:
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 56e réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 3 février 2022, le Comité se réunit pour étudier le transport interurbain par autobus au Canada et discuter de ses travaux.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 23 juin 2022. Les députés peuvent donc participer en personne dans la salle ou à distance par l'intermédiaire de l'application Zoom.
[Traduction]
Avant de commencer, je souhaite informer le Comité que les connexions de tous les témoins ont été mises à l'essai pour la réunion d'aujourd'hui. Ils ont réussi l'essai sonore au profit de nos interprètes.
JoAnn Jaffe, professeure du Département de sociologie et des sciences humaines de l'Université de Regina, et Adele Perry, professeure distinguée d'histoire et d'études des femmes et des genres, comparaissent aujourd'hui devant le Comité par vidéoconférence. Soyez les bienvenues.
[Français]
Nous accueillons également M. Pierre Maheux, administrateur à la Fédération des transporteurs par autobus et à qui je souhaite la bienvenue.
Ensuite, de l'Union des municipalités du Québec, nous recevons M. Daniel Côté, président, et M. Samuel Roy, coordonnateur aux politiques. Tous deux participeront par vidéoconférence.
[Traduction]
Enfin, nous accueillons par vidéoconférence Jason Roberts, directeur général de DRL Coachlines Limited.
Aujourd'hui, nous commencerons par entendre la déclaration préliminaire de la professeure JoAnn Jaffe.
Vous avez la parole pendant cinq minutes.
:
Je vous remercie de m'avoir invitée à participer à votre réunion. Je me joins à vous depuis le territoire visé par le Traité n
o 4.
Je vais faire valoir quatre arguments.
Premièrement, je vous signale que les transports sont des infrastructures essentielles et que cela vaut autant pour les collectivités rurales et éloignées que pour les collectivités urbaines.
Deuxièmement, le droit d'habiter dans les zones rurales et la possibilité d'y mener une vie agréable dépendent de plus en plus du droit de se déplacer, c'est‑à‑dire de la mobilité et de la possibilité de se déplacer selon ses besoins et ses désirs.
Troisièmement, la mobilité est de plus en plus souvent un facteur d'inégalité, en particulier pour les populations rurales et isolées déjà défavorisées.
Quatrièmement, on ne peut s'attendre à ce que le marché règle ce problème. Il est nécessaire d'avoir recours à des modèles innovants, intégrés, publics et coopératifs à l'échelle du système pour pouvoir exploiter pleinement le potentiel et les avantages des transports en commun.
Je vais aborder tour à tour chacun de ces sujets.
Les transports font partie des frais généraux liés au développement essentiel. Il s'agit d'infrastructures essentielles pour les zones rurales. Leur absence a pour effet de désavantager et de rendre vulnérables les collectivités rurales et les personnes qui y vivent. Les transports influent considérablement sur la manière dont les activités sociales et économiques se déroulent et sur le lieu où elles se déroulent, ainsi que sur la trajectoire de développement des collectivités rurales. Ils jouent un rôle crucial dans l'établissement des relations entre les lieux et les flux de personnes, de biens et de services.
Cependant, il est facile de négliger les réseaux et les systèmes de transport qui constituent des infrastructures essentielles, car les rôles qu'ils jouent en permettant des activités et en fournissant des biens et des services publics et privés sont souvent invisibles. La politique des transports est une politique économique, une politique de développement rural, une politique agricole, une politique sanitaire, une politique environnementale, une politique culturelle, une politique de santé mentale et une politique de lutte contre la solitude. C'est aussi une politique de réconciliation.
Le droit d'habiter dans des zones rurales et notre droit à des zones rurales dynamiques et durables dépendent de plus en plus de la mobilité, ou de ce que l'on appelle parfois les droits d'accès à la ville depuis les zones rurales. La restructuration rurale au Canada a entraîné une augmentation des inégalités, de la pauvreté, de l'insécurité alimentaire, du nombre de travailleurs temporaires et à faible revenu et du nombre d'immigrants dans les zones rurales. En même temps, les services, tant publics que privés, quittent les zones rurales et se centralisent dans les grandes villes. Les gens vivent de plus en plus fréquemment leur vie dans plusieurs régions, étant donné que leur emploi, leur éducation, leur famille, leurs soins de santé, leurs services sociaux, leurs emplettes et leurs activités de loisirs sont répartis sur plusieurs kilomètres. Pendant que le secteur privé et les gouvernements améliorent leurs résultats en procédant à des regroupements et des réductions de services, ces coûts sont transférés aux utilisateurs ruraux, qui doivent payer plus cher et voyager plus loin ou renoncer à certains services.
Ces mêmes personnes sont moins susceptibles d'avoir accès à des technologies de communication qui compensent la perte de moyens de transport et d'accès aux services, comme la possibilité d'obtenir des conseils médicaux en ligne ou de faire des achats en ligne. Pour vivre et s'épanouir dans les zones rurales, les gens ont besoin de moyens de transport.
Les lieux de résidence jouent un rôle dans la perpétuation de la pauvreté, tout comme le développement inégal de ces divers lieux. Les contraintes liées à l'accessibilité fondée sur les moyens de transport « ont tendance à aggraver ces inégalités sociospatiales, ce qui aboutit à des privations multidimensionnelles et, en fin de compte, à des pièges à pauvreté ». Ces contraintes intensifient et aggravent également l'expérience des déficiences et rendent plus difficile la possibilité d'échapper à des situations de violence familiale et à de mauvais traitements.
En revanche, l'accès à des moyens de transport et la mobilité dans les régions pauvres peuvent améliorer l'accès à des biens publics et à des services sociaux de meilleure qualité pour les personnes défavorisées vivant dans ces régions, et peuvent favoriser la réduction de la pauvreté et une meilleure qualité de vie à la fois pour les particuliers et les communautés.
Cependant, nous ne devrions pas nous attendre à ce que le marché règle ce problème. Contrairement à la démocratie où chaque personne a voix au chapitre, les marchés réagissent à l'argent, et plus il y a d'argent, plus il y a de voix. Les marchés réagissent aux possibilités de rentabilité privée. Il est peu probable qu'en s'en remettant aux marchés pour décider de l'offre ou du fonctionnement des transports, on obtienne des solutions aux problèmes que je viens de décrire.
En outre, la société a créé des règles du jeu inégales pour les transports en commun et les automobiles privées. L'ensemble du système est façonné par l'automobilité — la présomption par défaut d'un accès généralisé aux voitures et d'une dépendance à leur égard — et par des subventions liées aux automobiles et aux camions, qui sont omniprésentes bien qu'invisibles la plupart du temps, sous forme de deniers publics consacrés à la construction et à l'entretien des infrastructures physiques, ainsi qu'à la gestion des effets des accidents, de la pollution et des pertes de possibilités.
Les gouvernements peuvent intervenir dans les réseaux de transport, et le font, afin de façonner des systèmes qui rendent mieux compte des objectifs des politiques publiques, comme un accès aisé aux soins de santé, à l'éducation et au travail.
Il est vrai que l'amélioration des transports peut être une arme à double tranchant pour les régions rurales. De mauvais investissements peuvent avantager les régions riches au détriment des régions pauvres. Cependant, avec une consultation adéquate et la reconnaissance des besoins locaux, les effets des investissements dans les transports en commun sont susceptibles d'améliorer l'égalité et de réduire la pauvreté, ce qui profitera à la fois aux populations et aux régions.
Merci.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Pierre Maheux, d'Autobus Maheux, une compagnie de transport par autobus. Cette entreprise familiale, qui a acquis son premier autobus scolaire en 1958, il y a 65 ans, compte maintenant à peu près 200 véhicules et 330 employés.
Elle assure différents types de transport par autobus, soit le transport scolaire, nolisé, interurbain et à forfait. Plus particulièrement, elle assure maintenant dans la région de l'Abitibi‑Témiscamingue une partie des services auparavant offerts par Voyageur. Elle couvre neuf lignes de transport interurbain dans les régions de l'Abitibi‑Témiscamingue, de Montréal et de l'Outaouais.
