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Merci, monsieur le président.
J'apprécie l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant votre comité aujourd'hui dans le cadre de votre étude sur les barrières non tarifaires pour l'exportation de produits agricoles découlant des accords commerciaux du Canada.
Permettez-moi tout d'abord de vous dresser le portrait du Canada au chapitre du commerce agricole et agroalimentaire.
Comme vous le savez, l'économie du Canada est axée sur les exportations. En 2016, le pays se classait au cinquième rang mondial des plus importants exportateurs et importateurs de produits agricoles et agroalimentaires. Comme plus de la moitié de nos produits agricoles, de nos poissons et de nos produits de la mer sont exportés, le maintien de la croissance et de la rentabilité de ces secteurs dépend fortement des marchés d'exportation et de la compétitivité du Canada à l'étranger.
Dans les marchés où nous avons négocié des accords de libre-échange, nos exportations bénéficient d'un traitement tarifaire préférentiel grâce à l'établissement de mécanismes bilatéraux qui améliorent notre aptitude à nouer un dialogue efficace avec nos partenaires commerciaux sur des préoccupations communes. Ces mesures placent les entreprises canadiennes sur un pied d'égalité avec celles d'autres pays exportateurs ou les rendent même plus concurrentielles sur le plan de l'accès aux marchés.
Grâce à l'important programme commercial du Canada en 2015, 72 % de l'ensemble des exportations agroalimentaires canadiennes étaient couvertes par un accord commercial qui avait été soit approuvé, soit conclu ou qui était en vigueur.
Malgré ces accords commerciaux, nos exportations sont toujours confrontées à un certain nombre de barrières non tarifaires qui peuvent entraver considérablement l'accès aux marchés établis par l'élimination des tarifs.
Les barrières non tarifaires, que l'on appelle aussi mesures non tarifaires, peuvent être définies comme des catégories d'obstacles commerciaux qui comprennent des interventions gouvernementales distinctes, des droits de douane et des frais imposés sur les importations et les exportations, et qui ont pour effet de restreindre les échanges commerciaux.
Il est important de se rappeler que les mesures non tarifaires sont légitimes dans plusieurs cas. En effet, certaines mesures sont nécessaires pour s'assurer que des aliments importés sont sans danger et que le secteur de l'agriculture et l'environnement sont protégés de l'introduction de ravageurs ou de maladies. De telles mesures deviennent toutefois préoccupantes lorsqu'elles ne sont pas justifiées ou si elles sont excessivement restrictives.
[Traduction]
Concernant les mesures non tarifaires, nous voulons nous assurer que ces mesures adoptées ou maintenues sont nécessaires pour accomplir un objectif légitime, sont fondées sur les faits ou la science et sont le moins restrictives possible sur le plan commercial. Les mesures non tarifaires doivent aussi être conformées aux obligations internationales sur le commerce.
Il existe toutes sortes de barrières non tarifaires, comme les interdictions ou les restrictions à l'importation ou à l'exportation, les taxes discriminatoires, les procédures douanières fastidieuses, l'application arbitraire de règles de commerce, les mesures de protection de l'industrie nationale ou les mesures qui ne sont pas fondées sur des évaluations du risque appropriées qui s'appuient sur la science.
Au fil du temps, les exportateurs canadiens ont été confrontés à de nombreux obstacles d'accès au marché liés aux barrières non tarifaires imposées par nos partenaires de commerce. Permettez-moi de vous donner quelques exemples de telles mesures qui entraînent des conséquences économiques et commerciales importantes pour le secteur agricole.
Par exemple, les exigences d'étiquetage du pays d'origine constituent des barrières non tarifaires qui font grimper les coûts pour l'industrie si elles sont obligatoires et discriminatoires envers les produits importés. C'est le cas pour les produits comme le boeuf, le porc et d'autres, en vertu du projet de loi agricole adopté aux États-Unis en 2008. Ces exigences supplémentaires et coûteuses désavantagent les produits importés et encouragent les transformateurs à utiliser des produits américains.
