Passer au contenu

FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 25 septembre 2001

• 1535

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et souhaite la bienvenue à tous cet après-midi. Nous en sommes à notre troisième séance de la journée relativement aux consultations prébudgétaires.

Nous avons le plaisir d'accueillir à cette table ronde les témoins suivants: le Groupe de travail chargé de l'organisme national des sciences, le Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes, la Business Tax Reform Coalition, l'Union des producteurs agricoles du Québec et la Canadian Federation for Promoting Family Values.

Nombre d'entre vous ayant déjà comparu devant le Comité des finances, vous savez probablement comment se déroulent nos audiences. Vous disposez de cinq à sept minutes pour faire vos déclarations préliminaires, après quoi il y aura une période de questions.

Nous commencerons par le Groupe de travail chargé de l'organisme national des sciences. M. Howard Alper est ancien vice-président du Partenariat en faveur des sciences et de la technologie et occupe actuellement le poste de vice-recteur à la recherche à l'Université d'Ottawa.

La parole est à vous.

M. Howard Alper (membre, Groupe de travail chargé de l'organisme national des sciences): Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir pour moi que de comparaître devant vous cet après-midi au nom du Groupe de travail chargé de l'organisme national des sciences.

En octobre dernier, le secrétaire d'État aux sciences, à la recherche et au développement, M. Gilbert Normand, a tenu une table ronde à Aylmer, au Québec, pour déterminer si le Canada avait besoin d'un organisme national des sciences et, le cas échéant, quel devrait en être le rôle, la fonction et le mandat.

Une centaine de groupes intéressés représentant des secteurs différents à l'échelle du pays ont été invités à y participer. La table ronde a connu un véritable succès. Je crois pouvoir dire qu'un consensus s'est dégagé sur la nécessité de créer un organisme qui utiliserait et compléterait les rôles et les capacités des instances actuelles.

À la suite des recommandations de la table ronde, un groupe de travail composé de 15 personnes a été mis sur pied en février de cette année pour élaborer une proposition visant la création d'un organisme national des sciences. C'est au nom de ce groupe que je m'adresse à vous aujourd'hui.

Après avoir étudié différents modèles et scénarios, nous avons arrêté notre choix sur la création de ce que l'on a convenu d'appeler «les Académies canadiennes», soit un organisme national des sciences constitué en société sous le régime fédéral, qui serait indépendant et sans but lucratif, et qui jouirait du statut d'organisme de bienfaisance. Par «sciences», j'entends bien plus que les simples sciences exactes ou le génie, mais aussi les sciences sociales, les sciences humaines et les sciences médicales.

La mission des académies canadiennes serait de fournir une source d'évaluations crédibles, indépendantes—et c'est un aspect particulièrement important—et savantes sur les sciences qui sous- tendent des enjeux urgents et des questions d'intérêt public. Voilà en quoi consisterait son rôle principal. Son deuxième rôle serait de donner une voix solide à la communauté canadienne des sciences, tant à l'échelle nationale qu'internationale.

L'accent sera mis principalement sur l'évaluation scientifique. C'est ce qui se fait pratiquement dans presque tous les autres pays du G-8, notamment les États-Unis, le Japon, la France et l'Allemagne. L'évaluation nous permet de comprendre ce que nous savons de la dimension scientifique des sujets, et surtout, ce que nous en ignorons. C'est également ce qui permet de définir des questions qui nécessitent des réponses et nous donne une perspective globale d'enjeux complexes. Elle clarifie ce qui fait l'objet de convergence, de divergence et d'incertitude. Enfin, elle nous permet d'examiner le bien-fondé des sciences sous-tendant des questions importantes.

• 1540

Pour ce qui concerne la deuxième mission, c'est-à-dire assurer une voix à la communauté scientifique au Canada, le rôle des Académies canadiennes serait d'exprimer les intérêts du Canada sur toutes les questions où la voix collective de la communauté scientifique canadienne doit être entendue et de participer à des activités conjointes avec d'autres académies nationales du monde entier. Dès le début de son mandat, le secrétaire d'État s'est vite rendu compte de la nécessité de mettre sur pied un tel organisme. Le Canada devait combler cette lacune institutionnelle.

Les organismes membres fondateurs des Académies canadiennes seraient l'Académie canadienne des sciences, des arts et des lettres, l'Académie canadienne du génie et l'Académie canadienne des sciences médicales. Elles seraient dirigées par un conseil de direction diversifié et équilibré, auquel siégeraient des représentants de tous les secteurs de la société. Ce conseil serait composé de 12 à 20 membres ayant droit de vote. Ceux-ci seraient nommés par des organismes membres et d'autres parties concernées, et la moitié du conseil de direction serait des membres du grand public.

Le conseil de direction sera chargé d'approuver et d'orienter les programmes et les activités administratives des Académies canadiennes. Sa structure sera semblable, mais non identique, aux académies nationales des États-Unis, que je connais très bien, ayant déjà siégé à plusieurs groupes d'experts d'évaluation, notamment en ce qui a trait aux sciences, au génie et à la médecine.

Les groupes d'évaluation seront donc composés d'experts dotés d'une connaissance et d'une expertise dans les questions faisant l'objet de l'évaluation. On s'efforcera d'attirer des experts talentueux et chevronnés, d'où qu'ils proviennent. Cela implique que l'on pourra faire appel à des experts de l'étranger, tout comme j'ai moi-même participé à des groupes d'évaluation aux États-Unis. Tous les rapports des académies seront assujettis à des examens par des pairs et à des normes très élevées.

S'agissant du financement, la recommandation idéale serait d'avoir un modèle de financement semblable à celui de la Fondation canadienne pour l'innovation. En effet, le modèle du conseil de direction lui-même s'inspire de celui de la FCI qui, je dois dire, marche extrêmement bien depuis sa création.

Après la rédaction de la proposition de création des Académies canadiennes, dont vous avez tous obtenu copie, si je ne m'abuse, on a tenu de vastes consultations à l'échelle du pays, consultations auxquelles ont participé différents secteurs de la communauté scientifique. Un groupe de travail devrait passer en revue cette proposition la semaine prochaine. Ceci étant dit, m'étant déjà entretenu avec des membres de ce groupe de travail, je puis vous assurer que l'appui à ce concept est très fort. On m'a laissé entendre, entre autres, que le montant demandé était insuffisant. On devrait demander 5 millions et non 3 millions de dollars. À part ce détail, les membres du groupe de travail se sont montrés très enthousiastes pour le principe de l'évaluation indépendante.

Je m'arrête là-dessus, et je reste à votre disposition pour répondre à vos questions plus tard.

Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Alper.

La parole maintenant est au président-directeur général du Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes, M. Steve Sullivan.

Allez-y.

M. Steve Sullivan (président-directeur général, Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes): Je vous remercie, monsieur le président. Je voudrais également remercier le comité de cette occasion qui m'est donnée de participer aux consultations prébudgétaires.

Le Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes est un groupe national à but non lucratif de défense des intérêts et des droits des victimes. Nous sommes financés par l'Association canadienne des policiers. Nous travaillons avec les victimes de crimes et leurs familles à l'échelle du pays.

Nous intervenons beaucoup auprès des familles des victimes d'homicide, et parfois auprès des familles dont un être cher a été tué par un délinquant sous responsabilité fédérale libéré ou mis en liberté sous condition. Certes, ces incidents sont rares, mais ils se produisent quand même. C'est généralement le type de familles qui s'adressent à nous pour de l'aide.

À l'instar du Parlement, j'ai été préoccupé par les récents événements aux États-Unis. En préparant mon exposé en vue de l'audience d'aujourd'hui, j'ai eu de la difficulté à me concentrer, car tout m'a semblé si insignifiant. Ce que j'ai à vous dire aujourd'hui peut paraître négligeable compte tenu de ce qui s'est produit aux États-Unis. Cela dit, la vie doit continuer et il importe de prendre soin de ceux qui sont encore parmi nous, et au Canada, les victimes de crimes ont désespérément besoin d'aide.

Mes remarques porteront principalement sur le Service correctionnel du Canada et sur la Commission nationale des libérations conditionnelles. Si je mets l'accent sur ces deux organismes, c'est que les victimes qui ont affaire au système judiciaire reçoivent généralement l'aide d'instances provinciales, de l'avocat de la Couronne, des services d'aide aux victimes offerts par la police—et tout cela relève du champ de compétence provinciale. Quand un délinquant est condamné à deux années de prison ou plus, il tombe sous responsabilité fédérale, celle du Service correctionnel ou de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Les victimes doivent donc s'adresser à ces deux organismes, et c'est pourquoi j'ai jugé que mes remarques devaient porter sur ces deux organismes, puisqu'ils sont du ressort de l'administration fédérale.

