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Merci, monsieur le président. Je suis très heureux de pouvoir m'adresser à vous dans le cadre de cette révision de la LCPE.
Je m'appelle Kapil Khatter. Je suis médecin de famille et je travaille avec Pollution Watch, qui est un projet commun de Défense environnementale et de l'Association canadienne du droit de l'environnement.
La LCPE est l'épine dorsale de la législation canadienne sur l'environnement. On y trouve les pouvoirs nécessaires pour réagir aux principaux problèmes environnementaux du Canada : les polluants organiques persistants qui s'accumulent dans nos organismes, les gaz à effet de serre qui peuvent provoquer le changement climatique, des métaux comme le mercure qui contaminent nos poissons, notre faune et nous-mêmes. La LCPE donne au gouvernement fédéral le pouvoir de réglementer tous les produits chimiques, polluants atmosphériques ou gaz à effet de serre susceptibles de mettre en danger la santé humaine ou l'environnement. Elle offre au gouvernement une vaste panoplie d'outils pour réduire la pollution et prévenir les dommages.
La question à laquelle nous devons répondre est de savoir si la LCPE est efficace ou non et, si elle ne l'est pas, comment on peut la réparer. Notre argument est que la Loi n'a jamais été efficace parce qu'elle n'était pas bien conçue. Cela ne veut pas dire qu'il faille l'abandonner mais plutôt qu'il convient d'y apporter certains changements importants pour bien protéger notre environnement et notre santé.
C'est pour cette raison que nous pensons que le comité doit entreprendre une révision exhaustive de la Loi, en tenant des audiences publiques. Le comité devrait envisager cette révision comme une enquête sur l'état de la pollution au Canada, afin de déterminer si la LCPE a donné les résultats voulus pour assurer la qualité de l'air, de l'eau et de nos aliments.
Bon nombre d'informations montre que le Canada ne parvient pas à résoudre ses problèmes environnementaux et qu'il prend du retard à l'échelle internationale. Selon une étude récente de données de l'OCDE, il est 28e sur 29 pays de l'OCDE en ce qui concerne les émissions, 29e en ce qui concerne les composés organiques volatils, 27e en ce qui concerne les oxydes de soufre, 26e en ce qui concerne les oxydes d'azote, etc. Selon l'Association médicale de l'Ontario, la pollution atmosphérique dans la province est à l'origine de 1 900 morts prématurées, de 9 800 admissions à l'hôpital, et de 13 000 consultations en salle d'urgence, ce qui coûte à cette seule province plus de un milliard de dollars par an en frais d'hôpitaux et en absentéisme au travail. En 2003, les installations industrielles du Canada ont rejeté plus de 4 milliards de kilos de polluants dans l'atmosphère, et la situation a empiré depuis lors. Les émissions de gaz à effet de serre du Canada ont augmenté plus que dans n'importe quel autre pays du G-8 au cours de la dernière décennie, la hausse ayant été de 19 % entre 1990 et 2001. Selon une comparaison récente des sites industriels canadiens et américains autour des Grands Lacs, nous émettons par installation 93 % de plus de polluants atmosphériques susceptibles de causer le cancer, et près de quatre fois plus de polluants causant des problèmes de reproduction ou de développement.
Les États-Unis ont adopté des normes juridiquement exécutoires en ce qui concerne la qualité de l'air ambiant et la qualité de l'eau, ce que le Canada n'a pas fait. Ils ont des règlements rigoureux et ont négocié des ententes avec les entreprises pour éliminer progressivement certains des produits chimiques les plus persistants et les plus toxiques, comme ceux que l'on trouve dans les produits ignifuges et les produits antitaches, alors que nous n'avons même pas fini nos évaluations. Les États-Unis ont un programme exhaustif d'analyse de l'accumulation de produits chimiques dans le corps. Quant à nous, nous ne savons même pas à combien de plomb nos enfants sont exposés à l'heure actuelle.
