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Si vous permettez, nous allons commencer et j’aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Mais avant, étant donné que les membres sont là, nous allons faire un peu de planification. Ainsi, nous allons probablement devoir demander à notre greffier de se mettre au travail tout de suite.
Comme tout le monde le sait, nous examinerons le article par article, le 7 décembre, étude qui devrait être terminée la journée même.
Je suppose que la motion sera déposée demain. J’en ai parlé avec M. Rodriguez. Elle sera probablement adoptée, et nous terminerons l’étude du le 7 décembre, ce qui nous laisse le lundi 11, le mardi 12 et le jeudi 14 décembre, la semaine prochaine.
Je propose que Tim travaille à la production du rapport durant les fêtes de Noël, et quand nous reviendrons, il aura alors un rapport à nous soumettre que nous pourrons examiner, discuter, modifier, et ainsi de suite.
La ministre a offert de venir témoigner devant notre comité de 15 h 30 à 16 h 30 le 11 décembre. Je propose que nous puissions prolonger la séance parce que ce jour-là, selon notre programme, nous parlerons de la collaboration interministérielle et des dédoublements de la LCPE. Nous accueillerons donc la ministre le 11 décembre, après quoi nous passerons à notre séance ordinaire pour étudier la LCPE.
Je vais terminer ceci après quoi vous pourrez voir tout le plan.
Le 12 décembre, soit mardi, nous ferons un dernier tour de table, qui sera prévu à l’horaire. Il nous faut trouver des témoins parce qu’il ne nous reste qu’une semaine.
Nous entendrons le témoignage du groupe international dont la comparution a été interrompue par l’alarme-incendie et vous pourrez poser des questions à ces gens-là. Nous n’avons pas les questions, mais nous pourrons régler cela à cette date.
Le 14 décembre, nous remettrons nos dernières recommandations à Tim, et il aura alors jusqu’en janvier pour y travailler. Lorsque le comité reprendra ses travaux, Tim pourrait nous présenter un rapport provisoire, que nous pourrons alors discuter, bien sûr, avant de le faire parvenir au gouvernement.
C’est une suggestion. Ce n’est pas une motion ni rien d’autre. J’ai besoin du consentement unanime pour aller de l’avant avec ce programme. Nous procéderons de cette façon en grande partie pour fins de planification.
Des commentaires? Monsieur Silva.
Je vais me concentrer sur les normes canadiennes concernant les dioxines adoptées par le Conseil canadien des ministres de l’Environnement. Mais cela n’est qu’un exemple de ce dont je veux parler. Les mêmes arguments pourraient être apportés au sujet d’autres questions qui font l’objet de normes canadiennes comme l’ozone, les particules de mercure, voire les lignes directrices du CCME sur la qualité de l’eau ou l’évaluation des risques pour déterminer si une substance est toxique en vertu de la LCPE.
L’exemple des dioxines que j’utilise concerne un processus qui me préoccupe. À mon avis, les problèmes sont endémiques et relèvent de la structure baroque des comités et des luttes de pouvoir internes qui permettent au gouvernement de ne pas assumer ses responsabilités, à savoir protéger la santé et l’environnement des êtres humains.
Les principales conclusions — c’est-à-dire les messages que l’on retient — sont, d’abord, que nous ne croyons pas que la LCPE de 1999 a besoin d’être révisée de fond en comble. À notre avis, la loi renferme les outils nécessaires pour faire face aux problèmes environnementaux du Canada. Elle peut, à l’occasion, avoir besoin de certaines modifications, mais à vrai dire, la LCPE est tout à fait correcte.
Le problème, ce sont les relations entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Il se gaspille beaucoup de temps et d’argent en consultations entre les divers intervenants, en consultations entre diverses compétences qui ne font que semer la confusion dans les responsabilités de chacun. On trouve cette culture de l’inadéquation chez les politiques et les ministres qui n’ont pas la volonté d’utiliser pleinement la LCPE pour protéger l’environnement et la santé des Canadiens et des Canadiennes.
