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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 050 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 17 avril 2007

[Enregistrement électronique]

(1315)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous poursuivons nos audiences albertaines sur le Cadre stratégique de pour l'agriculture.
    J'accueille à la table M. Stephen Vandervalk, de la Western Canadian Wheat Growers Association. Nous accueillons également les porte-parole de l'Alberta Grain and Oil Seeds Crisis Advocacy Trust, Lorne Darlington et Leroy Fjordbotten. Lynn Jacobson et Everett Tanis représentent l'Alberta Soft Wheat Producers Commission et Mme Brenda Schoepp témoigne à titre personnel.
    Vous pouvez maintenant faire vos exposés préliminaires. J'aimerais qu'ils ne durent pas plus de dix minutes.
    C'est à vous de commencer, monsieur Vandervalk.
    Bonjour, mesdames et messieurs. La Western Canadian Wheat Growers Association se réjouit de cette occasion d'exposer son point de vue sur la gestion des risques de l'entreprise.
    Je m'appelle Stephen Vandervalk et je suis le vice-président pour l'Alberta de la Western Canadian Wheat Growers Association. Je suis un agriculteur de quatrième génération de Fort Macleod. Nous exploitons une entreprise familiale et cultivons du blé dur, du colza canola, de la moutarde, des pois, de l'orge, du mil et de la luzerne.
    Depuis 37 ans, les producteurs de blé préconisent des politiques agricoles tournées vers l'avenir pour améliorer la rentabilité de leurs exploitations agricoles et réduire leur dépendance à l'aide gouvernementale. Notre objectif a toujours été de veiller à ce que les agriculteurs aient la capacité de tirer du marché le plus de revenus possible. Nous sommes fiers d'être agriculteurs et de contribuer à la richesse de ce pays.
    Dans notre exposé, nous ferons des commentaires sur l'approche actuelle en matière de gestion des risques de l'entreprise; nous signalerons également certaines difficultés et certains risques qui doivent être examinés.
    Les producteurs de blé veulent remercier le gouvernement fédéral d'avoir annoncé dernièrement l'octroi d'un milliard de dollars pour mettre en place un système de comptes d'épargne pour les agriculteurs et les aider à supporter les coûts de production qui sont à la hausse.
    Nous croyons être exposés à deux principaux types de risques: les risques liés à la production et divers risques liés au marché.
    Dans le secteur céréalier, les risques de production sont principalement liés aux conditions météorologiques, aux maladies et aux parasites. L'assurance-récolte joue actuellement un rôle de premier plan dans la gestion de ces risques, quoiqu'au cours des dernières années, le secteur privé ait lancé des produits basés sur des contrats qui donnent aux agriculteurs davantage d'outils pour gérer ces risques.
    Une difficulté en ce qui concerne les programmes d'assurance-récolte est qu'il semblerait que le niveau des primes d'assurance et de la couverture soit très variable dans les Prairies. Les taux de production varient considérablement selon la perception de la valeur de ces programmes. Au cours des six dernières années, les niveaux de couverture ont fléchi alors que le niveau des primes a tellement augmenté que ce n'est généralement plus un outil d'assurance efficace. Je citerai des exemples venant de mon exploitation si vous désirez aborder le sujet au cours de la période des questions. Les producteurs de blé aimeraient qu'un pourcentage plus élevé des fonds fédéraux d'aide à l'agriculture soit utilisé pour rendre l'assurance-récolte plus abordable.
    Les producteurs céréaliers des Prairies sont en outre exposés à ce que nous appelons des risques liés au marché. Ce sont des risques qui ont une incidence sur nos revenus ou sur d'autres coûts des intrants. La plupart de ces risques ne sont pas contrôlables. En février par exemple, les agriculteurs ont été les victimes d'une grève paralysante du CN. Pendant deux semaines, les travailleurs du CN ont fait la grève et ont imposé des coûts considérables aux agriculteurs, notamment des frais de surestaries sur les navires, une augmentation des frais d'entreposage et des frais d'intérêt, une perte de ventes, une baisse du prix du colza canola et de graves perturbations dans le secteur des légumineuses. Il est très difficile d'obtenir une évaluation du coût total de ces pertes financières, mais nous pensons que les frais de surestaries de la Commission canadienne du blé se chiffrent à eux seuls à plusieurs millions de dollars. Nous sommes maintenant menacés par une nouvelle grève du CN. Nous prions tous les parlementaires d'adopter immédiatement une loi de reprise du travail pour limiter les pertes des agriculteurs et d'autres créateurs de richesses du Canada.
    Nous pensons que la façon la plus efficace de gérer les risques liés au marché consiste à réduire notre dépendance à l'égard de l'exportation de grain non préparé. Nous exportons actuellement 50 p. 100 de notre production céréalière dont l'acheminement vers les marchés étrangers est assuré principalement par le transport ferroviaire. Nous sommes persuadés que l'avenir de notre secteur est lié à une transformation accrue du grain que nous produisons plus près de chez nous, qu'il s'agisse de transformation comme telle du grain ou d'utilisation pour la production de biocarburant, la production de bétail ou pour toute autre initiative susceptible de réduire notre dépendance à l'égard de l'expédition de grain non préparé vers les marchés d'exportation.
    Sous ce rapport, nous apprécions quelques-unes des initiatives qui ont été prises par le gouvernement fédéral pour encourager une transformation accrue du grain dans les Prairies. Par exemple, les producteurs de blé appuient vigoureusement la récente initiative du gouvernement fédéral concernant les biocarburants, en vertu de laquelle nous adopterons une norme exigeant que l'essence contienne 5 p. 100 de carburant renouvelable et que le carburant diesel en contienne 2 p. 100. Nous appuyons également le programme annoncé en décembre qui apportera un soutien à l'investissement pour faciliter le démarrage d'usines de production de biocarburants.
    Nous appuyons ces initiatives, mais nous avons certaines réticences en ce qui concerne les dispositions de récupération que l'on compte mettre en place et qui pourraient décourager l'investissement dans l'industrie du biocarburant au Canada. Nous exhortons votre comité à veiller à ce que le climat d'investissement soit propice pour que tous les investisseurs, les agriculteurs comme les autres, puissent profiter de ce débouché de plus en plus intéressant.
    Nous insistons en outre sur le fait que, pour qu'une industrie de l'éthanol se développe complètement, il est essentiel de permettre la mise au point de variétés de blé axées sur des usages industriels. À ce propos, nous vous félicitons pour votre rapport sur la Commission canadienne des grains dans lequel vous recommandez la suppression de la distinction visuelle des grains (DVG) comme critère d'enregistrement dans toutes les catégories de blé. Nous vous demandons de continuer de faire preuve de vigilance pour que cette contrainte soit supprimée dès que possible.
    Les producteurs de blé sont en outre très encouragés par les progrès réalisés en matière d'accès des producteurs de blé et d'orge des Prairies à la liberté de commercialisation. Actuellement, on transforme environ deux fois plus de blé en Ontario et au Québec que dans les Prairies et, pourtant, les Prairies en produisent huit fois plus. Nous ne le reprochons pas à nos homologues de l'est du pays; en fait, nous les félicitons pour les efforts qu'ils font pour transformer un plus grand pourcentage du grain qu'ils produisent à l'échelle locale. Nous voulons simplement avoir l'occasion de faire comme eux. C'est pourquoi nous cautionnons à fond l'initiative gouvernementale ayant pour objet d'offrir aux agriculteurs des Prairies les mêmes options de commercialisation en ce qui concerne le blé et l'orge que celles dont bénéficient actuellement les agriculteurs ontariens. Nous craignons que la superficie des terres à blé ne continue de diminuer si le gouvernement ne fait rien pour instaurer sur le marché du blé le même niveau d'optimisme et de débouchés que celui qui existe déjà pour l'orge.
    Ce ne sont que quelques exemples indiquant comment notre politique agricole doit évoluer pour réagir aux nouveaux risques et aux nouvelles occasions qui se présentent. Si nous pensons que les perspectives sont très intéressantes en ce qui concerne l'agriculture dans les Prairies et qu'elle a un avenir prospère, nous sommes conscients du rôle que le gouvernement doit jouer pour qu'on mette en place des systèmes de protection financière efficaces pour les agriculteurs. Nous sommes heureux que le gouvernement ait annoncé des crédits de 600 millions de dollars pour l'implantation d'un nouveau système de comptes d'épargne pour les agriculteurs. Nous estimons que c'est un pas dans la bonne direction pour donner davantage de latitude et de responsabilité aux agriculteurs en ce qui concerne la gestion personnelle de leurs risques financiers.
    L'adoption d'un programme du type Compte de stabilisation du revenu net éliminerait ou atténuerait un grand nombre de problèmes associés au Programme canadien de stabilisation du revenu agricole, l'absence de prévisibilité du programme en ce qui concerne les prestations n'étant pas le moindre. Par contre, les comptes de stabilisation du revenu net donneraient aux agriculteurs une plus grande capacité de gérer leurs risques financiers personnels. La clé de la réussite du programme serait de donner aux agriculteurs la flexibilité nécessaire pour tirer des fonds de ces comptes de stabilisation du revenu net quand ils estiment en avoir besoin et pas selon un facteur déclencheur arbitraire.
    Un autre élément clé du soutien du revenu agricole est le programme fédéral d'avances en espèces. C'est un programme qui a bonne réputation car il donne aux agriculteurs la possibilité de mieux gérer leurs liquidités et leurs programmes de commercialisation. Nous remercions le gouvernement fédéral pour la décision qu'il a prise l'année dernière d'augmenter la portion exempte d'intérêts à 100 000 $ et de porter le plafond global à 400 000 $. Ces limites tiennent compte de la taille et de l'envergure de la plupart des exploitations agricoles actuelles.
    Une dernière question qui mérite à notre avis davantage d'attention est qu'il faut s'assurer que les agriculteurs aient les compétences nécessaires pour mieux gérer les risques. Une meilleure éducation en ce qui concerne l'utilisation des contrats de production ou d'établissement des prix et les divers risques et débouchés qui y sont liés est essentielle, par exemple. Une meilleure connaissance des options du marché à terme et des instruments dérivés, ainsi que des possibilités qu'ont les agriculteurs d'avoir recours à ces outils à leur avantage est nécessaire en tout temps.
    Nous estimons qu'un programme semblable à une version simplifiée du programme de stabilisation du revenu agricole comme le Compte de stabilisation du revenu net et des avances en espèces, une meilleure assurance sur la production et une meilleure formation en gestion des risques devraient être les quatre piliers du programme de gestion des risques de l'entreprise.
    Merci pour cette occasion d'exposer nos opinions. Je répondrai avec plaisir à vos questions.
(1320)
    Merci, monsieur Vandervalk.
    Monsieur Fjordbotten.
    Je vous remercie pour cette occasion de témoigner. Je m'appelle Leroy Fjordbotten. J'exploite une entreprise agricole à Granum, localité située au sud de Calgary. La plupart du temps, les gens ne savent pas où se trouve Calgary et, par conséquent, ils demandent où elle se situe par rapport à Granum. Par conséquent, si vous posez la question en sens inverse, c'est que vous êtes probablement déjà allés à Granum.
    Je suis accompagné de Lorne Darlington, directeur exécutif de l'AGCAT.
    Le secteur agricole subit de grands changements et, pour s'assurer que les producteurs puissent s'y adapter, il est essentiel de supprimer les obstacles. Pour que l'agriculture demeure vigoureuse, il est nécessaire que les producteurs et les pouvoirs publics agissent rapidement afin de répondre aux exigences des consommateurs et du marché mondial. Nous félicitons le comité pour la diligence dont il a fait preuve en écoutant les témoins et en faisant, suite à ses audiences, certaines recommandations concernant les changements qui sont indispensables.
    L'AGCAT, l'Alberta Grain and Oil Seeds Crisis Advocacy Trust, est un groupe dont certains d'entre vous ont peut-être entendu parler. Je vous expliquerai qui nous sommes en deux ou trois minutes.
    En premier lieu, nous ne sommes pas un organisme axé sur un produit ou type de produit précis. Nous ne sommes pas une organisation agricole, dans le plein sens du terme. Nous ne sommes pas des critiques ni des gens qui se plaignent et nous n'avons pas de politique en ce qui concerne tous les problèmes auxquels est confrontée l'agriculture. Nous ne faisons de reproches à personne pour les politiques qui sont en vigueur et nous ne nous préoccupons pas de savoir à qui revient le mérite pour l'élaboration de politiques efficaces, du moment qu'on en élabore.
    Qui sommes-nous et pourquoi devriez-vous écouter tous nos commentaires en les considérant comme étant dignes de foi?
    L'AGCAT a été créé parce qu'une poignée d'agriculteurs dévoués ont constaté qu'aucune organisation n'était la porte-parole des producteurs de céréales et d'oléagineux. Ce n'est pas un reproche, mais c'est une réalité du milieu dans lequel nous vivons. Les producteurs de céréales et d'oléagineux sont en crise et ils avaient besoin d'aide pour plaider leur cause. Le groupe a pris de l'expansion dans tout l'ouest du Canada. Nos membres possèdent au total près de deux millions d'acres. Ils deviennent membres de l'AGCAT en fonction de la superficie de leurs terres et, parmi eux, il y a de gros et de petits producteurs.
    En ma qualité d'ancien ministre de l'Agriculture de l'Alberta, on m'a demandé de jouer le rôle de conseiller auprès du groupe. J'assume donc ces fonctions et je suis en outre président du conseil d'administration de l'AGCAT.
    Depuis sa création, on demande à l'AGCAT de donner des conseils confidentiels aux gouvernements en ce qui concerne les grands problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs, et c'est ce qu'il a fait. Nous l'avons fait calmement, sans fanfare et sans publicité, mais nous voulons nous assurer que les meilleurs conseils sont donnés. Nous détectons les problèmes et proposons des solutions constructives.