Les exportateurs canadiens de céréales et d'oléagineux sont aussi tenus à répétition d'obtenir des approbations de produits biotechnologiques dans les marchés d'exportation, notamment en ce qui a trait aux produits génétiquement modifiés.
Dans bien des pays, les régimes réglementaires d'approbation des produits génétiquement modifiés ne sont pas fondés sur la science et ils ne sont pas diligents, prévisibles ou transparents. D'autres pays interdisent tout simplement ces produits.
Dans les grands marchés d'exportation, les retards dans l'approbation des produits génétiquement modifiés peuvent se traduire par diverses conséquences pour les agriculteurs canadiens. Ces retards peuvent, entre autres, limiter l'accès aux technologies agricoles novatrices. Même si ces nouvelles technologies sont approuvées au Canada, les agriculteurs vont attendre qu'elles soient approuvées dans les grands marchés d'exportation avant de commencer à les employer.
Les normes internationales portent notamment sur les pesticides, qui sont réglementés en fonction des limites maximales de résidus dans le secteur agricole ou alimentaire. Ces limites peuvent varier d'un pays à l'autre selon les méthodes d'évaluation, le type de consommation ou les retards d'approbation. Il peut même y avoir une interdiction complète si aucun règlement sur l'importation n'est établi. On peut considérer les divers règlements sur les pesticides comme des barrières non tarifaires s'ils ne s'appuient pas sur les pratiques internationales.
Afin que notre industrie agricole puisse vendre ses produits sur un pied d'égalité, le Canada emploie une variété d'approches et de mécanismes pour prévenir et surveiller les barrières non tarifaires, ainsi que pour en atténuer les répercussions.
Tout d'abord, l'Organisation mondiale du commerce constitue la pierre angulaire du système de commerce international. L'OMC fournit des règles prévisibles fondées sur la science dont dépendent les exportateurs pour maintenir l'accès au marché. Elle prévoit également des mécanismes qui permettent au Canada de dénoncer les mesures non tarifaires qui nuisent à nos exportateurs, comme le recours au règlement des différends.
L'OMC applique deux accords particulièrement importants.
L'Accord sur les obstacles techniques au commerce veille à ce que la réglementation, les normes, les tests et la certification techniques ne limitent pas inutilement le commerce.
L'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires restreint les mesures visant la salubrité alimentaire et la santé animale et végétale. Cet accord garantit que les pays prennent des mesures pour protéger leurs territoires et leurs populations qui reposent sur une évaluation du risque scientifique ou une norme internationale.
Ces accords appliquent divers principes communs. La transparence signifie qu'il faut informer les autres pays des nouveaux règlements ou des changements réglementaires et accepter les commentaires sur ces propositions. L'utilisation des normes internationales est aussi exigée, de même que la proportionnalité voulant que les mesures ne restreignent pas le commerce davantage que nécessaire. Enfin, les pays doivent accepter que les normes des autres offrent un niveau de protection équivalent.
Le Canada participe activement aux comités de l'OMC sur les obstacles techniques au commerce et les mesures sanitaires et phytosanitaires. Grâce à ces comités, nous pouvons faire avancer les discussions stratégiques sur l'application de nos approches réglementaires avec des partenaires commerciaux qui partagent notre vision et, dans certains cas, soulever des préoccupations particulières concernant certaines mesures imposées par d'autres pays.
Ensuite, les normes internationales fondées sur la science contribuent à créer un cadre commercial prévisible en réduisant les risques commerciaux et en facilitant l'accès aux marchés. Les normes élaborées au sein des organismes internationaux de normalisation, comme la Commission du Codex Alimentarius pour la salubrité alimentaire, la Convention internationale pour la protection des végétaux — c'est-à-dire les mesures phytosanitaires — et l'Organisation mondiale de la santé animale, sont énoncées dans l'Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires de l'OMC.
