |
Mme Christiane Gagnon |
M. Paul Bush |
Le président |
M. Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
À | 1055 |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
M. Paul Bush |
M. John Harvard |
Le président |
Mme Wendy Lill |
Á | 1100 |
M. Paul Bush |
Mme Wendy Lill |
M. Paul Bush |
Le président |
Á | 1105 |
M. Paul Bush |
Le président |
M. Paul Bush |
Le président |
M. Paul Bush |
Le président |
Lise Lareau (présidente, Guild canadienne des médias) |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
M. Arnold Amber (directeur, Newspaper Guild of Canada) |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
Le président |
Mme Lise Lareau |
Le président |
Mme Lise Lareau |
Le président |
Mme Lise Lareau |
Le président |
M. Jim Abbott |
Á | 1140 |
Mme Lise Lareau |
M. Jim Abbott |
Á | 1145 |
Mme Lise Lareau |
M. Jim Abbott |
Mme Lise Lareau |
M. Arnold Amber |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
Á | 1150 |
Mme Lise Lareau |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
Mme Lise Lareau |
Á | 1155 |
Le président |
M. Arnold Amber |
Le président |
M. John Harvard |
 | 1200 |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Mme Lise Lareau |
M. John Harvard |
Le président |
Mme Sarmite Bulte |
 | 1205 |
M. Arnold Amber |
Mme Sarmite Bulte |
M. Arnold Amber |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Lise Lareau |
 | 1210 |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Lise Lareau |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Lise Lareau |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Lise Lareau |
Mme Sarmite Bulte |
Le président |
Mme Wendy Lill |
 | 1215 |
M. Arnold Amber |
Le président |
M. Rodger Cuzner |
Mme Lise Lareau |
M. Rodger Cuzner |
M. Arnold Amber |
 | 1220 |
Le président |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Lise Lareau |
Le président |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 11 avril 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Bonjour. Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien,
[Français]
qui poursuit aujourd'hui son étude de l'état du système de radiodiffusion canadien.
[Traduction]
Pour débuter nos audiences aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de Bell ExpressVu, M. David McLennan, président; M. Chris Frank, vice-président à la programmation et aux affaires réglementaires; et M. Ian Gavaghan, vice-président et avocat général.
Vous avez la parole, monsieur McLennan. Nous vous accordons quinze à vingt minutes pour nous faire votre exposé, afin que les membres du comité aient le temps de vous poser des questions.
M. David McLennan (président-directeur général, Bell ExpressVu): M. David McLennan (président et directeur-général, Bell ExpressVu)Merci beaucoup.
Bonjour à tous. Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci d'avoir invité Bell ExpressVu à vous adresser la parole aujourd'hui.
Je m'appelle David McLennan. Je représente ici aujourd'hui un des deux fournisseurs autorisés de services de radiodiffusion directe ou SRD. Je vais donc vous parler en fait du rôle que les SRD ont joué et jouent aujourd'hui dans le secteur de la radiodiffusion au Canada, et je me concentrerai plus particulièrement sur nos réalisations du point de vue tant des avantages pour les clients, autrement dit de l'intérêt public général, que des avantages pour le système de radiodiffusion dans son ensemble. Je prendrai aussi quelques minutes pour vous expliquer certains des défis que notre industrie doit relever, après quoi je conclurai par des observations et des recommandations concrètes relativement à certains problèmes qui doivent être corrigés.
Du point de vue de l'intérêt public, la stratégie gouvernementale visant à stimuler la concurrence donne à mon avis d'excellents résultats, surtout parmi les entreprises canadiennes de distribution de radiodiffusion. La radiodiffusion directe constitue une solution de rechange très valable et compétitive à la câblodistribution d'un bout à l'autre du pays. L'évolution constante de notre technologie a contribué à l'innovation à tel point que les nouveaux produits ne cessent de se multiplier: la télévision haute définition, la télévision interactive et les réseaux entièrement numériques sont autant d'applications nouvelles et créatives. Ces innovations sont une conséquence de la numérisation et de la radiodiffusion directe.
Nous avons également fait des investissements précoces dans la technologie des satellites bidirectionnels qui pourrait sous-tendre le renforcement des services d'accès Internet par satellite à l'échelle du pays tout entier, et plus particulièrement dans les régions rurales et moins bien desservies. Nous avons un seul service national, si bien que les marchés ruraux et moins bien desservis ont les mêmes choix quantitatifs et qualitatifs en fait de programmation que les clients des grands marchés urbains. Les choix de la grande ville sont offerts aux clients des petites régions rurales et des grands marchés urbains.
Parce que notre service est national, nous sommes aussi en mesure d'offrir toutes nos émissions en langue française dans toutes les régions du pays, et j'estime qu'il s'agit là d'un avantage considérable. Il en va de même pour les services dans une troisième langue.
Grâce à notre service DirecPC, nous sommes également en mesure d'offrir l'accès Internet haute vitesse aux abonnés des régions rurales et moins bien desservies, et ce service existe déjà. Nous l'offrons non seulement aux abonnés de ces localités, mais aussi aux écoles; nous participons de façon très active au programme Rescol grâce à notre service DirecPC.
ExpressVu est aussi un employeur de taille, avec ses 1 500 employés dans les diverses régions du pays qui occupent des postes dans des domaines très divers, depuis le service à la clientèle jusqu'à la technologie de la radiodiffusion qui exige des compétences très spécialisées. Nous contribuons énormément aussi à la création d'emplois dans le secteur de la radiodiffusion en général, du côté de la production, par exemple, ou de la création de contenu canadien. L'important réseau de vente au détail que nous avons mis sur pied pour vendre notre produit contribue également à la création d'emplois à l'échelle nationale.
Depuis leur lancement il y a un peu plus de quatre ans, Bell ExpressVu et Star Choice ont connu une croissance très rapide. Au total, les deux entreprises comptent presque deux millions d'abonnés, qui représentent presque 15 p. 100 des ménages canadiens équipés d'une télé. Bell ExpressVu compte à elle seule un peu plus de 1,1 million d'abonnés. Pour en arriver là, les actionnaires des deux entreprises ont fait des investissements considérables, totalisant plus de deux milliards de dollars.
Ce sont ces investissements qui ont pavé la voie à la numérisation au Canada. Sans les SRD, l'implantation du numérique aurait été à mon avis beaucoup plus lente. Les deux fournisseurs de SRD représentent déjà 65 p. 100 environ du marché des abonnés du numérique au Canada. Notre apport dans ce domaine a valu des avantages considérables aux clients, aux responsables de la programmation et au secteur de la radiodiffusion dans son ensemble—nous avons d'autres diapos où vous verrez plus de détails à ce sujet.
Depuis le lancement des SRD, le nombre de foyers câblés est demeuré relativement inchangé. Ce sont les SRD qui sont à l'origine de la croissance de l'industrie. Chez Bell ExpressVu, nous allons de plus en plus chercher notre clientèle dans les régions non desservies par le câble. Je dirais même que les deux tiers environ de nos nouveaux abonnés ou de nos nouveaux clients nous viennent de régions non desservies par le câble. Environ 20 p. 100 de nos autres abonnés nous viennent de Toronto, de Montréal ou de Vancouver. Bell ExpressVu est donc une réussite extraordinaire dans le Canada rural, mais il commence aussi à faire des percées sur les marchés urbains. C'est là une constatation très importante pour ce qui est de concurrencer le câble.
¿ (0910)
Mais les SRD ne font pas que soutirer des clients aux câblodistributeurs. Depuis 1998, les SRD ont ajouté 800 000 nouveaux abonnés au système, soit un ajout net de 800 000 clients. Selon toute vraisemblance, ces nouveaux clients étaient abonnés à un service américain du marché gris ou bien ne souscrivaient à aucun service multicanaux avant l'arrivée des SRD. En attirant ainsi 800 000 nouveaux clients sur ce marché, les SRD contribuent à augmenter le nombre de Canadiens qui regardent les émissions des diffuseurs canadiens détenteurs de licence. D'où une possibilité de revenus supplémentaires considérables pour les diffuseurs d'émissions, notamment pour les chaînes payantes et spécialisées du Canada.
Comment expliquer cette réussite extraordinaire des SRD? C'est très simple. Nous avons un produit formidable--et vous voudrez bien m'excuser d'être un peu partial, mais je suis vraiment convaincu que nous avons un produit incomparable. Trois termes suffisent pour le décrire: choix, qualité et valeur. Voilà essentiellement ce que nous apportons comme valeur ajoutée à nos clients.
Par choix, il ne faut pas entendre simplement la possibilité de choisir un autre fournisseur de service de préférence au câblodistributeur local, mais bien la possibilité de faire un choix parmi des centaines de chaînes entièrement numériques. Des forfaits souples assortis de petits bouquets de services thématiques permettent à nos clients de regarder les émissions qu'ils veulent, au moment où ils le veulent, et ce, où qu'ils soient au pays.
Par qualité, on entend une image et un son incomparables. Toutes nos chaînes sont numériques. Bien sûr, notre technologie de pointe nous permet d'offrir d'autres applications utiles comme un guide de programmation électronique qui peut aider le téléspectateur à s'y retrouver parmi les centaines et les centaines de chaînes que nous offrons. On entend aussi par là des applications utiles, comme la télévision interactive, ce service que nous venons à peine de lancer et qui semble très prometteur. On entend également par là un service à la clientèle qui n'a pas son pareil dans l'industrie, et c'est là quelque chose qui nous distingue vraiment chez Bell ExpressVu.
Enfin, nos tarifs sont très compétitifs par rapport aux câblodistributeurs et à nos autres concurrents, si bien que nous offrons à nos clients un produit d'une très grande valeur économique.
Je vais maintenant céder la parole à Chris Frank, qui va vous parler des avantages pour le système de radiodiffusion canadien.
M. Chris Frank (vice-président, Programmation et affaires réglementaires, Bell ExpressVu): Merci, David.
Ce que nous offrons, c'est un seul et même service à l'échelle du pays tout entier, un vaste choix d'émissions et la possibilité de choisir la langue des émissions qu'on veut regarder. Nous distribuons toutes les chaînes éducatives provinciales de même que la chaîne autochtone, les délibérations de la Chambre des communes et de l'Assemblée nationale, tous les réseaux de télévision nationaux et régionaux, une vaste gamme de services canadiens de télévision payante et spécialisée, des services dans une troisième langue provenant de fournisseurs canadiens et étrangers, 55 chaînes de télévision à la carte et enfin une brochette des meilleurs services traditionnels et spécialisés des États-Unis et d'autres pays.
Cela signifie donc, dans la pratique, qu'un client francophone de Gravelbourg, en Saskatchewan, a accès aux mêmes services qu'un client à Vancouver. Un client anglophone de la Beauce a aussi accès aux mêmes services qu'un client du centre-ville de Montréal, ou peut même, dans certains cas, recevoir des services à la carte dans la langue de son choix. La chaîne autochtone est également accessible dans tout le Grand Nord ou encore dans les territoires des Premières nations où il n'existe pas de réseau câblé.
Grâce à notre technologie numérique adressable, nos clients peuvent se faire une programmation sur mesure et s'assurer ainsi choix, variété et rentabilité. Notre service s'étend à l'ensemble du Canada, de sorte que, dans tous les coins et recoins de notre vaste pays, on peut avoir accès à toutes les chaînes et à tous les services.
David a déjà parlé de l'ajout net de 800 000 nouveaux abonnés que le système de radiodiffusion canadien doit aux SRD. Cette nouvelle clientèle procure 316 millions de dollars de nouveaux revenus chaque année aux radiodiffuseurs canadiens. Ces revenus supplémentaires ne leur coûtent à peu près rien. Les SRD ont également contribué plus de 60 millions de dollars à des fonds indépendants pour la création de nouvelles émissions canadiennes.
La contribution directe des SRD à la production d'émissions canadiennes ne s'arrête pas là cependant. Même si nous n'occupons que 13 p. 100 du marché canadien de la télévision multicanaux, notre part des contributions au Fonds canadien de télévision s'élève à 25 p. 100. Depuis 1998, et grâce à notre aide, le montant dont dispose le FCT est passé d'un peu plus de 55 millions de dollars à plus de 100 millions de dollars en 2001.
En outre, Bell ExpressVu est fière des contributions qu'elle fait au Fonds de la radiodiffusion et des nouveaux médias Bell. Ce fonds unique en son genre est réservé au financement d'émissions offrant un service intégral, interactif ou multimédia étendu.
La diapo suivante illustre l'effet bénéfique des SRD sur les services canadiens de télévision payante et spécialisée. La croissance rapide des SRD s'est accompagnée d'une croissance considérable des services de télévision payante. Il ne serait d'ailleurs pas exagéré de dire que ce secteur était moribond avant l'arrivée des SRD et que nous avons contribué à sa renaissance. Les SRD assurent à la télévision payante un taux de pénétration quatre fois plus élevé que celui que lui procurent d'autres types de distribution. Comme je l'ai déjà indiqué, même si les SRD n'ont que 13 p. 100 du marché, une part énorme, soit 45 p. 100, des revenus de la télévision payante leur sont attribuables--et ce chiffre, c'est pour l'an dernier. En outre, les clients des SRD regardent jusqu'à 30 p. 100 d'émissions de chaînes spécialisées canadiennes de plus que les clients des autres entreprises de distribution.
En résumé, monsieur le président, les SRD ont non seulement accéléré l'implantation de la télévision numérique à l'échelle du Canada, mais ils ont aussi égalisé les règles du jeu pour ce qui est d'assurer des services de télévision multicanaux dans les régions rurales et moins bien desservies de même que dans les villes canadiennes. Les SRD ont pour effet d'égaliser le choix et la variété de la programmation télédiffusée à l'échelle du pays.
Je voudrais maintenant céder la parole à notre avocat général, Ian Gavaghan, qui va vous parler des problèmes de piraterie dans le domaine de la transmission par satellite.
¿ (0915)
M. Ian Gavaghan (vice-président, avocat général, Bell Express Vu): Merci, Chris.
Chris et David vous ont parlé de l'effet bénéfique que nous avons eu sur le secteur, et je voudrais maintenant vous parler d'un problème qui représente tout un défi pour notre industrie.
La concurrence non autorisée des satellites de radiodiffusion directe américains du marché noir et du marché gris, ou SRD, constitue pour nous un problème aigu qui va s'aggravant. Bell ExpressVu veut mieux faire connaître ce problème et plus particulièrement les effets nocifs qu'il pourrait avoir sur le secteur de la radiodiffusion canadien.
Quand Bell ExpressVu et Star Choice ont lancé leurs services en 1997, nous avons comblé un vide et nous n'avons pas tardé à montrer que nous étions une solution de rechange concurrentielle aux SRD américains. En 1997, on comptait 350 000 abonnés des SRD américains au Canada. Ce nombre a baissé à 200 000--il a baissé de plus de la moitié--à cause des efforts coûteux qu'ont déployés les deux SRD canadiens pour rapatrier ces clients et à cause aussi des efforts de contrainte musclés de la part de notre industrie et du gouvernement fédéral. Cependant, les détaillants d'appareils qui permettent de recevoir les SRD américains non autorisés se retrouvent toutefois dans une conjoncture favorable depuis un an en raison de certaines interprétations judiciaires de la Loi sur la radiocommunication qui vont contre notre intérêt. Bell ExpressVu a interjeté appel d'une de ces décisions devant la Cour suprême du Canada.
Des détaillants vendent maintenant ouvertement des appareils permettant de pirater les émissions distribuées par les SRD américains. Ils se parent d'une certaine légitimité en se donnant des marques de commerce comme DIRECTV et EchoStar. Bien souvent, les consommateurs ne savent pas qu'ils ont affaire à un service illégal. Parfois, le prix demandé est tellement bas qu'on ne peut tout simplement pas refuser l'offre.
La concurrence non autorisée des SRD américains au Canada a maintenant repris une part alarmante du marché canadien. On a publié cette semaine les résultats d'une enquête réalisée auprès de ménages du sud-ouest de l'Ontario qui avait été commandée par l'Association canadienne de la télévision par câble. D'après cette enquête, il y aurait de 520 000 à 700 000 ménages canadiens qui reçoivent des services de SRD américains non autorisés. Cela a confirmé notre estimation antérieure selon laquelle quelque 600 000 ménages reçoivent ces services, la grande majorité d'entre eux relevant du marché noir dont la part du marché s'accroît rapidement.
La présence au Canada de cette autre industrie de diffusion non autorisée nuit considérablement au secteur de la radiodiffusion autorisée au Canada. La part de marché que s'est appropriée cette industrie parallèle entraîne des pertes de revenu annuelles d'environ 325 millions de dollars pour les entreprises de distribution de radiodiffusion canadiennes, ou EDR. Chez ces 600 000 ménages, l'exposition à des émissions canadiennes est minime ou inexistante. Pas de Radio-Canada, pas de TQS, pas de TSN.
Les diffuseurs canadiens perdent des recettes publicitaires et la part des frais des abonnés qui leur revient. Les fonds canadiens de production perdent chaque année 16 millions de dollars de contributions directes des EDR et perdent aussi une part des contributions des diffuseurs. Cette baisse de financement pour les producteurs d'émissions entraîne une baisse des revenus que ces émissions pourraient générer à l'étranger ainsi qu'une diminution des débouchés pour les artistes. Bref, les Canadiens perdent ainsi des emplois.
En d'autres termes, ces concurrents non autorisés compromettent l'embauche dans notre industrie et mettent en péril les milliards de dollars que nous avons investis dans l'infrastructure et la programmation. Enfin, et cette conséquence n'est pas la moindre, ils sapent le fondement même de la politique qui sous-tend notre industrie de la radiodiffusion.
De toute évidence, il faut renverser la croissance du piratage de signaux de SRD américains au Canada qui ne fait que prendre de l'ampleur. L'industrie fait ce qu'elle peut. Sur le plan individuel, nous continuons à intenter des poursuites contre les pirates de signaux. Sur le plan collectif, nous nous sommes regroupés pour mieux faire connaître le problème et pour coordonner nos activités individuelles.
Il faut à tout prix qu'on comprenne que ce problème pourrait avoir un effet dévastateur et il faut absolument aussi que le gouvernement soit prêt à accorder dorénavant une plus grande priorité au problème. Si la Cour suprême du Canada nous donne gain de cause en ce qui concerne l'interprétation de la Loi sur la radiocommunication, comme nous pensons qu'elle le fera, nous nous attendons à ce qu'on fasse respecter les lois relativement au vol de signaux et à d'autres infractions semblables. S'il s'avère nécessaire de modifier la Loi sur la radiocommunication, nous incitons vivement les membres du comité à faire adopter ces modifications le plus rapidement possible.
David
¿ (0920)
M. David McLennan: Merci, Ian.
Permettez-moi maintenant de vous parler des aspects économiques de notre industrie, car pour que nous puissions maintenir les nombreux avantages dont nous vous avons parlé, il faut un bon bilan financier.
Jusqu'à maintenant, les actionnaires de Bell ExpressVu et de Star Choice ont sans doute investi plus de 2 milliards de dollars dans les SRD. Même si nous avons connu une certaine croissance sur le marché, la viabilité financière des SRD exige toutefois une envergure considérable, et nous n'en sommes pas là encore. Atteindre l'envergure nécessaire est tout un défi dans un pays aussi vaste que le Canada, où il n'y a que 12 millions de foyers qui sont équipés de téléviseur et où le marché est dominé par les câblodistributeurs.
Bell ExpressVu doit continuer à investir pendant trois années encore environ rien que pour rentrer dans ses frais. Pendant cette période d'investissement considérable, il est très important que nous puissions compter sur un cadre réglementaire stable. Sinon, il devient très difficile d'attirer les investissements dont nous avons besoin et de prendre les décisions en matière d'investissement qu'il nous faut prendre pour pouvoir aller de l'avant et nous assurer une masse critique.
Enfin, étant donné la situation économique difficile avec laquelle nous sommes tous aux prises, il faudrait revoir les obligations financières qui découlent de la réglementation. Ainsi, celles qui ne contribuent pas à l'avancement du secteur de la radiodiffusion canadienne devraient être éliminées. Je songe ici aux droits de licence de la partie II, dont l'Association canadienne des radiodiffuseurs et l'ACTC vous ont déjà parlé, je crois.
En conclusion, les marchés noirs et gris nécessitent une attention immédiate. Ce problème touche l'ensemble de l'industrie, et il constitue une menace très grave et un défi important pour le système de radiodiffusion canadien. Deuxièmement, il nous faut un cadre réglementaire stable, qui nous permette d'attirer les capitaux et de prendre les décisions en matière d'investissement que nous devons prendre pour maintenir notre croissance, pour nous assurer une masse critique et pour continuer à profiter des bienfaits de la concurrence.
Voilà qui termine notre exposé, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur McLennan. Je crois que vous nous avez présenté un exposé très concis où vous nous avez très bien décrit votre situation. Nous vous en remercions.
Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott (Kootenay--Columbia, Alliance canadienne): Je vous remercie pour cet exposé.
Dans le cas des Canadiens qui résident au soleil, en Floride, et dont les soucoupes captent les signaux de Bell ExpressVu, diriez-vous qu'il s'agit d'un marché gris et aimeriez-vous le voir disparaître?
M. David McLennan: C'est exactement la même situation, mais à l'inverse. Cela se produit effectivement aux États-Unis.
M. Jim Abbott: Vous aimeriez donc que les gens du Québec et de l'Ontario, qui ont une résidence d'hiver en Floride, ne puissent pas capter vos signaux, regarder les parties de hockey et ainsi de suite.
M. David McLennan: Nous n'avons pas le droit de commercialiser notre signal aux États-Unis. La Federal Communications Commission nous interdit de couper le signal d'un abonné, d'un client, aux États-Unis. Si nous apprenons qu'il y a des gens qui reçoivent notre signal aux États-Unis, en effet, nous devons les désactiver.
¿ (0925)
M. Jim Abbott: J'ai trouvé, sur un site Web originaire de Plain, au Wisconsin, un article intitulé «The Canadian Solution: An economical way of providing a vast improvement in the quality and quantity of TV & radio signals to your home», un article qui préconise donc une solution canadienne, une façon économique d'améliorer la qualité et la quantité des signaux de radio et de télévision qu'on peut capter chez soi, qui propose certaines choses pour réduire les coûts d'abonnement et améliorer la réception des émissions de Radio-Canada à la radio et à la télévision. Ce site Web donne un lien avec Bell ExpressVu, Star Choice et ainsi de suite. Vous en convenez donc, il existe bel et bien un marché gris inverse?