    Dans notre groupe, d'anciens politiciens de rang supérieur de tous les partis nous conseillent pour le règlement des problèmes. Plusieurs cabinets d'experts-comptables de renom nous ont apporté leurs associés principaux qui passent des modèles de toutes les solutions que nous proposons pour mettre en évidence les avantages ou les inconvénients, en signalant ce qui serait efficace et ce qui ne le serait pas. Tous les membres de notre conseil d'administration sont des personnes actives dans le secteur agricole et sont des gestionnaires très respectés.
    Nous ne cherchons pas des hommages publics pour ces solutions et elles ont été nombreuses jusqu'à présent. Notre objectif est d'obtenir des résultats positifs et d'assurer la sécurité et la croissance dans le secteur des grains et des oléagineux.
    En politique, on entend constamment des plaintes concernant des politiques efficaces ou inefficaces et il est souvent question du désir de mettre en place de nouvelles politiques. Cependant, un remaniement complet des politiques n'est généralement pas nécessaire. Il faut plutôt que le gouvernement supprime les obstacles à la mise en place de programmes efficaces et à leur bonne exécution. Il est important d'écouter attentivement et de faire preuve d'esprit de décision en ce qui concerne les suggestions qui sont faites, et d'écouter les suggestions faites par les personnes qui travaillent la terre.
    Je ne veux pas tenir de propos négatifs à l'égard des fonctionnaires, mais comme l'a signalé Dwight Eisenhower, c'est facile d'être agriculteur quand on est à un millier de milles d'une exploitation agricole et qu'on a un crayon pour charrue. C'est autre chose d'avoir les pieds sur le sol et de devoir prendre des décisions en se basant sur des critères économiques et sur des principes associés à la région où l'on se trouve. Les fonctionnaires sont nécessaires et je pense qu'ils ont des choses à apprendre des producteurs et qu'ils ont des choses à nous apprendre. Il est toutefois essentiel d'être vigilant pour survivre dans le nouveau contexte mondial. La suppression des obstacles facilitera beaucoup la vie et permettra de la rendre plus productive.
    Je suis certain que vous avez déjà entendu aujourd'hui, et que vous en entendrez encore, des témoignages de groupes qui critiquent plusieurs événements qui se déroulent dans le pays, et à juste titre. Un exemple est le secteur des transports avec les grèves et leur impact. Le problème de la distinction visuelle des grains qui a été évoqué par M. Vandervalk est extrêmement important et l'assurance-récolte est un autre programme qui ne répond pas très bien aux besoins actuels des agriculteurs.
(1325)
    Je n'essaie pas de minimiser ces questions, mais il fallait que nous choisissions deux ou trois problèmes, et j'estimais qu'il était inutile de choisir des problèmes qui avaient déjà été soulevés par d'autres témoins. Je n'essaie pas de minimiser ces problèmes ni de les mettre en évidence pour qu'on pense qu'ils sont les plus importants. Vous vous êtes déplacés jusqu'ici et je sais que la gestion des risques de l'entreprise vous intéresse. C'est un excellent sujet. C'est un sujet qu'il est toutefois très difficile de délimiter.
    Qu'est-ce que la gestion des risques de l'entreprise? Je n'ai pas peur des risques car sans eux, il n'y a pas de possibilités. Il y a des risques. Une question que j'aimerais aborder avec vous est celle du plafond sur les programmes. On m'a conseillé de ne pas soulever le problème car il est trop délicat et personne ne veut l'aborder parce qu'on pense que vous ne vous préoccupez que des grandes entreprises et pas des petites, ce qui est totalement faux.
    Les producteurs n'aiment pas beaucoup les programmes; nous préférerions que le marché nous procure les revenus nécessaires et être débarrassés des contraintes. Cependant, des programmes seront essentiels pour assurer la rentabilité des producteurs tant que les règles du jeu n'auront pas été égalisées à l'échelle mondiale. Cette question est très délicate et nous ne nous préoccupons pas uniquement des grands exploitants agricoles, car nous avons de gros exploitants et de petits exploitants parmi nos membres. Les gouvernements craignent toujours que quelqu'un reçoivent un chèque d'un montant très important et, pour l'éviter, ils veulent imposer un plafond sur les programmes. Cette façon de procéder est peut-être raisonnable sur le plan public et de cette façon, nous encourageons les producteurs à prendre de l'expansion et à devenir plus efficaces en faisant des économies d'échelle; c'est d'ailleurs ce qu'ils ont fait et ils ont réparti leurs dépenses — le coût de leur équipement et leurs dépenses en immobilisations — sur de plus grandes superficies.
    J'aimerais le dire deux fois. Chaque acre de superficie doit produire des liquidités. Je le répète, chaque acre doit produire des liquidités. Lorsqu'on prépare un plan d'entreprise, on établit le coût à l'acre et on a recours à la fixation des prix à terme. On a recours à toutes ces méthodes et il est essentiel de maintenir les coûts à un niveau inférieur à celui des revenus. Lorsque les gouvernements imposent des plafonds sur les programmes, cela a des conséquences énormes. Je ferai d'autres commentaires à ce sujet.
    L'autre programme à propos duquel je voulais faire des observations est l'importation pour approvisionnement personnel, le programme concernant les produits chimiques réclamés par les cultivateurs. Certaines lacunes de ce programme nécessitent votre attention. On fait par exemple des enregistrements d'urgence. Un produit de lutte contre le charançon rayé du pois a été approuvé. Nous avons besoin d'un produit de lutte contre le brome des toits dans le sud de l'Alberta; un produit chimique sera disponible en 2008, mais nous n'avons rien pour 2007. Il existe un produit sur lequel vous pourriez travailler.
    Il y a une autre lacune. Je sais que le temps dont je dispose est presque écoulé, mais je veux la signaler. Lorsqu'on importe des produits chimiques, ils sont généralement importés par l'intermédiaire d'organisations ou bien les agriculteurs ont un certificat qui leur permet d'en importer. Ces produits viennent généralement de certaines régions agricoles. Ils ne passent pas par le circuit local des marchands de produits chimiques et, par conséquent, cela enlève des milliers de dollars de revenu aux collectivités rurales. Pourquoi nos marchands et nos collectivités ne peuvent-ils pas être sur un pied d'égalité avec les producteurs lorsqu'il s'agit d'importer certains de ces produits chimiques? On prive les collectivités locales de plusieurs milliers de dollars en n'autorisant pas les commerçants à servir d'intermédiaire.
    J'aurais aimé aborder plusieurs autres sujets, mais je me contenterai de signaler que c'était pour moi un plaisir de faire cet exposé. J'attends impatiemment la suite des discussions.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Monsieur Jacobson.
    Je remercie le comité de nous avoir invité à témoigner. Nous pensons que si nous pouvons rencontrer les gens d'Ottawa, différents comités et diverses parties, cela nous aidera à mieux nous comprendre mutuellement et cela facilitera peut-être l'élaboration de programmes.
    J'aimerais faire une petite introduction. Je suis un agriculteur de troisième génération de Enchant. En fait, notre exploitation devrait obtenir l'année prochaine la plaque commémorative de son centenaire. Mon grand-père s'est établi dans la région. De nombreuses exploitations agricoles de la région seront bientôt centenaires. Nous sommes établis depuis un certain temps, mais certains d'entre nous ont des craintes au sujet de l'avenir de nos exploitations agricoles familiales.
    L'Alberta Soft Wheat Producers Commission a participé activement à de nombreuses discussions sur les politiques et à de nombreux processus de consultation. En fait, notre organisation existe depuis environ 23 ans. Une des observations que j'aimerais beaucoup faire en ma qualité de porte-parole de l'Alberta Soft Wheat Producers Commission, c'est que nous accordons une très grande importance à des politiques agricoles efficaces qui aident les producteurs primaires à être autonomes, à faire de l'exploitation écologique durable et à être concurrentiels sur le marché international; nous espérons que vous êtes également de cet avis. Si nous voulons soutenir ou encourager la croissance dans nos collectivités rurales, une industrie agricole dynamique offrant des débouchés et encourageant les jeunes à se lancer dans ce secteur est essentielle. C'est notre énoncé de mission.
    En ce qui concerne l'élaboration des programmes, nous avons participé aux discussions sur la première phase du Cadre stratégique pour l'agriculture. Nous avons participé à ce processus de consultation et je pense que deux séries de discussions avec les producteurs ont eu lieu. Nous avons participé à ces deux réunions. C'est très semblable à ce que nous faisons en ce qui concerne la deuxième phase du Cadre stratégique pour l'agriculture (CSA). Au cours des consultations de la première phase du CSA avec les producteurs, nous avons eu l'impression que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux avaient pris d'avance des décisions en ce qui concerne les détails des politiques et des programmes et que les commentaires ou les suggestions des producteurs concernant les programmes n'avaient pas été vraiment examinés ou, du moins, qu'on y avait porté très peu d'attention.
    Au cours des processus de consultation de la deuxième phase du CSA de l'hiver dernier, les producteurs ont demandé — et ils l'ont fait publiquement aux réunions — si le gouvernement les écouterait attentivement cette fois-ci. Est-ce que l'on tient compte des suggestions qui ont été faites en matière d'élaboration de politiques et de programmes? A-t-on déjà pris des décisions en ce qui concerne les programmes et les politiques? Est-ce à nouveau un processus stérile pour les agriculteurs?
    Vous vous demandez peut-être pourquoi les producteurs posent ces questions. J'aimerais vous faire part des commentaires que certains membres de notre organisation et d'autres associations de diverses régions du pays ont faits. Les programmes nationaux qui sont en place font intervenir en fait trois parties: le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les producteurs. D'après l'expérience des producteurs, en matière d'élaboration des politiques, les décisions ont été prises par les deux paliers de gouvernement qui ont négocié au sujet des politiques et des programmes; ils n'ont que consulté les producteurs.
    Une des initiatives qui a incité les groupes de producteurs à soulever ce problème a été la décision du gouvernement fédéral de supprimer le Comité consultatif national sur les programmes de protection du revenu. C'était un comité qui englobait toutes les principales associations agricoles du Canada. Malgré les promesses formelles que le gouvernement fédéral avait faites lorsqu'il a supprimé le programme, on se demande si lui-même et les gouvernements provinciaux écoutent réellement les producteurs.
    Une des premières recommandations que nous voudrions faire au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire serait de rétablir le Comité consultatif national sur les programmes de protection du revenu ou d'instaurer un comité semblable regroupant toutes les organisations agricoles nationales, ayant pour mission d'établir une collaboration étroite avec le ministre fédéral de l'Agriculture pour l'élaboration des politiques et les programmes.
    J'aimerais maintenant parler de la gestion des risques d'entreprise. On nous a demandé de faire des commentaires sur la deuxième phase du Cadre stratégique pour l'agriculture et sur certaines des choses auxquelles nous accordons de l'importance. Nous n'en ferons pas sur chacun des principaux volets du Cadre stratégique pour l'agriculture, mais seulement sur quelques-uns de ceux qui sont les plus importants pour nous.
    Comme vous pouvez le constater, le volet gestion des risques d'entreprise de la deuxième phase du CSA intéresse beaucoup les producteurs. Les programmes de protection du revenu et les programmes spéciaux du gouvernement faisant partie de ce volet prévus dans la première phase de ce cadre ont apporté un soutien financier aux producteurs. Il est juste de dire qu'un grand nombre de producteurs auraient eu des difficultés financières beaucoup plus grandes sans ces paiements.
(1330)
    Cependant, des problèmes se posent au niveau de l'application du programme de protection du revenu, et je pense que nous le reconnaissons tous. Ces problèmes ont entraîné une diminution des marges de production...
    J'aimerais aborder certaines des questions à régler en ce qui concerne la gestion des risques d'entreprise.
    Le fléchissement des marges de production de nombreux producteurs de céréales et d'oléagineux dû à la faiblesse des prix ou aux pertes de récoltes pose un autre problème dont nous tenons compte dans le programme. Les délais dans lesquels les paiements sont faits sont également problématiques. Le programme n'a pas la capacité de tenir compte de la hausse des coûts des intrants, ce qui réduit encore davantage les marges de production. Aucun facteur lié aux catastrophes n'y est prévu pour faire face à des problèmes comme une sécheresse ou l'encéphalopathie spongiforme bovine. On y a prévu un petit facteur en cas de catastrophe, mais il devrait exister un autre programme qui permettrait de prendre les mesures exceptionnelles nécessaires de temps à autre. Ces raisons et de nombreuses autres sont des facteurs dont il est essentiel de tenir compte dans tout nouveau programme de protection du revenu.
    Nous aimerions signaler que si la deuxième phase du Cadre stratégique pour l'agriculture ne permet pas de régler ces problèmes, il faudra continuer de prévoir des paiements spéciaux pour pallier ces lacunes et ceux-ci seront réclamés par les producteurs. Comme on l'a déjà signalé, les producteurs ne veulent pas être obligés de compter sur des programmes de protection du revenu pour assurer leur subsistance. Ils aimeraient avoir une agriculture durable leur permettant de tirer du marché et de leur travail les ressources nécessaires à leur subsistance.
    J'aimerais aborder maintenant le sujet de la science et de l'innovation. Les efforts d'Agriculture Canada dans ce domaine qui étaient axés pendant une certaine période sur la recherche en matière de développement d'espèces végétales, portent maintenant sur la recherche sur les produits à valeur ajoutée. L'Alberta Soft Wheat Producers Commission estime qu'un investissement accru de fonds publics dans la recherche sur des programmes à valeur ajoutée n'est pas la meilleure solution pour les producteurs primaires.
    Nous pensons que confier la plus grosse partie de la recherche sur les cultures primaires à des entreprises privées pour produire de nouvelles variétés encouragerait celles-ci à modifier ces variétés pour maximiser leurs revenus et non pas ceux des agriculteurs. La diminution de la participation du gouvernement dans la recherche sur la production primaire rend les producteurs et le public vulnérables, en les exposant à des coûts incontrôlables et en laissant aux multinationales la haute main sur les stocks de semences.
