:
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 128e réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités.
Avant de commencer, je demanderais à tous les participants qui sont présents de bien vouloir lire les consignes sur les cartes devant eux.
[Français]
Ces directives ont été mises en place dans le but de protéger la santé et la sécurité de notre formidable équipe d'interprètes.
[Traduction]
La séance d'aujourd'hui se déroule en mode hybride. La connexion de tous les témoins a été vérifiée.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 16 avril 2024, le Comité poursuit son étude sur la Loi sur la concurrence et les voyages aériens vers les localités nordiques, rurales et éloignées du Canada.
J'aimerais présenter les témoins que nous entendrons aujourd'hui.
[Français]
De la Régie intermunicipale de l'aéroport régional de Mont-Joli, nous accueillons M. Bruno Paradis.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Paradis.
[Traduction]
Nous accueillons Mme Susan Wright, directrice des ressources humaines et des communications chez North-Wright Airways. Bienvenue à vous aussi.
[Français]
À la deuxième heure, nous recevons M. Philippe Noël, vice-président de la Fédération des chambres de commerce du Québec, ainsi que M. Laurent Corbeil, de la même organisation. Ils participent tous deux à la réunion par vidéoconférence.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
[Traduction]
Nous recevons également M. Michael Spence, maire de la ville de Churchill, qui comparaît par vidéoconférence aussi. Bienvenue, monsieur le maire.
Vous aurez un maximum de cinq minutes pour vos déclarations liminaires. Les membres du Comité auront ensuite l'occasion de vous poser des questions.
J'aimerais donner quelques indications aux témoins, qui sont tous à distance. Si je vous montre le carton jaune, il vous reste 15 secondes pour terminer votre déclaration ou pour répondre à la question qui vous est posée. Si je vous montre le carton rouge, cela veut dire que votre temps est écoulé. Je préfère ne pas avoir à vous montrer le carton rouge parce que je n'aime pas vous interrompre. Votre témoignage m'est très important. Essayons de collaborer pour que je n'aie pas à le faire.
[Français]
Je laisse maintenant M. Paradis faire son allocution d'ouverture.
Monsieur Paradis, vous avez la parole pour cinq minutes.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie le Comité de me donner l'occasion de parler de la réalité de mon coin de pays et de l'aéroport régional de Mont‑Joli.
L'aéroport régional de Mont-Joli est un ancien aéroport militaire de la Deuxième Guerre mondiale. À l'époque, il s'agissait du plus gros aéroport de l'Est du Canada — je rappelle que Terre‑Neuve‑et‑Labrador ne faisait pas partie du Canada à cette époque. Il comprenait la 9e École de bombardement et de tir, où l'on a formé plusieurs milliers de soldats canadiens, australiens et anglais. Il est devenu un aéroport civil dans les années 1960‑1970, et il a été rétrocédé à quatre municipalités régionales de comté. Je suis le président du conseil d'administration, mais je suis aussi, dans mes temps libres, préfet et maire de l'une des localités de mon milieu.
Depuis le 4 décembre 2023, l'aéroport régional de Mont‑Joli n'est plus relié à Montréal ni à Québec par un transporteur commercial. La raison invoquée est la non-rentabilité pour les transporteurs, en raison d'une faible affluence des passagers. Certains pointent du doigt des horaires inadaptés, un manque de fiabilité et des coûts de billets élevés. Certains estiment aussi que le télétravail a réduit les besoins en matière de déplacement d'affaires. D'ailleurs, très peu d'aéroports ont retrouvé le volume de passagers qu'ils avaient avant la pandémie.
Il ne s'agit pas d'une situation exceptionnelle. En analysant les décennies passées, on constate que l'aviation a souvent été secouée par des crises. Les récessions, les changements dans les orientations économiques de certains gouvernements et, bien sûr, l'impact majeur du 11 septembre 2001 ont eu des conséquences sur nos régions. Ces dernières sont particulièrement touchées et doivent souvent repartir à zéro. Lors de chaque crise, la mobilisation est la même, soit trouver des solutions temporaires, qui sont souvent financées à court terme, et offrir des incitatifs financiers. Cependant, ces efforts, bien qu'ils soient louables, ne suffisent jamais à assurer la pérennité des liaisons régionales.
Les communautés ne disposent pas, à elles seules, des moyens financiers nécessaires pour soutenir ces mesures à long terme. Il faut de deux à quatre ans avant qu'une nouvelle route aérienne soit rentable. Les transporteurs étant des entreprises privées, ils ne peuvent assumer cette charge seuls, d'autant plus que les coûts d'exploitation en période hivernale sont particulièrement plus élevés lorsqu'il s'agit de desservir les régions éloignées comme la nôtre. Les aéroports municipaux, en tant qu'organismes à but non lucratif, reposent principalement sur les revenus générés par les frais d'atterrissage imposés et d'autres charges facturées aux transporteurs aériens.
De plus, la majorité d'entre nous doit également compter sur des subventions pour maintenir nos infrastructures conformes aux normes. Cependant, les programmes de subvention actuels restent limités. Prenons l'exemple du Programme d'aide aux immobilisations aéroportuaires, ou PAIA. Les montants disponibles n'ont pas été augmentés depuis de nombreuses années, ce qui complique la gestion des besoins croissants dans un contexte d'inflation galopante.
Nous croyons que le gouvernement devrait s'inspirer des pratiques de nos voisins du Sud pour améliorer le financement de nos aéroports régionaux. Il devrait également reconnaître que le transport aérien est un service essentiel pour développer nos régions, si nous souhaitons accueillir directement des investisseurs, aider notre main-d'œuvre spécialisée et accueillir des touristes, des médecins et d'autres professionnels. Les entreprises sur nos territoires méritent d'avoir la possibilité de se rendre dans les grands centres pour développer leur marché, attirer des investisseurs et déplacer leurs équipes.
Il est impératif que des programmes durables de soutien à la connectivité régionale soient mis en place. Maintenir une stabilité financière deviendra un atout majeur pour le développement des régions. Les investissements seraient ajustés selon la situation économique, c'est-à-dire qu'on donnerait moins d'argent quand ça va bien et plus d'argent quand ça va moins bien.
L'aéroport régional de Mont-Joli a récemment commandé une étude sur le déplacement des personnes pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2023. Les résultats montrent que, dans les quatre municipalités régionales de comté desservies par l'aéroport, sur une population active de 63 000 personnes, 46 000 personnes se sont rendues en voiture sur l'île de Montréal.
Une seconde étude révèle que 10 383 personnes se sont rendues à l'aéroport de Montréal en voiture, et 5 053 personnes à l'aéroport de Québec. Cela représente plus de 15 000 personnes ayant pris leur voiture pour accéder à ces aéroports. Ces déplacements soutiennent les données de 2019, selon lesquelles plus de 53 000 passagers ont utilisé des vols commerciaux à l'aéroport de Mont‑Joli.
En 2024, que doivent faire ces passagers? Ils doivent prendre leur voiture pour se rendre à Montréal ou à Québec. Nous parlons ici de 46 000 personnes de la région du Bas‑Saint‑Laurent qui se sont rendues sur l'île de Montréal, ce qui a contribué à la densification de la circulation. Il faut ajouter à cela les gens des autres régions, comme l'Abitibi, le Saguenay—Lac‑Saint‑Jean et la Côte‑Nord. Il s'agit d'une des raisons pour lesquelles les grands aéroports doivent agrandir leurs parcs de stationnement.
Aujourd'hui, si j'avais voulu discuter avec vous en personne, il m'aurait fallu plus de 20 heures pour faire l'aller-retour. Si une desserte avait été offerte, j'aurais participé à la réunion en personne. Nombre d'entreprises seraient également disposées à retirer leurs employés des routes et à rendre leurs déplacements plus efficaces. Nous avons été surpris d'apprendre, cette semaine, que les inspecteurs de Transports Canada devaient utiliser une voiture pour se déplacer; c'est une question de coût.
Pour terminer, j'aimerais dire ce qui suit. Actuellement, le problème a un grand impact sur les services offerts à la population de l'Est du Québec. En effet, cela a un impact sur l'éducation, puisque des professeurs de l'Université du Québec à Rimouski refusent des charges de cours en région; sur la recherche, puisque des chercheurs émérites refusent de collaborer à la mise en place de projets de recherche dans nos régions; sur la santé, puisque des médecins spécialistes refusent de pratiquer des opérations ici ou que des dentistes refusent d'offrir des services dans la région. Tout cela oblige les gens à faire parfois plus de cinq heures de route pour recevoir un service, par exemple pour qu'un dentiste procède à une obturation dentaire. Il y a aussi un impact sur le plan économique, puisque, par exemple, des investisseurs ont mis fin à certains projets lorsqu'ils se sont rendu compte qu'ils devaient faire six heures de route pour se rendre dans notre région.