La LCPE nous a permis de faire de bonnes choses dans certains domaines, par exemple pour analyser les produit les plus persistants et bioaccumulatifs. Entre-temps, les Européens ont créé le programme REACH -- enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques -- qui permet d'interdire la commercialisation de produits chimiques dont on n'a pas l'assurance qu'ils sont absolument sûrs. Avec notre propre Loi, nous ne pouvons même pas rêver de faire l'équivalent. Comme l'Europe est le plus grand marché de produits chimiques au monde, on peut se demander comment il se fait que des entreprises canadiennes qui respectent ces normes ne sont pas capables de respecter les nôtres.
La LCPE n'exige pas que les problèmes soient réglés une fois qu'ils sont découverts. Elle ne fixe pas d'échéancier obligatoire et, de ce fait, même si l'on constate qu'un produit chimique est très dangereux pour l'environnement, les processus gouvernementaux pour le réglementer peuvent être lents et inefficaces. La LCPE ne s'applique pas directement à un nombre élevé de substances chimiques que l'on trouve dans les produits de grande consommation. Or, nous apprenons peu à peu que certains contiennent des niveaux inacceptables de toxines mais, en vertu de la LCPE, c'est le gouvernement qui est tenu de démontrer qu'ils sont dangereux, au lieu d'obliger les fabricants à prouver que ce qu'ils nous vendent ne nous causera aucun tort.
La LCPE nous permet quasiment d'éliminer les produits les plus dommagebales mais le mécanisme d'élimination prévu dans la Loi ne fonctionne pas et il convient de rationaliser les procédures. Un seul produit a jamais été inscrit sur la liste d'élimination virtuelle depuis que la LCPE a été adoptée.
il nous faut une LCPE permettant d'éliminer les polluants organiques persistants qui s'accumulent dans le lait maternel, une LCPE qui mettra fin à la pollution atmosphérique causant des crises d'asthme, une LCPE qui permettra d'éviter que des métaux comme le mercure contaminent les gens et la faune, et une LCPE qui nous permettra de récupérer les Grands Lacs et d'en rebâtir les écosystèmes.
Pour être tout à fait juste, il faut convenir que notre connaissance de la pollution a beaucoup changé depuis 1999. Nous savons mieux aujourd'hui que les enfants sont plus vulnérables et nous avons constaté que certaines doses réduites de produits chimiques sont plus dangereuses que nous le pensions. Nous savons que le prix économique de la pollution atmosphérique, tout comme son prix sur le plan de la santé, est largement supérieur au prix de la réglementation par le truchement de la LCPE. Nous savons que le mercure et les produits chimiques persistants sont transportés vers le nord, dans l'atmosphère, où ils contaminent les aliments et les autochtones.
L'heure est maintenant venue de revoir la LCPE en fonction de tous ces facteurs. La question n'est pas de savoir si les procédures établies depuis 1999 ont donné des résultats mais plutôt si la LCPE nous a aidé à protéger notre pays contre la pollution des produits chimiques persistants, des métaux toxiques et des particules atmosphériques. La LCPE a-t-elle permis de protéger les grands bassins démographiques, comme la région des Grands Lacs, contre la pollution environnementale ? Selon nous, selon les asthmatiques, selon les personnes en difficulté d'apprentissage, selon les victimes du cancer, la réponse est non.
La LCPE peut être complexe parce que les problèmes à résoudre le sont aussi. Il existe beaucoup d'experts qui peuvent nous aider à répondre aux questions -- des organismes de la santé, des associations industrielles, des scientifiques, des groupes autochtones, des agents de la santé publique, des représentants des enfants, et des experts internationaux. Si l'on veut effectuer une révision exhaustive, comme c'est prévu dans la Loi et comme le gouvernement l'a récemment promis dans le Discours du Trône, il faudra entendre les représentants de tous ces groupes. C'est seulement ainsi que l'on pourra cerner les problèmes et commencer à trouver des solutions.
Je vous remercie de votre attention.