Autobus Maheux possède donc une certaine expérience, pour ne pas dire une expertise, en matière de transport par autobus, surtout pour desservir nos régions et nos populations dont les services de transport interurbain souffrent beaucoup.
En effet, le réseau de transport interurbain, particulièrement au Québec, est actuellement aux prises avec un important problème, l'achalandage de 2022 n'étant pas ce qu'il était en 2019. La plupart des transporteurs se trouvent encore en situation de récupération, ce qui n'est pas sans causer des préoccupations pour les lignes de transport régionales.
Dans le cas d'Autobus Maheux, la ligne principale assurant la liaison entre Rouyn‑Noranda, Val‑d'Or et Montréal est celle qui a toujours soutenu financièrement les sept autres lignes régionales. Ilexiste donc une notion d'interfinancement, qu'il est important de prendre en compte en vue de la période des questions qui suivra.
Aujourd'hui je m'adresse à votre comité principalement au nom d'Autobus Maheux, mais je suis également administrateur pour la Fédération des transporteurs par autobus , au Québec, fruit d'une fusion entre l'Association des propriétaires d'autobus du Québec, ou APAQ, et l'Association du transport écolier du Québec, ou ATEQ.
En 2002, dans le cadre des fonctions d'administrateur que j'assumais alors, j'ai eu l'occasion de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, présidé à l'époque par la sénatrice Lise Bacon. J'y ai fait valoir à peu près les mêmes arguments que j'ai l'impression de devoir présenter au gouvernement fédéral aujourd'hui.
Comme la dame qui a témoigné avant moi l'a mentionné, le problème reste le même. Les régions rurales sont appelées à voir des services disparaître. Même si la responsabilité première des services de transport aux régions relève des provinces, notamment par l'entremise de programmes d'aide, c'est le gouvernement fédéral qui leur a confié cette responsabilité.
Cependant, comme je l'avais mentionné en 2002, le gouvernement fédéral n'a peut-être pas à réglementer les programmes d'aide provinciaux, mais il se mêle tout de même du transport interurbain. Je pense notamment à VIA Rail Canada, qui reçoit des sommes énormes du fédéral et qui ne s'empêche pas de concurrencer les transporteurs interurbains par autobus sur différentes lignes, comme celles de Montréal—Québec ou de Montréal—Senneterre.
À mon avis, le gouvernement fédéral pourrait offrir des programmes d'aide qui auraient un énorme impact dans les régions. À Ottawa, à Montréal ou dans d'autres grands centres, 25 passagers de plus sur une ligne urbaine ne représentent qu'une statistique négligeable, mais c'est différent sur une ligne régionale, où 10 passagers supplémentaires peuvent garantir l'existence de la ligne et éviter sa disparition.
Les milieux ruraux ne sont pas la cible préférée des gouvernements et des municipalités, qui privilégient les milieux urbains, ce qui est logique, car c'est là que se retrouve la masse critique. Toutefois, selon moi, il est important que le gouvernement fédéral accorde plus d'attention au problème des lignes régionales abandonnées.
Pour ce qui est de l'aide financière qui peut être apportée, je pourrai soumettre des propositions. Je peux cependant vous dire que l'achalandage de 2022 sur le réseau dans notre région a diminué de 50 % par rapport à celui de 2019. Sur notre ligne principale, qui est censée être celle qui fait vivre le réseau, l'achalandage a baissé de 30 %. Selon mes collègues d'Intercar, l'achalandage a baissé de 50 % dans les régions du Saguenay—Lac‑Saint‑Jean et de la Côte‑Nord, et il ne reste plus que 25 % de la clientèle sur ces lignes régionales.
Plus on s'approche des grands centres, meilleure est la situation. Pour Montréal et Sherbrooke, Transdev Canada confirme qu'il lui manque encore de 20 à 25 % de son volume habituel.
Pour avoir une idée des problèmes dans les villes de moins grande envergure, on n'a qu'à regarder en Beauce, où mon collègue Pierre Breton, d'Autobus Breton, a annoncé la fin du service entre la Beauce et Québec en passant par Saint‑Georges, Sainte‑Marie et Saint‑Joseph‑de‑Beauce, parce que c'est une ligne déficitaire, comme trois autres lignes que nous assurons: celle de Rouyn‑Noranda à Toronto, en passant par Ville‑Marie et North Bay, avec Ontario Northland; celle de Rouyn‑Noranda à La Sarre; et celle de Val‑d'Or à Chibougamau vers le nord, avec Intercar.
Dans des milieux ruraux, de nombreuses lignes sont déficitaires, mais certaines existent toujours pour la simple raison que le gouvernement du Québec leur a apporté une aide financière d'urgence. Je pense que le gouvernement fédéral a un rôle plus important à jouer sur le plan régional.
Je n'ai pas entendu l'interprétation des propos de l'intervenant précédent. Je vais donc m'en tenir à mon exposé à mon tour.
Comme l'a dit l'un de nos intervenants, la situation des autobus au Canada est très contraignante en ce qui concerne le rapprochement des régions de notre province et de notre pays avec les régions périphériques et les zones rurales. En ce qui me concerne, à Terre‑Neuve, nous appelons cela la Transcanadienne, de Port aux Basques à St. John's, cette dernière ville étant notre principale plaque tournante. La plupart des activités importantes qui surviennent dans la vie d'une personne se déroulent à St. John's, qu'il s'agisse de soins médicaux, de l'aéroport le plus important ou de toute autre activité.
Pour ma part, j'exerce des activités dans ce domaine depuis 27 ans, de St. John's à Port aux Basques. Nous avons décidé d'acheter ce service après qu'une société d'État l'a abandonnée parce qu'elle perdait beaucoup d'argent.
Je pense que l'un des aspects les plus importants sur lesquels je voudrais insister, c'est l'émigration. Les chiffres diminuent, mais même s'ils sont stables à l'heure actuelle... Ils sont plutôt bons en ce qui concerne le nombre de personnes qui utilisent les transports en commun. Je trouve toujours très intéressant de savoir pourquoi nous, en tant que transporteurs se rendant dans les grands centres et dans toutes les villes intermédiaires, sommes traités différemment des exploitants de nos zones métropolitaines. Ceux‑ci reçoivent d'importantes subventions pour l'exploitation de leurs services. Mais qu'en est‑il de nous?
Je peux utiliser comme exemple notre service Metrobus à St. John's, Terre‑Neuve. Entre Metrobus, la plaque tournante et Wheelway, qui sont trois divisions différentes de la ville, ces exploitants reçoivent une subvention d'environ — et je vais rester prudent — 16 millions de dollars par an pour l'exploitation de ce service, dans le cadre duquel ils desservent environ 200 000 personnes. Nous desservons 250 000 personnes, et nous ne recevons pas d'argent — pas un cent.
Hier aux nouvelles à Terre‑Neuve, il a été mentionné que la province aimerait qu'un plus grand nombre de transports interurbains et ruraux soient offerts pour contribuer à lutter contre la pollution ou contre les gaz à effet de serre et tout le reste, mais selon moi, il faut simplement oublier les gaz à effet de serre et traiter la société équitablement. C'est ainsi que je vois les choses. Nous voulons voir une certaine égalité dans la province de Terre‑Neuve et dans toutes les provinces du Canada. Nous en avons besoin. Je ne me soucie pas de savoir qui apporte cette égalité; je laisse au gouvernement le soin de s'en occuper. S'il veut le faire et subventionner cette égalité, cela n'a pas d'importance.
Si j'ai continué et si nous avons continué, c'est parce que nous pensons qu'il est préjudiciable de ne pas le faire. C'est une autre chose qui disparaîtrait de notre société et qui n'existerait plus jamais si des gens comme nous ne continuaient pas d'offrir ces services et d'espérer que les choses s'amélioreront. J'attends le jour où il y aura un peu plus de clients et un peu plus de fonds disponibles pour nous aider à financer les infrastructures.
Cela me renverse tout simplement. Hier à St. John's, l'électrification des autobus Metrobus a été annoncée. Pendant ce temps, nous devons encore payer le prix fort pour que nos beaux autobus Prevost continuent d'aller et venir sur la route, et nous n'obtenons rien. Cela m'amène à m'interroger sur la situation dans son ensemble. Comment pouvons-nous ne pas régler ce problème afin que nous, les exploitants, soyons traités avec un peu plus d'équité partout au pays? Comment pouvons-nous faire en sorte que cela ne se produise pas?