Enfin, malgré tout cela, je dirais qu’il nous faut un mécanisme pour réactiver le système de normes canadiennes advenant des changements importants, comme les améliorations technologiques pour la prévention de la pollution, les nouveaux développements industriels qui changeront les niveaux de pollution, ou les nouvelles données scientifiques. Actuellement, ce mécanisme ne semble pas exister. Je ne suis pas certaine que vous deviez reformuler la LCPE pour avoir ce mécanisme; il suffirait peut être simplement de reconcevoir le processus.
Mon organisation, Reach for Unbleached, est une fondation nationale. C’est un organisme canadien de bienfaisance enregistré dont le mandat consiste à informer les consommateurs et à surveiller les usines de pâtes. Nous cherchons à édifier une industrie durable des pâtes et papiers en amenant les usines de pâtes à assainir leurs opérations et en faisant la promotion d’un papier propre et à privilégier pour l’environnement. Au cours des 15 dernières années, nous avons travaillé en collaboration avec les syndicats des pâtes et papiers, les premières nations, des organisations environnementales internationales comme Greenpeace et des groupes de citoyens dans la plupart des villes forestières de la Colombie-Britannique.
Nous avons participé, en tant que membre de la délégation canadienne, à la négociation du traité des Nations Unies sur les polluants organiques persistants, et nous avons travaillé à de nombreux processus concernant les toxiques en collaboration avec Environnement Canada et la Colombie-Britannique. Notre travail est cité dans des campagnes de sensibilisation partout dans le monde.
Je suis également rédactrice du magazine Watershed Sentinel, qui est en contact avec des douzaines, voire des centaines d’autres organisations de la base partout dans le pays.
Il est très rare qu’une organisation communautaire de défense des droits ait cette chance de faire part de ses opinions sur la façon dont nous percevons les mécanismes de la structure gouvernementale concernant le contrôle des produits toxiques, et de vous dire comment nous, les ONGE, entendons régler le problème. Nous ne vous donnons pas un point de vue juridique; nous vous offrons le point de vue d’un profane sur la toxicologie, la bureaucratie et les techniques de production de pâtes et papiers.
Le système n’est pas en déroute, mais les manettes des leviers doivent être assez puissantes pour lever autre chose que de petits poids. Beaucoup d’argent des contribuables, voire encore plus de temps des bénévoles, est gaspillé dans ces consultations qui perdent le cap et qui ne permettent pas d’assurer la prévention de la pollution à laquelle s’attendent les Canadiens et les Canadiennes. Ces processus ne font que semer la confusion dans les responsabilités de chacun. En Colombie-Britannique, c’est ce que nous appelons le « baratin forestier », où nous sommes là à négocier pendant que les arbres tombent sous nos yeux à l’extérieur. C’est exactement ce qui se passe avec la politique sur les produits toxiques au Canada.
Cette politique n’est pas prévue dans la LCPE de 1999; ce qui nous gêne, c’est la façon dont les gouvernements l’interprètent.
Permettez-moi de vous parler un petit peu de moi, et vous pourrez alors voir pourquoi j’en arrive à ces conclusions. Je viens d’une petite île près de la côte de la Colombie-Britannique. Je m’y suis installée en 1987 pour mener une vie paisible à la campagne. Mon conjoint et moi y faisions pousser nos légumes et nous sommes devenus pêcheurs de coquillages pour gagner notre vie. Après la fin de l’abattage des arbres de sa forêt ancienne, l’activité dans l’île se concentrait et se concentre encore fortement dans les entreprises familiales de culture des huîtres destinées aux marchés d’exportation et c’est en 1989, environ, que le paradis s’est transformé en enfer.
À cette époque, les fermetures d’installations de pêche ont commencé à se répandre le long de la côte de la Colombie-Britannique à cause de la contamination par les dioxines rejetées par les papetières qui blanchissaient le papier avec du chlore. Finalement, quelque 120 000 hectares de côte ont été interdits à la pêche au crabe et aux coquillages, et plus de la moitié le sont encore aujourd’hui.
