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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 21 juin 2006

[Enregistrement électronique]

(1540)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    D'abord, à nos témoins, soyez les bienvenus, et nous avons hâte d'entendre vos commentaires.
    Nous devons régler quelques questions d'abord, et nous nous en excusons si c'est un peu plus long que ce que nous aurions espéré. Mais comme plusieurs membres du comité devront partir bientôt, vers la fin de la réunion, nous sommes convenus de traiter de ce point d'abord. Donc prenez quelques minutes de repos, nous serons avec vous sous peu.
    Chers membres du comité, je crois que vous avez tous la motion de M. Cullen à l'endos de l'ordre du jour. Nous allons traiter de la motion maintenant.
    Monsieur Warawa.
    Un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais proposer que cette motion ne soit pas recevable. Avec votre permission, j'aimerais vous dire pourquoi.
    Monsieur Warawa, le greffier m'avertit que la motion doit d'abord être déposée avant que vous ne puissiez présenter votre motion.
    Désolé, je croyais qu'on traitait actuellement de la motion. Ai-je mal compris?
    Si vous pouviez proposer votre motion officiellement, monsieur Cullen, nous pourrions en débattre.
    Je voudrais proposer cette motion, monsieur le président, et je remercie le comité de m'avoir accordé ce temps.
    Je crois qu'il est important pour ceux qui sont ici aujourd'hui, mais qui n'ont pas la motion devant eux, d'entendre les détails de la motion. C'est avec beaucoup de regret, de frustration, et selon les procédures établies, que cette motion est soumise aujourd'hui.
    Je vais la lire en détail, et nous pourrons passer au débat le plus tôt possible. Elle se lit comme suit:
Que, étant donné que la ministre de l'Environnement : 1) a indiqué à Bonn que le Canada ne respecterait pas ses obligations internationales aux termes du Protocole de Kyoto; 2) a refusé de s'adresser aux maires et conseillers municipaux de la Fédération canadienne des municipalités réunis à Montréal en juin 2006; 3) est le premier ministre fédéral de l'Environnement à refuser de participer au sommet sur le smog à Toronto; 4) a refusé de témoigner devant le Comité malgré une invitation ouverte de longue date; 5) n'a déposé aucun plan pour que le Canada réduise les émissions de gaz à effet de serre ou s'attaque aux problèmes de pollution au pays; 6) n'a rien fait pour mettre fin aux coupes régressives dans des programmes environnementaux bénéfiques comme le programme Encouragement éconergétique ÉnerGuide pour les maisons et les programmes à l'intention des ménages à faible revenu; 7) n'a encore mis en oeuvre aucune mesure en faveur de la conservation ou de la protection de l'environnement au Canada;
    La fin de la motion se lit comme suit :
Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable demande au gouvernement du Canada d'enlever à la ministre de l'Environnement son poste au Cabinet et que cette décision soit transmise à la Chambre.
    Pour les membres du comité qui ont travaillé avec moi par le passé, je ne prends pas ces questions à la légère. Cette situation a donné lieu à énormément de frustration, pendant la période des questions et parce que nous n'avons pas réussi à obtenir des réponses à des questions qui sont importantes pour les Canadiens d'un océan à l'autre, sur le changement climatique en particulier, mais dans d'autres domaines aussi.
    Cet argument est fondé sur les comptes que nous, en tant que parlementaires, devons demander au gouvernement de rendre. Sous des administrations précédentes et celle-ci, d'autres ministres se sont mis à la disposition du comité, surtout lorsque la demande en avait été faite. Bien franchement, étant donné les questions cruciales auxquelles les Canadiens font face aujourd'hui — et je fais référence au changement climatique et à l'augmentation de la pollution — il doit tout simplement y avoir un ministre prêt à répondre aux questions de ses collègues, prêt à répondre aux questions des Canadiens et à présenter un plan efficace pour traiter du changement climatique.
    Évidemment, nous avons attendu beaucoup trop longtemps.
    Merci.
(1545)
    Monsieur Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais maintenant proposer que la motion dont nous sommes saisis n'est pas recevable actuellement. Si vous me le permettez, je vais vous donner les raisons pour lesquelles elle ne l'est pas.
    Merci.
    Monsieur le président, ce gouvernement a le mandat d'examiner la LCPE, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de 1999. Il s'agit de la pierre angulaire des lois environnementales, et nous nous sommes mis d'accord en tant que comité pour l'examiner.
    Monsieur le président, dans le discours du Trône, le gouvernement a pris l'engagement d'apporter des améliorations tangibles à notre environnement, notamment, des réductions de la pollution.
    Dans son discours, la gouverneure générale du Canada a déclaré:
En reconnaissance du rôle essentiel des parlementaires, les députés seront invités à examiner en profondeur certaines lois fédérales importantes, telles la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
    Monsieur le président, ce comité s'est mis d'accord pour en faire notre première priorité, étant donné que nous entamerions donc notre examen de la LCPE de 1999. Monsieur le président, c'est sur cela que le comité devrait se pencher.
     La motion du NPD gaspille le temps du comité et distrait le comité de son examen de la LCPE. La motion vise également à gaspiller le temps des députés à la Chambre.
    Je vous demanderais de conclure, au lieu de passer au débat. Nous pourrons ensuite commencer le débat.
    Ce qui importe, c'est que le gouvernement n'a pas le pouvoir de renvoyer les ministres; seul le premier ministre possède ce pouvoir. C'est la raison fondamentale pour laquelle cette motion n'est pas recevable et aussi la raison pour laquelle je crois qu'il s'agit de mesquinerie politique.
    Le député a dit que le changement climatique et la pollution sont des questions cruciales. Nous croyons qu'elles le sont. Je crois que ce que nous avons devant nous aujourd'hui est une mesquinerie politique et non pas une volonté réelle d'examiner ces questions.
    Merci, monsieur Warawa.
    Monsieur Bigras.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Sur quoi porte le débat, sur la motion de M. Cullen ou sur la question soulevée par M. Warawa? Parle-t-on de la motion de M. Cullen?

[Traduction]

    Oui, il s'agit du débat sur la motion de M. Cullen.

[Français]

    C'est bien.

[Traduction]

    Rappel au Règlement. Si on conteste la motion pour savoir si elle est recevable ou non, ne faut-il pas, selon la procédure, rendre une décision là-dessus?

[Français]

    Monsieur le président, avant d'entreprendre le débat, j'aimerais que le greffier nous dise si cette motion est recevable, oui ou non?
    Elle l'est.
    La motion est recevable, merci. Cela règle la question soulevée par M. Warawa, le secrétaire parlementaire.
    Sur le fond de la question, j'aimerais dire que le Bloc québécois votera en faveur de cette motion présentée par le Nouveau Parti démocratique. À plusieurs reprises, à ce comité, nous avons indiqué au gouvernement notre volonté de faire en sorte que la ministre vienne nous expliquer sa vision d'avenir en ce qui a trait à la protection de l'environnement et plus particulièrement en ce qui a trait au Protocole de Kyoto.
    Je tiens à vous rappeler, monsieur le président, que la Chambre des communes a adopté récemment une motion qui demandait au gouvernement fédéral de présenter un plan intégrant les objectifs de réduction de gaz à effet de serre prévus dans le Protocole de Kyoto, et à de multiples reprises, l'opposition a questionné la ministre de l'Environnement sur son intention d'intégrer les objectifs de Kyoto à son plan futur.
    Force est de constater aujourd'hui que le gouvernement a refusé de répondre favorablement aux voeux de la Chambre. En plus, Mme la ministre a refusé de se présenter ici, devant le comité, alors qu'elle avait tout le loisir et tout le temps de le faire.
    Je pense que la motion présentée par mon collègue du NPD est fondée. Elle doit recevoir l'appui de ce comité. C'est ce que je souhaite et c'est la position que nous exprimerons par ce vote aujourd'hui.
(1550)

[Traduction]

    Merci, monsieur Bigras.
    Monsieur Godfrey.
    Je suis un peu mêlé par rapport à ce que vous avez dit à M. Bigras; vous avez dit que la motion de M. Warawa n'est pas recevable.
    Non, j'ai dit que la motion de M. Cullen est recevable.
    A-t-elle préséance? Ce serait curieux de débattre de la motion de M. Warawa après avoir voté sur la motion principale. Je ne comprends pas tout à fait sur quoi nous devons voter en premier et si oui ou non la motion de M. Warawa a préséance par rapport au débat sur la motion principale.
    Si nous ne répondons pas à la question que M. Warawa a soulevée, peu importe ce que nous aurons déjà débattu, car la décision aura été prise.
    Monsieur Godfrey, je crois que nous essayons d'apporter un éclaircissement sur cette question.
    La motion de M. Cullen est recevable. La motion de Warawa fait partie du débat. Chaque individu peut ensuite participer au débat et donner son point de vue, comme l'a fait M. Bigras et comme le feront les autres membres du comité. À la fin du débat, nous voterons.
    Rappel au Règlement, monsieur le président. Du point de vue de la procédure, j'ai proposé une motion qui remet en question la recevabilité de la motion. Monsieur le président, vous avez décidé que la motion est recevable. Mais ma motion remet en question la décision portant sur sa recevabilité. Je pourrais en parler longtemps.
    À mon avis, d'après ce que je comprends de la procédure, cette motion n'est pas recevable et je vous ai donné mes raisons, monsieur le président, mais la motion devant nous actuellement est la mienne, à savoir si elle est recevable ou non. Nous devons voter là-dessus avant de pouvoir passer au débat sur la motion initiale.
    J'aimerais expliquer la décision que j'ai rendue sur la motion de M. Cullen. J'ai vérifié auprès du greffier; j'ai vérifié auprès du Président de la Chambre. Le Président de la Chambre me dit que cette motion est recevable; le greffier me dit que la motion est recevable. Toutefois, nous pouvons maintenant, évidemment, débattre de la question qui porte sur votre partie du débat...
    Rappel au Règlement. Vous ne pouvez pas déposer une motion sans préavis. Nous ne pouvons pas débattre de cette motion. Si on a jugé que la motion était recevable, alors la motion a été jugée comme étant recevable. Nous ne pouvons pas...
    Je crois, monsieur Cullen, que cela fait partie du débat  et c'est exactement ce que nous sommes en train de faire. Nous sommes en train d'écouter les points de vue des députés en ce qui a trait à votre motion.
    C'est vrai, monsieur le président, mais avec tout le respect que je vous dois, monsieur le président, les membres du comité ne peuvent pas présenter une motion au comité sans obtenir le consentement unanime. Il faut que cela soit fait dans les 48 heures.
    M. Warawa remet en question le fait que cette motion ait été jugée légitime. C'est ce qu'il remet en question.
    Monsieur Vellacott. 
    Monsieur le président, je crois que j'agis en conformité avec la procédure. Avec tout le respect que je dois à notre greffier — il occupe son poste depuis plusieurs années — et avec tout le respect que je vous dois également, vous avez rendu une décision en fonction des conseils que vous avez reçus du Président de la Chambre et du greffier du comité selon lesquels cette motion est recevable. J'aimerais maintenant remettre en question votre décision, et il faut voter là-dessus. Je ne suis pas d'accord avec votre décision et il faut maintenant voter afin de décider si oui ou non nous invalidons votre décision. Je fais appel de votre décision, et cela nécessite un vote des membres du comité.
(1555)

[Français]

    J'ai un rappel au Règlement, monsieur le président.

[Traduction]

    Monsieur le président, je crois que ce que j'ai proposé est recevable. J'ai contesté la décision du Président de la Chambre, qui a dit que la motion était recevable. J'ai contesté cette décision, et nous devons maintenant passer à la mise aux voix.
    J'ai accepté l'avis du greffier ainsi que celui du Président de la Chambre, et c'est un avis que je tiens à respecter.
    Je conteste votre décision; il faut passer à la mise aux voix.
    Vous avez raison. Nous devons voter là-dessus.
    Oui?
    J'ai un rappel au Règlement. C'est absolument exceptionnel, surtout si on considère que les députés qui en font la demande sont les mêmes qui estiment qu'il ne faut pas perdre de temps. En matière de procédure, selon la directive énoncée par les députés de votre propre parti, vous ne pouvez pas occuper le fauteuil du président pendant cette mise aux voix. Si on conteste une décision de la présidence... Lisez le règlement. S'il y a contestation de la décision de la présidence, vous ne pouvez pas occuper le fauteuil pendant le vote. Évidemment, vous n'êtes pas personnellement visé; mais c'est une incroyable perte de temps.
    Je pourrais faire appel à un de nos deux vice-présidents.
    Non, restez là. Le président occupe le fauteuil pendant toute la durée de la contestation. Lorsqu'il y a contestation, le président occupe le fauteuil.
    Le greffier dit que je dois demeurer ici. Me voici. Nous allons maintenant faire la mise aux voix sur la contestation.
    Ceux qui acceptent de contester la décision du président sur la recevabilité de la motion...
    Il y a contestation de la décision voulant que la motion est recevable.

[Français]

    Peut-on en débattre avant de voter? Il n'y aura pas de débat! Cela crée un dangereux précédent.

[Traduction]

    Alors nous allons voter contre la recevabilité de votre décision, et j'imagine que les autres vont appuyer votre décision. N'est-ce pas?
    La mise aux voix porte sur ma décision d'accepter la motion de M. Cullen; on a le choix, soit d'accepter ma décision, ou bien de la rejeter.
    (La décision du président est rejetée.)
    Monsieur Bigras.

[Français]

    Monsieur le président, il y a possiblement des précédents, mais je pense que le comité vient de prendre une grave décision.
    Selon moi, le comité vient de retirer sa confiance au président, et je pense que cela doit avoir des conséquences. Cette décision remet la présidence en question sur un élément fondamental. Je me demande même si on peut continuer à siéger aujourd'hui, compte tenu des circonstances.
    En ce qui me concerne, je n'occuperai pas le siège de la présidence dans de telles circonstances. Je ne sais pas qui peut nous éclairer, mais il faut fort probablement procéder à l'élection d'un nouveau président avant de continuer nos travaux. On vient de remettre en question la décision du président, qui m'apparaît claire. Il me semble que quand on dépose une motion et que la motion a été vérifiée par le Président de la Chambre, par le greffier....

[Traduction]

    Monsieur Bigras, le vote portait sur la décision, non pas sur la présidence; c'est mon interprétation de la situation.

[Français]

    En effet, il est question de la décision du président.

[Traduction]

    Il portait sur la décision voulant que j'aie accepté l'avis du Président de la Chambre et du greffier. Évidemment, je pense que nous passerons maintenant aux témoins qui sont là. Monsieur Bigras, je serai heureux de vous en parler après.

[Français]

    On en reparlera plus tard, mais en remettant en question votre décision, on vient, ni plus ni moins, de remettre en question la décision du président du comité, qui avait été prise conformément à l'avis que vous avait donné le Président de la Chambre.