• 1545

À l'heure actuelle, les victimes ont des droits limités aux termes de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, notamment en ce qui a trait à l'accès à certaines informations. Les victimes peuvent être avisées de toute décision de transférer un détenu sous responsabilité fédérale d'une institution à une autre. Elles peuvent être informées des audiences de libération conditionnelle. Récemment, le gouvernement fédéral a élargi le rôle des victimes en leur permettant d'assister aux audiences et de faire une déclaration orale. Or, ces droits existent depuis 1992, c'est-à-dire depuis l'adoption de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, et pourtant, il y a eu peu de changements depuis.

Dans ma déclaration préliminaire d'aujourd'hui—et j'essaierai d'être bref pour vous laisser le temps de me poser des questions—j'insisterais sur le fait que s'il est vrai que nous avons réalisé certains progrès relativement aux victimes et aux droits de celles-ci, l'ennui c'est que de nombreuses victimes ne sont pas au courant de ces droits et ne savent pas comment obtenir les services dont elles ont besoin. Certes, vous pouvez avoir le droit d'obtenir certains renseignements, mais il faut que quelqu'un prenne le temps de vous expliquer l'information que vous recevez, car celle-ci est souvent très difficile à comprendre. Je vais vous donner un bref exemple.

Une jeune fille a été assassinée dans une petite ville de l'Ontario. Après un procès qui aura duré sept ans, l'inculpé a été condamné à perpétuité avec possibilité de libération conditionnelle après dix ans. Pendant toute la durée du procès, l'inculpé était en détention. Or, dans notre système judiciaire, le calcul de la peine commence à partir de l'arrestation de l'inculpé. Dans ce cas-ci, l'inculpé avait déjà purgé sept années des dix auxquelles on l'a condamné. De plus, en vertu de notre système judiciaire, un délinquant devient admissible à la semi-liberté trois années avant d'avoir droit à la libération conditionnelle totale s'il est condamné à perpétuité pour meurtre. Le détenu en question avait déjà purgé sept ans de prison. La famille de la jeune fille s'était mise en rapport avec la Commission nationale des libérations conditionnelles pour savoir quand, en réalité, ce détenu allait être admissible à la libération conditionnelle, étant donné que le juge l'avait condamné à une peine d'emprisonnement «à perpétuité avec possibilité de libération conditionnelle dans 10 ans». On lui a alors appris que le détenu était admissible à la libération conditionnelle dans quelques mois.

Voilà le genre de choses qui peuvent être très difficiles à comprendre pour quelqu'un qui n'a jamais eu de démêlés avec la justice. Voilà pourquoi il est capital que les personnes chargées de communiquer avec les victimes reçoivent une formation appropriée et qu'elles comprennent les préoccupations des victimes, et elles sont nombreuses.

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition stipule qu'une révision doit avoir lieu tous les cinq ans. Vous n'êtes pas sans savoir que le comité de la justice a révisé cette loi l'année dernière et a rendu public son rapport l'été dernier, et que le gouvernement a publié sa réponse avant le déclenchement des élections fédérales l'automne dernier. Dans le cadre de ce processus, le gouvernement s'est engagé à apporter plusieurs améliorations à la nature et à la quantité d'information que reçoivent les victimes. Le gouvernement a également promis une meilleure coordination des services d'aide aux victimes de crimes.

Désormais, les victimes pourront obtenir des renseignements concernant les nouvelles infractions commises par un détenu libéré sous condition ou concernant les motifs de transfèrement des détenus—dans notre système correctionnel, même si le crime a été commis en Ontario, le détenu peut être transféré à un pénitencier en Colombie-Britannique. Bien des victimes ne comprennent pas comment cela est possible, ni pourquoi il y a différents niveaux de prison ou pourquoi quelqu'un est condamné puis transféré d'une prison à une autre. Autant de questions complexes que les victimes n'arrivent pas à comprendre.

Le gouvernement fédéral a également promis que les victimes qui choisissent de ne pas assister à une audience de libération conditionnelle pourront avoir accès à l'enregistrement audio de ladite audience. De plus, il s'est engagé à créer une unité nationale d'aide aux victimes au sein du Service correctionnel et de la Commission nationale des libérations conditionnelles, qui aura pour mission, entre autres, d'assurer une meilleure coordination de la prestation de services aux victimes et de recevoir les plaintes des victimes de crimes.

Cependant, le gouvernement ne s'est toujours pas engagé à affecter des ressources supplémentaires au Service correctionnel et à la Commission des libérations conditionnelles pour leur permettre d'offrir des services supplémentaires aux victimes. Sachez qu'à l'heure actuelle, il y a de nombreuses victimes qui ne sont pas très bien servis ni par le Service correctionnel, ni par la Commission nationale des libérations conditionnelles. Je n'ai nullement l'intention de critiquer ces deux organismes, car je sais qu'il y a bien des gens qui y travaillent, et j'en connais personnellement, et qui se dévouent corps et âme à la cause des victimes. Mais dans le cas du Service correctionnel en particulier, les employés qui sont censés venir en aide aux victimes doivent assumer cette responsabilité en plus de toutes les autres tâches qui leur incombent. Leurs tâches principales consistent à aider les détenus à suivre le traitement approprié et à les aider pendant la durée de leur peine, et en plus de tout cela, ils doivent venir en aide aux victimes. C'est ce qu'ils font, quand ils en ont le temps.

• 1550

Compte tenu des engagements pris par le gouvernement, nous promettons de faire davantage pour les victimes, nous leur promettons de meilleurs services, alors qu'en réalité, on ne s'est pas engagé à améliorer les services auxquels elles ont droit actuellement, ni à fournir les ressources nécessaires pour que le gouvernement tienne parole.

J'ai eu l'occasion de discuter avec la commissaire du Service correctionnel du Canada, Mme Lucie McClung. Je puis vous dire qu'elle a résolument l'intention de faire tout en son pouvoir pour que le Service correctionnel serve au mieux les victimes. Mais encore une fois, sans ressources additionnelles, on ne fera pas de grands progrès.

Les victimes communiquent de plus en plus avec la Commission nationale des libérations conditionnelles et le Service correctionnel du Canada et ce, année après année. Les victimes se plaignent principalement du fait qu'elles n'ont pas un grand rôle à jouer dans le processus. Le gouvernement s'est engagé à élargir ce rôle. En effet, les victimes pourront désormais faire des déclarations orales lors des audiences de libération conditionnelle.

Comme je l'ai déjà dit, un délinquant peut commettre un crime au Nouveau-Brunswick et purger sa peine en Colombie-Britannique. La plupart des victimes n'ont pas les moyens de se déplacer pour assister aux audiences de libération conditionnelle, notamment quand le détenu a été transféré d'une région du pays à l'autre. Les victimes n'ont droit à aucune aide pour assister à ces audiences, pourtant, on leur dit que c'est leur droit d'assister et de participer. C'est comme si l'on disait à un accusé qu'il a le droit de retenir les services d'un avocat, mais seulement s'il en a les moyens. Nous avons milité pour la création d'un fonds spécial pour aider les victimes de crimes dans des circonstances comme celles-ci, c'est-à-dire où les victimes veulent assister aux audiences de libérations conditionnelles, mais n'en ont pas les moyens.

Depuis que nous avons soumis notre mémoire écrit, le gouvernement fédéral a publié un rapport intitulé Consultation nationale auprès des victimes de crimes, dont l'objectif était de donner un aperçu de la façon dont les victimes réagissaient à l'orientation du gouvernement. Si vous n'avez pas lu ce rapport, je vous le recommande vivement. Il aborde notamment le point de vue des victimes sur la question de la formation des personnes qui leur prodiguent des services. Les victimes ont souvent l'impression que ces personnes ne comprennent pas tout à fait leurs difficultés—et soyons francs, certaines d'entre elles ont carrément peur des victimes. On y aborde également d'autres thèmes comme la coordination des services aux victimes, l'amélioration de l'information et la spécialisation du personnel qui offre des services aux victimes; le personnel ne devrait pas s'occuper des victimes en plus des délinquants. On explore également ce que l'éventuelle unité des services d'aide aux victimes peut et devrait faire pour leur venir en aide. Enfin, on y parle d'aide financière aux victimes qui veulent se déplacer pour assister à des audiences de libérations conditionnelles. Le rapport aborde toutes sortes de questions prioritaires dont les victimes de crimes elles-mêmes ont fait part au gouvernement. Les victimes sont reconnaissantes au gouvernement des engagements qu'il a pris. Elles demandent simplement que l'on alloue les ressources nécessaires pour garantir la concrétisation de ces promesses.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Sullivan.

