FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 6 décembre 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte. Elle porte sur la politique étrangère du Canada pour l'Arctique.
Je tiens à remercier Anja Jeffrey, directrice du Centre pour le Nord, au sein du Conference Board du Canada. Merci infiniment de votre présence parmi nous.
Nous espérions également entendre le témoignage de Greg Poelzer, professeur à l'Université de la Saskatchewan. Certains problèmes font en sorte que nous espérons entendre son témoignage ultérieurement.
Quoi qu'il en soit, nous tenons à vous remercier, madame Jeffrey, de comparaître devant nous dans le cadre de notre étude sur l'Arctique. Nous écouterons tout d'abord votre déclaration préliminaire qui durera environ 10 minutes. Comme vous êtes notre seule témoin, vous pourrez dépasser cette limite de temps, puis les députés ministériels et de l'opposition vous poseront des questions.
Madame Jeffrey, c'est à vous la parole.
Merci. C'est avec plaisir que je comparais devant vous.
Je voudrais vous parler brièvement de moi. Je m'appelle Anja Jeffrey. Je suis d'origine danoise, mais je suis une citoyenne canadienne maintenant. Je suis une spécialiste en politique étrangère. Pendant 17 ans, j'ai fait carrière en diplomatie pour le compte des Affaires étrangères du Danemark. J'ai eu deux affectations à l'étranger: aux États-Unis, dans les années 1990, puis au Canada de 2003 à 2007, à titre d'ambassadrice adjointe. J'ai donc vécu quatre ans à Ottawa. J'y ai appris à connaître le pays, ses orientations, sa vie politique et ses diverses régions, pour finir par en tomber amoureuse et décider d'y vivre en permanence. En 2009, mon mari, mes enfants et moi avons immigré au Canada.
J'ai une formation polyvalente: un bac en administration des affaires et une maîtrise en relations internationales. Pendant mon affectation ici, je me suis principalement intéressée aux questions circumpolaires et aux enjeux concernant le Nord, sur les plans tant économique que social. À mon retour au Danemark en 2007, j'ai été nommée directrice du comité danois de gestion des ressources de l'Arctique. Un de mes dossiers portait sur les phoques et l'interdiction de la chasse au phoque décrétée par l'Union européenne. Nous n'étions pas en faveur de cette interdiction. Nous avons mené des négociations pour le compte du Groenland et essayé dans toute la mesure du possible d'éliminer cette interdiction.
Lorsque je me suis installée au Canada en 2009, j'ai commencé à travailler pour le gouvernement canadien. En 2011, j'ai obtenu l'emploi que j'occupe actuellement: directrice du Centre pour le Nord au sein du Conference Board du Canada. Je voudrais ajouter quelques mots sur le centre.
Ma déclaration durera 10 minutes. J'en ai des exemplaires qui pourront vous être distribués. Je vais donc poursuivre ma lecture tout en faisant les rapprochements entre la politique intérieure et la politique étrangère, un aspect des plus importants. Par la suite, je serai heureuse de répondre à vos questions.
Tout d'abord, je voudrais vous dire quelques mots au sujet du Centre pour le Nord. Le centre offre une tribune aux dirigeants autochtones, aux gens d'affaires, aux gouvernements, aux universitaires et aux diverses collectivités pour aborder les enjeux dans le Nord. Nous effectuons des recherches de pointe sur trois thèmes: les collectivités prospères, le développement économique ainsi que la souveraineté et la sécurité dans le Nord canadien. Nos travaux sont axés sur le Nord, ses besoins et ses désirs. Nous avons publié des rapports sur les innovations en matière d'éducation dans le Nord, les problèmes de main-d'oeuvre et les répercussions des grands projets de ressources naturelles.
Nous publions de prévisions économiques semestrielles sur les territoires. Lundi prochain, nous ferons paraître un rapport sur les solutions durables dans le domaine du logement dans le Nord, un problème névralgique auquel on s'est attaqué en mettant en oeuvre des projets pertinents pour offrir des solutions dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci. Notre travail permet de combler de graves lacunes sur le plan de l'information et des données au Canada. Nous fournissons des données précises et exhaustives à tous les Canadiens sur le potentiel du Nord et l'avenir de cette région.
Je voudrais insister sur l'aspect humain de la politique étrangère pour l'Arctique. Pourquoi? Parce que nos recherches font systématiquement ressortir qu'il faut des collectivités résilientes et prospères dans le Nord pour que son énorme potentiel économique puisse se réaliser dans le cadre des mesures prévues. Intitulé Getting it Right: Assessing and Building Resilience in Canada North, notre rapport confirme que les gens du Nord veulent vivre dans des collectivités sûres, prospères et autonomes. Ils ne se préoccupent pas tellement des questions de souveraineté et de sécurité nationales dans l'Arctique. Le lien est facile à établir: des collectivités résilientes assureront le développement économique durable de l'Arctique et déboucheront sur une politique étrangère pour l'Arctique qui misera sur la force affichée par les gens du Nord.
Une collectivité résiliente est en mesure d'anticiper les risques, d'en restreindre les répercussions et de s'adapter rapidement au changement. Selon les normes d'aujourd'hui, bien des collectivités du Nord ne sont pas résilientes. C'est particulièrement le cas des collectivités autochtones. Les habitants du Nord ont un défi de taille à relever: assurer la résilience de leurs collectivités en dépit des rapides modifications socio-économiques qu'ont apportées les ouvertures ou les fermetures de mines — le cycle d'expansion et de ralentissement —, l'éloignement, les retards sur le plan de l'infrastructure et le manque de diversité économique.
Les changements climatiques et leurs conséquences constituent sans doute l'un des risques les plus menaçants pour les habitants du Nord. Les changements climatiques mettent à mal les habitations dans le Nord qui se détériorent à un rythme beaucoup plus rapide que celles dans le Sud et qui nécessitent des coûts de fonctionnement beaucoup plus élevés. Le surpeuplement vient aggraver le problème, et nous nous retrouvons avec une bombe à retardement. Au Nunavut, 25 p. 100 des habitations abritent au moins six personnes. Dans le Nord du Manitoba, la proportion est de 20 p.100.
Dans notre rapport exhaustif sur le logement dans le Nord, nous recommandons d'intégrer les technologies et les innovations dans la conception des habitations pour contrebalancer les effets des changements climatiques et réduire les coûts d'entretien et de fonctionnement.
Il faut adopter des mesures pertinentes pour favoriser et garantir la résilience dans le Nord. Les décideurs doivent donc commencer par le bas de la pyramide et formuler des stratégies pour assurer la résilience des collectivités, notamment en collaborant avec celles-ci afin tout d'abord de cerner les risques et la capacité de chacune de prendre les mesures nécessaires, puis de favoriser la mise en oeuvre de mesures concrètes en vue de dénouer cette impasse. Il faut donner aux gens les moyens de s'en sortir.
Dans la foulée de notre rapport sur la résilience, nous élaborons, de concert avec une collectivité autochtone des Territoires du Nord-Ouest, un projet pilote pour remédier aux problèmes sociaux et aux catastrophes naturelles susceptibles de survenir.
Je récapitule: il faut faire ressortir qu'un Nord prospère et résilient pourra garantir la souveraineté et la sécurité du Canada. Pour ce faire, nous devons continuer d'assurer la survie des collectivités les plus éloignées, sans compter uniquement sur les opérations militaires ou les Rangers. Si les gens quittent ces collectivités éloignées en raison du manque de possibilités économiques ou de la précarité des conditions sociales, notre souveraineté dans le Nord sera en danger. Il faut donc investir dans les collectivités et leurs habitants. Essentiellement, c'est ici même, au Canada, que nous devons commencer à promouvoir la stratégie pour le Nord canadien. Il faut bien saisir les défis qui se posent et les occasions qui s'offrent aux habitants du Nord. Il faut également élaborer des mesures pour venir à bout de ces problèmes.
J'ai apporté des exemplaires du rapport que je viens d'évoquer et qui s'intitule « Getting it Right: Assessing and Building Resilience in Canada's North ». Vous pouvez également le consulter sur notre site Web à l'adresse centreforthenorth.ca.
Merci.
Merci infiniment.
Nous commencerons par un député de l'opposition. Monsieur Dewar, vous disposez de sept minutes.
Je remercie notre témoin. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir choisi le Canada comme pays d'adoption. Je m'escompte particulièrement chanceux puisque vous demeurez dans ma circonscription, Ottawa-Centre.
Les problèmes que le Canada doit affronter dans l'Arctique... Bien des témoins nous ont signalé qu'il était important de comprendre l'essence même de ces problèmes. En fait, beaucoup nous ont indiqué que ce n'est pas vraiment une question de souveraineté ou de sécurité comme on l'entend souvent sur le plan diplomatique... c'est-à-dire que la menace existe ou que nous devons investir dans l'infrastructure militaire pour contrer l'ennemi éventuel. Lorsqu'il est question de sécurité et de souveraineté, il faut davantage investir dans les habitants du Nord. Vous le savez probablement mieux que moi, si nous n'empruntons pas cette voie, nous ne pourrons assurer ni la sécurité ni la souveraineté de notre territoire.
Votre expérience et votre formation m'intéressent vraiment. Pouvez-vous nous en dire davantage sur le modèle de gouvernance du Danemark?
Je vous formule deux questions bien précises.
Premièrement, au Danemark, quel ministère est responsable des affaires étrangères et des dossiers concernant le Nord et ses habitants? Dites-nous le chiffre approximatif de personnes en cause?
Deuxièmement, vous travaillez au Conference Board et au Centre pour le Nord. Avec qui collaborez-vous? Avec quelles organisations? Quels sont vos interlocuteurs?
Le Centre pour le Nord a été établi en 2009. Il s'agit d'une initiative de cinq ans. C'est le mandat du centre. Le Conference Board du Canada est une institution indépendante sans but lucratif. Toutes les activités qu'il mène doivent être financées. Autrement dit, il ne reçoit aucune subvention ni aucun financement de la part du gouvernement.
Lorsque nous menons des initiatives de grande envergure comme celle-ci — nous avons également d'autres centres, comme celui pour l'alimentation —, nous rassemblons essentiellement un groupe d'investisseurs, parce qu'il faut financer la recherche. Dans le contexte du Nord canadien, qui sont les principaux intervenants? Voilà la première question à se poser. À mon avis, notre centre est la seule tribune au Canada qui assure une représentation équilibrée et un dialogue sur les questions touchant le Nord.
Qu'est-ce que cela signifie au juste? Tout d'abord, nous avons des représentants du gouvernement fédéral; cela comprend, bien entendu, CanNor, AANDC, le Bureau du Conseil privé, RHDCC, Santé Canada, la Société canadienne d'hypothèques et de logement et l'ASPC. Nous avons aussi des représentants de tous les gouvernements provinciaux et territoriaux qui ont une compétence dans le Nord. Cela n'inclurait donc pas l'Île-du-Prince-Édouard, ni la Nouvelle-Écosse. Mais il y aurait le Labrador, le Québec ou l'Ontario. On peut deviner la suite.
Nous avons également des représentants de l'industrie, par exemple des sociétés minières, GE Canada et Cisco. Il y a des porte-parole de l'industrie privée; d'ailleurs, beaucoup de banques investissent dans cette initiative grâce à des mesures de responsabilité sociale. À cela s'ajoutent des représentants d'établissements d'enseignement — Greg Poelzer, qui ne peut malheureusement pas être ici aujourd'hui, est un de mes bons amis. Lui et moi rédigeons un rapport en ce moment avec Ken Coates et les chercheurs mis à sa disposition au sujet du rôle du secteur public dans la gouvernance du Nord. Si nous pouvons mener un tel projet, c'est uniquement grâce aux partenariats que nous avons établis avec les établissements d'enseignement. Il y a des gens qui sont des spécialistes en la matière, et nous jouissons de ces types de réseaux pour mener la recherche. Je pourrais financer ces travaux, mais les membres le font par eux-mêmes.
Nous avons aussi, à la table, des organisations autochtones pour des raisons évidentes. L'Assemblée des Premières Nations vient juste de se joindre à nous. J'ai donc des représentants des trois organisations autochtones nationales: le Ralliement national des Métis, ITK et l'Assemblée des Premières Nations. Il faut ajouter à cela un certain nombre d'organisations autochtones régionales. Par exemple, en Saskatchewan, nous avons le Grand Conseil de Prince Albert, etc.
On compte aussi parmi nos membres des organismes sans but lucratif, notamment l'Institut international du développement durable. Bref, en mobilisant un tel groupe de 50 membres, on crée vraiment un dialogue intéressant sur les questions qui touchent le Nord canadien. J'aimerais bien inviter plus de membres à la table, mais je cherche toujours la bonne solution. Ce n'est pas tout le monde qui paie. First Air, qui est membre du centre, me donnera des billets d'avion gratuits pour me permettre de voyager dans les régions desservies — surtout au Nunavut. Certains membres font des contributions en nature, alors que d'autres font des contributions en espèces. Je dispose donc d'environ 1 million de dollars par année pour payer mon personnel et la recherche que je mène.