[Traduction]

    À l'ordre.
    Monsieur Bigras, je crois que vous avez donné votre opinion; il s'agit d'une opinion, et nous l'avons tous entendue. Comme je l'ai dit, nous pourrons en reparler plus tard vous et moi.
    J'aimerais maintenant reprendre de façon officielle avec nos témoins, et je vous souhaite la bienvenue. Je crois que vous venez de voir un aspect intéressant de notre démocratie — c'est comme ça à Ottawa. De toute façon, j'aimerais céder la parole à nos témoins. Nous pouvons peut-être commencer par M. Schwarcz.
(1600)
    Je crois qu'on m'a demandé de vous rencontrer aujourd'hui en raison d'un article que j'ai publié dans le National Post dans lequel j'ai exprimé certaines opinions sur les activités du groupe Environmental Defence.
    Je suis directeur d'un bureau à McGill qui s'appelle le Bureau des sciences et de la société; notre rôle consiste à éduquer. Nous n'essayons pas d'avoir quelque influence que ce soit sur la politique. Nous ne sommes pas des porte-parole, nous sommes des éducateurs. Permettez-moi de vous expliquer ce que nous faisons et pourquoi on m'a demandé d'être ici aujourd'hui.
    Accompagnez-moi pour un instant dans une forêt d'Amérique du Sud et regardez autour de vous. Vous verrez peut-être un singe qui est suspendu dans un arbre. Soudainement, une flèche traverse l'espace et atteint l'animal. Le singe parvient à sauter d'un arbre à un autre et finalement à un troisième avant de s'effondrer sur le sol. Il a été touché par ce que nous appelons le poison des trois arbres. Le produit était un produit chimique qui s'appelle la tubocurarine. Il s'agit d'un produit isolé d'un produit naturel, soit d'une vigne qui pousse sur un arbre. Ce même produit a été pour la première fois utilisé dans le monde médical en 1942 par le Dr Harold Griffith, à Montréal en fait, à l'hôpital Queen Elizabeth; ce produit a eu un impact remarquable sur le monde de l'anesthésiologie puisqu'il permet de réduire la force des contractions de l'abdomen lorsque le chirurgien doit y faire une incision.
    Cet exemple m'amène à tirer trois grandes conclusions: tout d'abord, la dose est très importante; de plus, les produits naturels peuvent être très toxiques et enfin un produit peut être utilisé comme poison ou comme médicament; tout dépend de l'usage que nous voulons en faire.
    Il en va de même pour les substances synthétiques. Prenons par exemple un cachet d'aspirine. Nombre d'entre nous prennent une petite dose chaque jour pour empêcher les problèmes cardiaques, mais si vous avalez toute une bouteille d'aspirine, cela pourrait entraîner votre mort. Alors on se demande si le cachet d'aspirine est un produit chimique toxique. Pour répondre à cette question nous devons faire appel à la toxicologie, qui est en fait l'étude de l'impact des produits chimiques sur les organismes vivants. C'est un domaine d'étude fort compliqué. Il remonte au 15e siècle et à Paracelsus qui avait dit sola dosis facit venenum. Pour ceux d'entre vous qui ont oublié leur latin, cela veut dire: « le poison, c'est la dose », et c'est là le thème de la toxicologie.
    Le principal principe est qu'il existe toujours une courbe sur la relation dose-effet comme vous le voyez ici en toxicologie. Plus la dose augmente, plus les effets augmentent. Il faut se demander ce qui se produit tout au bas de la courbe. Est-ce que les effets tombent à zéro ou y a-t-il un seuil en-dessous duquel aucun effet ne peut être observé? Je crois que la majorité des toxicologues reconnaîtrait qu'il existe un seuil.
    Un autre concept, appelé l'hormèse, entre en ligne de compte et il intéresse tout particulièrement les toxicologues de nos jours. Ce n'est pas simplement qu'il existe un seuil à de très faibles niveaux, mais en fait les produits chimiques peuvent avoir des effets très différents à de très faibles doses, et ont en fait des effets bénéfiques à des doses à peine perceptibles, et un impact négatif plus la dose augmente. Le risque dépend de l'exposition et de la toxicité. Chaque produit chimique s'accompagne d'une toxicité inhérente fondée sur sa structure moléculaire, et ce qui nous intéresse ici, c'est le degré d'exposition.
    Évidemment, de nos jours, nous nous inquiétons tout particulièrement de ce qu'on appelle les produits chimiques synthétiques. On nous dit que nous vivons dans une soupe chimique toxique, que nous sommes entourés de 85 000 produits chimiques toxiques qui s'infiltrent dans notre vie, ce qui est évidemment vrai. C'est environ là le nombre de produits chimiques synthétiques auxquels nous sommes exposés. Il est également vrai que nous vivons dans une soupe chimique, mais elle ne se limite pas aux produits chimiques synthétiques. Elle comprend également tous les produits naturels. Si nous devions par exemple étiqueter une orange, voici cela à quoi ça pourrait ressembler, parce qu'il y aurait des centaines d'éléments naturels qu'on y retrouverait.
    Il existe environ 20 millions de composés naturels qui ont déjà été étudiés, alors que 85 000 composés synthétiques seulement l'ont été. En fait, les produits synthétiques ont été étudiés beaucoup plus en détail que ces quelque 20 millions de composés naturels.
(1605)
    Si vous prenez par exemple cette pomme, et que vous en prenez une bouchée, vous vous demanderez peut-être ce que vous ressentez. Ce que vous ressentez vraiment, c'est un collage de produits chimiques, plus de 300 différents composés chimiques qui ont été isolés, comme de l'acétone, ce qui est en fait du dissolvant pour vernis à ongles, ou du furfural.
    Nous savons que le furfural est un produit chimique cancérigène. Lorsqu'il est administré à des animaux à haute dose, il cause le cancer. C'est pour ça que nous pouvons le qualifier de cancérigène. On retrouve du furfural non seulement dans les pommes, mais aussi dans des céréales et dans les patates douces. Si vous avez eu votre tasse de café aujourd'hui, vous avez ingéré du furfural, de même que du benzène, du styrène, et d'autres cancérigènes connus.
    Évidemment, les pommes ne sont pas toxiques. On dit « chaque jour une pomme conserve son homme ». Mais en fait, il n'y a pas d'aliments magiques. Mais on ne s'en fait pas pour le furfural dans les pommes, parce que la dose est vraiment petite.
    De par nos méthodes de cuisson, nous nous exposons nous-mêmes à une grande variété de cancérigènes potentiels — les benzopyrènes. On les retrouve dans les aliments qui sont cuits à de hautes températures. Il s'agit de cancérigènes connus.
    Puis, évidemment, nous avons les polluants du milieu, y compris les dioxines, dont on entend tellement parler. Les dioxines sont relâchées dans notre environnement par diverses industries — pas délibérément, mais ce produit qu'on qualifie de « produit chimique synthétique le plus toxique » est un sous-produit de l'industrie. Et il est en effet toxique; il n'y a pas de doute. Mais sa toxicité dépend de sa structure.
    La catégorie des dioxines comprend de nombreux composés chimiques. Lorsque cette molécule comporte quatre chlores, elle est extrêmement toxique, mais lorsqu'elle n'en a que deux, elle l'est moins. Donc, il faut porter une attention particulière à la structure de la molécule.
    Il faut aussi accorder une attention particulière aux espèces en cause. La dose létale de dioxine en milligrammes par kilogramme de poids corporel dépend des espèces. Les dioxines sont en effet mortelles pour les cochons d'Inde, mais beaucoup moins pour les hamsters. Qu'en est-il des êtres humains? Nous ne le savons pas, parce que évidemment il n'est pas possible de procéder à des essais contrôlés. Ce ne serait pas un exercice éthique.
    On dit la même chose des cancérigènes les plus puissants jamais testés sur les animaux. Nous ne contestons pas cela; en fait, c'est vrai. Si on prend les rats par exemple, ils peuvent développer un tumeur du foie avec une dose quotidienne de 10 nanogrammes par kilogramme de poids corporel. C'est une très petite quantité. Nous savons aussi qu'avec un dose de un nanogramme, il n'y a aucun effet. Mais évidemment, nous voulons surtout en savoir davantage sur l'exposition humaine, qui est d'environ 0,002 nanogramme, ce qui représente 1/500 de la dose qui ne cause aucun effet chez les animaux.
    Ces données sont donc importantes. En science, nous procédons toujours à des analyses quantitatives de même que qualitatives. Nous examinons aussi les données épidémiologiques, et nous en avons beaucoup pour les dioxines, qui sont l'un des contaminants de l'agent orange. Dans le cadre de l'opération Ranch Hand, le personnel des forces aériennes a été exposé à des quantités phénoménales d'agent orange. De nombreux documents ont été rédigés sur ses effets, et les chercheurs ne s'entendent toujours pas à savoir s'il y a eu des conséquences pour ces gens.
    Nous avons aussi eu un terrible accident à Seveso, en Italie, en 1976, lorsqu'un fabricant d'herbicide a laissé échapper une quantité importante de dioxines. Nous avons effectué un suivi des conséquences de cet incident pour la population locale, et, fait assez intéressant, la seule chose qu'on a remarquée, c'est que les hommes qui ont été exposés aux dioxines ont eu un nombre disproportionné de filles.
    Il s'agit d'un phénomène qui semble se produire en Amérique du Nord également; le même genre de problème semble se produire dans la région entourant Sarnia. Il y a donc peut-être des conséquences hormonales attribuables aux dioxines, lesquelles sont très différentes du potentiel cancérigène.
    Évidemment, ce que l'on veut vraiment savoir, et c'est la raison pour laquelle on m'a demandé de venir ici aujourd'hui, c'est ce qui est fait concernant les produits chimiques qui sont présents dans notre sang, comme l'a découvert Environmental Defence.
    Par exemple, les éthers diphényliques polybromés, qui sont des produits ignifugeants et qui sauvent certainement des vies en raison de cette propriété, sont présents. Dans l'étude d'Environmental Defence, un sujet en avait 0,5 microgramme par litre dans le sang. Il s'agit d'une quantité considérable d'éther diphénylique polybromé, mais il faut mettre les choses en contexte. Si on considère que nous avons environ cinq litres de sang, cela représente 2,5 microgrammes dans le corps. La dose qui ne causait aucun effet chez les rongeurs était d'environ 2 500 microgrammes. C'est beaucoup plus.
(1610)
    Donc, qu'est-ce que ces données veulent vraiment dire? Est-ce que ça veut dire qu'il y a un effet sur les êtres humains? En fait, nous ne le savons pas, mais il ne faut pas oublier que ces cancérigènes représentent un pourcentage assez faible en ce qui a trait aux risques de cancer précoce. Trente-cinq pour cent des risques sont attribuables à une alimentation qui n'est pas équilibrée, tandis que 1 p. 100 à 5 p. 100 des risques, selon les sources, sont attribuables aux produits industriels. Sur quel aspect allons-nous donc nous concentrer et investir notre argent pour tenter d'améliorer l'alimentation des gens dans le but de réduire les risques de cancer de façon considérable?
    Nous pouvons faire beaucoup au chapitre du tabac, des infections et des comportements sexuels. Nous pouvons aussi accomplir beaucoup en ce qui a trait à l'exposition professionnelle. Donc, pour savoir si l'attention portée à ce 1 p. 100 en vaut la peine, il faut mettre les choses en perspective.
    J'aimerais évoquer quelques points que je tente de communiquer à nos étudiants et au public en ce qui concerne les produits chimiques et la toxicité potentielle.
    Il n'y a pas de bons ou de mauvais produits chimiques; il n'y a que des façons soit sécuritaires soit dangereuses d'utiliser les produits chimiques. Et en fait, il y a des façons sécuritaires d'utiliser les produits chimiques dangereux.
    Les effets dépendent de la structure moléculaire. Il faut être très précis. Les gens parlent des phthalates, qu'il faut bannir les phthalates, lesquels sont des plastifiants utilisés dans les rideaux de douche par exemple pour les rendre souples et malléables. Eh bien, ils sont aussi utilisés dans la fabrication de jouets, mais il y a différentes sortes de phthalates et leur niveau de toxicité peut varier grandement. Cela n'a pas de sens de tous les mettre dans la même catégorie, tout comme cela n'a pas de sens de mettre toutes les dioxines dans la même catégorie. En matière de toxicité, il y a des seuils en dessous desquels il n'y a pas d'effet observable.
    Les études à doses élevées effectuées sur les animaux ne nous renseignent peut-être pas correctement sur le risque pour les êtres humains, parce que le dosage en soi a des effets négatifs qui s'ajoutent à ceux du produit chimique comme tel. Je crois qu'il vaudrait beaucoup mieux examiner l'exposition humaine maximale, établir un facteur de sécurité de 100, par exemple, et tester cette dose sur les animaux, plutôt que tester la dose maximum tolérée chez les animaux.
    Nos corps traitent les produits chimiques naturels et synthétiques de la même façon. Nous sommes dotés de divers mécanismes de protection. Nous avons des systèmes d'enzymes qui traitent les petites doses de produits chimiques. Les problèmes ne surviennent qu'une fois que ceux-ci sont surchargés. Les petites doses ne présentent pas nécessairement un problème, et la présence de produits chimiques n'implique pas nécessairement qu'il y a un risque. En fait, si nous faisions une analyse de notre sang en bonne et due forme, nous verrions la présence de milliers de produits chimiques différents, dont la plupart seraient issus de sources naturelles et dont certains auraient une toxicité comparable à celle de produits chimiques synthétiques.
    La science ne peut prouver qu'il n'y a aucun risque associé à un produit chimique. Nous entendons beaucoup parler du principe de précaution. On demande aux scientifiques de démontrer qu'il n'y a aucun risque avant d'exposer le public à un produit chimique à son insu. Il s'agit d'une demande que les scientifiques ne peuvent satisfaire. On ne peut jamais prouver qu'un effet négatif est possible.
    Je ne pourrais pas vous prouver que les rennes ne peuvent pas voler. J'imagine que nous pourrions tous convenir qu'ils ne peuvent pas voler, mais je ne pourrais pas le prouver. Je pourrais bien emmener un renne en haut de la Tour de la Paix et le pousser en bas. Toutefois, je ne crois pas qu'il pourrait voler. Nous aurions un gâchis, mais tout ce que j'aurais prouvé, c'est que les rennes ce jour-là, ne pouvaient ou ne voulaient pas voler. On ne peut pas prouver quelque chose de négatif.
    On ne peut pas éliminer le risque. Il faut qu'il soit évalué en fonction des avantages. Nous parlons d'éliminer le bisphénol A, par exemple, un composé oestrogénique utilisé pour soigner les dents. On nous dit toutefois que les gens qui n'ont pas de soins dentaires adéquats sont plus susceptibles de souffrir de maladie du coeur. Eh bien, le disphénol A est utilisé dans ce domaine. Il est également utilisé par les policiers, pour les protéger des balles. On s'en sert aussi pour fabriquer des bouteilles incassables. Nous devons prendre des décisions.
    C'est toujours une question de risque et d'avantage, et c'est là qu'il faut se servir non seulement de son jugement, mais aussi des connaissances toxicologiques à notre disposition.
    Je vais terminer avec une dernière pensée: ne pas prendre de risque est aussi un risque en soi. Je vous remercie de votre attention. Si vous avez des questions, je serais évidemment très heureux d'y répondre.
    Merci, monsieur Schwarcz.
    Avez-vous l'intention de prendre la parole tous les deux? Nous avons déjà pris quelque 13 minutes. Tâchons de nous en tenir à une dizaine de minutes pour que tous les membres du comité aient l'occasion de poser des questions. Bien entendu, vous êtes libres de partager votre temps de parole comme bon vous semblera.
(1615)
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de l'occasion qui nous est donnée de nous entretenir avec vous aujourd'hui.
    Avant de commencer ma déclaration, je voudrais vous faire part de quelques conclusions impartiales de la Commission mixte internationale, la CMI. Comme nombre d'entre vous le savent, la CMI a été constituée en vertu du Traité des eaux limitrophes et tombe sous le coup de l'Accord relatif à la qualité des eaux des Grands Lacs.
    Cette organisation bilatérale a pour mandat de surveiller les progrès des gouvernements dans le rétablissement et le maintien de l'intégrité des eaux de l'écosystème du bassin des Grands Lacs. Pour lutter contre les menaces toxiques, les gouvernements du Canada et des États-Unis se sont engagés à adopter une nouvelle approche quand ils ont signé l'accord révisé.
    La position de la CMI est que, compte tenu des complexités des limites inhérentes de l'évaluation des substances chimiques les unes isolément des autres, d'une part, et les incertitudes scientifiques quant à la corrélation entre les substances chimiques et leurs effets sur la santé, d'autre part, la société devrait éliminer la production et l'émission de substances chimiques dont la régulation ne peut se faire en toute sûreté.
    La CMI a recensé une catégorie de substances chimiques, communément appelées substances toxiques persistantes, dont la régulation ne peut se faire en toute sûreté. Parmi ces substances chimiques, il y en a qui causent la mort, des maladies, des troubles de comportement, le cancer, des mutations génétiques, des dysfonctions physiologiques ou reproductives ou des déformations physiques dans un organisme ou sa progéniture. Veuillez noter que le cancer n'est pas le seul effet auquel s'est intéressée la Commission. En effet, elle s'est penchée sur de nombreux autres effets. Il faut se rappeler aussi que le cancer est un effet qui peut prendre des décennies avant de se manifester, et que son étiologie — sa cause — peut prendre encore plus de temps à se définir.
    L'article II, auquel adhèrent le Canada et les États-Unis, dispose notamment que les deux parties s'engagent à
interdire les rejets de substances toxiques en quantités reconnues toxiques et de voir à l'élimination virtuelle de rejets de toutes les substances toxiques rémanentes.
    En fait, dans toute l'annexe à laquelle le Canada a souscrit en signant l'Accord relatif à la qualité des eaux des Grands Lacs, c'est-à-dire l'annexe 12, qui porte sur les substances toxiques persistantes —, le principe général, le but visé par le programme proposé dans l'annexe est d'éliminer virtuellement tous les rejets de substances toxiques persistantes afin de protéger la santé humaine et de conserver la santé et la productivité des ressources vivantes aquatiques.
    La liste des substances chimiques comprend aussi les substances bioaccumulatives, c'est-à-dire celles qui deviennent plus concentrées à mesure qu'elles progressent dans la chaîne alimentaire —, ainsi que les substances chimiques persistantes. Celles-ci sont définies comme étant des substances ayant une demi-vie supérieure à huit semaines dans l'eau, le sol ou des organismes vivants. Si une substance chimique tombe dans ces catégories, la CMI dit qu'il faudrait l'éliminer. Elle n'exige pas de preuve causale de préjudice qui soit exhaustive; elle fonde ses décisions sur la prépondérance des preuves. Quand il existe des éléments d'information raisonnables qui établissent le lien entre certaines substances chimiques et certains effets, la Commission estime alors qu'elle dispose de suffisamment de preuves pour prendre des mesures préventives afin d'éliminer les sources toxiques. Ainsi, étant donné que de nombreuses substances chimiques chlorées ayant fait l'objet d'études ont jusqu'ici présenté une de ces caractéristiques sinon plusieurs, la CMI a recommandé, dans son rapport bi-annuel de 1992, que ces substances chimiques soient éliminées des écosystèmes des Grands Lacs.
    Passons maintenant à l'action des gouvernements. Ceux-ci assurent généralement la réglementation des rejets de substances chimiques afin de réduire les risques professionnels et environnementaux, ainsi que les menaces que constituent les substances chimiques toxiques pour la santé publique. Les gouvernements partent du principe qu'il existe des niveaux d'émissions acceptables. La technologie de contrôle des substances toxiques au point de rejet est désormais en conflit avec la chimie écologique plus durable qui préconise l'investissement dans des technologies de production novatrices et propres qui éliminent le recours à des substances chimiques toxiques et inutiles.