    La recherche axée sur les produits à valeur ajoutée est importante, mais la recherche sur la production de cultures primaires l'est tout autant pour l'agriculture. Lorsque ces deux facteurs n'ont pas une importance égale, cela crée un déséquilibre au niveau de la source des revenus et expose les producteurs à être essentiellement tenus en otage ou... Je ferai peut-être des commentaires à ce sujet plus tard.
    Les questions environnementales sont également parmi les principales préoccupations des Canadiens vivant en milieu urbain. Le public s'attend à ce que les producteurs agricoles soient de bons intendants de la terre et nous sommes d'accord avec cela. La plupart des producteurs sont disposés à accepter cette responsabilité, mais les coûts économiques peuvent être considérables pour chaque producteur. L'Alberta Soft Wheat Producers Commission pense qu'il est essentiel de prévoir de l'aide financière publique pour protéger l'environnement. J'aimerais examiner cette question de façon plus détaillée.
    Le gouvernement s'est fait prier pour financer des projets visant à améliorer l'environnement, et plus particulièrement des programmes comme ALUS et d'autres programmes. Je sais qu'il a examiné la question et que de nombreux autres programmes ont été suggérés. Nous recommandons que les gouvernements accordent de l'aide à des entreprises privées et à des municipalités pour qu'elles réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre ou la pollution qu'elles causent. Une des questions que nous nous posons dans le domaine agricole est la suivante: quelle est la différence entre le financement d'un projet pour un producteur qui protège et améliore l'environnement et le financement d'un projet d'une municipalité ou d'une entreprise qui réduit la pollution et améliore l'environnement? Je pense que les résultats sont essentiellement les mêmes; nous réfléchissons à la position à adopter dans ce domaine.
    J'aimerais maintenant aborder un autre sujet qui préoccupe beaucoup la vieille génération d'agriculteurs dont nous faisons partie. Je pense que la plupart d'entre nous savent qu'en Saskatchewan, l'âge moyen des agriculteurs se situe probablement entre 59 et 62 ans. Nous ne suivons pas de loin en Alberta. Je pense que notre moyenne d'âge est d'environ 53 ou 54 ans et je me trouve exactement dans la même fourchette que les autres agriculteurs.
(1335)
    Quoi qu'il en soit, les agriculteurs espèrent habituellement qu'un fils ou qu'une fille voudra reprendre leur exploitation. Dans la plupart des familles d'agriculteurs canadiennes, les exploitations ont été transmises d'une génération à l'autre, mais ce n'est pas ainsi que cela s'est passé au cours des dernières années.
    Dans de nombreuses collectivités rurales de l'ouest du Canada, nous avons déjà perdu une génération d'agriculteurs et la génération dont je parle est celle des personnes âgées de 30 à 40 ans. Les membres les plus âgés de la prochaine génération, celle des jeunes de 20 à 29 ans, ont déjà délaissé l'agriculture. Les jeunes de 20 ans qui sont encore aux études ou qui viennent de les terminer partent à la recherche de débouchés économiques plus intéressants. En Alberta, on observe une beaucoup plus grande activité économique et de plus nombreuses occasions pour les jeunes à l'extérieur qu'à l'intérieur du secteur agricole.
    Nous pensons que l'augmentation de la taille des exploitations agricoles n'est pas due seulement à de mauvaises conditions économiques en milieu agricole et l'obligation de prendre de l'expansion n'est pas uniquement le résultat d'une tentative de réduction des coûts de production ou des coûts de production unitaires, comme l'a signalé M. Fjordbotten. L'augmentation de la taille des exploitations agricoles est due également à l'absence de nouveaux venus dans le secteur agricole. Je crains fort que, d'ici une dizaine d'années, je devrai me demander à qui je pourrais bien vendre mon exploitation si mes enfants ne veulent pas prendre la relève. C'est la situation à laquelle de nombreux agriculteurs de notre région sont actuellement confrontés.
    Le volet «Renouveau» du Cadre stratégique pour l'agriculture indique que la planification de la relève est une des catégories qui en font partie avec le développement des compétences, les possibilités de valorisation et les plans d'action. Nous estimons également que le développement des compétences et les possibilités de valorisation seront avantageux pour les producteurs. La planification de la relève est également nécessaire mais, comme nous l'avons déjà signalé, un élément manque dans l'équation, et cet élément manquant est l'absence de nouveaux venus dans notre secteur.
    Si nous voulons sérieusement inciter les jeunes à choisir une carrière en agriculture, il est essentiel qu'ils voient dans ce secteur des perspectives de gains financiers et de réussite.
    Nous aimerions faire au comité quelques recommandations issues de certaines études que nous avons faites. Est-ce que je devrais les signaler rapidement...
(1340)
    Combien de recommandations avez-vous?
    Nous en avons neuf. Ce sont de très courtes recommandations d'une ligne.
    Bien. Faites-en lecture.
    Bien.
    Il est essentiel qu'un véritable partenariat entre les producteurs et le gouvernement pour l'élaboration de programmes soit instauré.
    Il est impératif de rétablir le Comité consultatif national sur les programmes de protection du revenu ou un comité semblable composé de représentants de toutes les associations agricoles nationales et des associations agricoles générales provinciales.
    Il faut concevoir un programme de type Compte de stabilisation du revenu net pour la tranche supérieure du Programme canadien de stabilisation du revenu net. Nous en avons discuté et il semblerait que cela se réalise.
    Il est essentiel de permettre la mise en place de programmes régionaux complémentaires pour répondre aux besoins régionaux différents.
    Il faut mettre en place un volet ayant pour objet d'enrayer la diminution des marges pour des causes indépendantes de la volonté des producteurs comme un facteur « coûts de production », un facteur d'« inflation » ou un ajustement pour baisse des prix n'incluant pas de volet « gestion des risques d'entreprise ».
    Il est essentiel d'établir un volet « aide en cas de catastrophe » pour faire face à des catastrophes majeures comme une sécheresse ou l'encéphalopathie spongiforme bovine.
    Il est impératif d'investir autant de fonds publics dans le développement de cultures primaires que dans la recherche sur les produits à valeur ajoutée.
    Il est essentiel de récompenser les producteurs pour les projets qui servent le bien commun.
    Enfin, il est impératif d'élaborer des politiques et des programmes qui encouragent les jeunes à se lancer en agriculture et aident les producteurs âgés à prendre leur retraite.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Jacobson.
    Madame Schoepp.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais me présenter. Je m'appelle Brenda Schoepp et je suis une productrice de la région de Rimbey.
    Notre famille a de longs antécédents en agriculture et a été active dans le secteur du naissage et de l'engraissement, dans celui de la production de céréales biologiques et d'autres produits alimentaires, dans la vente de détail et, maintenant, dans la transformation des aliments; elle envisage également de se lancer dans la production de produits de beauté à base de produits agricoles au Canada. Je suis consultante pour des clients canadiens, américains et sud-américains qui représentent un inventaire d'une valeur de plusieurs milliards de dollars. À titre d'analyste de marché pour le secteur de l'élevage bovin, je publie une revue nationale intitulée Beeflink qui est assez connue et j'ai fait des déplacements à travers le Canada. J'ai traversé le pays une vingtaine de fois pour donner des conférences sur toutes sortes de thèmes, allant de la conduite de l'herbe à la gestion des risques, en passant par tous les sujets de préoccupation des producteurs. J'ai en outre une vingtaine d'années d'expérience dans les conseils d'administration.
    Aujourd'hui, mes commentaires seront principalement axés sur une partie de cette expérience à titre d'ex-présidente du Fonds canadien d'adaptation et de développement rural, d'ancienne présidente du Programme pour l'avancement du secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire — qui sont, naturellement, l'un et l'autre, des programmes fédéraux —, d'administratrice du Beef Cattle Research Council, qui est également un organisme fédéral, et, à l'échelle provinciale, à titre de présidente de la recherche pour l'Alberta Beef Producers. J'ai en outre participé à l'élaboration et à la construction de la plus grosse station de recherche bovine du Canada — qui est actuellement entièrement opérationnelle —, à Strathmore, en Alberta. Je travaille en outre avec de nombreux clients privés de la province. En 2006, le milieu des affaires de l'Alberta m'a nommée parmi les 50 personnes les plus influentes de la province. Par conséquent, je ne m'ennuie pas.
    Ce que j'aimerais faire, c'est prendre beaucoup de recul pour signaler où se trouvent les opportunités en agriculture, en évitant de pointer les problèmes.
    Le producteur rural n'a peut-être jamais eu autant de difficulté à maintenir la rentabilité dans une petite ou moyenne exploitation agricole traditionnelle. Ce constat est confirmé par la croissance substantielle de 6,5 p. 100 du nombre d'exploitations de 1 600 acres ou plus. On constate par conséquent une certaine croissance dans le secteur agricole. Étant donné que le territoire agricole sur lequel on compte pour répondre aux besoins de l'agriculture et de la société est limité, il est important de mettre l'accent sur des engagements à long terme d'un niveau plus élevé que de simples pratiques durables — car je ne suis pas d'avis qu'une pratique qui n'est que « durable » soit acceptable — et d'attirer de la main-d'oeuvre qualifiée et des dirigeants d'envergure.
    J'estime que l'agriculture doit être considérée comme un service essentiel reposant sur des dirigeants du secteur qui sont instruits, apprécient une économie mondiale, comprennent le concept de la valorisation et soutiennent la recherche et la commercialisation. Lorsqu'on a des contacts avec plusieurs centaines de producteurs, on constate qu'il existe un écart entre la compréhension de l'importance de la recherche ou des méthodes de production et la participation, par le biais d'un investissement, à la commercialisation d'un produit à valeur ajoutée.
    Les gouvernements doivent appuyer l'agriculture par le biais de politiques habilitantes, d'examens réglementaires, d'une certaine harmonisation et d'une réaction rapide aux enjeux nouveaux. L'impact à long terme de toutes les pratiques agricoles écologiques sera peut-être remis en question un jour. L'intensité des changements démographiques posera un défi en matière d'infrastructure, de soins de santé, de logement, d'éducation, d'information et d'environnement. Les dirigeants politiques auront peut-être plus de difficulté à justifier les subventions ou les investissements agricoles en présence d'une population en grande partie « immigrante », c'est-à-dire des personnes âgées de 50 à 60 ans qui réintègrent le marché du travail ou une population venant d'une autre province ou de l'étranger, qui est principalement urbaine et n'a aucun lien avec la production agricole. Il sera également difficile de défendre l'utilisation de l'eau pour la production agricole, l'utilisation des terres pour les déchets animaux, les odeurs émanant de ces déchets, l'expansion des installations de production à proximité des centres urbains et les déchets provenant de la transformation, à moins que les déchets et les produits dérivés agricoles, y compris la co-masse ou le co-produit, ne puissent être une ressource éprouvée.
(1345)
    Actuellement par exemple, le co-produit du blé est un déchet dont l'utilisation n'a pas encore été faite en quantité suffisante dans l'alimentation du bétail pour en démontrer l'efficacité. La production d'une masse à base de maïs et de blé pour la fabrication d'éthanol a déclenché des discussions d'ordre éthique sur l'opportunité d'accorder la priorité à la production alimentaire ou à la production de carburant. La production cellulosique d'éthanol ou de butanol est perçue comme un modèle commercial plus stable, fondé sur l'utilisation de déchets agricoles, d'arbres, d'arbustes ou de graminées. Ce procédé réprime les craintes liées à l'utilisation de produits alimentaires pour la fabrication de carburant et il est écologique, car il produit moins de gaz à effet de serre que les méthodes de production d'éthanol à base de grain.
    La production de biodiesel sera largement dépendante de l'uniformisation des règles du jeu entre le Canada et les États-Unis, mais le secteur des oléagineux ne souffrira probablement pas en raison de la très forte croissance dans ce secteur.
    Les progrès de la biotechnologie permettent en outre à l'agriculture de faire partie de la solution aux besoins en matière de remèdes ou de vaccins à base de plantes et d'améliorations génétiques. Je pense que quelqu'un a signalé ce matin qu'étant donné que de nouvelles zoonoses — ce sont des maladies transmissibles de l'animal à l'être humain — se déclareront et qu'un nombre croissant de liens sont établis entre les maladies humaines et les maladies animales, un besoin urgent de dépistage rapide et de diagnostic précoce se fera ressentir. Un exemple frappant dans l'immédiat est le nouveau lien potentiel entre la maladie de Johne et la maladie de Crohn démontrant la nécessité de faire un dépistage rapide et un diagnostic précoce avant l'abattage; ce dépistage avant l'abattage est la clé.
    La production de produits alimentaires et de boissons est importante et continue d'avoir un potentiel de croissance dans la production et la fabrication de succédanés du sucre en particulier, car la consommation annuelle de sucre est de 169 livres par personne au Canada. C'est un secteur émergent offrant un potentiel énorme. Les aliments fonctionnels ou nutraceutiques et les aliments et produits biologiques, les produits de beauté faits à base de plantes, les produits de parfumerie, le tissu, les vêtements, les emballages, les couches pour bébé et les fournitures médicales présentent un potentiel énorme, de même que les aliments pour animaux domestiques, les produits de parfumerie pour animaux domestiques, les couches pour chiens, les produits de soins pour animaux familiers et d'autres produits pour le bien-être des animaux. Ce sont des secteurs émergents énormes pour le Canada.
    L'hygiène et la nutrition des animaux destinés à l'alimentation deviennent actuellement des secteurs d'enquête critiques. Les secteurs de l'élevage du bétail et de la volaille ont besoin de réponses immédiates concernant l'utilisation de co-produits et l'indice net de consommation, ainsi qu'en matière de recherche génétique, d'approches thérapeutiques à la gestion sanitaire, de diagnostic rapide, de résistance aux antimicrobiens, de zoonoses et de différentiation des produits. Le secteur de l'élevage des animaux destinés à l'alimentation doit continuer d'adopter une approche préventive à la résistance aux antimicrobiens en rapport avec la consommation alimentaire.