Pour moi, il est extrêmement important que le Conference Board du Canada, en tant que responsable de cet espace — qui n'appartient ni au gouvernement, ni à l'industrie, ni à n'importe quelle autre entité — puisse aller de l'avant de façon équilibrée et, bien entendu, en fonction des données recueillies, diffuser des renseignements que personne d'autre n'est en mesure de fournir.
Est-ce que cela enchaîne sur la prochaine question?
Très bien. La prochaine question porte sur le modèle de gouvernance au Danemark et au Groenland, ce qui est évidemment très différent de celui du Canada. Le Danemark s'appelle officiellement le Royaume du Danemark; cela comprend donc le Danemark, les îles Féroé et le Groenland. Comme vous le savez, le Groenland jouit d'une autonomie gouvernementale. Cette structure a été approuvée par vote en 2009. Toutes les dispositions sont prévues dans une loi, ratifiée et adoptée par les deux parlements. La loi énonce très clairement des règles, des engagements et des conditions pour la souveraineté du Groenland, pour ainsi dire. Elle contient aussi une formule qui sert à calculer la portion des recettes provenant de l'exploitation des ressources que le Groenland a le droit de garder et la subvention globale qui sera en quelque sorte récupérée à mesure que son gouvernement s'enrichira.
L'adoption de la loi a mis un terme à tous les débats dans lesquels on reprochait que le Groenland ne soit pas traité comme un partenaire à part égale et qu'il n'ait jamais l'occasion de s'asseoir à la table et de participer aux décisions. En fait, le Groenland est maintenant maître de sa destinée. Il peut faire ce qu'il veut. Par contre, la politique étrangère ne relève pas de sa compétence. Ce dossier est négocié par l'entremise de Copenhague. Toutefois, au Conseil de l'Arctique, vous verrez que le haut fonctionnaire de Copenhague chargé de l'Arctique s'assoit à côté de son homologue du Groenland. Il y aura deux représentants gouvernementaux à la table des négociations. Cette question n'est donc pas traitée par les participants permanents, ou les PP; elle fait l'objet d'une discussion de gouvernement à gouvernement.
Je sais que cela n'est pas faisable au Canada parce qu'il y a une structure différente, mais c'est ainsi que les choses fonctionnent pour nous. Bref, le Groenland jouit d'une autonomie, mais le tout se fait en très étroite collaboration avec le Danemark.
Merci.
Madame Jeffrey, merci beaucoup pour cet excellent aperçu. C'était très utile.
Je cède maintenant la parole à Mme Brown, qui dispose de sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci infiniment d'être parmi nous et de partager votre expertise avec notre comité. J'ai trouvé vos observations préliminaires très instructives.
Je m'intéresse beaucoup aux peuples du Nord et je suis convaincue que les mesures prises par le Canada dans le cadre de son rôle de leadership au sein du Conseil de l'Arctique donnera le ton à ce que d'autres pays feront. Je sais que d'autres pays circumpolaires tiennent leurs propres délibérations, débats et discussions avec leurs peuples du Nord. À mon avis, nous sommes très chanceux d'avoir une représentante du Nord qui assumera la présidence du conseil. Elle met à profit un point de vue, une expérience et une compréhension qui représentent les gens du Nord.
Vous avez utilisé l'expression « collectivités résilientes » et vous avez parlé plus précisément... Je suis très curieuse de lire votre rapport sur les projets intelligents, la construction de logements et la nécessité de bien faire les choses, parce que nous sommes confrontés à des défis de taille dans le Nord quand vient le temps de bâtir des collectivités résilientes. J'aimerais savoir quelles mesures vous nous recommandez dans votre rapport.
Dans le cadre de mes études, je travaillais pour une société d'ingénieurs, composée de trois services d'ingénierie. C'était des ingénieurs civils, mais ils s'intéressaient également au secteur du logement; je m'occupais donc des travaux de conception pour les logements. En tout cas, cette expérience m'a permis de comprendre les efforts que nous devons déployer au Canada dans le domaine de la construction, même dans le Sud de l'Ontario, en vue de créer des collectivités résilientes; par exemple, il faut creuser jusqu'à six pieds de profondeur afin d'installer une plate-forme qui protégera la construction contre le gel.
Étant donné que le gel est bien plus profond dans le Nord, il est d'autant plus difficile d'y construire des installations appropriées pour l'approvisionnement en eau potable et l'assainissement, c'est-à-dire des installations qui permettront d'assurer des conditions de santé appropriées, de fournir de l'eau potable et d'évacuer les eaux d'égout en vue de bâtir des collectivités résilientes. Avez-vous tenu compte de ces questions dans le rapport? Est-ce un sujet que vous avez abordé, et pourriez-vous nous faire part de certaines de vos découvertes et de vos recommandations pour édifier des collectivités résilientes dans le Nord?
Le rapport sur le logement contient quatre études de cas innovatrices. L'une d'entre elles porte sur Iqaluit, où l'on construit maintenant des logements au-dessus des normes du code. Une autre étude de cas se passe dans une réserve, où le Holmes Group a travaillé très étroitement avec la bande et le conseil pour construire un logement qui dépasse les normes.
Bon nombre des problèmes que nous voyons dans le Nord aujourd'hui tiennent au fait que les bâtiments qui y ont été construits n'ont jamais respecté les exigences minimales du code. Pour une raison quelconque, on a décidé que ce n'était pas nécessaire dans le Nord; c'est ainsi qu'on se retrouve aujourd'hui avec des logements lamentables et une crise du logement, surtout dans les réserves.
Le rapport tient compte de ces quatre études de cas parce que nous voulons souligner le fait qu'il existe bel et bien des initiatives destinées à relever ces défis et que notre pays peut avancer de manière très positive si nous nous mettons à voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide.
Oui, Attawapiskat est une réalité, et on trouve pas mal de cas semblables partout au pays. Toutefois, il y a des initiatives du secteur privé, dont certaines sont menées en collaboration avec le secteur public et qui visent vraiment à relever les défis et à bâtir l'avenir.
Maintenant, je reviens aux codes et aux normes parce que c'est extrêmement important. Le premier emploi que j'ai occupé au Canada était en fait auprès du Conseil canadien des normes, et j'ai négocié une entente avec AANDC et Environnement Canada pour obtenir des fonds dans le cadre du programme d'adaptation pour le système d'élaboration de normes afin de régler les questions liées aux codes et aux normes dans le Nord. J'ai ensuite quitté le Conseil canadien des normes, et quelqu'un d'autre a pris la relève. Il y a maintenant un groupe de travail, composé de représentants des territoires, ainsi que de Nunavik, qui étudie de façon détaillée les problèmes posés par le pergélisol et d'autres questions liées à l'infrastructure déjà construite. Ce groupe élaborera de nouvelles normes qui pourront être intégrées ou incorporées par renvoi dans la réglementation et le code.
C'est la première étape. En l'absence d'exigences précises sur la façon dont on doit construire et inspecter les bâtiments, on n'y arrivera pas. Malheureusement, ces normes doivent être obligatoires plutôt que volontaires, et le gouvernement du Canada — oui, je vais le dire — doit insister davantage sur l'importance de faire les choses correctement. Si vous êtes déjà allés dans certaines de ces collectivités, si vous avez déjà mis les pieds dans une réserve — et j'y suis allée un nombre incalculable de fois —, la situation n'est pas bonne. Les choses ne tournent pas rond. À l'extérieur des réserves, c'est le même scénario. On finit par se dire que cette situation ne peut être attribuable uniquement aux conditions climatiques; quelque chose a dû se produire durant le processus pour convaincre les gens de construire des boîtes qui, au bout de trois à cinq ans, commenceraient à se détériorer à vive allure. C'est la réalité à laquelle nous devons maintenant faire face.
N'empêche que dans le rapport, il y a des exemples qui montrent comment on s'attaque à ces problèmes. Voilà ce sur quoi je tiens à insister: c'est grâce à l'innovation qu'on ouvrira la voie à un avenir bien meilleur en matière d'habitation dans le Nord et à des collectivités résilientes. Si les gens ne sont pas contents, s'ils ne sont pas autonomes, ils ne pourront pas profiter des possibilités économiques, ni contribuer à l'économie nationale, et ils finiront par quitter leur collectivité.
Avez-vous des discussions avec les territoires du Nord au sujet de leurs codes de construction? Le Code national du bâtiment constitue vraiment la base, puis les provinces y ajoutent leurs propres codes. On s'attend à vivre dans une maison avec chauffage central, mais sans un système vaporifuge, sans une construction appropriée, elle ne durera pas plus de cinq ans. On a besoin de ce genre de directives dans le code de construction provincial ou territorial pour s'assurer que les bâtiments qu'on construit défieront le temps et donneront aux collectivités durables une place où vivre.
Merci.
Merci, monsieur le président.
Et merci de votre présence.
La revue The Economist a récemment consacré un article sur le réchauffement mondial. On y parlait, bien entendu, de certaines des causes à l'origine de ce phénomène, notamment l'exposition de l'eau à la lumière du soleil et le transfert de tous les polluants vers le Nord à partir des pays du Sud. Bien entendu, on faisait mention du Groenland. Les températures là-bas ont presque doublé. À l'échelle planétaire, les températures ont augmenté d'un peu plus d'un demi-degré, alors qu'au Groenland, elles se sont accrues de presque un degré et demi. Comme vous venez du Danemark, vous savez évidemment que le Groenland est la plus grande île du monde et qu'il possède le plus grand volume d'eau douce. On peut donc supposer que cette région sera touchée au plus haut point.
À cause de tous ces facteurs, le gouvernement du Danemark doit avoir adopté une approche très proactive pour essayer de faire face aux changements qui s'opèrent ou d'atténuer les changements qui vont se produire au Groenland. Quel a été le parcours? Que pensez-vous du modèle du gouvernement danois et de la façon dont il s'y prend? Que préconise-t-il comme politiques?
Avant la Conférence de Copenhague sur les changements climatiques tenue en 2009 — lorsque Copenhague avait été l'hôte de la CdP/RdP —, la ministre de l'Environnement d'alors, qui est maintenant une commissaire de l'Union européenne, Connie Hedegaard, a amené un certain nombre de délégations du monde entier à Ilulissat, au Groenland.
C'est à Ilulissat que le glacier Jakobshavn se déverse dans l'océan. Les photos satellitaires, entre autres, montrent invariablement que ce glacier se déplace beaucoup plus rapidement que par le passé. On a donc montré aux gens le Groenland pour leur faire voir ce qui se passe réellement, le tout conjugué à des renseignements scientifiques — évidemment, le glacier à Ilulissat est maintenant désigné patrimoine mondial par l'UNESCO. C'était un moyen très puissant pour permettre aux gens de comprendre comment les mesures prises dans le Sud provoquent des changements climatiques dans le Nord.
La stratégie du gouvernement danois misait donc sur l'éducation, et on voulait s'assurer que la perspective du Nord était au moins incluse dans les discussions. C'est ce que nous pouvions faire à l'époque, et je crois comprendre que la ministre a eu beaucoup d'entretiens productifs avec les délégations. Il n'y a rien de mieux que de voir les choses de ses propres yeux pour avoir une idée de ce qui se passe réellement. C'est ainsi que le gouvernement danois s'y est pris.
Cette région était en quelque sorte l'équivalent du canari dans une mine de charbon. Elle a vraiment subi des changements radicaux, signe que les changements climatiques étaient bien réels.
Eh bien, il y a des données scientifiques qui montrent que le glacier se déplace beaucoup plus rapidement et qu'il est en train de fondre en dessous, ce qui pousse les eaux vers l'océan; cela a également un effet sur l'océan lui-même, les stocks de poisson et tout le reste. C'est ainsi que nous en sommes arrivés là.
Bien.
Vous avez fait allusion au fait que le Conference Board est apolitique et non financé par le gouvernement. En un sens, c’est une bonne chose, car vous pouvez exprimer vos opinions sans timidité et sans risquer d’être victime d’intimidation. Vous pouvez mettre cartes sur table sans devoir en subir les conséquences et, selon moi, c’est bien.
Donc, en tenant compte de cela et en examinant certaines des politiques futures… vous avez fait allusion aux problèmes de logement qui existent là-bas et à la façon dont le gouvernement doit s’adapter à ceux-ci, en raison des changements. De plus, vous avez mentionné l’innovation. Pourriez-vous nous en dire davantage à propos de cette innovation dont vous parlez? Vous avez parlé du logement, mais quels autres moyens novateurs pouvons-nous employer pour gérer les changements, que ce soit pour transporter des marchandises là-bas ou pour exploiter des mines? Quels aspects devons-nous anticiper pour faire face aux changements qui vont survenir — aux défis de l’Arctique, mais aussi à ses possibilités?
