FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 11 décembre 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous procéderons à notre étude de la politique étrangère du Canada pour l’Arctique.
Nous accueillons James Manicom, associé de recherche en sécurité globale au Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale. Monsieur Manicom, je vous remercie et vous souhaite la bienvenue.
Nous avons aussi un collègue du Collège du Yukon qui comparaîtra par vidéoconférence à partir de Whitehorse. Il s’appelle Stephen Mooney et il est le directeur du Centre d'innovation en climat froid.
Il y a un décalage horaire de trois heures, n’est-ce pas?
Il est 5 h 45, n’est-ce pas?
Je vous remercie beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui. Nous savons qu'à ce moment-ci de la journée, trois heures peuvent faire toute une différence.
Je vais commencer par vous, monsieur Mooney. Vous disposez de 10 minutes pour faire votre déclaration préliminaire, et ce sera ensuite au tour de M. Manicom, qui est ici. Par la suite, nous passerons aux questions pour les 55 minutes suivantes.
Monsieur Mooney, je vous remercie beaucoup de votre présence. Je vous cède la parole pour que vous commenciez votre déclaration préliminaire.
Je vous remercie de me permettre de vous donner mon point de vue sur les possibilités et les centres d'intérêts aujourd'hui.
Je vais tout d'abord vous parler un peu de moi et de mon parcours. Je considère le Yukon comme mon chez-moi depuis 42 ans. J'ai grandi à Whitehorse, où j'ai obtenu mon diplôme d'études secondaires. Comme la plupart des étudiants yukonnais, j'ai dû faire mes études postsecondaires ailleurs, mais je suis revenu dans ma province. Je suis un ingénieur industriel et j'ai une formation en informatique. Je suis un professionnel de gestion de projets agréé. Avant d'occuper mes fonctions actuelles au Centre d'innovation en climat froid, j'ai travaillé pendant sept ans dans le domaine des télécommunications partout dans le nord du Canada dans le développement de produits, la gestion de projets et le marketing. J'ai également passé sept années à mettre au point et en place des logiciels informatiques aux États-Unis.
Je vais maintenant parler de notre centre. Le Centre de recherche du Yukon, situé au Collège du Yukon à Whitehorse, est le plus grand établissement de recherche et d'innovation au nord du 60e parallèle. Le CRY offre un large éventail de programmes et de services et du financement pluriannuel public et privé. Le CRY est prêt à appuyer la présidence du Conseil de l'Arctique pour le Canada. En prévision de nos discussions, j'aimerais vous donner quelques exemples de notre contribution.
Le CRY s'intègre à tous les volets de l'exploitation des ressources et du développement durable au Yukon et dans la région de l'Arctique. Nous travaillons dans les secteurs suivants: technologies de l'information et de la communication, mines, énergies de remplacement, agriculture, construction domiciliaire, applications industrielles, systèmes de transport, génie du pergélisol, réduction des déchets et combustibles artificiels. Pour l'essentiel, les initiatives du CRY peuvent être poursuivies de manière à améliorer la santé et le bien-être des gens qui contribuent aux économies du Nord. À titre d'exemple récent, il y a notre programme de l'exploitation des ressources et du développement durable pour l'Arctique, ou programme ReSDA. Il a été conçu pour trouver des façons de garantir qu'une plus grande part des avantages de l'exploitation des ressources dans l'Arctique profite à la région et entraîne moins de coûts pour les collectivités du Nord.
J'aimerais maintenant décrire deux programmes majeurs du CRY. Au cours des 12 dernières années, le Northern Climate ExChange du CRY a été un chef de file pour le renforcement des capacités des collectivités du Nord à signaler des dangers, liés par exemple au pergélisol et aux inondations, afin de les adapter aux changements climatiques. Ces renseignements liés aux changements climatiques ont été utiles pour plusieurs collectivités rurales du Yukon, et le conseil municipal de Whitehorse a adapté sa planification communautaire en fonction des constatations. Puisque 95 p. 100 de l’électricité au Yukon provient de l’hydroélectricité, et qu'elle est distribuée par un réseau, nous avons aussi établi un partenariat avec un fournisseur d’énergie local pour étudier les effets des changements climatiques sur le fleuve Yukon, qui est alimenté par les glaciers.
Innovation en climat froid, ou ICF, qui est sous ma direction, a été créé récemment grâce à l’aide financière de la Direction générale du développement économique du Yukon. Notre travail est axé sur le développement, la commercialisation et l’exportation de technologies viables en climat froid et sur des solutions dans ce domaine pour toutes les régions du Nord dans le monde. ICF appuie les partenariats entre les chercheurs en sciences appliquées, l’industrie et le gouvernement qui visent à régler les questions liées au climat froid et les problèmes techniques auxquels font face les habitants du Nord. ICF a le mandat de stimuler le développement économique au Yukon par des innovations et des technologies en climat froid. Nous nous concentrons sur ces deux éléments pour que l'économie du Nord soit bâtie dans le Nord, par le Nord et pour le Nord.
J’en suis venu à comprendre que le modèle de gestion d’ICF, un secteur de l’innovation que je représente aujourd’hui, ne cadre pas avec la définition traditionnelle ou courante du développement économique dans le Nord. En créant ICF, j’en suis venu à croire que l’innovation présente les plus grandes possibilités dans les économies de l’Arctique. Par exemple, lorsque le premier ministre Harper a fait son annonce concernant la Station de recherche du Canada dans l’Extrême-Arctique à Cambridge Bay, nous avons évalué cette possibilité et avons offert notre soutien avec quatre différentes initiatives: utilisation de notre méthodologie éprouvée pour mener une vérification du rendement énergétique qui établira une base de référence détaillée sur l’utilisation de l’énergie à Cambridge Bay; nouvelles technologies pour des parcs éoliens dans les collectivités éloignées; surveillance du vent et du soleil; et étude très importante sur les ventilateurs-récupérateurs de chaleur qui se traduira par l’installation de jusqu’à 10 VRC de trois fabricants canadiens dans diverses collectivités des trois territoires.
Le projet vise à développer des caractéristiques techniques pour fabriquer le VRC le plus efficace possible et à inciter les fabricants de VRC canadiens à fabriquer les meilleurs VRC. Ils serviront à la nouvelle SRCEA et seront vendus à l’échelle mondiale.
Certains sont surpris d’apprendre qu’ICF est également actif sur la scène internationale. Concernant les affaires circumpolaires, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international est un excellent partenaire du Centre international canadien pour la région de l’Arctique. Nous avons travaillé en partenariat avec le MAECI lors d’une mission en Scandinavie en 2010 et nous avons créé un projet avec une université technique danoise pour mener des projets de recherche conjoints. Cela a permis à ses étudiants de suivre un cours de maîtrise et de doctorat sur la conception de routes perfectionnée et le pergélisol. Ce cours est offert chaque année au printemps et comprend un voyage d’études très intéressant aux installations d’essai sur le pergélisol sur la route de l’Alaska, où les étudiants et les ingénieurs apprennent des techniques adaptatives. Grâce à notre partenariat avec l'Université de Laval à Montréal, ce cours sur le pergélisol a attiré l’attention de parties intéressées de Russie et de Chine, et des étudiants de ces deux pays suivront probablement le cours en mai 2013.
J’aimerais également souligner les efforts que nous déployons pour lancer la première machine servant à convertir du plastique en carburant en alimentation continue de l’Amérique du Nord à Whitehorse. En collaboration avec Blest Co., au Japon, et grâce aux contributions financières de l’Agence canadienne de développement économique du Nord, nous sommes en train de créer une machine robuste pouvant convertir 10 kilogrammes de plastique en 10 litres de carburant à l’heure. Le carburant sera utilisé pour chauffer des immeubles et les besoins liés aux sites d’enfouissement dans les collectivités du Nord seront réduits.
Le Collège du Yukon est également fier d’être le premier établissement du Nord canadien à obtenir des subventions du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Nous avons réussi à obtenir du financement pour une étude de trois ans sur l’assainissement des mines avec le biochar ainsi que pour une chaire industrielle de cinq ans sur le cycle de vie minier.
Puisque les récoltes sauvages représentent une grande partie de l’alimentation dans le Nord, le Conseil de l’Arctique serait peut-être aussi intéressé de savoir que nous avons soumis une demande au CRSNG par la subvention De l’idée à l’innovation pour les universités et les collèges, afin de travailler conjointement avec l’Université de Toronto et un partenaire de l’industrie pour la création d’un appareil de mesure pour le mercure en suspension dans l’air. Notre objectif est de concevoir ce produit, d’en faire l’essai et de le commercialiser avant que les Nations Unies obligent les pays à surveiller les particules de mercure dans l’air.
Ce ne sont qu’une petite partie des 27 projets, qui représentent 1,8 million de dollars de fonds publics et privés, qu’Innovation en climat froid a réalisés l’an dernier.
Nous avons toujours eu comme objectif de faire participer des partenaires de l’industrie et des étudiants à la maîtrise ou au doctorat à tous nos projets. Ce faisant, nous contribuons à résoudre les problèmes de l’industrie tout en contribuant au maintien de notre économie du savoir.
Encore une fois, j’aimerais dire que l’innovation est un domaine de possibilités inexploité dans les économies du Nord. Le CRY peut être une vitrine de l’expertise canadienne et peut collaborer avec d’autres collectivités circumpolaires pour échanger des outils et des technologies en vue de se préparer aux changements qui s’opèrent dans l’Arctique.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, monsieur Mooney.
Nous entendrons maintenant M. Manicom, qui est sur place. Vous disposez de 10 minutes, monsieur.
Et maintenant, voici quelque chose de complètement différent.
Des voix: Oh, oh!
M. James Manicom: Merci beaucoup de m'avoir invité à comparaître.
L'étude de l'Arctique est un sujet relativement nouveau pour moi, du moins comparativement à certains témoins précédents. Mes antécédents concernent surtout l'étude de la politique territoriale et étrangère de l'Extrême-Orient — la mer de Chine orientale, la mer de Chine méridionale —, la politique étrangère de la Chine et celle du Japon. D'ailleurs, c'est cette dernière qui m'a amené vers l'étude de l'Arctique.
Je travaille au Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale, ou CIGI. Nous avons essentiellement entrepris deux projets sur l'Arctique. Le premier étudie les États de l'Extrême-Orient et leurs intérêts dans l'Arctique et sa gouvernance, surtout en ce qui concerne le Conseil de l'Arctique. L'autre s'appuie sur le renforcement des capacités dans l'Arctique de l'Amérique du Nord, donc dans les corridors de l'Arctique; il s'agit d'un projet supervisé par John Higginbotham, qui faisait autrefois partie du gouvernement.
J'ai récemment voyagé en Asie dans le cadre du premier projet, et je vais donc vous parler de ces enjeux aujourd'hui. Je vais parler des États de l'Extrême-Orient, du Conseil de l'Arctique, et de leurs intérêts, et c'est ce que je veux dire par « quelque chose de complètement différent ». Je vais commencer par leurs intérêts dans l'Arctique, leurs perceptions des enjeux géopolitiques de l'Arctique, leur point de vue sur les participants permanents du Conseil de l'Arctique, et je vais essayer de faire le lien avec leur proposition en vue de devenir observateurs permanents.
À ma connaissance, la Chine, le Japon et la Corée du Sud n'ont pas d'intentions secrètes en ce qui concerne l'Arctique. Leurs intérêts sont cohérents avec ceux des États maritimes, et sont surtout d'ordre commercial. L'économie de ces États est axée sur l'exportation, ce qui explique leur intérêt pour les économies qui peuvent être réalisées grâce au transport dans l'Arctique. La Voie maritime du nord les intéresse particulièrement, non seulement en raison des importations de gaz naturel liquéfié de la Norvège, comme les médias l'ont récemment signalé, mais aussi en raison des exportations vers l'UE et l'amélioration des relations commerciales avec l'Union européenne. De plus, les trois États profitent d'une industrie de la construction de navires très importante et concurrentielle à l'échelle mondiale. Le transport dans l'Arctique les intéresse donc beaucoup, car cela présage une plus grande demande de brise-glaces et une toute nouvelle classe de navires.
Les perspectives d'importation de GNL de l'Europe m'amènent à parler du deuxième domaine d'intérêt des États de l'Extrême-Orient, c'est-à-dire l'énergie et les ressources. Le Japon et la Corée du Sud sont les deux plus importants importateurs de gaz naturel liquéfié au monde. Les importations du Japon continueront d'augmenter de façon spectaculaire, c'est-à-dire aussi longtemps que ses réacteurs nucléaires seront fermés, et il semble qu'ils le seront à moyen terme. La Chine est aussi intéressée par l'exploitation des ressources et des minéraux. Les trois États ont des stratégies en matière de sécurité énergétique similaires qui sont fondées sur des relations étroites entre les sociétés énergétiques d'État, qui peuvent être la propriété de l'État ou non, car elles procurent un accès aux ressources à l'échelle mondiale. De plus, les États ont diversifié le type d'énergie et l'emplacement géographique de leurs importations, c'est-à-dire qu'ils s'approvisionnent du Moyen-Orient à l'Amérique latine, en passant par l'Afrique et l'Arctique. C'est la raison qui explique l'importance de l'Arctique.