    Au chapitre du développement des produits, la recherche en ce qui concerne la volaille et le bétail doit se poursuivre pour régler la question de l'absence d'utilisation de produits locaux dans les aliments consommés dans les institutions, compte tenu du vieillissement de la population.
    Pour soutenir un système de commercialisation fondé sur la valeur, il est nécessaire de déceler des traits ou des caractéristiques qui permettent aux produits canadiens de se démarquer des produits concurrents. Cette recette de réussite doit être établie de toutes pièces avec un système de différenciation vérifiable tout au long de la chaîne de production, de transformation, de fabrication et de distribution. Étant donné que les fluctuations du cours de notre devise, les pénuries de main-d'oeuvre et les obstacles réglementaires réduisent l'avantage concurrentiel du Canada, il est essentiel que chaque intervenant ne se laisse pas dépasser et donne un caractère distinctif à son produit.
    Ce que je préconise donc en l'occurrence est un système de traçabilité pour tous les produits, tout au long de la chaîne de production. Ce ne seront plus des produits ordinaires; ils seront vérifiables et traçables et auront une valeur distincte pour l'acheteur.
    Dans un contexte évolutif, c'est le renseignement et l'information qui ont le plus de valeur. Les entreprises albertaines possèdent par exemple plusieurs des systèmes informatiques les plus exhaustifs au monde, mais ceux-ci sont largement sous-exploités et souvent négligés. Nous avons par exemple la banque de données la plus complète au monde sur la recherche, la nutrition, la santé, la vérification de l'âge, la reproduction, la valeur marchande des carcasses, l'exportation, l'investissement et les coûts de production. Nous nous appliquons à inciter les gouvernements à utiliser cette banque de données pour l'acheminement des produits et pour réaliser des progrès au chapitre de la traçabilité, mais il semblerait que l'on se heurte à une certaine résistance dans ce domaine.
(1350)
    Le transfert de technologies n'a jamais été efficace, et on constate une absence totale de formation ou d'accréditation de la production alimentaire et la dissolution du soutien technique aux agriculteurs. Dans la plupart des cas, les agriculteurs n'ont pas de formation officielle dans quelque aspect que ce soit de la gestion des risques et, comme l'a signalé le témoin, il est essentiel de remédier à cette lacune.
    Étant donné que l'agriculture au Canada ne se limite plus à la production de produits bruts, il sera encore plus évident qu'une pénurie en matière de renseignement technique, commercial, manufacturier et de recherche continuera de poser un défi à l'industrie. Pour attirer des investisseurs, de nouveaux arrivants et des partenaires dans l'un ou l'autre de ces créneaux, il est essentiel que l'agriculture adopte de nouveaux modèles, une nouvelle image et qu'elle ait des dirigeants instruits. Je parle de dirigeants de l'industrie.
    Par conséquent, la recherche axée sur la production de recettes, au détriment du perfectionnement des compétences et de la satisfaction des besoins en matière d'éducation des prochaines générations de travailleurs peut être contestée. La meilleure solution est l'adoption par l'industrie d'une approche systémique transparente, axée sur la coopération et sur la performance, et sur une économie du savoir, en matière de recherche.
    Une approche systémique est une approche dans le contexte de laquelle tout ce qui se fait en matière de recherche consiste à examiner tout ce qui est en avance de deux longueurs et tout ce qui est en retard de deux longueurs, puis à faire les liens entre les deux pour éviter la formation de cellules de recherche isolées qui ne soient pas rattachées à des besoins environnementaux, sociaux ou à d'autres types de besoins.
    L'éducation est alors le point de mire à tous les niveaux et la clé de la réussite de l'investissement de fonds publics dans l'agriculture.
(1355)
    Pourriez-vous conclure?
    Où voit-on du changement? L'investissement dans la biotechnologie se poursuivra. On a dénombré au Canada 459 entreprises en biotechnologie qui représentent 10 p. 100 de l'activité mondiale. Nous prévoyons que cette tendance se maintiendra.
    La collaboration avec la santé publique sera une priorité, car l'agriculture fera équipe avec des chercheurs dans les domaines des remèdes et des vaccins à base de plantes et s'attaquera au problème de la résistance aux antimicrobiens et à celui des zoonoses.
    La demande de succédanés du sucre à base de plantes atteindra des niveaux sans précédent, ainsi que la demande de mets tout préparés authentifiés. La demande d'aliments biologiques augmentera, notamment en ce qui concerne les aliments pour bébé, les viandes, les viandes congelées et les soupes. Nous avons observé une croissance sans précédent dans ces secteurs et ils offrent par conséquent des débouchés importants.
    En outre, il est essentiel de tenir compte du vieillissement de la population et du fait que 100 p. 100 de la viande consommée dans les institutions est importée et n'est pas de production locale.
    Nous considérons la fabrication de couches et de fournitures médicales biodégradables produites en grande partie à base de colza canola comme un progrès important.
    J'aimerais contester la validité du terme « durabilité » dans le contexte de l'examen de tous les aspects de l'industrie céréalière. Une nouvelle appréciation de cette industrie est essentielle.
    La question a été abordée brièvement, mais la recherche sur les variétés est très importante dans ce contexte. J'encourage à la poursuivre, car l'industrie de l'élevage du bétail au Canada a atteint un tel niveau de dynamisme qu'il est important que l'industrie céréalière soit maintenue.
    J'aimerais signaler que la différentiation des produits et l'assurance de la qualité, sous l'appellation de la traçabilité... Je sais que la confusion règne dans ce domaine, en ce qui concerne la nature de la traçabilité, ceux qui devraient la diriger, ceux qui participent dans ce domaine et ce que cela nous coûte collectivement mais, si nous voulons que le Canada se différencie pour les 50 prochaines années, il faut créer nos propres créneaux et s'éloigner de la poussée de l'offre au profit de la traction par la demande.
    Je pense que le financement de la recherche ne devrait pas être restreint. Il faudrait prévoir l'attribution de fonds pour permettre à l'industrie privée de participer plus activement à la recherche. En tout cas, étant donné que nous avons de plus en plus tendance à utiliser des co-produits, il est essentiel de penser à rétablir un financement pour la recherche appliquée en production.
    Le transfert de technologies est un enjeu énorme. La centralisation de l'information en matière de recherche et du transfert de technologies est aussi un enjeu énorme.
    J'insiste toutefois sur le fait qu'en fin de compte, l'éducation est peut-être plus importante que l'innovation en agriculture, si nous voulons attirer de nouveaux venus.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Schoepp.
    Monsieur Hubbard.
    Merci, monsieur le président.
    C'était très intéressant d'entendre des exposés aussi différents. J'ai cru un instant que j'étais dans une machine qui me projetait dans l'avenir. En ce qui concerne le dernier exposé, je pense que le comité devrait peut-être examiner ultérieurement certaines de ces questions.
    Pour ce qui est de la gestion des risques d'entreprise, je présume que nous pensons davantage aux conditions actuelles et à ce que nous pouvons faire pour améliorer directement la situation dans les collectivités agricoles.
    Tout se résume aux préoccupations de M. Jacobson pour l'avenir en ce qui concerne la relève en agriculture. Sans avoir un bon aperçu des perspectives qu'offre une carrière en agriculture pour cette génération-là, les jeunes refuseront certainement de s'engager dans cette voie. Si, avec la gestion des risques d'entreprise, nous ne pouvons pas leur faire la démonstration d'une certaine réussite dans les milieux agricoles à travers le pays, qu'il s'agisse d'enfants d'agriculteurs, de voisins ou d'immigrants récents qui se lancent en agriculture, ils auront de la difficulté à se décider à y consacrer leur vie.
    Une des questions que j'ai posées à plusieurs séances est la suivante: les programmes sont-ils trop nombreux? À l'échelle fédérale, les sommes dépensées sont considérables. La province a mis en place divers programmes; il existe des programmes réguliers et des programmes spéciaux. Un consensus important s'est établi en ce qui concerne l'aide en cas de catastrophe, l'importance capitale de l'assurance-récolte et de la recherche. À l'échelle fédérale, on pourrait probablement investir nos paiements en espèces dans d'autres domaines.
    Le nombre d'intervenants est-il, d'après votre expérience, trop élevé? Les agriculteurs sont-ils, comme vous l'avez mentionné, trop rebutés par la paperasserie lorsqu'ils doivent réagir aux demandes des bureaucrates ou des fonctionnaires dont les connaissances en matière d'agriculture sont très limitées?
    Vous avez cité une phrase d'Eisenhower. Est-ce une combinaison trop importante pour que la plupart des agriculteurs puissent vraiment se rendre compte de ce que l'on fait? Est-ce que ces programmes atteignent le niveau de réussite qu'en notre qualité de politiciens fédéraux ou provinciaux, nous estimons devoir offrir?
(1400)
    Je pense que les deux volets de votre question sont très appropriés. Le premier porte sur l'avenir des agriculteurs, sur lequel j'aimerais faire un bref commentaire. Le deuxième volet concerne les programmes.
    Lorsque j'étais ministre, on venait me trouver constamment pour me faire des propositions. Tout le monde était enthousiasmé à l'idée de pouvoir élaborer un nouveau programme et on prétendait que tel programme produirait toutes sortes de résultats précis. Mais c'est de la vieille histoire. On peut mettre au point un nouveau type de vache, mais on ne sait pas si on a réussi avant de voir si le taureau l'apprécie. Un grand nombre des programmes que nous avons conçus n'étaient appréciés de personne.
    Même au niveau de notre type d'exploitation agricole, à l'heure actuelle, une personne doit passer un jour par semaine au bureau. Nous devons consacrer au moins toute la matinée et parfois presque toute la journée au travail administratif dû à des programmes auxquels on n'ose pas refuser de participer. En toute sincérité, dans certains cas, je ne suis pas assez intelligent pour remplir les formulaires et nous devons faire appel à un comptable. C'est un travail qui est complexe. Tout est complexe de nos jours mais, dans certains cas, la complexité est très grande.
    Lorsque j'étais ministre, nous avions mis en place un nouveau programme agricole en Alberta pour encourager de nouveaux venus à se lancer en agriculture. À l'heure actuelle, la plupart des jeunes posent la question suivante: pourquoi devenir agriculteur si on peut gagner sa vie autrement? Et non seulement cela, mais on a actuellement de la difficulté à obtenir de la main-d'oeuvre dans une exploitation agricole. Je pense que c'est un problème auquel il est essentiel de s'attaquer.
    Pour répondre brièvement à votre question sur les programmes, les programmes sont nécessaires mais ils sont effectivement beaucoup trop complexes. Serait-il possible de faire baisser la moyenne d'âge des agriculteurs? Oui, je le pense, mais il faudra faire des efforts.
    Ai-je répondu à votre question?
    Monsieur Jacobson, plusieurs personnes ont fait mention de l'intérêt commun. Si un visiteur étranger voyage dans la zone rurale de l'Alberta ou qu'il va à Davidson, en Saskatchewan, pour visiter cette localité rurale, aura-t-il une bonne idée de ce que représente l'agriculture au Canada? Pensez-vous qu'un palier de gouvernement devrait prendre des initiatives dans l'intérêt commun pour faire connaître le Canada rural à d'autres personnes?
    C'est une question à laquelle il est difficile de répondre, quand on y pense bien.
    En ce qui concerne le premier volet, si un visiteur venait, il aurait certainement un aperçu de la diversité de l'agriculture dans nos différentes régions. Quand on va de l'extrême-nord de la région de Peace River jusque vers le sud de l'Alberta, on remarque une grande diversité dans les activités et les pratiques par rapport à nous. La diversité est encore plus grande à l'échelle du pays.
    J'ai vraiment de la difficulté à répondre à cette question. M. Tanis a peut-être une idée.
    Monsieur Tanis.
    Alors que les agriculteurs doivent consacrer une journée de travail à la paperasserie pour rester en activité, comment un visiteur pourrait-il savoir à quoi ressemble l'agriculture dans le Canada rural?
    Il y a quelques années, en revenant en voiture d'Edmonton, je me suis dit, en regardant le paysage: « Quel magnifique pays. Quel dommage que ce soit si coûteux de le cultiver. »
    Je ne sais pas si c'est une réponse satisfaisante pour vous, mais ça vous donne au moins matière à réfléchir.
    Un commentaire que je voudrais faire à propos du gouvernement est que nous avons en fait besoin du gouvernement ou de financement dans nos associations agricoles ou dans d'autres organisations pour montrer la complexité et la diversité qui caractérise l'agriculture; ce ne sera peut-être pas compris uniquement par les visiteurs mais également par notre population urbaine qui sera de plus en plus le groupe qui établira la politique environnementale et les pratiques pour le Canada rural.
    Il est donc essentiel que nous comprenions ce que nous sommes et ce que sont les citadins et que nous ayons l'occasion de nous faire connaître et de montrer ce dont nous sommes capables. Sans cette compréhension entre une population urbaine et une population rurale, c'est à long terme la population urbaine qui nous dictera essentiellement les pratiques que nous devrons adopter; c'est d'ailleurs ce qui s'est passé dans une large mesure en Europe.
    Je pense par conséquent que c'est à ces niveaux-là que le gouvernement a un rôle important à jouer ou qu'il doit faire les aménagements nécessaires pour que les associations agricoles puissent jouer ce rôle également.
(1405)
    Merci.

[Français]

    Monsieur Gaudet, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Schoepp, vous avez dit que vous aviez un magazine et que vous voyiez de haut l'agriculture. Je n'ai pas vu votre magazine et je ne peux donc pas en parler. Cependant, je veux savoir comment vous pouvez dire aux gens de la ville ce qui se passe à la campagne quand personne n'en parle jamais. Ce que voient les gens de la ville, ce sont des gros tracteurs, des grosses lieuses-batteuses, de la grosse machinerie. Les citadins pensent que tous les agriculteurs sont riches, qu'ils n'ont pas besoin d'argent ni de l'aide du gouvernement ou de qui que ce soit.