M. David McLennan: Cela semble effectivement être le cas.
M. Jim Abbott: En effet, je crois moi aussi qu'il existe un marché gris inverse. Je me demande pourquoi vous permettez ce genre de chose parce que selon moi, dès lors que quelqu'un connaît le numéro de ma carte Visa, il sait que cette carte a été émise quelque part en Colombie-Britannique et connaît également mon adresse.
Cela dit, j'imagine que c'est peut-être quelque chose que Bell ignorait, mais j'ai fortement l'impression que Bell sait très bien qu'elle peut s'adresser aux compagnies qui émettent des cartes Visa, et dans le cas de ceux-là qui, aux États-Unis, captent Bell ExpressVu dans ce marché gris inverse, vous devriez être capables de les déconnecter si ces gens utilisent leur carte Visa pour payer leur abonnement. S'il s'agit d'une carte émise par la FirstBank de Seattle ou par une banque quelconque à Miami, vous devriez pouvoir le détecter. Avez-vous procédé de cette manière pour éliminer ce marché gris inverse?
M. David McLennan: Pour apporter simplement une précision au sujet des sites Web comme celui-là, les vendeurs en question ne sont pas des fournisseurs de services autorisés par nous, et nous surveillons effectivement ce genre de chose. Nous intervenons lorsque c'est nécessaire, mais nous nous gardons bien d'offrir sciemment notre service aux États-Unis.
Si vous me permettez d'ailleurs d'ajouter encore autre chose, l'une des caractéristiques du marché gris est qu'il fait souvent intervenir un intermédiaire entre le client et l'EDR. Cet intermédiaire utilise souvent une carte de crédit ou une autre forme de paiement originaire du Canada. Par conséquent, même si nous pouvons remonter ce genre de piste, comme vous le dites, le résultat n'est pas toujours évident.
M. Jim Abbott: Pour pouvoir capter Bell ou StarChoice aussi, j'imagine--vous n'êtes peut-être pas au courant dans ce cas-là--il faut je crois téléphoner à un numéro 1-800 au Canada et qui ne peut être rejoint que depuis le Canada. Par contre, je sais également qu'on peut contourner cette difficulté en passant par un numéro de téléphone à Montréal qui fait le renvoi automatique. Êtes-vous au courant?
M. David McLennan: Non, de toute manière, ce n'est pas quelque chose qui se fait chez ExpressVu.
¿ (0930)
M. Jim Abbott: En toute déférence, je pense moi le contraire. Si vous demandez au comité et au gouvernement d'intervenir sérieusement pour éliminer le marché gris et le marché noir, cela nous encouragerait beaucoup de savoir que vous pouvez nous montrer que vous avez pris les mesures nécessaires pour qu'il n'y ait pas de marché gris inverse. Il me semble bien qu'il existe à Montréal--ou ailleurs--un numéro de téléphone qui est très souvent utilisé. En d'autres termes, en passant par ce numéro de téléphone-là, on obtient le renvoi automatique vers votre numéro 1-800 au Canada.
Laissez-moi vous exposer cela point par point. Je suis sûr que vous me comprenez, mais je voudrais également que tout le monde comprenne très bien ce qui se passe.
Il y a un numéro 1-800 qui permet d'entrer en contact avec le service Bell ExpressVu et de s'y connecter. Ce numéro n'est accessible que depuis le Canada. Pour contourner cette difficulté, on peut appeler, depuis les États-Unis, un numéro 1-800 à Montréal, et ce numéro renvoie automatiquement à un autre numéro de téléphone au Canada. Lorsqu'on compose donc ce numéro de téléphone au Canada, il renvoie automatiquement au numéro 1-800 au Canada, ce qui signifie donc que l'appel est effectué depuis le Canada. N'importe qui en Arizona, dans l'État de Washington, en Floride ou dans n'importe quel État du Sud peut se brancher à Bell ExpressVu en passant par ce numéro intermédiaire basé au Canada.
J'imagine qu'entre toutes les compagnies, Bell Canada au moins devrait être en mesure de savoir que son numéro d'accès 1-800 est régulièrement appelé depuis un numéro--ou deux, ou trois ou même une dizaine--au Canada. Je ne pense pas qu'il faille être grand clerc pour comprendre cela et que, pour Bell, c'est quelque chose de relativement simple.
Avez-vous fait quelque chose pour contrer ce marché gris inverse?
M. David McLennan: Allons un peu plus loin si vous voulez bien car, dès que la personne en question rejoint ainsi notre système par notre numéro 1-800, cela ne veut pas dire pour autant que nous la branchons automatiquement car il faut qu'elle ait une adresse légitime au Canada. Même si la personne en question passe par notre télécentre, si elle a une adresse en Floride, en Arizona ou n'importe où hors du Canada, son abonnement lui sera refusé.
M. Ian Gavaghan: Pourrais-je ajouter un mot?
Lorsque vous nous demandiez si nous avons fait quelque chose pour contrer le marché gris inverse, la Cour suprême du Canada a effectivement été saisie de la chose dans l'affaire Richard Rex-Can-Am. Nous avions à l'origine intenté des poursuites contre lui pour trois raisons, l'une d'entre elles étant qu'il exploitait un site Web qui offrait notre produit aux États-Unis. C'est précisément la raison pour laquelle nous l'avons poursuivi.
M. Jim Abbott: Pour passer à un sujet qui est directement relié à cela, j'aimerais beaucoup savoir pourquoi vous l'avez poursuivi alors que vous pourriez également poursuivre n'importe quel journal ou bulletin communautaire publié en langue espagnole à Montréal ou ailleurs. Si j'utilise l'exemple de l'espagnol, c'est qu'il y a énormément de chaînes en espagnol qui sont diffusées par les satellites américains. Pourquoi vous en prendre à un illustre inconnu? Pourquoi ne pas essayer plutôt de faire quelque chose contre les marchés hispaniques?
M. Ian Gavaghan: Vous voulez parler des journaux qu'on peut se procurer?
M. Jim Abbott: En effet.
M. Ian Gavaghan: Je dirais que c'est précisément ce que nous essayons de faire valoir ce matin. Au Canada, le marché noir explose littéralement, à tel point que les distributeurs de matériel clandestin au Canada se sentent suffisamment à l'aise pour faire paraître des pages entières de publicité dans le Toronto Sun, dans les journaux locaux de Montréal ou de Winnipeg et que sais-je encore. C'est précisément là le problème.
Pourquoi avoir poursuivi Richard Rex et Can-Am? Parce que c'était un très gros distributeur dans les trois secteurs: le marché noir, le marché gris américain et le marché gris inverse. Il exploite un site Web, mais il a également des magasins. Il était actif également en Colombie-Britannique, et nous voulions faire quelque chose en Colombie-Britannique parce que rien n'avait été fait jusque là dans cette province. C'est pour cette raison que nous l'avons poursuivi.
M. Jim Abbott: Je voudrais vous dire quelque chose à titre personnel, mais également peut-être au nom des autres membres du comité. Si vous parveniez à me convaincre, peut-être ultérieurement dans un mémoire, que Bell ExpressVu intervient de façon très vigoureuse pour éliminer ce marché gris inverse--me convaincre en fait que vous allez vous en prendre aux retraités migrateurs et aux gens comme lui qui utilisent l'Internet, que vous prenez les mesures technologiques simples mais nécessaires que je vous ai proposées ce matin--à ce moment-là, je serais peut-être mieux disposé à dire oui, nous devrions nous aussi faire quelque chose.
J'ai simplement l'impression--et peut-être me trompai-je--que tous ceux qui vendent des services DTH au Canada réclament des mesures contre le marché gris et le marché noir au Canada mais qu'étant donné la très large empreinte que vous avez avec votre propre signal satellite, les fournisseurs DTH au Canada ne sont pas vraiment très chauds lorsqu'il s'agit de se priver des recettes que le marché gris inverse peut leur procurer.
M. David McLennan: Je pense au contraire que nous sommes tout à fait sérieux et qu'au Canada, c'est nous qui avons été les plus agressifs à cet égard, mais cela dit, nous serions très heureux de vous faire parvenir par écrit le résumé de nos interventions.
M. Jim Abbott: Je vous remercie.
Le président: Pourrais-je donc vous suggérer de mettre par écrit un résumé de vos interventions et de l'envoyer à notre greffière? Cela nous serait très précieux étant donné que toute la question du marché noir et du marché gris est régulièrement remise sur le tapis.
M. David McLennan: Certainement, monsieur le président.
M. Ian Gavaghan: Si vous me permettez une dernière chose, je vous dirais que certaines des techniques qui ont été évoquées ici ce matin ont été exposées de façon trop simpliste. Il faut bien se souvenir qu'il s'agit là de gens qui essaient de frauder Bell ExpressVu. Ces gens essaient d'imaginer toutes sortes de moyens de nous frauder.
Le président: C'est précisément la raison pour laquelle, à mon avis, ce résumé de vos interventions sera extrêmement utile.
Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): J'aimerais poursuivre le sujet du marché noir, du piratage et du contournement des satellites. Comment, selon vous, pourrait-on faire échec à ce piratage? Il semble qu'il soit difficile de savoir même qui est le pirate et qui achète ces coupoles. Que faudrait-il modifier dans la Loi sur la radiodiffusion pour mieux cerner ce genre de pratiques?
[Traduction]
M. David McLennan: Le marché gris et le marché noir ont littéralement explosé depuis quelque temps en raison de certains jugements vagues rendus par les tribunaux depuis 12 ou 18 mois. Suite à ces jugements, les tribunaux ayant été insuffisamment clairs dans leurs directives, les poursuites en cas de vol de services sont devenues fort aléatoires.
Comme Ian vous l'a dit il y a quelques instants, nous avons saisi la Cour suprême du Canada dans un cas d'espèce. L'audition a eu lieu début décembre, et nous attendons le jugement. Nous escomptons avoir gain de cause, et si le jugement est en notre faveur, cela nous permettra je crois de rétablir un peu l'ordre sur le marché et de faire mieux respecter les dispositions de la loi. Au cas contraire, il faudra demander des amendements à la Loi sur la radiocommunication, et en particulier l'alinéa 9(1)c) pour la rendre plus claire.
¿ (0935)
[Français]
Mme Christiane Gagnon: En quel sens employez-vous l'expression «plus clair»? C'est ce que j'aurais aimé vous entendre préciser même en ce qui a trait à la formulation. Qu'entendez-vous par «être plus clair»?
[Traduction]
M. Ian Gavaghan: Nous avons déjà pensé à un texte que nous pourrions vous suggérer si cela peut être utile au comité. On pourrait envisager plusieurs versions différentes.
Le cas le plus patent est le problème qui découle de l'interprétation de l'alinéa 9(1)c), en ce sens qu'il faudrait que la loi dise sans aucune ambiguïté que le décodage d'un signal américain au Canada est illégal. Par ailleurs, il faudrait, par voie d'amendement, aligner la Loi sur le droit d'auteur sur la législation américaine, la Digital Millennium Copyright Act, afin de protéger les systèmes d'encodage du matériel protégé par le droit d'auteur.
Ici encore, nous avons une documentation à ce sujet que nous pourrions faire parvenir au comité.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je vous remercie.
[Traduction]
Le président: Madame Bulte.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale--High Park, Lib.): Je vous remercie d'avoir accepté de comparaître.
Je dois vous dire pour commencer que je ne partage pas l'opinion de M. Abbott pour qui c'est à vous qu'il revient d'aller vérifier ce qui se passe sur Internet. Pour moi, du vol c'est du vol, qu'il s'agisse d'un droit d'auteur ou d'un signal. C'est comme cela que je vois les choses.
Lorsque nous avons entendu les représentants de l'industrie de la câblodistribution, ils nous ont dit que l'application de la loi posait également problème. Personne ne veut y toucher. Pouvez-vous me dire pourquoi? N'y a-t-il pas suffisamment de personnel pour assurer l'exécution de ces dispositions? Pourquoi les pouvoirs publics ne veulent-ils pas intervenir?
M. David McLennan: Je vais commencer à répondre et Ian pourra apporter un complément d'information.
Récemment, et par là j'entends au cours des 18 derniers mois environ, divers tribunaux ont rendu des décisions qui ont embrouillé davantage l'interprétation de la Loi sur la radiocommunication. Depuis lors, l'exécution de la loi est beaucoup moins musclée et on est moins incité à poursuivre ceux qui vendent ce produit ouvertement. Nous espérons que les poursuites que nous avons commencées en Cour suprême rendront sa musculature à l'exécution de la loi et que nous pourrons de nouveau poursuivre avec plus d'acharnement ceux qui s'adonnent à cette activité.
Mme Sarmite Bulte: Quand attend-on la décision?
M. Ian Gavaghan: En fait, nous n'en savons rien.
Mme Sarmite Bulte: Vous ne savez pas encore.
M. Ian Gavaghan: Non, mais nous espérons que ce sera d'ici un mois.
Mme Sarmite Bulte: Je passe à votre deuxième recommandation. Je suis d'accord avec vous. En effet, ces zones noires ou grises du marché doivent être éclaircies dès que possible, et ce, aux yeux du public également. Comme vous l'avez dit, quand on en arrive à un tel extrême et qu'on fait une publicité ouverte, les gens ne savent plus ce qui est légal, ce qui est du vol, ce qui est répréhensible.
Vous préconisez un cadre de réglementation stable: pouvez-vous développer votre pensée et nous dire exactement ce que vous entendez par là?
M. David McLennan: Ce serait plutôt générique car nous avons investi intensément--«nous», c'est-à-dire les actionnaires de BCE, alors que les actionnaires de Shaw ont investi intensément dans Star Choice--parce que nous comptions sur un certain cadre, une série de règles réglementant l'activité. Par exemple, notre compagnie va demander le renouvellement de sa licence lors d'audiences qui se tiendront cette année. Nous voulons nous assurer que les règles ne changeraient pas à tel point que cela pourrait avoir une incidence sur les investissements que nous ne cessons de faire pour que notre entreprise atteigne une masse critique, pour qu'elle devienne rentable, et pour que nous puissions continuer à offrir les avantages que nous avons offerts jusqu'à présent. Autrement dit, il nous faut pouvoir compter sur une situation sûre et prévisible sur le plan de la réglementation afin de nous sentir à l'aise au moment de prendre nos décisions.
¿ (0940)
Mme Sarmite Bulte: Quand vous parlez des «règles», vous parlez des règles du CRTC, n'est-ce pas?
M. David McLennan: Essentiellement, oui.
Chris, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Chris Frank: Non, David, vous avez dit les choses absolument parfaitement.
Il faut savoir qu'en 1995, le gouvernement a étudié de très près tout le dossier de la radiodiffusion en direct du satellite au foyer et le gouvernement a rendu une ordonnance qui est devenue le cadre de réglementation du CRTC.
Nous pensons que l'industrie a été minutieusement analysée. En présence de certaines règles, nous essayons de faire prospérer notre entreprise. Nous souhaitons simplement stabilité et continuité dans les règles.
Mme Sarmite Bulte: Permettez-moi de vous poser une question qui porte sur un autre sujet, à savoir le contenu canadien.
Un des avantages du service de diffusion directe par satellite est qu'il offre un très grand nombre de choix. C'est merveilleux de pouvoir avoir tant de choix. Effectivement, si vous voulez regarder les nouvelles diffusées dans la région de l'Atlantique, c'est possible. Je me demande comment nous pourrions garantir de conserver la voix des Canadiens, disposer des choix canadiens, c'est-à-dire garantir le contenu canadien pour tous dans cet univers à canaux multiples? Tôt ou tard, nous allons nous retrouver avec «tout le reste sauf cela». Comment réserver ces espaces et garantir qu'ils ne sont pas limités mais que nous pouvons les élargir afin qu'ils servent au contenu canadien?
M. David McLennan: Tout d'abord, s'occuper de certains des principaux piratages, comme le marché gris, est une initiative très importante. Parce que des services comme la diffusion en direct et EchoStar n'offrent à peu près pas de contenu canadien. Ils n'appartiennent pas au système de radiodiffusion. Ils sont essentiellement à la périphérie de sorte que la luttte contre cette menace particulière est très importante pour garantir que le contenu canadien demeure la pierre angulaire de notre service.
Une fois cela fait, le genre de contributions que notre société et Star Choice apportent à la production canadienne--et Chris vous a parlé de nos contributions au Fonds des talents canadiens et au Fonds Bell pour la radiodiffusion et les nouveaux médias--sont capitales pour la fabrication de contenu canadien. Bien entendu, le contenu canadien aboutit à notre service, à la télédiffusion par câble Rogers, et à la distribution par câble à l'échelle du pays. Ainsi, si nous prospérons davantage et nous pouvons contribuer davantage à la production de contenu canadien, les choses vont se renouveler d'elles-mêmes.
M. Chris Frank: Permettez-moi d'ajouter quelques mots.
Tout d'abord, la loi et notre cadre réglementaire exigent que nous donnions la vedette aux services canadiens. En fait, chacun de nos clients offre une brochette à prédominance canadienne. C'est ainsi que nous regroupons nos services et dès lors c'est ce qui les rend très populaires. Dans notre guide électronique de programmation, les services offerts en vertu d'une licence canadienne prennent le pas sur les services étrangers. Nos services à la carte offrent toute une gamme de films canadiens, et nous faisons une promotion active des manifestations artistiques canadiennes.
Ainsi nous sommes tout acquis à la programmation canadienne. En fait, c'est ce qui fait que notre produit se démarque des autres. Si nous n'avions pas de programmation canadienne, nous serions très semblables à EchoStar ou à DIRECTV, les deux fournisseurs américains. Je pense que c'est ce qui nous a rendus très populaires. Nous offrons toute une gamme de services dans la langue du choix du client, d'un océan à l'autre.
Mme Sarmite Bulte: Monsieur Frank, vous avez dit «la loi et le cadre de réglementation exigent». De quelle loi s'agit-il?
M. Chris Frank: Excusez-moi, c'est la Loi sur la radiodiffusion.
Mme Sarmite Bulte: Merci.
Le président: Monsieur Tirabassi.
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier nos témoins d'avoir pris le temps de venir s'entretenir avec nous.
La question que j'allais vous poser est celle qu'a posée Mme Bulte, concernant le cadre réglementaire qui fait l'objet de vos recommandations. Je n'en parlerai donc pas.
À notre époque, on peut rester assis confortablement dans son salon avec la commande à distance à la main, et il est difficile de décider pour les autres ce qu'ils doivent regarder. Je n'ai jamais rencontré qui que ce soit qui pense que l'on peut convaincre d'autres personnes de regarder telle ou telle émission ou que l'on peut choisir pour les autres. Toutefois, il y a un segment qui prend de l'ampleur et c'est celui des canaux communautaires locaux.
Nous avons parlé du contenu canadien. Plus particulièrement, avez-vous songé à créer des canaux communautaires semblables aux canaux des câblodistributeurs locaux? Dans la négative, que feriez-vous pour faire la promotion du contenu local ou régional?
¿ (0945)
M. David McLennan: Dans l'industrie, on parle activement de ce sujet en ce moment, et nous travaillons sur ce dossier en étroite collaboration avec l'ACR et ses membres. Actuellement, nous offrons un grand nombre de chaînes locales qui viennent des quatre coins du pays. Nous n'offrons pas toutes les chaînes locales car ce n'est possible ni pratiquement ni techniquement sur le plan de la largeur de bande, mais nous offrons un choix varié de chaînes locales pour que notre service offre cette couleur locale. Rappelez-vous qu'il est très important pour nous de pouvoir le faire car nous offrons effectivement un service national mais nous concurrençons les câblodistributeurs à l'échelle régionale.
En particulier, le nombre considérable de choix offerts aux abonnés du service multichaîne constitue un des problèmes que rencontrent les radiodiffuseurs locaux et plus particulièrement les petits radiodiffuseurs locaux. En réalité, les gens regardaient ces chaînes davantage quand ils n'avaient qu'une ou deux chaînes, il y a 10, 15 ou 20 ans, mais désormais ils ont le choix entre 200 chaînes. Certains radiodiffuseurs locaux perdent des clients au profit de ces autres chaînes mais cela est le résultat de la croissance que connaît le produit.
Pour certains de ces radiodiffuseurs locaux, c'est un gros défi à relever, mais nous travaillons avec l'ACR pour trouver une solution qui convienne aux petits marchés locaux et à notre service également.
M. Chris Frank: Permettez-moi d'ajouter quelques mots. Nous avons évoqué auprès du CRTC la possibilité d'en faire une chaîne communautaire. Étant donné que nous sommes un service national, l'organisme de réglementation n'a pas jugé cette proposition efficace jusqu'à présent. Toutefois,--et je pense que cela a beaucoup de vogue auprès de nos abonnés--nous offrons des informations des quatre coins du pays, de chaque région et en provenance de toutes les collectivités majeures ou moyennes. Nous avons des informations en direct sur les chaînes 198 ou 199 de sorte que d'un océan à l'autre, les gens peuvent se tenir au courant des nouvelles régionales ou locales, ou s'ils sont des expatriés de Terre-Neuve vivant en Colombie-Britannique, ils peuvent capter Terre-Neuve à partir de ce fuseau horaire. Nous découvrons que c'est un service très utile et populaire et nous espérons lui donner de l'ampleur à mesure que notre bande du satellite augmentera.
Quant aux chaînes communautaires, nous allons continuer d'en discuter au CRTC car je suis d'accord avec vous. Nous pensons que l'idée a beaucoup de mérite et nous aimerions que cela se fasse.
M. Tony Tirabassi: Merci, monsieur le président.
Le président: Madame Lill.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci de votre exposé. Je voudrais revenir sur certaines remarques qui ont été faites concernant le contenu canadien.
Vous nous avez dit être tout acquis au contenu canadien et je sais que vous avez augmenté votre contribution au FTC. Vous avez également dit que vous mettiez en pratique la recommandation de l'ACR qui préconise que les droits de licence en vertu de l'annexe II soient supprimés. Pouvez-vous me dire pourquoi vous trouvez cela avantageux actuellement? Il y a quelques semaines, un représentant de l'ARC, j'ai suggéré que cet argent soit versé au FTC. Si on constate que les gens sont des inconditionnels du contenu canadien, pourquoi alors ne pas grossir la cagnotte du contenu canadien?