Sur notre île, menacés par une catastrophe économique, nous avons cherché une solution, d’où le nom Reach for Unbleached. Si les consommateurs achetaient du papier non blanchi ou des produits du papier blanchi autrement, les papetières pourraient rester en affaires et nous pourrions sauver notre île. C’est de là qu’est partie notre organisation.
Je n’ai pas le temps de vous raconter tout le processus des réunions avec les parties intéressées, les virages scientifiques, les paniques sur le marché, le chantage professionnel et l’accord sur l’harmonisation, très discordant et non renouvelé par le fédéral et la province, avec la Colombie-Britannique, sans parler de plusieurs élections en Colombie-Britannique, encore que celles-ci aient tendance à être la partie agréable de l’histoire.
En résumé, le gouvernement fédéral a déclaré les dioxines toxiques au sens de la LCPE et destinées à une élimination virtuelle. Il a ensuite pris des mesures pour mettre fin aux rejets de dioxines au moyen d’un règlement à la Loi sur les pêches qui interdisait aux papetières de rejeter des dioxines dans leur effluent. C’était une mesure contraignante stricte fondée sur la réglementation, et efficace. Les niveaux de dioxine dans les effluents ont chuté.
Dans mon document, je fais une description des impacts des dioxines sur la santé, le fait qu’elles soient l’objet d’une interdiction internationale en vertu du traité sur les polluants organiques persistants, etc., mais je vais passer par-dessus cela parce que je n’ai pas assez de temps.
Cependant, compte tenu de tous ces éléments, y compris la réévaluation scientifique de la LCPE concernant les impacts des dioxines sur la santé à de très faibles niveaux, il n’est pas étonnant que le Canada ait poursuivi son programme d’élimination des dioxines en élaborant des normes canadiennes. Ce qui étonne, compte tenu de l’objectif d’élimination justifiant les normes canadiennes, c’est que le processus ne portait que sur les émissions aériennes de dioxines, et non pas sur la création de dioxines. Il s’agit là d’une directive du Comité consultatif national qui semblait absolument impossible à changer lorsque nous en sommes venus à discuter des détails de la production de dioxines.
La Colombie-Britannique se classait parmi les premières provinces concernant les normes canadiennes sur les dioxines, et notre organisation, de même que de nombreuses autres communautés côtières, avons emboîté le pas. Des usines de papiers brûlaient des copeaux de bois provenant de troncs d’arbres qui avaient été transportés dans l’océan. À cause de son immersion dans l’océan, le bois absorbe le sel, ensuite lorsque l’on brûle ces copeaux, ils produisent des dioxines. Voilà le nœud du problème, mais ce qui est vraiment important, c’est que les normes canadiennes ne s’intéressaient qu’aux émissions aéroportées et non à la création des dioxines. La majeure partie de ces dioxines pénètrent en fait les sites d’enfouissement, plutôt que de rester à la surface et de se disperser dans l’air.
Cependant, nous avons réussi à faire insérer dans la norme canadienne la prévention de la pollution après deux ans de luttes au sein du comité. Malheureusement, cela est devenu un peu une farce. Après de nombreuses réunions coûteuses et très longues, auxquelles nous, les environnementalistes côtiers, avons donné de notre temps, les rapports de consultants ont fait la preuve, à la satisfaction de presque tous, qu’il était beaucoup trop onéreux de songer à retirer les bûches de l’eau salée, que l’eau ne pouvait éliminer le sel de ces copeaux de bois, et que c’était correct, parce que les dioxines étaient scellées à jamais dans les sites d’enfouissement des usines de papier.
Nombre de ces sites d’enfouissement n’ont aucune doublure. Lorsque des tests ont été effectués, la dioxine apparaissait souvent dans les eaux de lessivage et dans la nappe phréatique autour des sites d’enfouissement. Quoi qu’il en soit, le meilleur de ces sites d’enfouissement n’est conçu que pour résister aux conditions météorologiques pour cent ans, et je pense que l’on envisage une plus longue période que cela ces jours-ci.