Les règles régissant les mesures non tarifaires dans les accords commerciaux sont habituellement fondées sur des normes établies par ces organisations internationales, et ces normes, lorsqu'elles sont appliquées, sont donc généralement considérées comme étant conformes aux règles commerciales.
C'est pourquoi le Canada soutient les travaux des organismes internationaux de normalisation et y participe de manière active. Il participe et contribue à ces travaux par divers moyens, notamment en ayant des experts techniques au sein des trois organismes, en fournissant un financement à l'appui de l'élaboration de normes dans des domaines d'importance pour le pays et en accroissant son engagement et sa participation dans le cadre de ces organisations. Par exemple, le Canada a récemment fourni 1 million de dollars pour soutenir les activités de ces trois organismes.
[Français]
Les accords de libre-échange bilatéraux offrent d'autres possibilités au Canada de traiter les nouveaux enjeux commerciaux, y compris les barrières non tarifaires. Ils comprennent des chapitres sur ces mesures qui énoncent les obligations commerciales internationales que les pays doivent respecter.
En règle générale, l'approche du Canada en ce qui a trait aux accords de libre-échange vise à intégrer des chapitres et des dispositions qui réaffirment et prolongent les obligations de l'Organisation mondiale du commerce. Les accords de libre-échange peuvent également comprendre d'autres mécanismes et dispositions en lien avec des barrières non tarifaires qui ne sont pas strictement des barrières sanitaires, phytosanitaires ou techniques au commerce. Par exemple, l'Accord économique et commercial global, ou l'AECG, conclu récemment entre le Canada et l'Union européenne, comprend un dialogue sur les biotechnologies afin de faciliter la collaboration dans ce domaine.
Cet accord entre le Canada et l'Union européenne contient également un chapitre sur la coopération en matière de réglementation. Ce chapitre a pour but de promouvoir la collaboration prospective entre le Canada et l'Union européenne lors de l'élaboration de nouvelles mesures. En favorisant l'accès aux processus d'élaboration des règlements fédéraux, les parties entendent réduire les différences entre leurs approches réglementaires et, par conséquent, le nombre d'obstacles au commerce lorsque les règlements sont mis en oeuvre.
Évidemment, les relations bilatérales vont au-delà des accords de libre-échange. Agriculture et Agroalimentaire Canada, en collaboration étroite avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments, Affaires mondiales Canada et d'autres partenaires réglementaires, travaille au maintien de l'accès aux marchés actuels. Par exemple, le Conseil de coopération Canada–États-Unis en matière de réglementation permet de favoriser une coopération plus étroite en matière de réglementation entre les deux pays et de renforcer la compétitivité économique en harmonisant nos systèmes réglementaires,dans la mesure du possible.
Ces efforts continus comprennent la collaboration bilatérale avec nos partenaires commerciaux sur une base régulière, plus particulièrement lorsque des questions réglementaires et administratives entre les pays doivent être réglées ou lorsque l'éclosion d'une maladie au Canada — par exemple, une épidémie de grippe aviaire — a une incidence sur l'accès aux marchés d'exportation.
La défense de nos intérêts commerciaux peut également mener à la création de forums internationaux dans le but de fournir des renseignements exacts, de faire avancer les discussions sur les politiques commerciales et de s'attaquer aux irritants commerciaux potentiels en matière de commerce. Par exemple, au cours des dernières années, le Canada a établi l'Initiative mondiale sur la présence en faible concentration, afin de réduire les risques commerciaux associés à la gestion des cas de présence en faible concentration d'une culture génétiquement modifiée dans les importations. Cette initiative regroupe maintenant 15 pays qui collaborent au développement de solutions pour une gestion efficace des cas de présence en faible concentration. Cette initiative illustre notre capacité à collaborer avec des pays aux vues similaires pour promouvoir le développement d'approches communes pour traiter des enjeux commerciaux.
Finalement, nous collaborons étroitement avec nos partenaires des gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi qu'avec l'industrie pour résoudre le problème des barrières non tarifaires essentielles à l'accès aux marchés. Le gouvernement utilise un large éventail de mécanismes de collaboration avec le secteur agricole canadien, notamment la consultation et les groupes de travail gouvernement-industrie.