Nous entendrons maintenant les représentants de la Coalition pour la réforme de la fiscalité des entreprises. Il s'agit de M. Barry Lacombe, président de l'Association canadienne des producteurs d'acier et de Mme Fiona Cook, pour l'Association des produits forestiers du Canada. Soyez les bienvenus.

M. Barry Lacombe (président, Association canadienne des producteurs d'acier, Coalition de réforme du régime fiscal des entreprises): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. J'ai le plaisir de comparaître devant le comité et de vous faire part de notre point de vue sur la réforme de la fiscalité des entreprises. Nous vous sommes très reconnaissants de cette occasion que vous nous donnez.

Comme l'a dit M. Sullivan, nous traversons une période difficile, marquée par beaucoup d'incertitude financière et économique. Nous sommes conscients du fait que cette incertitude exigera des choix difficiles de la part du gouvernement, qui devra composer avec des pressions concurrentes en matière de dépenses, le problème du déficit et ainsi de suite. Par ailleurs, nous croyons qu'il importe de mettre l'accent sur notre régime fiscal si nous voulons avoir un régime qui favorise l'investissement, la croissance, la compétitivité et la productivité. Bref, un régime qui améliore le niveau de vie des Canadiens. Voilà ce dont nous aimerions vous entretenir aujourd'hui. Je voudrais vous parler brièvement de notre coalition, vous faire part de nos priorités, vous expliquer pourquoi ce sont des priorités pour nous, et pourquoi il faut réagir rapidement, après quoi, nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions, le cas échéant.

La Coalition pour la réforme du régime fiscal des entreprises regroupe des fabricants dont la production représente 267 milliards de dollars par année, les exportations 179 milliards de dollars par année et qui emploient 1,5 million de Canadiens. Comme l'indique la liste qui figure dans le mémoire, nous représentons les associations suivantes: l'Association canadienne des producteurs pétroliers, l'Association canadienne des fabricants des produits chimiques, l'Institut canadien des engrais, l'Institut canadien des produits pétroliers, l'Association canadienne de l'industrie des plastiques, l'Association canadienne des producteurs d'acier, le Conseil du patronat du Québec, l'Association des produits forestiers du Canada, l'Association canadienne de la technologie de l'information, l'Association des chemins de fer du Canada, l'Association canadienne de l'industrie du caoutchouc ainsi que l'Association minière du Canada. La coalition repose donc sur de larges assises.

Les questions qui nous préoccupent le plus sont les suivantes. En tête de liste figure, il va sans dire, l'allégement du fardeau fiscal des sociétés. Nous, et les autres industries, estimons que si la situation budgétaire permet de porter à 21 p. 100 les réductions d'ici à 2004, le gouvernement devrait saisir l'occasion. À moyen terme nous estimons qu'il importe également de surveiller de près la compétitivité fiscale. Cela signifie ramener à 17 p. 100 le taux fédéral pour donner un avantage net au Canada. Les provinces elles aussi doivent prendre des mesures, comme beaucoup d'entre elles l'ont fait, ainsi que vous le savez.

• 1555

Enfin, il faut à notre avis éliminer l'impôt sur le capital. Cet impôt, indépendant des bénéfices, est un faucheur d'emplois. Nous encourageons le gouvernement fédéral à collaborer avec les provinces pour éliminer tous les impôts sur le capital.

Nous estimons également qu'il faut éviter les impôts écologiques inappropriés. Nous collaborons avec la table ronde nationale sur la réforme de la fiscalité écologique. Il faut attendre la fin des travaux avant d'intervenir en matière d'impôts écologiques.

Enfin, la recherche et le développement sont importants pour la productivité et la performance de l'économie canadienne. L'actuel crédit d'impôt à la R et D doit être conservé. L'administration de ce programme a connu des améliorations importantes et celles-ci doivent se poursuivre.

Pourquoi nous intéressons-nous à ces questions, direz-vous. Vous trouverez dans notre mémoire un tableau qui indique la part que reçoit le Canada de l'investissement étranger direct en Amérique du Nord. Entre 1985 et 1998, la part du Canada a baissé d'environ 25 p. 100 pour atteindre 13 ou 14 p. 100. Selon nous, cela est attribuable à notre fiscalité et en particulier aux impôts sur le capital qui ont nettement progressé pendant la période.

Le tableau suivant compare la part du Canada et celle des États-Unis. Il n'y a là rien d'étonnant. La part du Canada régresse et celle des États-Unis progresse. Il faut contrer cette tendance car, moins nous attirons les investissements et plus nous les entravons, plus notre capital social prend de l'âge. Autrement dit, nous n'injectons pas suffisamment de capitaux dans notre économie par rapport aux autres pays. Nous sommes donc moins productifs et notre standard de vie est plus bas qu'il ne devrait l'être. Il faut lutter contre ces phénomènes.

Le tableau suivant illustre l'impôt sur les sociétés et l'impôt sur le capital du gouvernement fédéral et les provinces. Les chiffres s'arrêtent à 1995. Permettez-moi de vous en citer quelques-uns. En 1991, le produit de l'impôt sur le capital était de 1,9 milliard de dollars. Il est aujourd'hui de 4,8 milliards de dollars. Vous constaterez que l'impôt fédéral sur le capital a augmenté. De plus, les provinces interviennent pour une plus grande portion de l'impôt sur le capital, et c'est pourquoi nous estimons qu'il est temps que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership vis-à-vis des provinces pour examiner l'impôt sur le capital et ses effets nocifs.

Le tableau suivant illustre simplement le taux d'imposition réel de l'investissement de capital dans le secteur de la fabrication. Comparons ici la situation du Canada et des États-Unis. Vous constaterez qu'il y a un différentiel important et que le taux réel d'imposition de l'investissement de capital dans le secteur de la fabrication est beaucoup plus élevé qu'aux États-Unis. Il s'agit évidemment là d'un autre facteur qui explique pourquoi la portion d'investissement direct étranger au pays est en régression.

Le tableau suivant donne la ventilation du produit fédéral et provincial de l'impôt sur les sociétés. J'attire tout particulièrement votre attention sur les deux premières colonnes, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur le capital. Vous constaterez, comme je l'ai déjà dit, que les provinces aussi font largement appel à l'impôt sur le capital. Le message que nous entendons est très contradictoire lorsque l'on parle de réduire le taux d'imposition prévu par la loi ou le taux d'imposition des sociétés. C'est peut-être effectivement ce qui se fait, mais en revanche l'impôt sur le capital, qui de l'avis de l'OCDE est beaucoup plus nuisible à l'économie que l'impôt sur les sociétés, continue lui de s'alourdir. Il faut corriger cette situation. La répartition des impôts pose un véritable problème qui réclame notre attention immédiate.

Vous trouverez ensuite un abc de l'impôt sur le capital. Je ne vais pas tout commenter. Vous voyez ici chaque taux. Je signalerai seulement que le taux fédéral qui était de 0,175 p. 100 en 1989 est passé à 0,225 p. 100 en 1995. Je le répète, nous estimons que cet impôt devrait être éliminé.

Vous verrez également les taux provinciaux. Ceci continue de progresser, sauf en Colombie-Britannique et en Ontario qui ont récemment décidé de les abaisser.

Nous avons parlé des distorsions possibles de l'impôt sur le capital. Celui-ci a des conséquences sur l'investissement et l'emploi. Elles se font très lourdement sentir sur la trésorerie, car ce sont des impôts que vous payez que vous réalisiez des bénéfices ou non. Dans la situation actuelle de l'économie canadienne, c'est une très lourde charge pour l'entreprise, surtout pour le secteur de la fabrication. Les temps sont durs et il nous faut quand même continuer de payer cet impôt sur le capital peu importe si notre bénéfice est d'un cent ou nos pertes de 10 millions. C'est un impôt qui fausse absolument tout.