Nous sommes le seul exploitant à assurer cette liaison. Si nous nous arrêtons, ce sera fini. Personne d'autre ne sera assez fou pour le faire; je peux vous le promettre. Dieu merci, j'ai une autre entreprise. J'attends toujours le grand jour où ce service me permettra de gagner ma vie, mais après 27 ans, non, cela ne se produit toujours pas.
Cela fait des années, c'est‑à‑dire 15 ou 20 ans, que l'on me promet que l'argent sera disponible ou que l'on s'engage à le rendre disponible. Il y a des fonds disponibles pour les infrastructures. Terre‑Neuve a reçu 111 millions de dollars pour financer des infrastructures de transport, mais devinez quoi? Nous ne faisons pas partie des infrastructures visées. Ces fonds sont réservés aux villes de St. John's et de Corner Brook. Ces municipalités ne savent plus où dépenser cet argent. Ils ont reçu tellement de fonds qu'ils ne savent pas où les dépenser. L'argent va donc retourner dans les coffres du gouvernement fédéral. Quel meilleur endroit pour mettre une partie de ces fonds?
J'offrirais le service trois fois par jour, dans toute l'île, si je disposais d'un budget par personne desservie comparable à celui de la ville, laquelle reçoit des subventions. J'offrirais un service qui vous épaterait, compte tenu de ce que vous pourriez faire à Terre-Neuve en empruntant les transports en commun. Cela ferait vraiment... Cela nous intéresserait de savoir que quelqu'un se soucie vraiment de nous, mais pour l'instant, je ne crois pas que ce soit le cas. Laissez ce service disparaître. Laissez‑le mourir, tomber ou partir. Quand ce sera fait, ce sera fini. Le service sera parti, et on l'oubliera.
Je peux vous promettre que nous n'allons pas nous arrêter encore. Nous devons continuer parce que des gens dépendent de nos services. J'ai continué d'offrir des services pendant la pandémie de COVID‑19, et il y a eu des jours où deux autobus ont parcouru 2 000 kilomètres à raison d'aussi peu que 800 $ de recettes par jour, sans qu'aucune conversation n'ait lieu. Il y avait des gens qui avaient besoin d'aller voir un médecin et qui n'avaient pas d'autre moyen d'y aller.
Je me sens un peu engagé envers la société, et j'essaie de faire en sorte d'offrir le service aussi longtemps que possible, mais croyez-moi, des subventions, des aides... Je ne me soucie pas de la manière dont cela est accompli. Je ne veux pas faire des profits, mais seulement atteindre le seuil de rentabilité. Je veux que ce service continue. Il fait un peu partie de notre culture. Notre entreprise existe depuis 102 ans. Nous en sommes à notre 102e année. C'est un service que nous avons pris en charge il y a 30 ans, et nous n'abandonnons pas facilement la partie. M. Rogers est originaire de Terre-Neuve. Il sait que nous ne fuyons pas devant les difficultés.
Je pense vraiment qu'il y a une façon ou un moyen de faire en sorte que cela se produise.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de nous recevoir. Je remercie aussi les autres témoins d'être présents.
Je suis le maire de la ville de Gaspé, au Québec, et le président de l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ. Je suis accompagné de Samuel Roy, directeur des politiques à l'UMQ. Je vous remercie de laisser la parole à l'Union des municipalités du Québec dans le cadre de votre étude.
Tout d'abord, il est important de rappeler que, depuis plus de 100 ans, l'UMQ a comme mission de rassembler les municipalités de toutes les régions du Québec afin de mobiliser l'expertise municipale, d'accompagner ses membres dans l'exercice de leurs compétences et de valoriser la démocratie municipale. L'UMQ regroupe plus de 85 % de la population du Québec et du territoire du Québec, ainsi que 95 % des budgets municipaux au Québec.
Selon nous, la mobilité des personnes sur un territoire aussi grand que le Québec est un levier extrêmement important pour stimuler la vitalité économique, mais aussi pour désenclaver les régions québécoises. Ces dernières doivent être liées aux grands centres et entre elles par des réseaux de transport interurbain solides et fiables, afin d'assurer à toutes et à tous l'accès aux services et aux emplois.
Au Québec, une part non négligeable du transport interurbain par autobus est assurée par des transporteurs privés. Depuis la pandémie, comme les intervenants précédents l'ont mentionné, on a observé une baisse de fréquence, qui est associée à une baisse d'achalandage sur plusieurs lignes d'autobus. On parle d'autobus reliant Québec et Montréal, qui est souvent l'axe le plus prédominant au Québec, mais aussi d'autobus qui font le lien entre Québec et Havre‑Saint‑Pierre, sur la Côte‑Nord, en passant par Saint‑Siméon, dans Charlevoix, par exemple. Il y a aussi d'autres liaisons en Gaspésie et en Abitibi.
La rentabilité n'étant plus au rendez-vous, l'exploitation de ces lignes n'est plus avantageuse pour les transporteurs privés, mais elle est tout de même essentielle pour la vitalité des régions desservies. C'est avant tout le soutien financier des gouvernements, notamment les gouvernements municipaux, qui permet de garder ces lignes actives. À ce titre, l'UMQ aimerait vous faire part de deux recommandations à mettre en place pour améliorer le transport interurbain par autobus.
Notre première recommandation est de modifier le Fonds pour les solutions de transport en commun en milieu rural et de bonifier son enveloppe budgétaire, afin qu'il atteigne pleinement ses objectifs. L'Union est d'avis que le Fonds devrait permettre le financement des dépenses de fonctionnement et non seulement des dépenses en infrastructure, un point sur lequel j'insiste, afin de contribuer au maintien des services de transport interurbain. Les besoins sur le terrain sont substantiels et la bonification des sommes prévues permettrait d'aller encore plus loin et de développer davantage les services actuels, en plus de consolider ceux qui sont en place.
Notre deuxième recommandation est que le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec parviennent rapidement à des ententes permanentes pour permettre la distribution des sommes prévues par le Fonds pour les solutions de transport en commun en milieu rural et le Fonds pour le transport en commun à zéro émission. À l'heure actuelle, les municipalités et les opérateurs de transport au Québec sont les seuls au Canada à ne pas avoir accès aux sommes prévues par ces deux fonds. Il y a sûrement des raisons à cela, dont on discutera à la période de questions. Pourtant, ces montants sont nécessaires pour répondre aux besoins des municipalités et des opérateurs de manière continue.
Par exemple, les projets visés par l'entente transitoire du mois d'août 2022 dans le cadre du Fonds pour les solutions de transport en commun en milieu rural ont pu être financés, mais les projets qui n'étaient pas inclus dans l'entente transitoire n'ont pas été financés, même si le gouvernement fédéral avait répondu positivement aux demandes. Il est donc important que le gouvernement fédéral s'entende avec la province.
En ce qui concerne le Fonds pour le transport en commun à zéro émission, sa mise en œuvre devrait permettre d'accélérer les choses en matière d'électrification. Nul besoin de rappeler que c'est indispensable à l'atteinte des cibles de réduction des gaz à effet de serre, notamment celles du gouvernement fédéral.
En conclusion, j'aimerais rappeler que le transport interurbain permet l'occupation de notre territoire, permet de contrer sa dévitalisation et permet d'éviter l'isolement des communautés rurales. C'est un vecteur économique important, mais c'est également un service essentiel en région. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement fédéral et au gouvernement du Québec de s'entendre, afin que les opérateurs et les municipalités du Québec aient accès à un financement supplémentaire pour assurer la pérennité du transport interurbain par autobus.
Je m'arrêterai ici et j'attendrai la période de questions pour la suite des choses. Merci.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également tous les témoins de leur exposé.
Nous avons entendu parler de financement, de subventions en fonction du nombre d'usagers, etc. J'aimerais reprendre ces questions un peu plus en détail.