    De plus, les gouvernements ont jusqu'ici adopté des approches en matière d'établissement de normes et de réglementation fondées sur l'évaluation du risque, où les substances chimiques sont évaluées les unes isolément des autres, afin de déterminer le risque relatif qu'elles posent pour l'environnement et la santé. Or, ces approches ont permis la production et l'utilisation continues de milliers de substances chimiques, et ce, en dépit de leurs conséquences potentiellement préjudiciables. Nous avons appris, par exemple, qu'entre 70 000 et 85 000 substances chimiques différentes sont actuellement en usage à des fins commerciales. La plupart de ces substances n'ont pas été évaluées pour voir si elles sont cancérigènes ou si elles ont d'autres effets sur le système nerveux, sur le système immunitaire, le système endocrinien ou le système reproductif.
    À la lumière des relations quantitatives structure-activité, c'est-à-dire la relation entre la structure d'un produit chimique et son action pharmacologique, on pourrait prévoir qu'une substance chimique agisse comme une autre catégorie de produits chimiques si leurs structures sont semblables. Ainsi, les éthers diphényliques polybromés auraient des propriétés semblables à celles des BPC. En effet, les deux sont très stables à des températures élevées. Nous comprenons les menaces toxiques que constituent les BPC et prenons des mesures pour en arrêter la production. Quand l'utilisation des principes QSAR révèle que la probabilité qu'une substance se comporte comme des BPC est élevée, pourquoi alors prendre la peine de prouver la toxicité des EDP?
(1620)
    Dans mon mémoire, qui contient plus de détails, j'ai présenté les structures des PBC et des EDP, et vous verrez qu'elles sont très semblables.
    Alors que fait l'Union européenne? Essayons de trouver des repères ailleurs.
    La proposition relative au nouveau cadre réglementaire de l'UE pour l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, REACH, dont certains d'entre vous ont peut-être entendu parler, a été adoptée en 2003. En voici un extrait:
    REACH vise à améliorer la protection de la santé humaine et de l'environnement tout en assurant la compétitivité et le renforcement des capacités d'innovation des industries chimiques de l'UE. Selon l'approche préventive proposée, les fabricants de produits chimiques devront assumer le fardeau de la preuve en ceci qu'ils devront prouver qu'une substance chimique n'est pas dangereuse pour la santé humaine ou pour l'environnement avant qu'ils ne la proposent à des fins commerciales. Ainsi, on n'aura pas à attendre qu'il y ait préjudice massif avant de prendre des mesures protectrices.
    Je voudrais établir une certaine terminologie.
    Il y a eu beaucoup de recherche et de débats autour de la capacité de certains composés chimiques à causer un dérèglement endocrinien à certains stades critiques du développement du foetus et de l'enfant. Ce genre de dérèglement détruit fondamentalement les postulats sous-tendant la politique actuelle, à savoir qu'il existe un seuil sûr d'exposition à des substances chimiques toxiques. En effet, il remet en question le paradigme réglementaire du dernier quart de siècle, durant lequel on a évalué les substances chimiques en fonction de leur potentiel cancérigène. Je pense sincèrement que nous avons appris un peu plus de choses depuis le XVIe siècle au sujet des substances chimiques, notamment qu'elles peuvent causer des maladies.
    Voici le principe de précaution défini dans la LCPE, principe reconnu à l'échelle mondiale, qui dispose:
    dans le cas où il y a risque de dommages graves ou irréversibles, l'incertitude scientifique ne devrait pas servir d'alibi pour reporter à plus tard des mesures visant à prévenir la dégradation de l'environnement.
    Regardons maintenant ce que l'on dit au sujet de la censure. Wikipedia propose la définition suivante de « sound science », science sûre, et je cite:
    La science sûre est une expression souvent utilisée dans le monde des affaires, des relations publiques et des organismes publics pour décrire les recherches scientifiques ayant servi à justifier des postulats ou des positions politiques, ou encore à dénoncer des recherches menaçant leurs intérêts dans le but de protéger leurs revenus. Toutefois, il n'existe pas de définition scientifique de la science sûre, et c'est donc une expression qu'on utilise subjectivement.
    Wikipedia propose la définition suivante de « junk science » (pseudo-science), qui me semble exacte: « Junk science (pseudo-science) est une expression utilisée pour décrire des données, des recherches, des analyses ou des affirmations qui se veulent scientifiques mais qui sont motivées par des considérations politiques, financières ou d'autres considérations douteuses. »
    Ensuite, il y a l'expression fort intéressante « certitude scientifique ». Je suis scientifique, et je n'ai jamais rencontré de cas de certitude scientifique. Les scientifiques pourraient définir la « certitude scientifique » comme étant « le fait d'être à 95 p. 100 sûr que la cause et l'effet ont été correctement identifiés ». Il est extrêmement rare qu'un groupe important de scientifiques soit sûr à 95 p. 100 de quoi que ce soit, surtout en ce qui concerne quelque chose d'aussi complexe que les problèmes environnementaux. S'agissant des systèmes vivants, l'incertitude scientifique élevée est la norme.
    Comment traite-t-on actuellement l'incertitude scientifique dans le contexte de la protection environnementale? Prenons le cas classique.
    Le cas classique est l'utilisation du plomb tétraéthyle dans l'essence. En effet, quand les fabricants de produits chimiques et les constructeurs automobiles ont annoncé qu'ils commençaient à mettre du plomb tétraéthyle hautement toxique dans l'essence en 1922, de nombreux responsables des autorités sanitaires publiques ont pensé que c'était une mauvaise idée et ont exhorté les fabricants à retarder l'utilisation et à entreprendre des études approfondies. Les fabricants ont rétorqué que la communauté scientifique n'était pas unanime quant à la menace que cela représentait, et en l'absence de preuves péremptoires de préjudices à grande échelle, ce qui était impossible à déterminer étant donné qu'ils n'avaient pas encore eu le temps de mettre en oeuvre leur proposition, ils ont insisté pour dire qu'ils avaient le droit de le faire. Les conséquences de cette décision font désormais partie des annales: dix millions de Canadiens et d'Américains souffrent de problèmes cérébraux, leur QI a diminué de façon permanente à cause de leur exposition à la poussière de plomb.
    Enfin, j'aimerais terminer en évoquant l'Accord Canada-Ontario et revenir à l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. L'Accord Canada-Ontario relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs est un accord fédéral-provincial qui vise à améliorer et à protéger les écosystème du bassin des Grands Lacs. L'Accord établit les modalités de coopération et de coordination des efforts des deux gouvernements. L'accord le plus récent a été signé en 2002 et arrive à échéance en 2007. Essentiellement, il aide le Canada à respecter ses obligations en vertu de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.
(1625)
    L'Accord Canada-Ontario renferme une annexe portant sur les polluants nocifs. Les objectifs de cette annexe consistent à éliminer sinon réduire les polluants nocifs qui se trouvent dans les Grands Lacs. Sur les 10 résultats prévus dans le cadre de cette annexe, six sont axés sur la réduction des substances chimiques prioritaires.
    Permettez-moi de rappeler certains des principes contenus dans l'Accord Canada-Ontario de 2002 — que j'aborde de façon plus détaillée dans mon mémoire —, je me contenterai d'en nommer quelques-uns: gestion adaptée, ouverture, apprentissage continue, progrès, améliorations, réduction de la pollution, le principe de précaution, la prévention, la mobilisation des parties prenantes et la durabilité.
    Le gouvernement entreprend actuellement la révision de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, et un examen de cet exercice nous fera voir qu'il sera extrêmement important d'examiner la politique scientifique en vigueur ainsi que les concepts émergents en matière de protection de l'écosystème et de la santé humaine. L'examen de la LCPE est extrêmement important à cet égard. En effet, il pourrait donner le ton à l'action du Canada pour lutter contre les effets nocifs des substances chimiques conformément aux engagements fédéraux contenus dans l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.
    Enfin, la plupart des méthodes d'évaluation et de gestion du risque considèrent que plus la persistance des substances chimiques est grande, plus le risque potentiel pour l'écosystème est élevé. J'aimerais que la LCPE prenne en considération le fait que certains polluants découlent de substances chimiques qui sont utilisées continuellement, ainsi que de produits chimiques utilisés à grande échelle à des fins de production et dans la fabrication de produits de soins personnels et de produits pharmaceutiques qui, tout en étant importants pour la société, sont constamment relâchés dans l'environnement, et dont on ne cesse de renouveler les stocks. C'est pourquoi, même les substances qui ont des demi-vies longues dans l'environnement devraient être assujetties à un examen minutieux en vertu de la LCPE.
    En guise de conclusion, je recommande que le principe de précaution contenu dans la LCPE soit non seulement maintenu mais qu'il soit appliqué de façon rigoureuse afin de protéger les utilisations les plus sensibles, que les débats autour de la science sûre soient rejetés pour leur manque de pertinence et que la certitude scientifique soit reconnue pour ce qu'elle est, c'est-à-dire un mythe, puisqu'elle n'existe pas. Je ne dis pas que les substances toxiques peuvent être dérivées de source naturelle ou artificielle, mais je dis que les substances toxiques qui sont utilisées actuellement doivent être soigneusement examinées à la lumière du principe de précaution prévu dans la LCPE.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Monsieur Weinberg, je vous demanderais dans la mesure du possible de réagir aux affirmations de M. Schwarcz. Rick Smith nous a signalé des études très péremptoires qui ont été entreprises sur des familles qu'il a examinées, mais M. Schwarcz a remis en question les conclusions de ces études dans une interview. Le but du comité est d'étudier les deux aspects de la question et d'essayer de parvenir à un équilibre afin de bien comprendre les enjeux. Plus vous vous en tiendrez à cette question, mieux ce sera pour nous. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci. C'est un honneur que d'être invité à témoigner devant ce comité.
    Je m'appelle Jack Weinberg. Je suis conseiller principal en politiques à l'International POPs Elimination Network, qui est un réseau d'organisations non gouvernementales réunissant 70 pays. Le réseau a démarré à l'occasion de la négociation de la Convention de Stockholm et actuellement il s'occupe de façon plus générale des substances chimiques.
    Lundi, j'ai reçu un appel de mes collègues — j'habite à Chicago — qui m'ont invité à venir témoigner aujourd'hui, de sorte que je vais faire de mon mieux pour faire la lumière sur le sujet. Même si je n'ai pas suivi vos délibérations, j'ai préparé quelques notes.
    Sans aborder la question de l'étude comme telle, même si je peux vous parler de ce que je peux partager avec vous, j'ai été désemparé quand j'ai entendu les observations de M. Schwarcz, car je pensais que le débat était clos là-dessus depuis un certain temps. Je vais vous donner quelques exemples et nous verrons après les détails sur la façon dont ils s'imbriquent.
    Tout d'abord, dans la plupart des pays du monde, le principe de précaution est adopté mais dans aucun pays on ne le considère comme une politique à l'épreuve de tout risque. Le principe de précaution participe de trois composantes importantes. Premièrement, il faut un motif solide portant à croire qu'il y a un rapport de cause à effet — pas nécessairement une preuve tangible, parce que c'est presque impossible, mais un motif solide. Deuxièmement, les dégâts potentiels sont de taille et irréversibles. Troisièmement, une considération socioéconomique : quelles sont les conséquences sociales relatives et les coûts afférents, et existe-t-il des solutions de rechange disponibles, etc.
    Toute politique fondée sur le principe de précaution, comme ce fut le cas de la LCPE, ce qui est encore vrai, est une politique qui équilibre de façon appropriée ces trois considérations et qui n'est pas boycottée par des efforts pour créer un doute scientifique, la fabrication d'une incertitude scientifique, comme on l'a vu avec les campagnes de relations publiques qui appuyaient l'industrie du tabac, quand on a utilisé l'expression « science sûre » ou principes scientifiques objectifs, pour la première fois.
    La fabrication du doute est devenue une industrie à grande échelle. Nous l'avons constaté pour le changement climatique. Les rapports de cause à effet en toxicologie sont beaucoup plus compliqués et les enjeux sont beaucoup plus uniques. Par conséquent, la fabrication du doute est une industrie bien plus lucrative et bien plus facile à faire prospérer.
    Je vais vous donner un exemple du genre d'argument qui semble se tenir à première vue mais qui s'effondre par la suite. Nous avons parlé des EDP. L'étude indique qu'il y en avait 0,5 microgramme par litre de sang, et étant donné que le corps humain contient cinq litres de sang, cela signifie 2,5 microgrammes dans l'organisme. Cela aurait du bon sens si le sang était le principal vecteur où ces polluants sont entreposés. Mais nous savons que ces polluants sont lipophiles. Ils se logent essentiellement dans les graisses. Si on en trouve dans le sang, c'est parce que le sang contient des graisses. Ainsi, une « science sûre » qui prend en compte la seule chose connue, c'est-à-dire le contenu dans le sang d'un humain, et qui généralise cela à tout l'organisme, affirmant que cela représente 2,5 microgrammes au total, n'est pas du tout un principe scientifique objectif. C'est un exercice de relations publiques.
    Je vais vous donner un autre exemple. On nous dit — et c'est vrai — qu'il existe de nombreuses formes de dioxine. Les tétrachlores — les molécules qui comportent du chlore aux quatre extrémités — sont les plus toxiques. Cela est bien connu. On sait également très bien que les octachlores, qui sont la forme courante des dioxines — et non pas le bichlore mais les octachlores — ne sont pas très... Mais nous savons cela depuis bien des années et nulle part dans le monde, que je sache, on ne réglemente les dioxines sur une base de congénères individuels.
    Les scientifiques et ceux qui orientent la politique se fondent sur la notion de « facteurs d'équivalence toxique », en mesurant les tétras d'une part et en assignant une fraction à tous les autres congénères. Ensuite, après l'analyse de la dioxine, on obtient une quantité d'équivalence toxique, la QET. Tous les règlements sur les dioxines découlent de la QET, parce que c'est ce que l'on reconnaît.
    Ainsi, c'était encore un écran de fumée. Cela ne procédait pas d'un véritable débat en cours.
(1630)
    De plus, en ce qui concerne ce qui a été dit au sujet des pommes et des oranges, la LCPE, comme toute loi visant les produits chimiques, je présume, porte sur les substances toxiques anthropiques. Nous ne parlons pas ici de tous les produits chimiques; nous sommes tous composés de produits chimiques. Nous parlons des produits anthropiques.
    Les substances anthropiques sont des substances synthétiques, fabriquées par l'homme ou, étant donné que plusieurs substances fabriquées par l'homme se retrouvent également dans la nature et puisqu'il y a d'autres façons d'envoyer des substances toxiques dans la nature que leur fabrication, il y a également des substances toxiques qui sont présentes dans la nature, dans l'environnement, en raison de l'activité humaine en quantités artificielles. Ainsi, nous parlons de substances toxiques anthropiques et non de tous les produits chimiques.
    Il s'agit d'une question importante parce que, comme vous vous souvenez, nous avons entrepris nos travaux lorsque nous avons découvert un trou dans la couche d'ozone, et il y avait aussi la question de la science, établissant un lien entre les substances appauvrissant la couche d'ozone ainsi que l'appauvrissement de l'ozone stratosphérique. Cette question a été débattue pendant un certain temps. Elle a fait l'objet d'une vive opposition et la science a fait l'objet d'un débat, mais la question a finalement été résolue.
    Nous avons par la suite pris part à un débat animé au sujet des gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Encore une fois, le mécanisme de base est en soi extrêmement simple, ce qui fait que le doute fabriqué portait sur toute la climatologie même ainsi que sur les mécanismes, les puits et autres choses du genre. Nous avons donc perdu plus d'une décennie, et il se pourrait même que nous perdions davantage de temps, à tenter de résoudre un problème extrêmement difficile; puis, une fois que nous l'aurons reconnu, nous découvrirons que nous ne disposons pas des moyens suffisants pour le régler. Il s'agit d'un problème très grave pour le monde entier.
    Cependant, la question dont nous sommes saisis aujourd'hui, soit les substances toxiques anthropiques, est beaucoup plus compliquée. La stratosphère est un mécanisme relativement simple. Pour ce qui est de l'atmosphère, le mécanisme était simple, mais les modèles climatiques étaient compliqués. Nous parlons maintenant de la biosphère — c'est-à-dire les êtres humains et tous les êtres vivants ayant évolué dans un environnement chimique particulier, et le fait que tout en nous est chimique.
    La biochimie est le miracle en vertu duquel le foetus se développe. Nous devenons des êtres humains complets. Toutes nos fonctions corporelles sont gérées par un processus biochimique.
    Nous introduisons maintenant un grand nombre de substances toxiques anthropiques dans la biosphère; certains des effets sont connus, d'autres le sont moins, mais nous ne pouvons plus accepter plus longtemps...
    Nous pensions que la situation avait été résolue grâce à la science qui a pris naissance dans les Grands Lacs au Canada et aux États-Unis dans les années 80 et au début des années 90. LD 500, qui indique la quantité requise pour tuer un poisson, n'est pas le fin des fins en toxicologie. Il s'agit d'un seul aspect. C'est pour un poison virulent; c'est ce qui tue.
    Ce que nous apprenons concerne ce qui a été baptisé perturbation endocrinienne, mais je crois que cela peut parfois être difficile à comprendre. Même s'il ne s'agit pas du terme courant, je préfère parler de perturbation du signal, étant donné qu'il s'agit d'un terme plus général.
    La plupart des procédés biologiques sont gérés au moyen des récepteurs des cellules. Par la suite, les produits chimiques se lient à ces récepteurs, et ils enclenchent une activité. C'est de cette façon que se produit le développement. C'est de cette façon que les corps fonctionnent. Nous parlons donc de récepteurs. C'est très compliqué. Il y a donc un système d'échange des renseignements chimiques à l'intérieur du corps humain. Cet échange peut également avoir lieu grâce à l'odorat. Certains animaux échangent l'information nécessaire au moyen des hormones, mais il y a des systèmes très compliqués d'échange de renseignements chimiques.
    Il y a perturbation du signal lorsque des produits chimiques qui sont synthétiques ou anthropiques, par leur existence ou leurs quantités dans l'environnement, qui sont différentes des conditions dans lesquelles ces organismes ont évolué, se retrouvent soudainement dans l'environnement en des quantités qui perturbent un système très compliqué de signalisation. Cette perturbation peut prendre la forme d'un produit chimique qui se lie à un récepteur et enclenche une action qui ne doit pas être enclenchée. Elle peut également prendre la forme d'un produit chimique qui se lie à un récepteur et l'empêche de réagir lorsqu'il devrait le faire. Cette perturbation peut également interagir avec le produit chimique avant que celui-ci n'atteigne le réacteur.