[Français]
Je suis désolé, mais je n'ai pas eu le temps de faire traduire ma présentation.
[Traduction]
J'ai reçu l'invitation hier seulement. J'ai donc remis mon texte en anglais seulement.
[Français]
J'invite les francophones à s'adresser à moi en français, mais je leur répondrai en anglais.
[Traduction]
Je n'aurais malheureusement pas suffisamment de temps aujourd'hui pour vous fournir une analyse détaillée des forces et des faiblesses de la LCPE mais j'espère qu'un examen rapide de certaines des réserves exprimées depuis longtemps par la communauté environnementale vous incitera à entreprendre la révision exhaustive et approfondie qui s'impose.
On considère généralement dans la communauté environnementale, et cela est confirmé par les données sur la pollution, les analyses internes d'Environnement Canada et le classement lamentable de notre pays parmi les membres de l'OCDE pour ce qui est des questions environnementales, comme Kapil vient de l'indiquer, que la LCPE est défaillante à certains égards cruciaux et doit faire l'objet d'une révision approfondie et exhaustive. Les indices de pollution sont à la hausse dans pratiquement tous les secteurs au Canada.
Les cinq domaines clés que je vais mentionner portent à croire que le comité ferait erreur s'il se contentait, dans la révision actuelle, de simples ajustements bureaucratiques apportés à des détails techniques. C'est un examen de fond qui s'impose.
Premièrement, la prévention de la pollution est définie dans la Loi comme étant « l’utilisation de procédés, pratiques, matériaux, produits, substances ou formes d’énergie qui, d’une part, empêchent ou réduisent au minimum la production de polluants ou de déchets, et, d’autre part, réduisent les risques d’atteinte à l’environnement ou à la santé humaine ». Autrement dit, la prévention de la pollution est légalement la priorité du Canada en matière de protection de l'environnement.
Hélas, l'application de la Loi a peu fait, jusqu'à présent, pour éviter ou minimiser la création de polluants, la préférence ayant été accordée à l'exercice d'un contrôle en fin de processus, afin de saisir les polluants pour les entreposer, les incinérer, les transporter ou les enfouir. Bien que le gouvernement ait demandé aux grandes industries des plans de prévention de la pollution flexibles plutôt que prescritifs, nous ne connaissons que cinq usines qui ont adopté un plan, mais aucune encore qui l'ait mis en oeuvre. En l'absence d'efforts sincères pour réduire la production de polluants toxiques, le transport par l'air et par l'eau est en augmentation, si l'on en croit les données de l'Inventaire national des rejets de polluants.
Des mesures vigoureuses de surveillance et d'exécution de la Loi sont donc nécessaires pour appliquer des plans efficaces de prévention de la pollution, favorisant une réduction de l'utilisation et de la production de substances toxiques au lieu de les transférer d'un milieu à un autre. L'ingénierie industrielle résultant de la mise en oeuvre de plans de prévention de la pollution rehaussera la compétitivité à long terme du Canada ainsi que sa productivité dans le contexte continental.
En ce qui concerne les accords internationaux, je veux souligner que la LCPE offre le potentiel de réduire sensiblement l'utilisation et la diffusion de substances toxiques si ces principes progressistes sont mis en oeuvre. Alors que le Canada veut réaffirmer sa présence internationale, il importe de comprendre la relation de la LCPE avec le cadre politique mondial de réglementation des substances toxiques.
Des concepts importants comme l'élimination virtuelle et le principe de précaution, que l'on trouve dans le jargon de la LCPE, proviennent en grande mesure, dans le contexte continental, de l'Accord Canada-États-Unis relatif à la qualité de l'eau des Grands Lacs, lui-même produit d'un effort de coopération binational pour protéger le plus vaste écosystème d'eau douce au monde. Malgré cela, la LCPE n'a pas permis de protéger les Grands Lacs contre les rejets de produits toxiques de toute sorte.
Au-delà du contexte nord-américain, le Canada a ratifié des accords internationaux importants comme la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination, la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, et la Convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l'objet d'un commerce international.