• 1600

Il nuit aussi aux investissements. Cela devient un obstacle de plus. Nous estimons qu'à cause de cela il y a moins d'investissements au Canada que cela ne serait le cas autrement.

Nous signalons ensuite les dangers de l'impôt sur le capital. Je précise aussi que c'est un impôt très difficile à appliquer. Simple en apparence, il est en fait complexe et coûteux. La dépendance à l'égard de l'impôt sur le capital s'accentue au lieu de s'estomper. C'est un impôt déphasé, déconnecté des efforts qu'il faut déployer pour améliorer la productivité et la compétitivité et augmenter les investissements. C'est un impôt tout simplement déphasé. Je vous invite donc à lire ce chapitre.

En résumé, monsieur le président et mesdames et messieurs des membres du comité, nous réclamons l'élimination de l'impôt fédéral sur le capital, et nous exhortons le gouvernement fédéral à collaborer avec les provinces pour qu'elles éliminent leur propre impôt sur le capital. Nous demandons également au gouvernement fédéral, lorsque la situation sera propice, d'examiner la fiscalité des sociétés, d'accélérer les réductions annoncées et d'en faire de nouvelles.

Notre message, c'est que le gouvernement s'est engagé à instaurer au pays un régime fiscal concurrentiel. Nous souscrivons entièrement à cette position, mais ce n'est pas quelque chose de statique. Le monde change, la fiscalité change et il faut rester vigilant. C'est pourquoi lorsque la marge de manoeuvre le permettra, il faudra adopter un taux d'imposition des sociétés de 17 p. 100 pour rester concurrentiel.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lacombe ainsi que madame Cook.

Nous allons maintenant entendre M. Michael Gorman, représentant de la Canadian Federation for Promoting Family Values.

M. Michael Gorman (président, Canadian Federation for Promoting Family Values): Bonjour. Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à venir ici.

Je m'appelle Michael Gorman et je représente la Canadian Federation for Promoting Family Values. Ne vous sentez pas mal à l'aise si notre nom vous est inconnu. Très peu de gens ont entendu parler de nous. Nous sommes une nouvelle association. C'est la première fois que nous venons ici, et c'est aussi la première fois que nous faisons un grand exposé. Nous sommes une association à but non lucratif créée il y a 12 ans. Nous ne travaillons pas à temps plein dans l'association. Nous commençons à peine à y travailler très sérieusement. Nous avons mis beaucoup de temps à préparer notre plan de mise en marché. Il est prêt et nous commençons aujourd'hui.

Je crois que l'on vous a remis notre texte. Vous verrez qu'il y a une rubrique intitulée questions prioritaires. Chaque année nous demandons à nos membres de nous dire quelle est la question qui leur semble la plus importante et nous dressons une liste. La première n'est pas très étonnante; c'est «la dette, le surplus»; 82 p. 100 de nos membres ont déclaré que c'est la question prioritaire et c'est donc ce que nous examinons. Viennent ensuite les services de santé, l'environnement, etc., jusqu'à la pauvreté infantile. Vous voyez le pourcentage, c'est 26 p. 100. Ça ne signifie pas qu'à peine 26 p. 100 de nos membres pensent que c'est une question importante—pas du tout. Ça signifie que c'est considéré comme une question moins prioritaire ou qui ne relève pas du gouvernement fédéral mais plutôt des pouvoirs provinciaux ou municipaux. N'y voyez donc pas la véritable importance de cette question. Nos membres ne considèrent tout simplement pas cette question comme primordiale ou elle pourrait être ailleurs.

La chose la plus importante pour nous est de déterminer quel devrait être le budget ou ce que le gouvernement devrait faire à propos de ces questions.

«Observations» est une autre de nos rubriques. Par exemple, nous pensons qu'environ 50 p. 100 du surplus cette année devrait servir à réduire la dette et puis la même chose pour le reste de la liste. Nous faisons d'autres observations. Encore une fois, ce n'est pas une étude scientifique. Nous demandons aux gens leur avis, pas pour avoir un outil mathématique ou précis pour formuler un jugement. Il y a donc toute la liste: l'éducation, les pensions, l'emploi, la défense, etc.

J'aimerais maintenant parler de l'autre partie de notre document, qui s'intitule «conclusions». À partir de ces observations, on peut extraire des valeurs de ces jugements.

• 1605

J'aimerais vous lire les conclusions que nous avons dégagées. Une chose que nous faisons, c'est de comparer l'importance d'une question à une autre, et nous disons que la défense, l'emploi et l'environnement ont acquis de l'importance—et c'est certainement le cas—alors que le surplus de la dette, l'unité et les droits de la personne en ont moins. Ça ne veut pas dire qu'il y a une grosse différence, seulement qu'il y a une tendance ici. On peut passer les autres en revue, si vous voulez, mais je suis venu ici aujourd'hui pour vous parler des recommandations.

Dans la recommandation numéro 1, et c'est la chose est la plus importante d'après nos membres, nous disons que 10 milliards de dollars devraient être affectés directement au remboursement de la dette. La dette, c'est vraiment quelque chose maintenant. Dans la lettre que le ministre m'a envoyée, en date du 3 septembre 2001, il dit, eh ben, on va s'en tirer, parce qu'on va allouer 15 milliards de dollars à la dette. Puis trois jours plus tard il a dit, eh ben, il ne pense pas qu'il va y avoir un surplus. Encore une fois, nous savons que c'est difficile, mais si on peut réduire tant soit peu cette dette, ça sera une bonne chose, surtout, comme je l'ai dit tantôt, vu l'importance des événements survenus à New York il y a dix jours, qui pourrait réduire beaucoup notre capacité de rembourser notre dette cette année, ou peut-être l'année prochaine.

Nous disons aussi qu'il faudrait accélérer les propositions de réduction de l'impôt sur le revenu des sociétés et des particuliers. Comme quelqu'un l'a dit tantôt, si on peut injecter plus de l'argent des impôts dans l'économie, peut-être qu'on va pouvoir régler une partie de nos problèmes d'emploi. Je sais que c'est difficile, c'est délicat, on ne sait pas exactement où on s'en va, mais si on pouvait obtenir ces réductions d'impôt, pour les compagnies et les gens...

Nous pensons aussi qu'il faudrait continuer à éliminer les impôts pour les familles à faible revenu. Comme vous le savez peut-être, à peine 10 p. 100 des gens pensent que la pauvreté des enfants est un problème, pourtant nous disons, oui, abaissons les impôts des familles à faible revenu. Le seuil de revenu non imposable devrait être aux alentours de 10 000 $. Ces dernières années, on est passé de 6 000 $, je pense, à 8 000 $. Nous pensons ça devrait être 10 000 $ par an et qu'on devrait aussi augmenter les prestations pour enfants.

Il y a une chose qu'on se demande souvent dans le monde dans lequel je vis, c'est pourquoi on n'enlève pas plus de gens du rôle d'imposition. Ils paient très peu d'impôts. On a un ministère qui s'appelle Revenu Canada, lequel est obligé de tenir des dossiers pour tous ces gens-là. Je sais bien qu'on aime avoir des dossiers sur tout le monde, mais si quelqu'un n'a régulièrement que 8, 9 ou 10 000 $ de revenus imposables, pourquoi engorger nos ordinateurs? Nous, dans le milieu des affaires, on sait que plus on peut se simplifier la vie, mieux c'est pour tout le monde. Ça coûterait bien moins cher au ministère de supprimer leurs noms de cette liste, de s'en débarrasser. Pourquoi faire payer quelqu'un 25 $ par année pour remplir une déclaration d'impôt? Je trouve cela un peu ridicule.

La recommandation numéro 4, c'est que les fonctionnaires et les enseignants aient une certaine expérience de la libre entreprise avant d'occuper des fonctions de haut niveau. J'ai épousé une directrice d'école et tous les membres de sa famille sont des enseignants. Et pour être passé moi-même par le système d'éducation et avoir rencontré beaucoup de fonctionnaires, comme j'ai vécu à Ottawa toute ma vie, je sais très bien ce qu'ils savent de la libre entreprise. Je vais en rester là. Je pense que vous me comprenez. Comment peuvent-ils enseigner ce qu'est la libre entreprise, alors que la plupart d'entre nous finissent par se retrouver dans la libre entreprise—on a un peu de problèmes avec ça.