Je pense que ce que nous avons entendu dire précédemment, c'est que des services comme Via Rail bénéficient d'énormes subventions par usager. Il est évident que d'énormes investissements sont consacrés à Via Rail, des investissements de l'ordre de centaines de millions, voire de milliards, de dollars. Ce que je remarque au sujet de cette ligne ferroviaire et des propos que nous avons entendus au sujet du corridor Windsor-Québec, c'est qu'il est déjà très urbain. Ce corridor est déjà très bien desservi par d'autres moyens de transport. Il n'est pas difficile de se rendre à un grand aéroport, par exemple, à partir d'endroits situés le long de cette ligne, et pourtant on s'efforce toujours d'accroître les services et d'y injecter des milliards de dollars de subventions gouvernementales.
J'aimerais faire un suivi auprès de M. Roberts.
J'ai trouvé votre témoignage convaincant lorsque vous avez parlé de ce que vous pourriez faire si vous receviez un peu de soutien. Que pensez-vous du fait que le gouvernement fédéral investit des milliards de dollars dans des marchés bien desservis alors que, comme vous l'avez dit, des marchés comme le vôtre à Terre-Neuve‑et‑Labrador ne reçoivent rien? Y a‑t‑il, selon vous, un problème d'équité qui doit être réglé, et comment le gouvernement devrait‑il s'y attaquer?
De toute évidence, Via Rail est une société d'État. Je ne sais pas si vos jours meilleurs consisteraient à devenir une société d'État, mais j'aimerais savoir comment vous pensez que le gouvernement fédéral pourrait soutenir les collectivités rurales et les personnes qui n'ont pas facilement accès à d'autres moyens de transport et qui dépendent presque exclusivement de l'autobus, lorsqu'ils recherchent une option qui diffère d'un véhicule personnel.
:
Nous parlons d'équité. Nous allons laisser VIA Rail de côté pendant une minute, parce que son service se trouve au cœur d'un grand centre mondial. Je pense simplement à l'équité dans le cas d'une ville plus petite. Même Corner Brook, à Terre-Neuve, qui est une très petite ville, reçoit des fonds tirés du fonds pour l'infrastructure du transport en commun.
Si nous pouvions bénéficier d'une partie de ces fonds, même en tant qu'exploitant privé... Je sais que vous faites parfois affaire avec des exploitants privés, mais mettez tout sur la table: « Voilà les livres. Voilà où nous en sommes. Regardez le coût par kilomètre des autobus métropolitains ou d'autres transports en commun, et voyez ce que nous pouvons faire pour ce même montant. »
Je pense que l'une des solutions consisterait à affecter des actifs à l'exploitation d'autobus, afin d'aider les exploitants à récupérer une partie de leurs coûts. Par ailleurs, quel type de service voulez-vous vraiment avoir? Nous offrons un départ par jour de St. John's à Port aux Basques. Cet itinéraire représente environ 1 000 kilomètres dans chaque direction; 986 kilomètres dans chaque direction pour être précis. C'est un long parcours, mais une toute petite aide par kilomètre par an aurait un effet bénéfique important en ce qui concerne ce que nous pourrions réaliser en matière d'amélioration des services, en organisant un service deux fois par jour dans une partie de la région, afin de tenter d'offrir un plus grand nombre d'options.
Il n'est pas nécessaire d'investir un montant important pour que cela se produise. Nous sommes les derniers fournisseurs de services. Lorsque nous nous arrêterons, il n'y aura plus de transport en commun sur l'île. Il n'y a que nous. Ce n'est pas comme quelque part où, comme vous le dites, il y a VIA Rail, quelques exploitants, quelques navettes et tout le reste. Personne ne quittera Port aux Basques, à Terre-Neuve, à bord d'une navette pour se rendre à St. John's. Il s'agit d'un déplacement de 986 kilomètres. Aucun service de navette ne sera offert. Les gens ne partiront pas non plus de Corner Brook ni du centre de Terre-Neuve. Ce n'est tout simplement pas possible.
Mais ce n'est pas tout. Nous travaillons dans des conditions assez rudes et difficiles. Si nous n'utilisons pas des autobus fiables et durables, nous nous retrouverons dans la rhubarbe avant même de nous en rendre compte, comme le dit mon bon dicton terre-neuvien. Nous devons exploiter ce service de façon à ne pas nous retrouver là où nous ne voulons pas être.
Merci.
:
Je comprends ce que vous dites. Pendant une minute, j'ai eu l'impression d'entendre mon vieux père bûcheron.
Monsieur Maheux, vous avez mentionné que les gouvernements sont peut-être moins empressés de financer des activités dans les régions rurales du Canada que dans les régions urbaines. Je pense que vous avez mentionné que les gouvernements effectuent peut-être une analyse des coûts et des avantages et qu'ils accordent la priorité aux investissements dans des centres urbains, où il y a beaucoup plus d'électeurs.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la question de savoir si le gouvernement devrait élaborer une stratégie de transport rural ou établir une égalité entre les zones urbaines et les zones rurales en ce qui concerne les services offerts aux populations?
Là encore, je pense que les centres urbains disposent de nombreuses options. Les habitants des centres urbains ont souvent beaucoup de choix pour leurs déplacements, mais ce n'est peut-être pas le cas dans les régions rurales du Canada.
Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
Je vais répondre en français. Je parle très mal l'anglais.
[Français]
De toute évidence, il y a une incohérence et une différence énormes entre les besoins ruraux et les besoins urbains, et le traitement de ces besoins n'est pas le même.
Jason Roberts dit qu'il dessert un bassin de 250 000 personnes. Ce n'est pas le cas dans notre réseau et à beaucoup d'endroits au Québec. On part plutôt de villes de 3 000, 5 000 ou 10 000 habitants pour se rendre dans une ville de 40 000 habitants, à 80 ou 100 kilomètres au centre de notre région. C'est un tout autre problème.
Les besoins de 10 personnes, de Ville‑Marie, de La Sarre ou d'ailleurs, qui doivent se rendre au service d'oncologie de l'Hôpital de Rouyn‑Noranda sont aussi importants que ceux de n'importe quelle personne demeurant dans la région de Montréal ou d'Ottawa. Or, il y a des besoins qui ne sont pas comblés.
Curieusement, malgré sa bonne volonté, le gouvernement fédéral a pris des décisions — juste à titre anecdotique — un peu tristes. Dans son premier mandat, le gouvernement actuel a annoncé des millions et des milliards de dollars pour les infrastructures, à Montréal pour le Réseau express métropolitain, à Ottawa pour OC Transpo, ou à Toronto ou Vancouver. Ces sommes sont très orientées vers les milieux urbains. C'est normal parce que c'est là que la population est concentrée.
D'un autre côté, par contre, le gouvernement fédéral a annoncé en 2017 l'abolition du crédit d'impôt pour le transport en commun. Or, il faut en parler aux usagers, car ce sont eux qui en ont besoin. En milieu rural, moins peuplé, les gens ont besoin de cette mesure…
:
J'aimerais remercier le Comité et le personnel de m'avoir permis de comparaître virtuellement depuis le territoire visé par le Traité n
o 1. Je le fais, en ma qualité de colon dont les principales compétences sont dans le domaine de l'histoire.
En ce qui concerne le sujet qui intéresse votre comité, j'aimerais vous communiquer certaines des principales conclusions de l'étude que j'ai entreprise avec Mme Karine Duhamel et Jocelyn Thorpe. Dans le cadre de l'étude, nous avons examiné la documentation existante qui établit un lien entre le paysage changeant du transport interurbain dans l'Ouest canadien — en mettant particulièrement l'accent sur le Manitoba — et la crise actuelle des femmes, des filles et des personnes bispirituelles autochtones assassinées ou portées disparues.
Le passage à l'automobilité à l'échelle continentale a frappé le Manitoba d'une manière particulière. De nombreuses petites lignes d'autobus et de trains de voyageurs ont fermé dans les années 1970, 1980 et 1990. C'est dans ce contexte que le transport interurbain par autobus a failli s'effondrer dans les années 2010. Bien sûr, comme nous le savons tous, Greyhound a abandonné ses itinéraires déjà réduits dans l'Ouest canadien en 2018. La même année, Jefferson Lines a annulé son dernier trajet, qui reliait Winnipeg à Fargo, dans le Dakota du Nord. Un an plus tard, la troisième entreprise à avoir tenté de rentabiliser la liaison Winnipeg-Selkirk en 10 ans a mis fin à ses activités.
