:
Merci, monsieur le président.
Chers collègues, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
[Traduction]
Je suis heureux d'être avec les membres de cet estimé comité aujourd'hui pour répondre, à titre de ministre de la Justice et de procureur général, à vos questions sur le Budget supplémentaire des dépenses (B).
J'en suis à ma 50e comparution devant un comité parlementaire. Je vous présente les personnes qui m'accompagnent: William F. Pentney, sous-ministre, Pierre Legault, sous-ministre délégué, et Donald K. Piragoff, sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques
Nous avons une session très occupée. Nous avons trois projets de loi qui ont été adoptés par le Parlement. Nous en avons trois autres qui sont en bonne voie de l'être, six en fait si on ajoute ceux qui viennent d'entamer le processus, six ou sept qui sont en attente, et 13 projets de loi d'initiative parlementaire.
[Français]
En tant que ministre de la Justice et procureur général du Canada, j'ai l'obligation de faire de mon mieux pour m'assurer que le système de justice est équitable, adapté et accessible à tous les Canadiens.
[Traduction]
Une priorité et un défi toujours présents pour nous tous dans le système de justice consistent à veiller à ce que tous les Canadiens aient un accès concret et opportun à la justice. Je pense que c'est un sentiment que vous et tous les intervenants au pays partagez assurément.
Tous les gouvernements ont l'obligation de mettre en place des initiatives pour y arriver. De son côté, le gouvernement fédéral accorde aux provinces et aux territoires un financement continu pour mettre en place des programmes qui favorisent l'accès à la justice. Monsieur le président, chers collègues, le ministère de la Justice a aussi financé et appuyé les travaux du Comité d'action sur l'accès à la justice en matière civile et familiale, qui a réuni des acteurs très importants dans l'ensemble du système.
Le ministère continue en outre de promouvoir l'accès à la justice familiale en collaborant étroitement avec ses homologues provinciaux et territoriaux. En septembre dernier, j'ai assisté à la rencontre fédérale-provinciale-territoriale, et je peux vous dire que tous sont d'avis qu'il faut continuer à améliorer le système. Les gens sont très motivés, tout comme la magistrature.
C'est pourquoi nous avons renouvelé les subventions et contributions destinées à l'initiative de soutien des familles qui vivent une séparation ou un divorce pour une période de trois ans. Les provinces et les territoires peuvent ainsi obtenir jusqu'à 15,5 millions de dollars par année pendant les trois prochaines années pour offrir aux familles des services de médiation et d'exécution des obligations alimentaires. Les organisations non gouvernementales peuvent aussi obtenir jusqu'à un demi-million de dollars par année pour fournir de l'information aux familles sur leurs droits. Il s'agit d'un élément très important, notamment en raison du nombre de personnes non représentées de nos jours.
Les fonds destinés aux activités fédérales offertes dans le cadre de cette initiative ont aussi été renouvelés pour deux ans. Ces activités aident le ministère à s'acquitter de son mandat lié au droit de la famille, et elles permettent d'offrir aux provinces et aux territoires, de même qu'à tous les Canadiens, des services d'enregistrement des actions en divorce et de soutien à l'exécution des obligations alimentaires.
Les fonds servent également à financer de nombreux services et activités qui facilitent l'accès au système de justice aux familles qui vivent une séparation ou un divorce, et à faire en sorte que les parents s'acquittent de leurs obligations. Une évaluation effectuée cette année nous a permis de conclure que cette initiative atteint son objectif de faciliter l'accès au système de justice pour les familles. Je suis heureux de constater que nous faisons des progrès tangibles, et nous espérons pouvoir en faire autant dans l'ensemble du système.
[Français]
En plus de promouvoir l'accès au système de justice en matière familiale, les efforts de notre gouvernement comprennent également deux grandes initiatives qui sont financées dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles 2013-2018 du Canada. Cela permet de développer et d'améliorer la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Cela aide aussi à promouvoir la dualité linguistique dans le système de justice.
[Traduction]
Le ministère facilite également l'accès à la justice grâce à son programme juridique de partenariats et d'innovations qui finance des projets dans divers domaines comme l'accès à la justice, la violence familiale, la vulgarisation et l'information juridiques et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. À cet égard, nous prévoyons faire un transfert de 1,26 million de dollars des contributions aux subventions.