J'aimerais revenir un peu en arrière et vous parler de nos membres, parce que je réalise que j'ai peut-être fait une erreur. Ce sont les gens qui réparent votre voiture, conduisent des bétonnières, vous servent votre hamburger au coin de la rue à midi. C'est le gars qui vous vend de la poterie ou d'autres objets de une boutique. C'est ça notre clientèle. Ça va changer radicalement avec le temps, mais ce sont eux les 1 500 qui vous disent ces choses-là.

• 1610

Ici, je ne suis pas trop sûr, et c'est la même chose pour les 1 500 autres qui ont répondu, c'est la Fondation canadienne pour l'innovation. On dit seulement que les entreprises familiales, les affaires de famille, les familles en général devraient avoir leur mot à dire ici. Si on décide d'y affecter 6 milliards de dollars—c'est beaucoup d'argent—nous craignons un peu que ça ne devienne trop universitaire ou scientifique. On aimerait avoir notre mot à dire là-dedans, si ça se fait un jour.

Pour ce qui est de la défense, on dit qu'on affecte environ 1 milliard de plus à la défense. J'aimerais supprimer le montant et ne pas donner de chiffres, surtout avec ce qui vient d'arriver à New York. Il va peut-être falloir augmenter le chiffre rapidement.

Nous, à CFV, on est pour une armée plus petite, bien formée et bien équipée. Il faut avoir le matériel lourd si on passe à l'action. On sait bien que les porte-avions ou les gros bombardiers, c'est pas pour nous. Allons-y plus petit, mais avec le meilleur matériel et la meilleure formation possible. Je ne sais pas si au Canada on dispense la meilleure formation, mais on peut y avoir accès si on l'a pas ici, et je suis certain qu'on pourrait l'avoir ici si on le voulait.

Il faut que je fasse attention, ici. On préférerait insister davantage sur une réserve plus jeune, plus nombreuse, beaucoup plus nombreuse, parce qu'en cas d'un véritable conflit armé d'envergure, il faut trouver du monde vite. On a beaucoup de jeunes, énormément, qui sont instruits, formés et bien intentionnés. On pourrait les former pendant les fins de semaine ou le soir. Quand j'étais jeune, on les appelait les cadets de la marine ou de l'aviation, mais on pourrait faire bien plus. Ce sera à vous d'en discuter.

Dans le domaine de l'environnement, le Canada a l'air d'avoir une super-image à l'étranger, aux États-Unis aussi, comme un beau grand pays appelé le Canada, où l'eau est pure et tout est magnifique. À mon avis, ils ne conçoivent pas, les problèmes qu'on a, surtout avec les problèmes d'eau qu'on a eus ces dernières années, mais je pense qu'il y a beaucoup de débouchés, pour l'industrie, la science là-dedans. On pourrait au moins revaloriser votre rôle en tant que fabricants de produits environnementaux qui pourraient être vendus à l'étranger. Il y a là un marché et je ne pense pas qu'on l'exploite.

En voilà une belle: accélérer la stratégie à long terme visant à accroître le tourisme au Canada, stratégie axée sur le marché mondial. Je suis certain que la situation va changer et qu'on va vite récupérer notre espace aérien. Mais il me semble, à moi et à la plupart de nos membres, qu'on ne sait pas comment vendre le Canada au reste du monde, quand il s'agit de développer notre industrie du tourisme. Il y a quelque chose qui manque, et ici dans notre ville je ne comprends pas, vu le cours du dollar, pourquoi ça ne grouille pas de touristes qui ne pensent qu'à dépenser leurs dollars. Je sais qu'il y aura beaucoup de chambres vides dans les hôtels cette année. On sait très bien ce qui est arrivé. Ça n'a pas été à la hauteur—en tout cas, c'est l'impression que m'en donne, monsieur tout-le-monde; d'autres sont peut-être d'un autre avis.

On voudrait aussi continuer la privatisation des organismes financés par le secteur public. Il y a des compagnies qui adoreraient mettre la main sur les fonds publics, faire de la publicité, ou je ne sais quoi. Je pense qu'il y a quelque chose là.

Ma préférée, c'est la dixième recommandation. Nous disons que les Canadiens s'intéressent de moins en moins à la question de l'unité. Les Canadiens ont besoin de plus d'information sur les conséquences de la sécession. Une chose que j'ai découverte ces dernières années quand j'ai fait mes enquêtes, c'est que l'unité canadienne est passée du deuxième rang au huitième sur la liste des priorités. C'est important; il y a quelque chose là. Je pense qu'on ne comprend pas comment nos familles vont être touchées advenant une sécession.

• 1615

Nous recommandons aussi que de l'argent soit alloué à une nouvelle politique du bilinguisme, pour favoriser les deux langues et les deux cultures officielles, et axée sur les enfants d'âge préscolaire ou primaire. Il faudrait absolument que cela se fasse. Je vois un changement partout au Canada, et en particulier au Québec et dans l'ouest du pays. On n'entend plus les commentaires qu'on entendait, d'une culture à l'autre, d'une langue à l'autre. On pense que si vous voulez vraiment devenir...

[Français]

Je voudrais dire quelques mots en français, si je le peux. Chez nous, on croit qu'on devrait développer une attitude mentale qui ferait en sorte que nos jeunes aient la possibilité d'apprendre une autre langue quand ils sont jeunes, et non pas quand ils ont 20, 30 ou 50 ans. À cet âge, ce n'est pas le temps d'apprendre une autre langue ou une autre culture. C'est dans les maternelles de nos écoles, quand on est jeune, qu'il est temps de le faire.

Merci, mesdames et messieurs.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup.

[Français]

Le prochain témoin est M. Serge Lebeau, directeur adjoint, Recherches et politiques agricoles de l'Union des producteurs agricoles du Québec.

M. Serge Lebeau (directeur adjoint, Recherches et politiques agricoles, Union des producteurs agricoles du Québec): Merci, monsieur le président.

Mesdames et messieurs, je tiens d'abord à remercier le Comité permanent des finances de la Chambre des communes de nous donner l'occasion de faire valoir nos représentations en vue de la préparation du prochain budget fédéral.

Aujourd'hui, je devais être accompagné, pour la circonstance, du deuxième vice-président de l'UPA, M. Gratien D'Amours. Malheureusement, en raison du décès de sa mère la nuit dernière, M. D'Amours ne peut être présent parmi nous.

Je dirai quelques mots sur l'Union des producteurs agricoles. Nous sommes une organisation qui représente les producteurs agricoles au Québec. Nous représentons environ 45 000 producteurs et productrices agricoles au Québec. Je vais tout de suite entrer dans le vif du sujet, compte tenu du temps qui nous est alloué.

Ai-je besoin de vous dire en commençant que le secteur agricole canadien a eu la vie dure au cours de la dernière décennie? Tous les agriculteurs du Canada vous le confirmeront, qu'ils soient de l'Est ou de l'Ouest du pays ou, comme nous, du Québec. J'irai donc droit au but. Pour l'UPA, une large part de ces problèmes est imputable au désengagement de l'État de l'agriculture.

En 10 ans, les sommes consacrées à l'agriculture en provenance du gouvernement fédéral ont diminué de 57 p. 100. Elles sont passées de 6,1 milliards de dollars à 2,6 milliards de dollars, tant et si bien que le soutien du gouvernement canadien à l'endroit du secteur agricole est, à l'heure actuelle, l'un des plus faibles du monde, loin derrière celui de nos principaux concurrents, les Américains et les Européens.

En fait, pendant que le Canada diminuait sa contribution, nos concurrents maintenaient, sinon augmentaient la leur. Le résultat, c'est que l'écart entre eux et nous n'a fait que se creuser. Aux États-Unis, par exemple, l'aide à l'agriculture représente 350 $ par habitant. Dans l'Union européenne, c'est 336 $. Le Canada ferme la marche avec la moitié moins, ou presque, soit 163 $ par Canadien.

En fait, depuis 1991-1992, la part des dépenses fédérales en agriculture est passée de 3,9 p. 100 à 1,6 p. 100 aujourd'hui, sans compter que les dépenses totales du gouvernement fédéral ont augmenté de 6 p. 100. Cette situation est le résultat, voulu ou non, d'une gestion qui accorde la primauté au libre marché par opposition à l'interventionnisme gouvernemental.

