:
Je vous remercie monsieur le président, ainsi que mes collègues membres du comité.
Je suis heureux d'être accompagné de fonctionnaires de Justice Canada. Nous sommes ici pour répondre à vos questions sur le projet de loi .
[Français]
Je suis très heureux d'être devant le comité pour parler du projet de loi .
[Traduction]
Monsieur le président, chers collègues, j'espère que vous jugerez, comme moi, que le projet de loi constitue un texte législatif important pour assurer la protection des Canadiens contre les crimes commis sur Internet ou en ligne, et ce, en totale conformité avec le droit canadien.
L'un des moyens par lequel le projet de loi atteint cet important but consiste à ériger en infraction criminelle la forme particulièrement odieuse et insidieuse de cyberintimidation qu'est la distribution non consensuelle d'images intimes. Cette forme de cyberintimidation a saboté des vies et causé des pertes de vie. Je ne puis m'empêcher de penser aux jeunes Rehtaeh Parsons, Amanda Todd, Todd Loik et d'autres encore qui ont été victimes de ce genre d'activité insidieuse.
Le deuxième moyen par lequel le projet de loi protégera le public est la série de changements grâce auxquels le Code criminel et d'autres lois fédérales ne seront pas dépassés par le rythme rapide du changement technologique. Le besoin de moderniser est au coeur de cette intention générale.
Cela étant, le projet de loi prévoit certaines actualisations mineures d'infractions existantes, concurremment à une modernisation des pouvoirs, judiciairement autorisés, exercés par la police pour enquêter sur les crimes commis au moyen de réseaux électroniques ou pour recueillir des éléments de preuve électroniques. J'insiste sur le fait qu'il s'agit ici de pouvoirs « judiciairement autorisés ».
Pour commencer par la cyberintimidation, le projet de loi, comme je l'ai mentionné, prévoit l'établissement d'une nouvelle infraction dans le Code criminel, soit la distribution non consensuelle d'images intimes. Pour l'essentiel, cette disposition interdirait le partage d'images de nudité ou à caractère sexuel, telles que définies, sans consentement de la personne qui y figure. Ce genre d'action est en effet une tentative très malfaisante et cruelle d'humilier une personne, ou pire, qui, comme je l'ai déjà dit, a un effet pernicieux qui n'est devenu que trop courant, surtout chez les jeunes.
La nouvelle infraction envisagée corrigerait une lacune constatée en droit pénal et donnerait suite à l'une des recommandations formulées par les responsables fédéraux, provinciaux et territoriaux dans leur rapport de juin 2013 sur la cyberintimidation et distribution non consensuelle d'images intimes.
Il n'est pas sans intérêt de signaler, monsieur le président, que ce rapport a reçu l'approbation de tous les ministres — fédéral, provinciaux et territoriaux — de la justice et de la sécurité publique. Les articles actuels du Code criminel visant l'intimidation, le harcèlement, et les articles connexes, datent de l'époque du téléphone à cadran. Le besoin de modernisation est bien réel.
Le projet de loi contient une définition en trois parties des images intimes. En résumé, l'image intime est celle qui fait voir une personne nue ou se livrant à une activité sexuelle, qui a été réalisée dans un lieu privé et qui porte atteinte à la vie privée de la personne qui y figure. Cette approche, comme l'infraction actuelle de voyeurisme établie à l'article 162, est conçue en vue de protéger la vie privée de la personne qui figure dans l'image.
Il va sans dire que cet article du Code criminel et ses dispositions connexes ne sont qu'une réponse partielle. Comme les membres du comité en sont conscients, il faudra une stratégie beaucoup plus globale. Un grand effort d'information et d'éducation du public est nécessaire. Nous avons besoin d'un engagement plus large des autorités d'application de la loi et de l'appareil judiciaire lui-même. De nombreux efforts d'information publique ont été déployés, notamment les journées roses et les journées anti-intimidation consacrées à diverses activités de divertissement et de sport. Une approche holistique est nécessaire.
[Français]
Le projet de loi comprend également plusieurs modifications complémentaires à la nouvelle infraction proposée.
Par exemple, le tribunal serait autorisé à ordonner à une personne qui possède des images intimes de contracter un engagement de ne pas troubler l'ordre public, lorsqu'il existe des motifs raisonnables de craindre que cette personne ne commette la nouvelle infraction proposée.
[Traduction]
Outre les mesures préventives, telles que les engagements de ne pas troubler l'ordre public, qui ont un effet dissuasif, les tribunaux auraient aussi le pouvoir d'ordonner le retrait d'images intimes non consensuelles qui se trouvent sur l'Internet.