Le dernier intérêt commercial concerne les pêches. Ces trois États de l'Extrême-Orient sont des chefs de file mondiaux en pêcherie hauturière, avec l'UE et les États-Unis, et la demande de produits du poisson est très élevée dans ces États. De plus, leur industrie nationale de la pêche affiche une capacité excédentaire considérable, surtout en Chine, et l'ouverture de nouvelles régions de pêche dans l'Arctique les intéresse manifestement.
Dans une perspective non commerciale, leur plus grand intérêt concerne le changement climatique et la recherche scientifique liée à ce phénomène. Ils perçoivent l'Arctique non seulement comme étant un endroit pour étudier les effets du changement climatique et sa progression, mais aussi pour en savoir plus sur la source des phénomènes météorologiques qui se produisent en Extrême-Orient. J'ai parlé à un universitaire chinois qui a établi un lien entre le bas niveau record de glace enregistré dans l'Arctique, en 2007, et l'hiver extrêmement froid qui a suivi dans le Sud de la Chine en 2008.
Lorsqu'il s'agit de recherche scientifique sur l'Arctique, il est important de reconnaître que ces États se considèrent comme étant des États polaires, et non des États arctiques. Ils profitent d'une expertise considérable en recherche sur les questions polaires et sur l'Antarctique. De plus, d'une certaine façon, ils se considèrent plus aptes à effectuer des recherches polaires que les États de l'Arctique. En effet, un scientifique coréen m'a dit que son pays pouvait effectuer des recherches dans l'Arctique qui étaient hors de portée des Canadiens.
La recherche scientifique est perçue comme étant un effort de collaboration. D'ailleurs, ils ont tous signé le Traité de Svalbard. Ils ont tous des stations de recherche à Spitsbergen, et ils ont une expérience considérable dans la recherche sur l'Antarctique. D'ailleurs, 80 p. 100 du budget de recherche polaire de la Chine et de la Corée du Nord est axé sur l'Antarctique, comparativement à 20 p. 100 sur l'Arctique.
En ce qui concerne leur perception des enjeux géopolitiques de l'Arctique, les universitaires de l'Extrême-Orient en matière de politiques arctiques sont bien renseignés lorsqu'ils présentent des rapports à leur gouvernement. Ils ont lu les ouvrages de Scott Borgerson, de Rob Huebert — qui étaient censé être ici — et de Michael Byers. Ils sont tous au courant de la perspective concernant la course aux ressources et à la militarisation de l'Arctique qui a été si populaire pendant trois ou quatre ans. Je pense qu'ils reconnaissent qu'il y a eu beaucoup d'exagération à cet égard. Ils ont lu les documents relatifs à la politique de l'Arctique du gouvernement du Canada et ils les trouvent rassurants. L'incident concernant le drapeau russe en 2007 se démarque, mais ils reconnaissent que les enjeux géopolitiques de l'Arctique sont en grande partie sous le signe de la coopération. Comme un collègue de la Corée du Sud l'a souligné, les enjeux géopolitiques de l'Arctique ne sont rien comparativement à ce qui se passe dans leur région du monde.
J'aimerais aussi souligner que les universitaires de l'Extrême-Orient sont aussi entreprenants que leurs homologues nord-américains — y compris moi-même —, ce qui signifie que les études sont parfois conçues pour attirer l'attention des médias plutôt que dans le but d'informer.
Je soulève la question, car j'aimerais parler de la déclaration faite par l'amiral Yin Zhuo, de la marine chinoise, en 2010. Il a déclaré que l'Arctique appartenait à tous les peuples du monde. Cette remarque a été rapidement reprise par un autre commentateur d'Amérique du Nord, et il a transformé cette remarque en revendication de l'Arctique par la Chine. Malheureusement, cette perception erronée perdure aujourd'hui.
L'amiral Yin a pris sa retraite. Il ne parle pas au nom du gouvernement chinois, pas plus que Lewis MacKenzie parle au nom du gouvernement canadien. Les universitaires chinois auxquels j'ai parlé sont préoccupés par l'effet de cette déclaration sur la façon dont les universitaires nord-américains perçoivent les intérêts de la Chine dans l'Arctique.
Je pense que la déclaration de Zhuo, toutefois, exprime une préoccupation des États de l'Extrême-Orient. Ces États voient l'Arctique comme étant un océan, un océan dont les États utilisateurs ne peuvent pas être exclus par le droit international. Cette préoccupation au sujet de l'exclusion a un effet sur leur interprétation de la gouvernance dans l'Arctique.
Je soupçonne que cela est attribuable à une rupture entre notre perception de « l'Arctique » et ce qu'ils entendent. Lorsque nous disons « l'Arctique », nous parlons souvent des terres et des eaux revendiquées dans le Nord du Canada. Les États de l'Extrême-Orient, quant à eux, entendent « l'océan Arctique ». Ils se concentrent surtout sur les eaux arctiques. Les questions relatives aux terres arctiques, selon eux, sont des questions bilatérales, alors que celles concernant l'océan Arctique sont des questions multilatérales.
Les États de l'Extrême-Orient tiennent à ce que les États qui ne font pas partie de l'Arctique aient leur mot à dire dans la gouvernance de l'Arctique, car en tant qu'États utilisateurs, ils feront partie des gouvernés. Le fait que l'Arctique soit un océan signifie que ces États ont le droit d'utiliser l'espace maritime à des fins de navigation, de recherche militaire et de collecte de renseignements. Dans la région à l'extérieur de la zone économique exclusive, ils ont le droit de pêcher, et dans la région à l'extérieur de la compétence nationale, c'est-à-dire au-delà du plateau continental étendu, ils ont le droit d'effectuer des recherches scientifiques maritimes et l'extraction des ressources.
Enfin, j'aimerais souligner que la Chine et le Japon sont des chefs de file dans l'exploitation minière en mer. La Chine, surtout, cherche à exercer une plus grande influence sur l'Autorité internationale des fonds marins, qui réglemente les activités minières dans la région à l'extérieur de la compétence nationale. Les États de l'Extrême-Orient pourraient être d'avis que les efforts des États arctiques pour réglementer la région à l'extérieur de la compétence nationale vont tout à fait à l'encontre du droit international public de la mer.
Lorsqu'il s'agit de gouvernance, certains universitaires de l'Extrême-Orient croient que le rôle d'observateur permanent au sein du Conseil de l'Arctique pourrait être sans importance. Ils reconnaissent l'impuissance relative de ce rôle, et pensent qu'il sera difficile de convaincre leur gouvernement de proposer ses services de nouveau si leur première offre est rejetée. Les trois États ont une capacité considérable et, à leur avis, leurs représentants n'ont pas l'habitude d'être assis au fond d'une pièce sans avoir voix au chapitre.
Cela ne nous renseigne pas tellement sur ce qui se produirait si leur proposition d'être des observateurs permanents était rejetée au printemps. Un scientifique à qui j'ai parlé croyait fermement que même si son pays ne devenait pas un observateur permanent, il pourrait toujours effectuer des recherches sur l'Arctique et participer aux efforts de collaboration dans ce domaine. Il y a d'autres tribunes pour cela, par exemple, l'International Arctic Science Committee, le Pacific Arctic Group, etc. Il y a d'autres institutions par l'entremise desquelles ils peuvent s'engager dans la recherche scientifique sur l'Arctique.
Par contre, d'autres soulignent qu'ils ont des intérêts légitimes dans l'Arctique — je les ai mentionnés plus tôt — et qu'ils vont continuer à les poursuivre, qu'ils obtiennent un rôle d'observateur permanent au Conseil de l'Arctique ou non. Ils soutiennent qu'il y a d'autres tribunes à leur disposition pour défendre leurs intérêts, y compris l'Organisation maritime internationale, l'Autorité internationale des fonds marins, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, la Commission des limites du plateau continental et même l'ONU.
Enfin, je pense que le concept de participant permanent n'est pas bien compris en Extrême-Orient. On reconnaît de plus en plus, là-bas, que les participants permanents du Conseil de l'Arctique... les groupes autochtones transnationaux participent de façon importante à la gouvernance de l'Arctique. Ceux qui le comprennent le plus sont les universitaires et les scientifiques de l'Extrême-Orient qui ont assisté à des réunions du Conseil de l'Arctique ou des groupes de travail du conseil. Toutefois, je ne pense pas que les États de l'Extrême-Orient ont une idée précise de la façon de traiter avec les participants permanents.
C'est probablement une question d'expérience. En effet, la gouvernance, en Extrême-Orient, est fondée en grande partie sur l'État. Les États voisins veillent à ne pas commenter les affaires internes d'autres États. Mais évidemment, dans le Conseil de l'Arctique, les participants permanents sont assis à la table. Ils représentent souvent les peuples transnationaux, et ils ont une très grande autorité morale.
J'ai dit que les PP ne sont pas bien compris, car au cours de mes discussions avec des représentants de l'Extrême-Orient, on a laissé entendre que très peu de recherches étaient menées pour comprendre leur fonctionnement, leur rôle et la façon dont les États de l'Extrême-Orient pourraient s'engager auprès d'eux. Toutefois, je pense que cela va changer très prochainement.
Que signifie tout cela en ce qui concerne les propositions des États d'être observateurs permanents au sein du Conseil de l'Arctique? À mon avis, on devrait les accueillir à bras ouverts. Sur le plan fonctionnel, ils amènent une capacité, par exemple, des fonds et une expertise dans la recherche polaire. Sur le plan conceptuel, si un organisme veut prendre des règlements au sujet d'une région, il est logique de consulter les États utilisateurs. Étant donné que les États arctiques n'ont pas la capacité nécessaire pour assurer le respect des règlements qu'ils prennent dans la région, un engagement avec les États utilisateurs pourrait être la meilleure façon d'y arriver.
J'ai deux commentaires sur les effets qui s'ensuivront sur la politique étrangère de l'Arctique du Canada. Tout d'abord, je crois qu'il faut prendre une longueur d'avance dans certains dossiers. Je me fais l'écho des déclarations de Michael Byers lorsqu'il a comparu il y a quelques semaines, c'est-à-dire que nous devons prendre une longueur d'avance dans le domaine des pêches, avant que les enjeux surgissent. Cela signifie qu'il faut s'engager avec les pays qui vont pratiquer la pêche, y compris les États de l'Extrême-Orient. D'après ce que je comprends, les pêches non réglementées dans l'Arctique ne différeraient pas des autres pêches dans le monde, c'est-à-dire que le poisson sera pêché à outrance au point de disparaître si l'on ne prend pas les règlements appropriés.
Deuxièmement, je pense qu'il est justifié de faire du Conseil de l'Arctique un organisme inclusif pour les raisons que j'ai indiquées plus tôt. Cela signifie qu'il faut poser des questions difficiles, par exemple, qui ne devrait pas être membre du Conseil de l'Arctique? Par exemple, l'Inde a-t-elle sa place au sein du conseil? Et qu'en est-il des États avec pavillon de complaisance, par exemple, les Îles Marshall ou le Libéria? Le Libéria a-t-il sa place au sein du Conseil de l'Arctique?
L'option d'exclure les États qui ne font pas partie de l'Arctique, mais qui ont des intérêts dans la région, risque d'aliéner ces États qui ont d'autres moyens institutionnels à leur disposition pour leur permettre de poursuivre leurs intérêts. En effet, le Conseil de l'Arctique n'a pas le monopole de la gouvernance de l'Arctique.
Merci de votre temps. J'ai hâte de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Nous allons entamer la première série de questions. Monsieur Dewar et monsieur Bevington, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président. J'aimerais aussi remercier nos témoins.
Je vais commencer par poser une question à M. Manicom, et je donnerai ensuite la parole à mon collègue, M. Bevington.
Vous avez été suffisamment clair. À votre avis, c'est une bonne idée de faire de l'UE et de la Chine des observateurs permanents au sein du Conseil de l'Arctique. Pour le compte rendu, est-ce exact?
Je suis tenté de vous poser quelques questions au sujet des enjeux relatifs à la mer de Chine méridionale, car ils sont très actuels et nous ne les avons pas examinés, mais ce sera peut-être pour une autre fois.
À mon avis, l'un des points qu'il faut ajouter au compte rendu, c'est qu'il faut inclure tout le monde et adopter une approche multilatérale. C'est pourquoi nous pensons qu'il s'agit d'une bonne idée de les inviter en tant qu'observateurs permanents.
L'autre enjeu, c'est qu'il faut mettre les choses en contexte. Récemment, le Canada a été exclu du Sommet de l'Asie de l'Est.