Comme nous le savons, le créneau pour construire quoi que ce soit dans l’Arctique est court. L’une des études de cas exposées dans le rapport — en l’occurrence, celle qui a trait au Nunavut — démontre que, dans les usines du Sud, on peut concevoir, en fait, les types de panneaux requis et d’autres éléments qui peuvent être expédiés et assemblés dans le Nord. Les panneaux en question portent le nom de concept KOTT et sont dotés de la bonne sorte de pare-vapeur. Ils ont l’effet le plus isolant qui soit, et ils ne se détérioreront pas.
Donc, au lieu de faire les choses sur place, on s’assure qu’elles sont faites adéquatement dès le début et, en collaboration avec les gens du Nord, l’entreprise qui participe à cette initiative — et le gouvernement du Nunavut joue également un rôle dans celle-ci — a créé ce concept particulier. Les matériaux sont fabriqués de manière relativement économique dans le Sud. Puis ils sont expédiés pendant la période où le transport maritime est possible et assemblés non seulement à Iqaluit, mais aussi dans d’autres collectivités du Nunavut. Pendant son séjour là-bas, mon analyste a parlé à l’entrepreneur général, et il s’avère que ces maisons sont très faciles à monter, vraiment durables et grandement écoénergétiques. De plus, les gens qui ont emménagé dans les premières habitations ne semblent plus souffrir du froid comme avant.
Nous verrons bien ce qui se produira, mais ces maisons sont censées durer plus longtemps que le parc de logements actuel.
Qu’en est-il de certains des autres moyens novateurs dont nous disposons pour gérer les changements? J’ai un peu tendance à penser au Conseil national de recherches qui se trouve à Ottawa. Bon nombre des témoins qui ont comparu avant vous ont indiqué que la plupart des ministères établis à Ottawa devaient relever le défi que l’Arctique pose et tirer parti des possibilités qu’il offre. Nous devons tous travailler ensemble à cette tâche.
Il y aura plus de routes maritimes et d’activités là-bas — le Conference Board s’occupe-t-il de cela et de la façon dont nous devrions surveiller davantage les navires et nous préparer à répondre à ce défi, et à gérer cette activité?
En un certain sens, nous travaillons en ce moment à un projet sur l’incidence économique du développement des eaux marines du Nord. Nous allons mener ce projet un peu différemment. Nous collaborons avec un groupe consultatif… Nous rédigerons un rapport, puis nous tiendrons une audience à Ottawa. Ensuite, nous publierons un rapport qui pourra être diffusé dans les régions, par la suite.
Au Centre pour le Nord, nous nous occupons… nous ne prescrivons rien, et nous ne défendons pas des droits. En fait, j’ai tendance à jeter les assises d’une prise de décision éclairée, et je constate qu’au Canada, il y a une énorme lacune en matière d’information et de données relatives à ces enjeux. Les gens comprennent mal comment réunir ces renseignements.
Mon rôle à cet égard consiste à poser les fondations d’une prise de décision avisée, que ce soit pour les gouvernements ou pour l’industrie. Mes fonctions diffèrent énormément de celles que j’exerçais lorsque j’étais au gouvernement. Dans mon milieu, je suis chargée de conduire de la recherche appliquée qui est vraiment approfondie et d’examiner ces enjeux très attentivement.
J’ai parlé à mes investisseurs, et je leur ai demandé ce qu’ils attendaient de cette initiative, parce qu’avec l’argent dont je dispose, je peux continuer de développer la bibliothèque et de produire une multitude de rapports, ou je peux employer tout ce que j’ai à ma disposition pour créer une approche plus stratégique.
Pouvez-vous m’accorder une minute...?
Oui, veuillez simplement conclure rapidement. Nous venons juste de dépasser le temps qui nous était imparti. Allez-y.
Dans le cadre du mandat du centre, je vais utiliser toutes les études que nous avons effectuées — et il y en a de nombreuses autres en voie de réalisation —, et je vais rédiger un rapport provisoire qui répond aux questions suivantes: qu’est-ce que la recherche nous indique? Quels sont les principaux thèmes et les liens? Que se passe-t-il dans le Nord? Puis je vérifierai la validité du rapport sur le terrain en le présentant dans la région.
Ensuite, je vais l’assortir de pratiques exemplaires internationales. J’étudierai une analyse de rentabilisation. À la fin du processus, nous serons probablement en mesure de produire un document intitulé « Choix futurs pour le Nord du Canada ». Ce ne sera pas une stratégie pour le Nord, car je ne crois pas qu’il y ait une stratégie unique à adopter pour la région. En fait, je pense que cette idée est à côté de la plaque. Je ne crois pas en une approche équilibrée; je pense qu’on devrait formuler des politiques avant-gardistes qui règlent des problèmes cruciaux. Pour ce faire, il faut aller un peu plus loin. Il faut que les gens indiquent leurs priorités.
Merci beaucoup.
Nous allons amorcer la deuxième série de questions.
Nous allons passer à Mme Grewal qui dispose de cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie, madame Jeffrey, du temps que vous nous consacrez et de votre exposé. Nous vous en sommes tous assurément reconnaissants.
Même si l’on peut dire sans risquer de se tromper qu’en général, il y a une méconnaissance des vulnérabilités des diverses régions du Nord et des menaces qui pèsent sur elles, à mesure que les activités économiques augmentent, nous devons en apprendre davantage sur les conséquences possibles d’accidents industriels et d’autres catastrophes causées par l’homme, tant sur la terre ferme qu’en mer, comme le crime organisé, le terrorisme, les éclosions de maladies infectieuses et les catastrophes naturelles dans le Nord. En tant que personne ayant de grandes compétences dans le domaine, pourriez-vous vous étendre un peu sur les dangers et les menaces qui pourraient survenir dans l’Arctique?
Oui. Je pense que tout se résume vraiment aux ressources humaines. Si nous n’investissons pas dans elles, l’Arctique n’est pas une option viable. Qui acceptera de vivre à Alert, si personne ne s’occupe de ses habitants dans une certaine mesure?
Une voix: Pas moi.
Des voix: Oh, oh!
Mme Anja Jeffrey: Je trouve fort intéressant que le gouvernement fédéral investisse dans une station de recherche de l’Arctique — et c’est une idée qui sera bénéfique, selon moi —, mais pas dans un port de haute mer. À l’heure actuelle, le Yukon examine la possibilité d’utiliser le port de Skagway. Les gens là-bas envisagent de faire affaire avec l’Alaska.
Les lacunes en matière d’infrastructure sont l’un des facteurs qui menacent le plus le développement du Nord. De nos jours, l’industrie construit la plupart des infrastructures requises pour acheminer les ressources naturelles hors des territoires. Par exemple, Agnico-Eagle, qui exploite la seule mine d’or du Nunavut, la mine d’or Meadowbank, a construit une route de 110 kilomètres que relie Baker à la mine. Je l’ai emprunté en autobus scolaire, parce que je suis allée visiter la mine. L’entreprise a également bâti une piste d’atterrissage. Elle a installé des infrastructures de communication et toutes les commodités dont on a besoin quand on exerce des activités minières loin des collectivités. Elle met également en oeuvre un énorme programme de responsabilité sociale, parce qu’elle est établie près de Baker.
Maintenant, les gens se rendent à Rankin pour explorer le secteur de Meliadine. D’après ce que m’ont dit des représentants de l’industrie, les entreprises continueront d’exercer ces activités, parce que l’avenir du Nord est lié à la mise en valeur de ses ressources. Bien entendu, les gouvernements provinciaux leur sont très reconnaissants de leurs activités, mais il pourrait y avoir un risque, en ce sens que, si nous ne travaillons pas plus étroitement ensemble, la mise en valeur responsable des ressources pourrait ne pas progresser aussi rapidement et aisément que le gouvernement le souhaiterait, selon moi.
Comme l’exploitation minière est la principale industrie des territoires canadiens, l’économie de l’Arctique dépend grandement du prix mondial des produits de base. Par exemple, l’exploitation des mines de diamants est la plus importante industrie des Territoires du Nord-Ouest. Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez des prévisions concernant la croissance économique future de la région?
Je crois comprendre que la difficulté de trouver du personnel qualifié représente le principal obstacle que l’économie du Nord doit surmonter. Pourriez-vous également nous fournir des précisions sur la façon dont ce problème empêche la région de l’Arctique de réaliser son potentiel économique?
En fait, l’extraction de diamants diminue dans les Territoires du Nord-Ouest. J’étais là-bas la semaine dernière. J’y ai rencontré le premier ministre, et j’ai donné un exposé aux intervenants en développement économique du Nord dans le cadre de leur conférence. Au cours de mon séjour, le PIB des Territoires du Nord-Ouest a reculé de 5,1 p. 100.
L’exploitation de la mine Gahcho Kué, qui relève de l’entreprise De Beers, commencera bientôt. Mais c’est l’extraction de métaux qui fera progresser les Territoires du Nord-Ouest.
Des trois territoires, les Territoires du Nord-Ouest sont les seuls à enregistrer une croissance négative tant sur le plan économique que sur le plan démographique. L’économie et la population du Nunavut connaissent une croissance, mais le territoire a du mal à conserver ses habitants. Il ne disposera pas de la population active nécessaire et ne sera pas prêt à tirer parti des possibilités économiques.
Le Yukon est dans une bien meilleure posture, simplement en raison des ententes d’autonomie gouvernementale qui ont été négociées avec son gouvernement en vertu de l’accord-cadre, et de ce que la dévolution a entraîné. Le Yukon met actuellement en oeuvre plusieurs projets miniers et hydroélectriques qui feront progresser le territoire.
Madame Jeffrey, c’est tout le temps dont nous disposons au cours de la présente série de questions. Toutefois, nous avons encore le temps de tenir trois autres séries de questions.
Nous allons passer à M. Bevington qui dispose de cinq minutes.
Merci, monsieur le président, et merci, madame Jeffrey.
Si vous comprenez l’industrie minière des Territoires du Nord-Ouest, vous savez que notre PIB a grimpé plus tôt en raison des capitaux qui ont été investis dans les puits des mines Diavik et Ekati, et que ces investissements ont maintenant pris fin. Voilà pourquoi notre PIB a reculé. Cela n’est pas vraiment représentatif de l’économie des Territoires du Nord-Ouest.
Vous avez parlé de la diminution de la population. C’est là une erreur commise par Statistique Canada qui a été corrigée depuis. En fait, la population a légèrement augmenté.
Mais de 2000 à 2010, alors que la croissance économique était forte et que le PIB augmentait parfois de 10 p. 100, la population a régressé parce que les gens n’avaient pas les moyens de vivre là-bas et que les politiques de développement des mines étaient telles qu’un grand pourcentage des gens qui travaillaient dans celles-ci venaient d’autres régions du Canada.
Je pense que vous devriez revoir votre analyse des Territoires du Nord-Ouest. Cinq ou six mines sont en voie d’être exploitées — elles en sont au stade de l’évaluation environnementale. Cela représente un plus grand nombre de nouveaux projets que ce que l’on retrouve dans les deux autres territoires combinés. Nous sommes très actifs, et nous disposons de l’infrastructure de pointe nécessaire pour gérer des projets de développement minier. En fait, nous sommes des experts en la matière. Nous sommes des experts dans bon nombre de domaines liés au développement du Nord.
Votre exposé m’a plu. Je viens de donner au Comité des ressources naturelles un compte rendu du développement du Nord. Selon moi, la majeure partie de nos sujets de discussion pourraient être abordés au cours d’une de leurs séances, parce que vous parlez d’enjeux nationaux et de logements. J’ai vécu dans le Nord pendant toute ma vie, et j’ai visité chacune de ses collectivités et maintes fois leurs habitations. J’estime qu’en ce qui a trait au logement, il y a trois éléments clés. L’un d’eux est la propriété. Elle a tendance à accroître la qualité des habitations. Deuxièmement, il y a les poêles à bois. Dans presque toutes les collectivités du Nord, si l’on dispose d’un moyen quelconque de brûler de la biomasse, on s’en tire mieux dans sa demeure. La plupart des habitations dans le Nord sont des logements publics où le facteur de responsabilité élimine toute possibilité de les doter de cet instrument fort essentiel. Troisièmement, les gens ont besoin d’un congélateur installé à l’arrière de leur demeure, parce que notre société chasse et qu’elle a besoin des outils requis pour accomplir cette tâche. Voilà en quoi consistent des logements confortables dans le Nord.
Cela n’a vraiment rien à voir avec leur construction. De plus, je ne suis pas d’accord avec vous… Si vous parlez à la Société d’habitation des Territoires du Nord-Ouest, vous constaterez qu’elle emploie des experts mondiaux. Nous avons construit des habitations en Russie et partout dans le monde. Ces logements sont excellents, mais pas nécessairement pour les gens qui les occupent, parce qu’ils sont publics. Ils ne sont pas conçus pour des propriétaires privés. La propriété privée permet aux gens de concevoir des demeures adaptées au mode de vie durable qu’ils peuvent adopter et d’exprimer ainsi leur individualité. C’est là un élément clé. Je vais devoir examiner votre rapport pour déterminer si vous avez décrit correctement la façon dont les logements devraient être construits dans le Nord.