Et il y a autre chose que je voudrais savoir. En tant que service national offrant un contenu canadien, vous savez sans doute que les statistiques démontrent que le radiodiffuseur public, CBC-Radio-Canada est le producteur le plus efficace de contenu canadien. Quel rôle accru recommanderiez-vous éventuellement pour le radiodiffuseur public étant donné la nouvelle donne en matière de radiodiffusion?
¿ (0950)
M. David McLennan: Je vais répondre à la question concernant les droits en vertu de la partie II et c'est Chris qui répondra à votre question sur la SRC.
Ce que j'en ai dit, c'est qu'il faudrait que ces ressources servent à bonifier l'industrie de la radiodiffusion. En particulier, il faut quotidiennement faire des choix en ce qui concerne les investissements et les dépenses. Par exemple, nous venons de terminer un examen minutieux pour voir quel logiciel il nous faudrait développer en vue d'offrir les services de télévision interactive. Cela coûte des millions et des millions de dollars de sorte que je pense que les fonds comme les fonds qui sont utilisés pour la partie II, assortis de ressources semblables, pourraient être déployés plus avantageusement dans des investissements qui permettraient d'améliorer encore notre produit pour que nous puissions offrir des services innovateurs qui bonifient le système de radiodiffusion. C'est ce que je voulais dire en parlant de ces droits.
Chris.
M. Chris Frank: Merci, David.
En ce qui concerne les droits en vertu de la partie II, nous sommes nettement favorables à ce qu'ils soient réinvestis dans l'industrie de la radiodiffusion canadienne. Cela pourrait être versé au FTC mais par ailleurs, il ne faudrait pas perdre de vue les autres fonds indépendants comme le Fonds Bell pour la radiodiffusion et les nouveaux médias, parce que ces fonds ont également un rôle appréciable au sein de l'industrie.
Je pense que l'ARC et d'autres ont signalé l'importance qu'aura la télévision interactive à l'avenir. En fait, elle pourrait devenir un revenu substantiel pour les radiodiffuseurs canadiens au fur et à mesure que cette télévision acquerra de la vitesse.
Cet argent pourrait servir également à intensifier la diffusion de matériel de réception numérique à l'échelle du pays car l'avenir sera numérique et non analogique. La télévision à haute définition est pour demain. Nous savons que les Américains ont déployé la télévision à haute définition dans toutes leurs grandes villes, y compris les villes frontalières. Jusqu'à présent, le Canada n'offre pas ce service ni sur une base nationale ni sur une base régionale, et cela va constituer un problème épineux pour nous.
On constate qu'il y a donc divers secteurs où l'on pourrait injecter cet argent mais je suis d'accord avec vous. Le contenu est très important et il faut que notre contenu soit de premier ordre pour que les Canadiens continuent de syntoniser les services canadiens. Mais il nous faut également offrir un système de livraison moderne et efficace pour être au diapason du reste du monde.
En ce qui concerne la SRC, nous la soutenons inconditionnellement mais nous soutenons également les radiodiffuseurs privés. Je me bornerai à dire que nous offrons les services de la société d'un océan à l'autre. En fait, nous venons de signer une nouvelle entente avec la société et nous ajouterons de nouveaux services Radio-Canada dans d'autres régions du pays--en l'occurrence dans les Prairies et dans l'Ouest--dès que nous aurons une plus grande capacité satellite.
Nous offrons également le service audio numérique Galaxie, qui est préparé spécialement pour nous par la SRC. Ce service donne beaucoup de satisfaction. En fait, nous venons de signer une nouvelle entente en vertu de laquelle nous en ferons la distribution encore pendant six ans.
Nous offrons également CBC Newsworld et RDI dans notre service de base de sorte que la totalité de nos abonnés y a accès, en anglais et en français. Nous sommes très enthousiastes face à la nouvelle chaîne des arts en langue française que la société vient de créer. Nous appuyons donc la SRC et également les radiodiffuseurs privés.
Mme Wendy Lill: On nous a parlé de l'idée d'un «espace vert». Il s'agirait d'une série de chaînes qui seraient strictement canadiennes. Une telle idée est-elle compatible avec la technologie de la télévision directe par satellite? Votre technologie permet-elle la création d'un espace vert, c'est-à-dire un certain nombre de chaînes qui seraient réservées au contenu canadien et que les gens pourraient trouver plus facilement qu'ils peuvent trouver l'émission de la World Wrestling Federation ou d'autres émissions de ce type? Êtes-vous en mesure d'offrir ce genre de chaîne aux Canadiens?
¿ (0955)
M. Chris Frank: Je suis très heureux que vous posiez cette question parce que Bell ExpressVu est très fière du fait qu'elle est le seul distributeur au Canada à offrir un service de base complètement canadien au prix très abordable de 10 $ par mois en anglais et de 8 $ par mois en français. Nous offrons donc cet espace vert dont vous parlez.
Notre service de base comprend les services éducatifs d'un océan à l'autre, CBC, Radio-Canada et tous les radiodiffuseurs privés, tant nationaux que régionaux, Newsworld et RDI ainsi que la chaîne audio numérique Galaxie de CBC. Nous offrons ce service à ce qui nous paraît un prix très raisonnable. Nous avons pris l'engagement d'offrir ce service auprès du système de radiodiffusion canadien lorsque nous avons obtenu notre licence. Je suis heureux de dire que nous offrons toujours ce service qui, à notre avis, n'a pas son pareil dans toute l'industrie.
Le président: Les trois dernières questions seront posées par M. Cuzner, M. Abbott et M. Gallaway.
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or--Cape Breton, Lib.): J'ai deux questions à poser. Vous déciderez entre vous qui y répondra.
La première question porte sur les marchés gris et noirs. J'aimerais d'abord savoir si nous disposons de la technologie voulue pour identifier les personnes qui abusent du système? Un certain nombre de témoins nous ont parlé de ce problème. Pourriez-vous nous dire quelles mesures concrètes pourraient être prises pour le régler?
Ma deuxième question porte sur l'accès. Je représente une circonscription rurale. L'accès à Internet à haute vitesse est certainement une préoccupation dans les régions rurales. Excusez mon ignorance technologique, mais la télévision directe par satellite permet-elle d'avoir l'accès à Internet haute vitesse? C'est le câblage qui constitue le coût le plus élevé dans le cas d'Internet haute vitesse et ce serait peut-être maintenant plus rentable de prévoir un accès à Internet haute vitesse par satellite.
Je n'ai pas d'autres questions à poser.
M. David McLennan: Quant aux mesures à prendre pour remédier au problème que posent les marchés gris et noirs, il faut d'abord appliquer ces mesures dans les points de vente des produits. C'est le point de départ. Pour revenir à la décision que rendra sous peu la Cour suprême, je crois qu'elle jouera un rôle important dans la répression des abus.
Avez-vous quelque chose à ajouter, Ian?
M. Ian Gavaghan: Non, je crois que vous avez très bien répondu à la question, David. Il faut effectivement intervenir auprès de ceux qui importent le produit au Canada et qui le distribuent. Voilà où nous devons faire porter nos efforts.
M. David McLennan: Les principaux responsables sont les concepteurs de logiciels qui permettent de contourner les systèmes de protection. Il faut donc s'en prendre aux vendeurs de ces logiciels ainsi qu'aux concepteurs eux-mêmes. C'est à ce niveau-là qu'il faut intervenir.
M. Rodger Cuzner: Qu'en est-il de l'usager final? La technologie permet-elle de repérer les usagers qui ont recours aux marchés gris et noir...?
M. David McLennan: Nous ne pouvons pas spécifiquement identifier l'utilisateur, mais notre technologie--je ne sais pas ce qu'il en est pour la technologie des autres--peut contrer les efforts des pirates informatiques. En fait, c'est une sorte de jeu. Tout le monde cherche à savoir ce que l'autre a fait. Nous jouons au chat et à la souris.
À (1000)
M. Rodger Cuzner: Vous brouillez le signal et l'utilisateur achète ensuite une nouvelle carte. Il y a un gars dans ma ville qu'on considère comme un véritable héros. Il dirige une entreprise très lucrative, mais il est un peu comme le passeur de drogues à l'école secondaire. Tout le monde sait ce qu'il fait, et il le fait en toute impunité. C'est bizarre.
M. David McLennan: Il nous faut nous efforcer de mettre fin à ce genre de piratage qui se fait au su et au vu de tous et dont il est même question dans les journaux parce que c'est du vol. Il faut traiter ce genre d'activités comme du vol.
Pour ce qui est de votre question au sujet de l'accès à Internet haute vitesse dans les régions rurales, nous offrons actuellement un service appelé DirecPC. L'accès à ce service est limité en fonction de la largeur de bande. DirecPC permet aux clients vivant en milieu rural d'avoir un autre moyen d'accéder à Internet haute vitesse qu'en ayant recours à un modem transmettant l'information à la vitesse de 56 kilo-octets. Le DirecPC permet de télécharger des données à la vitesse de 400 kilo-octets, soit de sept à huit fois plus vite que par un modem. Il s'agit cependant d'un service unidirectionnel. Le client a accès à Internet par l'entremise du téléphone et l'information lui est transmise par l'entremise d'un satellite. Il ne s'agit donc pas d'un véritable système bidirectionnel.
Nous avons consenti des investissements précoces dans la technologie satellitaire bidirectionnelle. Le satellite que nous lancerons en collaboration avec Telesat en décembre comporte une petite charge utile bidirectionnelle qui servira à explorer les possibilités qui s'offrent en matière de services. Je peux vous assurer qu'il s'agit cependant d'investissements très coûteux qui présentent des risques commerciaux.
M. Chris Frank: David, le fait que cet investissement assure au Canada à jamais la propriété sur le 91e degré de longitude de l'emplacement où se trouve notre satellite sur la bande Ka intéressera sans doute le comité. Cette technologie permettra un jour vraiment aux régions rurales et éloignées du Canada d'avoir accès à Internet haute vitesse par un service satellitaire bidirectionnel. Je pense qu'on peut considérer comme une réalisation importante le fait que cet emplacement dans l'espace soit maintenant assuré au Canada grâce à l'investissement dont parlait David.
Le président: Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott: J'ai jeté un coup d'oeil à la liste de chaînes qu'offre ExpressVu. Je pense qu'il y en a environ 342. C'est du moins ce que je vois sur la liste que j'ai sous les yeux. Je vois que les membres de la communauté d'expression espagnole au Canada--dont bon nombre parleront à d'autres personnes d'expression espagnole qui ont des souvenirs notamment de la dictature d'Augusto Pinochet--ont actuellement accès par le marché gris à 26 chaînes en espagnol pour le prix de 21 $ US par mois. Ces personnes peuvent notamment regarder Sesame Street en espagnol.
Vous offrez à partir de Toronto au prix de 3 $ par mois le Telelatino Network dont la moitié des émissions sont en italien. Si nous éliminons le marché gris comme vous le proposez, comment les Canadiens d'expression espagnole pourront-ils avoir accès à des émissions de divertissement ou d'information dans leur langue?
M. David McLennan: Il nous est impossible pour l'instant d'offrir tous les services qui sont disponibles en Amérique du Nord. Nous n'avons tout simplement pas la largeur de bande nécessaire pour cela. Il nous faut donc faire certains choix difficiles quant aux types d'émissions que nous offrons. Nous devons malheureusement le faire parce que nous ne disposons pas d'une largeur de bande suffisante.
M. Jim Abbott: Est-ce qu'on reconnaît le problème qu'il y a à expliquer à la population hispanophone au Canada qu'elle n'aura plus 26 canaux?
M. David McLennan: Je reconnais certainement qu'il y a un certain nombre de choses que ces clients aimeraient avoir.
M. Jim Abbott: Vous avez dit que Bell ExpressVu a fait un investissement sur la base d'un certain cadre et d'un règlement. Je suppose qu'à Lloydminster, Medicine Hat et dans d'autres régions limitrophes, les radiodiffuseurs ont probablement fait un investissement en fonction d'un certain cadre et d'un règlement, pourtant on constate que leur signal leur est effectivement volé par les satellites. Autrement dit, il y a un gros problème de «marché rouge» comme je l'appelle.
Le marché rouge fait que la population de l'Ouest a accès à des émissions qui ont été achetées en toute bonne foi par des canaux de l'Ouest que l'on montre aussi dans la région de l'Atlantique et, à cause de vos services, ces canaux dans l'Ouest ne peuvent plus vérifier pour leurs annonceurs, pour ceux qui paient leurs factures dans l'Ouest, qu'ils ont en fait les téléspectateurs pour lesquels paie l'annonceur. Par exemple, pour Survivor, émission qui marchait très bien il y a un an ou un an et demi, je ne sais plus trop quand, les téléspectateurs ont découvert qui était le survivant sur une station de la région de l'Atlantique grâce au satellite. Quel remède avez-vous pour ce que j'appelle le marché rouge?
À (1005)
M. David McLennan: C'est une question dont nous discutons beaucoup en ce moment avec l'ACB et j'hésite donc un peu à parler de la solution tant que nous n'avons pas plus de détails. Mais nous travaillons avec les radiodiffuseurs et leur association afin d'essayer de parvenir à une solution équitable de leur point de vue.
M. Jim Abbott: Si vous permettez, j'estime que tout comme vous devez vous soucier des marchés gris et noirs, les radiodiffuseurs de l'Ouest du Canada s'inquiètent, et c'est très compréhensible, de ce que vos services et les services de Star Choice font sur ce marché rouge.
M. David McLennan: Évidemment, nous respectons tout à fait leurs droits et nous essayons de trouver une solution à ces problèmes.
M. Jim Abbott: J'aurais une dernière question à propos de la télévision haute définition. Je suis ni technophobe ni technophile mais, d'après ce que je sais, si l'on remonte à 50 ans en arrière en Europe, alors que la technologie était loin de ce que nous connaissons aujourd'hui, évidemment, la France avait décidé d'adopter une norme particulière pour les postes de télévision qui seraient vendus et utilisés en France. Elle a ainsi éliminé en France la possibilité pour les téléspectateurs d'avoir accès à des signaux du Luxembourg, de la Belgique ou de la Suisse où la technologie était légèrement différente.
Vous me corrigerez si je me trompe, mais on m'a laissé entendre qu'étant donné que nous en sommes au tout début de la télévision haute définition, nous en sommes arrivés à un point au Canada--et comprenez que ce n'est pas nécessairement ce que je recommande, je vous pose simplement la question--où nous pourrions établir une norme pour la télévision haute définition qui serait différente de celle qui s'applique aux récepteurs des États-Unis. Ce faisant, nous pourrions capter et enfermer les téléspectateurs dans un mur technologique. Il faudrait aller acheter un téléviseur aux États-Unis pour voir les signaux transmis par un satellite américain ou autre. Je crois qu'il y a des moyens de le faire mais je voulais savoir si c'était quelque chose que recommanderait Bell? Bell recommanderait-elle que, de cette façon, nous puissions entourer le Canada d'un pare-feu technologique?
M. David McLennan: Je vais commencer, Chris, et vous pourrez compléter.
Certes, le concept du pare-feu... Vous avez raison, nous en sommes au début de la télévision haute définition au Canada et il va falloir définir certaines normes. C'est très important mais ça l'est en ce qui concerne les réseaux privés. Il y a aussi la question de savoir comment nous diffuserions des services de haute définition avec notre technologie. Elle serait particulière à Bell ExpressVu et si nous avions une série de signaux haute définition canadiens à offrir, ils seraient disponibles pour tous nos clients du fait de notre technologie. Évidemment, cette technologie peut être différente de celle du câble ou de Star Choice qui auraient aussi une technologie différente de ce qu'utiliseraient les diffuseurs privés.
Pour ce qui est d'un pare-feu face au réseau privé, la situation serait très vite que l'on se contenterait d'acheter un téléviseur américain équipé du matériel voulu si l'on voulait capter les émissions haute définition américaines privées.
M. Ian Gavaghan: J'ajouterais simplement une chose. Les télévisions numériques peuvent envisager un certain nombre de procédés différents. Je suppose donc que, contrairement à l'exemple que vous donniez de la télévision analogue et de tous les circuits câblés, il y aurait des télévisions sur le marché--en fait, il y en a déjà aujourd'hui--qui pourraient recevoir tout un éventail de types d'émissions haute définition.
M. Chris Frank: J'ajouterais d'autre part, monsieur, que David a parlé tout à l'heure de l'importance du marché canadien et du fait qu'il compte 12 millions de foyers ayant la télévision. Nous vivons à côté d'un pays dont le marché est évidemment beaucoup plus développé et où il y a beaucoup plus de foyers qui ont la télévision.
Dans un monde parfait, votre idée d'un pare-feu serait défendable. Malheureusement, nous vivons dans un monde entouré de réalités économiques. Il serait impossible pour les fabricants de fabriquer un poste spécifique pour le marché canadien et de le vendre de façon rentable. Il y aurait un tel écart de prix entre les télévisions au Canada et aux États-Unis que ce que disait David se produirait certainement. On achèterait des téléviseurs américains et on capterait DIRECTV ou EchoStar si bien que l'on n'aurait rien gagné.
Nous réalisons d'importantes économies à être à côté d'une grande puissance économique. Ces économies d'échelle font que le prix à l'unité de notre décodeur ou téléviseur est plus bas. Il est donc inévitable que nous ayons la même norme que les États-Unis pour la TVHD et pour un certain nombre d'autres produits de consommation.
À (1010)
Le président: Bien, il faut que nous poursuivions car si l'on veut être juste...
[Français]
Mme Christiane Gagnon: [Note de la rédaction: inaudible].
[Traduction]
Le président: Non, il faut continuer et je demanderais à la fois aux députés et aux témoins d'être brefs dans leurs questions et leurs réponses.
Nous allons entendre M. Gallaway, puis Mme Gagnon et nous devrons en finir.
M. Roger Gallaway (Sarnia--Lambton, Lib.): Merci, monsieur le président. Je serai bref.
D'autres témoins nous ont parlé des 600 000 clients des marchés gris et noir. Comment évalue-t-on ce nombre?
M. David McLennan: L'ACTC a commandé une étude dans le sud-ouest de l'Ontario qui vient de se terminer. Elle a essentiellement déterminé le nombre d'abonnements au satellite et au câble et, pour la catégorie satellite, d'abonnements au satellite américain. On a ensuite extrapolé ces résultats à partir, si je ne m'abuse, d'entrevues avec plus de 1 000 personnes. On a fait une extrapolation nationale et c'est la façon dont on est parvenu à ce chiffre.
M. Roger Gallaway: D'accord, merci.
Je viens du sud-ouest de l'Ontario. Y a-t-il une concentration géographique du gris et du noir ou est-ce généralisé dans le pays? Pouvez-vous faire une ventilation entre le gris et le noir? Qu'est-ce que cela représente dans chaque cas?
M. David McLennan: Tout d'abord, je pense qu'il s'agit surtout d'un marché noir. Au départ, c'était probablement davantage un marché gris, mais c'est maintenant devenu un marché noir.
Le problème touche-t-il davantage une région particulière du Canada? Je ne le pense pas. À mon avis, le problème existe partout dans le pays. Il existe dans les régions rurales et dans les régions urbaines. Il existe partout.
M. Roger Gallaway: Comme dernière question, on emploie toutes sortes de qualificatifs au sujet de ceux qui fonctionnent en marge de la loi. On a même parlé de vol. On a dit que ces gens étaient des voleurs. Pourquoi le font-ils? Est-ce une question de coût ou est-ce que cela tient au choix d'émissions?
M. David McLennan: Ceux qui percent les codes le font certainement pour des raisons économiques. Ils vendent les codes ou les décodeurs pour contourner nos systèmes et ceux des autres distributeurs pour leur propre bénéfice. C'est donc...
M. Roger Gallaway: Je voulais parler des gens sur le marché noir.
M. David McLennan: Ce sont les gens qui évoluent sur le marché noir. Ce sont les pirates qui empiètent sur notre accès conditionnel et celui des autres et qui vendent les codes ou le matériel à d'autres pour que ceux-ci puissent regarder les émissions gratuitement.
M. Roger Gallaway: Oui, mais je songeais à l'utilisateur. À celui qui a une antenne pirate chez lui. Pourquoi le faire? Je ne veux pas parler des...
M. David McLennan: C'est aussi en grande partie pour des raisons économiques parce qu'ils peuvent acheter un seul dispositif qui peut coûter de 50 à 100 $ ou peut-être un peu plus sans avoir à payer des droits d'abonnement mensuels par la suite. Ils peuvent visionner presque toutes les émissions distribuées par DIRECTV, qui est un service de taille, en faisant un petit versement au départ et sans payer de frais d'abonnement mensuels.
M. Roger Gallaway: Une dernière question rapide.
Je ne suis pas certain de bien comprendre comment tout cela fonctionne, mais je crois savoir que si j'ai un de ces systèmes illégaux, vous embrouillez la transmission régulièrement et je dois chaque fois payer le pirate pour percer le code. N'est-ce pas ainsi que cela fonctionne?
M. David McLennan: Je vais essayer de résumer comment cela se passe. Prenons l'exemple de DIRECTV ou d'EchoStar.
Un client au Canada possède un service piraté de DIRECTV ou d'EchoStar. Ces compagnies peuvent, comme nous-mêmes, modifier leurs codes. La carte ou le système piraté ne fonctionneront plus à ce moment-là. Le client devra faire réaligner son système ou sa carte selon les nouveaux codes que les pirates de logiciels ou de systèmes auront découverts pour recommencer à voir les émissions. Il y a donc régulièrement des contacts entre le fournisseur de services et le...
À (1015)
M. Roger Gallaway: Ce que je veux savoir, c'est si le fait d'avoir un système piraté vous économisera de l'argent au bout de l'année.
M. David McLennan: Cela dépend de l'assiduité du fournisseur de services à modifier les codes pour que le client doive dépenser plus d'argent pour acheter une nouvelle carte ou un nouveau dispositif.
M. Roger Gallaway: Avez-vous des chiffres montrant ce que paient les gens pour un système piraté?
M. David McLennan: Je pense qu'ils coûtent de 50 $ à 100 $.
Ian?