Cinq ans plus tard, il est clair que le paysage actuel n'est pas suffisant pour maintenir des lignes d'autobus à horaire fixe fiables dans la province. Il y a un ensemble disparate et changeant d'exploitants qui couvrent certains trajets à certains moments. Seuls deux d'entre eux offrent un service quotidien. Il s'agit de la navette entre Brandon et l'aéroport de Winnipeg et de la liaison entre Winnipeg et Thompson qui est exploitée par l'entreprise NCN Thompson Bus Lines, qui appartient à la nation crie de Nisichawayasihk. De plus, vous pouvez emprunter les autobus de la Maple Bus Lines cinq jours par semaine pour vous déplacer de Winnipeg à Thompson, les autobus de la Mahihkan Bus Lines cinq jours par semaine pour vous déplacer de Winnipeg à Flin Flon, et les autobus de la Ontario Northland six jours par semaine pour vous déplacer vers l'est.
En passant, je vous ferais remarquer que la stabilité relative des liaisons nord-sud, par rapport aux liaisons est-ouest, semble indiquer l'importance de travailler avec les gouvernements autochtones à l'élaboration de toute solution de transport en commun dans ce contexte.
Il n'y a qu'un seul autobus par semaine qui assure la liaison entre Winnipeg et Regina, et cet autobus part après minuit le samedi. À la fin du mois de janvier 2023, vous pouviez réserver un voyage de Winnipeg à Vancouver qui nécessitait trois correspondances, coûtait environ 419 $ et durait environ 37 heures. Quelque chose a changé depuis, et hier soir, ce trajet n'était plus disponible. Il ne reste donc plus que le train de VIA Rail qui assure la liaison entre Toronto et Winnipeg deux fois par semaine, avec toutes les restrictions que le Comité connaît bien, comme seul moyen de transport en commun pour relier l'est et l'ouest du Canada.
Les possibilités très limitées et déroutantes du transport interurbain par autobus au Manitoba touchent certaines personnes et certaines communautés plus que d'autres, comme l'a indiqué Mme Jaffe. Nous disposons de trop peu de données sur les personnes qui dépendent de l'autobus à l'ère de l'automobilité et du transport aérien. En raison de l'effondrement des services de transport interurbains au Manitoba et dans l'ensemble des Prairies, il est difficile de collecter le type de données dont nous reconnaissons tous la nécessité pour concevoir le type de systèmes de transport qui servira adéquatement les gens et les collectivités où ils vivent au XXIe siècle.
Nous savons que les femmes ont davantage recours aux transports en commun, tant à l'échelle mondiale qu'au Canada. Nous savons qu'environ 18 % des habitants du Manitoba sont des membres des Premières Nations, des Inuits ou des Métis. Nous savons que les schémas nationaux de violence à l'encontre des femmes, des filles et des personnes bispirituelles autochtones se manifestent de manière particulière dans cette province. Nous savons que les taux de pauvreté sont plus élevés au sein des peuples autochtones, ce qui fait que les changements en faveur de l'automobilité s'opèrent de manière particulière dans ces communautés.
La forte diminution des options de transport interurbain a des conséquences pour les femmes, les filles et les personnes bispirituelles autochtones, comme cela a été souligné quand Greyhound a abandonné ses itinéraires dans l'Ouest canadien. L'Association des femmes autochtones du Canada a expliqué en 2018 qu'elle était profondément préoccupée par la sécurité des femmes, des filles et des personnes transsexuelles autochtones. Un an plus tard, dans le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, il était proposé de procéder à une analyse importante des transports en commun, une suggestion qui, selon moi, mérite plus d'attention qu'elle n'en a reçu dans ce contexte. Au chapitre 7, en particulier, les auteurs du rapport expliquent comment le manque de moyens de transport sûrs et abordables peut obliger les gens à avoir recours à des solutions comme la marche ou l'auto-stop, non seulement pour échapper à des situations dangereuses, mais aussi tout simplement pour se rendre à l'école ou chercher un emploi. Ainsi, des infrastructures et des moyens de transport inadéquats, ou des moyens de transport qui deviennent eux-mêmes des lieux de violence, — et je cite maintenant le rapport — « punissent les femmes autochtones ».
Deux des appels à la justice formulés dans le cadre de l'enquête nationale concernent directement le transport: l'appel no 4.8 indique ce qui suit: « Nous demandons à tous les gouvernements de veiller à la mise en place de stratégies et de financement adéquats pour l'établissement de services et d'infrastructures de transport et de transport en commun sécuritaires et abordables destinés aux femmes, aux filles et aux personnes 2ELGBTQQIA autochtones vivant dans des communautés éloignées ou rurales. »
En conclusion, je dirai qu'une politique efficace en matière de transport doit tenir compte des besoins et de l'expérience vécue par les usagers, qui ne sont pas interchangeables. Ce sont des personnes dont la vie se façonne à l'intersection des genres, des ressources économiques, du lieu de vie et de l'identité autochtone.
L'absence de transport public interurbain au Manitoba est une crise qui concerne les services, mais aussi, par voie de conséquence, les données. Il est particulièrement difficile de se renseigner sur les utilisateurs d'un service qui n'existe pas actuellement.
Je conseillerais vivement au Comité d'écouter les personnes qui ont établi un lien entre l'absence de transport collectif interurbain fiable et accessible, et les comportements violents à l'égard des femmes, particulièrement les femmes autochtones, les filles et les personnes bispirituelles, afin de voir comment un réseau de transport national revitalisé pourrait contribuer à résoudre ce problème.
Je vous remercie beaucoup.
:
C'est une question très importante, car la Saskatchewan Transportation Company était un excellent exemple de ce qu'un service de transport par autobus provincial pourrait avoir l'air et avait l'air. Cela commence à nous montrer ce qu'il arrive quand on met fin à ces services. Bien entendu, nous n'avons pas autant d'informations que nous en aurions besoin à l'heure actuelle, mais certaines études ont été réalisées, dont au moins une à laquelle j'ai participé.
Le gouvernement s'est justifié en indiquant simplement qu'il considérait que l'achalandage diminuait et que la subvention par passager... Il a insisté sur le fait que le coût par passager continuait d'augmenter pour la province.
Cela s'est produit alors que le gouvernement provincial commençait à faire en sorte qu'il soit plus difficile d'emprunter l'autobus, je dirais. Les prix étaient à la hausse, et comme la fréquentation augmentait, la province a cessé de faire de la publicité sur les autobus. Le gouvernement a imposé des balises dans l'exploitation des autobus concernant la capacité d'offrir des autobus nolisés afin d'en dicter les conditions et le prix. Il a ainsi fait en sorte que le coût par passager soit plus élevé qu'il l'aurait été autrement.
L'effet a été assez intéressant, car même si l'achalandage était supposément faible, les personnes qui utilisaient l'autobus étaient très dépendantes de ce moyen de transport. Avant d'en dire plus à ce sujet, j'ajouterais — pour ne pas l'oublier — que les autobus ne servaient pas qu'au transport des voyageurs; ils permettaient de transporter des biens aux quatre coins de la province. Ils transportaient des tests de laboratoire et du sang pour les services médicaux. Ils permettaient également aux prisonniers de retourner dans leur communauté quand ils étaient libérés de prison. Les gens dépendaient de l'autobus pour une multitude de choses. De plus, ce service à faible coût permettait aux gens d'obtenir des services de santé.
La fin du service d'autobus a eu des répercussions considérables sur bien des gens. Outre le fait que nous pouvons parler des inégalités, auxquelles Mme Perry a fait référence et qui sont très importantes ici, nous savons que la plupart des personnes qui prenaient l'autobus étaient des femmes, des aînés et des membres des Premières Nations. Les usagers étaient en grande majorité de jeunes et tendaient à avoir un faible revenu. Ces personnes se sont souvent retrouvées sans solution de rechange. Dans certains cas, les gens ont dû déménager en ville pour se rapprocher de leurs services de santé, alors que d'autres personnes s'en sont passées. Nous entendons parler de personnes qui sont privées de services de santé ou qui éprouvent de la difficulté à se sortir de la violence familiale. Il y a plus de gens qui font de l'autostop.