Monsieur le président, je sais que vous suivez ces transferts de près. Ce transfert est avantageux parce qu'il servira à alléger le fardeau administratif des organismes de vulgarisation juridique et des organismes non gouvernementaux. Il vise au bout du compte à leur faciliter l'accès au financement à partir d'une approche basée sur le risque élevé et à garantir que le système juridique demeurera accessible et efficace.
Au sujet de l'aide juridique, lors de la rencontre fédérale-provinciale-territoriale dont j'ai parlé, mes collègues et moi avons réitéré notre engagement de continuer à collaborer pour renforcer les services d'aide juridique et tout le système de justice pour bien servir les Canadiens. Dans le présent budget, l'augmentation totale des fonds est de 14,4 millions de dollars de 2014-2015 à 2016-2017, ce qui comprend les fonds consacrés à l'aide juridique aux immigrants et aux réfugiés, l'assignation d'avocats par le tribunal de la cour dans le cadre de poursuites fédérales, et les activités de programme.
[Français]
Afin de garantir l'accès à la justice, nous devons faire tout ce que nous pouvons pour protéger les Canadiens et assurer que nos rues et nos communautés sont sécuritaires.
Notre gouvernement met en avant plusieurs initiatives en matière de justice pénale afin d'assurer la sécurité de nos citoyens. En effet, c'est la plus importante responsabilité de tout le gouvernement.
[Traduction]
Parmi ces initiatives, mentionnons la Stratégie de justice applicable aux Autochtones, renouvelée dans le budget 2014 à hauteur de 22,2 millions de dollars sur deux ans. Ce programme, cofinancé avec les provinces et les territoires, sert à mettre en place des programmes de justice communautaires éprouvés qui réduisent la criminalité et offrent des solutions de rechange à l'incarcération pour les crimes mineurs lorsque les circonstances le permettent.
Nous poursuivons aussi nos efforts dans le cadre du Fonds de justice pour les jeunes afin de mettre en place un système de justice juste et efficace. Ce fonds fournit des subventions et des contributions à divers organismes. Depuis quelques années, les demandes de subventions pour des petits projets ont diminué, alors que les demandes de contributions pour des projets-pilotes pluriannuels continuent d'augmenter. Je peux vous donner quelques exemples, surtout en milieu urbain: l'initiative de lutte contre les armes et les gangs, les programmes axés sur le traitement de la toxicomanie et la santé mentale et, un problème tout particulièrement important dans les Prairies mais aussi, je pense, partout au pays, les troubles causés par alcoolisation foetale. Pour répondre à la demande croissante, monsieur le président, nous transférons 600 000 $ des subventions aux contributions, afin de mieux répondre aux besoins de nos partenaires.
Une autre initiative qui vise à assurer la protection de nos citoyens est celle mise en place dans la foulée de l'arrêt Bedford. Vous vous souviendrez que c'est en décembre dernier que la Cour suprême à invalider trois articles importants en matière de poursuites. Le gouvernement a donc pris des mesures pour protéger nos collectivités, les personnes vulnérables et ceux qui participent à ces activités fondamentalement dangereuses en concentrant les ressources policières sur les clients et les agresseurs.
Je suis heureux d'annoncer que le projet de loi , la Loi sur la protection des collectivités et des personnes victimes d'exploitation, entrera en vigueur la semaine prochaine. Je tiens à remercier le comité de son attention et de s'être réuni pendant les mois d'été pour se pencher sur ce dossier important. Cette loi nous permettra de protéger ceux qui offrent des services sexuels, et de poursuivre ceux qui les exploitent. Les collectivités seront aussi mieux protégées contre les dangers de la prostitution, et cela réduira aussi, espérons-le, la demande de services sexuels.
De plus, les ministères de la Justice et de la Sécurité publique appuieront les programmes de sortie pour ceux qui veulent quitter le milieu. Comme vous le savez, le montant prévu est de 20 millions de dollars. Nous en saurons davantage au cours des prochains jours sur les services offerts en matière d'éducation, de formation professionnelle, de garde d'enfants, de consultation, de santé mentale et de toxicomanie. Tous ces éléments sont des maillons importants de ce problème complexe.
Monsieur le président, le gouvernement continue également de mettre en place de nouvelles initiatives pour que les victimes de crime soient traitées avec la courtoisie, la compassion et le respect qu'elles méritent. À titre d'exemple, au cours des sept dernières années, le ministère a consacré plus de 140 millions de dollars à des initiatives pour mieux faire entendre leur voix. Les sommes sont versées au fonds pour les victimes, un programme de contributions et de subventions qui offre du financement aux provinces, aux territoires et à des organismes non gouvernementaux qui veulent mettre en place des projets et des activités qui répondent aux objectifs du fonds.