Pour en revenir à la question du caractère national ou international des enjeux, quel est le point de mire du Conseil de l’Arctique? Il est composé de huit pays, qui sont des membres permanents. Porte-t-il son attention surtout sur des problèmes nationaux au sein des pays, ou la résolution des problèmes communs — l’environnement, le transport maritime, la pêche et les enjeux de ce genre — est-elle essentielle pour comprendre la façon de protéger nos régions arctiques? N’est-ce pas ce sur quoi le Conseil de l’Arctique met l’accent et ce, depuis longtemps?
Je prends note de vos observations, et je vous félicite de la construction du pont Deh Cho. C’est une réalisation remarquable pour les Territoires du Nord-Ouest.
En effet, elle n’a pas été financée par le gouvernement fédéral, et je suis sure que les habitants des Territoires du Nord-Ouest en sont très fiers. La seule chose que je déplore, c’est le fait que, dans l’article du journal The Globe and Mail qui décrit l’événement, le premier ministre a été mentionné sous le nom d’Ed McLeod plutôt que de Bob McLeod. Cela a peut-être contrarié certaines personnes.
Le Conseil de l’Arctique s’occupe d’enjeux internationaux, mais leur origine est nationale. Ils découlent de politiques formulées dans les pays. Lorsque le Conseil de l’Arctique se réunit en tant que forum intergouvernemental, oui, ses membres discutent de questions scientifiques. Ils rendent publiques des positions communes, et le font de mieux en mieux.
Merci beaucoup. C’est tout le temps dont nous disposons.
Nous allons passer à M. Schellenberger qui dispose de cinq minutes.
Merci. Votre exposé était très instructif.
Avant d'être député, je travaillais dans l'industrie de la construction, mais à l'extrémité de la chaîne. J'étais dans le domaine de la décoration, alors je ne construisais pas beaucoup, mais nous tentions de couvrir certaines des erreurs commises par les autres métiers avant nous.
Je sais bien qu'il y a des années, l'industrie de l'automobile construisait des voitures de façon à ce qu'elles se détériorent au bout de quatre ou cinq ans, afin de pouvoir en construire d'autres. Je crois que l'industrie s'est rendu compte, avec le temps, qu'il s'avérait plus profitable de construire des véhicules durables et de qualité.
On a beau avoir une panoplie de règlements relativement à la construction de ces maisons, l'important, c'est que les entrepreneurs suivent ces règlements. Parallèlement, il doit y avoir des inspecteurs qui ne sont pas corrompus, qui veilleront à ce que ces règlements soient respectés.
Je connaissais un entrepreneur — mais il n'était pas vraiment un entrepreneur ici — qui faisait de la construction dans la région, mais qui obtenait des contrats dans le Nord ou sur des terres des Premières nations pour construire des maisons. Il construisait les pires maisons que l'on puisse avoir, mais il obtenait continuellement des contrats. Je crois que parfois, accorder un contrat au plus bas soumissionnaire n'est pas nécessairement la meilleure façon de faire.
J'aimerais seulement savoir ce que vous en pensez. Y a-t-il des gens qualifiés dans ces régions pour construire, assembler les maisons et suivre les règlements? Et y a-t-il des inspecteurs qualifiés pour faire le suivi?
Oui, il y a certainement des gens qualifiés pour construire de bonnes maisons, cela ne fait aucun doute. Je crois que le pays s'oriente dans cette direction. Il y a suffisamment d'exemples qui montrent que le parc de logements actuel ne répond pas aux besoins, dans les réserves et à l'extérieur, et il y a beaucoup d'exemples positifs, ainsi que des initiatives principalement suscitées par les provinces et les territoires. Le député a mentionné que la Northwest Territories Housing Corporation essaie vraiment de rehausser la qualité en ce qui concerne la construction.
Je crois toutefois qu'il y a un héritage dont il faut s'occuper. Aux dernières nouvelles, mais je n'en suis plus tout à fait sûr, le Nunavut n'avait pas d'inspecteurs qualifiés. Et les inspections sont nécessaires pour s'assurer que les choses sont construites comme elles sont censées l'être. Il y a donc un problème important en matière de capacité, et il sera essentiel de briser ce cycle afin d'améliorer tous les déterminants sociaux.
Dans les collectivités du Nord, y a-t-il des travailleurs qualifiés en construction pour faire cela? Est-ce que tout doit venir du Sud?
Oui, ou il faut que ce soit une solution conçue dans le Nord, dans un certain sens. Le Nord est extrêmement limité sur le plan des ressources humaines et financières; les partenariats sont donc la solution ici — de solides partenariats dans lesquels on ne prend pas de raccourcis, des partenariats honnêtes et durables. On doit ensuite les introduire dans les collectivités, car elles ne sont pas en mesure d'y arriver.
La raison pour laquelle je dis qu'il devrait y avoir des gens compétents en construction dans ces collectivités, c'est que cela peut être viable par la suite, s'il y a un cycle d'expansion et de ralentissement dans la région. Si les gens n'ont plus leur emploi à la mine, ils peuvent réparer la maison, la plomberie ou l'électricité, ou faire des choses qui permettent de conserver ces emplois dans la collectivité.
Et on en revient à la question des collectivités saines. Les gens veulent vivre dans des collectivités où il y a des écoles, des commodités, où les choses sont plutôt bien, où on s'occupe d'eux, et où il y a diverses possibilités économiques, bien sûr.
M. Gary Schellenberger: Merci.
Merci beaucoup.
Je crois que M. Van Kesteren a le temps de commencer le prochain tour.
Vous avez deux ou trois minutes pour poser des questions.
Merci beaucoup.
J'ai écouté votre exposé, et ce que vous avez réussi à faire — du moins à mon sens —, c'est nous permettre de voir les choses du point de vue des gens du Nord. Nous avons tendance à voir les choses de notre point de vue, au Sud. Je me suis dit que nous voulions entraîner les peuples du Nord là où nous voulons être, mais qu'ils ne veulent pas nécessairement y aller. Est-ce que je me trompe? Quand nous parlons du développement, des possibilités, les gens du Nord ont-ils le goût d'aller dans cette direction? Pensons-nous...
Oh oui, absolument. Les habitants du Nord veulent qu'il y ait des débouchés économiques. Ils veulent des emplois bien rémunérés. Qu'ils vivent dans une capitale ou dans une collectivité, ils veulent contribuer activement à la société canadienne.
Oui. Il y a souvent un schisme, cependant, et il en est aussi question dans le rapport. La population autochtone du Nord, évidemment, a un certain rapport avec la terre, un rapport qui ne correspond pas toujours à la façon dont l'industrie fait les choses. C'est pourquoi nous avons mis en place des mécanismes qui nous permettent de négocier des ententes sur les répercussions et les avantages, d'effectuer des évaluations environnementales, et toutes ces choses.
Il y a évidemment un choc des cultures. Mais cela s'améliore à mesure que l'industrie s'installe, parle aux collectivités et apprend de cette façon.
Ce que M. Bevington a dit m'a beaucoup intéressé, et je suis tout à fait d'accord avec lui. Je pense que la propriété est un élément clé. Mais les maisons que nous fabriquons sont toutes semblables. Cette fierté à l'égard de la propriété... La diversité est-elle possible pour les maisons, pour qu'il y en ait peut-être de plus grosses ou de plus petites? On dirait presque que nous essayons d'imposer nos points de vue et nos valeurs... Est-ce une chose que les gens partagent là-bas?
Les logements dont je parle sont des logements sociaux. Pour ce type de logements, dans le Nord, c'est le revenu qui détermine le montant du loyer. Quand les gens commencent à gagner de l'argent, qu'ils aient un emploi dans l'industrie des ressources ou ailleurs, le loyer augmente parce qu'ils ont davantage de revenus.
Ils pourraient l'être s'ils font assez d'argent, mais il y a tout le cycle d'expansion et de ralentissement dans beaucoup de localités, et on ne sait jamais vraiment... Chaque mine a son cycle de vie. Nous constatons que dans les collectivités de monopole économique, celles qui dépendent d'une seule grande industrie et d'un seul grand employeur, les gens hésitent à devenir propriétaires, simplement parce qu'ils pourraient se retrouver pris avec une hypothèque le reste de leur vie, mais perdre leur emploi pour des raisons totalement hors de leur contrôle.
Nous analysons avec beaucoup de nuances la question de la propriété dans le rapport, parce que c'est là où la question des soins entre en jeu.
Le Nord est différent du Sud. Les solutions du Sud ne s'appliquent pas dans le Nord, donc il faut repenser complètement la façon de gérer cet enjeu. C'est la raison pour laquelle — et je n'ai pas peur de le dire — nous avons eu beaucoup de conversations avec la Société canadienne d'hypothèques et de logement sur ce rapport, parce que la SCHL a certains programmes et certaines politiques. Ses dirigeants sont très sensibles aux réalités du Nord, mais ils doivent également suivre des lignes directrices.
Il est très important de comprendre le mystère du Nord. La meilleure façon d'y arriver, c'est de s'y rendre et de parler aux gens qui l'habitent.
Merci infiniment.
Madame Jeffrey, je vous remercie beaucoup d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. Nous avons vraiment apprécié votre témoignage.
Sur ce, nous allons nous interrompre quelques instants pour permettre à nos nouveaux témoins de s'installer, puis nous allons reprendre nos délibérations tout de suite après.
Commençons.
J'aimerais saisir l'occasion de souhaiter la bienvenue à nos deux témoins de la Commission canadienne des affaires polaires: Bernard Funston, président, et David Scott, directeur exécutif.
Messieurs, je souhaite vous remercier sincèrement de prendre le temps de venir nous aider dans notre étude de la politique étrangère du Canada pour l'Arctique. Vous avez préparé un exposé, je vais donc vous céder la parole sans plus tarder. Je vous accorde 10 minutes, après quoi les députés pourront échanger avec vous.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Nous avons hâte d'entendre votre exposé. La parole est à vous.
Merci infiniment, monsieur le président.
Je m'appelle Bernie Funston. Je suis président de la Commission canadienne des affaires polaires. C'est un très grand honneur pour moi d'être ici aujourd'hui avec notre directeur exécutif, David Scott.
Je vais dire quelques mots pour commencer, puis je vais céder la parole à David, qui va vous présenter l'exposé de la Commission canadienne des affaires polaires et ce que nous essayons de faire depuis que le nouveau conseil d'administration a été constitué, en novembre 2010. Nous serons très heureux de répondre à vos questions sur la commission et son travail, de même que sur les enjeux de politique étrangère qui vous préoccupent.
À cet égard, je vous dis d'emblée que j'ai travaillé longtemps au Conseil de l'Arctique, de 1995 jusqu'à décembre 2010, moment où j'ai quitté le Conseil de l'Arctique pour assumer la présidence de la Commission des affaires polaires. J'ai participé à la création du conseil en 1995 et j'ai participé aux négociations. J'ai présidé le comité qui a rédigé les règles de procédure du conseil et j'ai été secrétaire exécutif du groupe de travail sur le développement durable de 2002 à 2010. Je sais que vous vous intéressez à la politique étrangère, donc je serai très heureux de répondre à des questions à ce chapitre.
Sans plus tarder, je cède la parole à David.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie infiniment de permettre à la Commission canadienne des affaires polaires de venir vous présenter un peu d'information.
Je n'ai préparé que quelques diapositives, et je crois que vous en avez tous reçu une photocopie. Nous allons les passer en revue rapidement, pour vous donner une idée du but de notre organisme et de l'avancement des efforts de revitalisation que nous déployons depuis quelques années.
L'objectif de la Commission canadienne des affaires polaires est d'être l'institution nationale du Canada chargée de l'avancement des connaissances et de la sensibilisation sur les affaires polaires. Nous essayons de faire en sorte que le Canada puisse prendre pleinement sa place de nation polaire.
Le résultat stratégique que nous visons est une connaissance accrue des régions polaires du Canada, afin d'éclairer les décisions qui sont prises et d'améliorer la situation en général dans le Nord.
La commission a été créée à l'issue des travaux d'un groupe de travail qui a été formé à la fin des années 1980, qui ont abouti à l'adoption d'une loi portant création de la commission en 1991. Nous sommes très dynamiques dans le domaine des affaires polaires canadiennes et nous avons exercé une grande influence pendant l'Année polaire internationale, qui s'est terminée le printemps dernier par un important sommet international tenu à Montréal. Nous mettons maintenant la touche finale au processus de revitalisation de deux ans qui s'est amorcé avec la nomination du conseil d'administration actuel, dont M. Funston assume la présidence. Je me suis joint à la commission il y a sept mois, après plusieurs années à l'emploi de Ressources naturelles Canada. Je suis géologiste de formation et gestionnaire professionnel. J'ai pris tout un train de mesures stratégiques afin de mettre le programme de la commission en oeuvre et de revoir ses façons de faire.