M. Ian Gavaghan: Cela varie.
M. Roger Gallaway: Ce que je voudrais, c'est comparer le coût de vos services à celui d'un service piraté.
M. David McLennan: Essentiellement, une fois que le client a acheté le matériel, nous faisons concurrence à quelque chose de gratuit parce qu'il n'y a pas de frais mensuels pour le service.
M. Roger Gallaway: Très bien.
[Français]
Le président: Madame Gagnon.
Mme Christiane Gagnon: Je pense qu'on n'a pas abordé la question de la levée du pourcentage sur les propriétés étrangères. Quelques témoins nous ont dit que cela aurait un impact positif sur le développement de leur entreprise. Quels seraient les avantages ou les désavantages pour vous si on décidait de lever cette barrière que constitue le pourcentage sur les propriétés étrangères?
[Traduction]
M. David McLennan: Je n'essaie pas d'éviter de répondre à votre question, mais je dois dire que BCE témoignera devant votre comité d'ici quelques semaines pour parler de la question de la propriété étrangère du point de vue de toute la compagnie. Je préférerais donc ne rien dire pour l'instant. Merci.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Merci.
[Traduction]
Le président: Avant de terminer, je voudrais dire une chose. Nous avions invité vos deux rivales, Star Choice et Look Communications, à témoigner en même temps que vous. Elles ont cependant décidé de ne pas venir témoigner. Je tenais à le préciser pour que tout le monde comprenne que nous voulions accueillir tous ceux qui étaient prêts à témoigner et que nous avions invité ces deux autres compagnies.
Avant de terminer, je voudrais apporter une précision à une question que vous a posée Mme Lill à propos de l'espace vert. Si j'ai bien compris—d'après leurs mémoires, certains intervenants voudraient que nous examinions cette question—«l'espace vert» est défini comme un ensemble de programmation publique. Cela regrouperait des réseaux comme Vision TV, qui peuvent être considérés comme un service public, la SRC et d'autres. Tous les canaux publics seraient regroupés au lieu qu'on ait un groupe strictement canadien composé de canaux privés et publics. Pouvez-vous nous dire si vous jugez que ce serait utile ou non? Certains témoins nous ont fait une demande précise à ce sujet.
M. David McLennan: C'est certainement possible de le faire puisque, comme Chris vous l'a dit, par exemple, nos canaux locaux sont regroupés. Ces canaux sont regroupés logiquement dans le guide de programmation électronique et, une fois que vous avez étudié le guide quelque temps, vous savez quel type d'émissions renferme un secteur particulier du guide. Vous saurez qu'il faut aller à la section 200 pour tel genre de programmation et à la section 300 ou 400 pour d'autres types de programmation. C'est certainement possible de le faire sur le plan technique et nous avons déjà quelque chose du genre dans notre propre service maintenant.
Avez-vous quelque chose à ajouter à cela, Chris?
M. Chris Frank: Monsieur le président, nous connaissons très bien le principe des «paliers de fondation»...
À (1020)
M. Clifford Lincoln: Le palier de fondation.
M. Chris Frank: ...que des compagnies comme Vision TV ont proposé et, comme je l'ai déjà signalé, nous sommes très heureux de pouvoir vous dire que nous avons déjà ce palier de fondation dans le cadre de notre service de base. Nous sommes déjà convertis. Nous le faisons déjà et nous l'avons fait depuis nos débuts. Nous nous étions engagés à fournir un service de base entièrement canadien, avec quelques éléments clés comme Vision TV, les réseaux éducatifs, la SRC, les réseaux privés nationaux, le Weather Network, MétéoMédia, Newsworld, RDI et CPAC pour offrir des émissions d'information, d'actualité et de divertissement aux Canadiens à un prix abordable.
Le président: Merci.
Monsieur McLennan, messieurs, nous vous sommes vraiment reconnaissants d'être venus aujourd'hui. Nous attendrons avec impatience la documentation que vous avez promis de nous fournir au sujet du marché noir et du marché noir inverse. Merci beaucoup d'être venus.
M. David McLennan: Merci, monsieur le président et membres du comité.
Le président: Je vais maintenant inviter les représentants de Telesat Canada à s'avancer. Nous accueillons M. Paul D. Bush, vice-président du développement corporatif de Telesat Canada, et M. Bob Power, directeur des affaires réglementaires.
Monsieur Bush, la parole est à vous. Merci d'être venu.
M. Paul D. Bush (vice-président, développement corporatif, Télésat Canada): Merci beaucoup. Nous vous remercions de votre invitation, monsieur le président et membres du comité.
Mes propos d'aujourd'hui sont tirés directement du document que nous avons présenté en août. Nous en avons des exemplaires supplémentaires que nous pouvons laisser à la greffière.
Il y a trois choses dont je voudrais parler ce matin. Je voudrais d'abord vous dire qui nous sommes, qui est Télésat, deuxièmement, où nous nous situons dans le système de radiodiffusion canadien et, troisièmement, j'aurais quelques observations à formuler. Télésat se considère comme un élément fondamental de l'infrastructure du système. Je parlerai surtout des installations et le reste en découlera.
Télésat a été constitué en 1969 par une loi du Parlement. Nous possédons et exploitons les satellites de communication canadiens. Le tout premier satellite canadien, Anik A1, a été lancé en 1972. En fait, le Canada a été le premier pays à se doter de son propre satellite commercial.
Jusqu'ici, nous avons réussi à lancer 13 satellites au Canada. Quatre d'entre eux fonctionnent toujours tandis que les autres ont été soit mis hors service ou sortis de leur créneau orbital respectif. Nous louons et nous fournissons une capacité de transmission aux radiodiffuseurs de même qu'aux compagnies de téléphone et aux fournisseurs de services Internet pour qu'ils puissent assurer leurs services dans l'ensemble du pays.
Les satellites couvrent la totalité du Canada, de l'extrémité nord de l'île de Baffin à l'extrémité sud de l'Amérique du Sud grâce à nos derniers satellites. Nous couvrons un très vaste territoire.
En 2001, les recettes de Télésat se sont chiffrées à 320 millions de dollars. Plus de la moitié, soit 54 p. 100, provenaient du secteur de la radiodiffusion et principalement des entreprises de radiodiffusion canadiennes. Nous sommes une entreprise privée qui appartient en totalité à BCE. Nous avons une main-d'oeuvre technique et très spécialisée constituée de 600 employés répartis aux quatre coins du pays. Nous avons des bureaux de Vancouver à St. John's de même que dans le Nord. Nous ouvrons également de plus en plus de divisions en Amérique du Sud et aux États-Unis au fur et à mesure que nous élargissons notre champ d'activités.
Nous sommes considérés comme un chef de file mondial des communications par satellite. Comme le Canada a été le premier pays à lancer un satellite, nous avons pu profiter de cet avantage pour offrir des services de consultation. L'année dernière, ces services représentaient 10 p. 100 de nos recettes et nos clients étaient notamment la Grèce, des pays d'Asie du Sud-Est et des entreprises du monde entier qui sont dans le secteur des satellites.
La fourniture d'une capacité de transmission par satellite constitue notre principal secteur d'activités. C'est un marché très concurrentiel. Depuis la mise en oeuvre de l'accord de l'Organisation mondiale du commerce, en mars 2000, le gouvernement canadien a autorisé une cinquantaine de satellites étrangers à desservir le Canada. Il y a donc de la concurrence.
Quelle place occupons-nous dans le système de radiodiffusion canadien? En quelques mots, nous nous situons dans plusieurs secteurs différents. Nous sommes à 37 000 kilomètres, là où les satellites orbitent dans l'espace. Nous alimentons les services de diffusion directe et de câble. Nous fournissons les installations qui couvrent tout le Canada et, comme je l'ai mentionné, 70 p. 100 de notre capacité est utilisée par les radiodiffuseurs et 95 à 96 p. 100 des radiodiffuseurs du Canada se servent actuellement des satellites de Télésat pour distribuer leurs signaux.
Nous sommes également présents au sol. Autrement dit, nous négocions avec les radiodiffuseurs pour que leurs signaux soient captés par les satellites et retransmis dans l'ensemble du pays. Nous avons une importante infrastructure terrestre constituée d'un réseau de téléports et d'installations partagées auxquelles la SRC, CTV, Star Choice, ExpressVu et d'autres radiodiffuseurs envoient leurs services que nous retransmettons jusqu'aux satellites.
Et nous sommes aussi une entreprise sur la même longueur d'onde que l'industrie de la radiodiffusion. C'est indispensable si nous voulons concevoir le bon type de satellites et assurer notre succès étant donné que cela représente une part importante de nos activités.
À (1025)
Je voudrais maintenant mentionner certaines questions qui ont été abordées au cours de la discussion avec ExpressVu.
Comme je l'ai dit, le premier satellite a été lancé en 1972. Depuis, le Canada a été très novateur sur le plan de la technologie des satellites. À la fin des années 70, nous avons lancé le premier satellite bande Ku qui permettait d'avoir des antennes paraboliques plus petites, ce qui a vraiment conduit à la DTH. Dans les années 80, nous avons travaillé à la compression vidéo numérique, qui est en quelque sorte l'opposé de la télévision à haute définition et qui nous permet de transmettre davantage de chaînes avec le même satellite. Et comme ExpressVu l'a mentionné, en ce qui concerne la télévision interactive et la télévision à haute définition, nous sommes en train de voir où se dirige le marché afin de faire en sorte que nos satellites et nos installations pourront s'y adapter.
Nous avons inclus dans notre mémoire une section sur les innovations techniques qui fait partie du document que nous avons déposé.
Pour quantifier notre participation à l'industrie de la radiodiffusion canadienne, je voudrais vous citer quelques chiffres. Comme je l'ai mentionné, les satellites Anik et Nimiq transmettent 95 p. 100 des signaux de radiodiffusion du Canada. Nos installations desservent à la fois les câblodistributeurs et les services de radiodiffusion directe et comme il y a au Canada 8,5 millions de foyers qui ont le câble et 2 millions qui reçoivent le service DTH, cela correspond assez bien à la règle du dix pour un. Il y a en effet environ 20 millions d'usagers du service DTH aux États-Unis tandis qu'au Canada, nous nous rapprochons des 2 millions. La proportion est donc toujours de dix pour un.
Nos satellites et notre réseau de téléports assurent des services essentiels à nos radiodiffuseurs nationaux, la SRC, Global et CTV. Ils desservent également les localités du Nord. Au Canada, étant donné la morphologie du pays et sa démographie, il est souvent très difficile d'installer des réseaux et divers types d'installations terrestres. Les satellites comblent cette lacune et les radiodiffuseurs utilisent 70 p. 100 de notre capacité.
En résumé, Télésat assure, tant dans l'espace qu'au sol, des services essentiels qui servent de base au système de radiodiffusion canadien.
Télésat continuera de travailler avec les radiodiffuseurs canadiens et nous sommes venus ici aujourd'hui pour soutenir les radiodiffuseurs tant pour les services traditionnels que les nouveaux services, les EDR et les services DTH. Nous conserverons et élargirons ce marché étant donné qu'il représente l'essentiel de nos activités. Il faut donc, pour permettre à Télésat de prendre de l'expansion et au Canada de demeurer très présent sur le marché mondial des satellites que les législateurs, le gouvernement et les organismes de réglementation tiennent compte d'un certain nombre de choses que je voudrais souligner.
Premièrement, les installations de Télésat--et les satellites en général--fonctionnent dans une zone de libre-échange située à 37 000 kilomètres au-dessus de la terre. Je veux dire par là que même si, jusqu'ici, nos succès et nos échecs ont été mesurés par les résultats obtenus au Canada, nos réussites futures seront de plus en plus déterminées par des facteurs externes. Nos coûts sont très semblables à ceux de nos concurrents. En fait, ils sont identiques. Nos coûts d'assurance sont les mêmes que ceux des Américains ou des Européens. Et notre croissance future dépend de notre capacité de prendre de l'expansion dans des nouveaux marchés.
Deuxièmement, Télésat se réjouit de la concurrence. En fait, au cours des négociations de l'OMC, Télésat a renoncé à l'exclusivité dont elle bénéficiait au Canada deux ans à l'avance. Nous l'avons fait pour pouvoir accéder au marché des États-Unis et de l'Amérique du Sud. C'était donc pour gagner le marché des Amériques. Nous étions prêts à nous établir sur ces nouveaux marchés, forts de l'expérience acquise au Canada.
Pour soutenir la concurrence, nous avons augmenté nos dépenses pour les satellites. Au cours des quatre dernières années, nous avons dépensé plus de 1,2 milliard de dollars pour construire trois nouveaux satellites: premièrement, le satellite Nimiq qu'utilise ExpressVu, deuxièmement, Anik F1, qui a été lancé en 2000 et troisièmement, Anik F2 que nous sommes en train de terminer et qui sera lancé en juin de l'année prochaine. Nous construisons également Nimiq-2, un deuxième satellite de communication directe. Je précise que les satellites coûtent environ 4 à 5 millions de dollars pièce. C'est donc une entreprise coûteuse, mais nous croyons qu'il s'agit d'un excellent investissement pour consolider le système canadien et accroître notre expansion.
L'augmentation de la capacité de transmission a été très positive pour l'industrie de la radiodiffusion. Non seulement elle dispose de la capacité supplémentaire que nous avons mise en orbite ou que nous construisons, mais elle a également un moyen d'exporter ses produits vers d'autres pays et de se prévaloir d'un des systèmes de diffusion par satellite les plus fiables au monde.
À (1030)
Cela m'amène à une troisième recommandation: pour que le Canada puisse continuer à jouer un rôle très important dans le secteur des radiodiffusions canadiennes, votre comité et les autres organismes gouvernementaux devraient reconnaître les effets qu'une réglementation trop lourde risque d'avoir sur l'avenir de l'entreprise. Alors qu'il y a eu un assouplissement des règles de l'OMC, Télésat est assujettie à des contraintes politiques, une réglementation et des prélèvements beaucoup plus lourds que ses concurrents. Par exemple, nous payons des droits annuels de licence pour utiliser les créneaux orbitaux. Pour Nimiq--et ce sont les radiodiffuseurs qui doivent en faire les frais--les droits de licence s'élèvent à 2,1 millions de dollars par année tandis que pour les exploitants américains de satellites de communication directe, les frais équivalents ne sont que de 100 000 $. Nous payons donc beaucoup plus que nos concurrents.
Au Canada, nous devons également investir dans la R-D et nous sommes entièrement d'accord. Télésat a un vaste programme de R-D pour les régions rurales et isolées du pays, mais cette charge n'est pas imposée à nos concurrents lorsqu'ils viennent au Canada.
De plus, Télésat met une partie de sa capacité au service du public. Autrement dit, une partie de la capacité du satellite Nimiq est utilisée pour le bien public. Dans chacun de nos satellites Anik, une série de transpondeurs est réservée à des utilisations pour le bien public.
Les législateurs et les organismes de réglementation doivent reconnaître que les droits, obligations et règlements qui s'appliquent à Télésat ne peuvent plus être fixés isolément, autrement dit en fonction uniquement du marché canadien. Il faudrait tenir compte de la concurrence qui est très présente en Amérique du Nord, faute de quoi cette entreprise canadienne ne pourrait pas garder sa place sur le marché nord-américain des satellites.
En quatrième lieu, je voudrais dire que les législateurs et les organismes de réglementation doivent établir les politiques et adopter les lois visant les industries de la radiodiffusion et des télécommunications d'une façon mieux coordonnée. Je vais vous donner un exemple démontrant la nécessité d'une meilleure coopération entre les décideurs politiques.
Cet exemple est la décision CRTC 2001-435 dans laquelle le Conseil a imposé une redevance aux entreprises de télécommunications canadiennes dont Télésat fait partie. En 2001, cette redevance s'élevait à près de 9 millions de dollars et visait à réduire le coût élevé des services de télécommunications dans les régions isolées et mal desservies du pays, ce que nous approuvons entièrement. Cette mesure a eu pour effet d'imposer doublement Télésat.
Comme Télésat détient une licence pour ses satellites, elle doit assumer des coûts supplémentaires pour construire des satellites couvrant l'ensemble du pays. Autrement dit, les satellites canadiens couvrent le Nord tandis que nos concurrents couvrent Los Angeles et la Floride en débordant sur le Canada. Nous devons donc déjà débourser de l'argent pour pouvoir construire des satellites qui couvrent l'ensemble du pays, car c'est une des conditions de notre licence. Nous versons donc déjà notre contribution pour desservir le Nord.
La décision du CRTC impose donc indirectement les radiodiffuseurs: 54 p. 100 de nos recettes proviennent des radiodiffuseurs, lesquels utilisent nos satellites à 70 p. 100. Cette somme de près de 9 millions de dollars se répercute directement sur nos clients. Les radiodiffuseurs ont été lourdement touchés par cette redevance.
Pour prendre l'exemple du téléphone, c'est comme si, en tant qu'abonné, on vous imposait une redevance pour pouvoir verser de l'argent dans le fonds de production. Encore une fois, il s'agit donc d'assurer une coordination entre les divers droits et redevances. C'est une question qu'il faudrait examiner. Nous sommes convaincus que ces deux lois n'ont pas été créées dans ce but et l'Association canadienne des radiodiffuseurs ainsi que l'Association canadienne des utilisateurs de satellites ont fait appel de cette redevance au Cabinet.
Pour conclure, dans le cadre de votre étude de l'état du système de radiodiffusion canadien, nous vous demandons d'examiner un certain nombre de questions. Premièrement, reconnaissez la position bien particulière que Télésat occupe au Canada dans le secteur des télécommunications et de la radiodiffusion. Il faut coordonner les objectifs politiques et les impératifs législatifs s'appliquant à ces deux secteurs afin que chacun d'eux puisse prospérer, sans être pénalisé, grâce à une double réglementation pour les entreprises qui fonctionnent dans les deux secteurs.
À (1035)
Reconnaissez que Télésat évolue déjà dans un climat très concurrentiel dans le cadre de l'OMC. La réglementation dans l'espace, dans les créneaux orbitaux et dans la façon dont nous obtenons des droits dans les autres pays est dictée, dans une large mesure, par l'accord de l'OMC. Les droits, règlements et objectifs politiques ne devraient pas nous empêcher de soutenir la concurrence dans notre propre pays ou de nous implanter à l'étranger sans frais supplémentaires.
J'aimerais parler un peu de la télévision directe par satellite tant en ce qui concerne Star Choice qu'ExpressVu qui ont lancé leurs services DTH avec beaucoup de succès au Canada. Pour un bon nombre d'entre nous, c'était le couronnement de plus de 20 années d'efforts. Le lancement de ce service a eu des répercussions positives sur l'industrie en ce sens que vous avez maintenant le choix. Je crois qu'on en a déjà parlé, mais je dirais qu'il est très difficile de légiférer s'il n'y a pas le choix. Les Canadiens ont maintenant le choix entre deux services et nous nous réjouissons de voir que plus de 2 millions d'entre eux ont opté pour un service canadien.
Ce choix permet également d'avoir des installations en double. Non seulement nous avons un système qui alimente le câble, mais nous avons également un système SRD qui alimente la diffusion directe. Il y a un certain dédoublement qui rend le système beaucoup plus robuste au cas où un satellite tomberait en panne ou nous perdrions certains éléments du système.
Je vous exhorte également--et je crois qu'il en a été question au cours de votre discussion avec ExpressVu--à soutenir les efforts nécessaires pour lutter contre le marché gris et le marché noir. Cela représenterait des chiffres de 500 000 à 600 000 clients. Étant donné que Star Choice ou ExpressVu pourraient obtenir des recettes de 40 à 50 $ par mois, c'est une somme d'argent énorme qui part vers le sud ou qui n'entre pas dans le réseau canadien.
Nous sommes convaincus que nous devons consolider nos assises. Notre principal atout réside dans nos relations avec l'industrie canadienne de la radiodiffusion. Comme nous faisons partie intégrante du réseau canadien de radiodiffusion, en permettant à Télésat de continuer à grandir et à se trouver sur un pied d'égalité avec ses concurrents d'Amérique du Nord, vous consoliderez non seulement la viabilité de l'exploitant des satellites canadiens, mais vous permettrez aux radiodiffuseurs du Canada de conserver l'un des réseaux de satellites les plus avancés, les plus fiables et les plus rentables au monde.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bush. Nous allons maintenant passer aux questions.
Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott: Je vous remercie.
J'aimerais simplement que vous me confirmiez--et je crois que c'est le cas--que Star Choice et ExpressVu sont tous les deux être distribués à l'aide de vos satellites?
À (1040)
M. Paul Bush: Oui. Star Choice est distribué à l'aide des satellites Anik, Anik F1 et Anik F2. ExpressVu est distribué par le satellite Nimiq-1, et comme M. David McLennan l'a mentionné, le deuxième satellite Nimiq sera lancé en décembre de cette année.
M. Jim Abbott: Comme vous exercez effectivement un monopole--bien entendu c'est un mot affreux--les dispositions que vous avez prises avec Star Choice et ExpressVu, c'est-à-dire les dispositions financières et autres, sont-elles identiques? Étant donné que vous êtes la propriété de Bell et que Bell ExpressVu appartient de toute évidence à Bell, cela ne donne-t-il pas un avantage à Bell ExpressVu sur Star Choice?
M. Paul Bush: Permettez-moi de répondre d'abord à la première question.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, 54 satellites sont autorisés à offrir un service au Canada. Pour ce qui est de l'accès aux installations par satellite d'autres entreprises, elles peuvent être utilisées par les fournisseurs de services et les radiodiffuseurs canadiens aujourd'hui. En réalité, il existe trois exploitants aux États-Unis, et l'un d'entre eux vient d'être acheté par un exploitant européen, ce qui signifie qu'il y a en fait deux exploitants aux États-Unis. Donc oui, nous sommes le seul exploitant au Canada et nous nous sommes battus avec acharnement pour nous assurer de conserver notre place au Canada et prendre de l'expansion.
En ce qui concerne les contrats que nous avons conclus avec l'industrie de la câblodistribution, comparativement à ceux conclus avec l'industrie de la radiodiffusion directe et avec nos menaçants concurrents qui sont dans l'industrie de la téléphonie et qui utilisent aussi nos services, les dispositions commerciales sont tout à fait les mêmes, en fonction de ce qui est négocié en bout de ligne. Dans bien des cas, comme pour Nimiq, les contrats sont déposés en fait auprès du CRTC.