Si une telle façon de faire pouvait, à la rigueur, se justifier pour cause de déficit, nous croyons que cette logique n'a plus sa place à l'heure des surplus. Néanmoins, malgré ce faible soutien de l'État, les producteurs et productrices agricoles du Québec et du Canada ont contribué largement à ce que le prix au détail des aliments compte parmi les moins chers au monde, preuve de la bonne performance de leur secteur.

Cependant, à ce rythme et sans un nouvel apport du gouvernement, le secteur agricole canadien sera fragilisé de façon irrémédiable et ne pourra rivaliser encore longtemps avec la concurrence ni maintenir un prix de panier d'épicerie parmi les meilleurs de la planète.

Nous estimons que l'agriculture a fait plus que sa part pour le redressement des finances publiques. Le temps est donc venu pour le gouvernement de réévaluer son intervention en agriculture et de lui reconnaître son caractère particulier et sa contribution à l'économie canadienne. Plusieurs raisons justifient ce changement de cap, ou plutôt ce retour à la réalité.

Premièrement, l'agriculture n'a aucun contrôle sur les aléas climatiques et sur les aléas du marché, ce qui en fait un secteur à haut niveau de risque. Qui plus est, la concurrence est féroce et les marchés ne sont pas concurrentiels.

• 1620

Deuxièmement, la sécurité alimentaire est, pour le Canada comme pour tous les pays du monde, un objectif fondamental. Avec les crises successives qui ont secoué l'Europe ces dernières années, on a pu voir à quel point cette autonomie et cette sécurité alimentaire étaient importantes.

Troisièmement, l'agriculture est au coeur du développement économique canadien. Un très grand nombre de localités du Canada vivent d'ailleurs en grande partie de l'agriculture. Il est donc impératif que le gouvernement fédéral réinvestisse en agriculture. À l'UPA, nous avons donc longuement réfléchi avec nos partenaires sur les formes que pourrait prendre cette nouvelle intervention.

Nous proposons à cet égard un certain nombre de propositions. J'en reprendrai ici l'essentiel. Pour les détails, je vous renvoie au mémoire qui vous a été remis. Il me fera plaisir, le moment venu, de répondre à vos questions.

L'UPA presse donc le gouvernement fédéral de recibler ses politiques en tenant compte de quatre grands objectifs stratégiques: stabiliser les prix et les revenus; assurer la sécurité alimentaire; assurer la survie des communautés rurales; réinvestir en agriculture à la hauteur du soutien consenti par les pays de l'OCDE. À ceux qui objecteraient que le gouvernement est limité dans son action par les règles de l'OMC, nous rappelons que le Canada peut investir dans son secteur agricole sans risquer d'être pénalisé d'un point de vue commercial, puisque son niveau de soutien est nettement en-dessous des limites permises par l'OMC.

Il importe également de bonifier le programme de sécurité du revenu et de rendre accessibles les déductions fiscales pour les cotisations au CSRN; de bonifier les paiements anticipés pour les jeunes entreprises agricoles; de réinvestir dans les programmes verts, soit l'environnement, les services-conseils et la gestion des entreprises agricoles, le fonds d'adaptation de développement régional, la recherche, le CSRN, la main-d'oeuvre, et la traçabilité des produits agricoles.

En ce qui a trait à la fiscalité, l'UPA demande au gouvernement fédéral de maintenir la déduction pour gains en capital à 500 000 $ et de l'augmenter à 750 000 $ dans le cas du maintien des exploitations agricoles; de clarifier l'application de la déduction pour gains en capital pour les ventes de quotas dans les productions contingentées; de donner aux organisations agricoles un accès au crédit pour la recherche scientifique et le développement expérimental; d'améliorer l'admissibilité au régime d'accession à la propriété pour les jeunes; de lever les restrictions concernant l'amortissement fiscal et la demande des crédits de taxe sur les intrants pour les camions utilitaires et les fourgonnettes; d'exempter les agriculteurs de la taxe d'accise sur les carburants; de modifier les lois fiscales pour les propriétaires de boisés privés à la suite d'une catastrophe naturelle; enfin, d'abolir l'impôt sur les opérations forestières.

En terminant, l'UPA souhaite réitérer aux membres du Comité permanent des finances que le monde agricole considère avoir fait sa large part pour assainir les finances publiques, que la conjoncture économique s'est malgré tout considérablement améliorée depuis le début des années 1990 et qu'il est en conséquence impérieux qu'une partie des surplus budgétaires soit réaffectée à l'agriculture.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Lebeau.

[Traduction]

Nous allons maintenant passer aux questions. Commençons par M. Epp. Ce sera un tour de cinq minutes, après quoi nous donnons la parole à Mme Tremblay.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins. J'ai trouvé vos exposés fort intéressants. Vous nous avez donné matière à réflexion, c'est mon commentaire pendant que j'essaie de m'organiser.

Le président: Tout le monde l'a remarqué.

M. Ken Epp: Eh bien, c'est moi qui ai le privilège comme membre du comité de poser la première question, il faut donc que je travaille plus fort que n'importe qui d'autre.

Une voix: Ne vous gavez pas trop de matière à réflexion.

M. Ken Epp: Tout d'abord, je voudrais poser une question à M. Alper. Vous proposez un nouvel organisme indépendant pour aider le gouvernement à produire des rapports, je crois, sur l'évaluation de diverses choses. Je me demande à quel genre d'études vous songez. Donnez-moi des exemples, si vous le pouvez.

M. Howard Alper: Je vous remercie de votre question.

Pour ce qui est des sujets possibles, je vais en énumérer certains qui sont d'actualité. Par exemple, la recherche sur les cellules souches est très importante du point de vue médical et autres, du point de vue de l'éthique, etc. Il en va de même pour la biotechnologie alimentaire et les organismes et aliments génétiquement modifiés. Il y a aussi les questions sur les changements climatiques.

• 1625

Par le passé, l'Académie canadienne des sciences, des arts et des lettres a effectué quelques études, mais nous ne pouvons n'en faire qu'une par an. À vrai dire, nous n'avons pas de budget. Nous avons fait une étude sur l'incidence des lignes de transmission sur la santé, si c'est le cas; sur les téléphones cellulaires; sur une colonie de singes et où l'installer. La presse a beaucoup parlé de cette dernière étude et le gouvernement est intervenu dans l'affaire.

Je pense que les quelques premiers exemples que j'ai donnés sont vraiment importants pour notre société.

M. Ken Epp: Très bien.

D'abord, j'aimerais vous faire part de mes préoccupations. Comment pouvez-vous rester à l'écart des pressions politiques si vous demandez au ministre des Finances de financer votre organisation? Il est reconnu, je pense, que les politiques et les médias ont des objectifs. Comment pouvez-vous échapper à ces pressions?

Par exemple, si vous publiez un rapport où vous dites que le réchauffement de la planète est un canular—disons que vous avez fait des études et c'est ce que vous avez constaté, ce serait alors la fin de vos contrats.

M. Howard Alper: Je comprends ce que vous dites. Toutefois, si l'organisme n'a pas de lien de dépendance, tout comme une fondation semblable à la FCI, ce ne sera pas le cas, car les fonds sont fournis à perpétuité et vous vivez des intérêts de ce financement. C'est la situation idéale, on n'est pas exposé aux risques que vous mentionnez.

Je peux vous dire que dans d'autres pays—par exemple, au Royaume-Uni, la Royal Society, ou en France, l'Académie des sciences—obtiennent un financement annuel du gouvernement. Malgré cela, la Royal Society reçoit environ de 60 à 80 millions de dollars canadiens par an. Je ne connais pas les chiffres en ce qui concerne la France. Ce ne sont que des exemples. Toutefois, il s'agit d'un financement annuel. Malgré certains rapports et recommandations très controversés dans l'histoire de la Royal Society et de l'Académie des sciences, sur une période de plus de 250 ans, à ma connaissance, il n'y a pas été question que le gouvernement retire son appui ou modifie l'affectation des ressources financières.

M. Ken Epp: J'ai encore une question pour vous. Comment avez-vous l'intention de vous organiser? Je pense que presque toute la bonne recherche scientifique au pays se fait grâce à l'appui d'organisations telles que les universités, le Conseil national de recherches et, dans certains cas, les conseils provinciaux de recherche. Je me demande comment vous vous organiseriez pour faire des recherches précises de façon à maintenir votre indépendance.