    Ainsi, un grand nombre d'effets sur la santé qu'on a commencé à comprendre seulement dans les années 80 et au début des années 90 grâce, en grande partie grâce à la recherche dans les Grands Lacs, sont médiés par ces mécanismes de perturbation du signal. La perturbation endocrinienne est l'effet dont on parle le plus souvent, mais elle est générale, et signifie que la dose équivaut au poison.
(1635)
    Cela aurait peut-être suffi au XVIe siècle, mais la science ne se penche plus sur le problème. Je pense que la plupart des scientifiques croient que, quand la dioxine est pratiquement au niveau zéro, la courbe dose-effet est presque linéaire. Je pense que cela a été réfuté malgré le fait qu'on s'efforce beaucoup de jouer avec le concept.
    Je crois que la courbe dose-effet de dioxine vers le niveau zéro... Mais la dioxine en grandes quantités... nous l'avons vu avec le premier ministre de l'Ukraine, qui a été empoisonné avec une dose forte de dioxine pure mais n'en est pas mort. Beaucoup des produits chimiques qui perturbent les signaux ont des courbes dose-effet très bizarres. Certains scientifiques ont même trouvé des courbes dose-effet en forme de U. Quand cela frôle le zéro, ça monte très rapidement. Ensuite les effets non seulement disparaissent, mais à fortes doses, ça commence à diminuer. C'est parce que les systèmes biologiques réagissent à de petites doses comme à un genre de signal, mais quand la dose est plus importante, tout le système cesse de fonctionner afin de ne pas réagir exagérément.
    Nous ne traitons pas de DL500, ni de dose létale, ni de quantités légèrement moins fortes. Nous parlons de bon nombre d'effets ayant une incidence sur l'intelligence, la capacité d'apprentissage, de troubles de comportement et de foetus en formation. Nous traitons d'effets nocifs sur la reproduction, comme celui mentionné de Servaso, et de bien d'autres effets sur la reproduction. Nous avons affaire à des dysfonctionnements du système immunologique que nous ne comprenons toujours pas. Très vraisemblablement, nous traitons de la prévalence du cancer de la prostate et d'autres problèmes de prostate chez les hommes de mon âge, causés par des événements qui se sont produits quand j'étais foetus. Cela a pris tout ce temps à se développer.
    Nous avons parlé de toutes ces questions quand je suivais les enjeux environnementaux des Grands Lacs il y a 10 ans et plus. Ce sont des problèmes qu'il faut aborder.
    On en a dit plus pendant cette présentation et pendant les questions et réponses, mais je regrette de vous informer que je ne suis pas toxicologue. Je ne suis qu'un profane cultivé. J'admets être un défenseur de la cause.
    Ce sont, je crois, des questions d'une grande importance, et je voulais parler un peu de ce comité, si vous me le permettez, en conclusion.
(1640)
    Monsieur Weinberg, nos députés ont toutes les occasions de vous poser des questions.
    Je voulais dire quelque chose à propos de la LCPE, mais peut-être que vous en avez parlé suffisamment, et que vous voulez discuter de cette question. Peut-être que nous pourrions y revenir pendant la période des questions.
    Merci.
    Pendant que nos députés posent des questions, j'encouragerais les témoins à interagir avec eux. Quand vous entendez quelque chose et que vous avez envie d'intervenir, allez-y.
    Monsieur Godfrey.
    C'est précisément ce que je voudrais voir se produire. Je souhaite que mes 10 minutes soient un échange entre M. Weinberg et M. Schwarcz.
    Il me semble que vous en avez plus à dire, mais je pense que M. Schwarcz aimerait y répondre.
    Allez-y, messieurs. Vous avez dix minutes.
    Je ne crois pas que nous soyons en désaccord pour ce qui est d'essayer de protéger le grand public. C'est inattaquable. Bien sûr que nous voulons éliminer toutes les substances dangereuses de notre environnement. La question est de savoir comment procéder. Nous pouvons tous les deux cracher des données, mais au bout du compte c'est une question de jugement et de formuler des hypothèses bien fondées.
    Je contesterais la courbe des dioxines. Je crois qu'il y a certainement des preuves voulant que les dioxines aient un effet d'hormèse. Je vous inviterais à consulter le travail de Ed Calabrese, qui a étudié cette question en profondeur avec ses collègues. Il y a beaucoup de renseignements à ce sujet, à savoir que la courbe n'est pas linéaire.
    La raison pour laquelle j'examine la chimie sanguine quand nous parlons des éthoxyéthanes, c'est parce que c'est exactement ce que Environmental Defence a fait. Ils ont pris des sujets de partout au pays pour mesurer leurs niveaux sanguins. Ils n'ont pas fait de corrélation avec les dépôts de graisse et la quantité qui s'y trouvait. Ils ont cherché de façon exclusive.
    En passant, les éthers diphényliques polybromés ont été considérablement étudiés en ce qui concerne et la charge corporelle totale et ce qui est présent dans le sang. J'ai effectué des recherches en profondeur à ce sujet, et je ne trouve rien à partir des données relatives aux animaux qui me suggère que les doses auxquelles nous sommes exposées représentent un risque.
    Je reviens encore une fois au fait que vous avez mentionné, c'est-à-dire qu'il n'y a aucune certitude en matière de science. Nous prenons des décisions. Nous avons développé l'habitude de vivre en utilisant une grande variété de substances. Le nombre de produits chimiques auxquels nous sommes exposés est immense. Si vous réfléchissez à ce que vous avez fait depuis 24 heures, vous avez probablement bu quelque chose dans une tasse en plastique, mangé quelque chose dans une assiette en plastique, ou utilisé des produits cosmétiques.
    Ce sont des choses très complexes sur le plan chimique. Chacune de ces choses doit être fabriquée. Il est impossible de les fabriquer sans laisser échapper des substances. Le seul fait que ces substances existent et qu'elles soient mesurables ne nous dit rien de plus que le fait que nous avons des capacités d'analyse formidables, et que nous pouvons maintenant mesurer des choses en partie par billion ou même moins.
    Encore une chose: vous parliez des changements dans la structure moléculaire et de la subtilité de ce concept. C'est, bien sûr, vrai. Mais nous ne pouvons pas toujours prédire. Si vous prenez le méthanol et l'éthanol, qu'est-ce qui pourrait se ressembler plus? Vous avez là les deux alcools éthyliques de base mais le taux en carbone est différent, et cependant le méthanol est beaucoup plus toxique que l'éthanol. Je pense que si vous ne le saviez pas et que vous examiniez seulement la toxicité de l'éthanol, vous ne prédirez pas la toxicité du méthanol, ou vice versa.
    En passant, je n'avais pas l'intention d'exclure Mme Krantzberg de cette...
(1645)
    J'aimerais dire quelque chose, si vous me le permettez.
    Je crois que M. Weinberg avait maintenant la parole. Ensuite, madame Krantzberg, ce sera à vous.
    S'il vous plaît, prenez le moins de temps possible — je pense que vous serez d'accord, monsieur Godfrey — afin qu'on puisse entendre le maximum.
    J'espère sincèrement que le débat sur les produits chimiques deviendra une discussion de bonne foi et non pas un débat partisan. Le fait de trouver des arguments partiaux venant de tous les coins qui remontent toujours aux mêmes sources est très décourageant.
    Oui, ils ont examiné le sang, parce qu'ils ne pouvaient pas prendre un corps humain et en faire sortir toute la graisse par la cuisson. Le sang est la meilleure chose. Vous pouvez faire une incision dans la graisse; vous pouvez effectuer toutes sortes de procédures d'ordre médical. C'est pourquoi ils examinent le sang, mais nous savons que ces produits recherchent la graisse et nous savons qu'il y a de la charge corporelle dans la graisse. Je considère que c'est pour semer la confusion parmi les gens qui ne le savent pas.
    Sur la question de la relation dose-effet pour les dioxines, je me souviens qu'au début des années 1990, il y a eu une grande conférence. L'industrie a ensuite émis de longs communiqués de presse disant que la conclusion de la conférence était que la relation dose-effet était presque zéro, que ce n'était pas toxique; ensuite, dans Scientific American, toutes les associations scientifiques ont dit que ce n'était pas la conclusion, c'était uniquement l'interprétation partisane des conclusions à des fins de relations publiques.
    Au départ, l'EPA américain allait réévaluer ses données découlant de ces constatations. C'était il y a 15 ans, et parce qu'ils n'ont pas pu présenter ces arguments, ils n'ont jamais terminé cette réévaluation et ils n'ont tiré aucune conclusion, soit parce qu'ils ont tiré la bonne conclusion ou parce qu'il y a suffisamment d'argent et d'influence pour nous empêcher d'en tirer une.
    L'hormèse, par exemple, est différent. Il y a une courbe de la dioxine. Je n'ai dit « linéaire » que quand c'est presque zéro. La courbe de la dioxine n'est pas linéaire. En très petites quantités, elle a une incidence profonde, mais quand ces quantités augmentent — c'est ce que Seveso et d'autres disent, et cet empoisonnement en Ukraine — quand des populations sont exposées aux petites doses, que ce soit des humains ou des animaux, cela perturbe beaucoup la biochimie de base, et cela touche particulièrement le développement.
    Nous avons des études sur les BPC dans les Grands Lacs portant sur les enfants de femmes qui ont mangé du poisson venant de ces lacs. Ce sont de vieilles études maintenant. Leurs enfants avaient des difficultés d'apprentissage importantes par rapport aux mères qui n'avaient pas mangé ce même poisson. Nous le savions depuis longtemps, mais les scientifiques qui ont fait la découverte ont fini par se sentir intimidés, et toutes sortes d'autres choses se sont produites.
    Je pense que la discussion devrait être une discussion qui se déroule de bonne foi, en ce sens que nous essayons vraiment de ne pas seulement chercher des faits scientifiques partiaux à l'appui d'un cas en particulier.
    La réglementation des produits chimiques est une question très complexe. Je pense que c'est une bonne chose que la LCPE soit examinée tous les cinq ans; cela donne la possibilité d'une mise à jour peut-être à tous les huit, neuf ou dix ans. Il y a de nouvelles découvertes. Je pense que la LCPE commence finalement  — et depuis votre dernier examen — à tenir compte des produits chimiques pour lesquels il y a très peu de données. J'oublie le nom de la liste, mais il y a quelque 23 000 produits chimiques qui bénéficiaient d'une clause de droits acquis, vous les avez caractérisés maintenant. Je pense que c'est une mesure très importante. La question maintenant c'est de savoir ce que sera la prochaine mesure.
    Nous croyons que l'Union européenne s'oriente dans la bonne direction. Ils commencent en fait à exiger l'élaboration de données plus détaillées sur tous ces produits. Par la suite, ils pourront commencer à émettre des décisions réglementaires. Si je comprends bien, vos critères de toxicité inhérents sont toujours fondés sur le nombre de poissons qui meurent — la dose létale de 50 — et ne tiennent pas compte des autres orientations toxicologiques.
    L'orientation en matière de produits chimiques, dans un monde où le milieu vivant regorge de substances anthropiques qui diffèrent de la composition chimique de la vie au moment de l'évolution, est une lourde responsabilité que vous devez assumer. Je crois que vous avez besoin d'un projet de loi très délicat qui exige plus de données et qui applique le principe de précaution — c'est-à-dire un principe sans risque — mais qui inclut également un autre principe différent du principe de précaution et qui fait partie déjà de certaines lois, un principe qui s'appelle le principe de la substitution. C'est-à-dire que si vous avez une substance aux propriétés dangereuses qui sont bien connues mais qu'il existe des produits de remplacement qui n'ont pas ces mêmes propriétés ou des propriétés moins dangereuses, et si, sur le plan de l'économie et de l'utilité, les raisons sont suffisamment convaincantes, c'est une assez bonne raison d'exiger la substitution. Ce n'est pas nécessaire d'interdire un produit chimique.
(1650)
    Enfin, il n'est pas vrai qu'on peut contrôler tous les produits chimiques de façon sécuritaire. Il y aura toujours dans l'environnement des émanations de certains produits chimiques si on les fabrique, surtout si on s'en sert pour faire d'autres produits.
    J'espère que vous allez examiner la LCPE de près et continuer de la mettre à jour pour refléter ce débat international sur la politique en matière de produits chimiques.
    Madame Krantzberg.
    Merci.
    Dans le but d'établir un dialogue ouvert et bien équilibré, j'aimerais attirer votre attention sur les déclarations telles que celle préconisant qu'il n 'existe pas de preuve que les taux actuels d'EDP constituent un risque. Bien que cette déclaration soit vraie, il est aussi vrai que, sur une échelle logarithmique, le taux d'EDP dans l'environnement et dans les tissus animaux est à la hausse.
    Nous devrions peut-être nous poser des questions quant à l'avenir. Nous devrions peut-être prendre des mesures avant d'en arriver au point où nous faisons face à un taux de concentration qui constitue un risque, parce que nous savons déjà que certaines de ces substances sont nocives aux invertébrés. Pourquoi attendre?
    C'est une chose. Il faut aussi comprendre que les effets observés de certains produits chimiques, c'est-à-dire les effets décrits dans Toxic Nation, sont de nature subclinique. Par exemple, les enfants qui ont été exposés in utero au mercure ont perdu quelques points de QI. Nous sommes au courant de ce fait et nous nous disons qu'il s'agit simplement de quelques petits points de QI. Mais lorsque vous en parlez avec des experts, ils expliquent qu'un tel changement peut transformer la courbe en cloche de la population au point où il y aura une augmentation importante de personnes handicapées et une réduction importante de doués. Il y a donc un coût social pour certains effets qui sont toujours de nature subclinique.
    À mon avis, l'argument le plus important de Toxic Nation ne consiste pas à dire que les concentrations observées dans le sang de ces gens posent des problèmes maintenant. C'est plutôt un cri du coeur pour la biosurveillance, pour une évaluation des effets possibles de ces substances chimiques sur les êtres humains et sur tout autre membre de l'écosystème. Il ne s'agit pas simplement des êtres humains: nous sommes responsables de la protection de tout ce qui est sans voix.
    C'est un appel à l'action. Nous trouvons ces produits chimiques dans nos systèmes. Comme M. Weinberg disait, l'évolution de l'être humain ne s'est pas faite pas avec ces produits dans notre environnement. Nous ne sommes pas habitués à cette multiplicité de produits chimiques dans notre système. Par conséquent, il faut déterminer quel impact ils pourraient y avoir sur nos systèmes. C'est un appel à la prudence, c'est une demande en vue de faire plus de recherche; c'est un cri du coeur pour la biosurveillance. Et il n'incombe pas à Toxic Nation de s'assurer de la biosurveillance mais plutôt aux gouvernements de comprendre les conséquences possibles de la présence de ces produits chimiques dans les populations à travers le monde. Quelles seront les conséquences?
    Monsieur Schwarcz.
    Il y aura toujours un « mais » en science. Peu importe le sujet, il y aura toujours un « mais ».
    La science n'avance pas par des bondissements géants. La science avance par une série de tout petites étapes. Bien entendu, nous essayons toujours de corriger les erreurs du passé. Nous espérons que si on remplace un produit chimique par un autre, que le dernier sera plus sécuritaire que l'autre. C'est toujours notre intention, naturellement, mais il n'est pas toujours facile d'avoir cette assurance. Vous ne pouvez pas toujours prévoir. Et l'un des points que j'essaie d'établir c'est qu'on en devrait jamais suggérer qu'on a des connaissances qui n'existent pas vraiment. Il y a trop de choses qu'on ne sait pas lorsqu'il s'agit des règlements et des remplacements.
    Je vais peu-être vous donner une analogie. À l'heure actuelle, tout le monde parle des perfluorooctyles. On en parle dans les journaux depuis quelques jours en raison de l'interdiction de certains composés perfluorés, surtout les télomères utilisés pour faire des détacheurs. Je crois que c'est une bonne chose. À mon avis, nous avons des preuves qui s'accumulent qui nous signalent un problème, mais il y aura des conséquences. Ces produits servent d'anti-taches. Si cela ne marche pas, les gens vont avoir plus de taches donc ils vont aller chez le nettoyeur plus souvent. Et ensuite il faudrait s'inquiéter du tricholoéthylène utilisé par ce nettoyeur. C'est une inquiétude tout à fait légitime car ce produit représente l'un de ces produits chimiques persistants qui nécessitent des mesures de notre part.
    Maintenant nous parlons de la possibilité de remplacer ce produit par du gaz carbonique liquide. Mais il faut comprendre que la fabrication du gaz carbonique liquide n'est pas sans problème non plus. Il existe d'autres façons de fabriquer des composants anti-taches. Il y a maintenant des technologies qui sont tout à fait nouvelles, y compris les nanotubes de carbone dont vous avez sans doute entendu parler. Ces nanotubes s'inspirent de la technologie soccerène, ce qui est très fascinant, parce que essentiellement il s'agit de la découverte de nouvelles formes de carbone. Tout le monde sait que le graphique et le diamant sont tous les deux des carbones. Eh bien, nous avons une autre forme de carbone — c'est buckminstersullerènes, nommé après Buckminster Fuller, l'architecte des dômes géodésiques. On peut maintenant imprégner les tissus de ces substances anti-taches.
    À Chicago, nous avons déjà vu une manifestation où les manifestants ont laissé tomber les pantalons qu'ils venaient d'acheter chez Eddie Bauer parce que, selon eux, Eddie Bauer se servait du téflon contre les taches. Les compagnies se servent de la technologie buckminstersullerènes alors les manifestants se sont trompés en ce qui concerne cette partie-là. Mais lors de la prochaine manifestation, ils ont au moins corrigé cet aspect-là et cette fois-ci ils ont protesté l'utilisation des nanoparticules dans les tissus anti-taches. Pourquoi? C'est l'idée que nous ne savons pas quelles seront les conséquences si jamais le public est exposé à ces nanotubes. Le grand public, naturellement, ayant lu le roman de Michael Crichton, Prey, est déjà sensible à la possibilité que ces nanoparticules peuvent d'une manière ou une d'autre se multiplier pour créer une espèce boue toxique sur la planète.
    Il y aura toujours donc un « mais ». Oui, nous devons essayer de remplacer certaines choses avec des nouveaux produits, mais parfois ils ne marchent pas toujours mieux. Nous devons faire des estimations éclairées lorsqu'il s'agit de ces choses-là. Nous devons étudier chaque catégorie de produits chimiques individuellement. Nous devons examiner les structures moléculaires. Nous devons tenir compte des quantités. Je crois qu'il y a quand même des seuils, mais il est évident que tout le monde n'en est pas d'accord.
(1655)
    Évidemment, nous avons dépassé notre temps pour cette question. Monsieur Godfrey, en posant la question vous avez adapté une bonne approche.
    Monsieur Glover et madame Taylor, suite à ces réponses, je vous inviterai à nous faire part de vos observations.
    Nous avons fait faire de la recherche par le bureau du greffier et nous avons des précédents dont nous parlerons plus tard, mais je crois que selon les règles de la Chambre, l'annulation d'une décision n'est pas nécessairement considérée comme une question de confiance à l'endroit du président. Il s'agit-là d'un résumé sans doute assez clair pour les membres. Nous nous assurerons que vous en recevrez tous une copie ainsi que plusieurs exemples de cas de figure.
    Monsieur Lussier.