M. Jim Abbott: En ce qui concerne votre capacité, vous avez vraisemblablement une certaine capacité de réserve ou vous pourriez créer une certaine capacité de réserve sur le plan technologique. Avant de poursuivre, s'agit-il d'une hypothèse correcte de ma part?
M. Paul Bush: À l'heure actuelle, la capacité du système canadien est en fait assez serrée. C'est pourquoi nous sommes en train de lancer les satellites Anik F2 et Nimiq-2.
Pour ce qui est des types de services de Star Choice ou en ce qui concerne le service de câblodistribution, il existe effectivement une capacité disponible; donc nous n'avons pas été aussi limités pour nos services fixes par satellite ou nos services Anik. Dans le cas de Nimiq, nous avons été limités jusqu'à présent parce que nous n'avons qu'un satellite pour assurer ce service. Cependant, à compter de décembre nous en aurons un deuxième qui permettra clairement d'accroître cette capacité.
M. Jim Abbott: Donc vous prévoyez le lancement de deux nouveaux satellites qui permettront d'accroître assez considérablement votre capacité.
M. Paul Bush: Oui.
M. Jim Abbott: En ce qui concerne cette capacité accrue, je crois que M. Cuzner a posé une question plus tôt à propos de l'accès Internet à large bande. Sans débattre de la sagesse d'une telle initiative et du modèle qui permettrait d'offrir un accès à large bande, à votre avis, avec le lancement de ces deux nouveaux satellites, la capacité sera-t-elle suffisante pour permettre d'offrir un accès à large bande aux régions éloignées du Canada?
M. Paul Bush: Oui, à notre avis, ce sera possible grâce à la capacité que nous sommes en train de développer. En fait, dans un certain nombre de projets auxquels nous avons travaillé, depuis SmartLabrador jusqu'à K-Net dans le nord de l'Ontario, en passant par la télépsychiatrie en Colombie-Britannique, nous avons effectué un certain nombre de projets pilotes afin de développer cette capacité de manière à offrir un accès à large bande.
Nous sommes en train d'ajouter deux satellites particuliers. Le satellite Anik F2 a une charge utile très particulière destinée aux services interactifs à deux voies. ExpressVu s'intéresse à DirecPC et il s'agit d'une première étape très importante dans la fourniture des services Internet. En ce qui concerne l'aspect satellite, nous nous occupons des deuxième et troisième étapes. La nouvelle capacité sera lancée en juin prochain et permettra de desservir l'ensemble du Canada depuis l'île de Baffin jusqu'à l'île de Vancouver, et offrira à plusieurs centaines de milliers de Canadiens l'accès à un service Internet à deux voies.
L'autre façon dont nous envisageons de répondre à ces besoins, c'est à l'aide d'un modèle d'accès communautaire. Grâce aux bandes C et Ku de fréquences différentes, semblables à ce qu'utilisent aujourd'hui les radiodiffuseurs et les câblodistributeurs, vous pouvez installer un tube, si on peut dire, au centre de la ville--qu'il s'agisse d'un centre communautaire ou d'un détachement de la GRC--puis utiliser des modems sans fil, câblés ou téléphoniques pour pouvoir communiquer avec l'extérieur.
Donc, pour répondre brièvement à votre question, oui, nous estimons que la capacité est satellisée aujourd'hui ou est en train d'être lancée, et qu'elle permettra de répondre à ce besoin. Au Canada, il y a un peu moins de 6 000 collectivités en tout, dont 4 700 n'ont pas accès à Internet à haute vitesse. Nous considérons qu'un certain nombre d'entre elles seront desservies par le système à fibre optique et par les technologies traditionnelles à long terme, mais 1 000 à 2 000 d'entre elles ne le seront pas. Nous sommes tout à fait convaincus que l'on pourra combler cette lacune grâce au satellite.
M. Jim Abbott: Est-ce que la bande serait assez large pour répondre à bon nombre de tout nouveaux besoins, par exemple, l'enregistrement et la lecture en continu?
M. Paul Bush: Les avis divergent beaucoup à ce sujet. J'ai siégé au comité consultatif sur Rescol et je participe à plusieurs autres projets aujourd'hui. Je vous assure qu'il y a des points de vue bien différents sur la question. Certaines personnes voudraient des tonnes de térabits; elles veulent avoir accès à une transmission à haute vitesse à la maison. Mais ce qui nous semble vraiment important par ailleurs, c'est de pouvoir tenir des vidéoconférences.
Dans certains projets auxquels nous avons travaillé, nous avons essayé d'évaluer les véritables besoins de la collectivité. Au cours des deux ou trois dernières années, nous avons constaté que la plupart des collectivités veulent avoir accès au réseau Internet à haute vitesse. Elles ont actuellement l'accès par ligne commutée mais veulent absolument se doter d'un système qui leur permettra d'avoir accès en permanence à Internet. Et ce que les uns et les autres jugent acceptable varie énormément. Faut-il disposer d'un ou deux mégabits? Ou les gens seraient-ils satisfaits si l'on multipliait par 10 leur accès actuel par ligne commutée?
À notre avis, les collectivités que nous avons étudiées pourraient profiter de notre capacité de transmission par satellite. Nous pouvons les intégrer très facilement avec lec systèmes que nous avons déjà ou que nous allons construire au cours des prochaines années.
À (1045)
Le président: Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Dans votre mémoire, vous dites que le gouvernement et les organismes de réglementation devraient mettre en place des politiques plus harmonieuses entre la télécommunication et la radiodiffusion. Vous dites même qu'elles devraient être plus rationnelles. J'aimerais que vous me donniez des exemples de recommandations ou que vous précisiez davantage certains points.
[Traduction]
M. Paul Bush: Nous pensons qu'au moment de revoir nos politiques de radiodiffusion et de télécommunications, il faut tenir compte de l'OMC et des engagements que nous avons pris et que nous avons remplis à cet égard. Il faut aussi tenir compte de la Loi sur les radiocommunications qui établit des balises relativement aux conditions d'octroi de licence, aux droits à payer et aux moyens que nous pouvons prendre pour pénétrer de nouveaux marchés à l'extérieur du Canada.
Je ne propose donc aucune modification précise de la politique pour le moment. Je signale simplement que certaines études sont en cours et qu'au moment de prendre connaissance de leurs résultats, il faudrait tenir compte des différents facteurs.
M. Bob Power (directeur, Affaires réglementaires, Télésat Canada): Permettez-moi d'ajouter quelques précisions à ce sujet. Nous voulons entre autres porter à l'attention du comité aujourd'hui que nous sommes une entreprise de télécommunications et qu'à ce titre nous sommes assujettis à la Loi sur les télécommunications. Nous allons de l'avant dans un environnement de télécommunications libéralisé par l'OMC; cependant, un grand nombre de nos clients sont assujettis à la Loi sur la radiodiffusion. Il arrive quelquefois que des décisions prises en vertu de la Loi sur les télécommunications ont certaines répercussions non voulues sur nos clients radiodiffuseurs.
Permettez-moi de vous donner un autre exemple. L'article 28 de la Loi sur les télécommunications permet au CRTC d'attribuer une capacité de transmission par satellite si cela peut contribuer à la réalisation des objectifs de la Loi sur la radiodiffusion. Il y a donc des liens entre ces divers éléments et nous voulions simplement signaler au comité qu'il faut tenir compte de tous ces facteurs au moment d'élaborer des politiques.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Vous dites que vous avez ouvert votre marché au marché américain dans le cadre de l'Accord de libre-échange. Quelles retombées économiques ce fait a-t-il eu pour votre industrie?
[Traduction]
M. Paul Bush: Pour Télésat et pour l'industrie canadienne, les retombées ce sont les concessions mutuelles. Nous pouvons désormais faire des demandes de licence sur le marché américain, et Bob et son équipe ont réussi à obtenir des licences au Brésil, en Argentine et en Colombie. Pour les compagnies canadiennes, les retombées c'est que désormais nous pouvons vendre nos services sur leur territoire.
Permettez-moi de vous dire qu'il a été très difficile d'obtenir des licences sur leur territoire au cours des deux dernières années puisqu'ils ont utilisé tous les moyens pour freiner l'arrivée de nouveaux venus sur leur marché. Néanmoins, nous avons réussi à obtenir des licences d'accès au marché américain avec nos satellites et à l'exception d'un pays, nous couvrons maintenant toute l'Amérique du Sud. Donc si on considère l'ensemble du marché, l'avantage pour Télésat et pour d'autres exploitants de services par satellite, c'est la capacité de fournir des services des deux côtés de la frontière.
À (1050)
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je ne connais pas toutes les dimensions de l'univers des télécommunications, mais si la réciprocité des marchés vous a fait perdre une partie de votre marché, est-ce qu'elle ne vous en a pas fait gagner d'autres? Il a bien fallu que les autres marchés s'ouvrent à nous.
[Traduction]
M. Paul Bush: Oui, il y a eu une incidence au niveau de nos services. Nous avons perdu un certain nombre de clients qui ont opté pour des satellites américains. S'ils l'ont fait, c'est pour consolider leurs réseaux. Plutôt que de recourir aux services de deux ou trois satellites, ils préfèrent ne recourir qu'à un seul. Cette décision nous a fait perdre une certaine part de marché.
Nous avons perdu des clients à réseau et des clients qui se branchent sur nos services de manière ponctuelle, à la carte, pour des diffusions d'émissions spéciales, de nouvelles en direct ou de sports en direct. Lorsqu'il existe déjà des infrastructures plutôt que de basculer sur l'infrastructure canadienne, ils restent avec l'infrastructure américaine. Cela nous a donc coûté quelques clients.
Du côté de la radiodiffusion, nous avons mis l'accent sur le développement de notre infrastructure et de nos installations pour encourager les radiodiffuseurs à rester avec nous. Si nous avons réussi, c'est parce que nous avons essayé de le faire en partenariat avec les radiodiffuseurs canadiens plutôt que d'essayer de leur vendre un produit inconnu.
Donc, certains de nos secteurs d'activités ont subi des pertes mais dans d'autres, notre présence sur le marché nous a été profitable. L'année dernière, nous avons signé un contrat de service avec General Motors et Ford, un réseau qui alimente toutes leurs concessions. C'est un réseau qui compte de 12 000 à 13 000 sites. Nous avons donc subi des pertes au Canada, mais, comme nous le voulions, nous avons réalisé des gains dans certains secteurs du marché.
Le président: Monsieur Harvard.
M. John Harvard (Charleswood St. James--Assiniboia, Lib.): Merci.
Monsieur Bush, j'aimerais vous poser quelques questions qui font un peu suite à celle que vient de vous poser Mme Gagnon. J'aimerais en savoir un peu plus sur votre environnement concurrentiel et comment les choses ont évolué, si elles ont évolué, depuis la libéralisation des règles de l'OMC. Je crois vous avoir entendu mentionner que 70 p. 100 de votre capacité satellite est utilisée par les radiodiffuseurs; c'est bien cela?
M. Paul Bush: Oui.
M. John Harvard: Quel était ce pourcentage avant la libéralisation des règles de l'OMC?
M. Paul Bush: Il est arrivé qu'il soit un peu plus élevé. Mais nos recettes ont également augmenté. Comme nos recettes ont augmenté, cela n'a rien changé. Sur le plan de nos recettes totales, la radiodiffusion a légèrement fléchi mais nous avons essayé de faire en sorte qu'elles bougent le moins possible. En fait, nos recettes tirées de la radiodiffusion sont relativement stationnaires depuis plusieurs années.
M. John Harvard: Je pensais plus au pourcentage de capacité. Je crois que vous avez parlé de «capacité» et que vous avez dit que 70 p. 100 de votre capacité satellite était utilisée par les radiodiffuseurs. Je me demandais s'il y avait eu un changement depuis la libéralisation des règles de l'OMC.
M. Paul Bush: Dans le cas des radiodiffuseurs, c'est la technologie plus que l'OMC qui l'a déterminé, car il y a eu un mouvement massif vers la compression vidéo numérique au cours des quatre à six dernières années. Il fallait auparavant un canal de télévision par satellite pour transmettre un signal de télévision, tandis que maintenant on en voit six, sept et même huit. Les revenus sont donc restés relativement les mêmes en ce qui concerne les radiodiffuseurs.
Là où nous avons vu une augmentation de capacité, par rapport aux 70 p. 100, c'est avec l'arrivée des nouvelles chaînes spécialisées, en effet, mais c'était principalement dû à l'avènement de la diffusion directe. La diffusion directe a eu une incidence considérable en ce qui concerne la capacité utilisée.
À (1055)
M. John Harvard: Les grands radiodiffuseurs sont CanWest, CTV, et la SRC, n'est-ce pas?
M. Paul Bush: En effet.
M. John Harvard: Ces radiodiffuseurs sont-ils tous vos clients?
M. Paul Bush: Ils sont nos clients directs ou indirects. En d'autres termes, un certain nombre de radiodiffuseurs achètent leurs services de transmission par l'entremise de Star Choice ou d'ExpressVu. CTV et SRC sont en effet des clients directs, mais nous avons aussi des clients indirects dans le cas d'un radiodiffuseur comme Vision, qui achète ses services par l'entremise d'ExpressVu et Star Choice.
M. John Harvard: J'aimerais limiter ma question à la radiodiffusion ou aux clients radiodiffuseurs de votre entreprise. Depuis la libéralisation des règles de l'OMC, il me semble que vous avez pu maintenir votre carnet de clients et que les nouveaux concurrents devenus possibles en raison de la libéralisation ne sont que théoriques pour l'instant. Autrement dit, vous ne perdez pas vos gros clients, du moins jusqu'ici.
M. Paul Bush: Je pense qu'il est important de reconnaître que le secteur des satellites, celui de Télésat, est dominé par 10 à 15 clients. On pourrait dire que bien qu'il n'y ait pas eu une incidence considérable, il y en a quand même eu une grande...
M. John Harvard: Ce n'est pas une critique que je fais, je le mentionne en passant.
M. Paul Bush: Non, je le sais, mais j'essaie seulement de présenter la situation dans son contexte.
Les effets se sont fait ressentir dans certains secteurs du marché de la radiodiffusion. Télésat ne peut pas se permettre de perdre un de ses dix grands clients, parce que si nous en perdons un, cela pourrait entraîner un pourcentage de perte de capacité sur notre satellite--on ne perdrait pas un seul transpondeur, mais dix, et cela aurait des conséquences terribles pour nous.
Pour situer la chose dans son contexte, je rappelle qu'il y a très peu de groupes à qui l'on vend vraiment. Et cela n'est pas limité au Canada, les conditions sont assez semblables dans le monde. Il faut donc essayer de satisfaire ces clients afin de les garder, et c'est ce que nous essayons de faire.
Je pourrais également ajouter que le marché américain s'est ouvert. Quand nous avons pris des mesures pour entrer sur le marché américain--et il nous a fallu deux ans de plus que prévu--nous avons constaté que toutes les entreprises de télécommunications américaines avaient signé avec leurs radiodiffuseurs des contrats à long terme, soit pour les générations futures. C'était une astuce intelligente, je suppose, mais elle nous a empêchés de faire de grands progrès dans le secteur de la radiodiffusion aux États-Unis.
M. John Harvard: Je veux vous poser une autre question, car je ne comprends pas très bien votre secteur.
Lorsque je regarde une émission de télévision chez moi à Winnipeg, que ce soit une émission de la SRC, de CTV, ou de CanWest, toutes les émissions que je regarde chez moi passent par Shaw Cablesystems. Lorsque je regarde une émission, elle vient en fin de compte par voie de satellite également. L'émission passe donc par Shaw et aussi par votre satellite, et pourtant c'est la programmation de l'un de ces radiodiffuseurs. Avez-vous signé des contrats distincts avec Shaw et avec CanWest, ou avez-vous plutôt signé un contrat avec CanWest qui dicte ou stipule effectivement que l'émission paraîtra sur les postes diffusés par Shaw à Winnipeg. Comment les choses fonctionnent-elles?
M. Paul Bush: Non, ils ont habituellement des contrats distincts pour chaque diffuseur. Cependant, dans le cas que vous citez, CanWest fournit en effet ce service par l'entremise de Shaw.
M. John Harvard: Par l'entremise de Shaw.
M. Paul Bush: En effet.
M. John Harvard: Vous avez donc signé un contrat avec CanWest, c'est bien cela?
M. Paul Bush: En fait, nous avons un contrat avec Shaw, et Shaw fournit le service à CanWest. Je pense que c'est ainsi que les choses fonctionnent dans ce cas.
M. John Harvard: Je vois.
M. Paul Bush: Cela dit, il y a cependant d'autres exemples. Les radiodiffuseurs du Québec fournissent leurs services à partir de nos téléports, et ils passent ensuite par les services de Shaw à Winnipeg. C'est un contrat distinct que nous avons avec les radiodiffuseurs du Québec, mais avec SCN, le Saskatchewan Communications Network, nous avons un contrat distinct en vertu duquel l'entreprise fournit ses services. Dans certains cas, nous avons donc des contrats directs avec le radiodiffuseur, tandis que dans d'autres cas cela se fait indirectement. Tout dépend du marché.
M. John Harvard: Je vois.
Merci.
Le président: Merci.
Madame Lill.
Mme Wendy Lill: Je vous remercie de votre exposé.
Vous avez mentionné que vous êtes une entreprise de télécommunications qui va de l'avant aux termes de la Loi sur les télécommunications, mais un grand nombre de vos clients sont régis par la Loi sur la radiodiffusion. C'est un dilemme très intéressant que nous devons essayer de comprendre. Je pense que nous devons nous efforcer de mieux comprendre les liens entre ces deux lois, c'est-à-dire où elles se recoupent, et c'est donc une tâche pour notre comité.
Je suis frappée par le contexte général dans lequel vous fonctionnez. Vous êtes un libre-échangiste pour qui les portes sont grandes ouvertes. Vous fonctionnez dans une zone de libre-échange, mais votre succès est déterminé par des influences extérieures au Canada. Il est certain que vous oeuvrez au niveau international, et il semblerait évident que vous êtes en faveur de la concurrence et que vous voulez qu'elle soit tout à fait libre. En ce qui vous concerne, il doit en être ainsi dans le secteur des télécommunications.
Notre mission est d'examiner le milieu de la radiodiffusion et de trouver des moyens de favoriser l'épanouissement de la culture canadienne dans un environnement qui ne cesse de s'étendre. Nous essayons d'encourager et de favoriser la culture canadienne. La culture ne fait pas l'objet de propositions actuellement. Nous entendons constamment dire qu'elle ne fait pas l'objet de négociations commerciales. Je veux avoir une idée de la façon dont vous faites la quadrature de ce cercle. Vous oeuvrez dans le grand environnement international, et vous ne voulez donc pas de restrictions. Mais les gens disent que le contenu comme tel, ce qui va sur votre plate-forme, doit être soutenu et doit obtenir une certaine protection, et ne devrait pas faire l'objet de négociations. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Je voudrais aussi savoir si vous pensez qu'il faut maintenir des restrictions quant à la propriété étrangère dans votre secteur. Faut-il les éliminer? Examinons certains des enjeux.
Á (1100)
M. Paul Bush: Pour ce qui est de la réglementation relative au contenu, je vous rappelle que nos opinions, notre discussion et ma déclaration liminaire se limitent vraiment aux installations. On peut établir une distinction très nette entre les installations et le contenu, et les permis peuvent être et devraient être différents pour ces deux éléments. L'un est régi plutôt par la Loi sur les télécommunications, qui stipule comment on utilise les bandes de fréquences de part et d'autre des limites géographiques. Nous sommes très à l'aise, du côté des installations, dans un marché concurrentiel.
Je ne veux pas faire le saut et dire qu'il y a concurrence du côté culturel, parce que nous ne faisons pas de commentaires sur les régimes de licence en matière de radiodiffusion, au sujet des licences que doivent obtenir les entreprises de diffusion de radiodiffusion (EDR) au Canada par opposition à celles que doit obtenir une entreprise de câblodistribution ou une entreprise de satellite de radiodiffusion directe (SRD) aux États-Unis. Nos commentaires concernent spécifiquement la concurrence dans le secteur des installations. Nous sommes très disposés à parler de ce secteur. Nous ne sommes pas du tout disposés à parler de contenu et d'autres secteurs, parce que ce n'est pas vraiment notre domaine.
Mme Wendy Lill: Je comprends cela, mais j'aimerais que vous nous disiez si vous pensez qu'il est réellement possible d'avoir des mécanismes de réglementation distincts pour les installations et pour le contenu? Si c'est le cas, pensez-vous que c'est vraiment préférable et que c'est ce que nous devrions faire dans la nouvelle Loi sur la radiodiffusion?
M. Paul Bush: Nous pensons que oui, et nous croyons que c'est l'objectif visé par un certain nombre d'accords conclus aux termes de l'OMC: qu'il y ait concurrence dans le secteur des installations. Il y a une mention en caractères discrets dans les accords conclus dans le cadre de l'OMC, et il y a des exclusions prévues, mais nous estimons généralement qu'il est fort possible de voir une pleine et libre concurrence dans le secteur des satellites, tout en maintenant un régime de licences pour ce qui est des EDR et des entreprises de programmation. C'est au Canada de décider de la voie à choisir. Ce n'est pas aux États-Unis de le faire, ni à un organisme de l'OMC.
Le président: Merci beaucoup, madame Lill.
Puis-je poser quelques questions avant de passer à d'autres témoins? Premièrement, puis-je suggérer que nos attachés de recherche communiquent avec votre bureau au sujet des questions liées au fardeau de la réglementation, de ce qui s'applique à vous, et du régime que vous estimez préférable? Ainsi, nous pourrions vraiment bien comprendre votre situation, quand nous examinerons toute la question. Comme Mme Lill l'a suggéré, il y a une véritable dichotomie, en ce sens que nous examinons la Loi sur la radiodiffusion, tandis que vous êtes régis par une autre loi du Parlement. Nous devons donc établir le lien entre les deux et le comprendre.
En outre, pourriez-vous m'expliquer la différence entre un signal provenant d'un satellite géostationnaire et un SRD ou satellite de radiodiffusion directe? Dans quel sens diffèrent-ils, et pourquoi utilisez-vous l'un pour une chose et l'autre pour des services différents?