Nous collaborons aussi étroitement avec les autres ministères, notamment celui de la Sécurité publique, comme je l'ai mentionné, et celui du Travail et de la Condition féminine.
Monsieur le président, parmi les autres initiatives, j'aimerais mentionner, comme vous le savez, le Bureau de l'ombudsman des victimes, un élément clé pour améliorer... et qui comprend une stratégie de 10 millions de dollars pour financer les centres d'appui aux enfants mis en place partout au pays.
Je pourrai vous fournir d'autres renseignements sur ces centres, mais pour l'instant, je mentionnerai qu'il s'agit, à mon avis, de l'une des initiatives les plus humaines que nous ayons mises en place au cours des dernières décennies et qui contribue directement aux efforts visant à réduire les torts causés inévitablement aux enfants qui ont été agressés sexuellement. Les quelque 22 centres créés à ce jour aident grandement notre système de justice à remédier aux conséquences dévastatrices de l'exploitation des enfants. Depuis que je suis ministre de la Justice, les centres d'appui aux enfants et aux adolescents sont l'initiative la plus remarquable qu'il m'ait été donné de voir.
Monsieur le président, parmi les autres priorités importantes du gouvernement pour protéger les citoyens, permettez-moi de mentionner la lutte contre la conduite avec facultés affaiblies, qui constitue encore aujourd'hui la principale cause de décès criminels au Canada. Dans ce dossier, je demeure déterminé à déposer des mesures législatives pour moderniser et alourdir les peines liées à la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue dans le Code criminel.
Monsieur le président, chers collègues, tout cela pour vous dire que les fonds alloués au ministère sont bien utilisés et justifiés.
[Français]
En conclusion, j'aimerais vous remercier, monsieur le président, ainsi que tous les membres du comité, de votre travail essentiel et de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous.
Le financement que reçoit le portefeuille du ministère de la Justice donne des résultats pour les Canadiens. Je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir pour veiller à ce que ces fonds continuent d'être utilisés de manière judicieuse.
Ce sera un plaisir pour moi de répondre maintenant à vos questions.
Je vous remercie.
:
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur le ministre, d'avoir accepté de changer la date de votre présence devant notre comité pour que nous puissions étudier les crédits qui vous sont alloués en vertu du Budget supplémentaire des dépenses (B) 2014-2015.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je m'en voudrais de ne pas vous faire part de mes pensées sur la nouvelle du jour. Elle fait en sorte que le comité est suivi aujourd'hui avec probablement beaucoup plus d'intérêt qu'à bien d'autres occasions quand nous traitons de différents sujets. Il s'agit de la nomination faite à la Cour suprême du Canada afin de combler le poste qu'occupait l'honorable juge Lebel, qui prend sa retraite. J'en profite pour le saluer aussi pour toutes ses années de service. Comme avocate du Québec, je peux être fière du travail qu'a accompli le juge Louis Lebel au cours de sa carrière.
Il sera remplacé par Me Suzanne Côté. C'est la première fois que je vois une avocate être nommée directement à la Cour suprême. Ce n'est pas courant, mais c'est intéressant. Je suis très heureuse que vous ayez enfin accepté de nommer une femme à la Cour suprême du Canada. Je vous en félicite. Comme vous le savez, je vous ai beaucoup parlé de cette question. À mon avis, il est important que la Cour suprême représente, autant qu'il est possible de le faire avec un chiffre impair au chapitre du nombre de membres de la cour, l'égalité entre les hommes et les femmes. C'est une égalité qui doit prévaloir au Canada. Je vous félicite à cet égard.
Aujourd'hui, on entend de bonnes choses au sujet de l'honorable Suzanne Côté. D'ailleurs, c'est ainsi que l'on devra l'appeler bientôt. Ne vous en déplaise, vous savez comme nous que quand on parle de la Cour suprême du Canada, la question du processus est toujours l'éléphant blanc dans la pièce.
J'aimerais ouvrir une petite parenthèse à ce sujet. Votre gouvernement vient de procéder à la dernière nomination à la Cour suprême du Canada. En effet, à moins d'une démission, je ne crois pas qu'il y aura un poste à combler à la Cour suprême avant un certain nombre d'années. On devrait peut-être prendre ce temps, monsieur le ministre, pour réfléchir au processus. Sur le terrain, les gens ont plusieurs idées. Différents spécialistes en ont parlé et différentes suggestions ont été formulées. Au fil des ans, c'est-à-dire depuis le début des années 2000, on a tenté d'utiliser différentes méthodes. Je pense que les Canadiens ont droit à ce que le processus soit le plus transparent possible.