Au départ, on parlait seulement de quelques vols, mais on s'aperçoit maintenant que cela a un grand impact sur nos communautés.
Merci beaucoup.
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Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui.
Je viens du territoire traditionnel des Dénés et des Métis du Sahtu, où je travaille pour une compagnie aérienne fièrement détenue en majorité par les populations autochtones que nous servons, appelée North-Wright Airways. Ma présentation vous donnera un aperçu de l'exploitation d'une compagnie aérienne régionale de correspondance dans les régions les plus reculées du Canada, en ce qui concerne la Loi sur la concurrence et les voyages aériens vers les localités nordiques, rurales et éloignées du Canada.
Nous sommes une compagnie aérienne qui fournit des services réguliers et affrétés essentiels, et le plus grand avion que nous sommes autorisés à exploiter peut accueillir 19 passagers. Nous desservons huit communautés entre Yellowknife et Inuvik, dont six sont hors du réseau routier. Nous sommes le seul fournisseur de services aériens dans cinq de ces communautés. L'ensemble de nos opérations est basé dans une ville de 800 habitants, Norman Wells, où nous sommes au cœur de notre réseau de services. Lorsque nous pensons à la concurrence, nous pensons davantage à l'amélioration continue de l'échelle de nos opérations afin de pouvoir nous développer et offrir une option à bas prix à nos clients. Nous nous connectons en grande partie par l'intermédiaire du centre de Yellowknife.
Au Canada, il existe un large éventail d'opérateurs effectuant un travail très similaire. Nous ne représentons qu'une infime partie de la communauté aéronautique canadienne; notre réseau est très limité en taille et en portée par rapport à l'ensemble du secteur. Dans le Nord, nous sommes confrontés à des défis très similaires à ceux des autres opérateurs, et nous savons donc que nos défis sont partagés.
Dans notre région, nous sommes confrontés à des défis uniques qui ont un impact, tels que des infrastructures aéroportuaires et de navigation de base, une offre de carburant incroyablement volatile et inadéquate, des coûts de carburant importants, des pénuries de main-d'œuvre qualifiée et un marché très limité dans lequel nous pouvons puiser.
Les pistes sont courtes, généralement d'une longueur d'environ 3 900 pieds, et sont constituées de gravier, ce qui nous limite vraiment quant aux types d'aéronefs avec lesquels nous pouvons effectuer un vol régulier. En fait, nous sommes extrêmement limités en ce qui concerne la quantité d'avions que nous pouvons transporter, en fonction de la température. Nous sommes confrontés à des perturbations saisonnières sur les pistes en gravier en raison des dommages causés à nos hélices par la neige fondue, les aéroports ont une navigation de base qui ne nous permet pas d'obtenir tous les rapports météorologiques dont nous avons besoin, et nous sommes confrontés à des pénuries de carburant paralysantes qui se produisent en raison des perturbations dues au niveau d'eau historiquement basse sur le fleuve Mackenzie.
Il s'agit là d'exemples de défis logistiques très réels et légitimes qui entravent notre capacité à agir au maximum de notre potentiel, sans parler de la création d'un environnement propice à une plus grande concurrence. Les coûts supplémentaires qui découlent de ces facteurs, en plus de l'inflation et du dollar américain, sont répercutés sur nos clients. Notre capacité à fournir des services avec un modèle à faible coût est limitée, voire impossible. Nos économies d'échelle sont tout simplement limitées.
Par ailleurs, les opérateurs sont généralement de très petites entreprises familiales qui ont du mal à faire face à l'incroyable rythme des changements dans notre secteur réglementé par le gouvernement fédéral. Au cours des quatre dernières années, la direction a dû s'efforcer davantage de se conformer aux nouvelles réglementations que de se développer et d'offrir de meilleurs services à nos clients, qui comptent sur nous pour ce faire. Ces changements réglementaires sont tous importants et bénéfiques pour nous dans le secteur réglementé par le gouvernement fédéral, mais il est important de reconnaître que le rythme d'entrée en vigueur des nouvelles réglementations mobilise beaucoup de ressources de la part des petites compagnies aériennes pour suivre le mouvement. Ces quatre dernières années, les ressources ont été utilisées pour se conformer aux changements de réglementation importants, tels que la réglementation des vols et des tâches, l'équité salariale, la violence sur le lieu de travail, les réglementations en matière de handicap et d'accès, les droits des passagers énoncés dans la Loi sur les transports au Canada, et ainsi de suite. Beaucoup de ces nouvelles réglementations sont assorties d'amendes importantes, et nous nous battons vraiment pour suivre cette évolution systématique des réglementations, qui a un impact énorme sur nous.
Les nouvelles réglementations sur les vols et les droits de douane ont eu l'impact le plus important sur les opérateurs comme nous, qui n'ont pas été en mesure de se développer ou de poursuivre le même niveau de travail que les années précédentes. Nous sommes en fait devenus moins compétitifs, et je constate la même chose chez d'autres opérateurs.
North-Wright s'engage à collaborer et à travailler avec tous les niveaux de gouvernement pour donner une perspective sur le terrain de la difficulté des opérations dans le Nord et de la manière dont la loi sur la concurrence peut refléter cette situation.
Par ailleurs, nous pensons qu'à l'avenir, il faudra mettre davantage l'accent sur des éléments tels que l'asphaltage et l'augmentation de la longueur des pistes, les systèmes de navigation qui soutiennent les compagnies aériennes 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, le financement adéquat des équipements aéroportuaires pour soutenir des éléments tels que les services de dégivrage dans le nord du Canada, et l'expansion des systèmes routiers, tels que l'autoroute de la vallée du Mackenzie, pour améliorer l'accès aux marchés du carburant et fournir une chaîne d'approvisionnement plus fiable pour les carburants et les approvisionnements.
Par ailleurs, nous devons nous efforcer de comprendre la pression exercée par la nouvelle réglementation sur les petites entreprises qui effectuent des travaux importants dans des centres régionaux comme le nôtre, et de réaliser l'impact qu'elles ont sur ces entreprises.
Nous devons également nous efforcer de mettre en place une sorte de programme de soutien pour les compagnies aériennes qui opèrent dans ces collectivités. Il y a peut-être une communauté qui a de la concurrence. Comment ces compagnies peuvent-elles être soutenues en cas de pénurie de carburant due à des problèmes climatiques? Nous pensons qu'il faut protéger les compagnies aériennes régionales pour tenir compte de leur petite zone d'exploitation, où la concurrence n'est pas viable et peut avoir des répercussions à long terme sur les collectivités qu'elles desservent.
Je vous remercie infiniment. Ce fut un plaisir.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens d'abord à remercier nos témoins de nous avoir fait part de leur perspective en tant qu'intervenants de première ligne, pour ainsi dire.
Au printemps, notre comité a mené une étude sur l'état de la concurrence dans le secteur du transport aérien. Nous avons entendu les témoignages de WestJet et d'Air Canada, qui nous ont tous deux fait part de certains des thèmes similaires à ceux que vous avez évoqués, à savoir que les taxes, les frais, les coûts et le fardeau réglementaire étouffent la concurrence.
Vous avez tous deux mentionné les coûts. Vous avez parlé des frais. Vous avez parlé de la lourdeur réglementaire, des quatre années d'augmentation de la charge qui a augmenté les coûts et limité vos ressources.
Vous représentez une compagnie aérienne et un aéroport opérant dans le nord. J'ai été frappé par le commentaire selon lequel 15 000 habitants de votre région se rendent en voiture à d'autres aéroports. Il semble qu'il y ait là une bonne opportunité commerciale, mais elle est étouffée par l'état de la concurrence.
J'aimerais que vous nous parliez de ces coûts et de la concurrence et que vous nous donniez quelques exemples de l'impact de ces coûts sur votre compagnie aérienne et votre aéroport, car nous aimerions voir plus de concurrence au Canada.
Nous allons commencer par entendre les observations de Mme Wright.
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Je vous prie de m'excuser. Je n'ai pas eu accès à toute l'interprétation, mais j'ai cru comprendre quand même l'essentiel de la question en ce qui concerne la concurrence. Je vais répondre au mieux de mes connaissances.
Vous comprendrez que le faible volume que nous avons ici, en région, n'est pas très attirant pour les entreprises. Dans le passé, il y a une vingtaine d'années, nous avons déjà vu jusqu'à 100 000 passagers ici, à Mont‑Joli. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Pour qu'un transporteur soit rentable, il doit se rendre dans plusieurs aéroports pour venir chercher un peu sa masse critique de passagers. Toutefois, le problème, c'est que la plupart des aéroports ont été rétrocédés et qu'ils doivent mettre en place des frais d'atterrissage pour payer leurs frais.