Á (1105)
M. Paul Bush: C'est souvent déroutant, mais je vais vous expliquer la meilleure façon de voir les choses. Les satellites se trouvent physiquement dans des créneaux orbitaux dans l'espace, l'équivalent de places de stationnement dans l'espace, de sorte que la première chose dont on a besoin, c'est d'une place de stationnement pour chaque satellite. Les satellites ont des fréquences différentes. Dans le cas d'un téléphone cellulaire, on utilise une fréquence différente de celle d'un téléphone portable. Pour les satellites, c'est exactement la même chose. Nous avons différentes bandes de fréquences.
La principale différence entre un satellite de radiodiffusion directe ou SRD et un satellite géostationnaire--les satellites Anik sont des satellites géostationnaires et les Nimiq sont des satellites SRD--se situe dans les bandes de fréquences qu'ils utilisent. La différence dans les bandes de fréquences a pour résultat que, à cause d'un certain nombre de choses différentes, comme la fréquence que nous utilisons et la distance physique par rapport au voisin le plus proche, la bande de fréquences des SRD permet d'utiliser de plus petites antennes paraboliques.
Dans le cas d'un SRD, on peut utiliser des antennes aussi petites que 45 centimètres. C'est à peu près la plus petite dimension qu'on peut utiliser. Quand je suis arrivé à Télésat, la plus petite antenne était de 4,5 mètres, ce qui montre que nous avons fait beaucoup de progrès pour en être arrivés à des antennes de 45 centimètres ou 18 pouces. En ce qui concerne les satellites géostationnaires, on peut réduire la dimension des antennes paraboliques. De fait, avec Star Choice, nous avons réussi à utiliser une antenne de 60 ou 70 centimètres, mais bien que nous en ayons fait l'essai, c'est très rare. Avec des satellites géostationnaires, on est généralement limité à des antennes de 1 à 1,2 mètre.
La principale différence se situe donc dans le fait que les fréquences ou spectres que nous utilisons sur les satellites ne sont pas les mêmes pour les SRD que pour les satellites géostationnaires.
Je peux aussi mentionner que le SRD est généralement limité à un seul usage, à savoir qu'il est conçu pour une diffusion directe vers une petite antenne parabolique. Une ou deux grandes stations pivot servent des millions d'abonnés. Les satellites géostationnaires, les Anik, sont conçus à des fins multiples. Ils peuvent fournir un service de diffusion directe, mais ils sont vraiment conçus pour fournir un service de diffusion en même temps que des services téléphoniques et des services Internet. Le SRD est principalement destiné à envoyer un signal direct à l'usager qui possède une petite antenne parabolique, et comme le représentant d'ExpressVu l'a mentionné, il est possible d'ajouter des services multimédias, et c'est ce qui se fait. Il s'agit de services multimédias fournis directement aux usagers. C'est la principale fonction de ce satellite.
Le président: Quand les signaux sont diffusés à partir d'un service fixe par satellite (SFS), en direction d'une antenne parabolique un peu plus grande, et qu'ensuite un autre signal est diffusé par un SRD en direction d'une plus petite antenne parabolique, les signaux ont-ils une puissance et une clarté équivalentes, ou diffèrent-ils grandement?
M. Paul Bush: Non, ils ne diffèrent pas grandement. À certains égards, il y a une raison pour laquelle on utilise une plus grande antenne parabolique pour le SFS, et c'est parce que la puissance est peut-être un peu moindre. Dans le cas d'Anik F2 et de Nimiq, la puissance des deux satellites est à peu près la même, de sorte qu'il n'y a pas vraiment beaucoup de différence en ce qui concerne la puissance au sol.
La raison pour laquelle on utilise une antenne parabolique un peu plus petite dans le cas du SRD, est surtout que nous n'avons pas de satellites dont l'orbite est aussi proche. J'ai parlé de places de stationnement. Dans le cas de la bande de fréquences des SFS, il y a deux degrés de distance entre chacun des satellites. Dans le cas de la bande de fréquences des SRD, la distance entre chacun des satellites est de neuf ou dix degrés, de sorte qu'il y a moins de brouillage. Le fait qu'il y ait moins de brouillage signifie qu'on peut utiliser une plus petite antenne, et c'est pourquoi on a des antennes paraboliques plus petites.
Le président: J'ai encore une dernière question à poser. Pourquoi l'entreprise Star Choice, par exemple, ne choisirait-elle pas d'utiliser un SRD plutôt que d'utiliser Anik?
M. Paul Bush: Au moment du lancement des satellites, Star Choice et ExpressVu ont décidé de la technologie à utiliser. Star Choice a choisi d'utiliser le satellite fixe, parce qu'il constitue aussi leur moyen d'assurer des services de câblodistribution. L'entreprise a pu continuer de fournir des services de câblodistribution et d'y joindre un service de diffusion directe. Le même signal transmis pour Vision est transmis à la tête de câble de l'entreprise et aux usagers du service de diffusion directe.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bush et monsieur Power. Nous apprécions votre participation à la réunion d'aujourd'hui.
Nous entendrons en dernier lieu les représentants de la Guilde canadienne des médias et de la Guide des employés de journaux du Canada.
Á (1109)
Á (1112)
Le président: La dernière fois que vous avez comparu devant nous, monsieur Amber et madame Lareau, il est arrivé un incident malheureux. Il y a eu un vote et nous avons dû couper court à votre participation. C'était extrêmement malheureux, parce que vous étiez venus de si loin pour nous voir et que vous avez dû retourner chez vous sans vous faire entendre. Nous nous en excusons donc. Nous ne pouvions rien y faire, mais nous sommes très heureux de vous accueillir aujourd'hui.
Nous avons donc la présidente de la Guilde canadienne des médias, Lise Lareau, ainsi que le directeur de la Guilde des employés de journaux du Canada, M. Arnold Amber.
Nous sommes prêts à vous entendre, madame Lareau.
Mme Lise Lareau (présidente, Guild canadienne des médias): Merci beaucoup, monsieur le président, c'est un plaisir pour nous que de pouvoir de nouveau témoigner devant votre comité.
Je suis présidente de la Guilde canadienne des médias, ainsi que productrice au réseau Newsworld, mon emploi régulier.
J'aimerais attirer votre attention sur autre chose que les services par satellite. Parlons plutôt de la radiodiffusion publique et du rôle du radiodiffuseur public au Canada. Vous avez probablement reçu notre mémoire en octobre dernier, mais j'en ai quand même apporté quelques exemplaires. Nous avons déjà témoigné au mois de novembre, mais il ne nous a pas été possible de lire notre document en entier, ainsi que le précisait M. Lincoln. J'aimerais donc en résumer les principaux points, après quoi mon collègue Arnold Amber abordera les événements qui se sont produits depuis novembre dernier et répondra aux questions qui portent là-dessus.
Si l'on se reporte aux rubriques de notre mémoire, on constate que la politique relative à la radiodiffusion est passée d'un extrême à l'autre, favorisant maintenant à notre avis le secteur privé à but lucratif. En soi, cela ne poserait pas de problème, mais du coup les subventions gouvernementales sont disparues. Notre mémoire s'interroge donc là-dessus.
Nous nous demandons en effet si une telle politique représente la façon la plus efficace d'affecter les deniers publics, surtout que de l'avis général, le radiodiffuseur public manque d'argent. Les règles encadrant le fonctionnement du Fonds canadien de télévision et d'autres règles fiscales, par leur asymétrie, font obstacle au radiodiffuseur public et à son mandat, à savoir servir l'intérêt public avec l'argent des contribuables. C'est l'idée maîtresse de notre document.
Nous avons aussi proposé des moyens précis avec lesquels votre comité pourrait intervenir, y compris des amendements à la Loi sur la radiodiffusion. Cette dernière proposition cherche à recréer l'équilibre entre l'intérêt du secteur commercial et l'intérêt public.
Dans notre mémoire, nous demandons de modifier la loi de manière qu'elle précise qu'il devrait y avoir un équilibre entre la production interne de la SRC et la production indépendante externe que diffuse le radiodiffuseur public. Nous proposons également de modifier la loi pour qu'elle précise que la SRC doit demeurer une présence essentielle et marquée dans notre pays et au sein du système de radiodiffusion canadien. Nous traitons aussi de la façon dont la loi devrait souligner le rôle de la radio de la SRC, ce qui n'existe pas à l'heure actuelle.
Par ailleurs, notre mémoire traite assez longuement de la question de la gestion des affaires publiques, qu'il s'agisse du gouvernement d'entreprise—sujet que je vais aborder dans un moment—ou de la façon dont on choisit les commissaires du CRTC. À ce dernier sujet, nous estimons que le processus de nomination devrait se dérouler de façon beaucoup plus publique et transparente, et que le comité du patrimoine devrait y participer.
Au sujet maintenant de la partie de notre mémoire sur le gouvernement d'entreprise--c'est une partie importante du mémoire et une proposition que la Guilde canadienne des médias fait depuis presque une décennie--comme vous le savez, depuis notre dernier passage parmi vous, le gouvernement d'entreprise est devenu un enjeu politique d'une très grande actualité . À mon avis, vous pouvez certainement en traiter de manière à influer sur la situation du radiodiffuseur public.
Rappelons ici qu'aux yeux de la plupart des Canadiens, la SRC est en quelque sorte le porte-parole du gouvernement. Si l'on parle à monsieur ou madame tout-le-monde, on se rend compte qu'à ses yeux, la SRC est la voix du gouvernement. Il faut mettre un terme à cela. Il faut que la population commence à penser que le radiodiffuseur public lui appartient. À cet égard, nos propositions permettraient de libérer quelque peu le radiodiffuseur public de l'emprise du gouvernement et, qui plus est, de favoriser la perception voulant que le gouvernement n'intervient plus dans les affaires du radiodiffuseur public.
Á (1115)
Si vous permettez, je vais résumer notre proposition. La loi devrait rendre obligatoire un examen public des candidats au conseil d'administration de la SRC par le comité du patrimoine, qui présenterait ensuite sa liste de candidats au cabinet. À mon avis, il s'agit là d'un compromis canadien, par rapport à ce qui existe déjà au Royaume-Uni, où le processus est davantage public que cela. Le plus important ici, c'est que le conseil d'administration aurait le pouvoir de choisir lui-même son propre président, ce qu'il ne peut faire à l'heure actuelle.
Nous estimons que cela rendrait le processus beaucoup plus transparent. Qui plus est, il rehausserait l'intégrité de la SRC aux yeux du public, et ne donnerait plus l'impression qu'il obéit au gouvernement au pouvoir, ce qui est le changement le plus fondamental qu'on peut faire.
Depuis notre dernière comparution, deux rapports ont été publiés sur le sujet, l'un de la vérificatrice générale et l'autre du comité des comptes publics. Dans les deux cas, on s'est préoccupé des genres de personnes qui font partie du conseil d'administration. Nous aussi le sommes, mais ce à quoi nous tenons le plus, c'est à un processus transparent et que ce soit suffisamment indépendant du gouvernement aux yeux du public.
Il y a à peine quelques semaines, la SRC elle-même a comparu devant vous à ce sujet. La SRC aimerait beaucoup voir au sein de son conseil d'administration des personnes qui ont d'autres intérêts en matière de radiodiffusion. Franchement, nos organisations et moi-même préférerions pouvoir compter sur des gens qui connaissent la radiodiffusion, qui ont des antécédents dans ce domaine, mais que ceux dont les intérêts financiers se situent dans le secteur privé ou commercial ne puissent pas siéger au conseil. Il est plus important pour nous qu'ils comprennent et partagent la vocation publique du radiodiffuseur public.
C'était là les points saillants de notre mémoire. Maintenant, avant de céder la parole à mon collègue Arnold Amber, j'aimerais profiter de ma présence ici à cette tribune publique pour dire quelques mots au sujet d'une situation au sein de la SRC. Vous n'ignorez sans doute pas que mes collègues du Syndicat des communications de Radio-Canada sont en lock-out. C'est le troisième lock-out en deux ans à la Société. Je ne veux pas m'étendre trop longuement là-dessus, car nous sommes ici pour appuyer la SRC en tant que radiodiffuseur public, et non ses politiques de gestion. Je me permets tout simplement d'espérer que vous allez vous pencher sur ce conflit de travail afin de voir comment vous pourriez favoriser sa résolution.
Je vais maintenant céder le micro à Arnold Amber.
Á (1120)
M. Arnold Amber (directeur, Newspaper Guild of Canada): Merci.
Bonjour à tous. Le président a parlé de notre dernière comparution, lorsque la sonnerie s'est fait entendre. Certains de nos collègues, qui ont lu la transcription, ont dit que ça avait été le temps fort de notre exposé. J'avoue que cela nous a un peu démontés, n'ayant jamais eu à parler pendant que la sonnerie retentissait dans nos oreilles. Nous savions toutefois combien cette journée était importante. La Chambre était saisie d'un projet de loi très important.
Nous voici donc de retour aujourd'hui. Un des avantages de revenir plus tard, c'est que nous avons eu l'occasion de prendre connaissance d'autres thèmes qui ont été abordés. Nous aimerions en évoquer certains qui, forcément, ne figuraient pas dans notre mémoire. J'aimerais en aborder trois ou quatre.
Le premier est ce que l'on appelle «l'espace vert» de la radiodiffusion canadienne. C'est une idée que nous soutenons vigoureusement. Dans son sens le plus positif, cela désigne les questions qui justifient l'intérêt du gouvernement et du comité pour la radiodiffusion et les communications. Notre activité est mêlée à la culture de notre pays, ses affaires publiques et la conception qu'en ont ses habitants.
L'idée de créer un espace--et j'applaudis à l'idée de l'appeler espace vert--dans lequel se retrouvent tous ceux qui se consacrent aux diverses formes de radiodiffusion comme service--c'est-à-dire service public--plutôt que comme source de revenu est une excellente idée. Pour moi toutefois, il ne s'agit pas de regrouper tous les radiodiffuseurs publics à la suite sur le câble pour qu'ils occupent les chaînes 17, 18, 19 et 20. Il s'agit d'abord de consacrer l'idée qu'il devrait y avoir une place dans la radiodiffusion canadienne pour tout un éventail de radiodiffuseurs publics.
Oui, nous vous parlons aujourd'hui du radiodiffuseur public national de langue française et anglaise et qui diffuse dans d'autres langues dans le nord du pays. Toutefois, beaucoup d'autres devraient être ici: Vision, TVO, Aboriginal Peoples Television Network. D'ailleurs, un des problèmes de la radiodiffusion publique ici--et c'est ce qui fait des chiffres de l'ACR un véritable casse-tête--c'est qu'il y a eu une renversante démultiplication du nombre de «radiodiffuseurs privés», de «chaînes spécialisées» et de «chaînes par câble.»
Avant de décider de rassembler tous les radiodiffuseurs publics pour que l'auditoire sache qu'une partie du câble leur est réservée, il faut d'abord s'assurer qu'il y a bien un espace pour nous. C'est la priorité.
Ensuite, je suis convaincu que la technologie va évoluer dans l'avenir. À tel point que cela ne change rien que vous occupiez le canal 11 ou le canal 172. Lorsque la SRC a comparu devant vous et que vous lui avez posé la question, elle a répondu à juste titre que si un «espace vert» est créé et qu'on y place CBC, Radio-Canada, les deux canaux de l'information et tous les autres, ce devra être à un endroit que sélectionnent déjà les téléspectateurs dans l'alignement des canaux.
Cela m'a rendu furieux il y a plusieurs années quand mon télédistributeur a déplacé dans l'alignement une chaîne de qualité, Vision TV; elle avait un petit numéro facilement accessible et il lui a attribué un chiffre qui ne l'était plus.
Á (1125)
C'est donc dire que pour moi la priorité est d'accorder plus d'espace aux radiodiffuseurs verts puis de s'assurer que la SRC et ses pareils occupent un canal que sélectionne le téléspectateur.
Par ailleurs, depuis notre dernière comparution, je sais que vous avez entendu l'ACR ainsi que les radiodiffuseurs privés, dont CanWest Global. Ont aussi comparu des gens qui ont abondamment trituré les chiffres que vous a présentés l'ACR. Je ne veux pas revenir sur tout cela avec vous, mais il y a certains points que je vous invite à envisager.
Je trouve en effet incroyable qu'après toutes ces années où ils ont eu l'occasion de présenter des émissions canadiennes de qualité, ces radiodiffuseurs reviennent encore à la charge pour vous demander une plus grande portion des fonds publics, de réduire le financement de Radio-Canada, le radiodiffuseur public, et d'affirmer qu'ils sont les premiers fournisseurs d'émissions canadiennes.
Le mémoire de l'ACR fourmille d'incohérences. À un endroit, on y dit que les heures de grande écoute ne sont plus importantes à cause de ce que l'on pourrait appeler «la télévision à ses heures». Si c'est le cas, l'ACR devrait dire à ses membres de passer les émissions canadiennes aux heures de grande écoute.
Une des choses qui m'irritent quand je regarde les télévisions privées, et en particulier CTV, c'est l'apparition de leur logo à la demi-heure--je suis certain que vous l'avez tous vu. Habituellement, on y voit une image du Parlement. Vient ensuite se surimposer le logo de CTV et la voix hors champ dit: «La télévision canadienne». On y croirait davantage si cela n'apparaissait pas entre deux émissions américaines. En effet, entre 19 et 23 heures, la quasi-totalité des émissions sur CTV sont américaines et ils viennent nous passer ce logo sur la «télévision canadienne.»
Il y a je crois de très gros problèmes et je vous invite à ne pas suivre ces conseils. Je les cite: «les objectifs publics doivent dorénavant passer d'abord et avant tout par les radiodiffuseurs privés».
Autre incohérence: ils disent dans leur mémoire que les émissions américaines vont être mises en marché dans le monde par des distributeurs américains et directement par les réseaux américains et que les télévisions privées canadiennes devront trouver le moyen de produire elles-mêmes des émissions de qualité. Pardonnez-moi, non, ils ne disent pas «de qualité», ils disent «à succès».
Si l'on aboutit ici à un système qui dépend de radiodiffuseurs privés, on nous dira de plus en plus ce que vous avez entendu ces derniers mois, des choses comme le fait que l'infopublicité représente du contenu canadien de qualité.
Enfin, il me semble que l'ACR, dans son plan... l'ACR dit que le financement offert par le Fonds devrait être calculé en fonction de la cote d'écoute. C'est renversant. Il n'est pas question au comité...je ne crois pas que le comité souhaite voir une version canadienne d'une de ces émissions forcément américaines comme The Weakest Link, si vous me permettez d'utiliser un exemple de ce qu'il y a de plus lamentable. Le but est de créer des émissions de qualité aux valeurs et aux voix canadiennes. Ne négligez pas cela. Enfin, j'enchaîne.
La Société Radio-Canada est elle aussi venue témoigner et a dit beaucoup de choses lors de sa comparution. Je n'hésite nullement à l'appuyer quand elle dit qu'elle doit être un élément fondamental de la radiodiffusion canadienne--comme nous le disons dans des mémoires au comité et au CRTC depuis plus de dix ans--et non seulement un élément marginal.
Á (1130)
Nous croyons que la SRC produit actuellement des émissions dont le contenu peut donner lieu à un débat, par exemple, la récente dramatique sur Trudeau, mais il est difficile de nier que la Société nous a donné un reflet d'une époque dans l'histoire de notre pays, qu'elle nous a donné l'occasion de revenir sur cette période, d'en discuter et de réfléchir à la façon dont les événements qui se sont déroulés à l'époque peuvent infléchir l'avenir de notre pays.
Nous n'avons pas de mal non plus à appuyer la SRC quand elle affirme diffuser de véritables émissions canadiennes aux heures de grande écoute. Ce sont des émissions canadiennes de bonne qualité.
Enfin, nous vous avons déjà dit que nous voudrions que l'on reconnaisse dans la loi le réseau radiophonique de la SRC. Nous appuyons également la SRC quand elle vous demande et qu'elle demande au gouvernement de faire en sorte qu'il y ait suffisamment de fréquences sur la bande FM pour faire place à la radio de la SRC à l'avenir.
Il y a une question sur laquelle nous sommes évidemment complètement en désaccord avec la SRC, nommément la télévision locale. Nous sommes toutefois d'accord avec elle sur un point. Il faut préciser dans la loi ce qui est régional et ce qui est local. Comme je travaille à la SRC depuis bon nombre d'années, j'ai le grand avantage d'avoir vu une administration de la SRC déterminer que le régional était local, et une autre administration décider plutôt que le local est régional. Cela dépend des petits jeux qui se jouent en coulisse à la direction dans une année donnée, et il faut tirer cela au clair.
Quand cela aura été tiré au clair, il nous semble--nous l'avons déjà dit et nous le dirons de nouveau--que la télévision locale, comme concept de radiodiffusion, est également un élément essentiel. Aucun radiodiffuseur digne de ce nom, n'importe où dans le monde, même dans un État unitaire comme le Royaume-Uni...partout, il y a eu croissance. À la BBC, c'est l'essor de la télévision locale qui a été le secteur de plus forte croissance au fil des années. Quand j'habitais dans ce pays il y a de nombreuses années, il y avait seulement la télévision nationale. Il leur a fallu créer des stations locales parce que, fondamentalement, les gens s'intéressent au premier chef à ce qui se passe dans leur localité. Ils ne s'intéressent pas nécessairement à ce qui se passe partout ailleurs. Ils s'y intéressent aussi, mais leur intérêt primordial, c'est l'actualité locale.
Le fait d'être bien enraciné dans une localité donne une grande crédibilité à un radiodiffuseur. Cela lui donne de la profondeur. Dans notre cas, à la SRC, cela permet d'alimenter en émissions les réseaux Newsworld et RDI, et il est donc fondamental d'avoir une présence locale et de bonnes émissions locales.
Il faut ensuite se poser la question de savoir si les émissions locales doivent être exclusivement des nouvelles. Nous répondons non à cette question. Depuis trois ans, le débat sur les émissions locales porte exclusivement sur les émissions diffusées à l'heure du souper. Nous voulons vous dire aujourd'hui que les émissions locales, c'est plus que cela.