De plus, monsieur le président, sur déclaration de culpabilité en vertu de ce nouvel article, le tribunal pourra ordonner la saisie d'équipement — ordinateur ou appareil à main —, rendre une ordonnance d'interdiction restreignant l'accès du contrevenant à l'Internet ou à d'autres réseaux numériques et ordonner au contrevenant de verser un dédommagement à la victime qui a eu à engager des dépenses pour retirer de l'Internet les images intimes non consensuelles.
Le projet de loi prévoit également de moderniser les pouvoirs d'enquête. Ces outils mis à jour aideraient la police à enquêter non seulement sur la nouvelle infraction, mais aussi sur tous les crimes commis en ligne et tout autre crime comportant des éléments de preuve numériques, par exemple la fraude ou la distribution de pornographie juvénile. Ces modifications sont, à mes yeux, depuis longtemps nécessaires, puisque la police affirme que, de nos jours, plus de 80 % des crimes majeurs laissent des traces électroniques.
Bien que les organismes canadiens d'application de la loi continuent d'utiliser des outils d'enquête antérieurs à Internet, conçus premièrement pour recueillir des éléments de preuve matériels, il se fait de l'excellent travail, comme le comité est sans doute au courant, au Centre canadien de protection de l'enfance. Il accomplit un travail formidable par sa collaboration avec les forces policières partout au pays et pas ses interventions auprès des victimes.
Je tiens à dire clairement que, s'il est vrai que certaines de ces modifications étaient contenues dans un projet de loi antérieur, le projet de loi ne reprend pas les aspects les plus controversés de l'accès sans mandat. En particulier, monsieur le président, le projet de loi C-13 ne contient aucune disposition qui permettrait un accès sans mandat aux renseignements sur un abonné ou qui imposerait des obligations quant à la modification de l'infrastructure des télécommunications.
Ces modifications ont trait aux pouvoirs d'enquête et ont été vivement recommandées par le même groupe de travail FPT qui prônait la création d'une nouvelle infraction pour lutter contre la cyberintimidation et la distribution non consensuelle d'images intimes. Ce groupe de travail a reconnu l'important lien existant entre la nouvelle infraction prévue, qui crée une protection, et la nécessité de donner à la police les outils voulus pour enquêter sur les situations visées par la nouvelle disposition et les autres activités criminelles en ligne qui s'y apparentent. Ces deux éléments — l'établissement d'une nouvelle infraction et la capacité de la réprimer en vertu des dispositions actuelles — sont, il me semble, indissociables.
Pour illustrer rapidement la nécessité de ces modifications de mise à jour, il est utile de considérer deux renseignements élémentaires, mais essentiels des télécommunications: le numéro de téléphone et l'adresse IP. Pour obtenir un numéro de téléphone, la police peut demander l'actuelle ordonnance de communication dans le mandat autorisant l'installation d'un enregistreur de numéro, selon le nouveau paragraphe 492.2(2). Ce mandat s'appui sur le critère des motifs raisonnables de soupçonner qu'une infraction a été ou sera commise. C'est le critère habituel. Pour obtenir le même type de renseignements dans le contexte d'Internet, par exemple une adresse IP ou un courriel, la police doit, à l'heure actuelle, recourir à une ordonnance de communication générale, dont la délivrance est basée sur l'existence de motifs raisonnables de soupçonner qu'une infraction a été ou sera commise, ce qui est un critère différent, plus exigeant.
Il ne s'agit pas seulement d'un traitement dissymétrique de renseignements de nature similaire, de renseignements de base, c'est aussi, dans bien des cas, un empêchement pour la police, dans le contexte de la criminalité sur Internet, d'entreprendre une enquête, faute de pouvoir répondre à ce critère plus exigeant. Le projet de loi cherche à corriger cette situation.
S'agissant du motif raisonnable de soupçonner, j'aimerais bien, monsieur le président, passer en revue quelques-unes des modernisations proposées. L'un des nouveaux outils prévus est la préservation des données. Pour l'essentiel, les outils de préservation des données sont appelés ordonnances « pour ne pas effacer », qui permettent à la police de s'assurer que des données informatiques spécifiques sont sauvegardées en attendant que le tribunal l'autorise à obtenir ces données en tant qu'éléments de preuve. Je sais qu'il y a d'anciens policiers au comité et ils pourront discuter de cette importante mesure de préservation.
Ces outils apporteront un appui essentiel aux enquêtes sur les infractions où les éléments de preuve se présentent en grande partie sous une forme électronique. Nous sommes à une époque où des éléments de preuve critiques peuvent, parfois par inadvertance, parfois délibérément, être supprimés d'une seule touche de clavier. J'affirme avec force que la police a besoin de ce pouvoir.