Étant donné que vous êtes un expert dans ce domaine, pourriez-vous expliquer pourquoi, à votre avis, nous devrions nous engager avec la Chine et l'UE en ce qui concerne l'Arctique? Si on se rend compte que nous nous engageons de façon plus multilatérale envers les pays de l'Asie — la Chine doit évidemment jouer un rôle —, cela nous aiderait-il à obtenir une invitation à participer à d'autres discussions, surtout au Sommet de l'Asie de l'Est?
Il s'agit d'une très bonne question.
Je pense que la façon la plus rapide d'obtenir le droit de participer au Sommet de l'Asie de l'Est est de nous engager auprès de ces États, surtout les États de l'ANASE. L'ANASE mène le régionalisme en Extrême-Orient. Pour avoir accès au Sommet de l'Asie de l'Est, il faut s'engager auprès de l'ANASE, et moins auprès de la Chine, du Japon et de la Corée du Sud. En effet, l'ANASE a un droit de veto sur le choix des participants.
Cela dit, très peu d'États de l'ANASE, à l'exception de Singapour, ont défendu leur droit de devenir un État de l'Arctique. Je ne pense pas qu'être conciliant ou accueillant au Conseil de l'Arctique nous aide beaucoup en ce qui concerne le Sommet de l'Asie de l'Est.
Le président de l'ANASE a clairement dit que ce qu'il voulait obtenir de notre part, c'était un engagement plus régional. Quant à savoir s'il est possible d'échanger notre appui au Conseil de l'Arctique contre un appui au sein du SAE, c'est une autre histoire. Peut-être, mais je ne connais pas la réponse. C'est une question qui pourrait valoir la peine d'être explorée, mais nous en sortirions manifestement gagnants, car un rôle d'observateur permanent au sein du Conseil de l'Arctique ne donne pas un droit de parole ou d'action, alors que c'est le cas pour les membres du SAE.
J'aimerais faire un bref commentaire au sujet de la mer de Chine orientale. Il ne sert à rien de comparer la situation de la Chine en ce qui concerne l'Arctique et la mer de Chine orientale. En effet, la Chine a fait une revendication territoriale dans la mer de Chine orientale, ce qui en fait une priorité pour le gouvernement chinois. Le Comité permanent du Bureau politique du Parti communiste chinois ne parle pas de l'Arctique; la Chine ne perçoit donc pas l'Arctique et la mer de Chine orientale de la même façon.
Merci aux témoins. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui et aussi d'avoir utilisé la vidéoconférence, qui est un excellent moyen de communication pour les résidants du Nord.
Monsieur Manicom, j'aimerais connaître votre avis sur l'accroissement de la flotte de brise-glaces de la Chine. Le pays a réussi, l'été dernier, à traverser le pôle Nord en bateau, mais les Chinois planifient aussi d'accroître considérablement leur flotte. Je m'intéresse aussi à la question de la Corée et du Japon et du renforcement de leur capacité en vue d'une utilisation dans l'Arctique.
Je n'ai pas de données sous la main. La plus grande différence entre la flotte de brise-glaces de la Chine et celles de la Corée du Sud et du Japon, c'est que la capacité de construire des brise-glaces en Corée du Sud et au Japon peut être destinée à l'utilisation privée. Lorsque des entreprises veulent construire des navires arctiques pour transporter du GNL dans le Nord, elles vont probablement confier cette tâche à une entreprise sud-coréenne, car la Corée du Sud construit les meilleurs bateaux. Les brise-glaces chinois, par contre, seront probablement utilisés par le gouvernement chinois à des fins de recherche ou ils navigueront sous pavillon chinois, ce qui en fera des navires de transport de biens chinois, de matériaux bruts chinois, qui passent par l'Arctique.
Je pense que la Chine a l'intention d'utiliser la flotte pour améliorer sa capacité en recherche et en transport des biens.
Bon. D'accord.
Nous avons accordé un certain nombre de concessions à diverses grandes sociétés et à des sociétés minuscules, à caractère spéculatif, pour la mise en valeur des ressources dans la région de la mer de Beaufort, la plus prometteuse en ressources pétrolières et gazières. La politique canadienne sur les concessions a ceci d'intéressant qu'elle est muette sur les cessions de concessions. Il suffit au concessionnaire, pour céder sa concession à une autre société, de notifier la cession au ministre.
D'après vous, faudrait-il réviser cette politique? Les pays en question seront-ils très intéressés à acquérir des concessions dans nos eaux arctiques?
Un universitaire chinois, spécialiste de l'Arctique, m'a dit que les petites sociétés minières chinoises, qui appartiennent à des intérêts privés, pas à l'État, étaient très intéressées à exploiter les ressources de l'Arctique.
Oui. Il n'a pas précisé s'il s'agissait de ressources sous-marines, mais nous discutions des stratèges de la politique de l'Arctique en Chine, de l'existence, en fait, d'une telle politique, dont je doute. Je voulais en savoir davantage sur les grandes sociétés d'État. Il m'a dit que ça les intéressait, mais que ça intéressait plus les petites minières chinoises, qui ressentent le même attrait que les petites sociétés pétrolières occidentales. Elles ont besoin de s'assurer des réserves. Il faut qu'elles soient un peu plus disposées à prendre des risques. Je ne serais pas étonné que ces concessions les intéressent.
Voici une autre question. Si, pour le Conseil de l'Arctique, le Canada envisage de se concentrer sur les questions nationales — c'est également très intéressant et, pour les habitants du Nord, c'est fascinant — est-ce que cela signifie que le Conseil serait moins pressé de s'occuper des questions comme la navigation, la pêche, la prévention de la pollution, qui, en réalité, ont toutes une portée internationale?
C'est une question capitale, actuellement, parce que notre présidence se trouve devant deux orientations possibles.
La question est intéressante. Je supposerais que la présidence du Conseil de l'Arctique, si elle était canadienne, s'attacherait aux dossiers du Conseil, les aspects internationaux de l'Arctique, et que notre politique intérieure se concentrerait sur les aspects strictement canadiens.
Merci, monsieur le président, et merci, messieurs, d'être ici et de nous éclairer de vos lumières.
Merci beaucoup, monsieur Mooney, de vous être levé de si bon matin.
Je pense que vous avez dit que vous avez passé la plus grande partie de votre vie dans le Nord. Vous y êtes retourné et vous appliquez vos compétences aux problèmes technologiques du Nord, ce qui, je pense, est très intéressant. Comme vous le savez sûrement, parce que vous en êtes un, les habitants du Nord ont beaucoup contribué à l'économie canadienne et à l'économie de cette région. Vous savez probablement aussi que la ministre Aglukkaq, qui présidera le Conseil de l'Arctique pour le Canada, a passé énormément de temps, ces derniers mois, à rencontrer les groupes communautaires du Nord pour s'assurer qu'on écoutera ces communautés et que ce sont leurs problèmes, leurs sujets de préoccupation et leurs réflexions qui sont communiqués au Conseil de l'Arctique et qui sont intégrés dans sa politique pour l'Arctique canadien.
Pouvez-vous nous dire à quel point, d'après vous, les opinions des habitants du Nord sur la politique canadienne de l'Arctique sont importantes?
Pour commencer, les habitants du Nord constituent une race distincte. Je pense que nous sommes un peu plus robustes. Le changement climatique nous a touchés et nous y avons contribué. Cela nous déconcerte, mais nous devons nous adapter.
La politique qu'adoptera le Conseil de l'Arctique touche les habitants du Nord. Nous le savons. Pour les communautés du Nord — et je parlerai d'elles dans leur ensemble, mais, régionalement, elles ont toutes des intérêts différents —, la principale source d'inquiétude est, je crois, le changement climatique, qui touche le Nord, et la façon de s'y adapter.
Je crois que nous allons nous adapter, mais les conséquences...
Merci beaucoup.
Comme vous le savez probablement, dans son discours du Trône de 2011, le premier ministre a déclaré que le Nord canadien était une pierre angulaire du programme du gouvernement. Dans la foulée, on a créé l'Agence canadienne de développement économique du Nord et on a affecté 40 millions de dollars à la recherche scientifique pendant quatre ans.
Je me demande si vous pouvez nous donner votre opinion au sujet de ce budget de la recherche scientifique et ce à quoi il peut servir.
J'ai reçu des fonds de l'agence, tout comme le Centre de recherche du Yukon.
Je pense que c'est nécessaire. Le Nord représente l'avenir du Canada, et l'argent en question est allé à des projets très intéressants, formidables, qui n'ont pas seulement aidé le Nord canadien, mais, aussi, les pays circumpolaires.
En ce qui concerne la répartition des fonds, je remercie l'agence d'avoir un bureau régional à Whitehorse, pour que nous puissions traiter directement avec elle. Ces fonds ont été bien utilisés, et j'aimerais qu'il y en ait davantage pour le Nord, parce que les habitants du Nord savent ce que la vie ici exige. Nous sommes inventifs et nous pouvons mettre au point des techniques et appliquer des idées et des solutions innovantes que nous pourrons exploiter ensuite à l'échelle du globe. L'argent de l'agence a aidé à ces efforts.
Si on vous confiait la conception d'une étude de recherche scientifique pour le Nord, quels seraient les éléments de cette recherche auxquels vous tiendriez le plus?
Tout ce que j'ai lu dans les bleus concernant les témoins qui ont comparu est, je crois, très important. Il m'est impossible de choisir entre l'exploration pétrolière et gazière, les énergies alternatives, qui sont des sujets très importants.
Mais, d'après moi, voici où l'innovation et l'économie du savoir... Je pense que Mme Karen Barnes en parlera dans les quelques prochaines heures — de l'éducation dans le Nord et de l'économie du savoir. Le maintien de ce savoir dans le Nord sera la recette de la réussite de cette région. Les cerveaux créatifs pondent des idées originales et font rouler l'économie. Sans matière grise, c'est impossible. Les ressources vont et viennent, mais ces...
Pour investir, je conseillerais le capital humain. Investissez dans le Nord et dans le capital humain, vous réussirez.
Bon, d'accord. Vous nous avez certainement exposé, dans vos observations antérieures, des projets intéressants de recherche scientifique, actuellement en cours, et des innovations intéressantes qui en ont découlé.
Comme vous le savez, notre gouvernement a essayé d'encourager l'exploration et la mise en valeur du Nord, en améliorant les régimes réglementaires et en investissant dans les infrastructures indispensables pour attirer les investisseurs et les développeurs dans le Nord. Pouvez-vous décrire le climat économique qui règne actuellement dans votre région ainsi que dans le Haut-Arctique.
Au Yukon, je pense que nous avons été très chanceux, ces dernières années. Ailleurs, dans le monde, l'économie a beau ralentir, le Yukon a résisté à cette tendance et il connaît une croissance constante. Nous sommes gâtés.
Les paiements de transfert d'Ottawa qui nous permettent de continuer jouent très bien leur rôle. Je pense que nous en avons bien profité. Notre régime minier, notre programme d'attribution de permis pour l'environnement sont très accueillants pour les entreprises minières. Un mécanisme formidable permet aux sociétés pétrolières et gazières d'informer le gouvernement et les communautés sur les méthodes qu'elles comptent utiliser pour extraire les ressources. Ce mécanisme de la Direction de l'évaluation socioéconomique est très efficace.
Je peux seulement parler pour le Yukon et de ce dont j'ai été témoin ainsi que de mon travail avec l'industrie minière pour l'aider à résoudre ses problèmes... Vous savez peut-être que l'année dernière a été une année faste pour l'exploration au Yukon. Cette année, ç'a légèrement baissé, mais cinq ou six projets miniers sont dans les cartons. Et ça ne s'arrêtera pas. Le Yukon possède des gisements de minerais parmi les plus riches du monde, qui seront exploités. Je pense que nous sommes en mesure, grâce à l'innovation, d'essayer de réduire cette empreinte.
J'aimerais débuter par une citation: J'aimerais fermer la mine avant qu'elle ne soit mise en exploitation. Je veux dire, par là, travailler avec la société minière pour trouver une manière d'en terminer l'exploitation avant de commencer à creuser.
Merci, monsieur le président.
Je remercie aussi nos invités.
Je commencerai par vous, James. Vous avez tenu des propos très intéressants. En ce qui concerne vos déclarations sur l'importance, pour nous, de présider le Conseil de l'Arctique, beaucoup de nos témoins l'ont soulignée. Beaucoup de nos témoins, jusqu'ici, recommandent que nous ne nous en servions pas comme d'une tribune pour faire notre propre promotion et que, au lieu de diviser, nous unissions les autres pays. Vous avez également recommandé l'esprit d'inclusion, ce qui est très important, pour que nous puissions jouer un rôle rassembleur.
Cela dit, si la Chine vient se mêler un peu plus au groupe, elle sera l'un des pires pollueurs, particulièrement à cause des centrales au charbon. Beaucoup de particules de poussière montent vers le Nord. Elles auront même plus de répercussions dans cette région. Cela ne l'amènera pas seulement à constater les possibilités qu'offre la participation au Conseil de l'Arctique, mais je pense que nous allons devoir l'encourager à prendre conscience de sa responsabilité.