Il y a des années de cela--et je me tourne vers un membre de votre comité qui sait très bien de quoi je parle, parce qu'il a travaillé dans une station qui était un élément essentiel du réseau de la SRC--il y avait un débat à Winnipeg; on se demandait si la SRC répondait aux besoins de la collectivité locale. Les émissions locales permettent l'éclosion des talents des artistes locaux. Elles reflètent la collectivité. Il n'est pas nécessaire que les émissions locales soient exclusivement des bulletins de nouvelles d'une demi-heure ou d'une heure.
Mais nous devrions aussi revenir au débat des dernières années. Nous voudrions dire que l'idée qu'il n'y ait qu'une seule façon pour la SRC de diffuser des actualités locales, que cette idée est fondamentalement mauvaise. Même à la grande époque, quand les stations...je vais donner encore une fois l'exemple de Winnipeg. Il y avait à Winnipeg un service de nouvelles locales qui avait beaucoup de succès, mais dans d'autres villes, la SRC avait toujours beaucoup de difficulté à attirer un auditoire.
Ces dernières années, on nous a parlé de l'importance des émissions d'actualités locales sur la côte Est. De la façon dont la SRC comprend son mandat en termes de l'importance des émissions locales, il n'y a aucune raison qui l'empêche de dire que l'émission diffusée à Terre-Neuve sera d'une durée d'une heure, parce que c'est ce dont les Terre-Neuviens ont besoin, compte tenu de la situation à Terre-Neuve, tandis qu'ailleurs au Canada, il n'y a pas d'émission locale privée qui soit bonne ou remarquable ou suffisante.
Á (1135)
Si vous posiez la question aux Terre-Neuviens, et s'ils avaient le choix, ils choisiraient avec joie et à une majorité écrasante de revenir à un bulletin de nouvelles de la SRC d'une durée d'une heure. Par conséquent, nous affirmons qu'il est impossible que les administrateurs, qu'ils soient à Terre-Neuve ou ailleurs, ne puissent pas décider que leur collectivité a besoin d'un bulletin de nouvelles de la SRC d'une durée d'une heure.
J'ai terminé.
Le président: C'était très intéressant.
Je voudrais me faire l'écho des réflexions des membres du comité au sujet de votre exposé d'aujourd'hui et du mémoire que vous nous avez fait parvenir. Ce que nous apprécions, c'est que vous parlez sans détour. Il faut parfois beaucoup de courage pour dire ce que les gens n'osent pas dire, et je pense que vous avez soulevé beaucoup de questions qui sont considérées controversées et que les gens hésitent parfois à soulever. Je vous suis donc très reconnaissant pour vos interventions d'aujourd'hui, à tous les deux.
Madame Lareau, je voudrais dire publiquement, au sujet du conflit de travail à Radio-Canada, que nous sommes tous extrêmement conscients de la situation, bien sûr. L'un de nos membres, Mme Gagnon, a présenté au comité une motion invitant le comité à se pencher sur la question. Ce n'est pas notre mandat de nous ériger en tribunal du travail. Nous ne pouvons évidemment pas aborder de telles questions. Par contre, je pense que cette question est extrêmement présente dans l'esprit de chacun de nous, chacun à sa façon. Chose certaine, la question a été abordée dans nos caucus respectifs, et nous espérons que la situation finira par se régler, et le plus tôt sera le mieux. Chose certaine, tous les députés ici présents sont extrêmement conscients de cette situation et sont actifs à cet égard.
Madame Lareau, pendant la période des questions, peut-être pourriez-vous apporter une précision, ce qui m'éviterait d'avoir à poser une question là-dessus plus tard. Vous avez dit: «Nous recommandons que la Loi autorise le conseil à choisir le président, lequel serait membre d'office du conseil». À un moment donné, quand vous répondrez à des questions, peut-être que vous pourriez aussi nous expliquer si vous êtes en faveur du régime de la dualité comportant un président du conseil et un président. Ou bien faites-vous allusion à un nouveau poste qui engloberait les deux et dont le titulaire serait nommé par le conseil d'administration? Nous voulons simplement savoir exactement ce que vous voulez dire.
Mme Lise Lareau: Merci, monsieur Lincoln. Vous savez, j'ai de l'expérience à l'égard des deux modèles et, bien franchement, cela m'importe peu que ce soit l'un ou l'autre, pourvu qu'il y ait transparence et que la Société se distancie du gouvernement. C'est le plus important dans ce que nous avons à dire.
Le président: Ce que je vous demande, c'est si vous êtes en faveur que le président du conseil et le président soient tous deux nommés par le conseil.
Mme Lise Lareau: Non, ce que nous proposons, c'est que le président soit...
Le président: Le PDG, le poste actuellement occupé par Robert Rabinovitch.
Mme Lise Lareau: C'est bien cela. Le président serait le PDG et les autres membres du conseil seraient choisis par vous ou recommandés par vous, le choix étant fait par le cabinet.
Le président: Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott: Merci.
C'est vraiment une dichotomie intéressante que nous avons ici. D'une part, je comprends bien que ce que vous réclamez, c'est la transparence et le fait d'être distancié du gouvernement. Je pense que ce sont les mots que vous avez utilisés. Vous avez également pris bonne note du fait que bien des gens au Canada voient la SRC comme le réseau du gouvernement. Pourtant, en même temps, vous demandez au gouvernement et aux membres d'un comité qui a l'aval du gouvernement de se mêler d'un conflit de travail à la SRC. N'y a-t-il pas là une assez grave contradiction?
Á (1140)
Mme Lise Lareau: Vos propos dépassent ma pensée. Je ne vous ai jamais invitée à vous mêler d'un conflit de travail. J'ai simplement dit ces choses pour mémoire parce que c'est une thèse qui est désormais accréditée.
M. Jim Abbott: C'est seulement que, comme l'a bien dit M. Lincoln, notre comité a étudié sérieusement cette question, mais je crois que nous, politiciens, devons être très prudents si les parties qui sont actuellement en conflit avec la direction au Québec et à Moncton attendent une intervention quelconque de la part des politiciens et de l'autorité politique. Et, sauf votre respect, c'est le cas. Deux personnes sont venues me voir à mon bureau et ont exercé sur moi de vives pressions pour que je m'en mêle.
Nous sommes totalement autonomes. Nous sommes libres de faire ce que nous voulons à la Chambre des communes. C'est la beauté de notre démocratie. D'autres députés, dans leur sagesse, ont décidé de se mêler de ce processus. Je crois pour ma part que les parties à ce conflit devraient y réfléchir à deux fois, parce qu'il est nécessaire d'être transparents et de se distancer du gouvernement.
Je dirai aussi ceci--et peut-être que vous aimeriez y répondre--que j'ai toujours été très impressionné de manière générale par la conscience professionnelle des journalistes de Radio-Canada. J'ai donc été très troublé de lire l'opinion qu'a exprimée Dennis Trudeau--qui est présentateur à Montréal, si j'ai bien compris--dans la page en regard de l'éditorial du Globe and Mail. A-t-il vraiment agi en journaliste professionnel? En sa qualité de journaliste et de porte-parole de Radio-Canada, avec tout ce que cela signifie, a-t-il vraiment agi de manière professionnelle à votre avis?
Á (1145)
Mme Lise Lareau: Eh bien, en exprimant son opinion--et il ne s'agissait que de cela; il ne rapportait pas une nouvelle--il ne faisait pas son devoir de journaliste qui consiste à diffuser les nouvelles du jour. Il prenait clairement position à titre personnel, et son texte disait bien qu'il ne faisait qu'exprimer son opinion à lui. Comme tous les citoyens de notre pays, s'il a un point de vue sur telle ou telle question, rien ne lui interdit de l'exprimer.
M. Jim Abbott: Je ne crois pas qu'au Canada... c'est la démocratie, et nous avons une liberté totale, ou chose certaine, nous devrions avoir une liberté totale. Je ne me sens pas limité dans ces propos, sauf dans la mesure où je ne dirais rien qui donnerait une opinion défavorable de l'Alliance canadienne ou de ses membres, même s'il s'agissait bien d'opinion personnelle de ma part.
Cela dit, je relève la recommandation que vous faites à la page 31 de votre mémoire: «Nous recommandons que la Loi stipule que le gouvernement doit financer la CBC-SRC de façon à lui permettre de respecter son mandat». Rappelons-nous 1993, l'époque où le gouvernement a changé du tout au tout, où nous avions 201 nouveaux députés à la Chambre des communes. À cette époque, nous avions un déficit de 42 milliards de dollars; nous dépensions 42 milliards de plus que ce que nous recueillions en impôts. La dette publique, si je me souviens bien, avait atteint les 460 milliards de dollars, somme gargantuesque. Tous les programmes s'en trouvaient menacés, particulièrement les retraites aux personnes âgées, les soins de santé et tout le reste.
Prions Dieu pour que nous ne nous retrouvions pas dans la même situation, mais qu'arriverait-il si nous nous retrouvions dans la même situation et que la loi imposerait un niveau de financement particulier pour la SRC? Il nous faudrait modifier la loi de nouveau pour permettre au gouvernement d'opérer les compressions prudentes qui seraient nécessaires. Bien sûr, le gouvernement n'a pas seulement coupé à la SRC, il a coupé dans la santé, il songeait à couper dans les retraites, il a coupé à la défense, et il a coupé dans tous ses programmes qui sont financés par le contribuable.
Si nous devions adopter votre recommandation et qu'elle était enchâssée dans la loi, alors pour couper à la SRC, le gouvernement devrait d'abord couper dans tous ses autres programmes pendant que, de notre côté, nous modifierions la loi qui prévoit un niveau de financement particulier pour la SRC. Cette mesure aurait pour effet de menotter le gouvernement et mettrait la SRC dans une classe à part, chose qu'elle ne mérite pas vraiment à mon avis si on songe à toutes les autres dépenses nécessaires que doit faire le gouvernement.
Mme Lise Lareau: Avant de demander à mon collègue de répondre, nous devrions discuter un instant des compressions qui ont été faites.
Lorsque nous avons vécu cette période à laquelle vous faites allusion, je sais que la plupart des gens à la SRC, tout comme ses partisans et ses auditeurs et téléspectateurs, comprenaient la nécessité des compressions. Vous avez raison, on a beaucoup coupé dans ce temps-là. Mais ce que nous ne comprenons pas, c'est pourquoi la SRC n'a pas retrouvé son budget d'antan à une époque qui est plus prospère.
Ce à quoi nous voulons mettre un terme, c'est à l'attaque soutenue contre le principe de diffusion publique en une époque qui n'est plus marquée par le déficit public. Il est important de le dire maintenant. Nous ne sommes plus au milieu des années 90, mais rien n'a changé au niveau du financement. Il est demeuré stable. Et il n'est pas seulement demeuré stable, les fonds sont clairement insuffisants.
Je pense que personne ne conteste que le budget est insuffisant, mais personne ne semble vouloir faire quoi que ce soit. En réalité, s'il y avait une autre méthode qui permettrait d'assurer le financement qu'il faut, autrement que par une modification à la Loi sur la radiodiffusion, je vous la proposerais. Si vous pouvez trouver un autre moyen d'assurer un financement qui soit conforme au mandat de la SRC mais qui ne serait pas inscrit dans le texte de loi, je serais heureuse d'y réfléchir.
Mon collègue Arnold Amber a peut-être quelque chose à ajouter.
M. Arnold Amber: Très rapidement, je crois que le terrain sur lequel vous nous amenez n'a rien à voir avec la radiodiffusion--domaine que nous prétendons connaître un peu--et il s'agit des processus parlementaires. Mais je peux vous dire avec certitude que même à cette époque où l'on a opéré des compressions incroyables, cela ne s'est pas fait le lendemain de l'arrivée du nouveau gouvernement, qui aurait dit alors qu'il devait couper 50 millions de dollars du budget de la SRC. Il y avait un processus en place.
Il s'agissait en fait d'un processus relatif aux relations de travail, si ce n'est que pour cette raison-là, concernant un certain nombre de compressions, et il y avait en fait pour cela une fenêtre de trois ou quatre mois. À d'autres moments, l'exercice budgétaire est également intervenu. Je ne peux pas vous expliquer tout le système ici, mais si l'on finissait par couper le budget de la SRC de 100 millions de dollars au bout du compte, qu'on le fasse nécessairement le 1er septembre ou qu'on doive attendre jusqu'à ce qu'on ait «modifié la loi», j'imagine que ça ne changerait pas grand-chose à long terme. Comme je l'ai dit, il existe en ce moment des exigences d'ordre législatif qu'il faut respecter avant que certaines de ces compressions n'entrent en vigueur de toute façon.
Ce que nous disons ici, c'est que nous avons vécu ces processus, nous avons vu ces gens qui veulent essentiellement que les attentes relatives au diffuseur public national soient inscrites dans la loi dans certains cas ou dans un accord quelconque entre le CRTC et le diffuseur public, où tout marcherait bien exception faite d'une chose: les ressources qu'il faut pour réaliser la programmation dont tout le monde parle sont inexistantes. Comme l'a dit ma collègue, nous cherchons un autre moyen de surmonter cet obstacle.
Je crois qu'il ne sert à rien d'entrer dans un débat qui oppose le soutien au diffuseur public au soutien aux hôpitaux. Cependant, cela dit, vous êtes au beau milieu d'un processus incroyablement long et d'une étude détaillée sur une question qui revêt de toute évidence une grande importance pour notre pays. Comment allons-nous définir notre pays? Ce n'est pas seulement notre service de santé publique qui le définit, il y a des tas d'autres choses qui entrent dans cette définition, et la diffusion publique est sûrement du nombre. Mais comme je l'ai dit, je pense qu'il est inutile d'entrer dans ce débat.
[Français]
Le président: Madame Gagnon.
Mme Christiane Gagnon: Merci, monsieur le président.
Comme le président le soulignait tout à l'heure, il faut beaucoup de courage pour venir présenter certaines de vos recommandations, surtout quand elles touchent à des questions importantes.
Vous avez dit que Radio-Canada était la voix du gouvernement et qu'il faudrait sentir davantage que la télévision de Radio-Canada et de CBC est aussi la voix du public. On a entendu beaucoup de commentaires à cet effet venant de différentes communautés. J'aimerais vous entendre nous citer des situations précises qui illustrent votre vision.
Vous nous avez aussi dit que les membres du conseil d'administration devraient être interviewés par le comité. J'aimerais apporter mon point de vue là-dessus. Même s'ils étaient interviewés par le comité qui, comme vous le savez très bien, est composé de députés de l'opposition et du parti au pouvoir, est-ce que, finalement, on aurait le choix de donner certaines orientations pour l'embauche des membres de ce comité?
Voici une troisième question sur la recommandation qui nous a été faite par CBC et la SRC, lors de la comparution de M. Rabinovitch, qui en est le président. Il voudrait voir siéger à son conseil d'administration des gens du secteur privé, dans les divers domaines: réalisation, production et autres. Ne voyez-vous pas là une espèce de télévision publique hybride dont les orientations seraient données par le secteur privé? Quel impact cela aurai-t-il sur la programmation et le type de productions qu'on aurait à la SRC?
Donc, j'aimerais avoir votre opinion sur ces trois points.
Á (1150)
[Traduction]
Mme Lise Lareau: Pour ce qui est de savoir si un comité changerait les choses, il n'y a probablement pas de méthode idéale pour choisir les membres d'un conseil d'administration, mais nous avons pensé qu'un comité comme le vôtre...
Tout d'abord, nous pensons que ces postes devraient être annoncés à l'échelle nationale, et l'on réunirait ainsi des candidatures variées par opposition à celles qu'on obtient maintenant de ce processus très fermé. Donc, d'entrée de jeu, vos candidats proviendraient d'un bassin plus grand.
Maintenant, pour ce qui est de les interviewer, j'aimerais que ces interviews soient télévisés. Et je pense que cela donnerait une télévision intéressante parce qu'on verrait ainsi des gens qui seraient forcés de définir, publiquement, la vision qu'ils ont du diffuseur public. Dès lors, vous auriez un processus plus transparent. Vous élargiriez le recrutement et vous auriez un processus plus transparent qui vous permettrait de savoir qui sont ces personnes. Donc même si ce système demeurait imparfait, ce serait quand même un grand progrès par rapport à ce que nous avons maintenant, où le processus est très fermé, très secret, et très proche du gouvernement.
Pour ce qui est de savoir si l'on permettrait à des gens du secteur privé et commercial de siéger au conseil d'administration comme le veut la SRC, je ne crois pas que cela aurait grand effet sur la programmation. Le danger, cependant, c'est que le débat serait faussé au sein du conseil. Si quelqu'un a des intérêts dans le secteur privé--et l'on parle du diffuseur public et de ses intérêts au conseil d'administration--vous risquez d'avoir un conflit d'intérêts important. Dans les grands débats sur les plans confidentiels, les plans quinquennaux et la planification future, je pense que ce serait mettre dans l'embarras tous les membres du conseil d'administration. Ce n'est vraiment pas un scénario idéal.
Vous voulez avoir au conseil des gens qui s'y connaissent en radiodiffusion et des gens qui présentent un point de vue particulier, mais vous ne voulez pas de gens qui ont un conflit immédiat, par exemple, des personnes qui pourraient réaliser des gains financiers dans les emplois qu'ils occupent chez les diffuseurs commerciaux parce qu'ils ont pris certaines décisions à titre de membres du conseil d'administration.
Le président: Madame Gagnon, c'est votre dernière question.
Mme Christiane Gagnon: Oui, c'est ma dernière question.
[Français]
Vous avez mentionné que Radio-Canada était la voix du gouvernement. Il y a aussi des gens qui ont cette perception-là. Vous dites aussi que cette télévision doit être davantage la télévision du public. J'aimerais que vous me parliez des situations où vous avez l'impression que la SRC est la voix du gouvernement. Est-ce que vous sentez des pressions et où ces pressions s'exercent-elles?
[Traduction]
Mme Lise Lareau: Je n'ai pas dit que la SRC était la voix du gouvernement. Elle est perçue par les gens comme étant la voix du gouvernement. Il y a une grande différence.
À titre de présidente de la Guide, je pense que notre président et notre conseil ne peuvent vraiment intervenir dans les cercles gouvernementaux de la façon dont pourraient intervenir les gens qui sont plus à l'extérieur du domaine. Les employés ont certainement l'impression qu'ils ne peuvent aller vraiment à l'encontre du gouvernement au pouvoir. Si on préconise disons des changements à la formule de financement de la SRC ou autres, à l'intérieur on a l'impression...il faudrait leur demander, mais ils ont certainement l'impression qu'ils ne peuvent faire cela, qu'ils ne peuvent intervenir dans la mesure qu'ils le voudraient.
Á (1155)
Le président: Monsieur Amber, très brièvement.
M. Arnold Amber: Très brièvement, ayant travaillé à la SRC pendant un certain nombre d'années à titre de producteur de tout ce que nous appelons les émissions spéciales d'information, il faut qu'il soit bien clair que nous ne disons pas qu'il y a ingérence du gouvernement dans le bulletin de nouvelles, dans les affaires courantes, et dans d'autres affaires. Je pense que ma collègue a dit très clairement que c'était tout simplement la façon dont les gens le percevaient.
C'est comme une discussion que j'ai entendue la semaine dernière à la radio au sujet d'Air Canada. Quelqu'un a téléphoné pour dire que c'était une ligne aérienne gouvernementale. Eh bien, ce n'est plus une ligne aérienne gouvernementale depuis de nombreuses années. C'est donc une façon de percevoir les choses par quelqu'un de l'extérieur, mais ce n'est pas le gouvernement qui décide de la programmation.
Une autre chose qu'elle a dite, c'est qu'à l'interne on a souvent l'impression que si on est nommé par le gouvernement, il est alors difficile d'aller à l'encontre du gouvernement et de demander des choses que nous, en tant que travailleurs à l'interne, pensons qu'il nous faut en tant qu'institution. Je pense que c'est plutôt de cela dont nous voulons parler, à mon avis.
Le président: Monsieur Harvard.
M. John Harvard: Merci, monsieur le président.
Bienvenue à tous les deux.
Je dois dire, Lise, que je suis surpris lorsque vous dites que bon nombre de Canadiens perçoivent la SRC comme étant la voix du gouvernement. J'y ai travaillé pendant 18 ans et j'ai fait de nombreux gros reportages, des reportages controversés. Je ne me rappelle pas d'avoir été accusé d'être le porte-parole du gouvernement. Je ne me rappelle tout simplement pas. Nous n'allons pas cependant aborder les principes qui sous-tendent la SRC car puisque nous sommes tous d'accord avec ces principes, il n'est pas nécessaire de nous chamailler à ce sujet.
J'aimerais aborder deux des recommandations que vous avez faites, car je suis en désaccord avec les deux. Vous recommandez que notre comité participe au processus d'entrevue des membres du conseil d'administration de la SRC et, qu'en tant que comité, nous fassions une recommandation. Je ne toucherais pas à cela pour quelque raison que ce soit. Cela politiserait le processus beaucoup plus qu'il ne l'est à l'heure actuelle.
En fait, les gens qui siègent au conseil d'administration de la SRC sont plutôt anonymes, à mon avis, et je pense qu'il y a un certain bien-fondé à cela. Je reconnais que les Canadiens n'ont peut-être pas une bonne occasion d'évaluer leur travail. Si vous nous demandez si le conseil d'administration fonctionne bien, quelle est sa contribution à la prise de décisions et à la politique générale, je ne pourrais honnêtement vous le dire. Je n'ai vraiment aucun moyen d'évaluer leur travail, mais je pense que cela n'a rien à voir avec la façon de nommer les membres du conseil au départ.
J'ai déjà dit ailleurs que je n'étais pas en faveur d'audiences de confirmation de style américain qui ne sont qu'une invitation à faire du battage politique, alors je ne voudrais pas toucher à cela pour quelque raison que ce soit, et vous pouvez en dire ce que vous voulez.
L'autre recommandation est que la SRC garde une capacité de production dans tous les secteurs et que la programmation à la SRC soit un mélange de productions internes et de productions indépendantes. Je ne suis pas d'accord avec cela, et je vais vous dire pourquoi. Je serais d'accord pour qu'on garantisse à la SRC un pourcentage de certains fonds--par exemple le Fonds canadien de télévision; il ne serait pas difficile de me convaincre que la SRC devrait avoir accès à 50 p. 100 de ces fonds, et peut-être davantage, mais disons 50 p. 100--je pense cependant que c'est à la SRC de décider comment cet argent devrait être dépensé.