    Je ne peux pas concevoir que vous n'en ayez jamais parlé dans votre magazine, puisque vous voyez de haut l'agriculture. Les gens ne sont pas conscients que les agriculteurs travaillent 80 heures par semaine, sept jours sur sept, 12 mois par année. Il n'y aura pas de jeunes agriculteurs qui prendront la relève. Pourquoi? Parce qu'ils ne veulent pas travailler 80 heures par semaine, sept jours sur sept, ne jamais avoir de vacances, ne jamais aller en Floride ou ailleurs. Il faut faire comprendre aux citadins que c'est un travail qui est difficile.
    Je suis né sur une terre et je sais ce qu'il en est. Comme je l'ai déjà dit à plusieurs personnes, ma municipalité comptait 127 producteurs de lait en 1957. Aujourd'hui, il n'en reste que deux. Pourquoi? Parce que les gens doivent travailler sept jours par semaine et que cela n'en finit plus. Il faudrait que les agriculteurs expliquent aux gens de la ville ce qu'est l'agriculture. Une personne qui est à l'emploi d'une compagnie quelconque travaille 37 ou 40 heures. Si elle est employée dans un hôpital, elle travaille 37 heures et demie et a ensuite trois jours de vacances. Les agriculteurs, eux, n'ont pas de vacances. S'ils en ont, c'est parce que leur exploitation est énorme et qu'il ont assez d'employés, ce qui leur permet de prendre du bon temps. Mais même dans de tels cas, ils doivent penser à beaucoup de choses.
    J'aimerais avoir votre opinion là-dessus, madame Schoepp.

[Traduction]

    Merci.
    Dans la première partie de votre question, vous vouliez savoir comment on pourrait s’y prendre pour susciter l’adhésion de la population urbaine ou lui démontrer la valeur de l’agriculture et de l’exploitation agricole. D’entrée de jeu, je peux vous dire que je n’ai pas la réponse à cette question.
    À mon avis, on va chercher cette adhésion lorsqu’on commence à coordonner les politiques d’utilisation des terres, les politiques d’accès à la terre, le droit de l’exploiter à des fins agricoles, etc. En effet, au bout du compte, tout tourne autour de la terre. Je veux dire par là que c’est notre investissement en capital. La terre et l’accès à la terre représentent aussi un besoin sociétal, et nous pouvons donc commencer par-là.
    Dans une perspective fédérale et provinciale, il importe de ne pas présenter l’agriculture sous l’angle du « pauvre fermier », mais plutôt comme le début ou le moyen d’arriver à une fin — autrement dit, l’innovation, la recherche, la technologie, la transformation, la science et tous les aspects passionnants qui permettent un cheminement qui va du champ à l’assiette. Si l’on pouvait susciter une meilleure compréhension du processus intégral de transformation, cela serait peut-être utile.
    À titre d’exemple, nous avons fait cela par l’entremise d’une modeste publication appelée Food for Thought, en Alberta. Elle est distribuée dans les épiceries, les cabinets de médecins, etc. On y aborde tous les aspects de l’agriculture. En la lisant, le consommateur se rend compte à quel point l’agriculture a énormément d’importance pour lui. Je ne manquerai pas de vous en faire parvenir des exemplaires, monsieur le président. C'est une idée qui me vient à la suite de votre question sur la façon de s’y prendre pour communiquer cette information.
    Évidemment, séduire les jeunes et aller chercher des investissements sont deux aspects importants. Nous avons mentionné tout à l’heure la pénurie de capitaux dans l'agriculture. Il faut reconnaître que certaines économies d’échelle sont nécessaires.
    Il faut admettre qu’à l’heure actuelle, la situation démographique évolue. Au moins 28 p. 100 des exploitations agricoles appartiennent à des femmes et sont gérées par celles ci. Elles apportent une vision différente des pratiques agricoles et des pratiques sans cruauté différentes de celles qui existaient auparavant.
    Nous devons susciter l’enthousiasme en insistant sur l'innovation et l'aspect scientifique de l’agriculture, car ces aspects sont très présents. Même dans un tracteur nouveau modèle, l’ingénierie est remarquable. Nous pouvons intéresser les consommateurs urbains de cette manière.
    Pour répondre à votre question au sujet de Beeflink, il s’agit d’une publication bihebdomadaire. On y fait le point sur l’industrie bovine, du producteur primaire jusqu’aux ventes sur les marchés internationaux. Elle est distribuée par courriel dans tout le Canada et les États-Unis.
    Merci.
(1410)

[Français]

    Je vous ai parlé des 127 producteurs qui se trouvaient dans ma municipalité en 1957. Remarquez que maintenant tout est cultivé à 100 p. 100. Pas un seul lopin de terre ne l'est pas. C'est un autre genre d'agriculture.
    J'aimerais poser une question à M. Vandervalk. Vous avez dit que vous n'aviez pas besoin du gouvernement, mais j'ai cru comprendre que vous étiez très heureux d'avoir reçu un milliard de dollars du ministère, puis 600 millions de dollars pour la gestion du risque, sans compter l'argent disponible du CSA et les programmes de prêts. Je pense qu'en fait, vous avez besoin du gouvernement. C'est son rôle. Je ne veux pas vous faire de reproche, mais vous donnez l'impression de n'avoir besoin de personne.
    C'est bien beau de dire qu'on veut exporter et ouvrir le marché, mais n'oubliez pas que si on ouvre le marché, les autres vont vouloir entrer chez nous. C'est pourquoi je pense qu'il faut trouver un juste milieu. Au niveau de la politique gouvernementale canadienne, il faut faire attention. Si on ouvre trop les portes, certains vont sortir, mais d'autres vont vouloir entrer. Je voudrais entendre votre opinion à ce sujet.

[Traduction]

    Merci.
    Merci, monsieur Gaudet. Votre temps de parole est écoulé.
    Veuillez répondre brièvement, monsieur Vandervalk.
    Je suis désolé si c’est ainsi que l’on a compris mes propos. Ce que je voulais dire, c’est que les agriculteurs veulent être moins dépendants du gouvernement. Nous voudrions tirer notre revenu du marché.
    C’est très difficile parce que nos concurrents de l’Union européenne et des États-Unis bénéficient de subventions, ce qui leur permet de vendre à moindre prix. Par conséquent, nous ne pouvons leur livrer concurrence à armes égales et c’est là qu’intervient l’aide du gouvernement. Si nous étions à armes égales et si nous pouvions tirer notre revenu du marché, nous dépendrions moins du gouvernement. Tel est notre objectif.
    Merci.
    Monsieur Miller.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins. Vous avez tous fait des observations très judicieuses.
    Plus particulièrement, Brenda, vous avez abordé un sujet important. Je pense que nous tous, qui œuvrons dans le domaine de l’agriculture, et parfois au gouvernement… Vous avez signalé le grand besoin d’une diversité accrue et d’une volonté de changement dans le domaine agricole. Comme on le disait autrefois: « Mon père et mon grand-père cultivaient le blé et élevaient des bovins; par conséquent, c’est ce que je dois faire. » On a fait valoir qu’il existe d’autres marchés et qu’en tant qu’agriculteurs, nous devrions nous ouvrir à certains d’entre eux.
    Leroy, vous avez fait certaines observations plutôt controversées, mais je les ai trouvé intéressantes. Vous avez parlé, entre autres, des plafonds. Personnellement, j’ai tendance à y souscrire quelque peu, et je vais vous expliquer pourquoi. J’utiliserai le premier et le seul exemple qui me vienne à l’esprit, à propos du PCSRA. Il y a environ un an et demi, le syndicat du blé de la Saskatchewan, qui n’est pas à mon avis un rassemblement d’agriculteurs, a reçu de l’argent du PCSRA. Et il y en a d’autres exemples.
    La question que je vous pose est la suivante: des entreprises comme celle-là devraient-elles vraiment avoir accès aux programmes gouvernementaux? Et ce n’est qu’un exemple. Je n’ai rien contre la Saskatchewan Wheat Pool.
     Vous avez aussi évoqué les importations à usage personnel. Je suppose qu’à l’origine, ce sont les producteurs qui ont fait des démarches auprès du gouvernement. Je pense que ce mouvement a débuté dans l’ouest où l’on voyait cela comme un moyen d’aider les producteurs, et je comprends cela. Mais vous avez signalé que ce que j’appelle les négociants agricoles locaux, si vous voulez, sont les perdants dans ce cas. Et je le comprends aussi. En pareil cas, les acteurs locaux perdent de l’argent.
    La question qui se pose est la suivante: Existe-t-il un juste milieu auquel le gouvernement devrait adhérer? J’aimerais que vous m’en disiez plus long à ce sujet.
     C’est une question qui s’adresse à vous tous. Vous avez dit qu’il était pratiquement nécessaire aujourd’hui de passer une journée par semaine dans son bureau. En tant qu’agriculteurs, lorsque c’est le temps de rassembler le troupeau, de faire les semailles ou de récolter, c’est le dernier endroit où nous voulons être. Mais de nos jours, nous n’avons pas le choix.
    Comment le gouvernement peut-il instaurer des mesures de protection — un système de vérification — pour s’assurer que les programmes ne donnent pas lieu à des abus, sans augmenter la paperasse? Je souhaite vivement que le système soit simplifié, et je suis sûr qu’il y a un moyen d’y arriver, mais j’aimerais que les témoins nous disent, de façon générale, comment nous pourrions nous y prendre.
(1415)
    Monsieur Fjordbotten.
    Je répondrai d’abord à la dernière question. Je me limiterai à un seul commentaire et je sais que mes collègues voudront ensuite intervenir.
    Tout programme exige d’être encadré par un certain nombre de règles et de règlements. C’est l’argent des contribuables qui est en cause, et on ne peut tout simplement pas le distribuer sans s’assurer que les règles soient respectées, sinon le gouvernement se retrouve rapidement dans l’eau chaude. Par conséquent ce n’est pas une option. Cependant, les formulaires sont pratiquement dissuasifs.
    Je vais vous donner un exemple. Lorsque je suis devenu ministre, j’ai demandé aux fonctionnaires de m’apporter un exemplaire de tous les formulaires de demande. On m’en a apporté des piles. Je leur ai demandé à quoi servait chaque formulaire, et quand la réponse ne me plaisait pas, je le jetais à la poubelle. Au bout du compte, je me suis retrouvé avec une pile beaucoup plus raisonnable. Je leur ai alors demandé: Pourquoi ne pas intégrer tout cela sur une seule feuille au lieu de cinq? Le problème était tel qu’on ne savait jamais si l’on remplissait le bon formulaire. À mon avis, tout le système pourrait être simplifié.
    Pour répondre à votre question au sujet des grandes compagnies, je n’en connais pas la réponse. Ce n’est pas une question facile. Comme Mark Twain le disait, la démocratie est un peu comme un radeau. Elle ne coule jamais, mais on a constamment les pieds mouillés. Je pense qu’en l’occurrence, nous aurons toujours les pieds mouillés.
    J’aimerais terminer l’observation que j’avais commencé à faire au sujet des plafonds et que je n’avais pu finir parce que j’avais dépassé mon temps de parole. Il existe toutes sortes de plafonds. On traite différemment les acres cultivés selon le nombre d’agriculteurs en cause. Que l’on soit propriétaire ou locataire de la terre ne devrait pas être pris en considération. Les gouvernements ont tous encouragé les agriculteurs à prendre sans cesse de l’expansion. Ils obtiennent ainsi des économies d’échelle, mais dès que l’exploitation agricole atteint une grande taille, elle est assujettie à un plafond, ce qui revient à traiter injustement les agriculteurs. En raison des plafonds, on accorde des sommes disproportionnées aux petits producteurs et l'on pénalise les gros.
    Je vais maintenant faire un commentaire auquel je vous demanderais de réfléchir. Comme je ne crains pas de tenir des propos quelque peu controversés, je m’exprimerai sans détour. En fait, les plafonds ont nui davantage aux agriculteurs de l’ouest qu’à ceux de l’est. Cela tient au fait que dans l’ouest, les exploitations agricoles sont plus grandes. Il s’ensuit que lorsqu’on impose un plafond, nous sommes davantage touchés que les producteurs de l’est, ce qui est vraiment injuste. En matière de plafonds, tout doit toujours être équitable, et je ne pense pas que ce soit le cas.
     En ce qui concerne le PIAPDA, le regroupement des producteurs céréaliers de l’Amérique du Nord a présenté un mémoire qu’à mon avis, vous devriez tous lire. Je suis en accord avec tout ce qui figure dans ce document.
    Toutefois, vous avez fait allusion à la situation des petits marchands de produits chimiques. Pour que les chances soient égales pour tous, il faudrait permettre aux marchands de produits chimiques locaux de bénéficier des mêmes droits d’importation que les producteurs. On exigerait qu'ils respectent certains critères, mais cela aurait pour effet de permettre la distribution de ces produits chimiques dans les localités partout au pays. On nous vend des barils de produits chimiques en provenance des États-Unis. Ils sont distribués par quelqu’un d’autre et les marchands locaux sont exclus. Je ne pense pas que ce soit juste. C’est quelqu’un d’autre qui empoche cet argent. Pourquoi pas les marchands locaux?
     J’ai demandé des conseils là-dessus avant de venir pour m’assurer que j’avais raison. D’après mon conseiller, en permettant aux marchands locaux du Canada rural d’offrir ces produits à des prix comparables à ceux pratiqués par leurs homologues américains et en les autorisant à présenter, tout comme les agriculteurs, une demande d’importation, on mettrait tous les intervenants sur un pied d’égalité.
    J’espère que cela répond à votre question.