[Français]

    Monsieur le président, je serais sans doute tenté, comme M. Godfrey, de laisser toute ma période de 10 minutes aux témoins et même d'inviter aussi M. Glover et Mme Taylor à participer à la discussion.
    J'étais aussi tenté, après avoir lu la biographie de M. Schwarcz, de lui demander de nous parler de la chimie de l'amour. On dit dans sa biographie qu'il est un spécialiste de la science du vieillissement.
    Je pense qu'on pourrait laisser les trois partenaires dialoguer ou échanger, mais j'aimerais d'abord poser une question à Mme Krantzberg.
    Lorsque vous travaillez en consultation avec les États-Unis, dans le cadre du Traité des eaux limitrophes de 1909 entre le Canada et les États-Unis, comment fait-on pour s'entendre sur la liste des produits chimiques dangereux inscrit dans les programmes d'échantillonnages des grands lacs? Cette liste est-elle établie en consultation avec le ministère de l'Environnement du Canada et l'Environmental Protection Agency? Cette liste est-elle aussi appliquée à l'Accord Canada-Ontario concernant l'écosystème du bassin des Grands Lacs?

[Traduction]

    Petite précision, je suis maintenant professeure à l'Université McMaster. Je viens de quitter la CMI. Mais je peux vous parler de la CMI et de la liste des produits chimiques.
    Le traité des eaux limitrophes de 1909 prévoyait qu'aucune activité d'un côté de la frontière ne doit porter préjudice au bien ou à la santé de l'autre côté de la frontière. Cela a préparé le terrain pour l'Accord sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, tel que recommandé par la CMI et accepté par les deux gouvernements, celui du Canada et celui des États-Unis, par l'intermédiaire du ministère des Affaires étrangères et Département d'État.
    Il y a une annexe, l'annexe 1, qui renferme tous les objectifs spécifiques chimiques pour les substances organiques, les substances toxiques permanentes, les éléments nutritifs, les caractéristiques microbiologiques et radiologiques, et ainsi de suite. Cette liste a d'abord été dressée sur l'avis du conseil consultatif scientifique, un conseil binational qui relève de la CMI, composé de scientifiques des universités, du secteur privé, et dans une certaine mesure des gouvernements des deux côtés de la frontière, avec un nombre égal de Canadiens et d'Américains. Leurs recommandations ont été formulées auprès de la CMI, et la CMI a recommandé au gouvernement de mettre en oeuvre cette liste.
    Cette liste est actuellement, dans certains cas, vieille de 34 ans. L'élaboration de ces listes-là s'est fondée en grande partie sur les contributions des scientifiques de la EPA et d'Environnement Canada.
    L'Accord Canada-Ontario a adopté les 12 première substances toxiques identifiées par la CMI comme étant les plus dangereuses et visées par l'élimination virtuelle. On a ajouté ces substances-là à l'Accord Canada-Ontario pour oeuvrer en vue de leur élimination de l'environnement.
    Cet accord a été conclu en 2002. C'est aussi lié aux engagements pris par le Canada de concert avec les États-Unis sur ce qu'on appelle la stratégie binationale sur les produits toxiques dans les Grands Lacs, stratégie fondée sur les pratiques volontaires visant l'élimination des mêmes 12 substances.
    C'est donc une liste de 12 substances qui est très populaire. Beaucoup des composés dont vient de parler M. Schwarcz et dont nous parlions n'y figurent pas; ils étaient inconnus à l'époque. Il y a beaucoup de substances qui sont maintenant sur la liste LIS et qu'on ne trouve sur aucune de ces listes-là.
(1700)

[Français]

    Les nouveaux produits vont-ils être ajoutés à cette liste?

[Traduction]

    L'examen de l'accord est en train de se faire, et on est en train de discuter de la façon de fixer les objectifs spécifiques à l'annexe. Au lieu de créer une liste pleine de chiffres qui seront périmés au fur et à mesure que la science avance, on cherche à câbler sur, par exemple, une procédure comme celle de la LCPE, pour que les gouvernements puissent examiner ces nouvelles substances de façon binationale au moyen d'une procédure qui fait l'objet d'un examen régulièrement, et à coordonner l'examen binational de ces substances-là entre la IPA et Environnement Canada en se fondant sur un mécanisme tel que la LCPE.

[Français]

    Je m'adresse de nouveau au Dr Schwarcz.
    Vos commentaires, docteur, sont très intéressants, notamment quand vous parlez de la relation et de l'interaction entre tous les produits cancérigènes.
    Parlons des produits qui attaquent la couche d'ozone, ce qui entraîne des cancers. Compte tenu de l'interaction entre ces produits, comment doit-on travailler afin d'essayer de trouver une solution à cette problématique internationale?

[Traduction]