Au-delà du fait que la nomination de Me Côté soit excellente, j'aimerais pouvoir répondre à tous ceux qui me demanderont s'il s'agissait d'un processus politique ou d'un processus transparent. Toutefois, je ne pourrai pas le faire parce que tout a été fait entre quatre murs. C'est toujours un peu irritant. Je pense qu'il y a moyen d'arriver aux mêmes décisions en ayant recours à un processus un peu plus ouvert.
J'espère que vous voudrez bien, monsieur le ministre, permettre à ce comité ou à un autre, peu importe lequel, d'étudier la question afin de voir si l'on ne pourrait pas faire mieux. Quand je dis « faire mieux », je ne parle pas nécessairement d'une meilleure nomination, mais bien d'améliorer le processus. C'est l'un de mes souhaits par rapport à la situation. Je trouve regrettable qu'il n'y ait pas de comité ad hoc parce qu'il est toujours intéressant de présenter de nouveaux juges à la population canadienne. Cela conclut cette partie de mon intervention.
J'aimerais aussi qu'on le fasse pour toutes les autres nominations. On parle ici du budget. Certaines choses font déjà partie de vos budgets, monsieur le ministre, comme certains postes de juges qui ne sont toujours pas comblés. Je suis contrariée, étant donné qu'on parle d'accès à la justice, mais qu'il y a encore 23 postes qui ne sont pas comblés à la Cour supérieure de l'Ontario. Les juges que je rencontre au cours de mes consultations me disent tous que cela a d'énormes répercussions sur l'accès à la justice et sur la façon dont la justice est rendue. Les juges sont parfois débordés. Il faudrait que l'on puisse s'en occuper et que l'on s'assure de combler ces postes le plus rapidement possible.
Il faut aussi s'assurer que le processus de nomination de ces juges n'est pas politique. Il doit être le plus transparent possible, parce que, comme vous me l'avez dit à la Chambre cette semaine, on vise toujours à récompenser le mérite, c'est-à-dire la compétence et les qualifications des personnes. Cela devrait aussi être le cas pour ces tribunaux.
Je vous laisse réagir à ces quelques commentaires.
:
Monsieur Casey, permettez-moi de donner cette réponse. Il est plutôt ironique qu'à titre de représentant du Parti libéral, vous vous en remettiez aux propos que j'ai tenus en 2004, alors qu'ils ont été rejetés, à juste titre, par le ministre de la Justice de l'époque, M. Cotler, au point où ils ont été inclus dans un rapport dissident dans lequel on indiquait clairement que votre parti — même si vous n'y étiez pas — a pris la décision manifeste de ne pas suivre cette recommandation.
Divers processus ont été utilisés au fil du temps. Comme je l'ai indiqué à Mme Boivin, lorsque nous avons formé le gouvernement, en 2006, nous avons institué un mécanisme plus ouvert et plus inclusif, ce qui était sans précédent dans le système de justice canadien. Il comportait ce mécanisme parlementaire constitué d'un comité, de recommandations et d'une liste de candidats. Il va sans dire que je crois que les processus peuvent toujours être améliorés et qu'il convient de les revoir de temps à autre.
Il faut aussi garder à l'esprit les circonstances et la mentalité de l'époque. Par exemple, nous devions agir rapidement dans le cas de la nomination du juge Cromwell, si je me rappelle bien, en raison de l'imminence d'une élection et de la nécessité d'avoir un effectif complet. De même, plus récemment, par rapport aux nominations du juge Gascon et de Mme Côté, je dirais que c'est l'importance d'avoir une représentation complète pour le Québec qui nous a incités à agir et à recourir à un processus différent.
Quant à l'aspect consultatif de cet exercice, est-il utile ou nuisible d'avoir une participation parlementaire qui consiste à demander à un comité de mener des consultations et d'en faire rapport soit à moi-même, soit au premier ministre, par mon intermédiaire? Cela reste à voir. Lorsqu'il y a des fuites, que le processus lui-même est contesté et que des personnes qui, autrement, voudraient que leur candidature soit étudiée sont dissuadées de la présenter parce que leur nom pourrait être divulgué, il faut en tenir compte, et c'est ce que nous avons fait dans ce cas précis. Par conséquent, nous avons choisi de procéder autrement et de consulter directement les intervenants les plus importants. Dans ce cas, nous avons consulté la Cour suprême du Canada, la Cour supérieure du Québec, d'éminents membres du milieu juridique, le ministre de la Justice du Québec, évidemment, d'autres spécialistes et des juges à la retraite, dans certains cas. Tous ont étudié cette importante décision et nous ont fourni des conseils.