Ma première question concerne les nouveaux protocoles. Il y en a de nombreux en vigueur, comme la limite de 200 milles pour la pêche. Des lois internationales sont également en vigueur, comme, je pense, les lois maritimes. Prévoyez-vous que le Canada pourrait prendre l'initiative, au cours des quelques prochaines années, pour mettre sur pied de nouveaux protocoles concernant particulièrement le transport dans l'Arctique et la pêche? Le voyez-vous prendre l'initiative pour préconiser de nouveaux protocoles dans ces domaines?
C'est une excellente question.
Je pense que, visiblement, la présidence du Conseil de l'Arctique offre cette possibilité. Si on tient compte de son fonctionnement et de celui des lois internationales et des autres institutions que j'ai mentionnées — l'Organisation maritime internationale, notamment — nous sommes à peu près impuissants, si nous sommes laissés à nous-mêmes. Si nous voulons établir de nouveaux protocoles, il faudra le faire en consultation avec les pays assujettis.
Des Chinois m'ont simplement déclaré que la Chine ne suivra pas les règles à la rédaction desquelles on ne l'a pas invitée à participer. C'est en partie le rôle d'un général... Le gouvernement chinois ne considère pas avoir contribué à l'érection du système international actuel, n'est-ce pas? Il s'est intégré au reste du monde au cours des 30 dernières années. Il apprend les règles. Il les respecte, pour la plupart. Il en change quelques-unes. Il connaît les rédacteurs des règles. Il veut contribuer à leur élaboration.
Je conçois que la Chine a des responsabilités auxquelles elle doit être davantage sensibilisée, notamment en ce qui concerne la pollution, mais si nous essayons de la mettre devant un fait accompli, elle n'en tiendra tout simplement pas compte. L'échelle des réalisations que je soupçonne qu'elle envisage, pour cette région, est telle que si elle fait comme si les règles n'existaient pas, elles ne vaudront pas le papier sur lequel elles seront imprimées, si, effectivement, on les imprime.
J'ai une autre question. Je pense que vous avez fait allusion à la Corée et au Japon comme étant plus intéressés par l'Antarctique. De quoi s'agit-il?
Ce continent les intéresse tous davantage. Je suppose que leur recherche scientifique dans cette région s'étend sur une plus longue période que dans l'Arctique. Ils ont tous signé le Traité du Svalbard, dans les années 1920 et 1930. La Chine s'appelait alors la République de Chine, et ç'a été l'un des traités que la République populaire de Chine a conservés, au départ de la République de Chine pour Taiwan.
Tous ont des intérêts différents. La Corée est l'un des chefs de file de la recherche sur les météorites, et 85 p. 100 des météorites tombent dans l'Antarctique. Le Japon et la Chine sont présents aussi, mais, encore une fois, dans la recherche polaire. N'étant pas physicien, je ne peux rien dire de plus sur la nature de cette recherche, mais les chiffres montrent bien que c'est là qu'ils ont investi.
Je pense qu'ils prétendront que l'expérience leur a donné des compétences et des capacités, notamment — en matière de brise-glaces, l'exemple le plus facile — pour certaines réalisations dans l'Arctique. Le Japon est particulièrement catégorique. Il prétend avoir été le premier pays d'Extrême-Orient présent dans l'Antarctique et dans l'Arctique. Il s'est dit particulièrement blessé par le fait qu'on ne l'a pas distingué des autres pays. Il a dit qu'il méritait mieux.
On y lit que, en 1421, la Chine a envoyé une expédition qui a fait le tour des Amériques, jusque dans l'Arctique.
Ma prochaine question s'adresse à M. Mooney, au Yukon.
Le Yukon possède-t-il beaucoup de ressources?
L'Alberta, les provinces des Prairies et beaucoup d'autres régions de l'Arctique passent souvent pour être énormément riches en ressources. Quelles grandes ressources offrent des possibilités au Yukon? Je sais qu'il y a de l'or, mais où est le...
Ç'a débuté avec la ruée vers l'or, en 1898. Les placers du Yukon ont produit 40 millions de dollars d'or par année.
Les principales ressources sont minérales. À l'ouest de Dawson, on a découvert un nouveau district aurifère. C'est de l'exploitation minière en roche dure, et non dans le quartz. La rivière Snake possède l'un des gisements de fer les plus importants du monde. Immédiatement au sud, on trouve un important dépôt de charbon. En ce qui concerne le tungstène, le palladium qui appartient au groupe du platine, le Yukon possède quelques... Une mine de cuivre est en exploitation. Nous en avons une aussi de plomb et de zinc. Une nouvelle mine de cuivre sera bientôt exploitée avec, aussi, un gisement d'or se prêtant à la lixiviation en tas.
Merci.
Je suis maraîcher de l'île du Cap-Breton. La culture maraîchère n'est pas facile là-bas. Vous avez parlé de culture par chez vous et je pense que, à la faveur du changement climatique... quelles sont les cultures que l'on pratique là-bas et comment allez-vous les faire pousser?
Je sais que vos étés sont chauds, mais...
Exactement.
Pendant la ruée vers l'or, au début du siècle, on a nourri les 40 000 habitants de Dawson grâce aux gros choux et d'autres légumes qui poussaient dans les champs locaux.
Notre recherche se concentre sur la serriculture. Nous avons construit une serre utilisable toute l'année, qui est hors réseau. Quand les gens du Sud pensent à l'agriculture... Nous n'avons absolument pas de terres arables comme en Saskatchewan, en Alberta et dans les Prairies.
Mais nous avons des jours sans gel. À Dawson, un exploitant de placer pouvait s'estimer heureux s'il pouvait profiter de 100 jours sans gel. Maintenant, nous en avons 120, 130. Le changement climatique nous touche donc. Nos intersaisons s'allongent. Nous croyons que, désormais, à l'époque moderne, ce n'est pas la chasse du caribou et de l'orignal ni la cueillette des petits fruits qui assureront notre sécurité alimentaire, mais nos technologies de serriculture, qui nous permettront de prolonger les intersaisons.
Merci beaucoup, monsieur Mooney.
Nous commençons notre deuxième série de questions, pendant laquelle chaque intervenant aura droit à cinq minutes. Je pense que nous avons le temps pour la participation de deux membres du comité.
Commençons par M. Van Kesteren, puis nous passerons à Mme Grewal.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être avec nous ce matin.
J'ai une question pour M. Manicom.
Vous avez dit que la Chine s'intéresse à la pêche dans l'Arctique. Je pense que bon nombre d'entre nous, et que même la plupart d'entre nous en sommes inquiets. Tous les océans sont fragiles, mais j'imagine que le stock de poissons des eaux arctiques doit être particulièrement difficile à renouveler.
La Chine en est-elle consciente? Les Chinois et les Coréens comprennent-ils l'équilibre écologie de nos eaux arctiques, puisque la glace pourrait commencer à se briser et à réellement ouvrir la voie à la pêche commerciale dans le Nord? Déploie-t-on de gros efforts sur la scène internationale pour fixer des règles et donner des directives dans l'hypothèse où la pêche se développait?
C'est une bonne question. Je ne pourrais qu'avancer des hypothèses sur leurs connaissances de l'écologie arctique, mais je sais qu'ils sont au courant des recherches sur l'Arctique. S'il existe une collaboration scientifique, je suis persuadé qu'ils y participent.
Que je sache, peu d'efforts sont toutefois déployés à l'échelle internationale. Certains pensent que la création d'un organisme régional de gestion des pêches et l'instauration d'un moratoire est la recette magique. Je sais que les opinions divergent aux États-Unis quant aux moratoires.
Ce sont les États côtiers qui devront proposer des mesures afin de limiter la pêche dans l'Arctique. Pour ce faire, il faut invoquer l'Accord sur les stocks de poissons chevauchants et essayer d'étendre la compétence des États côtiers plus loin en mer, au-delà de la zone économique exclusive. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait au large de Terre-Neuve, entre autres.
Nous sommes signataires de quatre ou cinq accords différents, je crois. Plusieurs organismes régionaux de gestion des pêches dont nous faisons partie comptent aussi pour membres le Japon, la Corée du Sud et la Chine, bien souvent. Le dialogue avec ces pays est donc déjà ouvert, du moins en matière de gestion des pêches.
C'est assurément par là qu'il faut commencer.
Vous avez aussi parlé de navigation commerciale. Dans quelle mesure peut-on réalistement s'attendre à un accroissement de ces activités au cours des 10 prochaines années, disons? Quelles en seront les répercussions sur les collectivités nordiques? Ce genre de développement pourrait-il offrir de véritables avantages économiques?
Je pense que les avantages dont bénéficieront les collectivités nordiques dépendront de la présence d'un port pour accueillir les navires, sans quoi ceux-ci passeront tout droit. Les collectivités nordiques pourront naturellement servir au déchargement des navires et à bien d'autres choses. La pollution par les navires ne se limite pas au gaz d'échappement. Des organismes comme les bernaches, entre autres, s'attachent à leur coque. Mais il existe des règles en vertu de la Convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires et de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer. Une multitude de conventions internationales réglementent l'état des navires et les émissions permises. Le problème, c'est de déterminer la rigueur avec laquelle nous pouvons appliquer ces règles et de savoir si elles seront respectées par le pays d'origine des navires.
En terminant, vous avez dit que la Chine et la Corée, si je ne m'abuse, accordent 20 p. 100 de leur budget à l'Arctique, et 80 p. 100 à l'Antarctique. Pourquoi s'intéressent-ils autant au pôle Sud?
Les Chinois s'intéressent aux ressources, contrairement à tous les autres pays qui sont présents en Antarctique. C'est ce que je crois savoir, mais je suis loin d'être un spécialiste de la région. Si j'ai bien compris, la plupart des pays qui se trouvent en Antarctique s'attardent plutôt au gel des revendications territoriales et aux sciences polaires. Les Chinois sont les seuls à s'intéresser à l'exploration des ressources et à l'extraction minière, ce qui soulève des questions: jusqu'où peuvent-ils aller sans contrevenir aux instruments juridiques en place?
La Corée s'intéresse surtout aux météorites, mais aussi à la climatologie en général et aux leçons qu'elle peut en tirer. En fait, le changement climatique affecte bel et bien ces pays. Nous n'y pensons pas toujours, mais c'est vrai. Le gouvernement chinois est bien conscient que le désert de Gobi avance chaque année de quelques pieds en direction de Pékin. Moins de 100 kilomètres le séparent désormais de la capitale.
Le gouvernement chinois sait bien que le changement climatique est réel et qu'il pose problème. S'il est réticent à signer des ententes internationales contraignantes concernant les émissions, c'est parce qu'il ne croit pas que les autres pays les respecteront. Mais il est attentif au problème. En revanche, la Chine n'arrive pas même à appliquer une bonne partie de ses lois en raison d'un clivage entre les centres et les régions périphériques vieux comme le pays lui-même. C'était d'ailleurs ainsi bien avant que le pays ne devienne une république populaire. Quoi qu'il en soit, le changement climatique inquiète le gouvernement chinois, tout comme le Japon et la Corée du Sud, ce qui explique en grande partie leurs recherches polaires.
Merci, monsieur le président.
Puisque j'ai moi-même habité dans le Nord toute ma vie et connu le coût de la vie élevé et les problèmes énergétiques, monsieur Mooney, je trouve que votre travail est extrêmement important, et je vous en félicite.
Le réseau ArcticNet tient une très grande réunion cette semaine. Y participez-vous directement? Je vous invite à nous expliquer le rôle du réseau à l'échelle internationale.
Sans problème. Le Centre de recherche du Yukon compte parmi les exposants de la réunion. J'ai parlé du Northern Climate ExChange. En fait, notre équipe est là-bas parce que nous avons collaboré avec des pays appartenant au réseau ArcticNet. Ce qui est intéressant dans ce réseau, c'est qu'il se penche plus sur la science fondamentale que sur la recherche appliquée. J'ai codirigé un projet de radar à deux fréquences servant à mesurer l'épaisseur de la glace qui est utilisé pour l'exploration de la calotte glacière et la recherche; il est présenté à l'exposition. Le réseau ArcticNet est digne d'intérêt en raison de son rayonnement international et de la place privilégiée qu'il réserve aux sciences.
Au Canada, je dirais que le réseau ArcticNet s'est principalement attardé à l'Arctique de l'Est. Le Centre de recherche du Yukon y a joué un certain rôle, surtout dans le cadre du programme ReSDA. Je pense que c'est lié au Conseil de l'Arctique puisque les chercheurs s'y trouvent. Lorsque ce genre de partenariat se forme au sein du réseau ArcticNet, l'information peut être transposée; ainsi, les connaissances serviront peut-être à l'élaboration de politiques au sein du Conseil de l'Arctique. C'est donc fondamental. Je n'y participe pas beaucoup, car je préfère construire des choses, réaliser des projets et aider l'industrie, mais j'estime qu'il s'agit d'un outil de recherche et de communication essentiel. Il y a actuellement un exposé sur l'échange d'information.