    Votre temps de parole est expiré, monsieur Fjordbotten. Il faudra attendre le tour de table suivant ou un autre jour.
     Nous devons maintenant passer à M. Atamanenko, pour cinq minutes.
    Une question qui a été soulevée à maintes reprises hier, mais pas tellement aujourd’hui, est celle de la sécurité alimentaire et de notre capacité d’assurer notre propre subsistance, d’acheter des produits locaux et de s’assurer que nos institutions achètent des aliments sur les marchés locaux. À mon avis, c’est une question qui préoccupe les Canadiens.
    Par ailleurs, un point qui fait l’unanimité, c’est la qualité des produits que nous exportons. La réputation de notre blé, de notre blé dur et de notre orge de brasserie, par exemple, n’est plus à faire. Dans l’optique des producteurs primaires locaux, il faut répondre aux besoins en matière de recherche et déterminer qui, du secteur public ou privé, doit s’en charger.
    Nous avons évoqué la biotechnologie. Nous avons des produits de qualité. Nous savons qu’il nous faut veiller à notre sécurité alimentaire. Nos denrées sont respectées et recherchées partout dans le monde. Nous devons prendre en compte le vaste domaine de la biotechnologie et le fait que nous voulons mettre au point de nouvelles souches, de nouvelles marques, de nouvelles variétés.
    En tant qu’agriculteur local, quels sont les avantages que vous voyez à cela? Si ce secteur est avantageux, quel rôle devrait jouer le gouvernement? Ma question sous-jacente, je suppose, est la suivante: Les entreprises de biotechnologie seraient-elles peut-être plus avantagées par le soutien et l’aide à la recherche que les agriculteurs?
    C’est une question générale, et je vous invite à y répondre.
    Lynn, vous pourriez peut-être commencer.
(1420)
    Oui, c’est un sujet très pertinent dans la communauté agricole. Nous avons tous entendu dire qu'il faut aller chercher sa nourriture dans un rayon de 100 milles, ou essayer de s’approvisionner pour toutes ses denrées dans un rayon de 100 milles.
    Dans cette perspective, je m’intéresse aux régions avoisinant les grandes villes de l’ouest du Canada, par exemple Calgary ou Edmonton, qui pourraient approvisionner le marché local en légumes pendant l’été. On devrait sans doute encourager cela par des marchés de producteurs. Mais le hic, c’est que non seulement notre climat nous impose des limites quant à ce que nous pouvons concrètement fournir et à quelle époque nous pouvons approvisionner les gens en légumes frais du marché, mais les consommateurs canadiens ont l’habitude de faire leurs courses dans les supermarchés et d’y acheter suffisamment d’aliments pour une semaine environ. Par contre, un marché de producteurs doit fonctionner davantage sur une base quotidienne, selon le modèle européen, où les gens vont au marché tous les jours et y achètent des produits frais. Dans une certaine mesure, ce modèle ne s’applique pas vraiment chez nous. Nous ne pouvons pas faire cela.
    Pour ce qui est de la qualité des produits, de la recherche et de la biotechnologie, ce sont des domaines intéressants. Tous les acteurs du monde agricole reconnaissent qu’il existe dans ces secteurs des occasions intéressantes, particulièrement si l’on considère la diversité des produits pharmaceutiques, etc. D’ailleurs, certains produits pointent à l’horizon.
    À l’heure actuelle, une controverse fait rage au sujet de la possibilité de prendre un gène de poisson et de l’intégrer à une plante et d’autres innovations. La décision appartient à la société dans son ensemble. Ce n’est pas à nous, en tant que producteurs agricoles, de prendre cette décision. Je ne pense pas que les biosociétés non plus doivent en décider. Si l’on considère l’affaire Percy Schmeiser, essentiellement, dans une certaine mesure, le problème ne tenait pas tant au fait qu’il a utilisé le produit et qu’il a conservé la semence qui a germé sur sa terre. L’essentiel est de savoir à qui appartient le gène de cette plante. Voilà le nœud du problème.
    Lorsqu’un tribunal a rendu une décision au Canada… Je parlais de cela dans mon mémoire, mais j’ai supprimé ce passage parce qu’en vertu de la décision du tribunal, nous ne sommes plus autorisés à breveter un organisme vivant. Une compagnie ne peut être propriétaire d’une souris — c’est ce qu'on avait tenté de faire— mais elle peut être propriétaire de tous les gènes qui composent cette souris. En conséquence, il faudra surveiller ce qui va se passer dans ce domaine qui n’est pas exempt de controverse.
    La biotechnologie nous offre des débouchés à certains égards, mais je ne pense pas que ce champ d’activité doit être ouvert à tous. Je pense que certaines règles et lignes directrices s’imposent. On ne peut pas laisser régner l’anarchie. La société elle-même, par l’entremise du gouvernement, doit établir certaines restrictions quant aux paramètres exigés et aux avantages recherchés.
    En tant que producteurs, nous voulons avoir notre mot à dire sur le produit final, sur ce que nous cultivons dans nos champs, sur les débouchés et sur les effets qu’aura la biotechnologie sur notre mode de vie.
    Quelqu’un d’autre veut-il intervenir à ce sujet?
    Brenda, et ensuite, Stephen.
    Ce qui m’a frappé, entre autres, c’est qu’on ait parlé de vente de produits. À mon avis, il est judicieux de discuter de l’opportunité d’avoir une politique de soutien, au niveau fédéral, pour pénétrer des marchés populeux au-delà du marché nord-américain habituel et de faire plus pour susciter la demande plutôt que d’insister sur l’offre. Le Canada produit énormément de denrées qu’il essaie de vendre en disant: « Nous avons produit cet aliment. Pourquoi ne l’achetez-vous pas? », au lieu de susciter l’appel de la demande.
    En ce qui a trait à la biotechnologie, comme l’a dit mon éminent compagnon à ma gauche, l’une des choses qui nous fait défaut… Si je ne m’abuse, Alex, vous vouliez savoir quel avantage pouvaient en retirer les agriculteurs. Nous devons aider les agriculteurs à comprendre les avantages liés à la commercialisation d’un produit qui dépasse la simple denrée ou encore lui fournir certains outils ou un certain accès à ce transfert de technologies, car tant que nous ne le ferons pas, il sera difficile pour les producteurs comme moi d’assimiler les avantages potentiels.
(1425)
    Stephen.
    Pour ce qui est des avantages de la recherche pour les agriculteurs, très brièvement… Nous disposons de bons exemples. Il y a sur les rayons des magasins de Lethbridge des variétés de blé d'hiver qui produisent plus de 100 boisseaux l’acre. Elles ne sont pas autorisées à cause de l’obligation de la distinction visuelle des grains, car une fois tous les trois ans, cette variété ressemble au blé de force roux de printemps. Par conséquent, elle est exclue. Les chercheurs qui s’intéressaient au blé d’hiver ont essentiellement jeté la serviette et abandonné.
    En ce qui concerne l’éthanol, nous ne pouvons pas vraiment soutenir une industrie de l’éthanol parce que nous ne pouvons pas lui fournir les quantités dont elle a besoin pour être rentable. Nous produisons des récoltes de blé d’hiver de 70 ou 80 boisseaux alors qu’il faudrait en produire de 100 à 120 boisseaux. Si l’on calcule environ 40 boisseaux l’acre à 4 $ le boisseau, au prix actuel, cela représente 160 $ l’acre. Vous savez, étant donné que le gouvernement dépense des milliards de dollars, nous pourrions peut-être recevoir 8 $ ou 10 $ l’acre. Voilà pourquoi nous souhaitons que notre revenu provienne du marché.
    Merci.
    Merci, monsieur Atamanenko.
    Le suivant est M. Easter.
    Merci, monsieur le président.
    Stephen a mentionné la grève du CN. Ce problème devrait être réglé ce soir, Stephen. Je sais que le projet de loi devrait franchir toutes les étapes ce soir, et comme les libéraux et les conservateurs l’appuient, il sera adopté.
    Je remercie tous les témoins.
    C’était très intéressant d’entendre vos commentaires au sujet des débouchés potentiels futurs. Cela dit, une question essentielle se pose. Étant donné que bien des occasions se sont présentées à nous dans le passé, comment nous assurer que ces débouchés et leurs retombées financières profitent à tout le moins au Canada rural et, de préférence, aux producteurs primaires ou aux exploitations familiales, au lieu que ce soit quelqu’un d’autre qui en profite alors que nous soyons strictement des fournisseurs de main-d’œuvre ou de matières premières bon marché? Ce qui m’inquiète au sujet de l’industrie de l’éthanol et du biodiesel, c’est qu’étant donné la façon dont nous structurons ce secteur à l’heure actuelle au Canada, nous allons créer une source de profit pour les sociétés pétrolières plutôt que pour les collectivités rurales. C’est un problème énorme.
    Mais le but de notre visite est de discuter des programmes de protection. Un argument de poids a été soulevé ce matin. C’est un argument simple, mais il suscite la controverse. Personnellement, je ne l’ai pas trouvé controversé. Nous avons modifié les modalités du PCSRA en exigeant un dépôt plutôt qu’une contribution. Les représentants de l’Alberta Barley Commission, qui étaient ici ce matin, souhaitent que l’on revienne à la cotisation et que l’on abandonne le dépôt.
    Lorsqu’un nouveau programme est établi, avez-vous des suggestions sur la façon dont les agriculteurs devraient payer leur part?
    Il y a autre chose que je veux mentionner spontanément à propos de ce que plusieurs d’entre vous avez dit. Leroy a déclaré qu’il faut que nous tirions nos revenus du marché et que c’est de là que doivent provenir les profits. Stephen a tenu sensiblement les mêmes propos. Ce que je vais vous dire va peut-être vous ébranler. Voici les chiffres: au cours des 21 dernières années, le revenu agricole net réalisé au Canada s’est élevé à 51,51 milliards de dollars; les paiements provenant des gouvernements fédéral et provinciaux ont été de 58,4 milliards de dollars. Quant au revenu net du marché pour la même période, il était négatif, à 7 milliards de dollars. Cela mérite réflexion.
    Par ailleurs, j’ai beaucoup entendu parler des États-Unis et je suis de ceux qui disent que le Canada devrait consacrer autant d’argent que les États-Unis, jusqu’au dernier dollar, aux programmes dans le secteur agricole. C’est George Brinkman qui l’a dit et je vous invite à y réfléchir parce que je pense que nous devons vraiment y réfléchir tous. George Brinkman est un économiste à la retraite de Guelph. Il parle de l’endettement au Canada, qui est extrêmement élevé, beaucoup plus que l’endettement des producteurs primaires américains. Il dit que « la dette agricole par habitant plus élevée en Ontario et au Canada a embrouillé toute la question des subventions agricoles. En pourcentage du revenu » — voilà le point important — « les subventions du gouvernement canadien représentent 116 p. 100 du revenu agricole, mais les subventions du gouvernement américain représentent seulement 37 p. 100 du revenu agricole. »
    Maintenant, si ces chiffres sont exacts, nous avons vraiment un problème plus grave que je ne le pensais. Je vous invite à commenter cela également.
    Mais pour revenir au point précis, comment devrait-on prélever la part des agriculteurs de tout programme de soutien du revenu? Cela devrait-il prendre la forme de droits à payer? Cela devrait-il être un dépôt? Le pourcentage devrait-il être de 30 p. 100?
    Je vous invite à nous faire part de vos réflexions.
(1430)
    Qui veut se lancer en premier? Stephen.
    Je vais vous parler de ma propre exploitation agricole.
     Vous demandez si ce devrait être un dépôt ou des frais. J’ai envoyé un dépôt au PCSRA. Cela nous a coûté des milliers de dollars. Notre facture pour les trois dernières années dépasse 10 000 $, et je n’ai pas reçu un cent du programme. Voilà comment fonctionne ce programme. Il pénalise l’agriculteur proactif qui tente d’atténuer ses risques par l’irrigation, des cultures différentes, en semant des cultures spéciales ou même en faisant de la valeur ajoutée, et en essayant de stabiliser son revenu. En réalité, cet agriculteur est pénalisé. Quant à celui qui se lance sans précaution et qui fait beaucoup d’argent, s’il perd beaucoup d’argent l’année suivante, le programme va vraiment l’aider.
    Les réactions vont donc d’un extrême à l’autre. Un agriculteur vous dire que c’est fabuleux, parce qu’il a reçu de gros chèques. Un autre agriculteur vous dira que cela lui a coûté une fortune.
    Voilà pourquoi, si nous adoptons un compte du type CSRN — je ne dis pas précisément le CSRN —, il n’y a pas de paperasse, il n’y a aucun coût, on n’a pas à calculer les ventes, les stocks, le début et la fin et toutes les autres complications. On prend les ventes admissibles nettes et l’on touche un pourcentage de ce chiffre, et l’agriculteur peut dépenser l’argent à son gré.
    Monsieur Jacobson.
    C’est une très bonne question.
    Voici notre point de vue. Nous avons examiné les programmes du type PCSRA, avec la tranche supérieure de 30 p. 100 et la manière dont les sommes sont actuellement payées et les règles qui régissent le tout. Si l’on avait un programme de type CSRN en plus du PCSRA, ce serait mieux que d’adopter tout simplement un programme du type CSRN.
    En soi, le CSRN était limitatif. Il ne faisait pas ce que le PCSRA était censé faire quand nous avions seulement le CSRN, parce que ce dernier programme manquait d’argent dès le début. Si l’on avait deux mauvaises années de suite, on était perdu, parce que l’on ne pouvait plus compter sur le CSRN. Si l’on avait un programme PCSRA axé sur la tranche supérieure et assorti d’un paiement, le tout encadré par des règles...
    Le gouvernement a déclaré qu’il y avait trop d’argent dans l’ancien programme CSRN. C’était seulement un certain pourcentage de la population et les agriculteurs les plus âgés qui avaient cet argent de trop. Ce n’était pas les jeunes agriculteurs qui avaient de l’argent dans le CSRN; c’était les autres agriculteurs établis de longue date, qui avaient 60, 70 ou même 80 ans à l’époque. Ils avaient un dépôt de 100 000 $. Le type qui avait 30 ou 40 ans n’avait plus d’argent dans son compte CSRN. Nous devons établir ce fait.