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Je tiens à vous remercier, monsieur le président et monsieur le greffier, de m’avoir invité ici cet après-midi. Je m’appelle Gregory Heming et je viens d’une petite ville du Yukon qui s’appelle Haines Junction.
J’aimerais d’abord vous dire que je suis écologiste humain. J’étudie les façons dont les êtres humains interagissent avec les systèmes naturels, environnementaux, politiques, économiques, sociaux et culturels. De profession, je suis un communautaire, et j’entends par là que je suis quelqu’un qui croit à la valeur et à la viabilité des petites collectivités rurales, particulièrement celle dont je fais partie.
Ces deux intérêts m’ont convaincu que l’ancien secrétaire d’État (Développement rural) Andy Mitchell avait raison lorsqu’il disait que les collectivités rurales sont l’avenir du Canada.
Comme vous le savez d’après la correspondance que nous avons entretenue, mes observations cet après-midi sont centrées sur deux problèmes majeurs, dont ni l’un ni l’autre n’est abordé dans la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Cependant, je vous soumets humblement aujourd’hui que ces deux problèmes majeurs sont d’égale importance pour le succès éventuel de la LCPE pour prévenir la pollution, protéger l’environnement et la santé humaine et contribuer au développement durable.
Les petites collectivités rurales du Canada subissent les effets négatifs de l’intérieur, de ce que j’appelle la désaffection interne, et de l’extérieur, par l’exploitation externe. Ces deux phénomènes commencent à se manifester lorsque les collectivités sont incapables de répondre à leurs besoins à même les ressources dont elles disposent.
Je soutiens que les collectivités, les provinces, les territoires et les premières nations, au fur et à mesure qu’ils accroissent leur dépendance à l’égard de sources de l’extérieur, des gouvernements centralisés et des entreprises toujours de plus en plus grandes pour répondre à leurs besoins de base, deviennent par conséquent déconnectés de nos entreprises locales et de nos gouvernements locaux, et ce qui est le plus troublant pour moi, du comportement civique de nos voisins.
La Loi canadienne sur la protection de l’environnement peut, si elle arrive à concilier les critiques et les suggestions que votre comité a entendues depuis un certain temps, faire beaucoup pour nous protéger des sous-produits négatifs d’une économie à grande échelle. Mais même avec les améliorations et les adaptations que l’on apporte à la façon dont la LCPE choisit de réglementer et d’appliquer les lois sur l’environnement et la responsabilité des entreprises, nous réussirons très peu à promouvoir une série interdépendante d’économies à petite échelle qui incluraient des économies comme l’agriculture familiale, le marché communautaire, les petites industries innovatrices et productives ainsi que les stratégies d’énergies de remplacement communautaires.
Par conséquent, même si la LCPE peut nous aider à repérer et à réguler les symptômes d’une économie toxique, qui, en fait, inclut des milliers de substances bioaccumulatives et intrinsèquement toxiques, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que la LCPE nous aide à traiter les causes profondes de la pollution, c’est-à-dire notre propre incapacité de faire la distinction entre nos besoins de base et nos désirs inutiles. Nous ne pouvons pas non plus nous attendre à ce que la LCPE nous aide à reconfigurer notre économie de sorte qu’elle devienne moins exploitante, plus authentique et plus locale, saine et durable.
Notre modèle économique actuel, qui exige une croissance sans limite par le biais d’une consommation illimitée, que nous espérons ralentir avec des mécanismes comme la LCPE, est préjudiciable aux petites entreprises. Ce modèle renferme un préjudice industriel inhérent à tout ce qui et de nature rurale. Il va à l’encontre de l’entreprise familiale, de l’entreprise concurrentielle et de l’innovation à petite échelle. En fait, il pourrait même être juste de dire qu’en bout de ligne, ce modèle pourrait tout simplement être préjudiciable à l’équilibre délicat inhérent à notre monde naturel.
Parce que les habitants des régions rurales vivent en étroite proximité avec la nature, nous comprenons, mais d’autres ne comprennent pas, que nos vies et nos modes de vie sont toujours un mélange de ce qui est naturel, fabriqué et modifié. Bref, nous comprenons, comme peu de personnes le comprennent, que dans les collectivités rurales, la culture ne peut s’épanouir que par l’exploitation de la nature.
Parce que notre système économique continue de pomper les ressources de la périphérie vers le centre, de la campagne vers la ville et des pauvres vers les riches, parce que l’économie est en pleine ébullition, comme elle doit être dans notre système, il est de plus en plus acceptable de ruiner un endroit au profit d’un autre.
La principale question qu’il faut se poser quand on fait partie d’une collectivité ou qu’on habite la campagne, et ultimement quand on fait partie de ce comité, est de savoir dans quelle proportion la nature et la culture peuvent se côtoyer. Jusqu’à quel point le milieu naturel vierge, l’extraction des ressources, la pollution automobile, les substances toxiques et la faune déplacée peuvent coexister avant que la vie rurale ne devienne pareille à la vie urbaine?
À n’en pas douter, le comité entendra parler de la liste des substances prioritaires, des niveaux de dépistage, de l’évaluation des risques, des substances toxiques, des politiques de gestion et des ententes administratives et équivalentes — d’ailleurs, ne vous méprenez pas, ce sont là des éléments essentiels à l’efficacité de la LCPE. Mais nous ne devons pas laisser ce langage trop précis et spécifique qu’utilisent les spécialistes, les scientifiques, les avocats et les législateurs brouiller le langage du bon sens par lequel nous exprimons les valeurs canadiennes.
Dans le but de servir cette approche plus ordinaire de la lutte contre la pollution et de la protection environnementale, dans le but de prévenir l’affaiblissement et la réclusion des petites collectivités ou leur envahissement par des forces externes qu’elles sont incapables de repousser, j’aimerais soumettre à ce comité quatre principes pour le guider quand les questions administratives et réglementaires de la LCPE deviennent trop complexes. Ces quatre principes donnent à tout le moins un cadre philosophique qui justifie économiquement et politiquement une interprétation de la LCPE qui fait des collectivités rurales les garantes de l’avenir du Canada.
Premièrement, le moine trappiste Thomas Merton a un jour dit que, comme nous avions perdu notre habileté de voir la vie dans son ensemble et d’évaluer notre conduite dans son ensemble, nous n’avons plus de contexte pertinent où peuvent s’inscrire nos actions. Du coup, celles-ci deviennent désordonnées, arbitraires et insignifiantes. Selon moi, Thomas Merton voulait dire que la communauté offre un contexte pertinent où notre vie peut sembler moins désordonnée ou imprévisible, plus logique et infiniment plus significative.
Si la LCPE ne trouve pas d’assises directes et pragmatiques dans la vie communautaire et la vie rurale, il y a peu de chance que la population l’appuie. Du coup, elle sera toujours perçue comme un autre régime de gestion imposée d’en haut aux ordres de gouvernement inférieurs. La LCPE doit toujours poser une question précise et chercher à y répondre: quels impacts auront les changements de réglementation ou les innovations proposées sur chaque communauté particulière? Nous devons nous demander comment la LCPE affectera notre unité.
Deuxièmement, Daniel Kemmis, l’ancien maire de Missoula, au Montana, a dit cela en réponse à ses électeurs au sujet de la main de fer du gouvernement fédéral, ce qui m’a toujours impressionné :
C’est insulter les habitants que d’assumer qu’ils sont incapables de trouver un terrain d’entente entre eux sur la manière d’habiter leur espace. [Traduction]
Cette simple règle de gouvernance locale peut guider ce comité alors qu’il essaie de mettre en œuvre la LCPE en coopération avec les provinces, les territoires, les peuples autochtones et les citoyens.
Troisièmement, Charles Wilkinson, professeur de droit à l’université, a un jour défini ce qu’il appelait l’éthique du lieu :
Une éthique du lieu respecte de manière égale les habitants d’une région et de la terre, les animaux, la végétation, l’eau et l’air. Elle reconnaît que les habitants de l’Ouest respectent, voire vénèrent, leur milieu physique et qu’ils ont besoin d’une économie stable et productive accessible aux personnes à faible revenu, et qu’ils la méritent. L’éthique du lieu doit être une valeur communautaire partagée et doit se manifester par une détermination persistante de traiter l’environnement et ses habitants comme des égaux, de leur reconnaître leur caractère sacré et de veiller à ce que tous les membres de la communauté cherchent des solutions qui répondent à l’éthique et insistent là-dessus. [Traduction]
Ce comité ne doit jamais oublier que la prévention de la pollution, la protection environnementale et le développement durable sont liés — il n’y a pas à en sortir.
Fait encore plus important, nous ne devons jamais oublier que l’air, la terre, l’eau, la végétation, les animaux et les humains sont tous sur un pied d’égalité. Les systèmes culturels et économiques qui émergent de ces systèmes naturels doivent être accessibles aux personnes à faible revenu. Il s’agit là, probablement, de la principale valeur canadienne dont tout découle.
Quatrièmement, Erica Jong et ses réflexions concises m’ont donné à réfléchir une fois de plus. Prenez votre vie entre vos mains, dit-elle, et qu’arrive-t-il? Quelque chose de terrible : il n’y a plus personne à qui faire porter le blâme.
Ce comité et toutes les personnes présentes dans cette salle ne peuvent plus se permettre de mettre l’eau contaminée, le smog, les changements climatiques et les produits toxiques sur le dos de la seule industrie ou des gouvernements. En tant que citoyens et consommateurs, nous avons pour responsabilité de faire des choix sains pour nos vies et nos gagne-pain.
Ce comité serait mal avisé de modifier la LCPE de manière à réduire la responsabilité des consommateurs face à leur propre négligence, peu importe leur innocence. En 1853, six ans à peine avant le début des travaux de construction du Parlement original, le poète lauréat britannique William Wordsworth a écrit le poème suivant :
Vraiment le monde est trop avec nous; tôt ou tard
Gagner et dépenser étendent leur empire.
La Nature n'a rien à montrer, rien à dire
Pour l'esprit absorbé qui calcule à l'écart.
...
À nul de ces concerts notre coeur ne prend part;
...
S’il y avait un message en particulier que je voulais faire passer au comité qui doit procéder à l’examen quinquennal obligatoire de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, c’est celui-ci. Nous ne pouvons pas continuer indéfiniment à consommer des ressources limitées, car si nous le faisons, nos cœurs y passeront aussi, tout comme nos pouvoirs, et nous ne pourrons jamais aller au fond de la question.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de commencer en vous transmettant les remerciements de l’industrie qui est très heureuse de pouvoir s’adresser au comité dans le cadre de cet examen très important et très opportun de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE).
En guise de présentation, permettez-moi de vous dire que l’Association des produits forestiers du Canada (APFC) est la voix des producteurs de bois, de pâtes et de papiers, tant à l’échelle nationale qu’internationale, auprès des gouvernements, sur le marché et dans la sphère de l’environnement. L’industrie forestière du Canada représente 3 p. 100 du PIB du Canada et plus de 40 milliards de dollars en exportations de bois, de pâtes et de papiers par année. Un des plus importants employeurs du Canada, dans des centaines de collectivités — surtout rurales —, l’industrie forestière crée près de 900 000 emplois directs ou indirects dans l’ensemble du pays.
Le secteur forestier s’est affirmé en tant que chef de file des questions environnementales. Il a dépensé plus de 8 milliards de dollars pour réduire ses émissions dans l’air et l’eau. D’après les plus récentes données, les émissions de gaz à effet de serre du secteur ont diminué de 30 p. 100 depuis 1990, et les émissions particulaires ont chuté de plus de 60 p. 100. L’industrie a aussi enregistré des succès remarquables dans le dossier de l’eau, dont je ne traiterai pas aujourd’hui, faute de temps.
Nous sommes très fiers de nos réussites en matière d’environnement. Nous reconnaissons toutefois que le statu quo n’est pas suffisant. Nous devons continuer d’améliorer notre rendement environnemental et pour ce faire, nous devons adopter des approches novatrices fondées sur la collaboration et la coopération avec les intervenants, de même qu’avec les gouvernements provinciaux et fédéral. Grâce aux mécanismes comme le Forum des pâtes et papiers sur la qualité de l’air, nous avons fait la preuve que nous étions capables de travailler avec un large éventail d’intervenants pour élaborer des solutions créatives à des problèmes très complexes et difficiles, et ce, alors que le secteur subit une crise économique. En fait, les commentaires que j’aimerais partager avec vous aujourd’hui sont fortement inspirés des activités de ce forum.
Notre secteur est très réglementé un peu partout au Canada, ce qui fait que nous avons un niveau d’expérience appréciable des lois environnementales, tant fédérales que provinciales. La LCPE a un impact appréciable sur nos membres, surtout depuis qu’elle englobe les modifications de la Loi sur la lutte contre la pollution atmosphérique.
Aujourd’hui, l’APFC souhaite mettre l’accent sur une question prioritaire des membres: les dispositions d’équivalence de la LCPE. En tant que secteur hautement réglementé, nous sommes particulièrement sensibles à l’embrouillamini et à la complexité grandissante de la réglementation au Canada. Je tiens à préciser que l’APFC ne remet pas en question l’autorité du gouvernement fédéral envers la réglementation des dossiers environnementaux, pas plus qu’elle ne pousse pour une harmonisation des normes provinciales. Nous reconnaissons que le gouvernement fédéral est en droit de vouloir en faire davantage dans certaines provinces et que les gouvernements provinciaux partagent le fardeau que représente l’élimination des défis environnementaux complexes auxquels nous devons faire face.
Nous sommes cependant partisans des approches efficaces qui éliminent les chevauchements entre les programmes fédéraux et provinciaux. Nous sommes d’avis qu’il est essentiel pour les gouvernements fédéral et provinciaux de travailler ensemble pour atteindre ce but. D’après nous, la compréhension des forces et des faiblesses des programmes provinciaux existants est primordiale pour aller de l’avant avec les programmes fédéraux. Cette compréhension est un des piliers qui permettront de combler les failles de la réglementation et d’éviter les chevauchements.
La LCPE de 1999 prévoit des dispositions permettant aux gouvernements provinciaux et fédéral de signer entre eux des accords d’équivalence. Nous sommes convaincus que l’intention première de ces dispositions visait à simplifier le paysage environnemental sans affaiblir le rendement environnemental. Pourtant, notre expérience à ce jour révèle que les dispositions, et leur interprétation, sont des obstacles appréciables à la réalisation de cet objectif important. Comme vous le savez probablement, l’Alberta est la seule province qui a un signé un accord avec le gouvernement fédéral.
Comme le comité a peu de temps à m’accorder, je n’ai pas l’intention de passer en revue toutes les subtilités légales de la LCPE. Je suis certaine que vous les connaissez très bien. J’aimerais aussi mettre de côté le pour l’instant.
La LCPE actuelle prévoit deux dispositions relatives à l’équivalence que je tiens à souligner. D’une part, les dispositions réglementaires provinciales peuvent être jugées équivalentes aux règles fédérales et ainsi être admissibles à l’exemption. D’autre part, ces dispositions doivent permettre la tenue d’enquêtes sur les infractions reprochées ou à ce que nous appelons le droit du citoyen de faire enquête. Ces deux critères sont nécessaires pour établir un accord relatif aux dispositions équivalentes.
Le propose justement des modifications à la LCPE de 1999 dans ce domaine, et j’insiste pour que le comité étudie attentivement ces modifications.