Dans les régions rurales, des entreprises commencent également à fermer leurs portes, car les petites subventions qu'elles recevaient pour servir de dépôts favorisaient leur viabilité. Les agriculteurs ont plus de difficultés à obtenir des pièces, particulièrement les exploitants de fermes de petite et de moyenne taille qui dépendent de l'autobus pour recevoir des pièces venant de la ville.
Les répercussions sont énormes et très intéressantes. Il y a des effets de premier ordre et de second ordre. Je pense que de bien des manières, ceux qui ont pris cette décision n'avaient pas prévu ces conséquences, et cette décision n'a pas fini de les hanter.
La fin de semaine dernière, j'étais dans une région rurale où j'ai parlé à des personnes qui votent normalement pour le Saskatchewan Party et qui m'ont dit que cette décision les incitait à quitter le parti. C'est très intéressant, car ces personnes considéraient que cette décision touchait énormément de gens de tous les milieux, et qu'elle était si malavisée qu'elle les faisait douter de la capacité du parti de gouverner la province.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Bonjour à l'ensemble des témoins, je suis heureux de vous voir avec nous, aujourd'hui, pour cette étude.
Monsieur Maheux, de la Fédération des transporteurs par autobus, vous avez mentionné dans votre allocution le fait que vous semblez avoir de la difficulté à retrouver la clientèle qui était là auparavant. Ce n'est pas le cas que pour votre entreprise, mais aussi pour les autres, ailleurs. Il semble que les volumes postpandémiques ne soient pas au même niveau qu'ils étaient auparavant et que la récupération de la clientèle soit longue.
Tout d'abord, est-ce que vous prévoyez que cette récupération aura lieu? Ensuite, croyez-vous que les clients que vous avez perdus ont simplement arrêté de se déplacer ou qu'ils ont plutôt opté pour d'autres moyens de transport?
:
À ma connaissance et sous toute réserve, car je me dois de toujours garder une certaine dose d'humilité même si je suis censé être devenu un expert au fil des années, on peut imputer le non-retour actuel de la clientèle d'une bonne partie des trajets essentiellement au télétravail, surtout pour les plus courtes distances. Je pense par exemple à mon collègue qui assure le trajet Montréal-Sherbrooke.
Pour les plus longues distances, je pense que les coûts de transport sont aussi un élément important et un frein. Nous faisons face à une augmentation très importante de ces coûts. Dans le transport interurbain, assuré par des entreprises privées contrairement aux services de transport public, le client paie la totalité des coûts plus, en principe, une marge bénéficiaire. Par comparaison, les revenus provenant de la clientèle des réseaux de transport urbain et suburbain ne représentent que 35 %, 45 % ou 55 % des frais d'exploitation.
Cela amène des aberrations. Quand un autocar géré par une compagnie sous contrat avec une société de transport en commun part de Joliette ou de Sainte‑Julie à destination de Montréal, le client va payer son billet de transport « urbain » cinq ou sept dollars, alors que, pour la même distance, le client devrait payer 25 ou 30 $ à une compagnie de transport interurbain privée. Pourtant, dans nos régions rurales, l'usager aurait normalement droit à ce même déplacement pour un coût semblable, ce qui pourrait l'inciter à prendre l'autocar, lui permettant alors d'aller en ville, non seulement pour se faire soigner pour un cancer, mais aussi pour le plaisir, pour rendre visite à la famille et pour aller magasiner.
Comme je le disais plus tôt, il y a deux poids, deux mesures entre les gens habitant à proximité des grands centres urbains, et ceux qui habitent des milieux faiblement peuplés ou plus éloignés.
Parlant de distance et de lieux isolés, je viens d'entendre Mme Perry parler des Autochtones et Mme Jaffe décrire la situation en Saskatchewan. En 2016, nous avons lancé une nouvelle desserte du village de Chisasibi, près des côtes de la Baie-James, à partir de Val‑d'Or, un trajet de près de 1 000 kilomètres. En chemin, nous passons effectivement à Amos et à Matagami, mais nous nous arrêtons aussi dans les communautés de Némiskau, d'Eastmain, de Wemindji et de Waskaganish. Pourquoi le faisons-nous?
Ce n'est pas parce que le fédéral nous aide, mais parce que les communautés autochtones et le Grand Conseil des Cris ont décidé de mettre des sous pour bénéficier du Programme d’aide au développement du transport collectif du Québec, lequel permet d'utiliser cet argent pour réduire les frais d'exploitation du transporteur que nous sommes.
Il est certain que le privé est la solution à l'exploitation du transport interurbain, ce que M. Roberts sera heureux de m'entendre dire. Plus tôt, M. Strahl parlait de transformer tout ça en société publique de transport. Or, la Saskatchewan Transportation Company a dû fermer ses portes parce que ses coûts d'exploitation par kilomètre parcouru, doubles des nôtres, étaient devenus trop élevés. Cette fermeture avait attiré mon attention.
Je conviens qu'il faut fournir le service, mais il y a des limites à créer des organismes ou des sociétés publiques de transport qui n'arrivent pas à maintenir des coûts d'exploitation raisonnables tout en assurant des conditions de travail adéquates, la sécurité, l'entretien des véhicules et le respect de toutes les règles. Dans le transport interurbain, il est donc certain que le privé est la solution. Pour ce qui est des milieux ruraux, je prends l'exemple de notre ligne entre Val‑d'Or et Chisasibi. Avec raison, Mme Jaffe a rappelé toute la question du transport des colis, des biens et du matériel pour différents services, qui occupent une grande partie de nos soutes sur cette ligne.
D'autres petites mesures pourraient également être prises. Je pourrai les mentionner si, par chance, on me pose une question à ce sujet.
:
Oh, là, là! Vous ne me posez pas une question facile. Oui, c'est une question difficile.
Il y a certains éléments à prendre en compte, à mon avis. Il faut d'abord se souvenir de certains principes, notamment le fait que cette politique a une incidence sur toutes les autres politiques et que le transport facilite un grand nombre d'autres activités, programmes et politiques dans les régions rurales.
Il faut comprendre que le coût du transport peut également être réparti entre ces autres activités. Je pense que nous devons également nous rappeler que ces autres activités reçoivent certaines subventions. Nous avons parlé aujourd'hui de l'automobile et de la manière dont les réseaux de transport se sont développés d'une manière qui favorise réellement les automobiles et les camions, étalant essentiellement les coûts de ces moyens de transport sur l'ensemble de la population. Ces coûts sont en fait plus élevés qu'il n'y paraît. Je pense que je commencerais en gardant ces deux faits à l'esprit.
Je comprendrais également qu'il existe un éventail de solutions inventives que l'on peut mettre en œuvre actuellement et dont on peut tirer parti, comme les nouvelles technologies. On peut notamment envisager d'établir des réseaux de transport pour que les gens puissent profiter de certaines choses qui se passent ailleurs et d'utiliser les réseaux déjà en place.
Je pense qu'il importe également de commencer à modifier ce que cela signifie de prendre l'autobus et d'emprunter le transport collectif, particulièrement dans les régions rurales, en prenant des voies peut-être moins convenues. On peut entre autres porter attention au marketing des transports, et réfléchir aux services offerts ainsi qu'à la mesure dans laquelle les gens peuvent se fier à l'autobus. Le témoin de Terre-Neuve qui a dit qu'il fallait pouvoir offrir des autobus plus fréquemment envisage réellement les choses de la bonne manière. Nous savons que quand les gens ont davantage accès au transport collectif, qu'il est très fiable et qu'ils savent qu'il est offert et qu'il est sécuritaire, ils tendent à l'utiliser davantage.