En matière de développement durable, croyez-vous qu'il faut s'inspirer d'un organisme comme le réseau ArcticNet quant à la façon de réunir des intervenants à l'échelle internationale qui font des recherches sur les véritables enjeux? Je suis de votre côté. Qu'est-ce qui vous convient, à long terme?
Il s'agit justement du genre de partenariat dont vous parlez. Le réseau ArcticNet réunit des chercheurs de partout dans le monde. C'est un excellent forum, selon moi, mais n'oublions pas que nous n'avons aucun mal à communiquer avec le monde sans ce réseau, et que nous arrivons quand même à former nos propres partenariats. Il s'agit d'une plateforme de plus, mais je pense que lorsque des chercheurs talentueux et des gens brillants se réunissent, ils peuvent mener à bien des projets astucieux. La communication et la technologie permettent d'ailleurs de renforcer ces partenariats.
J'aimerais aborder un autre sujet d'intérêt international, cette fois-ci lié à l'éducation; il s'agit de l'Université de l'Arctique, bien entendu. Je suis persuadé que vous la connaissez bien. Ces dernières années, le gouvernement du Canada a réduit le financement qu'il accordait à cette université circumpolaire en ligne. Elle occupe encore une place importante au sein des autres pays. Croyez-vous que nous devrions y contribuer davantage et la rendre plus accessible aux étudiants de l'ensemble de nos collectivités nordiques?
Le Collège du Yukon compte 13 campus sur son territoire; les Territoires du Nord-Ouest ont 23 centres d'apprentissage et 3 campus, et la situation est semblable au Nunavut. Mais ces établissements ne seront jamais centralisés. C'est pourquoi nous avons besoin d'une connexion virtuelle comme celle que nous utilisons aujourd'hui pour vous parler.
Oui, j'en conviens. Je pense que Mme Karen Barnes vous parlera de l'Université de l'Arctique tout à l'heure; vous pourrez donc lui adresser vos questions à ce sujet. Quoi qu'il en soit, je peux vous dire que le Collège du Yukon joue un rôle auprès de cette université. Un de nos chargés d'enseignement s'occupe des cours en ligne. À mon avis, innover et unir les habitants du Nord est toujours une excellente idée.
Les Yukonnais sont gâtés. Comme je l'ai dit, 97 p. 100 d'entre eux ont accès à un réseau Internet à haute vitesse, une proportion qui dépasse tout autre territoire ou province au Canada. J'aimerais que la bande passante du Nord soit élargie pour que les collectivités nordiques puissent davantage avoir recours à l'apprentissage à distance par vidéo, par exemple. Je pense que c'est prévu, mais il serait bien de nous aider à débloquer cette enveloppe budgétaire. À ce chapitre, vous pourriez demander l'aide du Réseau canadien pour l'avancement de la recherche, de l'industrie et de l'enseignement, ou encore de l'Agence canadienne de développement économique du Nord.
Je vous remercie infiniment d'être venu, monsieur Manicom. Monsieur Mooney, merci de vous être levé aussi tôt pour nous parler aujourd'hui.
Je vais maintenant suspendre la séance une minute pendant que nous nous préparons à accueillir les prochains témoins.
Je souhaite la bienvenue à Mme Karen Barnes, présidente du Collège du Yukon. Madame Barnes, je vous remercie de vous être levée à une heure aussi matinale à Whitehorse afin de discuter avec nous.
Je vais vous laisser présenter votre déclaration liminaire, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
Merci encore, madame Bardes. La parole est à vous, car nous avons hâte d'entendre votre exposé.
Merci, monsieur le président.
Bonjour tout le monde. Je vous remercie infiniment de m'avoir invitée à vous parler aujourd'hui. Je félicite le comité de donner la parole aux habitants du Nord dans le cadre de son étude sur la politique étrangère du Canada pour l'Arctique.
Permettez-moi de commencer par vous présenter un panorama de la situation. Je suis la présidente du Collège du Yukon, qui est situé à Whitehorse, mais qui vise l'ensemble du territoire grâce à ses 11 campus ruraux. En plus de son centre de recherche dynamique, dont Stephen Mooney vient de vous parler, le collège offre plus de 40 programmes de formation professionnelle dans les métiers spécialisés et en technologie, en santé, en éducation, en services sociaux, en entreprenariat, en tourisme, en tourisme d'accueil, et ainsi de suite. Nous offrons aussi trois baccalauréats et trois maîtrises en partenariat avec des universités du Canada et de l'Alaska. Au total, environ 1 200 étudiants sont inscrits à temps plein à nos programmes, et 6 800 suivent des formations axées sur le milieu de travail et des cours d'éducation permanente. Nous abritons aussi le Centre for Northern Innovation in Mining et l’Institut nordique de la justice sociale. Nous sommes également en train de construire un institut sur la gouvernance des Premières Nations du Nord, dont je parlerai dans un instant.
J'ai quitté l'Alberta pour m'installer au Yukon en 2008. Je tiens à souligner que même si j'ai grandi à Edmonton, une ville prétendument nordique, je ne connaissais rien au Nord avant d'y vivre. Bien que j'aie passé peu de temps dans la région, je protège jalousement le territoire et les habitants du Nord canadien. Je crois que les établissements comme le Collège du Yukon jouent un rôle essentiel dans la diffusion de ce point de vue.
La ministre Aglukkaq dit vouloir profiter de la présidence du Canada au Conseil de l'Arctique pour mettre l'accent sur le fait que la mise en valeur du Nord passe par celle de ses habitants. C'est d'ailleurs ce dont je veux parler aujourd'hui: comment peut-on acquérir cette capacité? Je vais m'attarder sur quatre volets de la discussion sur les enjeux circumpolaires qui interpellent les habitants du Nord, à savoir l'éducation et la formation, la mobilité de la main-d'oeuvre, la gouvernance et la recherche.
Je vais commencer par l'éducation et la formation, puisque c'est là que tout commence et prend fin, selon moi. Le slogan « start here. go anywhere. » du Collège du Yukon signifie que ce qui commence là peut mener n'importe où. En fait, nous croyons que les étudiants qui reçoivent une éducation solide pourront devenir des citoyens actifs en mesure d'apporter une contribution à la société.
Bien des habitants du Nord trouvent essentiel que le collège dispense la formation là où ils résident. Il ne manque pas d'exemples d'étudiants qui ont commencé un programme au collège, puis qui ont poursuivi leurs études dans un établissement universitaire du sud du pays. Puisque la plupart ne reviennent pas, le Nord ne bénéficie pas de leur éducation. Mais c'est différent lorsque nous offrons l'ensemble du programme dans le Nord.
Cette année, nous allons diplômer nos tout premiers bacheliers ès sciences en collaboration avec l'Université de l'Alberta. Ceux-ci ont déjà trouvé du travail dans le Nord; ils y deviendront des chercheurs ou des scientifiques, qui participeront aux recherches et résoudront une multitude de problèmes et d'enjeux concernant le Nord. Depuis des années, les trois collèges territoriaux forment des infirmières, des enseignants et des travailleurs sociaux qui demeurent eux aussi dans le Nord et qui contribuent à sa mise en valeur.
Vous venez d'entendre parler du Centre de recherche du Yukon. Puisqu'il n'en est qu'à ses débuts, la plupart des étudiants diplômés et des chercheurs qu'il compte ont grandi et ont été formés dans le sud. Mais grâce au baccalauréat ès sciences et aux autres programmes offerts au Yukon, nous verrons bientôt des jeunes Yukonnais provenant de collectivités nordiques réaliser des recherches et trouver dans le Nord des réponses aux problèmes du Nord. C'est ainsi dans tous les autres pays nordiques; le Canada doit donc lui aussi offrir cette occasion aux jeunes.
Notre nouveau programme en technologie minérale constitue un autre exemple. Grâce à CanNor, qui a financé son élaboration et le projet pilote, ce nouveau programme très exigeant formera des technologues en géologie pour les secteurs minier, pétrolier et gazier. La Commission géologique du Canada s'intéresse déjà aux diplômés, de même que toutes les sociétés d'exploration qui évoluent actuellement au Yukon, puisqu'il s'agira d'habitants du Nord formés dans le Nord.
Le Collège du Yukon est l'un des membres fondateurs de l'Université de l'Arctique et continue d'offrir des cours en ligne dans le cadre du baccalauréat en études circumpolaires. Depuis 2004, 290 étudiants du Collège du Yukon les ont suivis, sur un total de 566 étudiants dans l'ensemble de la zone circumpolaire. Puisque 97 p. 100 des habitants du Yukon ont accès à un réseau Internet à haute vitesse, tous les Yukonnais peuvent s'inscrire à ces cours. Par ailleurs, le programme North2North qui vient de prendre fin permettait aux étudiants du Nord canadien de vivre une expérience d'étude dans un autre pays nordique. Ainsi, neuf étudiants du Collège du Yukon ont étudié en Finlande, en Suède et en Russie, dont une Yukonnaise pure laine qui a terminé chez nous sa maîtrise en administration publique de l'Université de l'Alaska, et qui est aujourd'hui analyste principale en matière de politiques au ministère du Développement économique du gouvernement du Yukon.
Voilà comment nous pouvons contribuer à la croissance du savoir dans le Nord et à la formation des candidats hautement qualifiés dont nous avons désespérément besoin pour éclairer le débat.
L’accès des habitants du Nord à une éducation supérieure de qualité constitue donc un enjeu circumpolaire.
La mobilité et le perfectionnement de la main-d’œuvre traduisent une véritable préoccupation de tous les habitants du Nord. Lors de l’exploitation des ressources, il est de plus en plus difficile d’attirer et de fidéliser les travailleurs hautement qualifiés qui sont nécessaires dans les domaines des sciences de la Terre touchant la prospection, de la surveillance environnementale et des mesures correctives, et du développement de sites miniers. Échanger les connaissances spécialisées et les programmes d’enseignement de l’ensemble des régions du nord circumpolaire offrira un avantage considérable et générera des économies de coûts.
Le Centre for Northern Innovation in Mining du Collège Yukon vient de signer une entente avec l’Université de l’Alaska qui nous permet dès maintenant d'échanger des professeurs, des programmes d’enseignement et des étudiants. Si tout va bien, la mobilité permettra un jour à la main-d’œuvre de l’Université d’Alaska Southeast de venir en aide au secteur minier. Notre programme de technicien-spécialiste en ressources minérales devrait bientôt s’harmoniser parfaitement au programme d’ingénierie des mines de l’Université d’Alaska Fairbanks. Nous formerons ainsi une nouvelle main-d’oeuvre spécialisée, prête et disposée à travailler dans l’environnement difficile et unique au nord du 60e parallèle, et capable de relever le défi. Grâce à l'Institut nordique de la justice sociale, nous collaborons étroitement avec l’Université de l’Alaska Fairbanks à l’élaboration de programmes visant à former des spécialistes en justice pénale et en services correctionnels pour les collectivités rurales ou éloignées. Le Collège du Yukon a également participé aux discussions de la Pacific NorthWest Economic Region au cours de la dernière année, qui nous ont permis de découvrir de nouvelles possibilités de partenariat avec des homologues américains en Alaska.
La mobilité des travailleurs hautement qualifiés dans l’ensemble des régions du Nord constitue donc un autre enjeu circumpolaire.
La gouvernance est essentielle partout dans le Nord. Grâce à ses 11 revendications territoriales résolues, le Yukon fait figure de proue dans la négociation et la mise en oeuvre des traités modernes. Le Collège du Yukon travaille d’arrache-pied afin d’intégrer à ses programmes le savoir et le savoir-faire des Premières Nations et des négociateurs gouvernementaux. Nous sommes en train d’élaborer un programme de formation sur la gouvernance des Premières Nations en collaboration avec l’Université de la Saskatchewan. Déjà, deux cohortes d’étudiants qui travaillent au gouvernement de leur Première Nation respective ont terminé la première année. Le savoir que ces étudiants pourront transmettre aux groupes autochtones de toutes les régions nordiques est précieux et arrive à point nommé puisqu'il est question d’enjeux comme la protection de l’environnement, l’exploitation des ressources, la sécurité alimentaire et, surtout, la façon de nouer une relation satisfaisante et fructueuse avec d’autres gouvernements à l’échelle locale, nationale et internationale dans le but d’atteindre les objectifs de développement. Nous venons tout juste de commencer la construction d’un institut sur la gouvernance des Premières Nations du Nord pour accueillir ce savoir-faire.
La mise en oeuvre des traités territoriaux constitue donc un enjeu circumpolaire.