    Merci.
    Premièrement, j'aimerais répondre à l'observation initiale que vous avez faite à la suite d'une déclaration intéressante de l'interprète. Vous m'avez demandé...en parcourant ma biographie et les choses que je fais, parce que je donne un cours sur la chimie de l'amour, et l'interprète avait dit, « J'ai pensé avoir entendu « amour », mais ça ne pouvait pas être ça. » Eh bien, c'est tout à fait possible, parce que c'est précisément ce que je fais.
    L'idée, c'est que le monde, bien entendu, fonctionne en fonction de la chimie, qu'il s'agisse des produits chimiques naturels ou artificiels, et j'essaie de sensibiliser les gens et d'expliquer cela, y compris le fait qu'il existe certaines substances qui nous permettent de tomber en amour. L'un de ces produits chimiques, c'est la phényléthylamine, que l'on trouve dans le chocolat.
    Les médias ont fait tout un cas de ce fait — et les amants s'échangent des chocolats traditionnellement pour la Saint-Valentin — et ils ont dit qu'il suffit de produire un peu de phényléthalamine pour tomber amoureux, avec celui qui a offert les chocolats au départ, on espère. C'est une histoire tout à fait charmante mais, sur le plan chimique, tout à fait farfelue parce que la phényléthylamine ne peut jamais pénétrer la barrière hématoencéphalique, elle ne peut jamais atteindre le cerveau. Et comme nous le savons tous, les chocolats ont un effet direct sur les hanches, plutôt que le cerveau.
    Il faut bien comprendre ces nuances chimiques pour répondre à votre autre question au sujet du mélange des produits chimiques. Je ne peux pas vous fournir une réponse et je pense que personne ne peut le faire parce qu'il s'agit de mélanges d'une complexité incroyable.
    Il serait impossible pour nous de mesurer toutes les interactions. Nous sommes, par contre, au courant de certaines interactions. Par exemple, si votre régime alimentaire comprend du fer et de la vitamine C, on sait que la vitamine C permet une meilleure absorption du fer. Ce type de données est connu. Nous savons, par exemple, qu'avec certains médicaments, il ne faut pas boire de jus de pamplemousse parce que ce dernier peut modifier la composition chimique du sang, modifier les niveaux de substances.
    Il s'agit d'interactions précises que nous avons réussi à mesurer. Il n'est pas possible de mesurer toutes les interactions possibles. Nous avons plutôt tendance à examiner l'exposition totale, le dosage et la chimie de base, en fonction des connaissances acquises; nous essayons de décider à partir de cela. Mais nous ne pouvons être certains.
    Vous avez posé une question au sujet de la couche d'ozone. J'aimerais vous donner un peu de contexte. On a introduit les chlorofluorocarbones pendant les années trente parce que, à cette époque, le système de réfrigération était à base d'ammoniac ou de sulfure d'hydrogène — deux produits chimiques qui sont horriblement nuisibles. Il y avait toutes sortes de fuites d'ammoniac. Vous vous rappellerez peut-être, on utilisait encore un ancien système à base d'ammoniac dans une patinoire d'hockey quelque part en Alberta. Eh bien, il y a eu une fuite d'ammoniac qui a fait des blessés graves.
    Il fallait donc trouver un nouveau produit chimique pour remplacer l'ammoniac. Les chlorofluorocarbones convenaient très bien, étant donné que sur le plan chimique, ils avaient de fortes propriétés non réactives. Il était possible de les mettre dans un réfrigérateur et de les comprimer et, lors de leur expansion, ils vidaient le réfrigérateur de sa chaleur. Tout le monde pensait que c'était formidable.
    À cette époque, personne n'aurait cru que ces produits chimiques pouvaient avoir un impact sur la couche d'ozone stratosphérique. Et comment auraient-ils pu prévoir une telle chose? Qu'est-ce qui aurait amené qui que ce soit à penser cela? On n'avait aucune notions sur la détérioration de la couche d'ozone. C'est une question qu'on n'avait même pas étudiée. Il y avait un problème, la réfrigération. Il y a eu une percée énorme. En se servant du fréon plutôt que de l'ammoniac, on a sauvé des milliers de vies.
    Par la suite, nous avons découvert qu'il y avait effectivement un problème au niveau de la couche d'ozone. Maintenant, il faut s'attaquer à ce problème parce que nous avons découvert que ce ne sont pas tous les types de fréon qui tombent dans cette catégorie. Tout dépend du nombre de fluor dans la molécule et de leur emplacement exact.
    Eh bien, il existe maintenant des frayons qui n'ont pas d'impact sur la couche d'ozone. Auront-ils un impact sur autre choses que nous allons découvrir d'ici 30 ans? Nous ne le savons pas vraiment, mais nous avons quand même établi un bon fondement qui nous permet de prendre des décisions, puisque nous avons depuis les années 30 acquis beaucoup de données toxicologiques et je dirais que la possibilité que les fréons utilisés maintenant ont un impact négatif est réduit au minimum. Mais il faut toujours prendre une décision.
    Je ne représente pas l'industrie. Qu'elle prospère ou non, cela m'est égal. Je suis universitaire et tout ce qui m'intéresse, c'est la science et la méthodologie scientifique. Cependant, je ne crois pas que l'industrie veut vraiment mettre en circulation des substances dangereuses dans le milieu parce que, au bout du compte, cela ne lui ferait pas de bien non plus. Ce qui compte pour l'industrie, c'est de produire de bons produits qui sont appréciés et utilisés par le public et qui comportent des risques minimaux. Mais il est impossible de toujours savoir si un risque est vraiment minimal.
(1705)
    Il s'agit finalement de prendre des décisions, mais il faudrait que ces décisions soient prises par des gens qui ont de l'expertise en chimie, en toxicologie et en physiologie.
    D'accord.
    Monsieur Warawa, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. J'ai trouvé tout cela très intéressant.
    Je vais m'en tenir à de brèves observations afin de permettre davantage de dialogue entre les témoins.
    Le dialogue d'aujourd'hui porte essentiellement sur la mesure du succès. Au départ, nous avons rassemblé plusieurs idées, déterminé des sujets que nous souhaitions aborder et élaboré une liste de témoins. Aujourd'hui, la mesure du succès portait sur trois questions précises: les objectifs de la LCPE et la façon de les mesurer, la meilleure façon d'informer la population de l'état de l'environnement et comment améliorer le contrôle de l'exposition aux substances toxiques.
    J'ai une question. En faisant votre exposé, si vous pouviez en traiter, ce serait très utile pour moi.
    Des projets de lois d'initiative parlementaire ont traité de deux choses, soir les phtalates et le PFOS. Je crois que c'était vous, M. Schwarcz, qui a parlé des phtalates.
    Est-ce que la LCPE fonctionne? On en est à l'examen. Nous voulons nous assurer d'avoir une loi environnementale efficace et qui fonctionne. D'autres témoins nous ont fait part de leur frustration à l'égard des délais de traitement et d'évaluation des substances.
    Nous avons également entendu à la Chambre dernièrement que des évaluations de phtalates ont été faites en 2000, alors elles sont maintenant vielles de six ans. Est-ce que les évaluations faites en 2000 sont toujours pertinentes, ou est-ce qu'il faut les refaire?
    Vous en avez parlé. À mesure que la science évolue, est-ce que nous devons refaire certaines de ces évaluations? Il y a des préoccupations à l'égard du PFOS et des phtalates. Pourriez-vous en parler, nous dire quoi faire et comment rendre améliorer la LCPE et la rendre plus efficace? J'aimerais que chacun d'entre vous y réponde.
(1710)
    Je ne suis pas un expert en matière de LCPE et je ne connais pas la vitesse à laquelle le Parlement prend des décisions, mais je pense qu'il prend ses décisions assez lentement, que ce soit au sujet d'une question sur la LCPE ou autre. D'après ce que j'ai lu au sujet de la LCPE, je crois que la loi fonctionne le mieux possible.
    Oui, la science fait des progrès et certaines choses deviennent désuètes; ce qui est vrai aujourd'hui peut ne pas être vrai demain. Je suis souvent témoin de cette situation parce que je donne souvent des conférences et je donne de nombreux cours; les concepts évoluent toujours. Laissez-moi vous donner un exemple.
    Lors d'une conférence, une ancienne étudiante m'a posé une question. Je parlais des anti-oxydants et des compléments alimentaires. Elle a dit: « Vous savez, je me souviens que vous m'avez enseigné à McGill il y a 25 ans », ce qui m'a quelque peu déstabilisé. Elle m'a ensuite dit: « Vous savez, à cette époque, vous disiez qu'il était absolument inutile de prendre quelque type de vitamines que ce soit, mais aujourd'hui vous dites qu'il est peut-être bon de prendre un comprimé de vitamine par jour. Vous voyez comme vous êtes, les scientifiques — un jour vous dites quelque chose et le lendemain vous dites le contraire. Comment pouvons-nous vous faire confiance? »
    Eh bien, je dirais que si les choses ont changé depuis 25 ans, on ne peut pas dire qu'elles ont changé du jour au lendemain, et que si nous disions aujourd'hui ce nous disions il y a 25 ans, alors je serais très inquiet, parce que cela signifierait que la science n'a pas fait de progrès.
    Il est certain que les connaissances au sujet des phthalates ont évoluées énormément. À l'origine, le problème des phthalates est survenu en raison de ce que l'on appelle le phthalate de diéthylhexyle. Il y a eu des effets oestrogéniques sur l'environnement ainsi que différentes questions liées à la toxicité. On a par la suite commencé à examiner différentes molécules, parce que ces phthalates se retrouvaient dans les jouets pour les bébés; c'était une préoccupation réelle parce que les bébés placent leurs jouets dans leur bouche.
    Nous avons par la suite découvert qu'en réorganisant les molécules d'une certaine façon afin d'obtenir ce que l'on appelle le diisononyl phthalates, les effets oestrogéniques n'étaient pas les mêmes.
    Le diisononyl phthalate n'a commencé à être couramment utilisé qu'il y a trois ou quatre ans, ce qui fait qu'en 2000, il n'était pas probablement pas dans l'équation. Oui, je crois que les règlements ont tendance à tarder, mais je sais pas si l'on peut remédier à cela, étant donné que la science évolue sans cesse. Peut-être demain trouverons-nous un autre phthalate qui soit mieux, ou peut-être découvrirons-nous un problème en ce qui concerne le diisononyl phthalate.
    Je crois qu'il est très difficile de faire connaître ces questions, en particulier au public. Une dame m'a téléphoné; elle était inquiète au sujet de son rideau de douche. Pourquoi? Elle avait lu l'étiquette, qui parlait de PVC, polychlorure de vinyle. Elle avait lu quelque part que le polychlorure de vinyle était plastifié avec des phthalates, ce qui est vrai; c'est ce qui le rend souple et mou.
    Nous avions autrefois des disques — vous vous souvenez des disques? On les plaçait sur un tourne disque, puis un plaçait le bras et la musique jouait. Enfin, ces trucs noirs étaient faits de PVC, mais ils étaient très durs. Le rideau de douche est très mou parce qu'on lui a ajouté un plastifiant.
    La dame était inquiète parce qu'elle avait entendu parler des plastifiants et des phthalates. Peut-être croyait-elle que ces substances allaient sauter du rideau de douche et l'attaquer, mais toujours est-il qu'elle avait des préoccupations au sujet de la toxicité. J'ai tenté de lui expliquer qu'il ne s'agissait pas d'un gros problème, mais elle voulait changer son rideau de douche pour un rideau de douche en nylon et n'a pas voulu admettre que ce n'était pas mieux du point de vue de l'environnementale parce que la production du nylon libère en fait de l'oxyde de diazote dans l'environnement, une source importante de gaz à effet de serre plutôt actif.
    Il est difficile de faire comprendre ce type d'informations aux gens, mais l'information évolue constamment. Dans le cas du nylon, il y a maintenant de nouveaux procédés chimiques soucieux de l'environnement qui sont mis en oeuvre et qui ne libèrent pas d'oxyde de diazote dans l'environnement, ce qui fait que si l'on m'avait posé cette question dans six mois, ma réponse aurait pu être très différente. La science est une discipline en constante évolution.
(1715)
    Monsieur Glover, je vois que vous avez très envie de faire un commentaire.
    Oui, merci.
    Je voudrais tout de même répondre brièvement à certains commentaires que nous avons entendus aujourd'hui dans le contexte de la LCPE, par rapport à la question posée par le membre du comité.
    Avec la LCPE actuelle, peu importe le temps, il est important de comprendre que la LCPE prévoit un processus visant à publier une évaluation, à recevoir des commentaires de la part du public et de l'industrie et à formuler une réponse. Encore une fois, je ne défends pas un processus par rapport à un autre ni le temps nécessaire, mais il y a deux points importants à noter. Comme vous avez entendu aujourd'hui lors du débat — et c'est ce qui rend notre travail si simple — nous voyons cela tous les jours. Il n'est pas inhabituel pour quelqu'un qui est insatisfait d'une de nos évaluations, d'un côté ou de l'autre, de présenter de nouvelles données ou une nouvelle formulation. Bien souvent, lorsque les gens ne sont pas satisfaits de nos décisions, c'est une indication qu'il faudrait recommencer, recommencer encore.
    Bien franchement, ce n'est pas ce que nous faisons. Nous nous servons d'une approche fondée sur la valeur probante de la preuve. Nous examinons les nouvelles données présentées, mais nous ne recommençons pas. Nous demandons si cette information modifie de façon considérable les conclusions. C'est notre méthode. Nous avons entendu cela de la part des témoins aujourd'hui. Ce QSAR, cette valeur probante de la preuve, ces données publiées, voilà ce que nous examinons. Nous sommes constamment inondés de nouvelles informations — on nous demande d'examiner ceci, d'examiner cela, de réévaluer. Nous examinons les données, mais nous ne faisons pas toujours une réévaluation. Nous nous servons d'une approche fondée sur la valeur probante de la preuve et ensuite nous décidons s'il est important de revoir une décision.
    L'autre chose à noter, c'est que la LCPE nous permet à mesure que la science évolue de revoir toute substance que nous avons déjà évaluée si nous croyons que les données scientifiques ont changé ou que l'exposition ou les utilisations ont changées et que nous pouvons en arriver à une conclusion différente. Nous pouvons faire une réévaluation; nous nous trouvons constamment devant de nouvelles données et nous utilisons une approche fondée sur le poids de la preuve.
    Merci.
    Monsieur Weinberg.
    Merci.
    J'aimerais parler brièvement du PFOS et des phthalates et ensuite tirer une conclusion générale.
    À mon avis, il est important de suivre l'évolution des connaissances sur les substances qui finissent par se transformer en PFOS et en PFOA. Les signataires de la Convention de Stockholm, un groupe qui étudie les nouveaux produits chimiques, discute actuellement de cette question. Plusieurs personnes croient, en se basant sur les résultats de certaines études, que presque tous les composés perfluorés finiront par se transformer en PFOS ou en PFOA dans l'environnement, et beaucoup d'efforts sont faits actuellement pour prouver ce lien. La question que se posent les signataires de la Convention de Stockholm est la suivante: Est-ce que seul le PFOS doit être inscrit sur la liste ou est-ce qu'on inclut les autres substances qui se décomposent en PFOS dans l'environnement?
    En ce qui a trait aux phthalates, je crois que c'est un bon exemple des problèmes importants que je n'ai pas mentionnés mais dont vous devez tenir compte dans le cadre de la LCPE. Au début des années 90, la CMI a parlé de l'élimination progressive de certains produits chimiques. Cependant, si vous éliminez progressivement certains produits, qu'est-ce que vous proposez comme substitut? Il y a deux façons d'aborder cette question, à mon avis.
    Au début, on niait catégoriquement tout problème avec les phthalates. Des scientifiques et des groupes de défense de l'intérêt public ont dû travailler très fort contre des groupes de pression extrêmement puissants pour montrer l'incidence des phthalates sur les nouveaux-nés et d'autres effets sérieux. Finalement, l'utilisation de certains phthalates a été bannie dans la fabrication de jouets pour enfants et d'autres utilisation semblables. Les phthalates ne sont pas persistants, mais leur utilisation est tellement répandue dans l'environnement que les gens en ont en quantité très élevée dans leur corps, car ils sont exposés très fréquemment à ces produits. La charge corporelle de ces substances est la même que ce qu'on verrait pour un produit persistant .
     La façon dont cela fonctionne avec ce produit chimique et d'autres produits, c'est que souvent, on peut atteindre ou on peut obtenir les mêmes résultats avec plusieurs produits chimiques très semblables. Donc, on défend un produit chimique aussi longtemps qu'on le peut, et ensuite on sort un autre produit, et cela prendra 15 ans pour établir la preuve contre ce produit-là. Pour ce qui est des produits substituts, un des problèmes souvent est la façon dont on fait la promotion des nouveaux produits chimiques. On prend un produit qui, du point de vue structurel et chimique, est très semblable à celui qu'on essaie d'éliminer progressivement, et on le propose comme substitut parce qu'on sait qu'on a entre 15 et 20 ans avant que la preuve puisse être établie pour faire bannir le produit.
    En général, et je crois que c'est quelque chose qu'on voit avec la LCPE et qui devrait être changé, le problème des produits substituts se pose d'une différente façon, et d'une façon qui est souvent mal utilisée. Nous avons entendu parler du nettoyage à sec — et il ne s'agit pas de trichloréthylène mais plutôt de perchloroéthylène, les quatre carbones —
(1720)
    Non, il s'agit bien de trichloréthylène. On peut également utiliser le tétrachloroéthylène, mais le perchloroéthylène coûte moins cher.
    De toute façon, nous pourrions en débattre. Au Canada, je crois que le nettoyage à sec se fait avec le perchloroéthylène. D'ailleurs, c'est une question sur laquelle j'ai travaillé longuement autrefois. En fait, il y a deux semaines, la Californie a décidé d'éliminer progressivement l'utilisation du perchloroéthylène dans le nettoyage à sec. Il y a plusieurs solutions de rechange. Parmi les plus intéressantes sont les systèmes à base d'eau, mais on a cité comme exemple tout à l'heure le dioxyde de carbone, qui risque d'être trop coûteux pour certaines utilisations.
    Il serait important de noter — et Coca-Cola serait très étonné de l'apprendre — que la fabrication du dioxyde de carbone se fait à partir d'une méthode très dangereuse. Le grand volume du dioxyde de carbone qui s'utilise commercialement est capturé en tant que substance résultant de la distillation, etc., ce qui reporte le rejet dans l'environnement. Il ne s'agit pas, en fait, d'une nouvelle fabrication de dioxyde de carbone.
    En général, certains aspects de la clause d'entrée en vigueur différée s'avèrent problématiques. Voilà ce qui explique la difficulté de formuler des solutions de rechange. Si un nouveau produit n'est pas identique à celui qui a causé le problème au départ — le produit préféré par l'industrie — et se propose comme solution radicalement différente, on invoque la clause d'entrée en vigueur différée sous prétexte qu'on n'a pas suffisamment de renseignements sur le nouveau produit.
    Ceci se manifeste dans la LCPE. À l'heure actuelle, en vertu de la LCPE, tout nouveau produit mis en marché après 1986 doit faire l'objet d'un processus d'approbation très rigoureux. En ce qui concerne les produits chimiques protégés avant 1986, les renseignements relatifs à ceux-ci ne sont pas nécessaires, on peut reporter. En conséquence, la situation entrave l'innovation. Actuellement, on favorise beaucoup la chimie verte, mais la situation est telle que le développement d'une approche considérablement différente est ralenti par les obstacles de réglementation énormes afin de prolonger l'utilisation des produits qui existent déjà.
    Je vous suggère fortement une mesure correctrice qui serait de placer les anciens produits chimiques et les nouveaux produits chimiques à parité. Les nouveaux produits chimiques ne devront pas être assujettis aux obstacles plus importants que les anciens produits. Ainsi, on pourrait encourager la chimie verte. On pourrait favoriser le développement des solutions de rechange qui sont plus sûres et moins dangereuses sans décourager involontairement le développement de la chimie verte.
    Cela signifie qu'il nous faut des données valables sur tous ces produits. Je ne veux pas rendre les tests sur les nouveaux produits chimiques moins rigoureux, mais tant qu'on n'applique pas les mêmes normes à tous les produits chimiques, on décourage l'innovation.
    Merci.
    Honorables députés, nous passons maintenant à notre deuxième tour. Au deuxième tour, nous avons cinq minutes pour chaque question et réponse, alors je vous demande à nouveau d'être aussi brefs que possible. Il y en a encore plusieurs qui souhaitent poser des questions.
    M. Rodriguez est le suivant.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Tout cela est très intéressant, mais parfois un peu ardu à suivre lorsqu'on n'a pas de notion en sciences ou qu'on ne siège pas à ce comité depuis longtemps.
    Je voudrais revenir plus spécifiquement à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Selon vous, quelles devraient être les deux ou trois principales recommandations qui émergeront de ce processus de révision?

[Traduction]

    Monsieur le président, je peux rester encore cinq minutes, mais ensuite, malheureusement, j'ai un vol à prendre.
    Le processus prévu par la LCPE est très bon en principe. À mon avis, le fondement de la loi et des règlements est raisonnable. Il y a un problème quant à sa mise en application. La mise en application est en grande partie fondée sur l'évaluation du risque, la communication des risques et la gestion du risque, et non pas la réduction du risque, et encore très peu d'application du principe de précaution, principe sur lequel la mise en application doit être fondée. La communication du risque se fait souvent et régulièrement. Un député avait demandé si le public était suffisamment renseigné.
    Il est très frustrant de discuter avec certaines personnes qui sont chargées de mettre en application la LCPE quand on dit que la stratégie de réduction du risque repose principalement sur la communication des risques. Cette stratégie ne mène pas à une réduction de l'exposition. En fait, il ne s'agit pas d'une mesure de précaution. On dit simplement aux gens qu'il y a du danger associé à l'exposition de certaines substances.
    Le « risque relatif » est un terme qui sème la confusion. Il faut se rappeler ce qui constitue le risque volontaire et le risque involontaire. Lorsqu'on parle du risque relatif on commence à s'interroger sur le niveau de risque de l'exposition à une substance dans un produit par rapport au risque de prendre un avion ou de traverser la rue, c'est-à-dire des actions volontaires.
    Le risque de l'exposition à une substance chimique contenue dans un produit est une question qui pose problème pour la LCPE. Aujourd'hui, on parle de substances qui se trouvent dans certains produits. Le mercure est utilisé dans les thermomètres. Le mercure est extrêmement neurotoxique. Cependant, en vertu de la LCPE, on ne peut pas réglementer le mercure utilisé dans les thermomètres, car c'est un produit.
    Le muscs synthétiques se trouvent dans presque tous les produits, y compris le savon que vous avez utilisé sous la douche de ce matin. Certains produits ne sont que des produits cosmétiques qui ne servent à strictement rien et certains sont même des modulateurs endocriniens ou des carcinogènes. On ne peut pas réglementer ces produits en vertu de la LCPE parce qu'ils s'utilisent dans ces produits. Il faudrait qu'on inscrive dans la LCPE un mécanisme pour la réglementation des substances chimiques présentes dans les produits.
    La conformité au principe de précaution se manifeste par de nombreuses actions et initiatives relatives à la prévention de pollution.
    Voilà donc les trois axes principaux.
    Enfin, en ce qui concerne la question de surveillance, telle que soulevée par le député, il faut des améliorations. Je sais que Santé Canada serait ravi de recevoir de nouveaux investissements appropriés pour la surveillance et la recherche en toxicologie afin de mieux comprendre les dangers pour la santé humaine et les tendances en matière de métabolisme.
(1725)
    Merci beaucoup. Nous savons que vous avez un avion à prendre.
    Monsieur Glover, je vous ai vu hocher la tête, vous désirez répondre.
    Y a-t-il d'autres députés qui aimeraient prendre la parole?
    Oui, monsieur Weinberg.
    Je serai très bref.
    Tout d'abord, parlons des échéanciers. Le processus de caractérisation a bien fonctionné parce qu'il y a des échéanciers à respecter, ainsi que des ressources. Les processus sont susceptibles de s'éterniser tant qu'il n'y a pas d'échéanciers clairs et nets.
    Ensuite, il faudrait favoriser l'approche de précaution — ce que vous appelez « inversion de la charge de la preuve ». À mon avis, il nous faudrait des données pour des produits chimiques qui sont déjà sur le marché, et il nous faudrait une obligation de fournir des données.
    Troisièmement, il nous faudrait un équilibre pour s'assurer que les nouveaux produits chimiques et les anciens sont assujettis au même processus de réglementation. C'est très bien d'exiger des données pour des nouveaux produits chimiques, mais tant qu'on n'exige pas la même chose pour les vieux produits chimiques, il y a un obstacle.
    Quatrièmement, le fait que la LCPE ne traite pas des substances chimiques présentes dans les produits constitue une contrainte sévère. Je pourrais vous citer beaucoup d'exemples, si on veut en parler; une bonne partie des produits chimiques auxquels nous sommes exposés et qui pose un risque pour la santé sont des substances présentes dans les produits, et la LCPE ne traite pas suffisamment cette question.
    Enfin, il faudrait examiner en profondeur les populations et les écosystèmes vulnérables, notamment l'écosystème des Grands Lacs et l'écosystème du Grand Nord. Si vous désirez une explication, je pourrais aller en détail. Dans le Grand Nord, les gens sont très exposés à des produits chimiques qui ne leur apportent aucun avantage, et le même phénomène se produit dans la région des Grands Lacs. Dans les deux régions, il y a des effets profonds sur la santé humaine.
    Merci.
    Merci.
    Nous passerons maintenant à M. Harvey.
    Monsieur Schwarcz, s'il vous est possible de répondre à la question de M. Harvey, veuillez le faire.