Par ailleurs, je pense que comme nous l'avons entendu ici à propos de la Saskatchewan, nous tendons à réduire les services quand les coûts augmentent; les gens utilisent donc moins le transport en commun. Nous devons commencer à réfléchir à l'élargissement des services et, comme Mme Perry l'a proposé, commencer à nous intéresser aux divers utilisateurs et aux usagers potentiels ainsi qu'à ce dont ils ont besoin pour utiliser ces services afin de combler les besoins réels que les gens expriment.
C'est par là que je commencerais.
:
Précisons que notre compagnie existe depuis 102 ans, mais qu'elle exploite des autobus depuis 30 ans.
Nous avons pris le relais du Canadien National quand il s'est privatisé en 1996. Quand nous avons examiné ses livres, nous avons constaté qu'il avait perdu 3,6 millions de dollars la dernière année en offrant des services partout dans l'île. Croyez‑le ou non, nous avons malgré tout décidé d'acheter le service. Donc, si vous voulez me dire qu'il y a bien des choses qui vont mal, c'est le cas. Au fil du temps, nous avons connu des périodes décentes, mais vous savez que les gens sont devenus de plus en plus dépendants de l'automobile, qui leur offre l'indépendance de partir quand ils le veulent et quand ils le peuvent.
Je vais toutefois vous prouver notre crédibilité. Le service était offert quand le Roadcruiser était la vision du CN, qui offrait un départ par jour de St. John's à Port aux Basques. Depuis 30 ans, il n'y a eu que 41 jours où nous n'avons pas offert de service, principalement en raison de la météo. Tous les autres jours, nous avons respecté l'horaire de notre mieux, compte tenu de la température et des conditions. Nous n'avons pas courbé l'échine et décidé de ne pas partir. Certains jours, pendant la pandémie de COVID, il y avait trois personnes à bord, mais nous quittions quand même Port aux Basques pour nous rendre à St. John's.
Il existe à Terre-Neuve une expression qui dit « Si l'autobus ne part pas, personne d'autre ne bouge. » Ce n'est pas envisageable, pas possible ou je ne sais quoi d'autre. Les Terre-Neuviens appellent toujours et disent « Si l'autobus part, il y a une possibilité que nous puissions partir. » Nous sommes donc crédibles et fiables, mais pas rentables. Le service est subventionné par une autre partie de mon entreprise, mais je vis encore pour voir le jour où nous serons rentables.
Je voulais juste vous expliquer la situation.
:
Merci beaucoup, madame la députée.
Ma première recommandation est celle que M. Daniel Côté, président de l'Union des municipalités du Québec, a formulée. Comme il l'a mentionné, le Fonds pour les solutions de transport en commun en milieu rural du gouvernement fédéral ne tient pas compte des dépenses de fonctionnement. Il faudrait que ces dépenses soient admissibles. Par ailleurs, on précise que ce fonds n'inclut pas le transport interrégional, mais seulement le transport local. Il y a donc une contradiction entre la volonté du fédéral, si c'est bien la sienne, de soutenir les communautés et de les garder reliées entre elles et l'utilité réelle de ce fonds. Pour être financés, les projets doivent couvrir un village ou une ville de 20 000 ou 25 000 personnes. Cela ne fonctionne pas. Il faut changer le Fonds pour qu'il finance le transport interrégional. Les gens doivent pouvoir accéder à la communauté la plus proche qui offre les services auxquels ils ont droit. Alors, il est sûr que je m'associe à cette proposition.
Concernant la deuxième proposition de l'UMQ, qui consiste à améliorer le Fonds pour le transport en commun à zéro émission, je suis entièrement d'accord. Je vais juste ouvrir une parenthèse concernant la technologie. Aujourd'hui, dans le transport interurbain, la technologie ne permet pas encore aux autobus électriques de parcourir d'assez longues distances. Ils peuvent parcourir 80 kilomètres et revenir, mais ce n'est pas ce qu'on appelle du transport interurbain, dans les grandes régions du Canada. On doit pouvoir parcourir 500 kilomètres, et il n'y a aucune technologie qui permet de le faire actuellement, même si on le voulait.
Nous avons beaucoup de véhicules électriques chez nous, en particulier dans le transport scolaire. Lors de notre congrès, nous essayions justement un nouvel autocar complètement électrique de la compagnie MCI, et il avait quand même une autonomie de 200 ou 300 kilomètres, aller-retour. Ce n'est pas encore suffisant, mais on va y arriver un jour, c'est sûr.
L'autre proposition est celle dont j'ai déjà parlé. Le fédéral, tout en investissant des milliards de dollars dans les infrastructures, a aboli le crédit d'impôt pour le transport en commun dont bénéficiaient les détenteurs de titres de transport en commun effectuant des trajets interurbains. Il devrait être rétabli, parce qu'il est important pour les usagers des petites communautés. Par exemple, pour se rendre ici, à Ottawa, nos usagers peuvent utiliser notre ligne Grand‑Remous—Maniwaki—Gatineau—Ottawa, que nous exploitons depuis des années grâce à l'aide de la municipalité régionale de comté de la Vallée‑de‑la‑Gatineau. Nous avions des usagers qui payaient un titre de transport en commun mensuel, et quand ce crédit d'impôt a été retiré, cela a eu un impact important sur la fréquentation de cette ligne. Cette mesure devrait donc être réintroduite.
J'ai parlé des compagnies de transport par autobus qui ont un contrat avec des sociétés publiques de transport en commun, ce qui est très courant au Québec. J'ai donné l'exemple d'un client qui monte dans un autobus à Joliette et qui paie cinq ou sept dollars pour aller à Montréal. Ce client ne paie pas de taxe sur son titre de transport. Pourquoi les gens auraient-ils à payer une taxe sur les services de transport interurbain? Si on veut que les gens les utilisent et que ce soit équitable, une exemption de taxe serait de mise.
Voici une autre proposition. Au Québec, il existe une remise de la taxe sur l'essence. Cette remise n'existe pas au fédéral. Le gouvernement fédéral pourrait apporter sa contribution en remboursant une partie de la taxe d'accise aux transporteurs. Cela aiderait certainement...
:
Notre clientèle est très diversifiée. Nos usagers les plus fréquents sont des personnes qui n'ont pas les moyens de voyager autrement. Le nombre d'utilisateurs est en augmentation, et c'est pourquoi... Vous avez posé une question au sujet de nos coûts, mais je n'ai pas eu l'occasion d'y répondre en raison du manque de temps. L'éventail des coûts est large. Nous offrons nos services à tout le monde.
J'ai discuté avec un passager il y a quelques jours. Il travaillait pour Revenu Canada et devait se rendre sur la côte Ouest de Terre-Neuve pour effectuer un audit. N'ayant pas pu prendre l'avion, il s'est tourné vers le transport interurbain. Comme je vous l'ai dit, notre clientèle est très diversifiée.
Beaucoup de nos clients n'ont pas accès à d'autres moyens de transport. À ce moment de l'année, nous offrons nos services à beaucoup de personnes qui ont vraiment besoin de se rendre sur place à St. John's pour ne pas rater un rendez-vous médical. Nous sommes reconnus pour la fiabilité et la disponibilité de nos services. Nous fonctionnons sept jours sur sept à l'année, sans arrêt.
Notre clientèle est diversifiée. Des gens de tous les horizons utilisent nos services à la grandeur de la province. Nos chiffres se sont à peu près stabilisés en ce qui a trait à la fréquentation. Il n'y a pas eu de diminution, mais les dépenses ont explosé, et nous devons donc chercher à augmenter le nombre d'usagers pour maintenir le même ratio.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Maheux, je vous remercie de toutes vos propositions. J'en prends très bonne note. J'ai écouté attentivement et nous verrons si nous sommes capables d'en intégrer le plus possible dans le rapport que le Comité produira.
Monsieur Côté, de l'Union des municipalités du Québec, j'ai peut-être une question piège pour vous. D'après ce que j'ai compris, M. Maheux, d'autres témoins et vous avez mentionné qu'il était important que le fédéral ne finance pas juste les infrastructures, mais aussi les dépenses de fonctionnement. C'est d'ailleurs quelque chose que les sociétés de transport en commun nous répètent souvent.