:
Ce sont les mêmes raisons qui expliquent que le Parti libéral l'avait rejetée à l'époque. J'ai lu cela attentivement. Je suis entièrement favorable à la modification du processus et à son amélioration. Je pense qu'on recherche tous cela.
J'ai pris bonne note des propos du ministre. Il semble ouvert à essayer de trouver une formule qui, en définitive, permettrait à tous de se dire satisfaits de la qualité de ce processus avec de bonnes nominations et qu'il soit suivi. Or, ce n'est toujours pas le cas.
J'ai plusieurs problèmes avec cette motion. Entre autres, la motion mentionne Vic Toews et compagnie. Avec tout le respect que je leur dois, je ne partage pas nécessairement plusieurs de leurs opinions. Comme cela me pose un peu problème, ça commençait mal.
Ensuite, là où le bât blesse davantage, c'est quand il est écrit ce qui suit:
[Traduction]
...[u]ne liste restreinte des candidats doit être soumise à l'examen public d'un comité parlementaire » et « [l]e candidat retenu doit être ratifié par le Parlement ».
[Français]
Pourquoi ai-je un problème avec ces deux éléments? C'est qu'on parle de ce qui suit:
[Traduction]
« Une liste restreinte des candidats doit être soumise à l'examen public »...
[Français]
J'ai pris part à deux reprises au processus confidentiel. Je respecte énormément l'aspect confidentiel de ce processus pour la simple et bonne raison qu'il en va de la protection des gens dont le nom est sur nos listes. Je suis d'accord avec le ministre à ce propos. Je pense que même les collègues libéraux devraient être favorables à cela, et ce, non pas pour nous faire plaisir, mais pour appuyer le principe de la confidentialité. Je vais toujours faire bien attention à ce principe.
Imaginez la chose suivante. Nous avons considéré la nomination de juges. On a vu ce qui est arrivé avec la liste publiée par le Globe and Mail. Je ne confirmerai jamais, jusqu'à l'heure de ma mort, si c'était la liste qui était devant nous. Admettons, à titre de simple hypothèse, que c'était le cas. Mettez-vous à la place des juges qui n'ont pas été retenus. Avoir été considéré a un impact, qu'on le veuille ou non, surtout à ce haut niveau. Les gens se connaissent. Ils savent qui a une bonne réputation, par exemple, chez les juges de la Cour d'appel du Québec. Les noms circulent chaque fois qu'un poste va se libérer.
Je le sais puisque je fais partie du Barreau du Québec. Mes collègues se parlent. Des gens me parlaient. Ils me disaient qu'ils espéraient qu'un tel ou une telle soit sur notre liste. L'obligation de confidentialité est pour moi extrêmement importante. Elle protège la carrière et la continuation de la carrière de ces candidats.
Par ailleurs, le processus d'examen public d'un comité parlementaire doit être ratifié par le Parlement. Dans ce contexte, je veux éviter, autant que possible, la méthode américaine. J'ai trouvé que le ministre, qui n'occupait pas cette fonction à l'époque, était dans l'erreur. Je suis heureuse qu'il ait changé un peu sa perception au fil des années et qu'il ait proposé cela.
Je pense par contre qu'on doit travailler à trouver un meilleur processus. J'allais faire une proposition. On n'aura toutefois peut-être pas le temps de s'en occuper tout de suite. Je pense cependant que j'ai aussi le droit de présenter une motion pendant qu'on parle d'un sujet donné, en autant qu'elle porte sur le même thème. Je ne pense pas que mon amendement à la motion sera adopté, à moins que M. Casey ne soit en faveur de celui-ci.
Ainsi, je proposerais plutôt que le texte se lise comme suit:
[Traduction]
« Que le comité — on efface tout le reste — entreprenne une étude en vue d’en faire rapport à la Chambre, sur le processus de nomination des juges aux tribunaux de compétence fédérale, notamment la Cour suprême du Canada, qui soit le meilleur et le plus transparent. »
[Français]
Je pense qu'on en est rendus là. Nous sommes à deux ou trois ans d'une prochaine nomination. Il n'y a pas de délai pour entreprendre une telle chose, mais on devrait quand même s'y attaquer.