[Français]

    Monsieur Schwarcz, j'aimerais d'abord parler de l'étude portant sur les émissions de dioxine en Italie. J'ai eu quatre enfants et ce sont quatre filles. Devrais-je m'inquiéter?

[Traduction]

    En fait, l'expérience à Seveso — ou l'accident qui s'avère être une expérience — est intéressante en ce sens qu'il y a eu une seule exposition importante. Il ne s'agissait pas d'une exposition continue. Il y a une grosse différence entre la toxicité chronique et la toxicité aigüe.
    On n'a pas vraiment vu beaucoup de toxicité aiguë à Seveso. Il y a des animaux qui sont morts. Des personnes ont souffert de chloracné; c'est le symptôme fondamental de l'effet toxique aigu de la dioxine.
    On continue à suivre la santé de ces gens-là, et on ne constate aucune augmentation évidente de quelque forme de cancer que ce soit. On l'aurait vu. Il y a des débats de part et d'autre quant à savoir s'il y a eu une augmentation subtile ou non, mais chose certaine, il n'y a pas eu d'augmentation importante.
    Encore une fois, il s'agissait d'une seule exposition. Ce qui nous préoccupe, c'est une exposition à de petites quantités sur une longue période. Si vous habitiez près de Seveso à l'époque, il est probable qu'il n'y a pas eu de conséquences.
(1730)
    Ce n'était pas vraiment une question.

[Français]

    J'aimerais savoir une chose. Il faut être capable de faire une évaluation véritable. Quand vous en avez parlé un peu plus tôt, on aurait dit des politiciens, puisque les deux points de vue étaient valables. Pour certains, c'est quasiment plus une croyance qu'une réalité. Vous avez dit à plusieurs reprises qu'il s'agissait d'une chose qui était possible.
    Y a-t-il des études sur l'ADN ou sur les cellules humaines qui se font par simulateur, notamment en ce qui a trait à la réaction aux différents produits chimiques? Vous avez parlé plus tôt de faire un test pour savoir si les orignaux pouvaient voler. On peut, bien sûr, les lancer du haut de la tour de la Paix, mais il ne s'agit pas de la meilleure façon de faire.
    Va-t-on bientôt créer des simulateurs pour pouvoir s'assurer que cela a un effet sur le corps? Les spéculations présentes rendent l'évaluation vraiment aléatoire.

[Traduction]

    Aujourd'hui, il y a plusieurs essais in vitro, comme on dit — des études en laboratoire effectuées sur des cultures cellulaires, tout à fait distinctes des recherches effectuées sur les animaux. Souvent, on expérimente les agents cancérogènes et bien sûr les médicaments anticancéreux sur des lignées cellulaires en boîtes de pétri ou sur des cellules implantées dans des animaux.
    Nos techniques ici sont vraiment très avancées, mais il y a aussi de nombreux cas où une substance qui s'est avérée cytotoxique et présentant un danger quelconque lors d'essais en culture cellulaire ne donne pas les mêmes résultats lorsqu'on l'expérimente sur un animal: soit rien ne se produit, soit il se produit quelque chose de pire. L'animal est beaucoup plus complexe que de simples cellules.
    Pour répondre à votre question, il existe bien sûr des essais aujourd'hui que l'on utilise; beaucoup de décisions se fondent sur cela. Lorsqu'il s'agit de déterminer s'il faut continuer à effectuer des recherches sur un nouveau médicament, par exemple, l'on se fie d'abord des conclusions des essais effectués sur des cultures cellulaires; en fonction de cela, il se peut que l'on décide de poursuivre ou non la recherche, mais ces résultats ne nous disent pas toujours à 100 p. 100 ce qui peut se produire chez les organismes vivants.

[Français]

    Ce n'était pas vraiment la question. Sur le plan médical, bien souvent, il faut jusqu'à 10 ans pour observer les effets secondaires d'un médicament ou vérifier si le médicament fonctionne réellement.
    Je parle plutôt d'un simulateur semblable à ceux qui sont utilisés en informatique dans le cadre d'études relatives à la résistance des matériaux de construction, par exemple. En ce qui a trait aux cellules, existe-t-il des simulateurs électroniques ou informatiques de leur comportement, etc.?

[Traduction]

    Oui. En effet, cela se fait. Dans la recherche effectuée aujourd'hui en chimie, nous utilisons très souvent une technique qu'on appelle la modélisation moléculaire. Il faut utiliser un logiciel. On entre la structure d'une molécule et la structure de ce qu'on appelle les récepteurs des cellules. Ce sont des molécules protéiques dans lesquelles s'insèrent des substances chimiques d'une manière qui ressemble à l'insertion d'une clé dans une serrure: le dispositif est ainsi ouvert ou fermé.
    On peut manipuler une molécule sur l'écran de l'ordinateur pour voir comment elle s'insérerait dans un récepteur. On peut en modifier la structure et analyser la façon dont elle s'y insère, et ensuite faire l'étude sur un animal et constater que cela fonctionne.
    Vous avez tout à fait raison; il existe des techniques de modélisation moléculaire qui seront utilisées. L'industrie des cosmétiques, bien entendu, s'y intéresse de près parce que...

[Français]

    Quelle en est l'efficacité?

[Traduction]

    Je dirais que pour l'instant, ce genre de modèles ne fonctionne pas aussi bien que lorsque l'on effectue des essais sur des organismes vivants, mais ça s'en vient. Je crois qu'au cours de la prochaine décennie, on mettra au point des simulations par ordinateur qui donneront une très bonne analyse du potentiel de danger ou d'innocuité d'une substance chimique donnée, surtout dans le domaine des hormones présentes dans l'environnement.
    Je ne peux pas prédire l'avenir. Je sais que vous avez l'impression que les experts se contredisent, mais malheureusement, c'est comme ça dans ce domaine. Il y a cette vieille histoire où un arbitre écoute deux personnes qui discutent de certaines choses; il écoute une version, et ensuite l'autre. Puis une autre personne demande aux deux personnes comment les deux peuvent avoir raison. Et la réponse à cela, c'est, « Savez-vous quoi? Vous avez raison aussi. »
    C'est comme ça que ça fonctionne. En science, rares sont les réponses tout à fait concluantes. Mais je crois que nous sommes sur la bonne voie, et en fonction des données scientifiques dont nous disposons aujourd'hui, nous pourrons mieux prévoir quelles sont les substances dont il faut s'inquiéter et quelles sont celles qui sont moins inquiétantes.
    Je sais que vous préféreriez une réponse plus concrète. Malheureusement, je ne crois pas que ce soit possible à ce stade-ci.
    La complexité chimique de la vie est tellement vaste que sa modélisation en laboratoire ou par ordinateur est un défi de taille. Le corps humain est la machine la plus complexe qui existe sur la planète. C'est beaucoup plus compliqué que n'importe quel ordinateur, et nous ne pourrons pas le modéliser sur une base prédictive parfaire. 
(1735)
    Monsieur Harvey, nous devons passer à quelqu'un d'autre. Merci.
    Je ne peux pas résister. Je croyais que M. Rodriguez porterait son maillot de soccer. Je l'ai vu, mais il ne l'a pas porté.
    Mais M. D'Amours, il faut que cela fasse.
    Monsieur D'Amours.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    On parle du processus de révision de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Cela m'amène à vous parler de ce qui se passe près de chez moi, dans ma province du Nouveau-Brunswick. Il s'agit d'un incinérateur.
    J'aimerais obtenir votre opinion sur cette question. Je crois que cela aura des répercussions sur la qualité de vie de la population et sur l'environnement. Initialement, on parlait de brûler au Nouveau-Brunswick ou au Québec des hydrocarbures en provenance des États-Unis. Maintenant, on dit qu'il pourrait y avoir des BPC en plus des hydrocarbures. J'aimerais connaître votre opinion sur ce sujet.
     Cela ne se passe pas directement chez moi, mais dans une circonscription voisine. Certes, lorsqu'on parle d'incinérateur, il y a des risques au niveau de l'environnement, notamment à cause du transport de ces matières. On dit qu'on veut améliorer la qualité de vie des citoyens. On veut donc s'assurer de la qualité de l'environnement et des écosystèmes.
    J'aimerais connaître votre opinion sur l'impact des incinérateurs sur l'environnement.

[Traduction]

    Merci.
    J'aimerais signaler d'entrée de jeu que les BPC avaient été désignés pendant les années 1970 pour être éliminés progressivement, et je crois qu'il est absolument remarquable qu'aux État-Unis et au Canada, il y a encore d'importantes quantités de BPC qui n'ont pas encore été traités. Cette situation est attribuable au débat qui entoure l'incinération des produits et le fait que les collectivités ne veulent pas que ces produits soient incinérés dans leur région, et ce pour d'excellentes raisons. Lorsque ces produits sont entreposés à perpétuité, ils continuent à dégager dans l'environnement des agents polluants et les gens craignent que ces substances soient émises par les incinérateurs. Je pense particulièrement à ce qu'on a appelé plus tôt l'équivalent toxique de la dioxine. Les BPC peuvent dégager le même type de substance toxique, ce qui signifie que même s'ils ne sont pas incinérés, ils causent quand même des problèmes.
    Il y a déjà un bon moment, des gens d'affaires et des scientifiques canadiens ont créé d'excellentes technologies pour détruire les BCP. Le processus que je connais le mieux s'appelle la réduction chimique en phase gazeuse. C'est un ancien scientifique d'Environnement Canada qui a créé la technologie de la RCPG. La compagnie a fermé ses portes, non pas parce que ce processus ne fonctionnait pas chaque fois qu'on l'essayait, parce que les résultats étaient magnifiques, et c'est la seule technologie que les ONG du monde entier aimaient beaucoup — mais plutôt parce que le secteur de l'incinération est tellement puissant qu'il a toujours été en mesure de jeter des bâtons dans les roues chaque fois qu'un effort était fait pour passer à un autre processus d'élimination.
    Ainsi, la RCPG est une très bonne solution au problème. Il y en a d'autres. Je ne suis pas tout à fait aussi convaincu de l'utilité de certaines des autres techniques. Il y a quelque chose qu'on appelle parfois la déchloration par catalyse basique et qu'on appelle aussi parfois la décomposition par catalyse basique. On a changé le nom à un moment donné. Quand on a essayé cette technique les premières fois, il y avait certains problèmes, mais on m'a dit qu'ils étaient beaucoup moins nombreux lors des derniers essais. Il y a peut-être d'autres techniques, mais il s'agit-là des deux que je connais bien.
    Si vous avez des BPC purement liquides et que c'est le seul produit que vous voulez éliminer, il serait peut-être plus économique d'utiliser la DCB, la décomposition par catalyse basique, mais je ne suis pas certain. Personnellement je préfère la RCPG, quoique la compagnie canadienne qui vendait ce processus n'existe plus et je ne sais pas si quelqu'un va acheter les droits de propriété intellectuelle pour continuer à vendre le produit.
    Il est vrai qu'il faut s'attaquer au problème que posent divers produits comme les BPC. Le transport présente un gros problème. L'entreposage aussi, parce qu'il s'agit de composés semi-volatiles. Si vous les transportez, les déplacez, les entreposez puis les envoyez à l'incinérateur, il se peut fort bien que vous semiez autant d'éléments polluants toxiques dans l'environnement que si vous aviez simplement incinéré les produits.
    Il faut tenir compte de tous ces facteurs, mais je crois que l'incinération n'est pas la bonne technologie à employer. Je crois que la bonne technologie existe. Malheureusement, le Canada et les États-Unis ont continué à créer des réserves de BPC, et ceux qui ont créé de nouvelles technologies n'ont jamais pu réussir, non pas parce que ces technologies n'étaient pas bonnes, mais simplement parce qu'ils n'avaient pas de clients. C'est un grave problème.
    Je ne sais pas dans quelle mesure cela touche la LCPE, mais je crois qu'il s'agit d'une question fort importante et je crois qu'il existe de bonnes solutions au problème. Je crois tout simplement qu'au fil des ans, on a créé des obstacles parce qu'il existe depuis longtemps une industrie qui construit des incinérateurs et qui vend tout le matériel d'épuration des fumées qui accompagne ces technologies. Ce groupe a été très efficace au niveau politique, et les nouvelles industries qui avaient de bien meilleurs processus n'ont jamais eu la chance de prendre de l'expansion.
    Merci
(1740)

[Français]

    Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais poser une question brève.
    Le fait qu'on apporte chez nous des polluants d'un autre pays afin de les traiter pose problème. Vous l'avez bien mentionné, c'est une question de transport. Le transport peut être aussi à risque que n'importe quelle autre chose. C'est souvent pire.
    D'un point de vue environnemental, croyez-vous qu'il faille s'assurer, si on a à traiter certaines substances, qu'on traite nos propres produits, et non ceux de nos voisins? Il est déjà dangereux pour notre environnement de traiter nos propres produits toxiques. Ce n'est certainement pas en prenant ceux des autres qu'on va améliorer notre environnement.

[Traduction]