Permettez-moi de terminer en mentionnant que les efforts du gouvernement visant à améliorer l'environnement commercial international pour les exportateurs canadiens de produits agricoles, que ce soit au moyen de négociations commerciales, de la défense bilatérale de nos intérêts ou d'une participation active aux forums multilatéraux, continueront de jouer un rôle essentiel en vue de surmonter les barrières non tarifaires et de s'assurer que le Canada demeure un acteur important dans le domaine du commerce agricole.
Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie encore une fois de votre invitation et de votre attention. Mes collègues et moi répondrons avec plaisir à toutes les questions que vous pourriez avoir.
Merci.
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Merci. C'est une très bonne question.
Quand on entame des négociations dans le cadre d'un accord de libre-échange, il est maintenant habituel de mener des consultations exhaustives auprès des intervenants de l'industrie. Nous cherchons à obtenir leur point de vue relativement aux enjeux qui pourraient être soulevés dans les négociations.
Il va sans dire que nous nous penchons sur certains enjeux, comme la non-discrimination tarifaire, et que nous essayons de reproduire et de renforcer les disciplines existantes qui sont liées aux mesures non tarifaires, comme les disciplines liées aux obstacles techniques au commerce ou les mesures sanitaires et phytosanitaires.
Toutefois, il arrive souvent que lorsque nous négocions avec un pays... Prenons l'exemple de l'accord économique et commercial global Canada-Union européenne. Dans la période menant à l'élaboration de nos positions de discussion, nous avons mené des consultations approfondies auprès de l'industrie. Bon nombre des intervenants, par exemple pour le secteur du boeuf et du porc, nous ont signalé que des approbations réglementaires touchant certaines techniques, comme des techniques de lavage des carcasses de boeuf, étaient un élément important pour eux et qu'il fallait les soulever dans la mesure du possible lors des négociations. Et c'est ce que nous avons essayé de faire.
Des accords commerciaux contiennent habituellement un certain nombre de choses. Ce que nous codifions, ce sont les règles générales d'application. Nous reproduisons, par exemple, ce qui existe avec l'OMC relativement aux disciplines touchant les obstacles techniques au commerce ou les mesures sanitaires et phytosanitaires. Nous avons également négocié, dans le contexte de cet accord avec l'Union européenne, des conventions accessoires nous permettant plus particulièrement d'intégrer des engagements politiques envers la résolution d'un certain nombre de ces enjeux. Par exemple, ces conventions accessoires comprennent deux techniques de lavage des carcasses sur lesquelles nous nous sommes mis d'accord à la satisfaction de ce secteur.
Cela étant dit, quand on parle de mesures réglementaires, il peut toujours y avoir, en dépit des accords commerciaux, de nouvelles mesures qui prennent effet. C'est pour cette raison que nous pouvons nous servir des accords commerciaux comme élément de base pour entamer un dialogue productif entre les autorités de réglementation — par exemple, entre l'Agence canadienne d'inspection des aliments et son homologue européen — pour essayer de faire fond sur l'accord commercial tout en cherchant à résoudre les problèmes émergents.
Je terminerai en signalant également que vous avez mentionné une liste qui, je pense, fait référence à notre système de soutien à l'accès au marché. Cette liste comprend environ 300 problèmes d'accès au marché qui ont été recensés. Ce n'est pas l'ensemble de ces problèmes d'accès au marché qui sont liés aux mesures non tarifaires. Dans certains cas, un secteur recense le fait qu'il aimerait avoir un accord d'équivalence entre le Canada et un pays en particulier relativement aux normes ou bien qu'il aimerait faire préparer un certificat d'importation. Ces éléments diffèrent légèrement des mesures non tarifaires, mais ce sont des enjeux qui ont été recensés par le secteur. Sur les 300 éléments de la liste, il faut savoir qu'il ne s'agit pas uniquement de mesures non tarifaires.