Comme vous pouvez le voir à la troisième diapositive, nous suivons l'évolution de la connaissance polaire au Canada. Nous aimons tâter le pouls de la situation. Nous travaillons à l'échelle internationale comme à l'échelle nationale pour établir les priorités qui sous-tendent la création de connaissances scientifiques et évaluer qui peut nous aider à acquérir les nouvelles connaissances nécessaires pour le Nord. Nous encourageons les jeunes Canadiens à s'investir et à s'intéresser aux questions nordiques. Nous communiquons aux Canadiens et au public étranger les résultats des recherches polaires et nous faisons de notre mieux pour accroître la coopération internationale dans la création de connaissances.
Je souligne que bien que nous mettions actuellement l'accent sur le Nord, notre mandat englobe également l'Antarctique. Nous prodiguons des conseils au ministre chargé de surveiller la commission, le ministre Duncan des Affaires autochtones.
La revitalisation en cours a commencé par la nomination d'un nouveau conseil d'administration. Nous suivons un plan stratégique triennal déjà bien enclenché, et sur le plan administratif, je suis en train de terminer un examen en cascade des activités de notre commission, afin de régulariser nos méthodes administratives et de mettre en place des mécanismes de surveillance rigoureux pour que nous puissions respecter les normes du Conseil du Trésor et des autres organismes centraux sur les ressources administratives, financières et humaines. Nous sommes donc littéralement en train de moderniser notre partie de la fonction publique, pour la rendre le plus efficace possible et assurer le respect intégral des obligations de rapport.
À la cinquième diapositive, je présente brièvement notre plan stratégique. Il comporte trois éléments clés. Le premier consiste à rassembler le savoir polaire, à colliger les connaissances pour pouvoir mieux les utiliser. Le deuxième est de dresser la synthèse du savoir polaire, de l'analyser, pour dégager les tendances, les perspectives et les enjeux. Le troisième volet consiste à nous ouvrir sur le monde et à diffuser efficacement le savoir polaire, c'est-à-dire les connaissances du réseau, de même que l'interprétation que nous en faisons. Nous souhaitons communiquer ces connaissances au public, au monde et aux décideurs du gouvernement fédéral, des territoires et des régions nordiques des provinces.
Vous pouvez voir à la sixième diapositive bon nombre des grands éléments auxquels nous travaillons. Nous venons d'ouvrir un bureau de liaison dans le Nord, à Yellowknife, dans l'édifice Greenstone. David Miller, chercheur et journaliste à CBC pendant longtemps, y est notre coordonnateur nordique. Il s'est joint à notre équipe ce mois-ci. Il arrive fort d'un grand bagage de connaissances, d'enquêtes et d'un réseau très solide de contacts nordiques pour nous aider à demeurer à l'écoute, à l'affût de ce qui se passe dans le Nord, à recueillir les points de vue des habitants du Nord et à leur communiquer nos connaissances polaires.
Nous appuyons activement le travail du CSRA, le Comité scientifique pour les recherches antarctiques et de l'IASC, le Comité international pour les sciences arctiques. Il s'agit là de deux organismes de coopération internationale dont la CCAP fait partie. Ces collaborations nous permettent de participer à la création de connaissances scientifiques de pointe, en sciences naturelles comme en sciences sociales, à l'échelle internationale, afin que le Canada contribue à l'avancement scientifique dans le monde et en tire pleinement profit.
Pour ce qui est de faire la synthèse de l'information, nous avons récemment réalisé des travaux à Anchorage, en Alaska, à l'occasion du troisième forum bisannuel de recherche sur le pétrole et le gaz dans le Nord que tiennent le Canada et les États-Unis. Nous avons établi des relations très solides avec ceux qui oeuvrent en Alaska, et nous entreprenons actuellement un certain nombre d'initiatives pour coordonner les travaux dans les mers de Beaufort et de Tchoukotka; il s'agit notamment d'études sur l'écosystème et les impacts sur les communautés, ainsi que de divers aspects techniques.
Enfin, au chapitre des communications, nous rajeunissons notre présence sur le Web et modernisons les publications. Alors que nous imprimions les documents et les diffusions par la poste, nous adoptons une approche bien plus numérique. Nous avons cessé d'imprimer les documents et comptons offrir une expérience enrichie sur Internet pour les parties intéressées du public.
En résumé, la CCAP met en oeuvre un processus de revitalisation de deux ans afin de devenir un organisme bien plus efficace et conforme à la stratégie du Nord du Canada, le tout au service des habitants du Nord et de tous les Canadiens. Nous réalisons actuellement un examen exhaustif des activités pour que l'organisation satisfasse aux attentes des organismes centraux sur les plans administratifs et juridiques. Enfin, nous examinons et modernisons le programme pour qu'il cadre avec les priorités du gouvernement du Canada et que son déploiement soit aussi efficace que possible.
Merci.
Je vais commencer, puis partagerai mon temps avec M. Bevington.
Merci de comparaître aujourd'hui. Je ferais remarquer qu'à une certaine époque, vous étiez en butte avec un problème de capacité. Je me souviens avoir posé des questions à la Chambre en 2008 pour savoir ce qu'il advenait du conseil d'administration. Il a fallu deux ans au gouvernement pour vous mettre en place. Je suis heureux de vous voir ici, bien établis. Je souligne toutefois que l'institut a été dépourvu de conseil d'administration pendant deux ans, de 2008 à 2010. Mais je me réjouis que vous soyez ici.
J'aimerais savoir comment vous travaillez avec les partenaires étrangers. Vous saurez que le Conseil de l'Arctique a été mis sur pied dans le but express de réunir les pays circumpolaires pour prendre des décisions afin de défendre les intérêts du Nord. Comment votre institut collabore-t-il avec les autres pays? Comment cette collaboration s'inscrit-elle dans le cadre de vos activités quotidiennes d'échange de renseignements avec ceux avec qui vous travaillez?
Je commencerai par répondre de façon générale, puis David pourra intervenir.
Nous travaillons effectivement avec un certain nombre d'organisations internationales. Nous commencerons par celui dont David a indirectement parlé concernant notre récent voyage en Alaska. Nous collaborons étroitement avec la U.S. Arctic Research Commission. Nous avons tenu des réunions conjointes en avril de l'an dernier et devrions avoir une rencontre la semaine prochaine à Vancouver. Nous nous penchons sur un éventail de questions d'intérêt commun et tentons de trouver des moyens de travailler ensemble.
Certaines de ces démarches consistent généralement à fournir de l'information. Je devrais préciser que la Commission canadienne des affaires polaires agit principalement comme une mine de renseignements. Nous ne nous occupons pas vraiment des politiques et de la recherche. Nous ne décidons pas des fonds qui seront investis en recherche ni des priorités, mais nous disposons d'un vaste réseau et nous veillons à savoir qui fait quoi, où et quand.
Nous entretenons des rapports très officiels avec deux organisations internationales, soit le Comité international pour les sciences arctiques, comme David l'a souligné, et le Comité scientifique pour les recherches antarctiques, ou CSRA. Ce sont les représentants nationaux avec lesquels nous collaborons dans ces démarches. L'un s'intéresse à l'Antarctique et l'autre, bien sûr, à l'Arctique.
La plus grande partie de notre travail ne s'effectue pas dans le cadre de projets conjoints, notre budget ne nous permettant pas de nous joindre à, par exemple, des projets de recherche communs. Il s'agit de rapports informels, qui consistent principalement à échanger des renseignements et à informer les gens de ce qui se passe pour qu'ils aient un lien, si l'on veut, aux activités que nous menons au pays concernant l'Arctique.
Dave,voulez-vous ajouter quelque chose?
Oui. Pour entrer un peu plus dans les détails, une bonne partie de nos activités visent à coordonner les partenariats et à encourager la création de nouvelles relations. Nous travaillons avec les organismes fédéraux au pays pour nous assurer que les activités de Ressources naturelles Canada soient peut-être un peu mieux harmonisées à celles d'Environnement Canada. Nous tentons d'élargir cette démarche à l'échelle internationale également auprès de la crème des chercheurs, qui pourraient s'intéresser à un domaine de recherche thématique particulier, pour les faire venir au Canada, forts de leurs compétences et de leurs moyens financiers.
Le Canada peut, dans bien des cas, constituer un laboratoire naturel propice aux nouvelles découvertes. Nous allons chercher les scientifiques les plus compétents et les plus brillants. Nous permettons également aux scientifiques canadiens au sein des universités ou du gouvernement de rester en rapport avec le reste du monde.
Une fois encore, le milieu scientifique est parfaitement conscient qu'il s'agit d'un système mondial intégré. Ce n'est pas tant les travaux dans le Nord ou dans le Sud qui importent, mais leur mise en commun.
Merci.
Je suis vraiment ravi de votre présence. Monsieur Funston, vous venez de ma ville natale et, comme Mark Carney, vous êtes l'une des personnes les plus célèbres de ma ville.
Des voix: Oh, oh!
M. Dennis Bevington: J'ai une question, que j'ai déjà posée devant le Comité des ressources naturelles. Quel est le programme de recherche sur l'Arctique du Canada? Peut-on y avoir accès? J'ai posé la question au sous-ministre et il m'a promis qu'il m'en ferait parvenir un exemplaire, mais il ne l'a pas envoyé au comité. Avez-vous donc vu le programme de recherche sur l'Arctique?
Je pense que l'actuel projet scientifique de la Station de recherche du Canada dans l'Extrême-Arctique en est l'expression. Vous savez sans doute qu'il n'en est qu'à ses débuts. Une étude de faisabilité expose les grandes lignes des domaines de recherche étudiés par le gouvernement par la station de Cambridge Bay et du programme scientifique qui sera appliqué essentiellement partout dans le Nord, sauf à Cambridge Bay. Les domaines en question concordent avec ceux de la stratégie pour le Nord, comme la gérance de l'environnement, le développement social et économique, la gouvernance et les questions de souveraineté et de sécurité. Ils sont clairement exposés dans le projet qui est présenté sur le site Web, dont l'adresse est www.science.gc.ca/SRCEA. Vous pouvez consulter ce document.
Les détails du plan scientifique, la façon dont il sera accompli au cours de la première période de cinq ans, n'ont pas encore été complètement établis. Une première ébauche a été produite à des fins de consultation. Le ministère en a fait la présentation plus tôt cette semaine, et des consultations auront lieu dans les semaines et les mois à venir, surtout avec les habitants du Nord. Tout cela est géré par le ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord.
Je veux ajouter quelque chose — Dennis serait sûrement choqué si je ne le mentionnais pas. Bien entendu, les trois gouvernements territoriaux ont également leur programme scientifique. Le Yukon est en train d'en élaborer un. Les Territoires du Nord-Ouest en ont déjà un. Je croyais qu'en parlant du Canada vous faisiez référence au gouvernement canadien, mais c'est plus général que cela.
J'aimerais simplement en savoir plus au sujet de la recherche sur les changements climatiques dans l'Arctique.
Existe-t-il un programme visant à voir quelles recherches sont proposées pour les changements incroyables qui se produisent dans l'Arctique: glaces, conditions météorologiques, et cetera? Ce sont les éléments critiques dans l'Arctique. Pour ce qui est du mouvement des glaces, il y a eu deux barrages de glace l'été passé. Les conditions météorologiques et la direction du vent ont changé, surtout dans la baie Frobisher, qui était remplie de glaces.
Existe-t-il un programme de recherche sur l'Arctique qui porte précisément sur les conditions météorologiques en Arctique et l'état des glaces?
Pour répondre brièvement, oui. Ces aspects sont couverts non seulement dans le cadre du projet scientifique de la Station de recherche du Canada dans l'Extrême-Arctique, mais aussi par certains des ministères responsables, comme Environnement Canada.
Merci, monsieur le président.
Messieurs, je vous remercie de votre présence.
J'aimerais revenir en arrière. Notre étude porte sur la politique étrangère du Canada pour l'Arctique. Je sais qu'il doit y avoir énormément d'éléments qui peuvent être étudiés aux deux pôles: les changements qui s'y produisent, les nouveaux projets ou les nouvelles possibilités. Je suis curieux de savoir si vous avez l'impression que votre travail a une influence ou des répercussions sur la question de la souveraineté dans le Nord, et si c'est le cas, de quelle façon?
Je me demande aussi en quoi votre recherche dans le Nord diffère de celle qui est effectuée en Antarctique?
Je vais tenter de répondre en premier.
En ce qui concerne la contribution de notre travail sur la question de la souveraineté, vous posez une question difficile. C'est une bonne question. Je fais partie de ceux qui doutent qu'on doive donner à la souveraineté un sens juridique et technique. La souveraineté est un prétexte très intéressant dans la politique canadienne sur bien des plans, à l'échelle nationale et internationale. Peu d'États de l'Arctique vivent des crises de la souveraineté comme celles que nous vivons de temps en temps. Par exemple, en ce qui concerne la question du Svalbard, qui touche les Norvégiens et les Russes, on ne parlait pas de crise de la souveraineté en Norvège. Il s'agissait d'un différend.