Il faudrait inclure dans la LCPE des dispositions d'application des engagements internationaux que nous avons pris pour protéger les Grands Lacs -- puisque nous gérons en commun plus de 20 % des eaux de surface accessibles du monde -- et pour réglementer le commerce et la circulation des produits dangereux. À l'heure actuelle, la LCPE n'appuie pas ces engagements.
En ce qui concerne la gestion des produits toxiques, les approches actuelles se sont avérées longues et inefficaces, et l'orientation de la Loi concernant l'utilisation, la fabrication et la dispersion des produits toxiques signifie que les substances toxiques se trouvant dans les produits de grande consommation sont laissées de côté. Par exemple, on ne s'intéressera pas au rejet dans les décharges publiques de composants électriques contenant du mercure. D'autres juridictions, comme la municipalité de Boston, ont mis en oeuvre avec succès des approches simplifiées qui sont plus exhaustives pour réduire les émissions toxiques.
Bien qu'il y ait dans la LCPE des échéanciers de catégorisation des produits, aucun délai n'a été fixé pour l'achèvement des évaluations ou l'obtention de données jugées acceptables afin de déterminer la toxicité des produits. En outre, l'article 71, concernant l'obtention de données auprès des industries, n'a pas été pleinement utilisé pour aider le gouvernement dans ses efforts de détermination de la toxicité. L'approche volontaire du gouvernement en matière de collecte de données, conjuguée au souci de confidentialité des industries, a handicapé le gouvernement à cet égard.
Cette ambiguïté est très préjudiciable à l'élaboration d'outils de gestion des produits toxiques. Nous n'avons connaissance d'aucun plan d'action dressé par Environnement Canada et Santé Canada pour évaluer les niveaux de risque des produits toxiques conformément aux critères de catégorisation.
Les produits de grande consommation devraient être réglementés par la LCPE et celle-ci devrait être modifiée pour rehausser le fardeau de la preuve imposé aux fabricants tenus de démontrer l'innocuité de leurs produits commerciaux. Il semble que la bureaucratie n'a pas les moyens nécessaires pour faire toute seule le classement requis.
En ce qui concerne le principe de précaution, une fois qu'un produit est déclaré toxique, il faut généralement trois années supplémentaires pour qu'un instrument stratégique de gestion du risque soit en place. En outre, des dispenses et des prorogations peuvent être accordées. Les échéanciers fixés pour l'élaboration des stratégies de gestion sont beaucoup trop longs si l'on veut une véritable approche de précaution et de prévention en matière de protection de l'environnement au moyen de la LCPE.
Le plus gros échec a été l'exécution de la Loi. Pendant des années, le Bureau de la prévention de la pollution s'en est remis à des programmes volontaires pour favoriser le passage à l'action, avec l'engagement explicite d'invoquer les dispositions réglementaires de la Loi en cas de besoin. Malgré l'échec largement admis de ces programmes volontaires... je songe ici à des programmes tel ARET, sur l'accélération de la réduction et de l'élimination des toxiques, d'il y a quelques années, aux ententes bilatérales de rendement environnemental avec l'industrie, et à l'ancien programme des leaders environnementaux. Bien que ces programmes aient tous échoué, on n'est pas plus porté à vouloir appliquer des règlements. Il est indispensable que la mise en oeuvre de la LCPE comprenne une intervention réglementaire lorsque les initiatives volontaires ont échoué.
Nous croyons comprendre que la capacité actuelle d'Environnement Canada de superviser une révision est compromise par de récents changements structurels. Toutefois, une réorientation relativement minime de ses ressources permettrait au ministère d'exploiter son expertise actuelle pour effectuer la révision nécessaire afin de protéger la santé humaine et l'environnement.