Prenons l'exemple d'un transporteur qui vient chercher quelques passagers à Mont-Joli, d'autres à Gaspé, et ainsi de suite. Il doit assumer des frais d'atterrissage pouvant varier de 500 $ à 2 000 $, selon le type d'avion. Cela a des répercussions beaucoup trop importantes sur ses activités. En effet, si la compagnie aérienne se rend dans deux, trois ou quatre aéroports, ces frais d'atterrissage viennent gruger l'essentiel du profit qu'elle pourrait faire. Cela fait en sorte que le coût du billet est notamment augmenté et qu'il est encore moins intéressant pour les gens des régions de voyager par avion. Cette situation explique le fait qu'il n'y a pas vraiment de concurrence.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens d'abord à remercier les témoins d'être présents aujourd'hui.
Je tiens également à remercier une fois de plus mes collègues du Comité de m'avoir permis de les remplacer pour cette réunion et de m'avoir aidé à présenter cette importante étude à votre commission afin de mettre en lumière certains des défis auxquels sont confrontées les compagnies aériennes régionales, en particulier dans le nord.
Lors de la première réunion de l'étude, qui s'est tenue le 30 mai, Joseph Sparling, PDG d'Air North, la compagnie aérienne du Yukon, a évoqué certains des défis à relever. Sous sa direction, Air North a vraiment construit une compagnie aérienne régionale solide grâce à de nombreuses décisions commerciales intelligentes prises au fil des ans, en prenant des risques, en gagnant le soutien de la population locale et en développant un partenariat avec la Première nation des Gwitchin Vuntut. Air North est très avant-gardiste et innovante et offre une concurrence directe aux grandes compagnies aériennes.
Néanmoins, dans son témoignage, M. Sparling a indiqué la chose suivante: « À la suite de la déréglementation, les services régionaux ont été consolidés et centralisés, et de nombreuses collectivités ont perdu leurs services de transport aérien par avion à réaction au profit du transport par avion à turbopropulseur, et certaines collectivités ont complètement cessé d'être desservies. ». Il poursuit en expliquant que « le comité des transports a reconnu ce risque dans son rapport sur l'acquisition par Air Canada des Lignes aériennes Canadien International. Deux des 42 recommandations préconisaient de rendre les accords intercompagnies obligatoires tout comme le partage de codes, et ce, entre toutes les compagnies aériennes canadiennes offrant des vols réguliers. ».
Lors de son témoignage, M. Sparling a également déclaré la chose suivante: « Cela permettrait d'égaliser les conditions de concurrence entre les petites entreprises régionales et les grandes entreprises de réseau en donnant aux entreprises régionales l'accès aux réseaux principaux ». Il a ajouté que cette question avait été « abordée par la législation dans le secteur des télécommunications et dans celui des chemins de fer ».
Ma première question porte sur les accords interlignes régionaux.
Madame Wright, peut-être pourriez-vous nous dire si cela résonne, si vous voyez un accord ou non dans ce domaine des connexions interlignes, et comment cela pourrait vous aider en tant que compagnie aérienne régionale.
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Je vous remercie, monsieur Hanley.
Dans l'ensemble, je pense que les accords intercompagnies sont vraiment une bonne chose pour le consommateur. Je crois vraiment que pour nos voyageurs, il serait merveilleux d'unir deux compagnies aériennes différentes de manière à ce qu'un passager ait un seul itinéraire pour toute la durée de son voyage.
Nous avons eu des problèmes avec les accords intercompagnies ou de co‑partage dans le passé, car une petite compagnie aérienne comme la nôtre ne peut pas appliquer les mêmes conditions qu'une autre compagnie interligne.
Par le passé, l'accord intercompagnie protégeait en quelque sorte le consommateur de la quantité de bagages qu'il avait et des différentes conditions qu'il avait. En ce qui nous concerne, en tant que petite compagnie régionale, nous n'avons pas nécessairement une approche différenciée pour nos tarifs, ni pour nos avantages, et ainsi de suite.
Ce qui me préoccupe dans les accords intercompagnies, c'est qu'ils exposent le transporteur aérien à être responsable d'un événement qui échappe à son contrôle. En règle générale, dans le cadre d'un voyage normal, notre accord avec notre client porte sur un trajet entre Norman Wells et Yellowknife, par exemple. Dans le cadre d'un accord intercompagnie, nous devons nous assurer que nous les transportons pendant toute la durée de leur déplacement. Je dirais que je n'y serais pas trop opposé, mais pour une petite compagnie aérienne avec des avions plus petits, des appareils et une charge utile plus faibles, il est vraiment difficile pour nous de garantir ces trois sacs à 80 livres, quelle que soit la décision d'Air Canada ou de WestJet...
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Il le fait déjà de différentes manières.
Comme je le disais précédemment, notre aéroport, qui appartenait anciennement à Transports Canada, a été rétrocédé. Toutefois, l'aéroport de Sept‑Îles, dans notre coin de pays, continue d'appartenir à Transports Canada.
Il existe trois réalités: certains aéroports appartiennent au gouvernement du Québec, d'autres, au gouvernement fédéral, et d'autres enfin, à des municipalités comme la nôtre.
Notre aéroport doit être financièrement autonome. Quant à ceux des deux autres paliers de gouvernement, ils payent leurs frais d'exploitation à même nos taxes et nos impôts. Cette situation crée une concurrence déloyale, car nos propres paliers de gouvernement nous font concurrence pour ce qui est de l'accueil de transporteurs ou de vols dans nos régions.
Pour ce qui est de s'en laver les mains, rappelons qu'à une certaine époque, même si je n'aimais pas la formule qui consistait à payer Air Canada pour qu'elle desserve certaines régions comme la nôtre — le service a été assuré par la compagnie aérienne Jazz pendant quelques années —, Air Canada a fini par nous dire qu'elle avait besoin de fonds supplémentaires pour continuer à offrir le service. Même si ce n'était pas une approche constructive à long terme, elle nous permettait au moins d'obtenir un service.
Pendant la pandémie de COVID‑19, Air Canada a arrêté de desservir notre région, et nous nous retrouvons maintenant sans services. Même si j'ai souvent fait appel au gouvernement fédéral depuis la fin de la pandémie, je n'ai jamais eu de réponses à mes questions. C'est le gouvernement du Québec qui semble avoir pris le relais, malheureusement, car cela reste à mon avis un dossier fédéral.
Nous aurions aimé avoir une formule hybride, qui consisterait non pas à payer des entreprises — parce que Québec a commencé à le faire, ce qui n'est pas la bonne formule, selon moi —, mais à travailler en collaboration avec les divers milieux pour mettre en place des dessertes aériennes qui correspondent aux besoins et qui s'adaptent à la réalité des différents territoires.
Dans des régions comme la nôtre, tous les intervenants, c'est-à-dire le monde municipal, les entreprises, les chambres de commerce, le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada, doivent mettre la main à la pâte.
J'aimerais voir le gouvernement fédéral s'investir davantage.
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Je vous remercie de votre réponse.
Comme le temps file, je vais poser une autre question.
Vous avez mentionné dans votre allocution d'ouverture que le service aérien régional est un service essentiel, et je suis d'accord avec vous.
Pourriez-vous nous expliquer pourquoi c'est un service essentiel et, surtout, comment cela devrait se traduire concrètement?
On peut faire une telle affirmation, mais elle doit s'accompagner de certaines obligations. Certains diront que, puisque la région de Mont‑Joli est reliée par la route, les gens peuvent se promener en auto, mais est-ce tout de même un service essentiel, malgré cela?
:
Le service aérien régional est un service essentiel pour plusieurs raisons.
Premièrement, nous effectuons plus de 700 vols pour raisons médicales à partir de Mont‑Joli, ce qui équivaut à presque deux par jour. Il s'agit de vols d'urgence souvent effectués vers les grands centres. Pour maintenir ces infrastructures, il faut des revenus, et ceux‑ci viennent principalement des atterrissages d'avions.
Deuxièmement, beaucoup de travailleurs se rendent dans le Nord pour aller chercher des métaux d'importance pour différentes industries.
Troisièmement, cela permet aux entreprises de continuer d'avoir accès à des marchés de Québec ou de Montréal et, surtout, de s'y rendre rapidement.
Par ailleurs, à cause du vieillissement de la population, nous devons avoir accès à des services de santé, et les gens doivent pouvoir se rendre rapidement à Québec ou à Montréal.
On pense qu'une formule hybride pourrait être mise en place, ce qui demanderait certains changements législatifs. Il n'en reste pas moins qu'on devrait prévoir un certain revenu de base pour les aéroports, ce qui nous permettrait de réviser à la baisse nos frais d'atterrissage. Il pourrait en découler une plus grande concurrence entre les transporteurs.
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À mon avis, c'est exact.
Comme nous l'avions démontré, entre autres dans le cadre de l'étude sur l'amélioration de nos infrastructures, notre aéroport rapporte aux différents paliers de gouvernement 82 millions de dollars par année en taxes et impôts. Le service de transport aérien régional ne représente donc pas une dépense, mais un investissement.