    Le CSRN comme complément d’un programme PCSRA donnerait un peu plus de souplesse aux agriculteurs et leur permettrait d’obtenir des paiements en temps voulu. Voilà ce qu’il nous faut. Nous n’avons pas besoin que vos comptables viennent nous dire que nous devrions toucher 10 000 $ du programme cette année, après quoi il faut attendre un an pour l’obtenir. Cela ne marche pas.
    Il faut que ce soit en temps voulu.
    Il doit y avoir une limite de temps. Il nous faut un programme du type CSRN nous permettant de retirer ce montant tout de suite.
    Mon seul commentaire est qu’il est notoire que les gouvernements, à tous les niveaux, ont le don d’annoncer un programme de stabilisation au moment où le secteur est dans le marasme. L’industrie est stabilisée au plus bas niveau possible, et cela ne marche jamais, naturellement. Si vous agissez de la sorte, je ne pense pas que le montant des frais soit un problème. Si vous avez le bon programme, vous trouverez bien le moyen de prélever l’argent.
    Je n’aime pas les programmes de stabilisation. J’ai participé à la conception de quelques-uns d’entre eux et vous intervenez toujours quand on est au creux de la vague. C’est mauvais.
    Monsieur Thompson.
    Je vous remercie de votre participation d’aujourd’hui, mesdames et messieurs. Je trouve cela intéressant parce qu’il y a 50 ans, j’étais en plein dans l’agriculture. Il y a 40 ans, j’ai quitté le secteur. Cela me ramène aux préoccupations qui étaient les nôtres à l’époque, quand nous tentions de nous maintenir à flot et d’obtenir un bon rendement, un rendement déterminé par le marché. L’idée des subventions ou d’une aide quelconque était encore loin dans l’avenir. Cela n’existait pas à l’époque.
    Je m’intéresse à ce qui se passe dans ce secteur. Je suis enthousiasmé de voir des organisations de jeunes agriculteurs qui apparaissent et tentent de préparer l’avenir. Ces jeunes veulent se lancer dans ce secteur. Ils veulent devenir agriculteurs. Je suis curieux de savoir à quoi ressemblera, à votre avis, l’entreprise agricole de l’avenir, disons dans 10 ou 15 ans, compte tenu des jeunes qui se rassemblent aujourd’hui, qui s’organisent, qui veulent se lancer dans l’agriculture et qui cherchent des moyens d’y parvenir, parce que ce n’est pas facile à notre époque. Je voudrais savoir à quoi ressemblera l’avenir.
    Le deuxième point qui m’intéresse — je pense que Steve y a très souvent fait allusion — est la valeur ajoutée. J’en entends parler depuis des années et des années: tout le monde veut de la valeur ajoutée. Je suis d’accord, c’est vrai que c’est ce que nous voulons, mais je ne comprends pas pourquoi cela ne se fait pas. Qu’est-ce qui nous en empêche? Pourquoi exportons-nous des billots et non pas des meubles? Pourquoi exportons-nous du grain et non pas des céréales préparées ou de la farine ou quoi que ce soit, surtout dans l’ouest? Je sais qu’il y a plus de valeur ajoutée dans l’est du pays. Mais on dirait que nous n’y arrivons pas.
    Quelqu’un peut-il nous dire ce que nous pouvons faire? Que devons-nous faire pour que cela arrive? Nous convenons tous qu’il faut que cela se fasse, alors pourquoi ne se passe-t-il rien? Je n’ai pas d’autres questions et j’attends vos réponses.
(1435)
    Les femmes d’abord; Brenda.
    C’est une bonne question, parce que les agriculteurs demandent souvent pourquoi ils devraient être obligés de s'en charger.
    Je travaille avec beaucoup de gens dans le secteur de la transformation, de la valeur ajoutée, depuis ceux qui ajoutent de la valeur sur leur propre ferme jusqu’aux boulangeries qui exportent dans le monde entier. D’après ces gens-là, le handicap tient en partie à certains problèmes de réglementation entourant l’Agence canadienne d’inspection des aliments, à l’absence de politiques habilitantes pour certaines exportations et peut-être à l’absence d’une présence continue dans les marchés d’exportation désignés.
     Chose certaine, dans l’ouest à l’heure actuelle, deux des principaux problèmes sont l’appréciation du dollar canadien et les graves pénuries de main-d’œuvre. Beaucoup d’entreprises déménagent simplement pour avoir accès à la main-d’œuvre des États-Unis.
     Je vais vous donner un exemple qu’un ami m’a cité l’autre jour, celui d’un appareil à cylindres pour sa boulangerie. Cette boulangerie produit quelque 40 000 pains par jour. L’appareil à cylindres coûtait 40 000 $ au Canada et on leur a dit qu’il faudrait neuf mois pour le faire venir. Aux États-Unis, le même appareil coûtait 9 000 $ et il a été livré le lendemain.
    Voilà une partie de l’explication, Myron.
     Vous m’avez aussi demandé comment nous pouvons obtenir l’engagement des agriculteurs alors que 61 p. 100 des exploitations ou même davantage sont des entreprises à propriétaire unique. On entend beaucoup de discussions portant sur les coopératives de nouvelle génération et tout le reste. La réalité est que des partenariats vont se constituer, mais les agriculteurs vont créer ces partenariats avec d’autres agriculteurs, vont aller de l’avant de manière indépendante et essayer de se procurer l’expertise technique pour se lancer dans le domaine de la valeur ajoutée.
    Monsieur Jacobson.
    Le problème tient en partie à la comparaison entre l’est et l’ouest du Canada, Myron, et vous avez aussi comparé les États-Unis au Canada. Nous comparons aussi l’Europe au Canada et nous examinons les activités de valeur ajoutée. Au fil des années, j’ai remarqué notamment que la valeur ajoutée augmente en même temps que la croissance démographique. Si la population était trois ou quatre fois plus nombreuse dans l’ouest du Canada, nous aurions plus de valeur ajoutée dans ce secteur.
    Pour beaucoup de produits à valeur ajoutée, surtout dans le cas de ce que nous produisons, comme la farine et autres denrées, il en coûte moins cher de transporter la matière première que de transporter la farine.
    Par ailleurs, les gens veulent des emplois là où ils habitent. Si nous expédions du grain au Japon, nous nous demandons pourquoi nous ne pouvons pas vendre aux Japonais notre huile de canola. Pourquoi ne pouvons-nous pas leur vendre notre farine? Les Japonais n’en veulent pas, pour commencer, parce qu’ils créent des emplois chez eux. C'est la même chose dans les secteurs des pâtes et papier ou du bois d’œuvre.
     Le secteur de la confection de vêtements, que nous avons virtuellement perdu au Canada, était à un moment donné un secteur à valeur ajoutée dans l’est du Canada. Les entreprises sont allées là où la main-d’œuvre coûte moins cher.
    Donc, la main-d’œuvre, la population et ce qu’il en coûte pour transporter le produit à valeur ajoutée plutôt que la matière première, tout cela influence parfois beaucoup l’emplacement où se fait la valeur ajoutée.
    Je sais que nous avons déjà eu ce débat quand on a annoncé l’élimination du tarif du nid-de-corbeau. Nous sommes tous passés par-là et nous avons tous perdu cet avantage. Cela ne créait pas beaucoup de valeur ajoutée dans notre pays, mais c’était une grande promesse qu’on nous avait faite à l’époque.
(1440)
    Quelqu'un d'autre?
    Monsieur Tanis.
    Le contrôle de la qualité a peut-être aussi quelque chose à voir avec cela. En fait, à l’ouest de Fort Macleod, on engraisse des chevaux pour le Japon et on les envoie vivants au Japon. Les Japonais veulent faire leur propre abattage et ils veulent savoir exactement ce qu’ils achètent. Ils ne veulent pas de bœuf congelé ou quoi que ce soit et c’est un autre problème. Et le produit est frais quand il arrive là-bas.
    Merci.
    Leroy.
    Myron, vous faites d’excellentes observations; essentiellement, vous nous interrogez sur l’avenir de l’agriculture.
    L’agriculture n’est plus vraiment un mode de vie, c’est une entreprise qu'il faut gérer. Une exploitation agricole est mieux d'être gérée comme une entreprise, sinon elle n'existera pas longtemps.
    C'est difficile de nos jours et les changements se produisent très rapidement. Les gens ne résistent pas au changement; ils résistent quand on veut les changer — vous pouvez changer n'importe quoi, pourvu que cela ne me change pas, moi. Mais à l'heure actuelle, des changements se produisent qui me changent et qui vous changent également. L'avenir sera différent et nous devons nous y adapter.
    Dans le cas d'un programme d'aide comme celui dont vous parlez, le problème tient en partie au fait que les gouvernements sont toujours en retard. Il leur faut une heure et demie pour regarder une émission de télévision d'une heure. Ainsi, avant que vous ayez mis la dernière main à un programme et l'ayez mis en vigueur, le marché a déjà pris une bonne longueur d'avance. Il faut que ce soit évolutif. Vous ne pouvez jamais dire: bon, je pense que j'ai fait ma part.
    Merci.
    Monsieur Steckle.
    Je suppose que j'ai le dernier mot aujourd'hui.
    Notre échange mettra fin à la séance d'aujourd'hui. En résumé, la raison de notre présence ici est essentiellement que l'agriculture n'est pas rentable et que nous essayons de trouver le moyen de la rendre rentable à l'avenir. Comment allons-nous faire entrer une nouvelle génération de gens dans l'agriculture? Voilà la question qui a été soulevée à maintes reprises aujourd'hui.
    Le chiffre d'un million de dollars pour les gains en capital est-il suffisant? L'exemption pour les gains en capital a été portée à un million de dollars.
    C'est 750 000 $.
    C'est 750 000 $? D'accord. Ce chiffre devrait-il être porté à un million de dollars, ou bien est-ce que 750 000 $, c'est suffisant? Je croyais qu'on l'avait porté à un million.
    Veuillez répondre brièvement, parce que j'ai plusieurs autres questions à poser.
    Je vais faire une brève observation. Je pense qu'il faut que ce soit évolutif. La situation est changeante. De nos jours, on n'achète plus avec un dollar ce qu'on pouvait acheter hier et on en achètera encore moins demain.
    Mais aujourd'hui? C'est d'aujourd'hui qu'il est question.
    Je pense que ce devrait être un million de dollars.
    Un million? Très bien.
    On a dit ce matin qu'on dirait qu'à chaque fois qu'un nouveau programme est lancé, dès qu'il y a un problème environnemental, des coûts viennent s'ajouter parce que nous devons respecter les normes particulières qui sont établies à ce moment-là. Que pensez-vous d'une écotaxe de 1 p. 100 sur la nourriture?
    Quelqu'un veut-il répondre?
    Des commentaires? Quelqu'un? Rapidement: oui, non, ou bien vous êtes indifférent? Cet argent... encore une fois, en supposant qu'il serait réinjecté directement dans un programme qui aiderait les agriculteurs à prendre diverses mesures, que ce soit des clôtures, un canal d'irrigation, ou un plan agricole ou quoi que ce soit. Rapidement, oui ou non?
    Eh bien, vous aurez diverses...
    Je sais, mais je voudrais vous entendre rapidement.
    Mon opinion est que si nous fournissons un bien, si les gens viennent profiter de la campagne et qu'ils en font la demande, alors nous devrions être payés.
    Oui. Comment?
    Je dirais non.
    Non?
    Non, parce que c'est une taxe et que si vous...
    Ça suffit.
    Et vous?
    Je n'ai pas suffisamment d'information.
    Très bien. Voilà une réponse politique.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Paul Steckle: On s'est demandé comment les agriculteurs obtiendraient l'argent, qu'il s'agisse de frais ou d'un dépôt au programme PCSRA. Pour tout programme qui permet la mise en banque, on peut emprunter de l'argent à la banque.
    Maintenant, si l'on prend le modèle qui a été proposé par l'Ontario et le Québec pour la gestion du risque, vous auriez à faire un choix. Ce serait un programme auto-administré et il vous faudrait décider à quel niveau vous voulez bénéficier de ce programme. Vous pourriez vous adresser à la banque et emprunter l'argent pour financer votre part.
    Dans le cas du programme CSRN, d'où viendra la part de l'agriculteur, à même cette tranche de 15 p. 100? Je ne crois pas que la totalité viendra des deux niveaux de gouvernement et, à mes yeux, c'est une autre question controversée parce que je pense que les gouvernements sont déjà trop impliqués.
    Monsieur Vandervalk.
    Je dirais qu'il nous faut deux programmes: un bon programme d'assurance-récolte et un programme du type CSRN, et c'est tout. À titre d'exemple, en 2002, je pouvais obtenir une couverture de 116 $ pour 6 $. En 2005, j'ai obtenu une couverture de 87 $ pour 8,30 $. Par conséquent, les primes augmentent considérablement et la couverture diminue.
    Si nous pouvons obtenir une bonne couverture et une assurance production qui correspondra à nos coûts, ainsi qu'un programme du type CSRN en cas de désastre, nous pouvons réduire de beaucoup les formalités administratives. Le coût de l'assurance-récolte est partagé par l'agriculteur — vous évoquez des frais à payer — et le CSRN est financé par des paiements de contrepartie ou d'une manière quelconque.
(1445)
    Bien. Quelqu'un d'autre?
    Oui, rapidement.
    Dans le cas des céréales, il nous faut toutefois un programme un peu plus étendu, parce que les secteurs du bétail et de la volaille sont tellement différents.
    Je voulais dire que le véritable problème, dans l'agriculture, c'est le coût de production. Le coût des intrants dépasse... et cela, nous n'en avons pas vraiment discuté.