Les membres du caucus Toxiques du RCE suivent ce dossier de près et ont consulté officiellement les décideurs depuis plusieurs années sur l'évolution de la liste des produits domestiques, la liste des produits prioritaires et l'INRP, et ont fait partie de plusieurs délégations saisies de traités internationaux, comme le traité des POP, la Convention de Bâle et l'Accord sur la qualité de l'eau des Grands Lacs. J'encourage votre comité à faire appel au RCE dans sa recherche de témoignages experts de nature plus exhaustive.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
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Je ne m'occupais pas de ces choses-là en 1999, hélas.
Je pourrais vous donner l'exemple de l'élimination virtuelle car, lorsque cela a été intégré à la Loi, on avait dit qu'il faudrait prévoir un certain niveau de quantification... C'est-à-dire qu'on ne peut pas faire d'élimination virtuelle si l'on ne sait pas quelle est la dose la plus minime possible que l'on peut mesurer.
Dès le départ, nous savions que ce serait un obstacle à l'élimination virtuelle, et ça c'est confirmé. Un seul produit a jamais été inscrit sur la liste, et c'est seulement parce qu'on ne le fabrique plus au Canada.
En outre, du point de vue des nouvelles informations, on n'était pas aussi préoccupé par les populations vulnérables en 1999 qu'aujourd'hui. Par exemple, quand nous nous penchons sur les études relatives au plomb chez les enfants, puisqu'il n'y a plus d'essence au plomb, on constate à chaque fois que la dose de plomb pouvant causer des problèmes chez les enfants est en réalité inférieure à ce qu'on pensait auparavant. Elle baisse chaque fois d'un facteur de 10. Ce que nous savons maintenant, c'est qu'il faut réglementer en fonction des populations vulnérables comme les enfants, comme les premières nations, qui sont très exposés au plomb, comme les personnes âgées plutôt que les adultes. Dans une certaine mesure, cela se fait déjà sans que l'on ait modifié la Loi mais il conviendrait d'adapter celle-ci parallèlement à la réglementation.
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Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec mon collègue M. Lussier.
J'ai l'impression, cet après-midi, que nous entrons dans la fosse aux lions. En effet, nous demandons aux intervenants de nous présenter leurs recommandations, alors que pour nous, la LCPE est déjà un peu loin. Selon moi, il aurait été pertinent d'organiser au préalable une séance d'information avec les fonctionnaires. Cela nous aurait évité une telle situation.
Mes questions s'adressent entre autres à M. Khatter. Le bilan que vous nous présentez est assez éloquent: le Canada se classe 29e sur 29 au chapitre des rejets de composés organiques volatils, 27e sur 28 pour ce qui est du dioxyde de souffre et 28e sur 28 en ce qui a trait au monoxyde de carbone.
Pourtant, il existe une loi à cet égard. Or, je note que depuis mon arrivée à la Chambre des communes en 1997, nous adoptons des lois, qu'il s'agisse de la Loi sur les espèces en péril ou de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, mais que leur application se bute souvent à un manque de ressources et de fonds.
Si le gouvernement avait accordé les fonds nécessaires pour appliquer la loi, quel genre de résultats le Canada afficherait-il relativement aux éléments que vous nous présentez aujourd'hui dans votre bilan? Selon vous, le problème est-il relié au financement, à la loi ou à l'un et l'autre de ces deux facteurs?
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Merci, monsieur le président. Je remercie aussi les témoins d'être venus aujourd'hui. Comme on l'a dit, notre principal objectif est de réfléchir à la procédure que nous allons suivre pour réviser la LCPE. En tant que gouvernement, nous savons que nous sommes tenus de procéder à une révision de la LCPE. Nous avons déjà un an de retard à ce sujet. Normalement, le travail aurait dû être terminé en mars de l'an dernier.
Je voudrais d'abord corriger une remarque qui a été faite par M. Silva, je crois, qui disait que cela pourrait se faire en deux ou trois mois. M. Stack, vous avez dit que cela ne vous semblait pas réaliste -- en fait, vous avez dit cela tous les deux. Je ne sais pas d'où venait cette idée d'une étude de deux ou trois mois mais je sais qu'elle ne venait pas de ce comité. Je tenais simplement à le préciser.