Il reste que certaines de nos activités sont actuellement précaires. De plus, notre mission de base étant d'offrir des services à notre population, nous devons utiliser beaucoup de ressources humaines et financières si nous voulons offrir à nouveau des vols vers Québec et Montréal. Or, ces ressources pourraient être investies ailleurs.
Les services pourraient être offerts selon différentes formules, mais pas la même que par le passé, qui consistait à payer des compagnies aériennes. Au contraire, nous voulons travailler en partenariat avec le milieu, les entreprises et les autres paliers de gouvernement.
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Qujannamiik, Iksivautaq. Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens d'abord à remercier les témoins de s'être présentés devant le Comité.
Je n'ai pas l'habitude de siéger ici, mais je remercie mon collègue, le député , de m'avoir invitée à siéger ici aujourd'hui, alors que vous étudiez le transport aérien dans le Nord. Mes questions s'adresseront à Mme Wright.
Merci beaucoup de nous avoir fait part de votre témoignage. La raison pour laquelle je veux vous poser des questions, c'est que c'est un peu plus comparable à ce qu'est ma réalité dans la circonscription que je représente, le Nunavut.
Comme nous le savons tous, le Nunavut compte 25 communautés isolées, qui sont toutes accessibles par avion. Il n'y a pas de route entre elles, c'est pourquoi l'industrie du transport aérien est en grande partie la bouée de sauvetage du Nunavut.
Madame Wright, permettez-moi d'établir une petite comparaison. Un aller simple d'Iqaluit à Ottawa coûte environ 1 500 dollars, et la distance entre Iqaluit et Ottawa est d'environ 2 085 kilomètres. Comparez ensuite un vol d'Ottawa à Winnipeg, où la distance est d'environ 2 138 kilomètres. C'est un peu plus loin, mais pas de beaucoup. Lorsque je compare les prix entre Ottawa-Winnipeg et Iqaluit-Ottawa, je constate qu'ils sont astronomiques. Un aller simple coûte entre 68 et 600 dollars.
Puisque vous travaillez dans le secteur aérien, pouvez-vous nous aider à comprendre pourquoi il y a un tel écart entre des vols dont les distances sont relativement similaires?
:
Il s'agit en fait d'une question qui, à mon avis, a été posée à maintes reprises. Étant moi-même originaire du Nord et résidant à Norman Wells, je ressens exactement la même chose. Je ne peux pas parler pour les autres compagnies aériennes, mais j'ai remarqué que les vols vers le Nord sont généralement moins fréquents et qu'ils transportent à la fois du fret et des passagers ou qu'ils n'ont tout simplement pas autant de sièges. Les vols d'Ottawa à Winnipeg sont peut-être plus fréquents et il y a plus de sièges dans l'avion.
On nous demande constamment pourquoi le prix de nos vols sont-ils si élevés, alors que nous pouvons prendre un vol pour l'Europe pour trois fois moins cher? En fait, je crois que tout dépend du nombre de sièges dans l'avion et de la fréquence des vols.
Par ailleurs, dans le Nord, les entreprises doivent vraiment faire attention à ces coûts surprises qui surgissent de nulle part. Je crois que c'est à Kuujjuaq que s'est produite la même situation que celle que nous avons connue en novembre dernier, et que nous connaissons actuellement, à savoir une pénurie surprise de carburant. Lorsque vous parcourez ces longues distances, je ne peux qu'imaginer, bien que je ne puisse pas parler pour eux, que cela a beaucoup à voir avec la situation, et je pense que parcourir ces longues distances ferait augmenter les coûts.
Je vais développer un peu cette question et citer le président de North Star Air, qui a indiqué la chose suivante: « Environ 10 % de nos vols sont annulés avant même le départ en raison des insuffisances des infrastructures dans le Nord, notamment le manque d'approches de précision, la rareté des équipements de dégivrage et l'absence de rapports météorologiques précis. ».
Plusieurs autres intervenants ont noté que le manque de pistes adéquatement recouvertes oblige les compagnies aériennes à utiliser des turbopropulseurs, qui ont une capacité moindre pour les passagers et le fret, une autonomie moindre et un rendement énergétique plus faible.
Pouvez-vous nous expliquer si ce manque d'investissement dans les infrastructures a un impact sur votre capacité à fournir des services dans les communautés rurales et isolées?
:
Tout à fait. Je dirais que notre principal problème, c'est une infrastructure insuffisante, mis à part l'enjeu du carburant.
Nos pistes sont très, très étroites et se composent de gravier. S'il y a de la gadoue... Disons qu'il neige au printemps et à l'automne. C'est ce qui arrive, et on obtient de la gadoue. En atterrissant dans une telle communauté, nous pouvons abîmer nos propulseurs, qui coûtent 250 000 $ à remplacer à cause d'un simple incident. Cela nous est déjà arrivé lors d'atterrissages dans les communautés.
Le service est si important pour nous, et nous n'annulons pas nos vols. Nous faisons de notre mieux pour que nos vols aient lieu. Nous allons patienter le plus longtemps possible, mais nous n'avons parfois pas d'autre choix que d'annuler un vol.
Nous faisons de notre mieux. Une chose que je sais de nous, c'est que nous essayons de travailler avec les moyens à notre disposition.
Nos systèmes de navigation sont un peu primitifs. Tout récemment, dans les huit dernières années, nous avons installé des approches aux instruments dans certaines communautés. Certaines données météorologiques ne sont pas disponibles après 17 heures. Certaines communautés sont munies de caméras, mais il n'y en a pas dans toutes nos installations.
Bien des facteurs nous influencent. L'infrastructure en est un, mais il faut aussi tenir compte de la disponibilité du carburant, qui constitue notre grand problème à l'heure actuelle.
Merci beaucoup de votre question.
Madame Wright, je suis allé par avion dans le Nord canadien une fois dans ma vie. Je suis allé d'Iqaluit à Kimmirut, dans la circonscription de la dernière députée ayant pris la parole. J'ai été très impressionné par les compétences des pilotes, mais j'ai aussi eu très peur à la vue de la piste de gravier et lors de l'impact que j'ai ressenti à l'atterrissage.
Merci de vos commentaires et de nous faire connaître l'infrastructure nordique et la façon dont se déplacent les gens dans plus de la moitié de notre pays.
Vous avez parlé de difficultés liées au carburant. Pourriez‑vous ventiler pour nous les coûts du carburant d'un exploitant dans les Territoires du Nord‑Ouest ou dans les autres territoires?
J'aimerais savoir quelle part va à la taxe sur le carbone, quelle part va aux autres taxes fédérales et quelle part va aux taxes territoriales et aux autres taxes que doit payer un exploitant comme vous.
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Merci de cette question. Je n'ai pas ces chiffres sous la main, mais je me souviens que dans les années précédentes, nous nous attendions à ce que le carburant représente environ 30 % des dépenses associées à chaque vol ou à chaque vol nolisé. C'est avec plaisir que je vous fournirai cette information.
Essentiellement, ces pistes de gravier ne sont pas très plaisantes — je suis contente que vous ayez vécu une telle expérience. Elles sont aussi très restrictives sur le plan des déplacements.
Pour vous situer un peu, nous sommes établis à Norman Wells. C'est un centre régional dans les Territoires du Nord‑Ouest qui se trouve directement sur le fleuve Mackenzie. Dans ce village à lui seul, nous faisons les frais d'un niveau d'eau historiquement bas sur ce fleuve. Cela nuit à notre approvisionnement et à la livraison de toutes les pièces pour nos avions. Ce centre comprend tout ce dont nous avons besoin pour exploiter notre compagnie aérienne, comme le carburant livré au village pour que nous puissions offrir ce service qui soutient la région en entier. Le niveau d'eau est si bas que les embarcations ne peuvent pas se rendre jusqu'à nous. C'est la deuxième année que nous devons faire venir le carburant par avion.
On vient de nous aviser avant notre venue ici que le mazout devrait augmenter de 3,50 $ le litre. Je pense que 30 ou 40 vols vont nous approvisionner en carburant. C'est nous et nos clients qui devrons assumer ces coûts.
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Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'aujourd'hui.
Bien sûr, nous savons tous, puisque nous voyageons partout au pays, qu'il est bien difficile de vivre dans les régions rurales au Canada. Lorsque nous avons amorcé cette étude, nous avons dit qu'une plus grande concurrence des différentes compagnies aériennes, ou moins de concurrence des géants comme Air Canada, WestJet et d'autres, pourraient aider à réduire le coût des billets et à améliorer le service.
Évidemment, comme vous le savez, madame Wright, les mêmes défis s'appliquent dans le Nord du Canada où vous vivez qu'à ma province de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Nous savons que les aéroports militaires construits par les Américains, comme ceux de Goose Bay, Stephenville, Gander et d'autres, ont été cédés dans les années 1990, et qu'on peine à survivre.