Mon quatrième point porte sur la recherche, dont mon collègue Stephen Mooney vous a parlé. Je ne vais rien ajouter, sauf que j’espère qu'il vous a convaincu que le Nord canadien est prêt à se joindre au reste du monde circumpolaire en ce qui concerne la recherche avant-gardiste visant à trouver des solutions aux problèmes uniques du Nord. Nous avons beaucoup à offrir, et les trois collèges nordiques sont l’endroit par excellence pour acquérir ce savoir-faire.
Par ailleurs, le Canada peut s’inspirer de collectivités nordiques d’autres pays qui ont créé des entreprises durables et des occasions d’affaires permettant aux habitants du Nord de rester dans leur milieu tout en adoptant un mode de vie sain et en occupant un emploi valable. Ce sont bien souvent les collèges et les universités qui appuient ces collectivités, car elles peuvent former les résidents en plus d’attirer des spécialistes d’ailleurs qui sont bourrés d’idées novatrices. Grâce à son vaste réseau d’établissements postsecondaires dans toutes les régions nordiques, le Collège du Yukon peut trouver ce savoir-faire et le diffuser dans le Nord.
Le Conseil de l’Arctique devrait donc s’attarder aux enjeux circumpolaires que sont l’accès à une éducation supérieure de qualité et la mobilité des travailleurs hautement qualifiés, la mise en oeuvre des traités territoriaux et le développement durable des collectivités nordiques.
Merci, monsieur le président. Je vais m’arrêter ici. J’ai hâte d’entendre vos questions et vos commentaires.
Merci.
Merci beaucoup d’être avec nous aujourd’hui.
Il va sans dire que les témoignages d’habitants du Nord revêtent une importance primordiale à nos yeux. M. Bevington, mon collègue, ne cesse de rappeler au caucus que nous devons nécessairement discuter avec les habitants du Nord si nous désirons parler de cette région. C’est pourquoi votre témoignage est si précieux.
J’aimerais aussi préciser qu’il faut être présent pour concevoir des solutions sur mesure pour le Nord. Votre collègue a déjà dit à quel point il est important d’investir en éducation. Vous avez fait référence à l’Université de l’Arctique. J’imagine que vous aimeriez que le gouvernement y investisse davantage.
J’étais parmi ceux qui préconisaient un certain recul à cet égard. En fait, je trouvais qu’il valait mieux investir dans les infrastructures canadiennes. À vrai dire, les réseaux et les fondements que nous avons établis ici grâce au réseau de l’Université de l’Arctique nous ont été essentiels. Mais pour l’instant, nous nous attardons plutôt à concevoir des programmes universitaires que nous pourrons offrir ici même, dans le Nord. Nous ciblons toujours la formation en ligne, car c’est le seul moyen d’atteindre notre objectif sur ce territoire. Mais nous essayons de le faire à partir de chez nous, avec l’aide de nos propres spécialistes.
Nous avons visiblement besoin d’un centre, qui sera probablement dans la capitale. Mais grâce à l’apprentissage en ligne, nous avons déjà accès à toutes les collectivités.
Vous avez parlé du programme d’échange North2North, entre autres.
Le NPD tient entre autres à ce que le Canada profite de la présidence du conseil pour adopter une stratégie multilatérale. Nous voulons collaborer avec tous nos partenaires sur les enjeux mentionnés, qu’il s’agisse du changement climatique, des pêches ou du développement des ressources, et ce, sans nous limiter aux deux années où nous assumerons la présidence.
Le programme North2North dont vous avez parlé constitue une belle occasion pour les habitants du Nord de travailler et de vivre des expériences avec les citoyens d’autres pays nordiques. En clair, nous recommandez-vous de recommencer à investir dans ce programme?
Tout à fait. Quelques étudiants ont demandé de participer au programme d’échange cette année, mais nous n’avons pas pu les envoyer en Finlande puisque nous n’avions aucune façon de financer le projet. Ils espéraient y aller. Je sais que les derniers fonds du programme North2North ont permis au Collège Nunavut Arctic d’envoyer 12 infirmières dans le nord de la Scandinavie pour travailler auprès des Samis.
Je pense que les étudiants peuvent transmettre bien des connaissances dans l’ensemble des régions nordiques. Ce mouvement contribue également au savoir et aux relations internationales, qui ne pourront selon moi qu’être bénéfiques à l’avenir non seulement au Nord, mais à tout le Canada aussi. Il est donc primordial que les étudiants canadiens du Nord aient la chance de fréquenter d’autres établissements et d’accueillir à leur tour des étudiants étrangers non seulement en sciences, mais aussi dans tous les domaines, comme les lettres, les sciences humaines et les sciences sociales. Nous avons accueilli un certain nombre d’étudiants russes et scandinaves. Ils adorent participer à la vie étudiante canadienne. Le langage est merveilleux, bien entendu. Ces étudiants ont aussi l’occasion de visiter de nombreuses autres collectivités pendant leur séjour.
L’autre question qui nous importe à tous et que vous avez soulevée vers la fin de votre exposé — je me demandais si vous alliez en parler —, c’est, bien entendu, la participation des peuples autochtones et des Inuits. Vous avez mentionné les 11 règlements en matière de revendications territoriales.
Nous sommes très intéressés de savoir comment les peuples autochtones et les Inuits peuvent faire valoir leur point de vue. Un Canadien d’origine danoise est venu nous dire qu’un des membres du groupe du Danemark est chargé de représenter le point de vue et les idées des peuples autochtones. Notre gouvernement nous dit: « Nous les finançons, alors ils sont à la table pour fournir leur opinion. »
Selon vous, que pouvons-nous faire pour nous assurer que les peuples autochtones et les Inuits soient pleinement représentés sur le plan structurel et pas seulement lors de réunions? Comment faire pour nous assurer que le Conseil de l’Arctique tient compte de leurs préoccupations, notamment celles des Inuits?
Une des façons, et cela fait partie de la vision à long terme, consiste à éduquer les jeunes Autochtones de partout dans le Nord, les Inuits autant que les Athabascans, afin qu’ils puissent un jour représenter leur peuple au sein du gouvernement. Ils seraient ainsi à la fois la voix politique et la voix autochtone de leur peuple. Ça, c’est la vision à long terme.
À court terme, il faudrait tenir des discussions dans le nord du Canada. On travaille souvent à Ottawa, comme aujourd’hui, mais si ces discussions avaient lieu à Whitehorse, à Yellowknife ou à Iqaluit, par exemple, la représentation de ces peuples serait beaucoup plus importante. Les participants au Conseil de l’Arctique comprendraient mieux leur position.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, madame Barnes, d’avoir accepté notre invitation. C’est exceptionnel de vous avoir ici.
Je suis une grande défenseuse de la formation continue et de l’éducation en ligne. J’ai obtenu mon premier diplôme universitaire de l’Université de Toronto. J’ai suivi mes cours sur place. Mais, j’ai continué à suivre des cours offerts grâce à l’éducation en ligne. Je sais que les enseignants y sont beaucoup plus accessibles, car ils vous communiquent leurs disponibilités. Si vous leur envoyez un courriel, ils vous répondent presque immédiatement. Ce fut une expérience merveilleuse. En fait, j’ai suivi des cours offerts par deux universités canadiennes différentes pour avoir accès aux cours et aux enseignants que je voulais. J’ai eu beaucoup de plaisir. Vraiment.
Vous soulevez un point intéressant. Ma circonscription est située à environ 30 kilomètres au nord de Toronto. Puisque nous n’avons aucun établissement d’éducation postsecondaire, nous n’avons pas accès au CANARIE. Nous présentons des demandes pour obtenir des fonds pour ce projet. Nous voulons avoir accès à ce réseau, car il nous permettrait de mettre sur pied un programme d’études postsecondaires. Nous sommes près de Toronto, mais nous n’avons pas accès à une éducation postsecondaire. Les étudiants de ma circonscription doivent aller ailleurs pour poursuivre leurs études. Nos circonstances sont très similaires — sauf sur la question de proximité. Mais je comprends bien la nécessité d’avoir accès à une éducation postsecondaire et d’offrir cette possibilité.
Je vous félicite de poursuivre vos efforts dans le dossier de l’éducation en ligne. Il est fascinant d’apprendre que 97 p. 100 des citoyens au Yukon ont accès à Internet. Il faut donc informer les étudiants du primaire et du secondaire sur les possibilités qu'offre l’éducation en ligne.
Les étudiants du primaire et du secondaire sont-ils informés de cette possibilité, qu’ils peuvent étudier tout en restant confortablement chez eux?
Je suis heureuse d’apprendre qu’on nous appuie en Ontario.
Nous travaillons en étroite collaboration avec la direction des écoles publiques de notre collectivité, notamment. Nos bureaux sont souvent installés dans les locaux des écoles secondaires. Je dirais qu’au cours des cinq dernières années, soit depuis que je suis en poste, il y a eu un changement important de l’attitude envers l’apprentissage en ligne. À mon arrivée, les étudiants suivaient des cours par correspondance dans les universités de la Colombie-Britannique. Il fallait envoyer tous les documents par la poste. Aujourd’hui, toutes les écoles ont des salles de classe dites « intelligentes ». Les étudiants peuvent maintenant suivre ces cours en ligne. À Whitehorse, on construit des stations pivots pour permettre aux étudiants de 11 et de 12e année de suivre des cours de science de haut niveau, mais aussi des cours d’anglais et de sciences sociales.
Ce n’est pas parfait, mais je dirais qu’il y a eu un changement considérable dans l’attitude des gens. Au cours de la dernière année, tous les étudiants de 2e année au Yukon ont reçu un iPad. L’idée est de les initier, eux et les enseignants, à ces technologies. Cela aussi s’inscrit dans le changement d’attitude dont je parle. Les enseignants doivent s’ajuster, eux aussi.
Je trouve cela très passionnant et novateur. Nous pourrions apprendre beaucoup de votre modèle, notamment en Ontario.
J’aimerais parler de la mobilité de la main-d'oeuvre. Vous dites que c’est un des problèmes auxquels vous êtes confrontés. En vertu des dispositions de la Constitution canadienne, il existe environ 450 organisations différentes qui distribuent des permis d’exercer diverses professions. C’est un problème qui touche tout le pays.
Vous dites à propos de votre établissement que ce qui commence là peut mener n'importe où. Selon vous, comment pouvons-nous faire tomber ces obstacles à la mobilité des jeunes travailleurs formés dans le Nord? Mon gendre est originaire du Ghana. Il travaille à la mise sur pied d’une entreprise ici et il est très peu probable qu’il retourne dans son pays d’origine. C’est un peu le problème que vous avez. Vous voulez former des gens afin qu’ils aient les compétences nécessaires pour travailler n’importe où, mais vous souhaiter qu’ils restent dans le Nord pour que la région puisse profiter de leur expertise. C’est un problème. Que pouvons-nous faire pour le résoudre, à votre avis?
Les éducateurs au niveau postsecondaire disent souvent que l’Acte de l’Amérique du Nord britannique nous a fait du tort en faisant de l’éducation une compétence provinciale. Cela n’a jamais été aussi vrai. De plus en plus d’étudiants vont d’une province à l’autre et tentent de faire transférer leurs unités de cours. Je suis originaire de l’ouest du pays où les étudiants ont depuis longtemps accès à des conseils pour les aider à ce chapitre. Le Yukon College est membre des conseils de l’Alberta et de la Colombie-Britannique. Il est donc assez facile pour nos étudiants de faire reconnaître leurs unités de cours dans les universités de l’Ouest.
Concernant les associations, nous travaillons en étroite collaboration avec celles de ces deux provinces et, s’il y a lieu, avec les associations nationales. Nous tentons de faire certifier tous nos programmes pour faciliter le transfert des étudiants. Mais, c’est plus difficile lorsqu’il est question des programmes de métiers. Le régime d’apprentissage cause beaucoup de problèmes à mes collègues ailleurs au pays en raison de la façon dont le régime fonctionne. Nous travaillons très fort afin d’offrir des possibilités novatrices aux étudiants pour leur permettre de passer de l’étape de l’apprentissage à l’emploi, et ce partout au pays.
Le secteur minier compte beaucoup de travailleurs migrants, tout comme le secteur pétrolier et gazier. Ces travailleurs doivent pouvoir se déplacer. C’est la raison pour laquelle nous avons amorcé les discussions avec l’Alaska, car malgré la courte distance qui nous sépare de cet État, la formation offerte en matière de sécurité y est différente de la nôtre. Nous espérons offrir un curriculum qui permettra aux étudiants de respecter les normes des deux pays en matière de sécurité. Ils pourront ainsi passer d’une société minière à l’autre. Certaines sociétés minières au Yukon exploitent aussi des mines dans le sud-est de l’Alaska, au sud du 48e parallèle et au Colorado, entre autres. Elles voudraient que leurs employés puissent traverser la frontière pour le travail.
Merci, monsieur le président.
Merci, madame Barnes, d’avoir accepté notre invitation.