L'une des priorités du gouvernement est d'entreprendre cette révision de la LCPE, et je suis très heureux de constater que le comité s'engage dans cette voie -- pour plusieurs raisons, d'abord parce que c'est une exigence de la Loi et, ensuite, parce que c'est justifié.
Je dois dire que nous allons certainement solliciter vos avis et recommandations de façon à effectuer une révision efficace, exhaustive et opportune de la LCPE. Nous avons un an pour faire ce travail. Nous sommes tenus de formuler des recommandations d'ici un an.
M. Khatter, vous dites dans votre mémoire -- au chapitre des recommandations je crois -- que notre comité devrait voyager. J'aimerais avoir des précisions à ce sujet. Si je comprends bien, vous pensez que nous devrions sillonner le pays afin d'obtenir une image complète et exacte de la situation relative à la pollution.
Que pouvez-vous donc recommander en matière de voyages ? Ou devrions-nous aller ? Pendant combien de temps ? Comme nous sommes tenus d'adresser des recommandations à la Chambre d'ici un an, quand pensez-vous que nous devrions entreprendre ces voyages ? Que recommandez-vous ?
Je voudrais également vous interroger sur la troisième recommandation de votre mémoire, qui est la suivante :
En vertu de la LCPE, l'élimination virtuelle des substances répondant aux critères...(PBT) devrait être obligatoire, et il faudrait préciser et renforcer la définition de l'élimination virtuelle. Pour commencer, le Canada devrait atteindre l'élimination virtuelle de toute dispersion de carcinogènes dans l'air et dans l'eau d'ici à 2008.
Si nous adressons des recommandations à la Chambre d'ici un an et que celle-ci a 120 jours pour s'en saisir, cela nous donnera environ un an pour intégrer les changements recommandés. Est-ce réaliste ? Pensez-vous que nous devrions nous en tenir à cette date limite de 2008 ?
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Je ne m'y retrouve plus.
Je pense que nous attendons du comité qu'il fasse le travail qui lui est imparti, en prenant le temps nécessaire. Comme vous l'avez dit, il y a un échéancier législatif d'un an.
Nous pensons qu'il serait important que le comité tienne des audiences régionales afin d'effectuer une révision exhaustive et approfondie. En même temps, nous souhaitons qu'un rapport soit produit par le Parlement dans des délais raisonnables et que vous puissiez respecter votre échéancier.
En ce qui concerne les voyages, il s'agirait pour vous d'aller rencontrer les gens chez eux plutôt que de les faire toujours venir à Ottawa. Il s'agit aussi de vous permettre d'apprécier l'étendue immense du pays et sa diversité géographique, ainsi que les différentes réalités, par exemple en allant voir des communautés autochtones au sud et au nord, parce qu'elles constituent des groupes particulièrement vulnérables, et parce que les collectivités autochtones du nord ont des problèmes bien différents de celles du sud.
Sur le plan régional, vous rendre à Sydney, dans les Maritimes, serait certainement un exercice très intéressant pour recueillir des informations -- ou en Alberta, avec l'industrie du pétrole et du gaz naturel.
Il s'agit donc en partie d'aller voir quelle est la réalité sur le terrain, et en partie d'aller interroger les gens chez eux pour mesurer l'incidence de la pollution sur les différentes populations.
Pourriez-vous répéter ce que vous disiez au sujet de la date limite et de l'élimination virtuelle ?
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Monsieur le président, j'ai oublié de poser une question sur différents modèles, notamment les modèles américain et européen.
Si je comprends bien, le Sénat américain a apporté des modifications au modèle américain en juillet 2005. Dans votre document, vous dites que ce sont les sénateurs démocrates américains qui ont adopté des mesures qui tendent à se rapprocher de plus en plus du modèle européen. On n'a pas tout à fait adopté le modèle européen jusqu'à maintenant, mais il existe une volonté de s'en rapprocher. Vous avez également indiqué, monsieur Khatter, que vous souhaiteriez que nous étudiions le modèle européen plus à fond et, si possible, apportions des modifications conformes à ce modèle.