Pour notre part, nous regroupons beaucoup d'éléments dans ce mot. Je dirais seulement qu'un organisme comme le nôtre peut avoir une énorme influence de façon peut-être latérale; il nous faut faire appel à notre imagination. À titre d'exemple, j'ai discuté avec certains pays côtiers du Pacifique — la Chine, la Corée, le Japon et Singapour, et bien sûr, les États-Unis et la Russie — des défis de la mondialisation dans l'Arctique. Il nous faut comprendre que l'Arctique est une région qui est touchée non seulement par des changements climatiques, mais aussi par la mondialisation. Notre planète compte présentement sept milliards d'êtres humains, et les changements que connaît l'Arctique ne se produisent pas que dans l'Arctique. En fait, la plupart d'entre eux se produisent à l'extérieur de l'Arctique. Qu'il s'agisse des pressions exercées pour les routes de transport, des minerais, des polluants transfrontaliers ou des changements climatiques, ils sont le résultat de facteurs extérieurs à l'Arctique.
Qu'est-ce que cela signifie pour le Canada et ses frontières? Le fait est que pour ces sept milliards d'êtres humains, cette partie de la planète devient de plus en plus intéressante. Il faut donc comprendre les aspects de la science physique qu'elle comporte — les changements climatiques, le régime de glaces — mais surtout les facteurs humains qui y sont liés. C'est pourquoi je pense que nous entendons autant parler de la voix de l'Arctique en politique étrangère. Ce n'est pas parce qu'on parle de l'art de gouverner dans les rues de Tuktoyaktuk tous les jours. C'est parce que très souvent, lorsqu'il est question de l'Arctique, nous oublions que des gens y vivent. Nous avons tendance à le voir comme une frontière, ce qui signifie que nous y allons pour obtenir quelque chose, ou que nous y passons pour nous rendre à des destinations au Sud ou que nous le voyons comme un laboratoire ou une grande aire de nature sauvage, un grand parc que nous pouvons préserver en y traçant des frontières. Toutefois, pour des gens comme Dennis et moi, il s'agit avant tout d'une terre natale. C'est un lieu où des gens vivent.
Si vous voulez vous lancer dans un exercice de réflexion, pensez à la réaction qu'aurait un résidant d'Ottawa si des habitants du Nord tenaient presque tous les jours et partout sur la planète, des conférences sur la façon dont les Ottaviens devraient structurer leurs activités et sur la façon d'être plus écologiquement et économiquement responsables. C'est le genre de pression que subissent les habitants du Nord.
En ce qui concerne la souveraineté, je ne crois pas que nous ayons des enjeux cruciaux sur le plan juridique. Nous avons un conflit territorial avec les États-Unis dans la mer de Beaufort. Nous sommes sur le point de régler des questions touchant l'île Hans. Nous ne vivons cependant pas de crise de la souveraineté. Comme je l'ai dit, il faut s'arrêter au terme et penser à tous les prétextes qui s'y rattachent.
J'ajouterais simplement que sur le plan de l'acquisition des connaissances et de la recherche, la collaboration internationale est une façon de se servir des connaissances acquises partout dans le monde. Lorsque des recherches sont menées dans le Nord du Canada, les règles et les règlements canadiens sont respectés, les processus d'attribution de permis relatifs aux travaux scientifiques des territoires sont suivis, le processus relatif aux permis d'utilisation des terres pour l'établissement d'un camp de recherche est respecté. Je pense que c'est une bonne façon de montrer que le Canada a établi des règles et des règlements et que les étrangers respectent les secteurs de compétence.
Merci.
Par contre, monsieur Funston, je dirais que vous n'êtes probablement pas le seul à avoir parfois l'impression qu'Ottawa exerce ce genre de pressions. Je crois que bon nombre de collectivités et de villes partout au pays ont parfois l'impression qu'Ottawa s'ingère trop dans certaines des démarches des administrations municipales.
Il ne s'agit pas seulement d'Ottawa. Je ne blâme pas qu'Ottawa. Il y a plus que cela. C'est tout l'intérêt que porte le sud du pays à l'Arctique. En 2005, il y avait peut-être un article à l'occasion qui portait sur l'Arctique. Depuis 2006, il apparaît sur presque toutes les pages couverture de tous les magazines que vous pouvez imaginer. Il ne s'agit pas seulement des capitales nationales. Il y a vraiment un intérêt à l'échelle mondiale maintenant.
J'ai passé les 30 premières années de ma carrière à demander aux gens de s'intéresser à l'Arctique, et je dois dire que je ne suis pas sûr que j'aurais dû le souhaiter aussi fortement.
Faites attention à ce que vous souhaitez.
M. Bernard Funston: Tout à fait.
M. John Williamson: Dois-je vous appeler M. Scott ou professeur?
David, j'aimerais savoir quelque chose, étant donné que vous avez mentionné que l'Arctique est un territoire canadien et que vous travaillez avec des scientifiques. Trouvez-vous que cela vous donne un avantage? Arrive-t-il souvent que des scientifiques d'autres pays travaillent dans votre groupe? La formation du Nord doit être complètement différente de celle du Sud. Par exemple, vous devez avoir plus de liberté et de mobilité ici, et plus d'obstacles lorsque vous êtes en Antarctique.
Tout à fait. Les deux régions polaires comportent leurs difficultés quant à la mobilité. En été, il est plus facile de faire du travail de terrain dans le Nord que dans le Sud en raison du climat.
Il y a à mon avis un certain nombre d'obstacles. L'accès en est un. La géographie, la taille des régions et toutes les recherches qu'il faut faire afin de bien connaître ces milieux et de comprendre quelque chose des découvertes sont des obstacles majeurs.
Avant de devenir membre de la commission, en tant que chercheur scientifique, et gestionnaire scientifique à Ressources naturelles Canada, j'ai eu l'occasion de collaborer avec bon nombre de partenaires étrangers qui ont tous le plus grand respect pour le Canada et son secteur de recherche. Ils sont toujours heureux de collaborer avec les Canadiens, ce qui ouvre souvent des possibilités d'agir à l'échelle internationale et de partager les meilleures connaissances qui existent, d'apprendre de l'expérience des autres et de continuer à progresser dans un contexte mondial — la connaissance des fonctions de notre planète et des créatures qui y vivent.
Merci, monsieur le président, et bienvenue à nos invités.
Je suis heureux que vous ayez précisé qu'il ne s'agit pas d'une question de souveraineté. La question a été maintes et maintes fois soulevée, et les témoins ne cessent de répéter que ce n'est pas le cas. Il s'agit de déterminer comment administrer et élaborer des politiques pour le Nord dans l'avenir.
Je viens de lire que votre président et les membres de votre conseil d'administration sont nommés par le premier ministre.
Êtes-vous libres de prendre les décisions qui vous semblent justes, ou devez-vous suivre des directives du Conseil privé? Comment est-ce que cela fonctionne?
Notre processus décisionnel est totalement indépendant. Évidemment, nous avons des liens très étroits avec le gouvernement du Canada. Techniquement, je crois que notre organisation est considérée comme un établissement public. Les membres de notre conseil d'administration sont tous de l'extérieur du gouvernement, mais nos employés sont des employés de l'État.
Non, nous n'avons pas à suivre des directives précises. Le ministre s'intéresse évidemment à ce que nous faisons, parce qu'il a une responsabilité générale à assumer à l'égard du Nord. Je dois dire que le ministère a été d'un très grand soutien au cours des deux dernières années, alors que nous tentions de ressusciter et de revitaliser la commission, mais ce n'est pas une relation de commandement et de contrôle.
Je pense que le gouvernement nous a encouragés à entreprendre une initiative stimulante pour entamer la nouvelle ère. Comme je le disais, la commission a lancé ses activités juste comme on commençait à s'intéresser sérieusement à l'Arctique, et les membres de son conseil d'administration proviennent de toutes les sphères. C'est très intéressant de travailler avec eux. Nous tenons le cabinet du ministre au courant de nos activités, et c'est par l'intermédiaire du ministre que nous rendons des comptes au Parlement, mais je le répète, ce n'est pas une relation de commandement et de contrôle.
La nomination des membres du conseil d'administration doit être approuvée par le cabinet du premier ministre. Est-ce ainsi que cela fonctionne?
Je me suis rendu en Nouvelle-Zélande récemment, et j'ai pu constater qu'il n'y avait que très peu d'écart là-bas entre les Premières nations et les nouveaux arrivants, les Néo-Zélandais, en ce qui a trait à leurs revenus. Les Premières nations participent davantage à l'économie du pays.
J'ai demandé au député ce qu'ils avaient compris là-bas que nous n'avions pas encore compris ici. Il a répondu qu'ils avaient appris des erreurs commises en Amérique du Nord, parce que l'histoire a commencé 100 ans plus tard là-bas, et qu'ils ont adopté un modèle d'inclusion à l'égard des ressources, entre autres choses. Leur approche est différente.
Pour ce qui est de l'avenir de l'Arctique, vous avez dit qu'il ne fallait pas tomber dans l'esprit de frontière — il semble y avoir toutes sortes de revendications de territoires et de ressources et des batailles juridiques constantes en ce moment entre le Canada, les États-Unis et les peuples autochtones. On peut supposer qu'il serait possible de changer nos méthodes et peut-être d'adopter un modèle différent pour traiter avec les collectivités du Nord.
Cela dit, et vous y avez déjà fait allusion, il ne faut pas qu'Ottawa devienne le centre névralgique, comme si le Nord était une sorte de colonie. Les idées doivent venir du Nord. Comment pensez-vous que le gouvernement devrait s'y prendre pour faire les choses autrement cette fois-ci, afin de faire ce qu'il se doit pour la population du Nord? Devrions-nous tâcher d'apprendre de nos erreurs et éviter de les répéter?
Absolument. Il est important d'apprendre des erreurs des autres.
Je pense que nous avons déjà commencé à faire les choses autrement. C'est en tout cas différent de ce que c'était il y a plus de 30 ans, quand j'ai commencé à travailler dans ce domaine. Ce vent de « renouveau » a commencé avec le règlement des revendications territoriales et la conclusion d'ententes d'indépendance gouvernementale. Il en reste quelques-uns à régler dans les Territoires du Nord-Ouest, mais ce vide politique n'existe plus. Nous avons des régimes juridiques, qui bénéficient des plus hautes protections de notre Constitution. En Nouvelle-Zélande, par exemple, le traité de Waitangi a reconnu très tôt la notion de loi autochtone. Il a été signé en 1841, je crois, alors ils ont eu bien du temps pour y travailler.
Nous sommes en voie d'y arriver. Nous avons les fondements juridiques nécessaires. Il est toujours difficile de mettre en application de telles mesures, et il faudra un certain temps pour y arriver, car ce n'est pas le genre de chose qui se fait du jour au lendemain. Cela prend du temps. Je pense que nous faisons les choses du mieux que nous pouvons. Nous sommes toujours limités par les ressources, et dans ce cas-ci, le monde est venu frapper à notre porte d'en arrière sans trop qu'on s'y attende. Je crois que personne ne se doutait que l'Arctique allait susciter autant d'intérêt de la part du monde entier après 2005. J'ai l'impression que les capitales nationales des États arctiques ont été prises de court. À part pour la Norvège, qui avait l'habitude de composer avec un environnement climatique unique — elle était très bien préparée —, aucun des autres pays n'était aussi bien préparé qu'il ne le croyait.
Essentiellement, c'est qu'il n'est plus seulement question d'enjeux nationaux dans le Nord — construire des postes infirmiers, des écoles, des patinoires, des centres communautaires, etc. Dans les Territoires du Nord-Ouest, on réussit très bien de ce côté depuis 1950, l'année de ma naissance. Par contre, au large des côtes, il n'y a pas eu beaucoup de construction ni d'aménagement d'infrastructures. Nous ne pensions pas qu'il serait possible d'accéder à l'Arctique par la voie maritime, et cela a été tout un choc pour le Canada, les États-Unis et la Russie — un peu moins, comme je le disais, pour la Norvège. Pour l'Islande, ce n'est pas du tout un problème.
Faire les choses différemment implique aussi aujourd'hui de tenir compte du reste du monde. Peut-être que le dialogue se limitait autrefois à Ottawa et à la capitale territoriale, mais on parle maintenant de l'Arctique avec la Chine et avec... Vous savez, l'Inde a posé sa candidature pour avoir le statut d'observateur au Conseil de l'Arctique. Comme je le disais, le débat sur les changements dans l'Arctique s'étend au monde entier. Il n'est pas seulement question d'Ottawa. Je ne voulais pas laisser entendre qu'Ottawa avait colonisé l'Arctique. Les demandes proviennent généralement des latitudes moyennes, et elles portent sur les ressources, la possibilité d'une route de transport plus courte, et évidemment sur la grande question des effets transrégionaux des changements climatiques. La fonte des glaces de l'Arctique comporte d'énormes conséquences pour les latitudes moyennes, qu'on pense à la hausse du niveau de la mer ou à la variation des régimes climatiques.