Il y a quelques années, j’ai passé une semaine au Yukon en compagnie de Larry Bagnell. C’est très beau chez vous et les gens y sont dynamiques. Ils sont tenaces.
Vous semblez bien comprendre la position des autres pays sur l’Arctique, notamment en raison des étudiants étrangers que vous accueillez et de vos relations avec les États-Unis. Lorsque vous discutez avec l’Alaska, avez-vous l’impression que l’État se préoccupe davantage de ses propres intérêts que de ceux de l’ensemble des États-Unis lorsqu’il est question de l’impact qu’auront les changements dans l’Arctique sur la souveraineté et le transport maritime?
Un autre témoin a parlé de la mer de Chine méridionale. On sait que les Américains s’intéressent beaucoup à ce qui se passe dans cette région. Puisque vous êtes près de l’Alaska, parlez-nous du point de vue des États-Unis par rapport à l’État et à la nation. Que savez-vous à ce sujet?
Comme je suis originaire des prairies, je ne m’y connais pas beaucoup sur les questions maritimes. Au Yukon, nous dépendons du port de Skagway pour expédier nos minéraux vers les côtes Ouest américaines. Nos discussions portent principalement sur des questions terrestres. Les plus importantes — je ne suis pas en poste depuis longtemps, alors je n’ai pas eu beaucoup de discussions — concernent les universités. Nous parlons beaucoup de la nécessité de permettre aux experts, aux gens hautement qualifiés, de partout dans le Nord d’échanger, et ce, sans être limités par nos frontières respectives ou nos lois. C’est une des conversations que nous entretenons, soit de permettre aux scientifiques, aux corps professoraux et aux chercheurs de partout dans le monde de se déplacer plus facilement. Malheureusement, je ne discute pas beaucoup avec des représentants situés au sud du 48e parallèle.
Que vous disent les étudiants internationaux lorsqu’ils arrivent dans votre région? Il est intéressant de voir que beaucoup d’étudiants étrangers sont captivés par le Nord. Évidemment, ils y ont un intérêt direct, mais ont-ils un point de vue différent des étudiants canadiens sur la région? Qu’en pensez-vous?
Je dirais que ce que l’on entend le plus souvent... plus particulièrement de la part des étudiants asiatiques. Nous accueillons beaucoup d’étudiants du Japon et de la Corée, notamment, des pays avec lesquels nous avons conclu des partenariats. Nous avons aussi plusieurs étudiants scandinaves et du nord de l’Europe, plus particulièrement de l’Allemagne. Ils sont impressionnés par nos grandes étendues sauvages et le fait que nous ayons accès à de si belles régions.
Le fait que ces espaces impactent sur notre qualité de vie et que nous les protégeons les émerveille. Ils disent que l’on devrait tout faire pour les protéger. Que l’on développe ou non… Bien entendu, un jour ou l’autre, nous développerons ces régions, mais devrons procéder de façon à protéger ces espaces pour les prochaines générations. C’est ce que nous répètent sans cesse les étudiants étrangers.
Vous dites que le comité devrait tenir des discussions ailleurs qu’à Ottawa. Si nous avions l’occasion d’aller dans le Nord… Vous avez parlé de trois collectivités, soit Whitehorse, Iqualuit… Outre le Nord canadien, où devrions-nous aller? Y a-t-il des pays à l’avant-garde dans le dossier de l’Arctique? La Norvège serait-elle du nombre? Où devrions-nous aller, selon vous? Si vous deviez planifier nos déplacements pour une semaine…?
J’irais certainement en Norvège. On y trouve des institutions, comme celles à Tromso ou à Svalbard, qui ont su démontrer qu’il était possible d’avoir un système d’éducation solide et de mener de très bonnes recherches au nord du 76e parallèle. J’irais aussi au Groenland, car on a réussi à y mettre sur pied une université pour éduquer les gens de la région sur les problèmes locaux. Cet établissement mène également des recherches très utiles, notamment sur les changements climatiques et la faculté d’adaptation à ces changements.
Ensuite, je crois que j’irais en Russie pour y visiter certaines institutions autochtones. Les Russes ont fait de l’excellent travail, notamment à Iakoutsk, pour saisir l’importance culturelle des peuples autochtones et amasser des connaissances traditionnelles. Fairbanks a également connu du succès à ce chapitre. On y a recueilli des informations sur la langue et, grâce à cela, on y a acquis des renseignements sur les connaissances traditionnelles dans le Nord.
J’espère pouvoir faire une tournée semblable cette année.
D’accord. Très bien.
Nous allons amorcer la prochaine série de questions.
Monsieur Dechert, vous avez la parole pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci, madame Barnes, d’être ici.
Vous dites que les sociétés qui exploitent dans l’Arctique, et dans les régions nordiques du Canada qui ne font pas partie de l’Arctique, ont acquis beaucoup d’expérience sur le terrain. Selon vous, serait-ce utile de créer un forum circumpolaire des affaires pour permettre la mise en commun des pratiques exemplaires de ces sociétés, tant du point de vue des affaires que du point de vue de la mise en valeur responsable des ressources?
Je pense que c'est tout à fait essentiel. Je me suis entretenue récemment à Ottawa avec Patrick Borbey, le président de CanNor. Il m'a demandé pourquoi nous nous concentrions sur la gouvernance et non sur l'aspect commercial de la mise en oeuvre des traités modernes.
Bien sûr, nous le faisons d'une certaine façon en aidant les gens à obtenir une éducation, mais l'un des aspects des traités modernes sur lequel nous devons vraiment commencer à nous concentrer, c'est la manière de faire naître des occasions d'affaires durables afin que les gens puissent rester dans le Nord et administrer la région. Nous avons beaucoup de choses à apprendre. J'ai visité Kiruna, en Suède. Comme vous le savez, cette ville est située au 70e ou au 76e parallèle. C'est un endroit dynamique qui compte de nombreuses petites entreprises, beaucoup de maisons et un grand nombre d'habitants.
Je pense qu'un tel forum pourrait servir à examiner certaines de nos difficultés, comme le transport, en particulier le transport de marchandises si nous faisons de la production dans le Nord, et le logement. Le logement est une source quotidienne de défis ici. Il a ralenti l'exploration dans le secteur minier et il empêche l'expansion de certaines mines. C'est probablement une difficulté que tout le monde affronte, toutes les collectivités du Nord canadien et, je présume, la plupart des pays nordiques. Nous devrions examiner attentivement la question dans le cadre de la discussion sur le développement des entreprises.
C'est très intéressant. Merci.
Madame Barnes, vous êtes pédagogue. Nous avons parlé aujourd'hui et lors de nos autres séances sur l'Arctique de la connaissance du reste de la population canadienne des difficultés et des défis que pose la région de l'Arctique, ainsi que des occasions qu'elle offre. Le niveau général de connaissances est bon, mais il y a beaucoup de choses que les Canadiens d'autres régions ne comprennent pas.
En tant que pédagogue, que recommanderiez-vous que nous fassions pour sensibiliser le reste du Canada aux occasions et aux défis liés à la région de l'Arctique?
J'aurais quelques suggestions. D'abord, il faudrait probablement améliorer de beaucoup le programme éducatif et le matériel pédagogique employés dans les écoles publiques, et il faudrait sans doute qu'ils soient préparés dans le Nord. Ils doivent être créés dans le Nord et peut-être enseignés à partir du Nord, maintenant que nous avons les moyens de le faire.
Ensuite, il y a l'Université de l'Arctique. Le produit crucial, selon moi, de cet organisme, c'est qu'il compte 29 établissements canadiens parmi ses membres, des universités du Sud pour la plupart. Chacune de ces universités compte un programme solide d'études canadiennes, nordiques et circumpolaires. Ces établissements ont les moyens de contribuer à l'éducation de la population canadienne; il faudrait donc probablement leur allouer des ressources pour leur permettre de se réunir.
ArcticNet est un autre bon exemple. Le problème, c'est qu'il se concentre principalement sur les questions maritimes; il n'examine donc pas toujours les dossiers terrestres. Or, si tous ces organismes avaient les ressources nécessaires pour communiquer les résultats de leurs études — non seulement à d'autres universitaires, mais à l'ensemble des Canadiens —, je pense que ce serait très utile.
Par ailleurs, l'industrie cinématographique du Nord canadien est assez bonne. Le Yukon produit beaucoup de films, et je pense qu'ils devraient être mieux distribués.
Très bien.
Vous savez peut-être qu'il y a une proposition de fonder un centre qui s'appellerait « La Maison polaire », probablement dans la région de la capitale nationale. Il s'agirait à la fois d'un groupe de réflexion et d'un genre de musée sur l'Arctique ouvert à tous les Canadiens. Que pensez-vous de cette idée?
Je pense que c'est génial. Tout récemment, nous avons parlé de la possibilité de former un groupe de réflexion politique ici, car les gens du Nord doivent avoir un moyen bien organisé de débattre et de discuter des dossiers qui les touchent.
Cet été, j'ai visité le Musée du Nord de l'Université de l'Alaska, à Fairbanks. C'est un excellent exemple de ce qui peut être fait avec un musée. Bien sûr, l'une des choses qui agacent les Yukonnais, c'est que les gens s'imaginent que le Nord est un territoire glacial, désertique et dépourvu d'arbres; pourtant, le Yukon représente une partie importante de la forêt boréale. En fait, la toundra ne commence que bien plus au nord, à Old Crow.
D'après moi, ce genre d'activités aidera les Canadiens à comprendre la diversité du Nord.
Très brièvement, si vous aviez à faire des recommandations à la ministre Aglukkaq, quelles devraient être, selon vous, les trois, quatre ou cinq priorités de la présidence du Canada au Conseil de l'Arctique?
L'éducation, évidement, en est une. Je pense que c'est une question d'accès: il faut faire en sorte que tous les habitants du Nord aient accès à une bonne éducation jusqu'aux niveaux supérieurs. De plus, je crois que la discussion sur les entreprises et le développement économique de la région mentionnée plus tôt est essentielle pour aider les gens à comprendre la réalité, ainsi que comment instituer des pratiques commerciales et faire naître des occasions d'affaires.
En outre, je crois qu'il faut poursuivre la recherche sur les changements climatiques; on l'a déjà beaucoup dit dans le cadre de votre étude. Ils sont réels. Nous les voyons partout ici, et ils posent des défis notamment sur les plans de la sécurité alimentaire et du transport.
Nous devons également songer à la mise en valeur et à l'extraction des ressources dans le Nord. L'environnement est si fragile et si vulnérable; il faut procéder différemment dans les climats froids. En tant qu'organisme international du Nord, nous devons examiner attentivement la question.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je suis très heureuse d'entendre toutes les histoires de succès que vous nous avez mentionnées. C'est très rafraîchissant.
J'aimerais simplement rappeler qu'on parle de politique internationale, en fait de la politique que le Canada devrait avoir avec ses partenaires au plan international. La semaine dernière, j'ai posé une question au gouvernement sur le fait que le programme du Canada comportait beaucoup plus d'enjeux nationaux.
Par exemple, la majeure partie de votre discours parlait de l'accès à l'éducation, du développement des ressources et des occasions d'affaires dans le Nord. Cependant, j'aimerais simplement rappeler que le mandat du Conseil de l'Arctique ne comporte aucun de ces trois enjeux.
Vous avez mentionné la recherche et les changements climatiques. J'aimerais simplement vous demander de nous dire ce que vous pensez du fait que, dans ses politiques sur l'Arctique, le Canada n'a pas mis en avant actuellement l'enjeu relatif aux changements climatiques auprès du Conseil de l'Arctique.
En 2010, le ministre des Affaires étrangères a parlé d'une stratégie de l'Arctique basée sur les quatre piliers du gouvernement canadien sans jamais mentionner les changements climatiques. Pouvez-vous commenter sur le fait que l'environnement a été totalement évacué par le Canada au chapitre des enjeux internationaux?
[Traduction]
C'est une très bonne question.
Du point de vue des habitants du Nord, c'est une lacune considérable. Comme je viens de le dire, les gens qui vivent ici voient tous les jours les conséquences des changements climatiques. Certainement, les aînés — leurs peuples sont installés ici depuis des millénaires — nous disent que les changements sont rapides et imprévisibles. Partout, les gens en ressentent les effets.
Je pense que toutes les administrations du Nord devront se pencher sur la question, surtout sur le plan de l'exploitation des ressources. La disparition du pergélisol est seulement un exemple de ce qui pose problème pour les secteurs minier ainsi que pétrolier et gazier, et pour la construction des routes. Chaque année, nous dépensons des millions de dollars pour entretenir les routes du Yukon en raison de difficultés liées au pergélisol.
Ainsi, bien que le dossier ne soit pas nommé, je crois vraiment qu'il est dans l'esprit de tous. Nous participerons certainement aux discussions. Lors de sa visite récente au collège, l'ambassadrice de la Norvège nous a suppliés de continuer à parler des changements climatiques et de l'adaptation de nos collectivités.