    Je me souviens — je crois que c'était pendant les années 80 — un chargement de BPC provenant du Royaume-Uni est arrivé au Canada et je crois qu'à son arrivée dans le port de Montréal, il y a eu tant de protestations qu'ils ont dû le retourner d'où il venait. Il est certain qu'importer des BPC du Royaume-Uni au Canada n'a aucun sens, parce que cela revient à les envoyer dans le pays où la réglementation est la plus faible et, par conséquent, la moins coûteuse.
    Aux États-Unis, on dit que le Canada peut parfois avoir de très bonnes lois, mais que celles-ci ne sont pas réellement mises en application, ce qui fait qu'il est moins coûteux de faire ce genre de choses au Canada. Je crois que si les BPC sont envoyés au Canada, il y a une raison. Si on les envoie dans une collectivité pauvre au Canada, on connaît la raison — il s'agit d'une solution peu coûteuse pour régler le problème. Le problème devrait être réglé dans le pays d'origine.
    J'ai une attitude différente envers les polluants toxiques provenant d'Afrique, des régions pauvres d'Asie, ainsi que des régions pauvres de l'Amérique latine; je suis davantage en accord avec l'idée de renvoyer les BPC dans le pays qui les a produits à l'origine, et les pays n'ont pas la capacité technique ou les ressources nécessaires pour faire face à ce problème. Il s'agit donc d'un enjeu différent et c'est plus compliqué.
    Mais je dirais que si on souhaite transférer des déchets des États-Unis vers le Canada, il s'agit d'une question d'argent, et ce n'est pas à cause du dollars canadiens ni du coût de la main-d'oeuvre. Il s'agit d'une question d'argent, puisqu'on s'attend à ce que les contrôles environnementaux soient moins stricts ici.
    Je vous conseille donc de renforcer vos contrôles environnementaux et de mieux appliquer la loi, et de continuer à refuser les déchets provenant des autres pays.
    Merci.
    Continuons avec M. Vellacott. Ce sera la dernière question, puis nous donnerons la chance à M. Glover et à Mme Taylor de conclure.
    Monsieur Vellacott.
    Merci.
    Si je comprends bien et si mes renseignements sont exacts, Santé Canada semble planifier une étude nationale auprès de 5 000 personnes afin d'étudier leur exposition à des substances toxiques pendant deux ans, soit de 2007 à 2009.
    Lorsque j'ai appris cela, je me suis demandé — j'ai trois questions, et la première irait dans ce sens — si cette période est assez longue. À première vue, selon moi, il aurait fallu une période plus longue pour être en mesure de juger des effets, mais il y a peut-être des aspects de l'étude que je ne comprends pas. M. Glover a peut-être des commentaires à formuler à cet égard, mais j'aimerais que le Dr Schwarcz ou que M. Weinberg réponde également à ma question.
    En deuxième lieu, si j'ai bien compris ce que M. Weinberg a dit au sujet de ces nombreux produits chimiques lipophiles — et je ne sais pas quels pourcentages de produits chimiques sont « lipophiles » — à quelle quantité leur présence devient-elle dangereuse? Je crois que le terme utilisé était « charge corporelle totale ». Il s'agit de savoir la quantité contenue dans le gras corporel, si vous voulez.
    Ainsi, est-il pertinent de réaliser des essais — ou de la biosurveillance, si vous préférez — à partir du sang et de l'urine des personnes, alors que dans certains cas, les effets négatifs résultent surtout de la présence de ces produits dans le gras corporel? C'est là où devraient être recherchées les concentrations dangereuses. J'aimerais que vous me donniez la réponse à cette question. Je ne sais pas si c'est de l'EDP qu'on parlait — c'est possible — mais voilà ma deuxième question.
    En dernier lieu, j'ai été quelque peu intrigué par quelque chose — ce n'est rien de nouveau, de nombreuses personnes en ont parlé et on en a même parlé ici à quelques reprises. Monsieur Weinberg, vous avez parlé d'une « prédisposition » au cancer de la prostate qui est induite chez le foetus, avant la naissance.
    Ainsi, les essais que nous faisons sont-ils faits chez des sujets trop âgés et devrions-nous tenter d'en faire chez des sujets plus jeunes? Pour ainsi dire, il est trop tard si la plupart des effets et si la prédisposition sont causés par des conditions qui prévalent avant la naissance, chez foetus. Sommes-nous à la traîne dans cette situation? Et comme je l'ai dit, il est trop tard lorsque la plupart des dommages sont faits...
    J'ai un fils de 12 ans qui est atteint du syndrome d'Asperger. J'imagine qu'il y aura un débat intéressant à ce sujet au cours des prochaines années. Il semble y avoir une augmentation rapide de l'autisme et d'autres maladies semblables chez les enfants. Ces maladies sont-elles causées lors de la période précédant la naissance? Peut-être que la biosurveillance et les essais sont effectués chez des sujets beaucoup trop âgés. Peut-être devrions-nous faire les essais chez le foetus?
    Voilà mes trois questions compliquées. Je suis certain que les réponses pourraient être longues.
(1745)
    Qui veut commencer?
    Monsieur Scharcz.
    La biosurveillance est un projet à long terme puisque ce qui nous intéresse vraiment, c'est de connaître les tendances. À mon avis, les chiffres absolus à ce stade-ci ne veulent pas vraiment dire grand-chose puisque nous n'avons pas de valeurs de référence.
    Nous surveillons le sang parce que c'est la méthode la plus simple. Bien sûr, l'échantillonnage de tissus est beaucoup plus difficile, et les gens ne se bousculeraient pas pour se faire prélever la graisse — certains diront oui... dans le cas de la liposuccion. Il y a une hypothèse de départ qui veut que lorsque l'on mesure la concentration sanguine, cela donne aussi une indication des composés liposolubles qui sont présents dans la graisse. Par ailleurs, il faut se rappeler le même argument que j'ai utilisé: la présence d'une substance dans le sang ne veut pas dire que cette substance cause des dommages; la présence d'une substance dans le gras ne veut pas non plus dire que cela est nocif pour la santé.
    À mon avis, la bioaccumulation est souvent assez mal interprétée, et je crois qu'il serait très difficile de rendre justice à ces questions en quelques minutes. Ce que je vous recommande de faire, c'est de lire un livre intitulé The Dose Makes the Poison, d'Alice Ottoboni. Je vous recommande de lire ce livre parce qu'il contient beaucoup plus de détails que ce que nous pouvons vous donner ici. C'est un excellent livre sur la toxicologie. Il contient les délais qui sont vraiment pertinents et de l'information pour vous aider à comprendre ce qu'est la bioaccumulation, de même que des indications pour savoir si vous devez vous préoccuper ou non de l'accumulation dans le gras corporel. La simple présence d'une substance dans le gras ne signifie pas que c'est nocif pour la santé.
    Il faut commencer quelque part. Nous avons commencé avec le processus de biosurveillance. Le CDC aux États-Unis est expert en la matière, et nous surveillerons les tendances à l'avenir. La question importante est de savoir si on peut relier les concentrations sanguines à des phénomènes observables chez les humains, et jusqu'à maintenant, à ma connaissance, cela n'a pas été le cas. C'est ce que nous examinons, mais pour ce faire, il faut avoir des données. C'est pourquoi nous sommes présentement en période d'accumulation de données.
    La question que vous avez posée, à savoir s'il est trop tard ou non pour faire les essais chez les adultes est une très bonne question. Je dirais qu'il faut commencer quelque part. Il se peut que nous soyons trop tard pour aujourd'hui, mais non trop tard pour la prochaine génération. Il faut recueillir les données et voir ce que nous pouvons en faire.
(1750)
    Merci.
    Je crois que toute mesure prise est bonne. Je crois qu'à plus long terme...par contre, vous voudriez peut-être tirer des leçons de votre étude initiale et ensuite mettre à jour votre méthodologie. Donc, je ne sais pas si vous parlez d'une longue étude ou de plusieurs études. Il est cependant vrai que les charges corporelles ne vous révèlent que ce qui est présent dans l'organisme, elles ne vous disent pas grand-chose à propos de l'impact de ces substances. J'y reviendrai plus tard.
    Quant à la question du sang dans l'urine, le sang contient des lipides; le sang transporte des graisses. Et comme le sang contient des lipides... Je ne connais pas les formules. Il existe une bonne formule dont vous pouvez vous servir — un prélèvement de sang comme élément auxiliaire pour estimer le taux de lipides dans le sang. Donc oui, je crois qu'à toute fin pratique, les prélèvements de sang vous indiqueront ce qui se trouve dans les graisses. Il ne s'agit pas tout simplement de multiplier ce résultat par le nombre de litres de sang dans le corps. Il faut faire des calculs plus complexes.
    Les échantillons d'urine sont révélateurs, mais ce sont les produits chimiques bioaccumulables qui donnent lieu à des préoccupations. Ils ont tendance à être liposolubles et non pas hydrosolubles. La plupart des processus d'épuration de l'organisme sont hydrosolubles. Les reins éliminent efficacement les substances toxiques hydrosolubles, mais pas les substances toxiques liposolubles. Il faut tenir compte du métabolisme, et je crois qu'on peut obtenir des données à partir des échantillons d'urine quant aux substances hydrosolubles et quant aux sous-produits provenant d'autres substances. Dans le cas des produits chimiques dont nous parlons ici, les prélèvements de sang vous donneront une meilleure idée de ce qui se passe dans l'organisme.
    Est-ce trop tard? Il était probablement trop tard en 1930, lorsque nous avons créé ces produits chimiques, mais il n'est jamais trop tard, car il y aura toujours une autre génération. Je vous ai donné de l'information sur la prostate; j'ai obtenu cette information au début des années 90 lors d'un atelier organisé par la CMI. C'est trop tard si des mesures ne sont prises en fonction de cette information. Les obstacles qui nous empêchent de prendre l'information qui existe au sein de la communauté scientifique — de surmonter les critiques, les doutes, les délais — sont tels que l'action prise par les législateurs, les régulateurs, et ainsi de suite, est trop tard. D'une certaine façon, nous pouvons raffiner nos connaissances. C'est absolument vrai. Lorsqu'on a créé les BPC, on l'a fait parce qu'on les considérait comme étant très stables et non toxiques. Maintenant, tout le monde au Canada et aux États-Unis s'entendent pour dire que les BPC sont toxiques.
    Lorsque la Convention de Stockholm a été négociée, j'ai entendu la même histoire de je ne sais pas combien de pays: les BPC ne peuvent pas faire de mal, car les électriciens s'enlèvent la graisse des mains avec les BPC lorsqu'ils ont fini leur travail. Ils ramènent ces substances à la maison, et dans certains pays on s'en sert comme substitut à l'huile de moutarde pour faire la cuisson. Nous n'avons pas encore vu de problèmes. Donc les anecdotes sur la non-toxicité continueront jusqu'au jour où on prendra des mesures législatives ou réglementaires.
    Monsieur Weinberg, excusez-moi de vous interrompre, mais notre temps s'écoule rapidement. Je veux donner l'occasion à M. Glover et à Mme Taylor...
    Nous avons déjà dépassé neuf minutes, et c'est la ronde de cinq minutes, monsieur Vellacott.
    Nous céderons la parole à M. Glover.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais répondre très rapidement à la question posée par l'honorable député en vous donnant une brève histoire de nos activités. En tant que directeur général du programme à Santé Canada, je trouvais que l'on se dirigeait sans gouvernail. J'ai lancé un défi aux employés, soit de songer à un programme de biosurveillance qui nous servirait de référence, de point de départ.
    D'aucune manière nous considérons les 5 000 personnes comme étant un chiffre suffisant. Il s'agit d'une étude ponctuelle. Il nous fallait un point de départ. Il fallait déterminer par où commencer. Je tiens à remercier Statistique Canada, dont les fonctionnaires ont comparu avec nous la dernière fois, et avec qui nous travaillons en partenariat. Une des raisons pour laquelle l'étude portera sur 5 000 personnes, c'est que c'est tout ce qu'on pouvait faire. Ce qui nous aidera, c'est de trouver un moyen de rendre le programme plus systématique et continu.
    Voilà donc un bref survol de notre cheminement et de nos contraintes. Je tiens à souligner qu'il s'agit d'un point de départ dont on avait fortement besoin.
    Pour ce qui est de savoir si nous commençons trop tard, nous nous intéressons également beaucoup aux échantillons de sang ombilical. Nous avons d'autres travaux en cours avec des hôpitaux et des universités qui consistent notamment à déterminer l'exposition foetale à des substances à partir d'essais chez la mère. Ces données de base seront très révélatrices. Nous essayons d'entamer ce travail le plus tôt possible.
    Monsieur le président, voilà donc ma réponse à cette question. Je voudrais revenir sur d'autres questions soulevées.
(1755)
    En fait, notre temps est presque écoulé.
    Peut-on entendre M. Glover et Mme Taylor le plus rapidement possible?
    Allez-y.
    Je vous remercie de nous permettre de participer à cette séance aujourd'hui.
    J'aimerais rappeler aux membres du comité ce que fait la LCPE dans les différents domaines dont on a parlé aujourd'hui, parce qu'essentiellement, je crois que c'est ça le travail que vous avez devant vous. Je vais donc vous rappeler ce que la LCPE fait et ne fait pas, et quelle est notre position, en tant que ministère, en matière de biosurveillance.
    Comme j'ai déjà dit lors de réunions précédentes avec vous, nous voyons la biosurveillance comme étant un outil pour mesurer les progrès, identifier les tendances, nous aider à établir des priorités et à interpréter les résultats des mesures que nous avons prises. Est-ce que ces mesures sont assez efficaces? Faut-il en faire plus? Ce n'est pas une panacée, mais c'est un élément important qui nous aide à mesurer le succès.
    J'aimerais également vous signaler qu'on ne peut pas tout mesurer par la biosurveillance. Oui, les substances persistantes bioaccumulables sont importantes. Certaines substances sont hautement réactives et changent lorsqu'elles sont introduites dans l'organisme; ces substances nous rendent malades, et il y a moyen de les déceler. Ces substances sont également importantes en raison de leur impact sur la santé humaine et des maladies qu'elles créent, donc il nous faut un système pour traiter de tous ces aspects.
    Quant à l'autre question portant sur les mesures du succès, la LCPE a trois objectifs de base: la prévention de la pollution, la protection de l'environnement et la protection de la santé humaine. Si on résume la LCPE, c'est ce qu'elle fait. Ce qui est important, c'est de déterminer comment mesurer le succès par rapport à ces trois critères. Je crois que plus nous déterminons clairement comment nous serons évalués dans l'avenir, plus ce sera facile de mettre en place des outils pour répondre à ces questions. Donc, la LCPE a trois objectifs de base, et il s'agit de déterminer les critères dont nous nous servirons pour faire ces mesures, ce qui, évidemment, représente tout un défi.
    On nous a parlé de prudence, on nous a parlé d'une approche axée sur le risque.... À titre de rappel aux membres du comité, la LCPE fait les deux. Comme j'ai dit lors d'une comparution précédente, la loi est axée sur le risque, c'est de cette façon que nous faisons notre travail... le danger et l'exposition afin de comprendre les risques. Mais la prudence fait également partie inhérente de la loi, nous permettant d'agir en l'absence de certitude. Donc la LCPE comporte les deux éléments, tel que le débat en témoigne. Ce sont des outils dans la loi qui sont à notre disposition, et nous nous efforçons de les utiliser. On vous a fait des commentaires sur notre capacité de mettre en oeuvre cette approche axée sur le risque et la prudence, mais je vous signalerai que ces deux éléments sont déjà dans la loi actuellement.
    Nous avons également entendu parler du renversement du fardeau de la preuve, et l'idée d'imposer le fardeau de la preuve à l'industrie. La LCPE nous permet de faire cela. Quant aux nouvelles substances, c'est nécessaire; les compagnies doivent nous fournir ces données. Ce fardeau de la preuve existe pour les nouvelles substances. Pour les substances existantes, grâce à l'article 71, nous pouvons exiger la production de données de la part de l'industrie; nous pouvons imposer le fardeau de la preuve à l'industrie. Ces outils sont déjà convenus dans la loi.
    Enfin, pour résumer, on nous a parlé de l'Enregistrement, évaluation et autorisation des substances chimiques, REACH. J'aimerais juste vous signaler que la proposition REACH n'a pas encore été adoptée en Europe; elle fait et a déjà fait l'objet d'un grand débat, et elle a été modifiée. Je ne dis pas qu'il ne faut pas l'examiner, mais à mon avis, le Canada a une loi solide, et la partie portant sur les catégories, que nous allons terminer d'ici le mois de septembre, fera de nous un chef de file mondial. Aucune autre administration n'a fait ce que nous allons faire, c'est-à-dire de passer en revue chacune des substances existantes pour déterminer si elles sont persistantes, bioaccumulables et d'une toxicité intrinsèque; quels sont les risques d'exposition chez l'humain; et si ces substances sont dangereuses pour les humains. Ensuite, nous pourrons établir les priorités, qui dépasseront de loin celles des autres pays; nous pourrons aussi aller de l'avant, quant à savoir ce que nous comptons évaluer, comment nous comptons le faire, comment nous allons gérer les risques, et quels fardeaux nous allons imposer à l'industrie quant aux données ou aux mesures à prendre.
    Étant donné le nombre de substances en utilisation dans un pays donné, il sera toujours important de prioriser, qu'il s'agisse de la proposition REACH en Europe, ou des programmes américains d'intendance, compte tenu des défis de haute production et de grand volume. La LCPE comporte déjà ces catégories, ce qui nous aidera en tant que pays à établir des priorités quant à ce qu'il faut faire. Je crois que c'est un aspect important, au moment où nous mesurons les succès. Nous avons une longueur d'avance sur le monde dans le domaine des substances existantes.
    Merci.
(1800)
    Merci.
    Madame Taylor.
    Plutôt que de mettre l'accent sur la mesure du succès, je voudrais porter quelques précisions.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Oui.
    Je ne suis pas du tout contre l'idée de poursuivre la discussion, mais le comité n'a pas encore adopté une motion comme quoi il souhaite prolonger le temps accordé.
    Voulez-vous proposer la motion?
    Oui.
    Je propose que l'on prolonge le temps accordé à Mme Taylor.
    (La motion est adoptée.)
     Je tiens à signaler que la LCPE nous donne le droit de réglementer les produits. Nous sommes en droit de réglementer la vente, la fabrication et l'importation des produits. Certains aspects des produits ne sont pas de notre ressort, tels que la conception même du produit. Cependant, il est important de rappeler que la LCPE prévoit certains mécanismes de réglementation.
    En ce qui concerne l'importation et l'exportation de déchets dangereux, la LCPE prévoit pour nous un cadre de réglementation. Il existe un processus de réglementation pour l'importation et l'exportation des produits comme les BPC. C'est quelque chose qui est prévu dans la loi, et nous nous intéressons beaucoup à cet aspect-là.
    On entant beaucoup parler -- on revient un peu à la question de la mesure du succès -- et c'est assez intéressant, de règlements pour le nettoyage à sec, alors qu'il existe un tel règlement actuellement. Nous sommes en train de réglementer le rejet des produits de nettoyage à sec. En fait, il s'agit d'un règlement pour lequel nous avions utilisé un de nos nouveaux outils d'application. Lors du dernier exercice financier, nous avons émis plus de 100 ordres d'exécution relatifs à la protection de l'environnement obligeant les établissements de nettoyage à sec de cesser leurs activités tant qu'ils ne se conforment pas au règlement.
    Voilà une des façons dont on applique la LCPE. Je voulais soulever ce point avec vous aujourd'hui.
    Une petite précision. Il y a eu une discussion entre nos deux invités concernant le nettoyage à sec et les produits chimiques utilisés. Il y a eu un désaccord sur...
    Il ne s'agissait pas d'un désaccord. Tous ces hydrocarbures chlorés peuvent être utilisés comme agent de nettoyage à sec. Que ce soit le perchloroéthylène ou le trichloroéthylène, la seule différence, c'est qu'il y a une molécule d'hydrogène à la place du chlore. Les deux peuvent être utilisés. Le perchloroéthylène est plus économique et plus courant. Par contre, on entend beaucoup parler du trichloroéthylène parce que c'est un produit plus toxique.
    Le trichloroéthylène est surtout utilisé pour le dégraissage des pièces de métal. Il est rarement utilisé pour le nettoyage à sec.
    J'ignore si c'est pertinent...
    Nous sommes en train de réglementer ces deux produits. Nous sommes en train de réglementer le perchloroéthylène qui est utilisé pour le nettoyage à sec et pour le dégraissage. Ces deux produits font l'objet d'une réglementation.
    Merci.
    Y a-t-il d'autres questions, très rapidement?
    Je voudrais remercier nos invités. Nous apprécions beaucoup votre présence au comité. Nous apprécions également toutes les explications et les précisions. C'était extrêmement intéressant. Merci beaucoup.
    Monsieur Schwarcz, il se peut que nous vous invitions au moment de la fête de la St-Valentin pour parler d'amour.
    Merci.