M. Howard Alper: Ce sont des groupes nommés par le conseil de direction qui feraient ces évaluations. Les membres de ce groupe ajouteraient de la valeur du fait de leur compétence, qu'ils soient membres de l'organisation A ou de l'organisation B. Ils pourraient venir d'une université, du gouvernement ou du secteur des entreprises.

Cela a donné d'excellents résultats dans d'autres pays. Savez-vous que l'académie nationale aux États-Unis effectue une étude par jour? C'est une production énorme. Cela a vraiment une incidence sur la formulation et la modification de politiques ainsi que sur les questions de mise en oeuvre.

Très récemment, il y a deux semaines et demie, je pense, j'ai assisté à une réunion générale sur les défis posés à la société et j'y ai vu une lettre du président des États-Unis adressée au président des académies nationales demandant qu'une étude soit effectuée sur des points particuliers des changements climatiques. Vous connaissez la position des États-Unis sur l'Accord de Kyoto, etc.

• 1630

Ces questions qu'on soulève sont très importantes lorsqu'il s'agit d'informer les décisionnaires et d'autres sur des aspects particuliers des changements climatiques. Je pense donc que le conseil de direction joue un rôle très important. Par sa composition générale, il représente divers secteurs de la société et n'est pas lié à un organisme ou groupe particulier.

M. Ken Epp: J'aimerais également poser une question rapidement à M. Sullivan. Je suis curieux de constater que dans votre rapport, vous dites que les contacts avec les victimes de crimes ont augmenté de quelque 88 p. 100 depuis 1995-1996, pourtant les statisticiens de Statistique Canada nous disent que le crime est à la baisse au Canada. Est-ce que parce que votre organisation n'existait pas avant cette date ou ne faisait rien? Pouvez-vous nous expliquer cet écart dans les chiffres?

M. Steve Sullivan: Les données statistiques que je cite portent sur les contacts avec la Commission nationale des libérations conditionnelles, un organisme gouvernemental, pas notre organisme. La Commission attribue cette augmentation au fait qu'il y a de plus en plus de groupes qui font état des droits des victimes, et de victimes qui sont de plus en plus conscientes de leurs droits. Il y a encore bien des gens qui ne savent pas que les victimes ont des droits. Ces dernières années, la question des droits des victimes est devenue un sujet de débat public et de plus en plus de personnes se sont prévalues de leur accès à ces droits.

M. Ken Epp: Ne serait-il pas tout à fait raisonnable d'offrir un mini-pamphlet, peut-être de 16 pages, dans lequel on résumerait aux gens leurs droits? Si quelqu'un est une victime, vous pourriez leur donner ce livret. Il ne faudrait pas grand temps ni ressource pour décrire aux intéressés ce qui se trouve dans le livret. Toutefois, les intéressés pourraient le lire pendant leur deuil ou leur malheur, et ainsi savoir où aller pour obtenir de l'aide.

M. Steve Sullivan: En fait il existe plusieurs petits pamphlets de ce genre. La Commission nationale des libérations conditionnelles et les services correctionnels les publient. L'une des difficultés, c'est que la procédure devant les tribunaux relève des gouvernements provinciaux—la Couronne—et que la Commission nationale des libérations conditionnelles et des services correctionnels sont des organismes fédéraux, et parfois il y a manque de communications. Souvent, le procureur de la Couronne et les services provinciaux à l'intention des victimes ne disent pas à celles-ci quels sont leurs droits et ne leur remettent pas très souvent ces pamphlets. Mais vous avez raison, cela aiderait certainement les victimes à comprendre leurs droits.

Il reste toutefois à surmonter le problème qu'ont les victimes à comprendre l'information relativement au délinquant, à savoir qu'il vient de déménager ici, ou comment assister à l'audience de libération conditionnelle—des choses du genre.

M. Ken Epp: Cela m'amène directement à ma dernière question pour vous, le financement. Vous êtes ici devant le Comité des finances et vous nous demandez de recommander au ministre des Finances qu'il vous donne un financement accru de façon à ce que votre organisation puisse faire son travail. En passant, c'est une organisation dont j'appuie le rôle de tout coeur. Toutefois, il n'en demeure pas moins que la plupart des crimes sont commis dans les villes—je pense que les données statistiques le démontrent—et la plupart des forces policières urbaines sont à l'emploi de leurs villes respectives. Comment proposez-vous d'acheminer ce financement du gouvernement fédéral aux municipalités qui paient pour les services de police?

M. Steve Sullivan: Je me dois de préciser que le financement n'est pas en fait pour nous. Nous sommes un organisme national à but non lucratif. C'est l'Association canadienne des policiers qui nous finance.

Ce que je vous demande, c'est de recommander un financement accru pour les services correctionnels du Canada et pour la Commission nationale des libérations conditionnelles, deux organismes qui offrent des services aux victimes si le délinquant est condamné à une peine de plus de deux ans. Il incombe au gouvernement fédéral d'offrir ces services aux victimes. Nous ne demandons pas d'argent pour nous; nous demandons d'accroître le financement d'organismes fédéraux de façon à leur permettre de mieux servir les victimes.

M. Ken Epp: Merci.

Monsieur le président, je suis certain que j'ai pris mes cinq minutes. J'aimerais m'inscrire au deuxième tour, à moins que vous ne souhaitiez que je continue maintenant.

Le président: Non, je regrette, ce n'est pas possible.

Madame Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Merci, monsieur le président.

Je m'excuse auprès des personnes dont je n'ai pas entendu les témoignages et dont je ne connais pas les documents. Je ne pourrai malheureusement pas m'adresser à elles pour leur poser des questions. Je vais m'adresser au représentant de l'UPA, M. Lebeau.

• 1635

Monsieur Lebeau, avez-vous des données sur les conséquences du désengagement de l'État dans le domaine de l'agriculture, par exemple? En termes de développement régional, l'occupation du territoire est extrêmement importante dans un pays vaste comme le nôtre. Le développement se fait principalement par l'occupation et le travail des agriculteurs et des agricultrices.

Le Canada s'étant désengagé considérablement dans le domaine de l'agriculture, les provinces ont elles-mêmes réduit leurs dépenses dans ce domaine, comme dans tous les autres domaines. Quelles en sont actuellement les conséquences en termes du nombre de fermiers qu'on a perdus, de capacité de production qu'on a perdue et de la fermeture de certains territoires, conséquences qui risquent de faire en sorte que le Canada devienne un pays de grands centres parce qu'il a négligé de continuer à occuper son territoire?

M. Serge Lebeau: On est en train de faire une étude sur l'impact du désengagement de l'État sur les communautés rurales. C'est une étude qui n'est pas encore terminée, mais on peut soupçonner que le fait que l'activité agricole soit moindre dans certaines régions a sûrement un impact sur l'activité économique de la région. On est en train d'évaluer précisément cet impact.

Concernant les impacts, si vous regardez des séries statistiques sur le revenu net des producteurs agricoles au Canada, vous verrez qu'il y a des fluctuations très importantes. Il y a des provinces canadiennes qui ont vu leur revenu net baisser, ce qui n'est sûrement pas étranger au désengagement de l'État. Il y a des provinces, particulièrement les provinces de l'Ouest, qui sont actuellement très affectées par la crise qui sévit dans le secteur des céréales au niveau des prix. Il y a un réel problème pour ces provinces.

Au Québec, une de nos caractéristiques, c'est qu'on a une assise agricole un peu différente de celle qui peut exister dans les autres provinces. Il y a beaucoup de productions qui sont assujetties à la gestion de l'offre. On sait que la gestion de l'offre n'exige pas du gouvernement des apports d'argent aussi importants que dans des secteurs où le marché est complètement libre. La gestion de l'offre est présente dans le secteur laitier et dans le secteur de la volaille. C'est le consommateur qui paye directement.

Il n'en demeure pas moins, comme je l'expliquais, que le panier d'épicerie, au Canada, est parmi l'un des moins chers au monde malgré la gestion de l'offre. Les producteurs de lait du Canada font une enquête tous les ans et arrivent à démontrer que c'est encore au Canada que les produits laitiers sont le moins chers. C'est vraiment une production qui est contingentée. Je dirais qu'au Québec, le désengagement du gouvernement s'est peut-être moins fait sentir au sein de ces productions-là.