Les mesures de préservation des données comportent bon nombre d'importantes sauvegardes. par exemple, à l'expiration d'un ordre ou d'une ordonnance de préservation, la personne concernée est tenue de détruire toutes les données informatiques qu'elle a préservées sauf celles qui seraient normalement conservées dans le cadre de son activité commerciale.
Le projet de loi prévoit également la mise à jour de la structure existante des ordonnances de communication sous contrôle judiciaire. Ces modifications permettront de créer une trousse d'outils complète comprenant l'ordonnance de communication générale, comparable à un mandat de perquisition, et quatre ordonnances de communication spécifiques et d'application plus restreinte qui, dans bien des cas, aideront la police à entreprendre son enquête.
Les quatre ordonnances de communication spécifiques envisagées dans le projet de loi permettront à la police d'obtenir quatre types d'information: d'abord des données pour déterminer où se trouvait une personne ou une chose à un moment précis, donc des données de localisation; en deuxième lieu, des données relatives à l'occurrence des télécommunications, comme les courriels associés à ces télécommunications, donc des données de transmission; en troisième lieu, des données permettant de retracer une télécommunication afin de déterminer l'identité du suspect; en dernier lieu, les renseignements financiers de base, comme le numéro ou même l'existence d'un compte bancaire d'un particulier. Il importe de signaler que ce type d'ordonnance de communication de renseignements financiers existe déjà.
Le projet de loi prévoit la mise à jour de deux pouvoirs judiciaires existants, ceux touchant aux mandats qui autorisent l'installation, d'une part, d'un dispositif de localisation et, d'autre part, d'un enregistreur de numéro. Ces types de mandat sont uniques en ce sens qu'ils permettent à la police de recueillir l'information en temps réel et, bien que le projet de loi ait été critiqué dans les médias en particulier parce qu'il diminuait censément l'examen judiciaire, je ferais valoir et soulignerais que les modifications proposées en matière de mandats ayant pour objet la localisation de particuliers a, au contraire, pour effet de faire passer le critère de délivrance du mandat de « motifs raisonnables de soupçonner » à « motifs raisonnables de croire ». Cette protection accrue de la vie privée tient compte des progrès technologiques et de leurs répercussions sur la vie privée des particuliers. Toutefois, la police demeure en mesure de mener des opérations de localisation en vertu du critère actuel des « motifs raisonnables de soupçonner ».
Le projet de loi comprend des modifications qui visent à réaliser des gains d'efficience relativement aux demandes d'écoute électronique. Ces modifications feront en sorte d'uniformiser dans tous les tribunaux canadiens les processus qui s'appliquent lorsqu'une autorisation d'écoute électronique est demandée. Elles établiraient une seule demande pour les mandats et ordonnances judiciaires liés à l'exécution d'une autorisation d'écoute électronique. Le nouveau processus habiliterait le juge qui accorde l'autorisation d'écoute électronique à délivrer également les autres mandats ou ordonnances complémentaires sans qu'il soit nécessaire de produire une demande distincte. Dans certaines juridictions, la police doit se présenter devant plusieurs juges pour obtenir les pouvoirs connexes, par exemple des mandats de localisation, ce qui est non seulement inefficace, mais empêche aussi le juge d'avoir une vue d'ensemble de l'enquête.
En dernier lieu, monsieur le président, j'aimerais prendre un moment pour corriger quelques-uns des malentendus entourant le projet de loi .
Certains ont, à tort, laissé entendre que le projet de loi encouragerait les fournisseurs de services de télécommunication et les banques à divulguer sans autorisation des renseignements sur leurs clients. Je tiens à dire clairement ce qu'il en est. Le projet de loi n'accorderait aucun nouveau pouvoir à la police pour ce qui de la divulgation volontaire, ni ne créerait de mécanisme pour contourner le contrôle judiciaire nécessaire. Pour commencer, la disposition en question, le nouvel article 487.0195, est une disposition dite « pour plus de sûreté » et, à ce titre, ne saurait accorder de nouveaux pouvoirs à la police. Dans le cadre de ses fonctions générales, la police peut déjà obtenir, sans ordonnance judiciaire, de l'information divulguée volontairement par un tiers à condition que ce tiers — et c'est là l'important — ne soit pas par ailleurs légalement tenu de ne pas la divulguer. Par exemple, un tiers peut actuellement aider la police en lui communiquant de l'information pour peu qu'il ne manque pas à ses obligations en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Les personnes qui apportent leur aide à la police de cette manière sont à l'abri de poursuites.