Nous tendons à adopter des normes qui correspondent à ce qui se fait aux États-Unis. Par conséquent, l'adoption du modèle européen pourrait-elle constituer une contrainte ou un frein à l'harmonisation avec les États-Unis? Ne vaudrait-il pas mieux que nous nous rapprochions des modifications adoptées en juillet 2005 par le Sénat américain plutôt que d'y aller trop rapidement? Habituellement, nous tendons à harmoniser nos normes et nos pratiques.
Je pose la question, car il ne faudrait pas en arriver à un conflit, si je peux dire, avec les Américains sur une question comme celle-là, puisque, au Canada, nous avons toujours cherché à harmoniser nos normes à celles des États-Unis.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités et je suis heureux de vous revoir, M. Khatter.
Je voudrais revenir sur les Grands Lacs. Comme je suis le député de la région située le plus au sud du Canada, la région de Windsor, je connais assez bien la situation. Le rapport Gilbertson-Brophy -- je ne sais pas si vous le connaissez mais on commence certainement à établir un certain nombre de liens entre la pollution atmosphérique, les taux de cancer et les problèmes respiratoires. Nous avons dans la région certains des taux les plus élevés. Même dans notre propre famille, nous avons vu des cas de lymphome non-Hodgkins.
Il y a également dans la région de Windsor certains des taux les plus élevés de fausses couches. Ma femme travaille dans le domaine de l'accouchement. On trouve de tout dans notre région, comme des taux très élevés de fertilité des couples.
Vous avez dit que la LCPE n'a pas permis de protéger suffisamment le bassin des Grands Lacs. Je crois que c'est vous, monsieur Stack, qui avez dit ça au début.
J'aimerais avoir quelques précisions à ce sujet mais, avant cela, je voudrais aborder le revers de la médaille : y a-t-il eu des succès particuliers attribuables à la LCPE dans la région des Grands Lacs ?
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Je ne pense pas qu'il s'agisse de pouvoir... Je suis sûr que nous avons la capacité technique de mesurer des éléments infimes. Ce que je voulais dire, c'est que nous constatons que des doses minimes peuvent être plus toxiques ou plus importantes que nous ne le pensions. Il y a des « fenêtres de vulnérabilité » et le moment où une femme enceinte, par exemple, est exposée à quelque chose est aussi important, ou presque, que la dose d'exposition.
Ce que montrent les nouvelles études, c'est quelque chose qu'on appelle une courbe en U. On peut penser que moins la dose est élevée, moins le problème est grave, et vice versa, mais on découvre en fait que des doses faibles peuvent parfois causer des problèmes au niveau moléculaire que ne causent pas des doses plus élevées. C'est très troublant.
Nous savons déjà, avec les carcinogènes, qu'il y a ce que nous appelons un « seuil zéro ». Des petites doses de carcinogènes assimilées au mauvais moment peuvent déclencher un cancer. Nous devons donc faire tout notre possible pour éliminer tout ce qui est carcinogène du système.
En ce qui concerne les autres problèmes, reliés au développement ou à la reproduction, il est parfois difficile d'établir un lien de cause à effet à cause du délai qui s'écoule entre l'exposition et l'apparition des effets. Voilà pourquoi nous avons tendance à privilégier une politique de précaution en disant qu'il ne faudrait pas exposer les gens à ces choses si ce n'est pas nécessaire.
Autant la pollution atmosphérique est aujourd'hui bien comprise, si quelqu'un a une crise d'asthme, autant il est difficile d'établir des liens dans le cas des cancers, des difficultés d'apprentissage, de l'accroissement de l'autisme, et d'autres choses que nous ignorons encore. Nous devons donc adopter une attitude de prévention pour nous assurer que ces problèmes ne seront pas reliés à la contamination environnementale.