Les économies d'échelle et l'emplacement des aéroports sont bien sûr de grands facteurs pour ce qui est d'être concurrentiel et de garder les coûts à un minimum pour les gens qui utilisent ces services.
Je reviendrai à vous, madame Wright.
Monsieur Paradis, dans votre situation, vous avez dit que les gens se rendent en voiture à Montréal, à Québec et ailleurs. Pouvez‑vous nous dire comment vous travaillez avec vos partenaires, d'autres industries ou diverses organisations pour promouvoir le transport dans votre région et réduire au minimum les coûts, ou pour améliorer les services que vous offrez aux gens?
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Je remercie le député de sa question.
Actuellement, dans le cadre de la démarche que nous avons entreprise concernant l'aéroport, nous consultons les organismes de développement économique, les chambres de commerce et l'ensemble des entreprises de nos territoires. Nous consultons également des organismes du réseau de la santé, que nous appelons les centres intégrés de santé et de services sociaux, l'université de la région et les différents établissements scolaires qui ont des besoins sur notre territoire. Tous ces intervenants sont représentés au sein d'un comité actuellement. Nous parlons aussi avec des représentants des ministères provinciaux. L'objectif est de mettre en commun l'ensemble des besoins en matière de transport aérien en région et d'avoir un portrait le plus précis possible de la situation.
De plus, nous avons communiqué avec un transporteur pour voir s'il lui était possible d'offrir le service. Parmi les entreprises privées, plusieurs avaient besoin de vols, entre autres, vers Toronto pour des contrats dans la région du Grand Toronto. Nous avons donc fait le tour de l'ensemble des entreprises, des différents organismes de service et des organisations gouvernementales. L'objectif est d'arriver à établir un portrait très clair de la situation.
Nous travaillons actuellement avec le gouvernement du Québec pour établir un programme ou mettre en service une desserte avec un transporteur aérien, à moyen ou à court terme.
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Merci, monsieur le président.
Quand nous avons posé la question à Mme Wright au sujet de la concurrence, elle a mentionné que le fait d'avoir plusieurs transporteurs essayant d'occuper un petit marché peut poser un problème, parce qu'il n'y a pas nécessairement un volume suffisant pour faire vivre plusieurs transporteurs.
Vous venez de nous dire à peu près la même chose, monsieur Paradis.
À une certaine époque, je sais que vous avez travaillé sur le projet Régionair pour trouver une solution à ce problème. Ce projet était peut-être un peu semblable, voire apparenté à celui qui avait été élaboré par l'Union des municipalités du Québec, ou UMQ. On souhaitait permettre aux régions d'avoir des régies, où l'offre de services se ferait sous forme d'appel d'offres. L'objectif était d'offrir la possibilité d'avoir un libre marché, mais, en même temps, cela favoriserait le transporteur le plus concurrentiel. On a aussi proposé un genre d'exclusivité pour ce qui est de la desserte. Si je ne me trompe pas, c'est une solution que vous et l'UMQ avez privilégiée.
Où en est ce projet? Quels sont les obstacles qui se dressent à la mise en place d'une telle solution, si c'est la volonté locale?
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Nous travaillons actuellement sur la formule 2.0 de cette façon de faire. L'objectif était effectivement d'avoir une concurrence de façon ponctuelle, où différents transporteurs peuvent faire une demande pour offrir un service. C'est ce que nous souhaiterions. La concurrence existerait donc pendant une période précise, et un contrat serait attribué pendant plusieurs années. Pour proposer un bon prix, il faut quand même offrir un service pendant un certain nombre d'années.
À l'époque, ce que nous souhaitions, c'était de revenir à un processus d'appel d'offres tous les trois ou cinq ans. La concurrence s'exercerait donc à ce moment-là.
Il faut savoir qu'il n'est pas possible pour nous d'avoir deux ou trois transporteurs qui se font concurrence, comme cela a été mentionné par Mme Wright, parce que nous n'avons pas la masse critique suffisante pour remplir ce type d'avion.
Pour ce qui est du projet, tout à l'heure, j'ai mentionné que nous faisions intervenir l'ensemble des acteurs socio-économiques du milieu. Nous voulons avoir une idée la plus claire possible de la situation avant d'être en mesure d'aller de l'avant.
Actuellement, il y a des problèmes sur le plan juridique. Il y a des choses qu'il n'est pas possible de faire comme entité municipale. Il faudrait être une entreprise, ou encore procéder par des appels d'offres d'une certaine manière. Il y a des obstacles d'ordre juridique à notre démarche, tant au fédéral qu'au provincial.
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Je vous remercie de votre question. L'éléphant dans la pièce, c'est la réglementation en matière d’heures de vol et de service.
Afin de l'appliquer, nous avons dû embaucher plus de gens pour gérer les heures des pilotes, et aussi des préposés à l’affectation des équipages. Nous devons avoir du personnel qui effectue constamment des vérifications en raison de la complexité inouïe de ces règles sur les heures de vol et de service. Elles n'ont rien à voir avec celles que nous avions auparavant.
Le nombre de choses que nous devons surveiller est beaucoup plus laborieux. Puisque nous avons perdu 30 % des heures de travail de tous les pilotes, nous avons dû embaucher plus de gens, ce qui ne fait qu'augmenter le coût de tout le reste, comme la formation de deux pilotes par avion au lieu d'un. Les répercussions économiques de ces règles sont énormes pour nous.
Les autres règlements dont je parlais nécessitent principalement des ressources administratives pour les services juridiques, la formation de tous les membres de notre personnel et l'élaboration des manuels. On parle parfois de 50 000 $ pour créer un manuel. Il y a beaucoup de règlements qui sont adoptés, et ils arrivent tous très vite. Je travaille pour cette entreprise depuis 15 ans. C'est très rapide.
Voici mon message. Ceux qui élaborent ces manuels et mettent en œuvre ces règlements doivent également offrir des options à faible coût à nos consommateurs et trouver un moyen d'améliorer les déplacements.
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Monsieur le président, j'aimerais apporter une précision sur certains commentaires de Mme Wright au sujet des petits exploitants.
Le fait est que les exploitants disposent d'une plus grande souplesse à l'égard du Règlement sur la protection des passagers aériens et l'accessibilité, même avec des règlements sur les heures de vol et de service. La réglementation sur le temps de vol des pilotes leur donne essentiellement une marge de manœuvre pour se conformer.
En ce qui concerne le temps de vol des pilotes, ils se conforment aux directives de toutes les autres compagnies aériennes parce que c'est une question de sécurité, monsieur le président. C'est à cela que tout se résume.
Je suppose que c'est un peu subjectif. En même temps, les commentaires qui ont été faits doivent être précisés et remis dans leur contexte.
Je tiens également à ajouter que pour comprendre les commentaires des petits exploitants du Nord, Transports Canada, comme certains le savent peut-être, a lancé une consultation initiale en mai 2024. Nous sommes en train d'évaluer le tout. Encore une fois, monsieur le président, la sécurité sera toujours une priorité absolue.
Je tenais à apporter cette précision et à donner cette information. N'hésitez pas à faire d'autres commentaires si vous le souhaitez.
Monsieur le président, je veux vraiment en venir aux affaires. C'est ironique, parce que j'ai eu une réunion aujourd'hui avec l'Aéroport international de Kelowna, et c'est notamment ce dont nous parlions. Il était question des activités des petits aéroports, des plans stratégiques, des priorités, des plans d'action et, au bout du compte, de la possibilité de générer d'autres revenus, en plus de ceux tirés de l'exploitation de l'aéroport elle-même. Certains de ces revenus sont quelque peu limités en raison de la réglementation que Transports Canada impose aux petits aéroports, et c'est ce que je veux approfondir.
Comme je l'ai déjà dit, les chaînes d'approvisionnement comptent des biens, mais aussi des personnes. Ces chaînes dépendent de la capacité autorisée ou de l'investissement dans les petits aéroports. Il s'agit souvent d'un transport multimodal, qui combine les rails, les airs et les eaux. Mais dans le cas du transport aérien qui nous intéresse, nous devons mettre plus de mécanismes à leur disposition pour qu'ils génèrent plus de revenus.
Premièrement, qu'est‑ce qui fait obstacle aux aéroports dans la réglementation qui, si c'était plus vaste, pourrait autrement encourager plus d'entreprises et, par conséquent, générer des revenus sur les terres ou dans le plan d'affaires des aéroports? Deuxièmement, quels règlements en particulier pourraient poser un tel obstacle?
Je vais commencer par M. Paradis, car il a mentionné certaines des occasions d'affaires qui pourraient se présenter dans sa région.
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Je vais essayer de répondre à la question. J'avoue que je ne l'ai pas entièrement comprise, l'anglais n'étant pas ma langue maternelle.