Cela étant dit, je ne peux pas voter en faveur de cette motion en raison des deux motifs fondamentaux que j'ai mentionnés. Selon moi, ce ne sont pas des solutions. Je ne voudrais jamais qu'on me voie comme étant favorable à cela et qu'on dise que je privilégie cette façon de procéder.
:
D'accord. Nous allons maintenant discuter de la motion de M. Casey.
Je suis d'accord avec Mme Boivin. Il est pour le moins étrange que le Parti libéral propose que le comité adopte un rapport dissident du Parti conservateur datant de mai 2004, un rapport dissident au rapport du comité d'alors, qui était majoritairement composé de députés libéraux et sous la présidence de M. Lee qui, à l'époque, était le député libéral de la circonscription de Scarborough—Rouge River. Je crois savoir que ce qu'on y proposait était très différent de ce que son parti et l'ancien ministre libéral de la Justice avaient décidé de faire pour ce qui est de la nomination des juges à la Cour suprême.
Le rapport du comité renfermait huit recommandations à l'intention du gouvernement sur la façon de sélectionner les juges de la Cour suprême. En fait, à ce moment-là, le gouvernement n'a pas donné suite à la majorité de ces recommandations.
Selon moi, M. Casey devrait aller en discuter avec ses anciens collègues, notamment l', l' , l' , et l', qui font actuellement partie de son caucus. Il y a également Marlene Jennings, qui l'a précédé en tant que porte-parole libérale en matière de justice, et l'honorable Andy Scott, qui était ministre à une certaine époque. Tous ces gens se sont opposés à ce qu'il propose maintenant.
Il est intéressant de constater le nombre de membres actuels de son caucus qui, en mai 2004, n'étaient pas favorables à ce qu'il nous propose aujourd'hui; apparemment, il veut adopter un rapport dissident rejeté il y a plus de 10 ans par ses propres collègues, et il nous présente cette idée, comme si elle venait de son parti, sur la façon dont les juges de la Cour suprême devraient être sélectionnés.
Parmi les recommandations, on proposait qu'un comité consultatif, composé d'un député de chaque parti, dresse la liste des candidats au poste de juge de la Cour suprême. Je suis certain que M. n'a jamais fait ça, ni aucun autre ministre de la Justice que je connais.
Je trouve la situation très étrange. Chose certaine, c'est la première fois, depuis que je suis député à la Chambre des communes, qu'un membre d'un autre parti fouille dans les archives pour sortir une proposition qu'ont faite certains de mes collègues par le passé et à laquelle son propre parti s'était opposé, et nous la présente comme quelque chose que le gouvernement d'aujourd'hui devrait adopter.
Je pense que nous avons entendu la préoccupation du ministre quant au processus de nomination du juge Nadon. Je faisais partie du processus lorsque les juges Karakatsanis et Moldaver ont été sélectionnés. Le processus s'était très bien déroulé. Tout le monde avait signé un accord de confidentialité et s'y était conformé, et aucun nom n'avait été révélé. Je suis d'accord avec Mme Boivin pour dire que c'est problématique lorsqu'il y a une fuite, comme nous l'avons vu dans le Globe and Mail.
Personnellement, j'ai été assez scandalisé lorsque j'ai vu la liste dans le Globe and Mail. Je me souviens de l'époque où je siégeais au comité. On nous avait avertis d'être extrêmement prudents pour s'assurer qu'aucun nom ne soit révélé. C'est comme postuler pour n'importe quel emploi. Si vous occupez déjà un poste et que vous postulez à un autre emploi, vous ne voulez pas nécessairement que vos collègues soient au courant.
Bon nombre des personnes qui figurent sur la liste travaillent actuellement dans d'autres instances. Certaines d'entre elles travaillent dans des cabinets d'avocats ou ailleurs. Le comité consulte une multitude de personnes dans le système judiciaire au Canada afin d'obtenir leur opinion sur chacun des candidats. De toute évidence, cela compromettrait leur point de vue si ces personnes savaient que les conseils qu'elles donnent seront rendus publics.
Pour toutes ces raisons, je suis d'accord avec Mme Boivin et avec le ministre pour dire que cette motion devrait être rejetée. C'est d'ailleurs l'une des motions les plus étranges que j'ai vues depuis que je suis ici.