Si elle ne l'a pas déjà fait, je peux penser à toutes sortes de situations où il serait logique que la SRC mette en place une unité interne pour faire la programmation, plutôt que d'impartir le travail ou de le donner en sous-traitance, mais c'est à la direction de la SRC de décider. Dans certains cas, on voudra peut-être qu'une unité interne fasse tout le travail. Dans d'autres cas, on voudra peut-être donner le travail en sous-traitance pour une raison ou une autre. Pour moi, c'est une décision de gestion. Je ne pense pas que ce soit vraiment une décision stratégique, du moins pas au niveau parlementaire. Voilà donc ce que j'en pense.
 (1200)
Mme Lise Lareau: Je répondrai d'abord à votre deuxième question, car il s'agit en fait d'une décision stratégique. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi.
Les gens ne se rendent pas compte que la SRC ne peut produire sa propre programmation interne elle-même en vertu des règles actuelles--je parle ici de la programmation autre que pour les informations. Le coût de production d'une dramatique ou de toute autre émission est 40 p. 100 plus élevé à l'interne. Pour produire ces émissions, on veut donc avoir accès au Fonds canadien de télévision, et c'est ainsi qu'on joue le jeu. On doit passer par un producteur de l'extérieur. On ne peut pas être le producteur de l'émission à l'interne dès qu'on reçoit de l'argent du Fonds canadien de télévision. Ce sont les règles, et c'est pourquoi je dis que le système est biaisé...
M. John Harvard: Je suis désolé, mais je ne comprends pas ce que vous dites au sujet des 40 p. 100.
Mme Lise Lareau: C'est ce que montrent les chiffres de la SRC. S'ils veulent faire une émission sans avoir accès au Fonds canadien de télévision, c'est ce que ça leur coûte de plus pour faire cette émission. Par conséquent, cette politique a mis une pression financière sur la SRC pour accéder au Fonds canadien de télévision afin de produire une émission, car la SRC a des difficultés financières à l'heure actuelle--mais pour produire des émissions avec le financement du Fonds canadien de télévision, elle doit aller à l'extérieur. Elle ne peut le faire à l'interne. Ce sont les règles du Fonds canadien de télévision.
Vous comprenez donc...
M. John Harvard: Je comprends cela, oui.
Mme Lise Lareau: ...que c'est la politique qui a créé un climat de dissuasion pour que la SRC produise ses propres émissions à l'interne.
M. John Harvard: Vous dites donc que si la SRC veut avoir accès au Fonds canadien de télévision, elle doit s'adresser à des producteurs indépendants.
Mme Lise Lareau: C'est cela.
M. John Harvard: Très bien, je reconnais que vous avez raison à ce sujet.
Mme Lise Lareau: Merci. Je vais continuer d'essayer.
Au sujet du point que vous avez soulevé précédemment, vous savez quoi? Je ne tiens pas absolument à l'idée du comité du patrimoine non plus. Je voulais tout simplement que le processus soit transparent et ouvert. Au Royaume-Uni, ils ont un commissaire dont le travail consiste à nommer des personnes publiques à des conseils d'administration publics. C'est un bon modèle également. Je pense tout simplement que le modèle actuel, le statu quo, est inacceptable en 2002, de sorte que je serais très heureuse si vous pouviez nous recommander un système plus transparent que celui que nous avons à l'heure actuelle.
M. John Harvard: Puis-je revenir à la question du Fonds canadien de télévision? Si la politique était changée de façon à ce que la SRC puisse dépenser l'argent à l'interne ou à l'externe lorsqu'elle reçoit de l'argent du Fonds canadien de télévision, à votre avis, est-ce que la SRC choisirait de dépenser la majeure partie de cet argent à l'interne?
Mme Lise Lareau: Je pense que ce serait divisé assez équitablement, franchement.
M. John Harvard: Vous voulez tout simplement que la SRC puisse avoir cette possibilité.
Mme Lise Lareau: Exactement.
M. John Harvard: Je ne vois rien de mal à cela. Je vous remercie pour cet éclaircissement. Si c'est le cas, si vous voulez tout simplement donner à la SRC plus de souplesse, alors je n'y vois pas d'inconvénient.
Elle a donc converti quelqu'un au moins pour une des recommandations.
Le président: Madame Bulte.
Mme Sarmite Bulte: Merci beaucoup, monsieur le président.
Encore une fois, merci à vous deux pour votre exposé et vos recommandations. Je crois que vous avez soulevé bon nombre de questions dont il vaut la peine de discuter. Nous ne sommes peut-être pas d'accord avec tout, mais c'est une merveilleuse occasion d'avoir un échange entre nous.
Comme M. Harvard, je suis un ardent partisan de la SRC. Il s'agit à mon avis de l'institution culturelle nationale la plus essentielle que nous ayons au Canada.
Vous avez soulevé de nombreuses questions. Je ne veux pas trop insister sur la question du Fonds canadien de télévision, mais à une époque, lorsque c'était un fonds pour le câble, certains montants étaient alloués à la SRC. La situation a par la suite changé, cependant.
Monsieur Amber, vous avez parlé d'une programmation de qualité. J'ai de la difficulté à songer à une production maison d'émission dramatique. Sauf pour la série produite par Mark Starowicz, qu'y a-t-il d'autre? Vous avez parlé de l'importance d'une programmation de qualité. Pensez à l'émission The Arrow, au sujet de l'Avro Arrow. Les producteurs indépendants font des émissions de grande qualité. Ils travaillent en étroite collaboration avec la SRC et avec des partenaires de la SRC.
Je dirais aux fins du compte rendu que ce qui me préoccupe, c'est de réserver des fonds pour les productions internes. Je n'étais pas au courant de la question de gouvernance à cet égard. Je croyais qu'ils avaient changé quelque chose au sujet des opérations internes. Comment pouvons-nous assurer des productions de meilleure qualité? Puisque nous avons un talent incroyable au pays, pourquoi ne pas l'utiliser? Je ne suis pas convaincue que des fonds devraient être réservés.
En ce qui a trait encore une fois au Fonds canadien de télévision, je comprends que la raison pour laquelle on a inclus une disposition concernant les opérations internes, c'est qu'on ne voulait pas que les radiodiffuseurs privés fassent leur propre programmation, car ainsi ils n'utilisent pas des talents canadiens. On a donc encore un peu de travail à faire pour me convaincre à cet égard.
En ce qui concerne toute la question de la programmation locale et régionale, je suis tout à fait d'accord, monsieur Amber. Lorsque M. Rabinovitch a comparu devant notre comité et justifié les fermetures dans l'Est et un peu partout au pays, il a dit que la programmation régionale ne comprenait pas la programmation locale.
Je ne demande pas une réponse maintenant, mais je me demande si vous pourriez nous aider à définir cela dans la loi. Quelle définition proposeriez-vous afin de régler ce problème dans la loi?
Vous avez dit par ailleurs, monsieur Amber, que la programmation locale c'était plus que les informations. Une partie du problème n'est-elle pas attribuable au fait que le CRTC n'a pas rendu service en changeant sa définition de ce qu'est la programmation prioritaire? On dit qu'il y a moins d'émissions dramatiques et qu'on ne produit pas de dramatiques. La définition de programmation prioritaire n'a-t-elle pas été modifiée ou élargie il y a quelques années seulement? Ces changements concernaient toutes sortes de choses, mais ils ont éliminé les émissions dramatiques de la définition. Je pense qu'on a peut-être inclus les informations locales, mais pas celles qui sont présentées entre 18 et 19 heures. J'aimerais savoir ce que vous pensez de la décision du CRTC relativement à la programmation prioritaire.
J'aimerais que nous ayons plus de temps, car il y a tellement de questions à aborder. J'aimerais cependant savoir ce que vous pensez de tout cela.
 (1205)
M. Arnold Amber: Vous avez raison. Il est difficile de se souvenir de la dernière «émission produite à l'interne» dans certaines régions. Cela tient au mode de financement actuel des productions télévisuelles au Canada. Et comme Lise l'a dit, si vous pouvez obtenir automatiquement des centaines ou des milliers de dollars en retenant à contrat un réalisateur de l'extérieur, pourquoi choisiriez-vous de faire autrement? Au fil des ans, un groupe de très illustres personnalités qui travaillaient pour la SRC a fini par ne plus y travailler.
Toutefois, la question que nous posons dans notre mémoire est de savoir si un radiodiffuseur public national doit se contenter d'acheter et de retransmettre des émissions ou s'il doit aussi produire lui-même une partie de ces émissions. Je réponds oui à cette question--comme nous l'expliquons dans notre mémoire--en précisant qu'il doit y avoir un certain équilibre.
Dans notre mémoire, nous donnons des exemples du caractère trompeur de tout cela. Il y en a deux ou trois. Le premier c'est que quand on touche les 40 p. 100 de fonds additionnels pour la première émission diffusée, on n'obtient pas les droits d'auteur sur l'émission et que si cette émission est vendue ailleurs, on n'obtient rien en échange. L'autre problème, c'est que cette façon de procéder ne permet pas d'établir l'horaire de la programmation puisqu'il faut chaque fois trouver à l'extérieur quelqu'un qui acceptera de réaliser l'émission. Nous décrivons ce problème dans notre mémoire.
Il faudrait en réalité poser la question de savoir pourquoi on ne pourrait pas utiliser tous ces gens. Eh bien, dans le passé, quand nous réalisions des émissions à l'interne, cela ne signifiait pas qu'il y avait sur place des employés avec 25 ans d'ancienneté qui s'en occupaient. Dans le domaine de la radiodiffusion, une personne pouvait venir travailler à la SRC--un réalisateur ou un directeur bien connu--et consacrer six ou neuf mois à la réalisation d'une émission. Cela se faisait dans le passé et cela pourrait se faire à l'avenir. Nous ne préconisons pas le rétablissement d'une hiérarchie et la création d'émissions qui constitueraient des «emplois à vie».
Mme Sarmite Bulte: Vous avez parlé du droit d'auteur sur les émissions produites à l'interne. Qu'en est-il de l'émission The Red Green Show? N'est-ce pas une émission réalisée à l'interne?
M. Arnold Amber: Non.
Mme Sarmite Bulte: D'accord.
Mme Lise Lareau: Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter que la SRC ne détient même pas les droits d'auteur de la mini-série Trudeau. Là aussi, la mini-série a été réalisée avec des fonds provenant du FCT et, lorsque la SRC utilise l'argent du FCT, ce qu'elle ne peut éviter pour des raisons d'ordre financier, le producteur indépendant conserve la propriété de l'émission. Ainsi, la SRC n'est pas propriétaire de Trudeau. Voilà à quoi est réduit le radiodiffuseur public. Nous ne pouvons être propriétaires, nous ne détenons pas les droits d'auteur, nous ne pouvons pas produire nos propres émissions à moins que cela n'intéresse un producteur indépendant.
Et je me permets d'ajouter que trop souvent cela n'intéresse pas d'autres producteurs. Il faut les intéresser et ils ne le sont que s'ils peuvent revendre les émissions, particulièrement sur les marchés étrangers très lucratifs. Certaines des histoires que nous voulons conter dans ce pays ne pourront être revendues. Qui conte ces histoires? À l'heure actuelle, personne.
Dans cette ville, je connais un journaliste du Ottawa Citizen qui m'a dit ceci, il y a quelques semaines, quand on a diffusé la mini-série Trudeau : beaucoup d'histoires n'accrochent pas autant que celle de Trudeau, alors personne ne les raconte actuellement à la télévision.
 (1210)
Mme Sarmite Bulte: Mais n'est-ce pas aussi parce que le radiodiffuseur refuse de verser les droits de licence? Il en va de même du producteur indépendant. S'il veut pouvoir produire ses émissions, il faut que ces dernières intéressent des acheteurs.
Mme Lise Lareau: C'est exactement pour cela que vous avez un radiodiffuseur public. La SRC est la seule à ne pas se préoccuper de rentabilité. Elle est la seule à pouvoir réaliser des émissions à l'interne sans...
Mme Sarmite Bulte: Nous devons rencontrer quelques-uns des producteurs indépendants. Par exemple, pourquoi le réseau CTV a-t-il acheté les droits pour Tagged: The Jonathan Wamback Story, une histoire canadienne, mais pas la SRC? Je ne crois pas que la SRC achètera les droits pour toutes les histoires canadiennes, parce qu'elle ne le fait pas actuellement.
Mme Lise Lareau: Du point de vue des producteurs—et j'en ai rencontré beaucoup de ceux qui ne font que cela—je peux vous dire qu'ils savent que les seules émissions qu'ils peuvent vendre à CTV et aux autres réseaux privés sont des émissions qui peuvent défrayer la manchette--c'est du moins ce qu'ils croient. Si c'est une émission qui intéresse un auditoire plus restreint, si ses vedettes sont moins connues et si c'est une histoire à moindre retentissement, même si elle est importante, les réseaux commerciaux ne s'y intéresseront pas. Ces émissions ne seront pas réalisées. Vous pouvez inviter ces producteurs à comparaître devant votre comité et ils l'admettront.
Mme Sarmite Bulte: Mais vous dites que la SRC le ferait automatiquement.
Mme Lise Lareau: Pas en vertu des règles actuelles. Vous avez raison. Nous disons donc que la Loi sur la radiodiffusion doit être modifiée afin que les règles relatives au FCT soient aussi modifiées pour permettre à la SRC de produire des émissions à l'interne et d'en acheter à des producteurs indépendants. Quand la SRC se sera dotée d'une politique de réalisation d'émissions à l'interne, elle pourra alors contrôler et réaliser les projets qui n'ont pas nécessairement une valeur commerciale assurée. Il y a très longtemps qu'elle n'a pas eu ce luxe.
Mme Sarmite Bulte: Je suis d'accord avec vous là-dessus.
Le président: Je suis désolé, madame Bulte, mais il est près de 12 h 15. Mme Lill doit partir et beaucoup de gens ont d'autres réunions. Je crois que nous devons être justes envers elle et lui donner la parole.
Mme Wendy Lill: Merci.
Je veux revenir à la question des télévisions locales. Vous avez dit que la croissance de la SRC a été rendue possible grâce à l'intérêt des collectivités pour les émissions de télévision locales auxquelles elles sont attachées et qui donnent de la crédibilité au réseau. J'aimerais m'attarder sur cet aspect.
Comme nous le savons tous, les émissions diffusées à l'heure du dîner ont été modifiées du tout au tout dans tout le pays. Nous avons ce modèle moitié-moitié. À Halifax, on enregistre une baisse énorme des cotes d'écoute à cette heure. Ceux qui participent à la réalisation de ces émissions craignent de se retrouver sans travail. En réalité, nous abandonnons à toute vitesse les émissions produites localement. Les radiodiffuseurs privés disent qu'ils n'ont pas besoin de la SRC, qu'ils font tout eux-mêmes, et pourtant mon collègue de Sydney et mes collègues de Terre-Neuve savent qu'en réalité ils sont très mal desservis par les radiodiffuseurs privés au niveau local.
Vous avez dit qu'il faut une certaine souplesse, qu'il y a certains marchés où les auditeurs s'estiment assez bien servis, ceux de Toronto ou de Montréal, mais je n'en suis pas convaincue. Je sais toutefois qu'à Sydney, à Halifax et à St. John's, ce n'est pas le cas.
Devrions-nous préciser dans la loi... Devrions-nous exiger que la SRC ait une présence locale, tout en permettant une certaine souplesse à l'intérieur de cela?
 (1215)
M. Arnold Amber: C'est exactement ce que nous préconisons pour les émissions locales diffusées à l'heure du dîner. C'est bien beau de dire... Prenons l'exemple d'une autre ville, par exemple Calgary, ou d'autres villes où il y a beaucoup de choix. Je ne dis pas que Calgary est bien desservie ou mal desservie. Je n'habite pas là, et ce n'est qu'un exemple que je donne.
Il faudrait peut-être dire qu'il faut affecter les ressources là où le besoin existe et là où la demande existe. Il y a diverses façons de le vérifier et j'estime que la SRC devrait à tout le moins être obligée de tenir compte de ce facteur. Je crois que c'est M. Abbott qui ne cesse de rappeler que c'est une question de choix. Personne ne prétend que la SRC devrait injecter 2 milliards de dollars dans la programmation.
C'est effectivement une question de choix, mais certains de ces choix sont fondamentaux dans le secteur de la radiodiffusion et partant de la radiodiffusion publique. En Europe, on parle d'«utilité publique». S'il s'agit de radiodiffusion d'utilité publique, que veulent les habitants de Terre-Neuve? Que veulent les habitants de Halifax et de quoi ont-ils besoin? Je parle de ce dont ils ont «besoin» et de ce qu'ils «veulent». Est-il impossible de cerner cela? Je ne le crois pas.
Par exemple, quand vous allez plus à l'ouest, l'émission Canada Now diffuse d'abord une demi-heure de nouvelles nationales comme dans le Canada central, puis une demi-heure de nouvelles locales. Dans l'Est, où l'on préfère les émissions locales, on diffuse d'abord la demi-heure de nouvelles locales. Une émission qui s'appelle Canada Now m'attire moins qu'une émission qui s'appellerait Halifax Today, ou peu importe le nom de l'émission.
Je pense que nous devons nous affranchir de certaines idées reçues car les choix sont de plus en plus difficiles à faire. Nous ne demandons pas à la SRC, ou à ce comité, de modifier la loi de façon irréaliste. Or, si nous voulons être réalistes, nous devons admettre qu'un modèle national ne répond pas nécessairement aux attentes de tous pour ce qui est des émissions locales. Le principe à retenir c'est qu'il doit y avoir des émissions locales.
Le président: Monsieur Cuzner, vous serez le dernier intervenant.
M. Rodger Cuzner: Madame Lareau, si vous me le permettez, j'aimerais savoir si votre position sur les émissions réalisées à l'interne ou par des producteurs indépendants est celle de la SRC ou si, à tout le moins, cette dernière l'appuie?
Mme Lise Lareau: Elle a l'appui de la Société mais je dois avouer qu'elle n'y tient pas autant que nous, et cela pour ses propres raisons. Beaucoup de réalisateurs de la Société nous ont aidés à élaborer cette position et je sais qu'ils la défendraient. Je ne crois pas qu'elle soit contraire à ce que pourrait vous dire la SRC.
M. Rodger Cuzner: Monsieur Amber, nous avons à Glace Bay un jeune boxeur qui s'appelle Kyle Clark. Il a 18 ans et il a le talent qu'il faut pour se rendre aux Jeux olympiques. Il est médaillé d'or des derniers Jeux du Canada qui se sont tenus à Corner Brook en 1999. Toutefois, si nous le mettions en compétition avec Lennox Lewis, je crois que nous savons tous qui l'emporterait. Il se ferait chauffer les oreilles. Si nous l'opposions à Mike Tyson, il se ferait mordre les oreilles.
Des voix: Oh, oh!
M. Rodger Cuzner: Si nous faisons le même genre de comparaison pour le secteur de la télévision, ne vouons-nous pas nos propres émissions à l'échec si nous les mettons en compétition avec ER et Friends, ces émissions monstres qui nous viennent des États-Unis? Ne pensez-vous pas que les radiodiffuseurs privés ont leurs raisons de modifier leur grille horaire pour tenter de trouver un créneau pour les émissions produites au Canada? Je vous pose la question.
M. Arnold Amber: Il y a du vrai dans ce que vous dites mais, pour ma part... Vous savez, quand on vient ici, on ne peut qu'expliquer ce que l'on croit. Si je croyais que Bay Street tentait de comprendre pourquoi les réseaux diffusent Friends plutôt qu'une émission canadienne qu'ils voudraient bien diffuser à 20 heures s'ils ne craignaient pas qu'un autre radiodiffuseur privé au Canada n'obtienne les droits de diffusion de Friends, nous pourrions en débattre.
Toutefois, je ne crois pas que c'est ce qui se passe en réalité car, à maintes reprises au fil des ans, les réseaux comme CTV, Global et les chaînes françaises du secteur privé auraient pu réserver des créneaux horaires de choix pour les émissions canadiennes qui n'auraient pas été en compétition avec Friends mais qui l'auraient été contre d'autres émissions. Par exemple, à l'heure actuelle, beaucoup de chaînes américaines diffusent des émissions d'actualités de deuxième catégorie. Une émission canadienne pourrait certainement soutenir cette concurrence, car les Canadiens ont tendance à préférer les nouvelles canadiennes et les émissions d'actualités canadiennes.
Je ne crois donc pas que c'est la vraie raison. C'est l'un des prétextes que l'on avance pour justifier la priorité que l'on accorde à la rentabilité. Et soit dit en passant, si je possédais une entreprise soucieuse de rentabilité, je ferais probablement les mêmes choix. Mais ce n'est pas notre but ici. Nous voulons créer un système de radiodiffusion capable de nous parler de nous.
 (1220)
Le président: Je suis désolé, mais nous devons nous arrêter ici. Malheureusement, il se passe beaucoup de choses en même temps. C'est vraiment dommage, car votre témoignage est extrêmement important pour nous. C'était très intéressant. Vous avez pu juger par les questions qu'on vous a posées tout l'intérêt que nous portons à votre témoignage et nous aimerions vous remercier chaleureusement d'être revenus nous rencontrer.
Mme Sarmite Bulte: Vous pourriez peut-être revenir une autre fois.
Des voix: Ah, ah!
Mme Lise Lareau: Il faudrait que ça devienne une habitude.
Merci d'avoir pris le temps de nous écouter. Nous vous en sommes reconnaissants.
Le président: Avant de lever la séance, permettez-moi de dire que j'aurais souhaité que M. Harvard soit encore là, mais il vient de partir. J'ai reçu deux requêtes de M. Abbott et de Mme Gagnon, qui ont dû nous quitter un peu plus tôt. Ils aimeraient que nous invitions à comparaître des experts ou des fonctionnaires du ministère qui pourraient nous expliquer le projet de loi S-7. Nous ne pouvons pas en discuter maintenant car nous n'avons pas le quorum, mais je tenais à dire pour mémoire que j'ai reçu ces requêtes par écrit et que je les ai remises à la greffière. Nous verrons en temps et lieu.
Merci. La séance est levée.