Certains témoins sont venus nous parler d'une question intéressante sur laquelle j'aimerais vous entendre. Il n'y a pas si longtemps, un témoin nous disait que les investissements en matière de transport interurbain étaient certes un sujet d'étude important, mais qu'en matière de transport public ou en commun, il conviendrait d'abord d'investir dans le type de transport dont quelqu'un a besoin dans sa vie quotidienne. On peut penser, par exemple, au transport pour se rendre au travail, à l'école ou à l'hôpital. Ce témoin disait que c'est le transport local qui serait sa priorité.
En tant que président de l'UMQ et maire d'une ville régionale, que pensez-vous de cette déclaration? Il y a d'autres moyens de transport qui existent. On peut penser au fameux projet de train à grande fréquence du gouvernement du Québec, au transport par train, qui se rend aussi dans votre région, au transport par avion, qui est un problème important en région, et au transport par autobus.
Si on vous donnait 1 milliard de dollars, quelle serait votre priorité et où mettriez-vous l'argent en premier?
:
En fait, on ne peut pas nous demander de faire un choix prioritaire. Tous les moyens de transport sont importants. Cela dépend des gens à qui cela s'adresse et cela dépend des besoins.
Si vous me demandez quel est mon besoin en tant qu'élu, ce serait d'avoir un service aérien fiable, prévisible et qui a du sens, ce qui n'est pas le cas actuellement. J'entends le gouvernement du Québec se préoccuper du transport aérien régional mais, malheureusement, je n'entends pas souvent le gouvernement fédéral s'en préoccuper, même si cela relève de sa compétence. Vous aurez sûrement l'occasion d'y retravailler à ce comité.
En ce qui concerne les autres moyens de transport, cela dépend des besoins. Je comprends qu'il y a une certaine concentration de personnes dans les villes et qu'il existe du transport collectif intra-urbain, souvent fortement prioritaire. Or, là encore, les frais d'exploitation sont financés presque essentiellement par l'administration municipale, qui n'a pas les moyens de ses ambitions. Il devrait donc y avoir une certaine forme d'aide à l'exploitation du transport collectif, de même que du transport interurbain qui, pour les gens en région, est parfois le moyen de se rendre au travail ou à des centres de services de santé ou d'éducation. Il est important d'en tenir compte.
J’entendais les propositions de M. Maheux et je partage presque totalement ses préoccupations. Les billets de transport par autocar sont taxés. Pourtant, c'est un service essentiel. Pourquoi taxe-t-on les services essentiels? Pourquoi taxe-t-on le service aérien régional, qui est aussi un service essentiel? Pourquoi doit-on payer la taxe sur les produits et services et la taxe de vente du Québec, entre autres, sur ces services, qui sont essentiels? Normalement, un service essentiel ne devrait pas être taxé.
:
Merci beaucoup pour cette question.
L'Acte de l'Amérique du Nord britannique est un document complexe. La place du transport a fait l'objet de discussions et de débats, mais nous savons aussi que dans l'histoire du Canada, nous avons parfois dû réexaminer ce qui relève de la compétence des gouvernements fédéral et provinciaux. Je pense que dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, il serait simpliste d'affirmer que le transport interurbain devrait relever uniquement des provinces.
L'idée d'un transporteur national était d'offrir aux usagers, bien que de manière imparfaite, la possibilité de se procurer un billet auprès d'un seul transporteur pour voyager entre les provinces. Le passage de ce modèle au système hétéroclite actuel pose un véritable problème en termes d'accessibilité et de coordination. Le cas du Manitoba illustre très clairement le problème. Dans cette province, il existe des liaisons de transport avec Ontario Northland à l'est, mais les liaisons demeurent extrêmement limitées avec nos voisins provinciaux à l'ouest; on parle d'autocars qui partent une fois seulement par semaine après minuit.
Nous constatons ainsi les limites de l'idée selon laquelle le transport interurbain devrait relever uniquement de la compétence provinciale pour bien fonctionner. Les usagers ont besoin de différents types de services non seulement dans un contexte provincial, mais aussi pour maintenir des liens avec leur famille et leurs amis, pour accéder à de nouvelles possibilités d'emploi, et pour faire partie d'une communauté qui s'étend au‑delà des frontières provinciales.
Les frontières provinciales telles qu'elles ont été établies ne sont pas nécessairement les plus pertinentes dans tous les contextes. En effet, un service national d'autobus pourrait générer des retombées à la fois sociales, économiques et environnementales. Ce type de service nous oblige à réfléchir aux politiques et aux pratiques dans une perspective qui dépasse la simple question de la rentabilité comme moyen...
:
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais également remercier tous les témoins pour leur présence aujourd'hui. Ma question s'adresse à Mme Perry.
Je vais faire référence à ce qu'a dit Mme Jaffe, à l'effet que la réconciliation passe par l'équité en matière de transport. Je la paraphrase.
La réserve des Six Nations se situe à proximité de la circonscription que je représente, Haldimand—Norfolk. On sait que bon nombre de collectivités rurales, y compris la réserve des Six Nations, n'ont qu'un accès limité aux villes au moyen des transports publics, ce qui a des répercussions sur leur qualité de vie.
J'aimerais que Mme Jaffe nous explique comment, selon elle, la réconciliation peut être facilitée par l'équité en matière de transport.
:
Merci pour votre question.
Je suis heureuse de partager mon temps de parole avec Mme Jaffe, qui, je pense, pourrait aborder cette question de manière très concrète.
Les défis associés à la réconciliation sont entre autres d'ordre matériel. Ce sont des défis substantiels qui dépassent la simple dimension symbolique. Je pense que l'enjeu des transports nous le montre de manière réelle et tangible. Plusieurs éléments qui auraient des répercussions mesurables sur la relation entre les collectivités autochtones et non autochtones peuvent être observés dans un domaine comme la politique en matière de transport. Un meilleur système de transport permettrait de créer des liens entre les collectivités autochtones et les autres collectivités, mais également de relier les communautés autochtones entre elles.
Ce genre d'enjeux nous incitent à réfléchir au‑delà de la dichotomie opposant les zones urbaines aux régions rurales. Nous parlons souvent de villes comme Winnipeg et Brandon qui répondent à n'importe quelle définition d'une collectivité urbaine. L'absence d'un marché privé et le manque d'intérêt des gouvernements provinciaux à fournir des moyens de transport adéquats touchent particulièrement certaines collectivités. Les collectivités autochtones, et notamment les femmes autochtones, sont de toute évidence parmi les plus affectées.
Il s'agit d'une manière concrète pour le gouvernement fédéral de répondre aux appels à la justice dans le cadre de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées et de manière moins directe, mais tout aussi importante, de répondre aux appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation.
:
Je vous remercie. Je vais vous les acheminer, c'est certain.
Je voudrais simplement soulever un point important. Quelqu'un, ici au Comité ou dans la salle, sait-il où est le terminus d'autocars à Ottawa?
Il n'existe plus depuis que l'opérateur Greyhound a eu des difficultés financières, comme nous, et a mis fin à ses services partout au Canada, entre autres dans la circonscription de Vaudreuil—Soulanges, la vôtre, monsieur le président. Votre service d'autocar n'est donc plus offert.
Les services interurbains au Canada sont malades, la preuve étant qu'il n'y a plus de terminus d'autocars à Ottawa, où on se retrouve aujourd'hui avec un promoteur immobilier qui développe le site de l'ancien terminus. Nous sommes quatre ou cinq transporteurs à desservir Ottawa. Il y a notamment notre nouveau service qui couvre Montréal, Laval, Gatineau et Ottawa, si on me permet ce message publicitaire. Il y a aussi les autocars de Keolis Canada, qui empruntent l'autoroute 417, et ceux d'Ontario Northland, qui arrivent de Sudbury et de North Bay.
Cependant, où est-ce que ces autocars s'arrêtent pour débarquer les passagers chargés de valises? Ils doivent s'arrêter aux coins de rue, dans des bancs de neige. Le fait que la capitale du Canada n'a pas de terminus d'autobus n'a vraiment aucun sens.
Je pense que la solution passe par les sociétés de transport public, qui devraient donner accès à des quais et à des services en recourant aux subventions qu'elles reçoivent des municipalités, du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral.