Je m'appelle Marie White et je suis la présidente nationale du Conseil des Canadiens avec déficiences, basé à Winnipeg. Notre organisation existe depuis 30 ans et cela fait 30 ans que nous nous intéressons, entre autres, aux questions du sous-emploi et du chômage.
Nous savons que la pauvreté est une réalité pour les gens ayant une déficience. Environ 60 p. 100 des adultes en âge de travailler qui ont une déficience sont sous-employés ou chômeurs. Pour les femmes ayant une déficience, les statistiques sont effrayantes. En effet, 75 p. 100 d'entre elles sont sous-employées ou en chômage, ce qui semble contester l'hypothèse dont on a récemment entendu parler selon laquelle les femmes ont déjà un statut égal à celui des hommes.
Pour les personnes ayant une déficience, l'employabilité est une question complexe. Les solutions doivent donc être multidimensionnelles. La responsabilité ne relève pas d'une seule organisation, d'un seul gouvernement, d'une seule entreprise ou encore d'une seule personne.
Nous abordons l'employabilité selon un modèle axé sur les obstacles sociaux. Nous ne prenons pas le modèle médical selon lequel il faut « réparer » les personnes ayant une déficience pour qu'elles puissent travailler. Ainsi, nous estimons que c'est un devoir sociétaire que d'éliminer les obstacles, qu'ils soient environnementaux, systémiques ou de communication, à l'employabilité. Le gouvernement fédéral, qui a un rôle clé à jouer, doit s'assurer que des emplois sont disponibles pour les personnes ayant une déficience et agir pour que le marché du travail soit inclusif. Au cours des trois à cinq prochaines années, on aimerait que le taux d'emploi des personnes ayant une déficience passe du taux actuel de 44 p. 100 à 61 p. 100. Cela ne leur permettrait pas d'atteindre la moyenne nationale, mais au moins ce serait un important pas en avant.
Beaucoup des accords, politiques et programmes qui existent à l'échelle nationale posent des problèmes pour les personnes ayant une déficience. Il est important qu'on reconnaisse que ce groupe de personnes est marginalisé et, dans certains cas, l'a toujours été. On ne peut pas se contenter de tout simplement débloquer des emplois pour les personnes ayant une déficience. En effet, certaines ont besoin de formation et de compétences précises avant de pouvoir être embauchées. Certaines se sont retrouvées en marge du système d'éducation, même si elles étaient présentes. Ces personnes sont victimes de discrimination, se heurtent à des obstacles physiques et ont beaucoup de difficultés qui, pensait-on en 1976, auraient disparu en 2006. Il est important qu'on ait une stratégie FPT sur le marché du travail qui permette d'offrir plus de débouchés aux personnes ayant une déficience.
En 2003, les ministres responsables des services sociaux ont approuvé le cadre multilatéral portant sur les ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées. C'est ce qui a remplacé l'AEPH, soit l'initiative d'aide à l'employabilité des personnes handicapées. Bien que le but de ce cadre est d'améliorer l'employabilité des Canadiens ayant une déficience, le financement actuel est insuffisant. Dans le budget de 2003, 193 millions de dollars ont été débloqués, mais il faudrait que ce montant soit doublé, au minimum. Il faut que ça se fasse parce que les ententes sur le marché de travail actuelles ne prennent pas en compte la situation des personnes ayant une déficience.
Idéalement, nous n'aurions pas des ententes sur le marché du travail distinctes. En effet, nous aurions des ententes qui prendraient en compte les personnes ayant une déficience ainsi qu'une panoplie de secteurs dans notre société, éliminant ainsi la nécessité d'avoir des programmes distincts pour les différentes catégories. Mais tant et aussi longtemps que les personnes qui créent des programmes ne sauront pas comment inclure les personnes ayant une déficience, il sera nécessaire d'avoir des programmes distincts.
Il faut procéder à des réformes des politiques. La Loi sur l'équité en matière d'emploi est une catastrophe totale. D'ailleurs, ce sont les personnes ayant une déficience qui souffrent le plus du manque d'équité en matière d'emploi. En 2004, leur représentativité a atteint 2,5 p. 100, ce qui est une légère amélioration par rapport à 2,3 p. 100 auparavant. Tous secteurs confondus, seulement 1 100 personnes ayant une déficience ont été embauchées, alors qu'en vertu de leur présence au sein de la population et de leur disponibilité, il aurait dû y en avoir cinq fois plus.
Nous prônons diverses mesures. Nous demandons au gouvernement fédéral de prendre en compte les besoins des personnes ayant une déficience lors de la passation de marchés publics, par exemple lors de l'acquisition de matériel et de logiciels. Si le gouvernement fédéral ne devient pas un employeur modèle, quel espoir peut-on avoir pour les autres secteurs, en particulier le secteur privé? Nous demandons au gouvernement fédéral d'intégrer le principe du design universel dans l'ensemble de ses installations et d'aménager adéquatement les installations existantes.
Ce qui est plus important, nous souhaitons que le gouvernement fédéral investisse dans des aides pour personnes handicapées. Ces aides sont fournies aux personnes handicapées pour leur donner une chance de participer.
J'ai l'impression de parler beaucoup trop vite, et je vais ralentir. Je sens une certaine anxiété dans la salle. J'ai toujours ce problème lorsque je fais un exposé au niveau national. Je vais ralentir autant que je le peux.
Les aides pour personnes handicapées sont prioritaires pour les personnes handicapées de tout le pays, et c'est la priorité des organismes nationaux oeuvrant auprès des personnes ayant des déficiences car cet investissement est logique au plan économique. S'il est vrai qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre, s'il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans les métiers, si nous avons besoin de nouvelles ressources humaines dans le secteur de l'emploi, eh bien, pour l'amour du ciel, fournissez des aides aux personnes handicapées afin qu'elles puissent participer.
En tant que personne handicapée, je trouve consternant qu'un si grand nombre de mes pairs n'aient pas accès au marché du travail parce qu'ils n'ont les aides dont ils ont besoin. Ils vivent dans la pauvreté; ils n'ont pas les moyens de se les offrir. Les programmes de sécurité du revenu ne sont pas conçus pour eux. Nous avons donc ce que j'appellerais une population en attente — elle attend que quelqu'un reconnaisse leurs capacités et leurs compétences.
En ce qui concerne l'alphabétisation, le nombre de diplômés handicapés qui ont seulement ce que j'appellerais une éducation partielle est renversant. Qu'allons-nous faire pour que ces personnes puissent acquérir les compétences dont elles ont besoin, pour qu'elles puissent avoir une éducation adéquate, appropriée, accessible et inclusive? Les récentes compressions dans les budgets des organismes d'alphabétisation toucheront durement cette population. Dans bien des cas, ils n'ont pas une scolarité appropriée. On vient de nouveau de porter atteinte à leur qualité de vie et à leurs possibilités d'acquérir de l'expérience.
L'un des thèmes qui revenaient sans cesse au Forum canadien sur l'apprentissage tenu cette année à Montréal était celui de la pénurie chronique de main-d'oeuvre. Les personnes handicapées ont beaucoup de difficulté à avoir accès aux programmes d'apprentissage car, encore une fois, on n'a pas pensé à leurs besoins.
En terminant, je dirai simplement que les déficiences ne sont pas confinées à un secteur. Vous savez, il n'y a pas de prérequis pour être une personne handicapée. On naît avec une déficience ou on l'acquiert. C'est donc maintenant qu'il faut agir de manière coordonnée. Je ne voudrais pas devoir revenir dans dix ans dire les mêmes choses à un autre comité permanent.
Je m'en voudrais de ne pas parler de la nécessité d'investir dans les organismes nationaux. Si vous ne continuez pas à appuyer les organismes nationaux qui défendent les intérêts des personnes handicapées, nous ne pourrons plus nous faire attendre. Rappelez-vous que nous sommes une population en attente et nous attendons que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership.
Merci.
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Je m'appelle Lana Payne et je travaille pour l'Union des pêcheurs de Terre-Neuve, qui est associée au Syndicat national de l'automobile, de l'aérospatiale, du transport et des autres travailleurs et travailleuses du Canada. À Terre-Neuve, nous représentons environ 20 000 travailleurs dans les secteurs de la pêche et de la transformation du poisson.
J'ai pensé vous donner d'abord un bref aperçu de notre marché du travail et de la position des pêches dans ce marché, ainsi que de quelques problèmes auxquels nous faisons face et des solutions possibles.
À Terre-Neuve-et-Labrador, 45 p. 100 de notre marché du travail est situé dans les régions rurales, comparativement à 81 p. 100 pour la moyenne nationale. D'après DRHC, 31 p. 100 de nos travailleurs ont des emplois saisonniers. C'est le double de la moyenne nationale. Parmi les travailleurs ruraux, 68 p. 100 travaillent une partie de l'année comparativement à 52 p. 100 pour l'ensemble de la province. Nous avons le plus fort pourcentage de travailleurs saisonniers de toutes les provinces.
Les deux tiers des personnes qui travaillent dans des industries saisonnières retournent chaque année travailler pour le même employeur et ces industries dépendent de la disponibilité de cette main-d'oeuvre saisonnière, y compris dans l'agriculture, les pêches — que je représente — la construction et bien d'autres secteurs.
En 1987, le secteur des pêches de Terre-Neuve-et-Labrador valait environ 615 millions de dollars. En 2004, il en valait 1,2 milliard. L'an dernier, sa valeur a décliné à 913 millions de dollars et nous nous attendons à une autre baisse cette année. Je vais vous expliquer pourquoi. L'un des principaux facteurs est la force du dollar canadien. Lorsqu'on a une industrie qui dépend des exportations, comme la nôtre, cela crée des difficultés. De plus, les marchés ne nous ont pas fait de faveurs.
La semaine dernière, la Banque du Canada a essentiellement conclu que notre économie tout entière avait plus de difficultés que prévu à s'adapter à un monde où les prix sont élevés, où le dollar canadien est fort et où il y a de la concurrence. Ce sont les trois mêmes facteurs qui influent sur les pêches. Nous croyons que le gouvernement du Canada a une responsabilité et un rôle à jouer en ce qui concerne notre adaptation à ces facteurs.
Je ne vous parlerai pas beaucoup du programme d'AE, mais je vous dirai qu'il joue évidemment un rôle très, très important pour les travailleurs canadiens comme instrument de remplacement du revenu, et comme voie d'accès à la formation. Bien sûr, ces deux volets ont besoin d'être améliorés. Je vous signale qu'en 2002, le rapport de contrôle et d'évaluation du programme de l'AE indiquait que celui-ci avait permis de sauver 71 000 emplois en 2001 et 2002. Nous appuyons les améliorations à l'AE proposées par le Congrès du travail du Canada et je suis sûre qu'on vous en parlera lors de futures audiences.
Je vais sauter certaines parties car je n'ai que sept minutes. J'essaie de parler aussi rapidement que mes amis.
Pour illustrer l'incidence de la valeur du dollar canadien sur la pêche au crabe, par exemple, qui est l'espèce la plus rentable dans notre province, si le dollar canadien était au même niveau qu'en 2004, les pêcheurs et les 4 000 entreprises de transformation du poisson dans des centaines de collectivités auraient empoché 70 millions de dollars de plus.
L'emploi dans le secteur des pêches a changé depuis le moratoire. Il y a eu une baisse d'environ 13 à 15 p. 100 du nombre de pêcheurs et une baisse de près de 60 p. 100 dans le secteur de la transformation. Bien sûr, il y a beaucoup de femmes qui travaillent dans le secteur de la transformation et c'est surtout leurs emplois qui ont été touchés.
Trente pour cent des travailleurs du secteur de la transformation ont plus de 50 ans. Leur revenu moyen, de toutes les sources, y compris le revenu marchand et l'assurance-emploi, est d'environ 17 000 $. Plus de 55 p. 100 de ces travailleurs sont des femmes et 64 p. 100 n'ont pas terminé leurs études secondaires. Je répète: 64 p. 100 n'ont pas terminé leurs études secondaires.
Dans le secteur de la pêche, 33 p. 100 des travailleurs ont plus de 50 ans et 22 p. 100 d'entre eux sont des femmes. Leur revenu moyen est d'environ 31 000 $ par année et 59 p. 100 d'entre eux n'ont pas terminé leurs études secondaires. Il est très difficile de se recycler lorsqu'on est âgé et qu'on n'a pas fait d'études secondaires.
Il y a eu un effet très sensible, technologique dirais-je, sur les deux secteurs.
Côté transformation, les usines ont amélioré leur productivité de deux minutes mais cela a diminué le besoin de main-d'oeuvre. Si le besoin est moindre, il y a moins de travail pour les travailleurs.
Ceci vient en partie, en plus du dollar canadien, des conséquences de l'effondrement de la pêche au poisson de fond dans les années 90. Le programme de transition a pris fin mais les problèmes n'ont pas disparu. Certaines usines de poisson se sont adaptées et ne transforment que du poisson étranger. Malheureusement, avec la montée du dollar canadien, ce n'est plus possible. Beaucoup ressentent maintenant le moratoire.
Une évaluation de la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique en 1998 a fait ressortir que les clients, l'industrie et la collectivité rencontrent d'énormes problèmes qui ne pourront disparaître avant des décennies. Nous en sommes encore là.
On ne peut pas recycler tout le monde. Les programmes de recyclage et d'alphabétisation sont certes importants, mais ce n'est pas une solution pour tout le monde dans ces circonstances. Quand on a peu d'instruction, qu'on est âgé, qu'on n'a pas tellement de compétences facilement transférables, qu'on est très attaché à sa collectivité, qu'on vit dans une région où le chômage est élevé, qu'on est une femme ou qu'on a une grande famille et des responsabilités vis-à-vis de parents plus âgés, il est extrêmement difficile de déménager. Or, essentiellement, on demande aux gens d'abandonner ce qu'ils ont bâti durant toute leur vie.
Il faudrait dans le secteur des pêches un genre de revitalisation. Après quoi, il faudra un certain degré de rationalisation. Cela accroîtrait la stabilité et la durée de l'emploi pour ceux qui pourraient continuer à travailler dans ce secteur. Ils recourraient moins à l'assurance-emploi. Certes, il faut aussi une sorte de programme de retraite, un programme d'adaptation pour ceux qui doivent sortir du secteur.
Pour certains de ces secteurs, et en particulier pour les pêches, je pense qu'il faut faire face à la réalité. Nous venons de connaître deux décennies de restructuration considérable avec des compressions terribles dans nombre de ces usines.
Ces travailleurs sont épuisés. Beaucoup souffrent d'arthrite ou de problèmes de dos et prennent des médicaments tous les jours. Il s'agit très souvent de femmes de 58 et 60 ans qui font cela depuis 30 ans, qui travaillent sur des sols de béton, les mains dans l'eau froide et qui ne peuvent plus le faire. Les recycler pour aller faire quelque chose ailleurs au pays n'est tout simplement pas une solution.
Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas besoin de recycler les autres. Il faut prendre en considération les circonstances dans chaque cas. Un certain degré de souplesse est nécessaire.
Je dirais évidemment par ailleurs qu'il faut faire quelque chose pour la garde des enfants de ceux qui continuent à travailler.
Le budget de 2006 a au moins fait ressortir que nous avions un problème en ce qui concerne les travailleurs âgés. Le gouvernement va mener une étude de faisabilité en partenariat avec les provinces et les territoires afin d'évaluer les mesures actuelles et éventuelles pour remédier aux problèmes que rencontrent les travailleurs âgés déplacés, que ce soit de meilleurs programmes de formation ou de soutien du revenu ou encore des prestations de retraite anticipée. Il est grand temps d'agir.
Le programme qui a été annoncé la semaine dernière sur l'initiative ciblant les travailleurs âgés n'est pas un programme de retraite. Il ne réglera pas le problème. Il n'est pas assez riche et ne convient pas.
Bref, le Canada a un marché du travail varié. Tout le monde ne peut pas vivre en Alberta et nous devons faire tout ce que nous pouvons pour aider les gens là où ils vivent.
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Nous serons aussi concis que possible.
Bonjour à tous. Je m'appelle Mélanie Thomas et suis la directrice exécutive de la Newfoundland and Labrador Association for Community Living.
Notre association communautaire a pour objectif de défendre les intérêts des personnes ayant une déficience développementale et de leur venir en aide. Parmi les principes fondamentaux du mouvement communautaire, on retrouve l'indépendance et la citoyenneté. Aujourd'hui, notre espoir est de vous donner un exemple qui démontre qu'en mettant en place de bonnes structures de soutien, et qu'en s'assurant que les gouvernements provinciaux et fédéral assument un rôle de leadership politique en collaborant avec les organismes communautaires, il est possible de créer des programmes qui répondent réellement aux besoins des personnes ayant une déficience développementale.
Notre association assume la prestation et la coordination de programmes à l'intention de nos nombreux partenaires au sein du gouvernement et de la collectivité. De plus, nous jouons un rôle important en matière d'élaboration des valeurs et des politiques inclusives qui sous-tendent le concept communautaire depuis 50 ans dans notre province. Le mouvement communautaire accorde beaucoup d'importance à la diversité de nos collectivités. En effet, peu importe d'où les gens viennent, tous les Canadiens devraient avoir un sentiment d'appartenance.
À titre de membres du comité, vous vous déplacez d'un bout à l'autre du pays pour approfondir vos connaissances et appuyer la diversité et l'inclusion au sein de nos collectivités. Nous avons voulu comparaître aujourd'hui non seulement pour vous encourager à continuer votre travail mais également pour vous donner des informations vitales démontrant que le travail effectué par le comité se traduit par des résultats concrets pour la population des diverses collectivités de notre pays.
Dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, nous avons opté pour un modèle de collaboration et de partenariat avec les autorités fédérales, provinciales et communautaires. Le comité consultatif provincial qui s'intéresse aux mesures d'aide dans le contexte du travail regroupe des représentants de Service Canada au niveau fédéral et, au niveau provincial, des partenaires représentant les ressources humaines, les syndicats et le patronat, les services de santé et communautaires, le ministère de l'Éducation ainsi que des représentants communautaires des organismes de soutien en milieu de travail et de notre association.
Il y a également des groupes de travail régionaux sur l'emploi qui collaborent avec le comité consultatif provincial de soutien en milieu de travail. Ces groupes sont constitués de membres uniques et sont axés sur la libre circulation d'informations et d'idées, ce qui permet d'améliorer les politiques et les programmes pour le bien de l'ensemble des Canadiens.
Grâce au modèle adopté, le programme d'assistance en milieu de travail s'est traduit par de véritables perspectives d'emplois, certes, mais a également permis aux personnes ayant une déficience développementale d'établir des liens solides avec le marché du travail, ce qui a permis de renforcer le concept de la pleine citoyenneté des habitants de notre province.
Dans notre province, l'assistance en milieu de travail a pour objectif de venir en aide aux personnes ayant une déficience développementale pour qu'elles se trouvent et gardent un emploi à long terme au sein de la collectivité. Nous avons fait preuve de prévoyance en nous assurant que ces mesures d'aide sont transférables. Nous abattons les obstacles afin de permettre à ces personnes de profiter de tous les différents types d'emplois qui existent, peu importe le type d'aide qu'elles nécessitent. On ne peut parler de l'employabilité de personnes ayant une déficience sans discuter de mesures de soutien adaptées et adéquates.
S'il est vrai que la question de l'employabilité des personnes ayant une déficience développementale semble être complexe, à prime à bord, les organismes d'assistance en milieu de travail de notre province ont démontré qu'en mettant en place des mesures de soutien en milieu de travail adéquates et en créant des partenariats efficaces avec les autorités communautaires et gouvernementales, il est possible pour les personnes visées de se trouver de l'emploi à long terme. Les 693 personnes qui se sont trouvé un travail dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador au cours du présent exercice financier en témoignent. Il s'agit de vrais Canadiens qui ont de vrais emplois canadiens.
Pour ce qui est de la question du marché du travail, nous savons qu'il existe une pénurie de main-d'oeuvre dans beaucoup de régions de notre pays, même dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador. Grâce aux modèles de collaboration que nous avons adoptés dans notre province, il nous est possible de cerner la pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur des services et d'y remédier partiellement en faisant appel aux personnes handicapées dans notre collectivité qui constituent une force économique et une main-d'oeuvre inutilisée. Je vous demanderais de vous reporter au graphique qui figure dans notre mémoire. Vous y trouverez des statistiques précises portant sur l'emploi et les niveaux de revenu dans notre province ainsi que des données comparatives à l'échelle nationale.
Il est vrai que le Canada est constitué de beaucoup de collectivités, mais il faut savoir que les personnes ayant une déficience n'ont pas toujours eu l'occasion de contribuer socialement ou économiquement à leur collectivité. Les collectivités qui accordent une grande importance à l'inclusivité permettent à chacun, en les soutenant, de contribuer personnellement et économiquement. Un des objectifs du mouvement communautaire est d'aider les gens à se rendre compte que leur rêve de pleine citoyenneté peut effectivement se concrétiser. Ainsi, beaucoup des personnes qu'on aide découvrent leur vraie valeur en étant des employés productifs de leur collectivité et en participant pleinement à la vie économique et sociale.
Dans notre province, les mesures d'assistance en milieu de travail se sont traduites par de vraies carrières pour des gens qui touchent un vrai salaire. Par le biais de recherches effectuées au niveau provincial, on a pu confirmer que sans l'aide nécessaire pour assumer la transition vers l'emploi, beaucoup de personnes ayant une déficience continueraient à être exclues de l'ensemble des secteurs de nos collectivités et à vivre dans la pauvreté. Il est possible de régler ces problèmes par le biais de pratiques et de programmes inclusifs.
C'est dans les collectivités que les gens se sentent chez eux. Dans quelle mesure votre collectivité est-elle inclusive?
Afin que vous compreniez le succès de ces programmes à l'échelle locale, provinciale et nationale, nous allons maintenant vous parler des résultats positifs du programme d'assistance en milieu de travail de notre province. C'est Sean qui va vous donner les détails.
(directeur général, Avalon Employment Corporation, Newfoundland and Labrador Association for Community Living):
Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle Sean Whiltshire et je travaille chez Avalon Employment. Nous sommes un service d'emploi qui aide les personnes ayant des problèmes de développement à trouver du travail rémunéré permanent, à long terme et non subventionné. Je répète qu'il s'agit de personnes qui sont des employés précieux dans notre province et partout au pays.
Votre comité a un défi très important à relever mais nous avons également beaucoup d'atouts à utiliser. L'un d'entre eux est le modèle de collaboration que nous avons utilisé dans notre province en matière d'emploi.
Depuis 20 ans, Terre-Neuve-le-Labrador est considérée comme la capitale du chômage de notre pays. Nous venons ici vous dire que l'inclusion, le développement communautaire et l'employabilité des personnes handicapées est prioritaire pour nous et que nous avons répondu à l'appel. Nous allons vous donner maintenant à vous la possibilité d'utiliser ce que nous considérons ici comme un grand succès pour le reste du pays.
La réduction de la pauvreté commence par l'inclusion. L'inclusion commence par un emploi et la liberté économique. On ne peut être libre si l'on est pauvre. Nous devons éliminer les facteurs qui font obstacle au travail. Nous avons des programmes qui incluent tous les Canadiens de toutes les régions, urbaines comme rurales. N'est-il pas préférable d'aider quelqu'un qui a une déficience à trouver un emploi que de le déclarer inemployable, comme on l'a beaucoup fait, de l'empêcher en fait d'être un citoyen à part entière? C'est ce qui se passe dans notre pays partout et il nous faut des programmes qui permettent d'inclure tout le monde.
Dans notre province, nous avons un partenariat unique en son genre. Service Canada est un représentant du gouvernement fédéral. Notre ministère provincial des Ressources humaines, du Travail et de l'Emploi et l'organisation Community Living ont trouvé un moyen de travailler à l'intérieur de politiques et cadres nationaux au problème du marché du travail local et ont signé ainsi des ententes car, dans notre province, l'EDMT est cogérée.
Nous avons des solutions réelles à des problèmes locaux mais nous utilisons des programmes nationaux pour les régler. C'est unique en son genre parce que nous entendons très souvent dire qu'il y a une contradiction entre les programmes fédéraux et provinciaux. Nous avons transformé cette contradiction en atouts, et nous avons permis à des tas de gens de prendre la place qui leur revient dans l'économie canadienne.
Les employeurs considèrent les personnes handicapées comme des employés précieux qui ont beaucoup de compétences. Ce n'est pas parce qu'elles ne peuvent pas travailler que les personnes handicapées ne travaillent pas, mais parce que quelqu'un quelque part croit qu'elles ne le peuvent pas — qu'il s'agisse d'un parent, d'un enseignant, d'un employeur ou de l'État.
On parle beaucoup de leadership. Le véritable leadership c'est de faire sa part et de ne pas attendre que la solution tombe du ciel, de se mettre à travailler et mettre l'État et la collectivité au défi de trouver la solution qui va fonctionner localement, d'utiliser toutes les possibilités et d'agir comme un véritable partenaire.
Un des problèmes que nous avons connus dans notre province et dans notre pays, c'est de définir le rôle du secteur sans but lucratif. Notre rôle est de nous assurer qu'il y a des freins et contrepoids, que l'inclusion est une réalité, que le système est transparent et équitable.
Vous parcourez le pays depuis des années en tant que comité permanent et vous vous penchez sur les questions de ressources humaines. Je suis venu vous dire ici aujourd'hui que nous avons trouvé une solution partielle au problème social d'inclusion et d'égalité et au problème économique que représentent une démographie à la baisse et une population qui évolue. Notre solution est l'emploi, l'emploi de la population.
Les gouvernements, partout au pays, annoncent des programmes et des politiques pour attirer des travailleurs dans leur région. Ils sont utiles mais il ne faut pas oublier, comme l'a dit mon brillant collègue, que nous avons une population qui attend. De 10 à 15 p. 100 de notre population souffre d'une déficience et l'on n'a jamais compté ce que représenterait l'inclusion de cette population dans la population active. Quand on voit les compétences et les talents qui sont sous-utilisés parce qu'ils ne participent pas à l'économie canadienne, c'est absolument honteux. De 10 à 15 p. 100 de notre population n'a jamais la possibilité de travailler.
Pour mon organisation, votre travail au sein de ce comité est le partenariat entre Service Canada, les gouvernements provinciaux et locaux et l'Association for Community Living se traduit en termes d'emplois réels: 693 cette année dans la province mais, pour mon organisation seulement, ce sera 63 000 heures d'emplois rémunérés dans notre région géographique. Il s'agit d'emplois réels. Ce sont des services que vous avez reçus ici cette semaine et dans cet hôtel. Certains sont assurés par quelqu'un qui souffre d'une déficience. Vous ne l'avez peut-être pas remarqué, mais n'est-ce pas justement ce qui est important?
Nous savons que nous réussissons parce que ces personnes handicapées nous l'ont dit. Elles veulent prendre leur place dans l'économie canadienne.
Enfin, l'équité en matière d'emploi est la réponse de notre société à 100 ans de discrimination systémique. Les personnes handicapées ne se sont pas exclues elles-mêmes de notre société, c'est nous qui les en avons exclues. Il est grand temps que nous suivions la pratique exemplaire adoptée à l'extrémité de notre pays, dans notre province de Terre-Neuve-et-Labrador, et que nous constations des succès réels. Nous comprenons les problèmes mais nous savons que nous sommes capables de les régler et que nous pourrons le faire.
Merci.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle Jean Ann Ledwell.
Normalement j'aurais dû m'adresser à vous à Toronto où je vis mais du fait d'une situation familiale très grave ici, je suis revenue chez moi et, grâce à Mme Lafrance, je peux m'adresser à vous aujourd'hui.
Étant donné que je n'ai pas eu accès à mon ordinateur ni à mes notes, j'ai décidé de vous parler en mon propre nom et comme vous avez déjà entendu ici mes collègues, je ne vous parlerai pas de façon générale ou systémique mais bien de mon expérience personnelle, afin de vous présenter un exemple concret de ce dont on vous a déjà parlé très éloquemment.
Je dirai simplement, toutefois, que j'ai dit beaucoup de ces choses-là déjà à la fin des années 70 et au début des années 80 alors que je dirigeais les services de bibliothèque pour les personnes handicapées luttant pour l'équité et la reconnaissance de leur citoyenneté. Je trouve très troublant et désespérant, à 60 ans, de vous redire ce que je vous disais à 18, 19 et 20 ans.
Cela dit, bien que nous ayons d'excellents exemples de progrès, dans l'ensemble, le progrès n'a vraiment pas été très brillant.
Vous savez probablement tous, si vous l'avez lue, que l'étude financée en partie par votre gouvernement publiée en novembre 2005 et intitulée Inégalité des chances: Rapport sur les besoins des personnes aveugles et handicapées visuelles vivant au Canada a fait ce triste constat. Je vous en ai apporté la référence. Elle ne fait que souligner pratiquement tout ce que j'aurai à vous dire personnellement comme personne légalement aveugle. Pour les personnes aveugles ou légalement aveugles ou qui souffrent, comme moi, d'une perte de vision importante mais qui continuent... Vous savez, vous êtes magnifique dans le brouillard. Je fais les choses avec mon nez.
Ce qui est vraiment important, ce que je veux souligner aujourd'hui c'est ce dont on a déjà parlé, à savoir la nécessité de se définir soi-même comme inemployable si l'on ne veut pas mourir de faim. La majorité de mes concitoyens qui souffrent d'une déficience physique ou autre ou d'une déficience sociale ou autre veut le faire pour ne pas mourir de faim.
Vous savez probablement que les statistiques sont totalement criminelles à propos de la pauvreté. La majorité des aveugles disposent de moins de 10 000 $ par an pour vivre. À peine plus vivent avec moins de 20 000 $. Dans notre société d'aujourd'hui, nous savons très bien que cela ne mène pas loin. On vous a très bien dit que l'on ne peut avoir accès à un emploi réel et, d'une certaine façon, avoir accès à de l'argent en étant payés, on a beaucoup de mal à participer comme citoyen.
J'en resterai là pour le moment mais je voulais être très claire.
L'autre chose que je voulais dire avant d'en finir de cette question, c'est que de façon générale les programmes d'équité en matière d'emploi ne nous ont certainement pas bien servis dans notre secteur. Je vais donner un exemple personnel.
Je suis allée faire une demande d'emploi en répondant à une annonce qui avait la formule habituelle: « Ouvert aux personnes ayant toutes sortes de... groupes touchés par les mesures d'équité en matière d'emploi. » Je me suis donc présentée et il m'a fallu monter à pied jusqu'au troisième étage. Heureusement pour moi, mon problème est un problème de vue. J'étais capable de monter ces trois étages mais il m'est apparu très clairement très vite que ce que voulait en fait dire l'employeur, c'est qu'il recherchait une diversité ethnique. Il n'avait aucune notion de ce que signifiait diversité sur le plan des aptitudes.
Je voulais insister là-dessus. Il nous faut considérer les choses du point de vue de la différence dans les aptitudes. Malheureusement, notre société est organisée en fonction de l'inaptitude. Nous avons tous la même structure physique, la même structure mentale, la même structure sociale. Nous pouvons tous faire les mêmes choses de la même façon.
Tout le modèle médical auquel a fait allusion Marie a donné une importance énorme à cela dans toute cette réflexion.
Pour vous faire part de mon expérience, voici ce que j'ai à vous dire: je suis une femme de 60 ans avec des diplômes de haut niveau à mon crédit, qui a travaillé professionnellement dans quatre provinces et dans deux langues. Comme j'ai été blessée au travail en raison d'un manque d'adaptation, je suis inemployable. Malgré mes brillants antécédents de leadership dans les domaines où j'ai travaillé, je ne suis plus employable.
Je ne m'attendais jamais à en arriver là. J'ai dû me battre pour aller à l'université. C'est seulement quand j'ai obtenu une bourse de la province que tout d'un coup j'ai pu obtenir une résidence. J'ai dû me battre pour obtenir un emploi même si je n'avais pas d'automobile et que je ne conduisais pas — et je dois dire que c'est un domaine dans lequel nous aurions besoin d'un peu de collaboration. Dans une économie où nous essayons d'être écologiques, quand on voit que sur toutes les demandes d'emploi, sur tous les avis d'emploi on exige que les candidats conduisent ou possèdent un véhicule... Et je dois dire, comme je le fais depuis trois ans, que cela a été le principal obstacle pour moi, le fait qu'on me demande d'avoir mon véhicule, de conduire et d'avoir un permis de conduire. Est-ce qu'on ne pourrait pas trouver une autre façon de faire les choses? J'ai grimpé le Matterhorn; j'ai voyagé à l'étranger toute seule. Je sais prendre un autobus ou un taxi. Sur le simple plan économique, le fait d'avoir une automobile et de l'entretenir coûtait environ 8 000 $ par an à la dernière organisation avec laquelle j'ai travaillé. Croyez-moi, il faut vraiment prendre beaucoup d'autobus, de transport en commun et de taxis pour en arriver à ce montant.
L'autre point important sur lequel je voudrais insister, c'est que l'ordinateur qui est devenu un allié — en tout cas pour les personnes aveugles — est aussi devenu notre pire ennemi puisqu'on n'a plus besoin de personnel de bureau, et c'est évidemment à cause de cela que j'ai été blessée et même les avocats commencent à se rendre compte que c'est un gaspillage d'argent de demander à des professionnels de haut niveau et à des directeurs de faire eux-mêmes leur travail de bureau.
Je voudrais ajouter que l'autre gros problème, c'est l'attitude condescendante qu'on manifeste à l'égard des personnes handicapées et le fait qu'on n'attend rien de ces personnes — vous savez, l'histoire de la prophétie qui s'autoréalise: on ne s'attend pas à ce que vous ayez de bons résultats à l'école, à ce que vous ayez de bons résultats au travail, et à ce que vous duriez. On ne s'attend pas à ce que vous soyez là tout simplement, on ne s'attend pas à ce que vous soyez présent.
Quand nous avons fait une présentation il n'y a pas longtemps, j'ai été amusée de voir que quand nous parlions d'accessibilité et de conception universelle des édifices publics et des hôtels, etc., tout le monde parlait comme si les seules personnes handicapées qui seraient présentes dans ces locaux, ce serait des invités. Personne n'a pensé un seul instant qu'il pourrait aussi s'agir du gérant de l'hôtel ou d'un membre du personnel ou du commis à la réception. Personne n'a envisagé la possibilité que des personnes handicapées soient employées dans ces établissements.
Voilà quelques constats personnels qui ont une importance vitale pour les gens qui voudraient participer à notre société.
J'ai très soif, et j'aurais dû prendre de l'eau, mais je voudrais savoir où j'en suis pour le temps.
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J'ai une dernière observation à faire en conclusion, monsieur le président.
Même les agences qui sont censées nous aider — les agences publiques, parapubliques et quasi-publiques comme la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail avec laquelle je suis maintenant aux prises — ne tiennent tout simplement pas compte des besoins particuliers des personnes handicapées victimes d'un accident du travail qui ne répond pas aux normes. Aucun des processus ni aucun des moyens de communication n'est accessible. Les soutiens qui devraient être là pour aider quelqu'un comme moi à réintégrer le marché du travail n'existent tout simplement pas.
L'autre côté de la médaille, c'est que, parce que j'ai des antécédents impeccables sur le marché du travail, je suis considérée comme employable et qu'on me refuse donc des prestations. Alors, au lieu de vivre avec un salaire de cadre supérieur, je vis avec moins de 10 000 $ par an, avec le soutien des groupes chrétiens avec qui j'ai des liens. C'est scandaleux.
En temps normal, j'hésiterais beaucoup à parler de mon cas personnel. Pour tout vous dire, si je vous en parle aujourd'hui, c'est pour vous sensibiliser à la situation. Je suis une des rares personnes aveugles ou malvoyantes — nous sommes moins de 25 p. 100 de cette population — à avoir le privilège d'occuper un emploi dans notre société — je vous assure que ce n'est pas encore un droit — et pourtant, voyez ce qui arrive à quelqu'un comme moi qui a des antécédents aussi reluisants lorsque nous essayons de nous prévaloir de certains des soutiens qui sont censés exister.
Enfin, je vous implore — je connais certains d'entre vous de réputation — de faire tout en votre pouvoir pour que de véritables progrès soient réalisés relativement à toutes ces questions, car il y a déjà trop de livres qui dorment sur les tablettes à la Bibliothèque nationale.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
D'abord, je tiens à vous remercier d'être ici ce matin et de nous faire partager votre analyse de cette situation à la fois complexe et pas trop compliquée, de sorte qu'elle pourrait être réglée. Il s'agirait parfois d'une volonté et d'un parti pris pour y parvenir.
Je vais commencer par Mme White et Mme Thomas, qui avaient parlé particulièrement de la problématique des personnes handicapées. Je reviendrai à Mme Ledwell un peu plus tard.
J'ai été un peu étonné parce que je n'étais pas trop sensibilisé aux statistiques. Cependant, si j'ai bien compris, il existe 75 p. 100 des femmes qui ont un handicap auxquelles on ne fait pas appel pour travailler.
Selon vous, parmi toutes les personnes ayant un handicap, combien y en a-t-il actuellement, parmi celles au sujet desquelles vous nous avez donné des statistiques, qui pourraient travailler? Je parle des personnes qui sont aptes à travailler malgré leur handicap. Puisqu'on dit qu'on ne fait pas appel, pour travailler, à 75 p. 100 des femmes handicapées, combien d'entre elles pourraient être aptes à travailler? Pouvez-vous nous donner des chiffres à cet égard?
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Je ne sais pas si je pourrais vous donner le pourcentage exact de celles qui seraient aptes à travailler. Ce qui a été dit, c'est que 75 p. 100 d'entre elles sont sans emploi ou ne participent pas au marché du travail. Dans bien des cas, c'est parce qu'elles ont renoncé à y participer.
À l'échelle nationale, nous comptons un nombre important de sans emploi parmi les femmes et les hommes handicapés, quel que soit leur groupe d'âge. Quand j'ai dit qu'il faudrait accroître la participation des personnes handicapées au marché du travail, pour la faire passer de 44 à 66 p. 100, j'ai omis de préciser que les efforts en ce sens devraient viser toutes les personnes handicapées. Je suis moi-même devenue handicapée à l'âge de 27 ans. J'étais enseignante. Quand je suis devenue handicapée, on m'a refusé la possibilité de continuer à enseigner à cause des milieux dans lesquels il m'aurait fallu travailler. Pendant dix ans, je suis restée assise dans mon fauteuil roulant et, pendant dix ans le milieu de travail et l'attitude des gens m'ont empêché de travailler. Je suis donc là devant vous aujourd'hui comme le parfait exemple de quelqu'un qui avait réussi, car j'avais fait mes études avant de devenir handicapée, et j'avais une expérience de travail.
Pour ce qui est des 44 p. 100 des personnes handicapées qui travaillent, je vous ferai remarquer que, d'après les données sur l'équité en matière d'emploi — qui, je le répète, sont lamentables —, la majorité d'entre elles occupent des emplois de bureau ou de soutien administratif. Il n'y en a pas beaucoup qui finissent par devenir gestionnaires, cadres supérieurs ou PDG, et ce, peu importe la classe d'emplois. Tant que nous n'aurons pas des soutiens pour les personnes handicapées et une société accueillante — j'entends par là une société où l'accueil fait aux personnes handicapées est dicté par le gouvernement —, tant que nous n'aurons pas une société qui comprend que nous avons des besoins auxquels il est possible de répondre, que nous ne coûtons pas trop cher, que nous ne sommes pas des personnes jetables et que nous sommes prêtes et aptes à participer et à contribuer à notre économie, nous continuerons à avoir une participation très faible au marché du travail.
Je vous remercie.
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Non, je crois que la réponse est très simple. Il ne s'agit plus d'un programme social, mais bien d'un facteur économique. Si vous voulez attirer l'attention des gens, il faut leur dire que c'est une question d'argent.
Je peux vous dire comme c'est formidable et comme c'est encourageant de voir quelqu'un qui a enfin réussi à s'intégrer, qui arrive dans mon bureau, son premier chèque de paye à la main, qui me regarde droit dans les yeux et me dit qu'il a, lui aussi, sa place dans la société, tout comme moi. C'est vraiment quelque chose d'extraordinaire, mais ce que je tiens surtout à vous faire savoir, c'est que vous êtes là parce que vous avez besoin de ce groupe de personnes. Le Canada a besoin de cette communauté. Nous avons des stratégies pour attirer les travailleurs, et pourtant nous avons laissé pour compte une partie importante de notre population. La réponse est donc très facile: il faut dire aux gens que l'inclusion n'est plus une question sociale mais une question d'ordre économique. Je mets les Canadiens au défi de reconnaître que, si la question est présentée sous l'angle économique, les attitudes vont changer, comme elles ont changé par le passé à l'égard de bien des questions. Il faut ramener cela à une question économique plutôt que sociale, et nous savons que l'inclusion coûte quelque chose.
Voici, les programmes coûtent cher, mais les établissements et les soins de santé à long terme coûtent cher aussi. Nous avons le choix: mieux vaut prévenir que guérir. Nous ne nous présentons pas comme le cousin pauvre qui a besoin d'un coup de main. Nous avons une solution à proposer. Vous vous déplacez dans le pays à la recherche de réponses? Nous les avons les réponses, et nous sommes là pour vous les faire connaître.
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Je voudrais notamment, madame, vous parler des mesures de soutien à l'emploi de Service Canada qu'on appelle les services d'aide à l'emploi. Dans notre province, jusqu'à janvier, au bout de six mois vous ne deviez plus avoir besoin d'aucun soutien. Cela veut dire que pour une personne non voyante, on lui retirait sa canne. Dans le cas d'une personne à mobilité réduite, on lui retirait sa chaise roulante. On vous disait que vous aviez six mois pour vous améliorer. C'est la stricte vérité, c'est ce que disait Service Canada.
Nous disposons maintenant d'un mécanisme pour dialoguer avec Service Canada au niveau local et au niveau national afin de changer cette situation. Nous avons une entente qui montre que ces programmes ne fonctionnent plus en opposition et que ce n'est pas parce que vous n'êtes pas admissible à l'assurance-emploi que vous ne pouvez pas avoir un service. Actuellement, tous les Canadiens qui ont besoin de services dans notre province, qui ont une déficience de développement, peuvent le demander, notamment grâce à des programmes qui leur donnent accès à l'assurance-emploi.
Si vous avez été enfermé dans un établissement pendant 40 ans et qu'on vous met dehors parce que quelqu'un trouve tout d'un coup que c'est une bonne idée, et que personne n'a réfléchi à un emploi pour vous, et que vous n'avez jamais travaillé — donc vous n'avez pas d'assurance-emploi — vous n'allez pas avoir de travail, parce que le gouvernement fédéral ne vous compte même pas.
C'est cela qui est essentiel. Il faut que les programmes soient ouverts. Il faut supprimer cet obstacle de l'admissibilité à l'assurance-emploi et de la récupération parentale. Nous avons 40 milliards de dollars dans la partie deux de l'assurance-emploi. Qu'en faisons-nous? Je sais qu'il y en a une partie qui est versée au Trésor. Mais n'oublions pas que c'est l'argent des travailleurs canadiens. Ils veulent s'assurer que d'autres travailleurs vont prendre leur place. On a parlé des baby boomers et du vieillissement de la population. Qui va s'occuper de nous?
Il faut que les programmes fonctionnent aux niveaux fédéral et provincial. Nous pouvons coopérer. Ce n'est pas toujours facile, mais nous avons réussi dans notre province, absolument. Ce sont les choses qu'il faut changer.
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C'est une question à laquelle il n'est pas facile de répondre compte tenu de la complexité des divers programmes de sécurité du revenu aux niveaux fédéral et provincial, et il faudrait probablement essayer de voir en particulier pourquoi ils ne se complètent pas.
Prenons le modèle. Vous avez le programme de prestations d'invalidité du RPC. Vous avez le soutien du revenu au niveau provincial. Il y a le système d'assurance-emploi. Il y a l'indemnisation des travailleurs. Et il y a aussi l'assurance privée. J'aimerais bien pouvoir vous montrer comment tout cela s'intègre, mais je ne peux pas. Je ne peux pas vous dire qu'il y a une bonne correspondance entre tous ces programmes.
L'exemple le plus simple, c'est le mien. Quand je suis devenu handicapé, mon assurance privée — un bon conseil, allez tous lire de près ce que vous propose votre assurance privée — m'a fourni des soins sur 24 heures dont j'avais besoin pendant deux mois. Pour obtenir quelque chose de la province, qui voulait me placer dans un établissement pour le restant de ma vie, on m'a dit que je devais être pauvre. J'ai donc dû faire appel au soutien du revenu.
À ce moment-là, j'ai fait une demande auprès du programme Opening Doors, c'est-à-dire Portes ouvertes ou, comme je l'appelle, le programme Portes fermées, qui vise à trouver un emploi pour les personnes handicapées. On m'a proposé, à moi qui avais un diplôme et tout un bagage d'études, un emploi où j'aurais coché les réponses aux questions qu'on pose aux jeunes de 16 ans qui répondent au questionnaire du permis de conduire. Si j'avais eu une blessure au travail et que les gens de l'indemnisation des accidents du travail avaient dû s'occuper de moi, ils ne m'auraient probablement même pas laissé passer la porte.
Donc tant qu'il n'y aura pas des liens entre tous ces systèmes... Si je bénéficie du soutien du revenu et que j'ai besoin d'une carte de paiement des médicaments parce que j'ai un problème mental — et il n'y a pas de miracle, cela ne disparaît pas — au bout de six mois, on va me retirer cette carte en vertu des dispositions prises par notre province. À ce moment-là, je serais à l'assurance-emploi, mais comme je serais à l'assurance-emploi, je ne pourrais plus faire appel au soutien du revenu et obtenir de nouveau ma carte. Je pense que vous voyez ce que je suis en train de faire. Voilà ma réponse.
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Je vous promets d'être brève. Je ne veux pas monopoliser la conversation.
En 1996-1997, un document a été élaboré par le gouvernement fédéral; il énonçait trois principes fondamentaux pour les personnes handicapées: l'éducation, l'emploi et l'aide aux personnes handicapées.
Cette aide aux personnes handicapées est individuelle et unique. J'ai une chaise roulante dans laquelle je m'assois chez moi quand je suis fatiguée. J'ai une marchette que j'utilise pour faire le tour de ma mare tous les jours. J'ai une canne dont je me sers quand je viens à des endroits comme celui-ci. Ce sont des aides dont je dispose en fonction de ma déficience.
Une personne sourde peut utiliser un téléimprimeur au travail ou faire appel à un interprète. Pour une personne qui a une déficience développementale, cela peut être un travailleur de soutien.
On a accompli beaucoup de travail là-dessus au niveau national. Je crois que c'est en janvier l'année dernière que nous avons envoyé encore un document au Bureau de la condition des personnes handicapées et au ministre libéral, le prédécesseur du ministre actuel, au ministère du Développement social. Les informations disponibles sont considérables.
Je crois que ce qui est important, c'est de reconnaître qu'il faut qu'on ait un cadre national pour que l'aide puisse être donnée au niveau individuel, qu'elle relève des fonds distribués par les provinces ou par un programme quelconque.
Personnellement, quand il y a transfert d'argent aux provinces, si les gens parlent de liens, je parle plutôt de noeuds, parce que dans ce genre de situation, il est beaucoup trop facile d'utiliser l'argent pour autre chose.
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J'ajoute que d'après ma propre expérience, nous avons des systèmes qui marcheraient en théorie. Mais j'ai constaté que le problème, c'est la culture qui semble endémique dans nos bureaucraties des services sociaux, et qui consiste à essayer de trouver des moyens d'économiser, des moyens de vous empêcher d'obtenir l'argent auquel vous devriez pouvoir avoir accès en cas de besoin, etc.
On nous dit qu'il y a des gens qui s'opposent à cette culture du tout m'est dû. Je suis d'accord; je suis contre la culture du tout m'est dû. Je crois que j'ai droit à certaines choses en tant que citoyenne, et je suis d'accord avec la façon dont on utilise cette formule. En revanche, il y a une culture opposée à laquelle nous nous heurtons chaque jour dans notre bureaucratie, c'est la culture du refus, la culture du soupçon, la culture de la méfiance parce qu'on vous soupçonne de cacher quelque chose, de ne pas être honnête, de ne pas être franc et d'essayer d'obtenir quelque chose à quoi vous n'avez pas vraiment droit. Voilà ce que j'ai pu constater personnellement quand j'ai été confrontée au système ces trois ou quatre dernières années après mon accident. Évidemment, cela fait des années que j'entends ce genre de commentaires de la part d'autres citoyens.
Je pense que sur le papier, en théorie, nous avons un système qu'on considère un peu partout dans le monde comme le meilleur système, et en théorie je suis d'accord. Mais il y a eu un dérapage épouvantable au niveau de la mise en place de ces systèmes et des bureaucraties qui se sont développées pour administrer. Je crois qu'il faudrait vraiment étudier cette question.
Je crois aussi, comme le disait Marie, qu'il faudrait peut-être examiner de façon beaucoup plus stricte les critères de conditionnalité des transferts de paiements du gouvernement fédéral aux provinces. Je le sais bien que les provinces, en particulier la belle province, tiennent à leur indépendance et je suis d'accord. Je pense que nous devrions avoir le maximum d'indépendance pour adapter les programmes aux conditions spécifiques de notre province, de notre région et de notre nation.
Nous n'avons même pas parlé des questions autochtones et des problèmes de déficience dans ce domaine aujourd'hui, et on n'ose même pas effleurer le sujet tellement c'est épouvantable.
Tout en étant d'accord sur le principe, je crois que quand on transfère de l'argent pour des programmes sociaux, il faut exiger qu'on respecte la Charte canadienne de droits, les codes des droits de la personne et les conventions que nous avons signées avec les Nations Unies. À cet égard, le gouvernement fédéral a un rôle vital à jouer.
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Monsieur Allison, il faut que les mesures de soutien aux personnes handicapées soient transférables. Comment peut-on annoncer à quelqu'un qu'il va bénéficier d'aide à la mobilité pendant seulement six mois? Aussi, les gens ayant des déficiences comportementales ne souffrent pas, ne sont pas non plus en train de dépérir. C'est simplement leur manière d'être. Ils font les choses différemment.
Lorsque vous et moi allons travailler, vous prendrez peut-être la voiture tandis que j'emprunterai l'autobus. Nous nous sommes quand même tous les deux rendus mais avec des moyens différents. Personne toutefois n'a l'air d'avoir fait les choses de travers. C'est bien autre chose lorsqu'on dit à quelqu'un qu'on va lui trouver le soutien dont il a besoin pour se rendre au travail, tout en le traitant avec condescendance puis en ajoutant qu'on lui trouvera quelque chose à faire et un endroit où se loger... Ça veut tout simplement dire un établissement, où on lui fera surconsommer des médicaments, où on n'en parlera plus et où on n'en tiendra pas compte. Les soutiens renforcent d'abord l'identité personnelle.
Que feriez-vous si demain matin vous deveniez paraplégique? Est-ce que vous demeureriez député? Est-ce que vous resteriez encore à votre domicile? Ce sont des questions que les Canadiens doivent se poser tous les jours, et pourtant, on ne tient aucunement compte de circonstances qui nous ont menés à notre situation. C'est le Parlement du Canada, c'est notre société et c'est nous qui avons créé de tels obstacles. À mon avis, c'est peu de chose que de tenter de les éliminer, mais aussi que de donner aux personnes se trouvant dans cette situation toute la liberté, les choix et les appuis dont elles ont besoin pour devenir députés, PDG ou travailleurs communautaires.
Nous sommes en mesure de tirer parti d'une occasion très rare. Nous pouvons enfin invoquer des raisons économiques et non sociales pour inclure les personnes handicapées car telle est devenue la réalité. La population active du Canada vieillit et ses effectifs diminuent. Si vous tenez à continuer à prendre votre café chez Tim Hortons et à ce qu'on mette vos achats chez Loblaws dans des sacs, alors il faut que tout le monde dans notre société puisse travailler. De plus, une stratégie d'immigration qui force un médecin ayant fait ses études à l'étranger, et dont on a pourtant un urgent besoin, à travailler au supermarché n'est pas bien efficace.
Il faut qu'on reconnaisse les diplômes étrangers et qu'on inclue tout le monde, et enfin qu'on reconnaisse la nécessité d'adapter les mesures de soutien aux besoins individuels et de les faire concevoir par les intéressés eux-mêmes. Nous connaissons les solutions à apporter, cela ne fait aucun doute. Il nous reste simplement à trouver nos partenaires. Nous, les personnes handicapées, sommes là et sommes prêtes à nous mettre au travail. Le monde du travail canadien est-il prêt à nous accueillir?
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Merci, monsieur le président.
Premièrement, je veux vous remercier de vous être déplacés pour nous faire votre présentation. Une chose semble être claire dans ce que vous avez mentionné depuis ce matin: lorsque les personnes sont dans le besoin, on dirait que le système fait en sorte de leur nuire encore plus, si bien qu'elles s'enfoncent encore davantage. Cela étant dit, vous pourriez peut-être faire un commentaire à cet égard, si le coeur vous en dit.
Cependant, j'aimerais quand même revenir sur les commentaires qu'a faits Mme Payne plus tôt ce matin, portant sur ce que j'appelle le travail saisonnier.
Chez nous, au Nouveau-Brunswick, nous sommes aux prises avec cette problématique du travail saisonnier, peut-être pas dans le domaine des pêches, mais dans l'industrie forestière, certes. Lorsque nous examinons cette problématique du travail saisonnier, nous nous apercevons que souvent, beaucoup de gens dans ce pays ne comprennent pas que si nous perdons ces travailleurs saisonniers, nous devrons les remplacer. Mais par qui?
Voici ce que je veux dire par là. Souvent, il s'agit d'un travail pour une durée potentielle de 14, 16, 18 ou 20 semaines. Parfois c'est moins; parfois c'est un peu plus. Si on offre à ces personnes de leur donner une formation pour les envoyer travailler ailleurs dans d'autres industries ou dans d'autres provinces, cela ne règle absolument pas le problème. On ne fait qu'accentuer, jusqu'à un certain point, la problématique existante.
C'est clair qu'ils ne pêcheront pas du poisson au centre-ville de Toronto. Ils ne vont pas faire pousser non plus les épinettes nécessaires pour fabriquer les deux-par-quatre à Montréal. Il faut donc être réaliste, mais à mon avis, une bonne proportion de Canadiens n'ont pas encore compris cette réalité.
En fait, ce n'est pas un problème d'assurance-emploi qui se pose dans les régions rurales, mais un problème d'emploi. Si on avait des industries qui pouvaient compenser la différence sur 12 mois au gré des saisons, il n'y aurait pas de problème, car les gens veulent travailler. Par contre, cela ne signifie pas non plus qu'il faille tout faire pour essayer de donner une nouvelle formation aux travailleurs saisonniers et les envoyer ailleurs. De fait, le problème sera double, triple, etc. la saison suivante.
J'aimerais entendre les commentaires de Mme Payne ou d'autres personnes à cet égard.
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Je vous remercie de votre question.
À notre avis, il faut garder à l'esprit que le marché du travail n'est pas une chose simple. Il existe en effet toutes sortes d'emplois et d'industries. Ce ne sont pas les travailleurs qui sont saisonniers mais les industries. Dans le cas de la pêche, les dates d'ouverture et de fermeture ne sont pas le fait de ceux qui travaillent à bord des navires. Il faut aussi se rappeler que nous sommes une nation maritime. Malgré cela, il y a des moments de l'année où il est interdit de travailler dans les régions côtières. Ainsi, il est interdit de pêcher dans l'Atlantique Nord en janvier, à moins que ce ne soit à 200 milles des côtes et à bord d'un navire de 200 pieds. Cela exclut donc les gens qui travaillent à bord d'un navire de 25 pieds et dont l'activité soutient pourtant sa collectivité. C'est ainsi.
La question qu'un membre d'un comité comme le vôtre chargé d'étudier l'employabilité doit se poser, c'est si tel emploi a une valeur quelconque. À mon avis, oui, il en a une. Il compte aux yeux de ceux qui vivent dans les petites collectivités. Celles de Terre-Neuve-et-Labrador, mais aussi des autres régions côtières du Canada, et qui représentent une part très importante de notre identité. Nous ne pouvons pas nous transformer en une nation exclusivement urbaine. Les gens vivent où ils vivent et devraient avoir le choix de le faire.
Plus tôt, vous avez parlé du rôle qui incombe au gouvernement fédéral à cet égard. Il ne fait aucun doute qu'il doit effectivement en assumer un. Quels genres de problèmes surgiraient si tout le monde vivait à Toronto, à Montréal et à Vancouver? Ce serait absurde dans une nation comme la nôtre. Il faut que nous pensions à là où vivent les gens et aussi à leur apport à notre société, qu'ils vivent dans un village de 400 âmes situé sur la côte sud de Terre-Neuve, ou dans un quartier en plein centre de notre plus grande ville.
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D'abord, monsieur le président, je vous remercie des bons mots que vous avez eus à mon égard relativement à ma préoccupation quant au soutien au revenu des personnes âgées. Je sais que vous êtes une personne sensible et je suis convaincu que vous allez travailler fort pour convaincre votre parti d'adopter mon opinion.
Je vais poser une question à Mme White, mais auparavant, j'ai une deuxième question à poser à Mme Payne, plus particulièrement.
Au regard d'une suggestion faite par Mme Savoie plus tôt, puisque tout cela ne fonctionne pas bien sur la plan national, ne serait-il pas mieux que cela soit pris en charge par les provinces et le Québec? En effet, cela relève de deux champs de compétence provinciale, soit le fonctionnement de l'appareil, en ce qui concerne les relations de travail, et la formation.
Vous avez dit que cela limiterait la mobilité. N'y a-t-il pas là un faux problème, étant donné que la mobilité n'est que théorique et que, dans les faits, vous avez reconnu plus tôt que cela ne fonctionne pas? Voilà donc la question que je vous pose.
Mon autre question, qui s'adresse à Mme Payne, est en même temps un élément d'analyse. Il me semble qu'on nage actuellement en plein paradoxe. Dans le passé, les travailleurs âgés gardaient plus longtemps leur emploi, à cause des conventions collectives, de l'ancienneté. De fait, lorsqu'il y avait des mises à pied, c'étaient les plus jeunes qui partaient, car lors de mises à pied massives, l'entreprise ne fermait pas nécessairement ses portes.
Dans le contexte contemporain, lorsqu'il y a des pertes d'emploi, c'est en grande partie dû à la fermeture complète d'une entreprise. C'est donc dire qu'il y a quelque 20 ou 25 p. 100 de la main-d'oeuvre — sûrement 20 p. 100, dans la plupart des endroits répertoriés —, qui a plus de 55 ans.
Ne vient-on pas là, du coup, puisqu'on n'a pas de mesures d'adaptation pour ce groupe d'âge, de mettre ces personnes dans une situation similaire à celle des personnes ayant un handicap? C'est donc dire que dans la situation actuelle, avoir 55 ans devient une barrière rigide, un handicap comme celui des personnes handicapées. Mon propos ne consistait pas à comparer l'un et l'autre. C'est donc dire qu'on n'est pas en train d'alourdir davantage la problématique. Voilà ma deuxième question.
Quant à la troisième question, n'est-on pas en train de constater que ce n'est pas en fait la politique qui fait défaut, mais plutôt la culture? On a développé une culture d'exclusion, alors qu'on veut des politiques d'inclusion.
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Est-ce qu'on cherche à mettre ma mémoire à l'épreuve?
Par rapport à une logique d'exclusion, oui, c'est le cas selon moi, et c'est souvent involontaire. À mon avis, les gens ne pensent tout simplement pas à nous. Toutefois, ainsi que Sean l'a si bien exprimé, ils sont maintenant forcés de le faire, et je me réjouis du fait que notre situation économique ne leur donne pas d'autres choix.
Pour revenir à votre question au sujet de la mobilité, les mesures de soutien aux personnes handicapées sont importantes. Dans l'ensemble du pays, et aux fins de nos organisations, les personnes handicapées au Canada se disent préoccupées par le manque d'uniformité des services, et ici, je ne tiens pas à utiliser le terme « normes » parce que ça énerve trop les gens du fédéral. Cela étant dit, que je me trouve à St. John's, Terre-Neuve, à Abbotsford, Colombie-Britannique, ou à Inuvik, si je reçois des mesures de soutien à la mobilité de la part du gouvernement, non seulement le délai de carence de deux semaines disparaîtra, mais aussi celui de neuf mois. C'est cela l'uniformité, et c'est ce qui me paraît le plus important. Si je vis à St. John's, j'aurais accès à un logement abordable si j'en ai besoin, mais j'aurai droit à des services de garde pour mes enfants si je vis au Québec et à des services de transport adapté pour me rendre au travail si j'habite Abbotsford, en Colombie-Britannique.
C'est l'uniformité des soutiens aux personnes handicapées qui a une incidence sur leur mobilité. Si toutefois il n'y a pas moyen de créer de telles conditions de manière obligatoire, alors je ne sors pas de chez moi.
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Dans un cadre national, il arrive souvent qu'on n'entre pas dans une catégorie donnée d'avance. Dans le cas d'ententes fédérales-provinciales, il y a conflit lorsque les gens ne collaborent pas. Le gouvernement fédéral dira que c'est son argent, la province répliquera qu'elle en a besoin pour telle ou telle raison, et personne ne réussira à s'entendre. Très souvent, nous devons composer avec cela. Ce qu'il y a de plus difficile à faire comprendre aux deux parties, c'est que l'argent n'appartient ni à l'une ni à l'autre mais au-delà des deux, à la collectivité.
Je viens de Terre-Neuve-et-Labrador, et je suis à même de constater que le gouvernement fédéral accorde beaucoup d'argent à des gens de chez nous pour qu'ils acquièrent certaines habiletés puis, ces derniers s'en vont en Alberta. Je n'y vois rien à redire puisque je fais partie d'une fédération. Ce contre quoi j'en ai cependant, que ce soit de la part du Québec, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, du Yukon ou du Labrador, c'est le refus de reconnaître que la collaboration doit prendre des formes très différentes selon l'endroit. Récemment, à l'occasion du transfert des responsabilités à l'Ontario, dans le cadre de l'Entente sur le développement du marché du travail, on a bien pu voir quels problèmes surgissent lorsque la collaboration vient à manquer. En fin de compte, ce sont les collectivités qui y perdent quand ce sont elles qui essaient de trouver une solution.
Sans collaboration entre le fédéral et les provinces, sans respect des caractéristiques de la province, des collectivités et de la région des gens, nous perdons tous notre temps. Si l'on opte pour une norme nationale, je peux vous dire d'avance qu'une réponse à la manière de la rue Bay ne fera pas l'affaire rue Water à Terre-Neuve-et-Labrador.