Le collège continuera à le faire.
[Français]
Selon vous, le gouvernement devrait faire de la question des changements climatiques l'une de ses priorités au Conseil de l'Arctique.
[Traduction]
[Français]
Pensez-vous que le Conseil de l'Arctique est pour le Canada l'endroit pour discuter de ses politiques nationales relatives à l'éducation et au développement des ressources? Croyez-vous vraiment que c'est le forum approprié pour discuter des enjeux et des politiques nationales et intérieures ainsi que des défis vécus tous les jours par les communautés autochtones? Pensez-vous que le Conseil de l'Arctique est le forum approprié pour discuter des problèmes des communautés autochtones du Canada?
[Traduction]
Comme je l'ai dit au début de mon exposé, c'est avec l'éducation que tout commence et prend fin. Pour moi, le Conseil de l'Arctique est un lieu où nous pouvons tirer des leçons de ce que d'autres gens du Nord ont appris avant nous. De découvrir s'il y a de bonnes pratiques durables utilisées dans le Nord qui peuvent servir à guider notre politique intérieure — à mon sens, c'est là la valeur du Conseil de l'Arctique.
Les peuples autochtones du Nord ne voient pas les frontières de la même façon que nous. À leur sens, le Nord appartient à tous les peuples autochtones établis au nord du 60e parallèle ou peu importe. Pour eux, ce n'est pas une discussion politique; c'est une discussion sur le territoire et sur les manières de le protéger.
Madame Barnes, vous avez abordé le sujet de la gouvernance. Vous avez parlé de former des habitants du Nord pour qu'ils deviennent des dirigeants dans les négociations de traités territoriaux. Vous espérez que des jeunes qui fréquentent le collège assumeront des responsabilités dans le Nord en tant que parlementaires et que membres de l'assemblée législative.
Tout d'abord, comment le cours est-il reçu? Suscite-t-il beaucoup d'intérêt? Quels processus sont employés pour mener les négociations? Font-ils d'abord des recherches qui peuvent ensuite leur servir dans le cadre des négociations?
Ces préoccupations ont toujours occupé une place dans la vie des jeunes Autochtones. Ils en ont une compréhension intrinsèque. Puisque ces études sont aussi transfrontalières, peuvent-elles ensuite servir sur la scène internationale?
Pour répondre à la première partie de votre question, l'intérêt augmente rapidement. Si vous veniez au Yukon, vous seriez très impressionnés par le nombre de jeunes qui font des études supérieures — et beaucoup d'entre eux reviennent. Des avocats, des ingénieurs et des géoscientifiques issus de nos Premières nations reviennent et participent activement aux négociations — ils établissent des cartes et des frontières, ils traitent des droits miniers, etc.
Vous avez posé une question sur l'aspect transfrontalier. Je ne m'y connais pas autant par rapport aux négociations sur les traités territoriaux à l'extérieur du Canada et de l'Alaska, mais je parlais hier à un des négociateurs du Yukon, un ancien chancelier du collège. Il est revenu récemment d'Alaska; on continue à s'inspirer de ce qui a été fait là-bas, surtout dans le secteur du pétrole et du gaz. Puisque cet État est plus avancé que nous, nous pouvons tirer des leçons non seulement de ses réussites, mais aussi de ses erreurs. Nous allons certainement intégrer une partie de ces recherches dans nos programmes.
Vous avez parlé de trois programmes de baccalauréat et de trois programmes de maîtrise. Je pense que l'un d'entre eux est un baccalauréat en sciences, en génie minier.
Nous offrons des baccalauréats en sciences de la conservation, en éducation et en service social. Nos maîtrises sont dans les domaines du leadership en éducation, des programmes d'éducation et de l'administration publique.
Pour finir les cours de génie, à l'heure actuelle, les étudiants doivent probablement aller dans une autre province, n'est-ce pas?
Oui.
Nous avons conclu des ententes d'articulation avec des universités du Sud pour les étudiants en sciences et en génie, et nous travaillons à une nouvelle entente avec le programme universitaire en génie minier de Fairbanks.
C'est très intéressant. Les questions de gouvernance m'intéressent tout particulièrement, et je suis heureuse d'apprendre que les étudiants peuvent utiliser ces renseignements, car je suis certaine qu'ils pourront servir au Conseil de l'Arctique; comme le Canada avance, cette expertise et ces recherches pourront lui servir, et les jeunes auront un rôle à jouer. Merci beaucoup pour ce que vous faites.
Merci, monsieur le président.
Et merci à la présidente Barnes.
Vos propos m'intéressent vivement. J'ai été président du conseil des gouverneurs du Collège Aurora, dans les Territoires du Nord-Ouest, pendant nombre d'années. Je pourrais certainement louer longuement nos collèges, moi aussi. Toutefois, notre discussion est d'ordre international, et je dois respecter ce fait, car c'est très important que nous comprenions ce qui arrivera dans ces dossiers.
Cela dit, l'Université de l'Arctique a tenu une très grande réunion à Winnipeg il y a environ un mois. Y avez-vous participé? Pouvez-vous nous en parler?
Malheureusement, c'était en même temps que la soirée de remise des prix étudiants, à laquelle je trouve très important d'assister. Notre vice-président à la recherche et à l'enseignement, Dr Chris Hawkins, s'est rendu à la réunion.
Je pense que nous avons assisté à presque toutes les réunions des recteurs, dont celle-là. Elles regroupent tous les présidents et les vice-présidents des universités et des collèges participants.
Je crois comprendre qu'il a été beaucoup question des provinces nordiques, ce qui est intéressant, car il y a toujours eu un peu de tension entre l'Université de l'Arctique et les provinces nordiques du Canada.
Bien sûr, aujourd'hui, le véritable intérêt de l'Université de l'Arctique réside principalement dans les réseaux de recherche. Je pense qu'on a aussi beaucoup parlé des moyens de continuer à fournir des ressources aux chercheurs afin que les membres puissent se déplacer et continuer à collaborer partout dans le Nord.
Selon vous, nous devrions donc promouvoir l'Université de l'Arctique au Canada.
Je sais que vous n'étiez pas de cet avis quand vous avez accepté le poste à Whitehorse il y a quelques années. Peut-on dire sans se tromper que vous appuyez maintenant le fait que le Canada soit un partenaire important de l'Université de l'Arctique?
Je n'ai jamais dit que l'organisation n'était pas importante. Ce que j'ai dit, c'est que je préférais que les ressources limitées soient employées pour améliorer et multiplier les programmes collégiaux offerts dans le Nord. Toutefois, j'ai toujours cru que ce qui faisait la valeur de l'Université de l'Arctique, c'était son réseau de professionnels et d'universitaires du Nord circumpolaire, et je le maintiens encore.
Ne pensez-vous pas, toutefois, que l'Université de l'Arctique est un meilleur lieu pour échanger sur l'éducation dans le Nord que le Conseil de l'Arctique, qui doit s'occuper d'un si grand nombre de dossiers internationaux liés à l'ouverture de l'océan Arctique — principalement des questions relatives à l'environnement, au déplacement des navires et à l'ouverture d'une nouvelle pêche dans le monde? Il n'existe aucun autre endroit pour examiner ces questions — absolument aucun —, comme d'autres l'ont déjà dit. Si nous nous concentrons sur des dossiers qui sont au coeur des préoccupations d'autres organismes internationaux déjà établis, ne croyez-vous pas que nous manquerons d'accomplir des choses qui doivent absolument être faites à l'échelle internationale?
Le temps presse. L'océan Arctique s'ouvre très rapidement. Les changements climatiques ont d'immenses répercussions, non seulement dans le Nord, mais aussi dans le sud du Canada et partout dans le monde. Nous devons nous concentrer sur ces dossiers internationaux.
Ne voyez-vous pas de meilleures façons de s'occuper de l'éducation à l'échelle internationale par l'intermédiaire des structures déjà établies?
À mon sens, ce n'est pas une alternative. Pour moi, l'intérêt de l'Université de l'Arctique, c'est qu'elle établit un lien entre la recherche et l'apprentissage faits partout dans le Nord. Cela guide les travaux du Conseil de l'Arctique, où les parlementaires peuvent mener les discussions nécessaires. Grâce à l'éducation dans le Nord, ces affaires seront examinées par les gens qui les vivent.
À mon avis, l'Université de l'Arctique est essentielle car elle fournit les connaissances, mais ce n'est probablement pas là que les conversations devraient avoir lieu.
Merci beaucoup.
Monsieur Williamson, vous vouliez poser une brève question avant que nous concluions.
J'ai beaucoup aimé écouter vos observations. J'espère certainement avoir la possibilité, soit avec le comité, soit seul, de visiter un jour le Nord. En tant que député, je trouve utile de rencontrer les gens et de vivre ce qu'ils vivent au quotidien et à l'occasion. Je pense que ces expériences nous guident dans notre rôle de législateurs lorsque vient le temps de présenter des recommandations.
J'ai une question. J'aimerais faire un suivi, car parfois, lorsqu'on dit qu'il faut continuer à parler des changements climatiques, on s'arrête là. Selon vous, à quoi faut-il songer « au-delà de l’adaptation », et l'adaptation doit certainement poser un défi comme l'environnement se réchauffe — je présume que c'est principalement le réchauffement qui touche le Nord? Lorsque des dignitaires étrangers vous disent de continuer à en parler, qu'ont-ils en tête, ou vous concentrez-vous vraiment sur l'adaptation, sur le besoin de veiller à ce que les collectivités et les territoires aient les moyens de relever les défis posés par ce qui doit être la tendance au réchauffement dans le Nord?
L'adaptation peut vouloir dire nombre de choses. La disparition du pergélisol fait sortir des polluants de la terre, et ces polluants pénètrent dans nos sources de nourriture. Ils ont un effet sur notre santé: ils causent des taux très élevés de certaines maladies et de certains cancers. Voilà pour le côté de la santé.
Aussi, de merveilleux objets culturels émergent du pergélisol. Vous avez probablement entendu parler des bancs de glace et du fait que nous commençons à y trouver des objets qui nous racontent des histoires inconnues qui datent d'il y a environ 15 000 ou 20 000 ans. Nos idées de la façon dont le Nord a été formé s'en trouvent transformées.
Ce n'est pas uniquement une question d'adaptation, mais puisque tous ces facteurs ont une incidence sur notre mode de vie, ils se rapportent à l'adaptation.
Je pose la question parce que l'une de mes préoccupations, lorsque les gens nous suggèrent de faire quelque chose... J'aimerais avoir votre avis sur le point suivant. J'ai toujours trouvé étrange que dans le cadre du Protocole de Kyoto, le Canada était le seul pays des Amériques — du Nord et du Sud — à avoir à réduire ses émissions. Vous comprendrez peut-être; notre climat est très froid, nos émissions sont élevées, et pourtant, le Canada était le seul pays américain que l'entente obligeait à faire quelque chose.
Vous avez peut-être quelque chose à dire à ce sujet. Or, compte tenu de notre environnement froid et du besoin de brûler des combustibles fossiles simplement pour nous réchauffer l'hiver, c'était une entente étrange qui mettait tellement l'accent sur nos efforts à nous et si peu sur ceux d'autres États, par exemple, ceux du sud des États-Unis, si friands de VUS, ou du Mexique, où l'on utilise des moteurs à deux temps, pratiques qui produisent beaucoup d'émissions.
C'était plus une observation. Vous pouvez dire quelque chose à ce sujet, vous aussi. C'est comme vous voulez.
Je n'ai pas grand-chose à dire. Le Protocole de Kyoto a été signé avant que je déménage dans le Nord; ce n'était donc pas sur mon écran radar. Nous sommes en contact plus direct avec les polluants dans le Nord que dans le Sud. Ils ont certainement des répercussions immédiates ici.
D'un point de vue personnel, l'énergie est un souci quotidien ici. Il a fait moins 30 durant les 3 dernières semaines. L'énergie est une grande préoccupation pour nous. Nous devons absolument commencer à penser à des solutions de rechange pour ne pas dépendre d'une source unique, qui coûte très cher à faire venir jusqu'ici.
Chers collègues, nous n'avons pas de témoins pour jeudi. Je pense que tous s'entendent pour annuler la séance. Êtes-vous d'accord?
Cela me convient, monsieur le président.
J'ai une dernière chose à dire. J'aimerais remercier notre personnel et vous, monsieur le président. Je souhaite à tous des Fêtes paisibles. Joyeuse Hanoukka, joyeuse fête de Kwanzaa, joyeux Noël et bonne année.
Et de même à nos interprètes et à tout le personnel.
Vous avez reçu notre plan de travail. Nous allons continuer à le suivre, à moins qu'il y ait des préoccupations. Il a été préparé par les chercheurs, et nous allons continuer à nous avancer à notre retour en 2013. Nous discuterons du reste de l'étude sur l'Arctique et de nos autres travaux.
Joyeuses Fêtes à toutes et tous.
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