On a parlé de ce qui pouvait limiter les occasions d'affaires ou en faire perdre. Je vais donner un exemple.
Tantôt, il a été question des règles relatives au nombre d'heures de vol. Prenons, par exemple, un vol qui part de Montréal et qui s'arrête d'abord à Mont‑Joli pour se rendre ensuite à Gaspé. L'équipage ne peut pas se rendre à Montréal pour le retour. Il faut donc changer d'équipage, ce qui a vraiment une incidence importante, car on doit ajouter une équipe supplémentaire pour le voyage de retour. Ainsi, le voyage devient impossible d'un point de vue concurrentiel.
On a aussi dit que la réglementation devrait être faite en fonction de la taille des entreprises. Je pense qu'il faut y réfléchir, parce qu'effectivement, les petits transporteurs sont soumis aux mêmes règles que les grands, alors que la réalité quant à leurs activités quotidiennes n'est absolument pas la même.
Les autres règles en place n'ont pas autant de répercussions. Certaines règles de sécurité sont normales. Ce sont les règles relatives au nombre maximal d'heures de vol pour les pilotes qui nous ont vraiment touchés dernièrement.
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Il n'y a personne. D'accord.
En ce qui concerne la question que j'ai posée plus tôt au sujet des commentaires que Transports Canada a reçus des petits exploitants du Nord en mai 2024, les témoins ont-ils des remarques à ce chapitre?
Je tiens à dire ceci. Lorsque nous menons ces études et ces consultations auprès des membres de l'industrie, ce ne sont pas les réponses à nos questions qui comptent, mais plutôt celles qui sont données aux analystes. Ce sont eux qui les intégreront au rapport final, qui comprendra bien sûr des recommandations à l'intention de la ministre.
Par conséquent, les témoins ont-ils d'autres commentaires à faire sur les questions que j'ai posées?
Comme il n'y en a pas, je passe à autre chose. Mon temps est écoulé. Merci.
Bonjour.
Je suis Philippe Noël, vice-président aux affaires publiques et économiques à la Fédération des chambres de commerce du Québec, ou FCCQ. Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue M. Laurent Corbeil, qui est conseiller aux affaires publiques et économiques et responsable des dossiers liés au transport et à la logistique.
Grâce à son réseau de 120 chambres de commerce et de plus de 1 000 membres, la FCCQ représente plus de 45 000 entreprises exerçant leurs activités dans tous les secteurs de l'économie et sur l'ensemble du territoire québécois.
Nous formons le plus important réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec. Nous sommes à la fois une fédération de chambres de commerce et la chambre de commerce du Québec. Notre organisme est aussi membre du groupe d'intervention sur la relance des services aériens régionaux du ministère des Transports du Québec.
Pour la FCCQ, les ordres de gouvernement ont une responsabilité à assumer en matière d'occupation du territoire. Pour ce faire, il est essentiel de rendre les régions le plus accessibles possible. La voie aérienne demeure souvent l'option à privilégier en matière d'efficacité pour le déplacement des personnes, en particulier au Québec, du fait de l'immensité de son territoire.
La FCCQ considère que l'accès au transport aérien régional est primordial afin d'assurer la vitalité de nos régions et pour favoriser leur rayonnement économique. Cet accès leur permet d'être connectées aux destinations mondiales par des aéroports internationaux, comme ceux de Montréal et de Québec.
Nous sommes d'avis que les gouvernements auraient avantage à modifier leur vision des liaisons aériennes régionales et des aéroports régionaux en les voyant davantage comme des outils de développement économique plutôt que comme un coût.
Dans un contexte où le transport aérien régional est un sujet de préoccupation majeur, en particulier dans les régions québécoises, la FCCQ souhaite interpeller les gouvernements pour qu'il y ait une modernisation des aéroports régionaux, qui favoriserait ainsi l'accès à nos régions et le développement de projets porteurs et créateurs de richesse pour tous les Québécois. Il est primordial de nous adapter et d'innover pour être en mesure de faire face à une concurrence de plus en plus féroce et mondiale, et ces investissements sont nécessaires.
Les infrastructures aéroportuaires sont essentielles au développement économique dans les régions éloignées. Elles sont aussi des infrastructures importantes, voire vitales dans certaines communautés, autant pour le transport des personnes que pour celui des marchandises par fret aérien. C'est pourquoi il est important, pour des entreprises et des communautés, d'avoir accès à des liaisons aériennes commerciales fréquentes non seulement pour la livraison de produits, mais aussi pour les déplacements de gens d'affaires. Elles représentent également des infrastructures essentielles à certains services publics. Pensons à la lutte contre les incendies de forêt et au transport d'urgence pour les soins de santé. Pensons aussi au développement de certains projets dans les régions ressources qui font appel au navettage aérien pour l'exploitation de certaines mines, par exemple.
Actuellement, plusieurs aéroports régionaux et locaux ont besoin d'être modernisés, voire développés. Il faut rappeler que les administrations aéroportuaires en région n'ont aucune marge de manœuvre sur le plan financier pour améliorer leurs services. Certaines chambres de commerce ont fait valoir que les investissements gouvernementaux dans les infrastructures devraient égaler, au minimum, ceux des régies intermunicipales aéroportuaires, ce qui n'est pas le cas. Les besoins pour d'autres infrastructures sont plus élevés en matière de financement, que ce soit pour entretenir les pistes ou améliorer les aérogares, entre autres choses.
En fait, la capacité actuelle de certaines infrastructures pose des limites ponctuelles ou saisonnières à la desserte aérienne de certaines régions. Il peut s'agir des besoins en matière de réfection de pistes, d'équipement, d'allongement de pistes, et ainsi de suite. Ces améliorations pourraient représenter un incitatif à l'expansion des liaisons aériennes et ainsi accroître la notion de marché concurrentiel. Dans d'autres cas, la modernisation des infrastructures aéroportuaires est névralgique, ni plus ni moins, pour permettre des retombées économiques dans une région déterminée, ou encore être en mesure d'offrir des services d'urgence aux citoyens.
C'est le cas, notamment, de l'aéroport des Îles‑de‑la‑Madeleine. En raison de la piste trop courte, les avions-cargos ne peuvent y atterrir, ce qui empêche l'exportation du homard madelinot par voie aérienne. C'est le même constat pour les nouveaux avions destinés aux transports d'urgence, qui nécessitent une piste plus longue que celle disponible actuellement. Qui plus est, étant donné les conditions météorologiques de plus en plus extrêmes, le prolongement de la piste d'atterrissage permettrait de réduire le nombre de vols annulés. Nous avons sensibilisé le gouvernement fédéral sur cette attente fondamentale pour les Madelinots, en vain.
Les entreprises doivent pouvoir partager leur expertise et créer des contacts. L'obligation de passer plusieurs nuits à l'extérieur oblige certaines personnes à utiliser un autre mode de transport que les services aériens régionaux, ce qui entraîne une perte de productivité et nuit au rayonnement des entreprises et à leur croissance quand vient le moment de développer leur marché.
Je vous remercie de votre attention. Je vous remercie aussi de prendre en considération nos commentaires.
Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur Noël.
[Traduction]
Chers collègues, comme nous en avons discuté, je pense que nous devrions accorder la priorité dès maintenant aux représentants de la Fédération des chambres de commerce pour nous assurer de pouvoir leur poser des questions.
Monsieur le maire Spence, si vous nous le permettez, nous aimerions d'abord adresser nos questions aux deux représentants de la Fédération. Puis, dans environ 12 minutes, nous pourrons nous concentrer sur vous, monsieur, et vous permettre de faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous vous poserons nos questions.
Cela vous convient‑il, monsieur le maire? Je vois un pouce levé. D'accord.
[Français]
Nous commençons par M. Muys.
[Traduction]
Monsieur Muys, vous avez la parole. Vous avez trois minutes, monsieur.
:
Merci, monsieur le président.
Je suis heureux que nous puissions poser des questions à MM. Noël et Corbeil.
Vous avez donné de bons exemples des possibilités économiques qui s'offrent, en particulier dans les régions-ressources du Québec. Nous sommes d'ailleurs arrivés à cette conclusion tout au long de cette étude, lorsque nous avons examiné le Nord et d'autres régions du pays. Il y a toutes sortes d'occasions à saisir.
L'une des préoccupations que nous avons exprimées, c'est qu'il y a beaucoup d'obstacles au service aérien essentiel dont nous avons besoin non seulement pour transporter les travailleurs et les gens, mais aussi pour assurer le service de ces régions. Celles‑ci seront importantes pour les débouchés économiques d'aujourd'hui et de demain. Il y a des taxes, des frais et des tracasseries administratives dans les régions du Nord, comme nous l'a dit plus tôt la représentante de la compagnie aérienne.
J'aimerais savoir si vous pouvez nous en dire un peu plus à ce sujet. Il est important d'examiner les façons dont le gouvernement fédéral peut investir dans l'infrastructure pour éliminer certains des obstacles afin que ces possibilités économiques puissent être saisies.