Les modifications proposées à la Loi sur la lutte contre la pollution atmosphérique s’éloignent de l’interprétation strictement réglementaire au profit d’une approche davantage axée sur les résultats, c’est-à-dire les dispositions dont les effets sont équivalents. L’APFC est d’avis qu’il s’agit clairement d’un pas important dans la bonne direction, car cela donne une nouvelle souplesse aux exigences et ne devrait pas compromettre la qualité de l’environnement. Par contre, le n’amende par les dispositions accordant aux citoyens le droit de faire enquête.
J’aimerais vous présenter un court exemple qui traite de la qualité de l’air et qui souligne les défis et les répercussions de la LCPE de 1999, ainsi que ceux des amendements proposés dans le .
Fondés sur des analyses juridiques approfondies, nous avons soumis plusieurs avis juridiques séparés au ministère fédéral de la Justice, à Environnement Canada et à cinq gouvernements provinciaux — la Colombie-Britannique, l’Alberta, l’Ontario, le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador, avec qui nous tenons aussi des consultations. Dans notre secteur, nous avons constaté que seules l’Alberta et Terre-Neuve-et-Labrador ont la possibilité de signer des accords d’équivalence en vertu de la LCPE de 1999 sans avoir à modifier en profondeur leurs régimes réglementaires actuels. Si nous tenons compte des amendements proposés dans le , nous constatons que l’Alberta, l’Ontario, Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse pourront signer des accords d’équivalence, en raison de l’adoption de l’approche axée sur les résultats, dont j’ai parlé plus tôt.
J’aimerais souligner que le Québec, même s’il a un régime de réglementation très complet — son régime réglementaire est extraordinaire — ne serait pas en mesure de signer un accord d’équivalence, en raison de l’absence de dispositions accordant aux citoyens le droit de faire enquête. Honnêtement, nous trouvons cela très inquiétant.
Voici nos recommandations à votre intention. Nous vous prions de rester engagés sur la voie de la simplification des exigences environnementales réglementaires sur l’environnement au Canada en vous penchant sur les contraintes légales qui empêchent l’établissement d’accords d’équivalence. En outre, nous encourageons le comité à soutenir les amendements proposés dans le qui sont liés à l’équivalence. Même s’ils ne vont pas assez loin à notre avis, ils nous mettent dans la bonne direction.
Par ailleurs, nous ne savons pas comment le comité prévoit gérer la situation, mais nous pensons qu’il serait préférable pour le comité de coordonner ses activités d’examen de la LCPE avec ses activités sur le . Je suis certaine que vous avez toutes sortes d’idées à ce sujet, mais je pense que mes propos illustrent le bien-fondé d’une telle façon de faire.
Pardonnez-moi, je n’ai pas de recommandations spécifiques à ce sujet, mais j’aimerais demander au comité d’étudier les options qui permettraient de soutenir le droit du citoyen de faire enquête. Nous sommes convaincus qu’il s’agit là d’un concept important et qu’il doit bien exister des manières de laisser aux provinces une marge de manœuvre dans ce domaine. Nous n’avons pas encore étudié la question. Nous avons l’intention de le faire et nous aimerions présenter les résultats au comité. Nous encourageons le comité à en faire autant et à se pencher sur les possibilités.
Nous demandons au comité de recommander au gouvernement de s’appuyer sur l’expérience des secteurs qui ont déjà mis au point des mécanismes de coopération aux niveaux provincial et fédéral. Par exemple, j’ai mentionné le Forum des pâtes et papiers sur la qualité de l’air. Depuis deux ans, nous collaborons avec les organisations environnementales, les Autochtones, cinq provinces et le gouvernement fédéral pour élaborer un plan d’action sur la qualité de l’air et les changements climatiques qui répondra aux attentes de tous les intéressés. Nous espérons que ces initiatives ne seront pas repoussées pour faire place à une nouvelle approche sur l’air.
C’est sur cela, monsieur le président, que se termine ma présentation officielle. Je suis prête à répondre aux questions des membres du comité. Merci.