Nous faisons du mieux que nous pouvons au Canada, et je crois que d'autres pays ont appris de nos erreurs — je pense notamment à la Nouvelle-Zélande et à l'Australie —, mais nous ne sommes pas parfaits.
C'est tout le temps que nous avions.
Nous entamons notre prochain tour de cinq minutes.
Nous vous écoutons, madame Brown.
Merci beaucoup. Je vais partager mon temps avec Mme Grewal, si c'est nécessaire.
Monsieur Funston, vous n'aimerez peut-être pas ma question, parce que vous étiez de toute évidence d'avis qu'il fallait arrêter de demander à la population du Nord de s'impliquer. Mais je m'adresse à vous particulièrement, monsieur Scott. Vous parlez d'éduquer et de sensibiliser les gens. Est-ce que votre organisation a lancé une initiative quelconque pour offrir un tel programme dans les écoles? Est-ce que cela fait partie de votre mandat, ou est-ce qu'un membre de votre organisation se consacre à cela?
Ma fille est une nouvelle enseignante. Elle vient de terminer une unité sur les peuples autochtones au Canada. Il y a très peu de possibilités d'enseigner l'histoire des peuples autochtones du Nord, et c'est pourtant un point que nous devons aborder. Elle tente de trouver des ressources. Je lui ai proposé de parler du Nord dans son cours de géographie, peut-être. Elle enseigne à des classes de troisième et de quatrième années. Quels programmes élabore-t-on en ce sens? L'éducation doit commencer aux premières années du primaire maintenant.
Merci d'avoir posé la question. Je vais en profiter pour vous parler davantage d'un des volets de notre stratégie de communication et de sensibilisation, qui est grandement axé sur les enfants du Nord.
Les programmes scolaires sont évidemment de compétence territoriale, mais nous sommes tout à fait conscients qu'il est nécessaire de soutenir l'enseignement d'un programme approprié. Nous avons entrepris différentes initiatives en ce sens. Nous collaborons maintenant avec la Société géographique royale du Canada, qui produit depuis longtemps du matériel de grande qualité qui est à la portée des enseignants. Elle s'est montrée très intéressée à travailler avec nous pour mettre l'accent sur le Nord aussi, de façon à ce que le programme à enseigner dans les trois territoires et dans le nord des provinces soit mieux soutenu. Nous voulons aussi nous associer à d'autres organisations pour contribuer au financement de l'élaboration de documents qui pourraient aider à l'enseignement des programmes à l'échelle du Nord.
L'Office national du film du Canada a récemment sollicité notre aide pour un de ses projets, qui consiste à ramener dans le Nord les films historiques qui ont été tournés là-bas, traduits dans les dialectes parlés dans les régions concernées. On nous a entre autres demandé de veiller à ce que des copies de ces films historiques, auxquels ont participé bien souvent les aînés des personnes qui vivent encore là-bas, se frayent un chemin jusque dans les écoles et les demeures des gens du Nord.
Ce ne sont là que deux exemples d'initiatives qui peuvent permettre à la Commission des affaires polaires de remplir son mandat de communication et de sensibilisation à l'égard des enjeux polaires, en prenant des mesures très concrètes à l'intention des écoles et des enfants. Et nous savons que les enfants sont très doués pour enseigner des choses à leurs parents.
Nous sommes très heureux de collaborer à ces projets. Ils n'en sont qu'à un stade embryonnaire en ce moment, mais nous espérons qu'ils pourront être mis au point et lancés dans les mois à venir.
Le besoin est flagrant. Nous pensons être en mesure, grâce à notre mandat, de réunir des partenaires, les bons, pour mettre en place des programmes locaux appropriés.
Merci.
C'est grâce à votre organisation que nous pouvons voir et entendre ce qui se passe dans la région de l'Arctique, mais depuis les coupes de 2000, vous n'êtes plus très présent dans le Nord. Le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord a maintenant débloqué les fonds nécessaires pour que la commission puisse ouvrir un bureau dans l'Arctique.
Pourriez-vous nous parler de l'importance que revêt ce bureau et nous dire comment il vous aidera à remplir votre mandat?
Merci de me poser la question.
Nous sommes très fiers d'assurer une présence dans le Nord maintenant. Encore là, c'est ce que veut notre mandat, et nous n'avons pas été en mesure de le remplir pendant un certain nombre d'années.
Le ministère des Affaires autochtones nous a effectivement accordé des fonds pour l'exercice en cours. Nous avons agi le plus rapidement possible pour rédiger la description du poste et en faire l'annonce. Notre stratégie était d'étendre la recherche du candidat parfait à l'ensemble de la région nordique pour ensuite établir le bureau dans la collectivité de la personne retenue, plutôt que de décider de l'emplacement du bureau d'abord et de tenter d'y envoyer le candidat choisi. Nous avons été très chanceux. Le processus a suscité beaucoup d'intérêt. Plus de 25 personnes se sont montrées intéressées au poste, et nous avons reçu 17 candidatures. Nous avons interviewé 10 personnes originaires du Nord, et nous avons finalement choisi M. David Miller, de Yellowknife.
C'est très encourageant. Il entretient d'excellents liens avec les collectivités du Nord, principalement dans les Territoires du Nord-Ouest, mais comme il a passé 33 années là-bas, il a aussi de très bonnes relations avec les autres territoires et les régions du Nord des provinces. Étant sur place, il a d'excellents contacts avec les gens de l'endroit. Nous avons déjà entrepris de changer notre façon de faire les choses afin d'offrir un programme qui rejoigne davantage les habitants du Nord. C'est encore une fois une occasion unique pour renouveler notre présence là-bas et nous adapter beaucoup mieux aux réalités locales. Même si notre administration centrale et que six de nos employés sont ici, à Ottawa, nous avons maintenant quelques personnes dans le Nord.
J'ajouterais également que grâce au processus de sélection qui a mené à la nomination de M. Miller, nous avons aussi rencontré une jeune femme du nom de Jocelyn Joe-Strack, des Premières nations de Champagne et d'Aishihik. Elle habite à Whitehorse et s'est jointe à notre équipe à temps partiel. Elle termine une maîtrise en science à l'Université de Northern British Columbia, et elle nous aide d'ici là à analyser les besoins de recherche dans le Nord et l'état actuel des connaissances.
Je vais partager mon temps avec Mme Péclet.
Je n'ai que deux ou trois questions à vous poser.
Je voudrais qu'on parle de l'aspect éducation du point de vue international, car c'est évidemment pour cette raison que nous sommes ici.
Pour ce qui est de l'Université de l'Arctique, l'université virtuelle internationale qu'a soutenue le gouvernement jusqu'en 2010, pensez-vous que nous devrions renouveler notre engagement à cet égard, et de façon plus importante encore? L'université a tenu une rencontre très fertile à Winnipeg il y a environ un mois. Croyez-vous qu'il s'agisse d'un bon outil pour transmettre des connaissances à la population de l'ensemble de l'hémisphère Nord?
Ce projet est très intéressant. À vrai dire, il a vu le jour au Canada en 1998, au moment de la réunion ministérielle qui s'est tenue à Iqaluit. Ceux qui ont eu cette idée en premier ont participé à la réunion, où ils ont présenté le projet. C'est une formule tout à fait louable. Les responsables essaient de concevoir un programme de formation qui soit utile aux habitants du Nord. Grâce au Web, ceux-ci peuvent étudier à partir de leur collectivité sans devoir se rendre dans le sud, s'ils ne le veulent pas.
Le coût du projet constitue naturellement un obstacle majeur, et je pense que nous en avons limité le financement depuis 2010. Je serais ravi qu'il soit remis sur pied.
Le Canada est le seul État arctique ne possédant aucune université au-delà du 60e parallèle. Mais je dois dire que le problème lorsque le projet a été lancé en 1998, c'est que peu de jeunes Canadiens atteignaient un niveau d'études suffisant pour entamer des études universitaires — Dennis connaît les chiffres beaucoup mieux que moi. Nous nous sommes récemment améliorés à cet égard, mais à l'époque, il y a 10 ans seulement, nous avions encore du mal à convaincre les jeunes de terminer leurs études secondaires. Il faut toujours trouver un équilibre convenable. Il ne sert à rien d'investir en enseignement supérieur si le système ne forme pas suffisamment de gens pour en bénéficier.
Il s'agissait tout de même d'un projet emballant, mais je sais qu'il a rencontré des difficultés.
[Français]
Je vous remercie beaucoup.
Une des fonctions de la commission consiste à conseiller la ministre de l'Agence canadienne de développement économique du Nord. Comme vous le savez, la ministre de la Santé et ministre de l'Agence canadienne de développement économique du Nord va assumer la présidence du Conseil de l'Arctique au cours des prochains mois.
Allez-vous la rencontrer pour la conseiller, notamment quant aux priorités que le Canada devrait faire valoir dans le cadre du Conseil de l'Arctique? J'aimerais aussi savoir ce que vous pensez des priorités que le gouvernement a mises en avant. Pensez-vous vraiment que ce sont les bonnes? Nous avons entendu parler du développement des communautés du Nord, du développement du Nord et de l'exploitation des ressources naturelles. Or ce sont des enjeux davantage nationaux qu'internationaux.
Ne pensez-vous pas que nous devrions plutôt prioriser des questions comme les changements climatiques, la gestion des pêches et la gestion des dangers, par exemple les déversements de pétrole? D'après vous, quelles devraient être les priorités? Allez-vous rencontrer la ministre pour la conseiller à ce sujet?
[Traduction]
D'accord.
Nous n'avons pas encore discuté de ces priorités avec l'une ou l'autre des ministres. Nous avons offert notre aide, mais n'avons toujours pas reçu de réponse. J'imagine qu'il y a beaucoup de travail.
En fait, les priorités seront déterminées en collaboration avec les autres États arctiques lors de la réunion ministérielle qui se tiendra à Kiruna en mai 2013. Il ne faut pas oublier la règle du consensus qui prévaut au sein du Conseil de l'Arctique. Ainsi, le Canada ne pourrait pas imposer unilatéralement un programme visant le développement durable des collectivités de l'Arctique canadien, par exemple.
Le Conseil de l'Arctique continuera surtout de s'attarder à des enjeux tels que le changement climatique et ses répercussions à court terme, entre autres. L'ordre du jour sera assez complet. Je pense que le Canada devrait plutôt tenir compte de ses priorités à l'échelle nationale. Je constate que de véritables efforts sont déployés afin de mieux appliquer les travaux du Conseil de l'Arctique à la situation canadienne, ce à quoi la commission pourrait contribuer. Nous pourrions assurément aider les collectivités nordiques à mieux comprendre le Conseil de l'Arctique grâce à nos volets stratégiques visant à rassembler l'information, à en faire la synthèse et à la diffuser tout en améliorant la communication à l'échelle locale.
Nous n'avons établi aucune priorité puisqu'on ne nous l'a pas demandé.
Pourriez-vous nous dire en quoi la Commission canadienne des affaires polaires est comparable à la U.S. Arctic Research Commission? Pourriez-vous remplir un rôle similaire à celui de la commission américaine?
Je vais commencer, après quoi David complétera mes propos, car c'est une excellente question.
Aux États-Unis, deux organisations remplissent le rôle de la Commission canadienne des affaires polaires, à savoir la U.S. Arctic Research Commission et le Polar Research Board, qui s'intéresse surtout à l'Antarctique. Ces organisations se concentrent sur la recherche. Je pense qu'elles coordonnent aussi les programmes de recherche sur l'Arctique des ministères et des organismes américains. Quant à nous, nous ne jouons pas ce rôle; nous ne nous mêlons pas des programmes de recherche des ministères.
Par ailleurs, les structures des deux commissions ont bien des points en commun. Aux États-Unis, c'est la présidence qui nomme les membres. Justement, certains postes étaient vacants et viennent tout juste d'être pourvus. La présidente Fran Ulmer vient elle aussi du Nord, et plus particulièrement de l'Alaska, dont elle a été lieutenante-gouverneure. Je dois dire qu'elle et moi avons beaucoup en commun lorsque nous discutons aux réunions conjointes des deux commissions.
Vous pouvez continuer, David.
Sur le plan opérationnel, le dialogue bilatéral des sept derniers mois a permis de déterminer un certain nombre de domaines où, en tant que commissions indépendantes, nous pourrions mieux coordonner les travaux de diverses organisations scientifiques. Au Canada, il s'agit naturellement du milieu universitaire et de réseaux comme ArcticNet, de même que de ministères fédéraux et d'intervenants territoriaux. Nous pouvons contribuer à réunir tout ce beau monde.