:
Je vais prendre la parole en premier, mais, par la suite, je vais laisser mon collègue M. Corbeil donner son avis.
Pour ce qui est des entraves, la disponibilité des pilotes est évidemment un élément qui revient extrêmement souvent dans les commentaires, outre les infrastructures. Les groupes intéressés par le transport aérien régional discutent de la façon dont le gouvernement fédéral pourrait mettre en place des règlements visant à réduire les délais pour l'obtention des permis et des licences de pilote. Il faudrait aussi augmenter le nombre d'heures de vol autorisé, sans compromettre la sécurité.
Actuellement, il s'agit d'un frein important à la capacité des transporteurs d'offrir des liaisons régulières et fréquentes. Le milieu des affaires n'est toujours pas convaincu de la pertinence de limiter à ce point le nombre d'heures de vol autorisé. On pense qu'on pourrait faire preuve d'un peu plus de flexibilité. Il faut effectivement qu'il y ait une limite afin d'assurer la sécurité, mais cela pourrait refléter davantage la réalité des pilotes et l'offre de pilotes.
On a aussi discuté de la possibilité d'accorder une aide sous forme de financement des études. Acquérir une licence, cela coûte très cher aux apprentis pilotes.
Nous pensons que le gouvernement du Québec devrait avoir des discussions avec ses homologues fédéraux sur cette question. Il faudrait, à tout le moins, que, de votre côté, vous ayez en tête de modifier la réglementation pour répondre à la pénurie de pilotes d'avion actuelle.
Il s'agit d'un des problèmes.
:
Il s'agit d'une question tout à fait pertinente.
Notre organisation, soit la Fédération des chambres de commerce, représente 120 chambres de commerce, qui sont situées sur tout le territoire. Nous tenons fréquemment des discussions avec leurs représentants. D'ailleurs, les chambres de commerce nous interpellent souvent pour nous donner le pouls du terrain. Nous répertorions tous ces avis, qui proviennent de l'ensemble des régions du Québec. En matière de transport aérien régional, il y a vraiment un consensus: le système actuel ne fonctionne pas.
Pour une chambre de commerce comme la nôtre, cette constatation a été révélatrice et elle nous a amenés à donner un tour de roue. Cela s'est avéré être un tour de force idéologique d'en arriver au constat que le libre marché ne fonctionne pas et qu'il faudrait un marché réglementé et concurrentiel qui laisse une place aux transporteurs privés.
Habituellement, nous sommes favorables au libre marché. Cependant, dans ce cas-ci, le système ne fonctionne pas. Il a atteint ses limites. C'est la raison pour laquelle nous avons appuyé le système d'appel d'offres pour l'attribution des lignes assurant les liaisons aériennes pour le transport aérien régional sur le territoire québécois. L'objectif est d'avoir des liaisons fréquentes, régulières et à prix modique, sans compromettre la rentabilité des transporteurs, autant que possible.
Notre position découle notamment des discussions que nous avons tenues avec les chambres de commerce. Nous avons aussi tenu compte des préoccupations et des attentes en matière de transport aérien régional que nous avons répertoriées.
:
Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux témoins.
Monsieur Noël, dans votre allocution d'ouverture, vous avez mentionné faire partie du comité de travail sur le transport aérien régional, qui a été mis en place par le gouvernement du Québec. Nous avons aussi reçu M. Daniel Côté, qui siège à ce comité au nom de l'UMQ, je crois. Ce dernier nous a dit être déçu que le gouvernement fédéral, qui a été invité à participer au comité, ne soit pas présent. Je me demandais si, du côté de la FCCQ, vous auriez aimé, vous aussi, voir le gouvernement fédéral à la table de discussion.
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Effectivement, nous aurions aimé voir cela. Je pense que la présence du gouvernement fédéral aurait été importante en raison de son implication dans les dossiers du transport aérien.
Nous préconisons, comme le font M. Daniel Côté, de l'UMQ, et d'autres acteurs économiques, le système d'appels d'offres pour des liaisons aériennes régionales en territoire québécois. Cela ne concerne aucunement les liaisons aériennes à l'étranger. Nous nous basons sur un modèle qui a fait ses preuves aux États‑Unis et en Australie. Nous voulons qu'il y ait des liaisons exclusives pour les transporteurs vers des destinations précises et que l'État compense les pertes. Cette responsabilité n'incombe pas uniquement au gouvernement du Québec. Elle incombe aussi au gouvernement fédéral, selon nous.
Dans ces groupes de travail, il est aussi question de la réglementation fédérale et de modifications réglementaires, notamment par rapport aux pilotes, comme je l'ai mentionné précédemment. En effet, ce serait bien que le gouvernement fédéral soit présent.
Notre temps de parole est assez limité. Par conséquent, j'aimerais vous proposer de nous soumettre un mémoire, si vous en avez l'occasion, qui comprendrait une liste de recommandations que vous aimeriez voir mettre en place. Cela pourrait compléter votre témoignage.
Cela étant dit, en plus de la question des régies, vous avez aussi abordé la question de l'investissement en immobilisations. Plusieurs témoins ont mentionné que le PAIA était stagnant, voire maintenant très insuffisant. En outre, d'autres témoins ont aussi parlé du fait que le fédéral pourrait s'engager à réinvestir l'argent qu'il prélève des loyers des aéroports.
Quelle est la position de la FCCQ à ce sujet?
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Je vous remercie de me donner l'occasion de participer à cette discussion très importante.
Pour les collectivités du Nord comme Churchill, le transport aérien est un lien vital et essentiel. C'est indispensable pour nos déplacements à des fins médicales, la sécurité alimentaire, le tourisme et le développement économique. Dans notre cas, la situation du transport aérien ne s'est pas améliorée depuis un certain temps.
Notre situation est en quelque sorte unique par rapport à d'autres collectivités, en ce sens que nous avons une infrastructure considérable. À l'origine, notre aéroport a été construit par l'armée et faisait partie de l'établissement militaire de Fort Churchill. Notre aéroport est probablement l'un des plus longs du Nord canadien. C'est une piste d'asphalte de 9 195 pieds qui peut accueillir n'importe quel gros aéronef. Aujourd'hui, il est censé servir d'aéroport public pour la recherche scientifique, l'écotourisme, le transport médical, le fret et le réapprovisionnement de marchandises, ainsi que pour les déplacements entre Churchill et Winnipeg.
Cependant, cette infrastructure essentielle est sous-exploitée. Par conséquent, Churchill est mal desservie par avion, tant pour les passagers que pour le fret.
Comme nous le savons, Churchill est une destination de classe mondiale. C'est l'un des aéroports canadiens les plus au nord à être relié par ligne terrestre aux Territoires du Nord. Ce service de piètre qualité limite la croissance économique et entrave les possibilités au Canada et à Churchill pour les collectivités autochtones et nordiques du Manitoba.
Les compagnies aériennes ne tiennent pas suffisamment compte des répercussions économiques et communautaires, en particulier pour les collectivités autochtones nordiques. Dans le passé, Churchill a été un carrefour régional essentiel qui reliait la région à Winnipeg et au Nunavut.
En fait, je veux saisir l'occasion pour parler de ce point. C'est extrêmement important, surtout après la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation qui a eu lieu hier partout au pays.
Churchill a tissé des liens avec nos voisins du Nord pendant de nombreux siècles. Dans la région de Kivalliq au Nunavut, le lien entre ma communauté d'origine et Kivalliq revêt une importance culturelle majeure, car il réunit des familles et des générations de gens qui ont travaillé ensemble, vécu ensemble et pris soin les uns des autres. Ce lien traditionnel entre nos collectivités a maintenant été rompu par des horaires de transport aérien qui ne tiennent pas compte de ces types de relations communautaires ancestrales. Par conséquent, les liens historiques avec les cultures et le commerce traditionnels et avec la terre ont été coupés.
La planification des aéroports et des voyages aériens ne cadre pas avec les objectifs communautaires et les intérêts des communautés. C'est une préoccupation majeure pour beaucoup de gens de Churchill et du Nord. C'est une question qui entre en ligne de compte dans les décisions sur le transport aérien qui sont soumises à un monopole. Les communautés sont souvent exclues de la planification des aéroports. Par exemple, il arrive souvent que les appels d'offres gouvernementaux ne cadrent pas bien avec les initiatives et les priorités régionales et communautaires. Les appels d'offres pour le fret, le transport médical et le transport de passagers ne répondent pas aux besoins de la collectivité.