Pour que les choses soient claires, j'insiste sur le fait que ce pouvoir existe déjà en common law. La modification explicative de 2004 avait pour objet de préserver ce pouvoir. Elle est reprise ici dans le même but. Les modifications contenues dans le projet de loi ne sont pas conçues pour modifier de quelque façon cette situation, mais bien pour rendre les dispositions plus claires et plus transparentes.
Il a également été suggéré que le projet de loi instaure de nouveaux types de mandats permettant à la police de recueillir des métadonnées en appliquant un critère diminué pour la délivrance d'une ordonnance de communication. Cela aussi est une erreur. Les métadonnées désignent, comme les députés le savent, une large catégorie d'information, parfois décrite comme des données sur des données. Il s'agit, par exemple, d'informations de base sur un document électronique, comme un logiciel, la police de caractère utilisée, la taille, le nombre de kilo-octets, la taille des caractères, etc. Dans le cas d'une photo électronique, les métadonnées peuvent comprendre le nombre de pixels, le type de caméra et peut-être la date, l'heure et le lieu où la photo a été prise. Certains ont laissé entendre qu'elles pourraient aussi comprendre des renseignements personnels. Il importe de signaler que le projet de loi , d'après la définition qu'il contient des données de transmission, ne prévoit pas la saisie de ce type d'information.
En fait, la transmission est définie de façon restreinte et ne s'applique qu'aux données relatives à la télécommunication proprement dite. La définition des données de transmission est l'équivalent moderne de l'information sur les appels téléphoniques, non sur la teneur de la conversation téléphonique. Les dispositions proposées visent à assurer le traitement semblable de renseignements de nature similaire.
En terminant, monsieur le président, j'insiste sur le fait que cet ensemble de réformes procède d'une approche ciblée pour contrer des formes malignes de cyberintimidation. Toutes les modifications qu'il est proposé d'apporter aux pouvoirs d'enquête visent à donner à la police les outils appropriés pour enquêter sur les crimes en cette ère de l'Internet, tout en réduisant au minimum les répercussions sur la protection de la vie privée des Canadiens.
Je vous remercie de votre attention et j'attends vos questions.
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Je peux vous parler du projet de loi Le projet de loi est une autre mesure, ce n'est pas la nôtre, elle relève je crois du . Il faudrait que vous interrogiez d'autres fonctionnaires ou personnel, monsieur le président, en ce qui a trait à ce projet de loi.
Quant à l'interrelation, comme le ministre l'a dit, la disposition du Code criminel adoptée en 2004 avait pour but de préciser que les ordonnances de production promulguées par le Parlement en 2004, ne devaient nullement affecter le pouvoir des citoyens de fournir des informations à la police spontanément ou de leur propre gré, qu'il s'agisse de télécommunications ou d'une personne qui se trouve à la porte, tel que prescrit par la common law. Quand la police frappe à la porte pour dire qu'il y a eu toute une pagaille dans la rue la nuit dernière et demande si la personne a vu quelque chose, celle-ci a le choix de dire qu'elle ne veut pas parler ou de dire « oui, j'ai tout vu et je vais tout vous raconter ». Cette personne serait protégée. C'est le pouvoir du droit commun. C'est énoncé à l'article 25 du Code criminel.
L'institution d'un pouvoir obligeant les personnes à fournir l'information a suscité des inquiétudes. On se demandait notamment si cela pouvait dissuader les gens de fournir l'information de leur propre gré. C'est pourquoi l'article 487.014 a été créé à ce moment-là, pour instaurer une plus grande certitude. Comme il mentionne que c'est l'intention visée, le fait qu'il y ait une ordonnance de production n'affecte pas la capacité des gens à fournir des informations de leur propre gré, et la disposition prescrit également que les gens qui fournissent des informations volontairement bénéficient de l'article 25 du Code criminel. L'article 25 du Code criminel est la disposition qui dit que, si vous faites quelque chose que la loi vous autorise à faire, vous êtes à l'abri de toute responsabilité civile ou criminelle.
Ce que fait le nouvel amendement, c'est de mettre à jour la disposition de l'article 487 existant, pour pouvoir faire deux choses. La première, parce qu'il existe d'autres types d'outils qui ont été créés par le projet de loi, dont les ordonnances de préservation, c'est la conservation volontaire de données par une entreprise. Il est clairement indiqué que l'entreprise serait protégée contre toute responsabilité civile ou criminelle, non seulement pour avoir fourni des données, mais aussi pour les avoir conservées.