Pour l'instant, nous nous préoccupons avant tout de la région des mers de Beaufort et de Tchoukotka, entre autres. Une frontière internationale traverse bien sûr la mer de Beaufort, mais les écosystèmes n'en tiennent pas compte. Les mammifères la franchissent sans problème, et l'eau y circule librement.
Puisque la coordination peut améliorer l'efficacité de la recherche, nous collaborons actuellement très étroitement avec la U.S. Arctic Research Commission et d'autres intervenants en Alaska pour veiller, par exemple, à ce que les scientifiques des deux pays utilisent un bateau de la Garde côtière. Ainsi, les données recueillies seront compatibles, ce qui permettra une compréhension plus globale de l'écosystème naturel que si chaque pays avait agi indépendamment. C'est le genre de coordination que nous essayons de développer.
J'ai une question, monsieur le président.
Je vous remercie d'être avec nous.
J'aimerais poursuivre dans la même veine. Qu'en est-il des Russes? Leur tendez-vous la main? Ont-ils les mêmes intérêts que les Américains et nous? Aimeriez-vous nous faire part de certaines difficultés?
Il est difficile de nouer le dialogue avec les Russes. J'ai travaillé très étroitement avec eux lorsqu'ils ont assuré la présidence du Conseil de l'Arctique de 2006 à 2008. Leur manière de procéder est différente. Ils sont beaucoup moins portés sur l'échange d'information, qui ne leur paraît pas normal depuis la chute de l'Union soviétique. Ils sont plutôt là pour se servir des divers rapports du Conseil de l'Arctique, mais eux-mêmes n'en déposent pas beaucoup.
Des voix: Oh, oh!
M. Bernard Funston: Cette attitude complique les choses. L'autre difficulté majeure lorsque nous travaillons avec les Russes, c'est de connaître leurs responsabilités officielles et de savoir s'ils sont le porte-parole attitré d'un ministère, d'une agence ou de quoi que ce soit d'autre.
Nous ne savons toujours pas à quoi nous en tenir au quotidien. Par exemple, je garde le contact avec des organisations autochtones russes. Je sais que la direction de l'Association russe des populations autochtones du Nord vient de changer. Quoi qu'il en soit, les échanges sont laborieux. Je pense que la collaboration est meilleure dans le domaine scientifique, surtout au sein du International Arctic Science Committee, une des organisations auxquelles nous participons. On peut donc dire que les Russes s'investissent sur le plan scientifique
Une des menaces qui se dessinent, et dont le comité n'a pas beaucoup parlé, du moins à la séance d'aujourd'hui, c'est que l'Arctique attirera plus de navires de pêche au fur et à mesure qu'il se dégage. Les Russes sont-ils disposés à conclure une sorte d'entente qui mettrait peut-être à contribution les forces policières pour éviter que l'Arctique ne se fasse dévaliser comme c'est arrivé sur la côte Est et ailleurs dans le monde?
Ce genre d'organisation régionale de gestion des pêches existe déjà. Par exemple, l'Institut polaire de la science et de la recherche sur la pêche et l'océanographie, ou PINRO, est un organisme scientifique très connu de la Russie arctique qui travaille beaucoup avec les Norvégiens, entre autres, sur les stocks de poissons de la mer de Barents, une région exploitée depuis quelque temps.
Lors de nos récentes réunions en Alaska, nous avons appris que la productivité du secteur de pêche de l'Extrême-Arctique est méconnue. La pêche est surtout pratiquée dans les zones côtières, qui relèvent de la compétence du pays. À vrai dire, il existe déjà de très solides plans de gestion là où il y a des stocks de poissons chevauchants, comme c'est le cas dans la mer de Barents que les Norvégiens et les Russes se disputent.
Vous vous demandez si les gens se mettront à pêcher dans la région centrale de l'océan Arctique. Or, nous avons appris que la principale espèce de la région est la toute petite morue polaire, dont la taille varie entre un et sept pouces. Nous n'en connaissons pas bien la productivité.
La pêche se pratiquera, mais sera en majeure partie réglementée par l'État. Il est probable que nous collaborions surtout avec les Américains en présence d'un stock chevauchant, de même qu'avec les Danois sur la côte Est, bien entendu. À ce jour, je n'ai entendu parler d'aucun stock chevauchant de qualité commerciale avec les Russes, mais je sais que ceux-ci collaborent étroitement avec les Norvégiens depuis des années à ce propos.
M. Dave Van Kesteren: Bien.
Merci.
Merci. Vous avez déjà utilisé une minute du temps de Mme Brown.
Il vous reste quatre minutes, madame Brown.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je sais que vous avez assisté à une partie du témoignage de Mme Jeffrey ce matin. J'ignore si vous avez tout entendu, mais elle nous a dit que le Conference Board du Canada a publié un document qui s'intitule Getting it Right: Assessing and Building Resilience in Canada’s North.
L'avez-vous consulté? Qu'en pensez-vous?
Je n'en ai pas suffisamment pris connaissance. J'aimerais tout de même ajouter que plus les gens s'intéressent au Nord, plus ils nouent le dialogue avec ses habitants et cherchent des solutions en collaboration, plus nous courons la chance de trouver des idées et la voie à suivre. Mais je ne peux pas me prononcer sur le contenu du rapport.
Mme Jeffrey a dit qu'un autre rapport sera déposé lundi sur les stratégies en matière de logement dans le Nord. Il sera accessible.
Recevez-vous ce genre d'articles publiés au Canada? Avez-vous des employés pour les éplucher? Servent-ils de point de départ aux recherches de la commission?
Notre personnel ne nous permet pas de parcourir le nombre impressionnant d'articles publiés. Aimerions-nous le faire? Tout à fait. Or, il est plus important à nos yeux de savoir qui travaille sur quoi plutôt que de connaître le contenu des rapports.
C'est une source d'information, mais nous préférons souvent tirer nos conclusions de diverses expériences plutôt que de lire des rapports puis d'y répondre. Nous n'avons tout simplement pas suffisamment de ressources à l'heure actuelle.
Nous faisons de notre mieux pour nous tenir au courant. Mais comme M. Funston l'a dit, la quantité d'information est écrasante pour notre équipe, qui est relativement petite. On peut dire que nous avons deux employés et demi qui s'occupent de l'ensemble de nos dossiers.
Le menu vertical de votre site Web présente une liste de ressources et un répertoire. Qui utilise ces outils? Comment avez-vous dressé la liste? Où se trouvent les données empiriques? Considérez-vous que le Conference board du Canada devrait faire partie des ressources proposées à ceux qui consultent votre site Web?
Tout d'abord, je vous prie d'excuser l'état de notre site Web. Je dirais qu'il s'est détérioré au cours des quatre ou cinq dernières années; il est loin d'être à jour et à la hauteur de mes attentes. Nous faisons de notre mieux pour remédier à la situation.
Puisque le Conference Board est un des intervenants qui compile de l'information et en fait l'analyse, c'est effectivement le genre d'acteur dans le Nord, qui détient et examine des renseignements, auquel nous devrions faire référence dans un esprit d'échange de l'information existante. Nous ne portons aucun jugement. Nous diffusons les travaux de toute une série d'organismes, gouvernementaux ou non, qui publient de l'information sur le Nord.
J'imagine qu'il y a beaucoup de travaux universitaires. Pour revenir sur les propos de M. Bevington au sujet des universités dans le Nord, l'éducation en ligne est désormais une des manières de faire des études là-bas. Espérons que le nombre total d'étudiants justifiera un jour la construction d'un établissement universitaire en bonne et due forme.
Merci beaucoup.
Je vais laisser M. Dewar poser une question, après quoi j'interviendrai à mon tour, puis nous clôturerons la séance.
Je sais que vous avez parlé de la gestion des écosystèmes, mais j'aimerais y revenir étant donné le nombre effarant de variables qui entrent en ligne de compte. Le fait que le Canada assumera la présidence du conseil à partir de mai n'est pas étranger à notre étude de l'Arctique.
D'après vous, comment le Conseil de l'Arctique devrait-il envisager la question? Si aucune idée ne vous vient à l'esprit, vous pourrez nous faire parvenir votre réponse plus tard. Comment gérer convenablement les écosystèmes, non seulement en ce qui a trait aux pêches, mais aussi sur le plan des politiques générales?
À ce sujet, je pense que le pari le plus difficile est de comprendre la signification de l'expression « gestion écosystémique », qui ne plaît pas aux Norvégiens. D'ailleurs, ceux-ci préfèrent parler d'« approche écosystémique », qui n'est pas nécessairement axée sur la gestion des écosystèmes. En plus, ce n'est pas l'écosystème qu'il faut gérer, mais bien l'activité humaine au sein de l'écosystème.
L'application rigoureuse de la démarche scientifique est un des fondements de la gestion écosystémique. La plupart des rapports du Conseil de l'Arctique nous ont appris que nous ne comprenons pas bien la dynamique des systèmes qui composent les écosystèmes. Dans la région de l'Arctique, 17 vastes écosystèmes marins ont été identifiés, mais ils ne se prêteront probablement pas tous à l'activité humaine de si tôt.
Mais le véritable défi, c'est toute cette question des données scientifiques au fondement de la gestion écosystémique. Il faut se demander de quelle façon les données influencent la gestion. En fait, la science est une bonne source de savoir et d'information, mais elle ne convient pas particulièrement à la prise de décisions. Les données scientifiques peuvent être utiles, mais en présence d'intérêts divergents, c'est aux politiciens et aux décideurs de trancher. Comme je l'ai dit, nous comparons l'Arctique à une frontière, à un laboratoire ou à une grande aire de nature sauvage. Ces représentations du Nord sont toutes aussi valables les unes que les autres. Comment peut-on décider si l'exploitation d'un gisement de pétrole ou la chasse à l'ours polaire seront permises? Ces décisions et ces choix revêtent un aspect politique, et il arrive que l'information n'existe pas. Il se peut donc que la science ne dicte pas la réponse.
Par conséquent, l'expression va évoluer à l'instar du concept de « développement durable ». Un gros rapport sur la question sera déposé en mai 2013 au Conseil de l'Arctique. La dimension scientifique a ses limites, mais la gestion aussi, car la fonction publique des États arctiques ne permet pas d'appuyer ce genre de décisions sur des considérations techniques. Il s'agit donc typiquement de décisions politiques.
Ainsi, on pense que la gestion écosystémique s'appuie sur la science, mais j'ai bien l'impression que les décisions seront fortement influencées par la politique, au bout du compte.
Je pense que je préfère l'expression des Norvégiens. Lorsque je travaille avec eux, je trouve qu'ils maîtrisent beaucoup mieux l'anglais que moi.
Je pense que l'approche écosystémique correspond davantage à la réalité. Nous étudions les écosystèmes, mais ce ne sont pas des compartiments étanches. En gestion écosystémique, qu'arrive-t-il si le problème vient d'ailleurs, comme c'est le cas des polluants transfrontaliers et du changement climatique? Impossible de gérer ces enjeux au sein de l'écosystème. Il faut...
À vrai dire, ma question dérive en quelque sorte du développement durable dont vous venez de parler. Que pensez-vous de l'évolution du Conseil de l'Arctique, auquel vous participez depuis des années? C'est lié à ce que vous venez de dire, en quelque sorte. Depuis 1996, vous avez visiblement été témoin de bien des changements au sein du Conseil de l'Arctique. Pourriez-vous nous en parler brièvement?
Sans problème. J'ai trouvé cette évolution remarquable et assez stupéfiante. Le conseil a de nombreux détracteurs, mais le processus a pris du temps.
Au départ, le développement durable ne s'appuyait sur aucune théorie ou définition. Les États n'ont pas voulu définir le concept d'emblée. Il s'agissait alors d'un ensemble de projets dont l'approbation dépendait simplement de ceux qui s'y intéressaient et avaient les fonds pour aller de l'avant. Mais une tendance a commencé à se dessiner pendant les 10 premières années. À la lumière du rapport sur le développement humain dans l’Arctique paru en 2004 sous la présidence de l'Islande, il semble que nous observons une sorte de tendance et presque un cadre stratégique régissant les questions de développement durable.
Le plus difficile à propos du développement durable de l'Arctique, c'est de déterminer qui en profitera. Est-ce la population locale ou les sept milliards d'habitants de la terre? Comme je l'ai dit, je crois que l'Arctique aura la cote en raison des pressions de la mondialisation, des ressources énergétiques possibles, des ressources minières et même du tourisme — nous n'en savons pas beaucoup sur les pêches. La question est donc la suivante: qui en bénéficiera?
L'expression « développement durable » est délicate, car elle correspond à une procédure plutôt qu'à un résultat ou une destination. Je pense que tout se passe bien. On essaie même d'envisager la question sous un angle plus commercial. Assurément, le groupe de travail a largement contribué à faire valoir le point de vue des autochtones. L'équilibre n'est pas parfait, mais le dialogue est bien plus sain qu'il ne l'était en 1996, lorsque je me suis joint au conseil.
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