    Ce type de programme s'appliquerait donc?
    Voilà où se situe le problème.
    À vos yeux, ce programme fonctionnerait, mais il faudrait qu'il soit beaucoup plus étendu, qu'il s'applique même au secteur du bétail?
    C'est bien cela.
    Je suis d'accord.
    Quelqu'un d'autre?
    L'assurance-récolte, comme Stephen l'a dit, fonctionne bien pour assurer la production des denrées, mais ne compense pas le faible rendement obtenu sur le marché. Nous pourrions produire 300 boisseaux l'acre, mais si nous obtenons seulement 1 $ le boisseau, nous serons quand même...
    Mais l'assurance-récolte n'a jamais été conçue pour cela.
    Non. L'assurance-récolte, c'est pour la production. Il nous faut quelque chose d'autre qui vienne s'y ajouter, et il y aura une discussion très étendue là-dessus. Il faut prévoir quelque chose... et nous devons vraiment en discuter et mettre au point différents programmes pour cela.
    Je m'adresse à l'ancien ministre: Qu'avez-vous à dire là-dessus?
    Je ne sais vraiment pas. Je pense que je vais passer mon tour.
    Vous passez votre tour? Voilà une autre réponse politique.
    Et le monsieur au bout de la rangée?
    Je passe mon tour, moi aussi.
    Et moi aussi.
    J'ai moi-même trois questions à poser. Tout au long de la discussion, je pense que nous avons parlé du CSA en nous tournant vers l'avenir. Il n'était pas seulement question des problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui et de la conception du programme de gestion du risque, mais aussi de l'avenir. Pendant les exposés et les questions et réponses, j'ai entendu certains commentaires à propos desquels je veux maintenant revenir à la charge.
    Vous avez parlé de l'augmentation de la valeur ajoutée. Plusieurs d'entre vous ont dit que c'était nécessaire. Je pense que quelqu'un a utilisé l'expression « valeur distincte pour l'acheteur » à propos des aliments fonctionnels et d'autres produits novateurs qui seront fabriqués à partir de céréales ou de produits du bétail. Que dites-vous d'une valeur distincte pour le producteur, c'est-à-dire de s'assurer que l'avantage soit répercuté jusqu'à ce dernier?
    Ma deuxième question porte sur la prochaine génération d'agriculteurs. Nous disons qu'il faut tenter de maintenir l'exploitation agricole familiale. Je suis agriculteur, mon père l'était et mon grand-père avant lui, et l'on peut remonter ainsi jusqu'à mes ancêtres en Europe. Ma question est celle-ci: c'est facile pour nos enfants de partir et de se lancer dans de nouvelles professions, mais qu'en est-il des enfants urbains? Il semble que ce soit extrêmement difficile pour eux de se lancer dans l'agriculture et de se joindre à notre société. Comment pouvons-nous faciliter cette transition, pour qu'il ne soit pas nécessaire à l'avenir d'avoir grandi sur une ferme pour en devenir un jour propriétaire et exploitant?
    Voici mon dernier commentaire, à propos d'une observation faite par M. Jacobson. Pendant la première ronde de discussions sur le CSA, il y a cinq ou six ans, la SAF avait l'impression que tout le processus avait été prédéterminé, que vous n'étiez qu'un simple participant, que vous pouviez seulement écouter et attendre de voir ce qui se passerait, sans nécessairement avoir votre mot à dire.
    Je pose la question à tous ceux d'entre vous qui ont participé aux première et deuxième rondes de discussions sur la deuxième version du CSA: Avez-vous le sentiment que c'est le cas aujourd'hui, ou bien pensez-vous, d'après les commentaires formulés par les ministres provincial et fédéral, que ces derniers sont à l'écoute?
    Je vous invite à commenter ces trois questions.
    Monsieur Jacobson.
    Puisque c'est moi qui ai soulevé la question, je suppose que je dois me présenter au bâton en premier.
    Au sujet de la participation des agriculteurs et de ce qu'ils pensent du processus, j'ignore à combien de gens j'en ai parlé durant le processus de la deuxième version du CSA. Tout le monde se demandait: Est-ce que ce sera vraiment utile? Cela va-t-il vraiment nous aider; nous écoutent-ils seulement?
    C'est alors que le gouvernement provincial de l'Alberta a réuni un groupe rassemblant bon nombre d'entre nous et nous sommes passés encore une fois par ce processus. C'était essentiellement une mini ronde de discussion sur le CSA. Nous avons reçu un rapport du gouvernement.
    Quand les gouvernements fédéral et provinciaux négocient et que les fonctionnaires fédéraux conçoivent le programme et qu'on laisse l'autre composante qui est vraiment touchée à l'extérieur du processus... Nous n'avons même pas la moindre idée de notre apport au programme. Essentiellement, tout le processus, au fil des années, a consisté à dire: « Venez nous voir, dites ce que vous avez à dire et retournez chez vous ». Les gouvernements provinciaux décident exactement de ce qu'ils vont faire.
    Oui, je pense que beaucoup de producteurs estiment que la même chose pourrait se reproduire dans le cadre de ce processus. Et puis, quand on prend des décisions comme de supprimer un groupe national sur le soutien du revenu qui était en fait un conseiller du gouvernement et qu'on veut ensuite avoir des entretiens avec chacun des groupes pris individuellement, pour nous... J'ai entendu beaucoup de gens dire: « Si je m'adresse à dix groupes différents, j'entendrai dix opinions différentes, alors je peux bien faire ce que je veux. » Si l'on peut rassembler les dix groupes en question et dégager un consensus sur plusieurs points, cela donne un peu plus confiance aux producteurs qui ont l'impression que le gouvernement les écoute peut-être.
(1450)
    Essentiellement, nous essayons de concilier ce qui s'est passé pendant les consultations et ce qu'on entend maintenant de la part du gouvernement. Nous essayons de recueillir nos propres renseignements pour voir si, en bout de ligne, tout concorde.
    Je dirais qu'essentiellement, notre attitude consiste à attendre de voir ce qui va se passer. Mais nous sommes sceptiques — c'est le mot juste — et nous verrons bien où tout cela va aboutir.
    Brenda.
    J'ai participé à certaines discussions et recherches initiales et il est certain que ce qui était envisagé par le secteur et ce qui en est ressorti au bout du compte, c'était deux choses complètement différentes. Je l'ai déjà dit et je pense que c'est une observation juste. Mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas recommencer sous votre direction et aller de l'avant.
    Vous avez posé une question sur la valeur ajoutée, notamment sur la part qui irait aux producteurs. C'est une très bonne question, parce que dans le secteur du boeuf, les producteurs primaires obtenaient 25 p. 100 du prix du boeuf il y a une quinzaine d'années; aujourd'hui, leur part est inférieure à 8 p. 100 et un producteur de bovins gras touche seulement 16,8 p. 100 du prix du boeuf. On a donc assisté à un déplacement fondamental faisant diminuer la part du producteur primaire et celle du transformateur, dont la marge bénéficiaire est encore plus mince, le secteur du détail accaparant la plus grande partie de l'argent versé pour la nourriture. Si nous voulions vraiment en discuter sérieusement, James, il nous faudrait vraiment nous pencher sur le secteur du détail, car nous n'avons plus vraiment de secteur de la vente en gros.
    Quant à la prochaine génération d'agriculteurs et à la participation des citadins, j'en reviens encore une fois aux points saillants de mon exposé, dans lequel j'ai parlé d'éducation — je n'insisterai jamais assez là-dessus —, du partage de l'information, de l'engagement nécessaire. J'aime voir des jeunes gens des villes se lancer dans l'agriculture: ils n'ont pas d'idées préconçues. Ils voient la situation d'un regard neuf et du point de vue du consommateur et, en fin de compte, nous sommes au service du consommateur.
    Voilà quelques brèves observations.
    Monsieur Tanis.
    Merci, monsieur le président.
    Il faut absolument que les agriculteurs participent aux décisions, comme Lynn l'a dit, parce que nous avons été laissés de côté pendant trop longtemps.
    Je ne peux pas répondre à votre question, mais je voudrais vous donner un exemple. Deux hommes sont debout dans un champ, dans une région faiblement peuplée du sud de l'Alberta. L'un est un producteur agricole. L'autre est mécanicien de machinerie lourde dans le secteur pétrolier. Le mécanicien reçoit une augmentation de 8 $ l'heure le 1er janvier. L'agriculteur reçoit une augmentation si le prix des engrais augmente de 120$ la tonne par rapport à l'automne dernier. Le déséquilibre est catastrophique.
    Merci.
    Stephen.
    Le coût des capitaux est tout simplement trop élevé pour amener la population rurale à se lancer dans l'agriculture, et le rendement est trop bas. Aucune banque n'acceptera de prêter à quelqu'un qui veut se lancer dans l'agriculture à partir de zéro. Pour que cela puisse arriver un jour, il faudrait que le rendement augmente.
    Je suppose qu'avec tous les programmes de soutien du revenu... Nous venons d'en avoir un exemple aujourd'hui. Je parle de l'assurance production et du CSRN, mais les éleveurs de bétail disent que ce n'est pas bon pour le bétail, et les éleveurs de porc disent que ce n'est pas bon pour le porc. Je ne sais pas quoi vous dire. Aucun programme ne pourra jamais contenter tout le monde. Faut-il donc emprunter cette voie ou bien opter plutôt pour un pourcentage du revenu pour que le coût soit le même pour tout le monde, ou bien faut-il créer des programmes séparés? C'est difficile à dire.
    Monsieur le président, j'ai l'habitude de ne pas commenter ce que je ne comprends pas à fond. Je n'étais pas partie prenante lors de la phase initiale du CSA, mais j'y ai participé par la suite et je comprends ce qui s'est passé. En toute honnêteté, je ne peux pas répondre à votre question de savoir si tout cela a été bien fait ou mal fait.
    Au sujet de la population rurale, j'ignore comment s'y prennent les autres agriculteurs, mais nous avons une importante ligne de crédit d'exploitation et nous ne pouvons pas toucher un sou à moins que le montant soit bien garanti et que la banque puisse recouvrer deux fois le montant prêté. Par conséquent, si vous voulez amener des jeunes à se lancer dans l'agriculture de nos jours, cela n'arrivera tout simplement pas à moins qu'ils puissent compter sur un bailleur de fonds aux reins très solides.
    En passant, je voudrais vous dire que la Société du crédit agricole fait du très bon travail. Ces gens-là communiquent très bien et pourraient probablement le faire encore mieux et faciliter la tâche aux jeunes agriculteurs. Mais de là à amener de jeunes citadins, je pense que cela n'arrivera pas, à moins qu'ils aient de gros moyens financiers.
    Essentiellement, nous sommes devenus de grandes entreprises. Si l'on examine les grandes entreprises dont la propriété est fermée, celle-ci reste dans la famille, mais personne n'y entre. Il faut toujours entrer par la petite porte et gravir les échelons, n'est-ce pas?
(1455)
    Nous voyons mon exploitation agricole comme une entreprise. Mon beau-fils s'appelle Dean Hubbard, c'est un type très brillant et nous travaillons bien ensemble. C'est un nom qui donne confiance, n'est-ce pas?
    Ce n'est pas un mode de vie. On ne peut pas être sentimental. Nous sommes des gens d'affaires. Si nous n'avons pas de succès, nous allons fabriquer autre chose, des machins quelconques. Mais nous aimons l'agriculture et nous aimerions y rester. Nous avons perdu notre chemise depuis deux ou trois ans et nous espérons recouvrer une partie de nos pertes, mais nous sommes des gens d'affaires et les temps sont durs.
    Je vais vous donner le dernier mot, Stephen.
    Je suis un jeune agriculteur et j'ai remarqué que, dans mon groupe d'âge, la plupart sont propriétaires d'une ferme familiale, parce que le seul moyen d'avoir une exploitation agricole, c'est d'en avoir hérité de son père. Je participe à des appels conférences et à des vidéoconférences sur le Web; quand c'est impossible, je prends mon iPod, je télécharge le tout et je l'écoute pendant que je conduis mon tracteur ou ma moissonneuse-batteuse. C'est une grande entreprise et c'est de cette manière que nous l'envisageons, dans notre génération. Si c'est impossible de voir les choses de cette façon et d'obtenir un bon rendement, nous serons de moins en moins nombreux, c'est certain.
    Je tiens à vous remercier tous pour votre participation aujourd'hui. Nous avons eu une très bonne réunion ici en Alberta, comme c'était le cas hier en Colombie-Britannique. Nous abattons beaucoup de travail en peu de temps et cela nous aidera à rédiger notre propre rapport à la Chambre des communes sur le CSA et l'avenir de nos programmes.
    Un dernier point.
    Je m'adresse à Lynn: notre comité devrait entendre des représentants du comité consultatif sur le soutien du revenu, mais pourriez-vous nous nommer deux personnes que nous devrions entendre comme représentants de ce groupe?
    Bob Friesen, de la FCA, serait un bon représentant. Nous en faisons partie, les Grain Growers of Canada. Et peut-être aussi l'association des éleveurs, la Canadian Cattlemen's Association. Tous ces groupes travaillent ensemble, par consensus. Ces gens-là ont le temps de s'en occuper, mais notre organisation n'a pas de temps à consacrer à cela. Nous n'avons pas l'expertise ni l'argent pour le faire.
    Nous devrions les entendre.
    Je propose que nous le faisions à notre retour à Ottawa, étant donné que la plupart de ces organisations ont des bureaux à Ottawa. Nous avons déjà entendu des représentants de la plupart des organisations nationales de producteurs à Ottawa, en particulier sur la question de la gestion du risque. Nous les inviterons à participer à une discussion plus vaste sur le Cadre stratégique pour l'agriculture. À ce moment-là, nous pourrons aussi aborder la question du conseil consultatif pour le soutien du revenu agricole.
    Cela dit, nous disons au revoir à Olds.
    La séance est levée.