En ce moment, face à ces nombreuses entreprises de télécommunication, par exemple — vous vouliez savoir en quoi consiste la relation, monsieur Casey — il n'est pas possible d'obliger une entreprise de télécommunication ou un FSI à conserver l'information. Les autorités obtiennent une coopération volontaire de certaines entreprises de télécommunication et de certains FSI, mais non pas de tous. Cela dit, il en est qui coopèrent de leur plein gré avec la police et qui préserveront les données volontairement en attendant que la police revienne avec un mandat de perquisition ou une ordonnance de production.
Ainsi, cela élargirait la portée des dispositions sur l'immunité afin d'inclure les personnes qui conservent des données volontairement, de manière que celles-ci ne soient pas tenues responsables sur le plan civil ou criminel parce qu'elles auront coopéré volontairement avec la police. Voilà la relation qui existe entre les deux, monsieur Casey.
Pour ce qui est de la nature des pouvoirs, c'est-à-dire les circonstances dans lesquelles les entreprises de télécommunication et autres entreprises sont autorisées ou obligées à fournir l'information, il faudrait en revenir à la LPRPDE et, une fois de plus ce n'est pas là mon domaine d'expertise.
Je ne peux pas faire de commentaire sur la cause Amanda Todd, car, comme vous le savez, le procureur général de la Colombie-Britannique a porté des accusations contre une personne aux Pays-Bas, et l'enquête est toujours en cours.
L'autre partie de votre question concernait les outils dont disposent les États-Unis et d'autres pays et que nous n'avons pas.
Concrètement, le projet de loi prescrira de nombreux outils pour les besoins d'enquête, comme l'ordonnance de préservation, l'ordonnance interdisant de supprimer les données jusqu'à ce qu'on revienne avec une ordonnance de production ou un mandat de perquisition pour voir effectivement accès aux données. C'est un pouvoir que les Américains ont depuis des années, depuis au moins 15 ou 20 ans. Nous ne l'avons pas.
C'est aussi un pouvoir créé par la Convention du Conseil de l'Europe, une convention que nous avons signée mais non ratifiée, comme le ministre l'a dit, et nous serons le dernier pays du G7 à la ratifier si le Parlement approuve ce projet de loi.
D'autres dispositions utiles seraient celles permettant d'obtenir les données de transmission. Ce genre de données ne se rapportent en principe pas au contenu réel d'un courriel, mais à l'endroit où il a été envoyé, au trajet qu'il a suivi, via Rogers, Bell, Telus, AT&T, etc., de l'expéditeur au destinataire.
En ce qui a trait aux cas de cyberintimidation, supposons qu'une victime reçoive un courriel et que ce courriel émane du réseau Bell. Vous allez au réseau Bell qui vous dit « Eh bien, cela venait de Rogers ». Et ensuite Rogers vous dira « Nous ne sommes qu'un maillon de la chaîne. Cela vient de AT&T ». Ensuite vous allez à AT&T et vous dites « C'est vous qui êtes le terminus? », et AT&T vous dit « Pas du tout. C'est venu d'un autre fournisseur de service ».
Ces outils permettraient à la police d'obliger les FSI à préserver ces données de sorte qu'elles ne soient pas systématiquement supprimées, ce qui se fait normalement, parce qu'ils ne conservent ces informations que pendant une certaine période. Ils permettraient également à la police d'obtenir une ordonnance de production sur la transmission montrant qu'elle ne cherche pas à savoir quel est le contenu du courriel, mais simplement sa provenance. Provient-il de l'autre côté de la rue avant de passer par tous ces points, ou d'une autre province ou d'un autre pays? C'est tout ce que la police demande à savoir.
Plus tard lors de l'enquête, quand la police s'aperçoit qu'il ne s'agit pas simplement d'un suicide, qu'il y a peut-être des éléments de criminalité, que quelqu'un a poussé quelqu'un d'autre au suicide, une fois qu'elle possède des éléments plus probants et qu'elle a en fait des motifs raisonnables de croire qu'il y a eu agissements criminels, elle peut se rendre chez le FSI avec un mandat de perquisition ou une ordonnance de production et dire qu'elle veut à présent voir le contenu du courriel.
Comme le ministre l'a dit, c'est un système progressif où, au premier niveau, tout ce qu'on a c'est un soupçon que ces courriels pourraient se rapporter à des actes criminels, mais on ne le sait pas. Tout ce qu'on veut, c'est suivre certaines pistes, alors on utilise les premiers outils disponibles pour savoir vers où se diriger. Une fois qu'on obtient davantage de preuves et qu'on a des motifs de passer des soupçons à des motifs raisonnables de croire, on commence à chercher des informations de nature plus personnelle, comme le contenu des courriels.