Comme vous le savez, Churchill est une destination touristique internationale. Destination Canada dit au monde entier que c'est le meilleur endroit où regarder un ours sauvage dans les yeux, et c'est aussi la capitale mondiale du béluga pendant l'été. Il n'y a pas de meilleur endroit pour faire du kayak avec des milliers de bélugas, et pourtant, les exploitants d'entreprises touristiques sont parfois obligés de louer des avions à réaction privés 737 et des avions de passagers ATR 72 et 42 pendant des périodes de l'année. Cette pratique divise encore plus la collectivité, car il est parfois plus facile pour des touristes de venir en ville et d'en repartir, que pour les gens, de la région de réserver un vol pour visiter leurs petits-enfants dans le Sud.
En fin de compte, il est embarrassant de parler de notre service aérien, et quelque chose doit changer.
Comme vous le savez sans doute, le réaménagement du port de Churchill et le travail acharné que nous avons fait pour relancer le port et le chemin de fer de la baie d'Hudson nous permettent enfin d'offrir le corridor commercial depuis longtemps promis dans l'Arctique canadien. Le modèle de propriété retenu est l'Arctic Gateway Group, un regroupement composé de 41 collectivités autochtones et de la baie d'Hudson, y compris Churchill. Il s'agit donc d'une infrastructure appartenant à des intérêts locaux.
Nos communautés autochtones et nordiques sont la force motrice de la revitalisation du port et du chemin de fer. Nous ne serions pas ici aujourd'hui si nous ne le faisions pas collectivement, tous ensemble. C'est primordial pour l'activité économique dans le Nord. Cela aide également le Canada à affirmer plus fermement sa souveraineté dans l'Arctique. Tout cela est possible grâce à la mobilisation des dirigeants locaux. Nous avons repris en main ces actifs et, de concert avec la province du Manitoba et le gouvernement fédéral, nous les développons au profit de nos collectivités.
En ce qui concerne le transport aérien, nous voulons faire partie de la solution, mais nos collectivités ne peuvent pas régler ces problèmes à elles seules. La concurrence au sein du transport aérien dans les collectivités nordiques et rurales est d'une importance cruciale. Nos communautés ont besoin d'un meilleur service. Nous avons besoin de l'aide du gouvernement et d'autres partenaires pour y arriver. Les solutions n'ont rien de simple, et le statu quo n'en fait pas partie. Nous devons garder ces actifs en bon état et continuer à en optimiser les avantages pour nos collectivités.
On pourrait aussi favoriser une plus grande concurrence entre les compagnies aériennes dans le Nord en éliminant les obstacles à l'accès au marché, en surveillant les comportements prédateurs et en cherchant des moyens de fournir un soutien financier aux entreprises en démarrage autochtones et locales. Les propriétaires issus du milieu sont mieux à même de répondre aux besoins locaux dans le contexte du tourisme, mais aussi des réalités scientifiques, culturelles et familiales. Nous pouvons tous nous assurer que les collectivités du Nord sont bien servies en exigeant que les compagnies aériennes offrent des liaisons quotidiennes ou, tout au moins, cinq jours par semaine. Nous devons également limiter les prix abusifs, un phénomène courant.
Nous devons examiner les modèles qui existent ailleurs dans le monde. Par exemple, aux États‑Unis ou en Europe, on subventionne les services aériens essentiels. De telles subventions n'existent pas au Canada, mais elles pourraient contribuer à faire en sorte que des collectivités comme Churchill soient mieux servies et plus faciles d'accès. Ces types d'accords peuvent prévoir un niveau de service minimal.
En conclusion, j'aimerais souligner l'importance cruciale du transport aérien pour les collectivités du Nord comme Churchill.
Comme ces témoins représentent les chambres de commerce du Québec, je veux leur demander s'il y a des besoins particuliers qui ne sont pas comblés dans les communautés autochtones du Nord du Québec. Je sais, par exemple, qu'il y a au Nunavik 14 communautés inuites et, je crois, une dizaine de communautés des Premières Nations. J'espère que les gens des chambres de commerce pourront nous donner une meilleure idée des besoins de ces communautés autochtones et nous soumettre des recommandations en conséquence.
Monsieur Spence, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui et de nous faire part de certaines de vos expériences en tant que maire de la petite collectivité éloignée de Churchill. Ce lien dont vous avez parlé avec Qikiqtaaluk dans ma circonscription du Nunavut est tout ce qu'il y a de plus réel. Ma grand-mère est enterrée à Churchill même. Voilà à quel point nos liens étaient étroits à l'époque. Je comprends donc très bien ce que vous dites à ce sujet.
Je veux vous poser la question suivante. Quelle est l'incidence du manque de concurrence dans le service aérien à Churchill, une ville qui n'est desservie que par Calm Air? Quelles répercussions êtes-vous à même d'observer du point de vue économique? Selon vous, quels avantages y aurait‑il à accroître la concurrence?
:
Il va de soi que la situation est difficile pour nous actuellement du fait que nous n'avons que deux vols par semaine en dehors de la saison touristique habituelle, comme c'est le cas en octobre et en novembre. Cela complique grandement les déplacements pour des raisons médicales.
Par exemple, si je vais chez le médecin et que je fais faire mes analyses sanguines le lundi — et c'est la même chose le mardi —, il arrive que les prélèvements ne se rendent pas à Winnipeg avant le vendredi. Il faut savoir que l'hôpital de Churchill a un contrat avec un petit transporteur aérien pour déplacer vers Winnipeg des patients et des professionnels de la santé ainsi qu'une partie des échantillons sanguins qui y sont prélevés, mais il y a des moments où il est vraiment débordé.
C'est notre vitalité économique qui en souffre. Lorsqu'il n'y a que deux vols par semaine, l'économie est mise à rude épreuve. C'est notamment le cas pour le secteur de l'hébergement, les services, les personnes qui doivent se déplacer et l'industrie touristique qui n'est pas en mesure de respecter ses arrangements pour les réservations. La situation devient donc très difficile. J'y vois un gros inconvénient pour notre collectivité, surtout en tant que destination touristique et du fait que certains résidants souhaitent se rendre ailleurs.
Par ailleurs, j'ajouterais que si je dois aller à Winnipeg sans pouvoir réserver longtemps à l'avance, le billet d'avion aller-retour me coûtera 2 400 $, un tarif inacceptable pour certains. Si l'on veut vraiment générer des retombées économiques pour la collectivité, il est essentiel que nous puissions compter sur des liaisons aériennes au moins cinq fois par semaine.
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Je remercie les témoins.
Je suppose que M. Spence est toujours en ligne. Je vous remercie, monsieur Spence, d'être des nôtres aujourd'hui.
Dans un article que j'ai lu récemment en prévision de cette réunion, vous avez indiqué que la relance du trafic de réapprovisionnement via le port de Churchill est une étape cruciale pour rétablir la vitalité économique dans le Nord du Manitoba. En fait, je sais que mon chef, , a parlé de la nécessité de redonner au port de Churchill les capacités voulues pour les exportations futures de combustibles fossiles, de gaz naturel liquéfié et de produits agricoles.
Vous êtes maire depuis longtemps. Quelles sont les relations entre les autorités portuaires et celles de l'aéroport? Que pourrions-nous envisager d'un point de vue stratégique, dans une perspective nationale, pour à la fois favoriser le développement économique dans votre région et habiliter les Premières Nations locales à y contribuer de façon significative?
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Comme je l'ai mentionné, et je pense que vous le savez, nous avons notamment coalisé les collectivités touchées par la gestion déficiente du port et des installations ferroviaires. On avait laissé la situation se détériorer, et nous avons pris l'initiative de remettre les choses sur la bonne voie. En étant propriétaires de ces infrastructures, nous devons nous assurer de faire les investissements nécessaires. Ces actifs nous appartiennent et sont notre planche de salut.
Pour ce qui est des autres possibilités, la collaboration avec l'aéroport est d'une importance capitale. Toute collectivité portuaire — si je peux utiliser cet exemple, parce que vous en avez parlé — doit pouvoir compter sur un service quotidien fiable et responsable pour ce pilier économique qui lui ouvre vraiment toutes les portes. Nous devons nous assurer de fonctionner à plein régime. Nous devons veiller à fournir de façon adéquate les services auxquels les gens s'attendent.
L'autre atout à notre disposition pour stimuler la croissance régionale, c'est notre très longue piste d'atterrissage. Comme je l'ai indiqué, elle fait 9 200 pieds. Elle appartient au gouvernement du Canada qui en assure l'entretien. C'est la seule piste d'atterrissage de cette envergure dans la région. Nous devons nous assurer d'investir dans les infrastructures essentielles comme celle‑là afin de pouvoir continuer à desservir et à approvisionner les collectivités situées plus au nord.
Nous avons en fait besoin d'une infrastructure permettant le transport des marchandises par train jusqu'à l'aéroport pour qu'elles soient ensuite expédiées au Nunavut et dans l'Arctique. Dans le cadre du programme Nutrition Nord, il pourrait ainsi devenir possible de rendre accessibles aux résidants de ces régions des produits de base comme les denrées alimentaires à des prix raisonnables.