Par contre, je dois ajouter que le gouvernement du Québec a continué d'appuyer l'agriculture, contrairement aux gouvernements d'autres provinces. Je pense aux provinces de l'Ouest et à la Colombie-Britannique, qui ont diminué leur aide au secteur agricole. C'est sûr que cela a eu un impact. Au Québec, la diminution du gouvernement fédéral a été compensée, peut-être pas à 100 p. 100, mais en partie par le gouvernement du Québec, ce qui fait que l'impact qu'on peut connaître au Québec est peut-être moins grand que dans d'autres provinces, compte tenu de la caractéristique du secteur agricole qu'on connaît et du non-désengagement de l'État québécois.

Mme Suzanne Tremblay: Il y avait un programme, qui existe toujours, auquel le gouvernement fédéral contribuait. Maintenant, la contribution du gouvernement fédéral est finie. Il s'agit du Programme d'analyse des troupeaux laitiers. On m'a dit que, malheureusement, la contribution du Canada à ce programme, qui était de 3 millions de dollars—étant donné l'ampleur du budget du Canada, c'est presque des pinottes—a été complètement arrêtée, bien que le Québec fournisse toute l'expertise à l'ensemble des producteurs laitiers canadiens. Êtes-vous en mesure de jeter un peu plus d'éclairage sur cette question?

M. Serge Lebeau: C'est vrai que le gouvernement fédéral s'est désengagé du Programme d'analyse des troupeaux laitiers. Je pense que c'était le ROP au niveau fédéral. Je ne connais pas les particularité des autres provinces, mais je sais que le Québec soutient toujours ce programme à raison de...

Mme Suzanne Tremblay: Un million deux cent mille dollars.

M. Serge Lebeau: Un million deux cent mille dollars par année, à peu près.

Mme Suzanne Tremblay: À peu près.

• 1640

M. Serge Lebeau: Bien sûr, il y a eu un désengagement là aussi, mais je dirais qu'au Québec, il y a quand même un soutien de la part du gouvernement du Québec. Le Québec est responsable, notamment, du contrôle des troupeaux laitiers au Manitoba. Je ne pourrais pas vous dire si, dans les autres provinces, ce sont les producteurs qui doivent payer directement ou si c'est la province qui intervient.

Il y a une chose que je n'ai pas mentionnée. Il est certain que ce genre d'intervention est dans la catégorie verte des mesures que l'OMC permet. Je pense que c'est le genre d'intervention que le gouvernement fédéral devrait continuer à faire, parce qu'aucune attaque commerciale ne peut nous être faite, compte tenu du fait que ce type de programme est dans une catégorie verte.

Mme Suzanne Tremblay: J'ai encore une question.

On a beaucoup parlé des OGM et de la traçabilité des produits agricoles. On nous dit que si on mettait l'accent sur la traçabilité, on aurait beaucoup moins d'inquiétudes au sujet des OGM puisqu'on pourrait suivre leur trace et savoir exactement ce qu'on mange. Donc, on pourrait faire autrement ce qui semble être difficile à faire du côté des OGM.

Avez-vous la moindre idée de ce que pourrait coûter la mise sur pied d'un vrai programme de traçabilité pour l'ensemble des provinces? Et sur combien de temps faudrait-il l'échelonner? C'est bien beau d'en entendre parler, d'en parler et de le répéter, mais est-ce qu'il y a moyen de savoir combien cela pourrait nous coûter?

M. Serge Lebeau: Je n'ai pas fait l'évaluation. Cependant, au Québec, actuellement, le gouvernement du Québec souscrit à un programme de traçabilité ou de qualité. Je pense que c'est 21 millions de dollars sur trois ans, ou 7 millions de dollars par année. On sait que c'est nettement insuffisant, et cela concerne actuellement seulement le secteur du bovin, qui n'est pas la première production au Québec. Donc, on sait que c'est nettement insuffisant. Je dirais que cela pourrait coûter près d'un demi-milliard de dollars sur cinq ans, mais je vous dis cela en essayant d'imaginer, compte tenu des apports d'argent qu'il y a au Québec, ce que cela pourrait être au niveau canadien. Bien sûr, ce sont des sommes assez importantes, mais vous avez tout à fait raison. Étant donné la situation qu'on peut connaître en Europe, je pense que nous devons être extrêmement vigilants de ce côté si nous ne voulons pas nous retrouver avec des problèmes de maladie de la vache folle, etc.

Évidemment, il y a aussi toute la question des OGM. Je pense que le consommateur veut de plus en plus savoir ce qu'il mange. Donc, je pense qu'il y a une intervention à faire à ce niveau-là. Encore une fois, ce sont des programmes verts du point de vue du commerce international.

[Traduction]

Le président: Merci madame Tremblay.

Nous allons maintenant passer à la liste suivante: Mme Barnes, M. McCallum, M. Cullen, M. Pillitteri, M. Nystrom et M. Brison.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie tous de vos exposés.

J'aimerais m'adresser à M. Gorman.

Même si je pense que nous aimerions tous que les contribuables à faible revenu n'aient pas à payer d'impôts et n'apparaissent donc pas sur les rôles d'imposition, le fait de remplir une déclaration d'impôt comporte un avantage incroyable pour ces personnes. À titre d'exemple, je vous citerai le remboursement de la TPS, l'information est tirée de la déclaration de revenus, le crédit d'impôt pour enfants, la réduction sur le prix du combustible. Il y en a une foule aux paliers provincial et fédéral... et l'information provient de la source la plus fiable, sur une base tout à fait volontaire lorsque la personne elle-même remplit sa déclaration d'impôt. Même si remplir sa déclaration comporte certaines frustrations, il y a des avantages à disposer de cette information exacte et à un seul endroit.

J'aimerais également dire que la Fondation pour l'innovation est l'une de ces nouvelles institutions au Canada qui fait un travail incroyable. Venant de London en Ontario où il y a une université et des centres de recherche médicale... c'est vraiment un grand bienfait pour les milieux de la recherche et du développement partout au Canada.

Monsieur Alper, j'aimerais avoir une idée réaliste du temps qu'il faudra pour que ce nouvel organisme que vous proposez au gouvernement soit en place et fonctionnel. J'aimerais également que vous nous disiez comment on a accueilli votre idée d'investir immédiatement 30 millions de dollars avec amortissement sur 10 ans plutôt qu'un versement de 3 millions de dollars par an.

M. Howard Alper: Merci.

• 1645

Si vous permettez un commentaire sur la FCI, je crois qu'il faut reconnaître les avantages fantastiques de la fondation, non seulement pour les milieux universitaires, mais pour tous les secteurs. Il s'agit d'un partenariat qui comprend le secteur des entreprises, les gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral, les universités, etc. Les résultats, depuis trois ans et demi simplement sont vraiment exceptionnels.

En ce qui concerne la création des Académies canadiennes, nous aimerions que cela se fasse au cours de l'année à venir, c'est-à- dire au cours du prochain cycle budgétaire.

Quant au protocole de financement, oui, la vaste majorité préconise une solution du même type que la FCI car, comme je l'ai mentionné en réponse à une question précédente, cela assure une autonomie complète. En outre, cela garantit aussi un financement soutenu pour les académies pendant au moins 10 ans. Si l'on adopte le modèle de la FCI, le financement existerait à perpétuité, bien que pour une période précise—pas à perpétuité, mais pour une période définie.

Cela semble être l'opinion générale, je ne dirai pas unanime, mais l'opinion de la vaste majorité jusqu'à présent.

Mme Sue Barnes: Merci beaucoup.

Monsieur Sullivan, êtes-vous un employé à plein du temps du centre que vous représentez?

M. Steve Sullivan: Oui.

Mme Sue Barnes: Très bien. Vous avez dit que votre financement venait de l'Association canadienne des policiers—vous l'avez dit à deux reprises. S'agit-il d'un financement à 100 p. 100 ou recevez-vous quelque chose de la Canadian Badge In Uniform...

M. Steve Sullivan: Actuellement, nous sommes financés uniquement par l'Association canadienne des policiers. Nous ne touchons plus de financement de la Canadian Badge In Uniform.

Mme Sue Barnes: Donc, c'est inexact...

M. Steve Sullivan: C'était le cas précédemment. Ces dernières années toutefois, nous sommes financés uniquement par l'Association canadienne des policiers.

Mme Sue Barnes: L'Association canadienne des policiers elle-même n'est pas vraiment un organisme national puisqu'elle n'existe pas dans chaque province. Pourtant, vous vous prétendez un organisme national. J'aimerais savoir comment vous trouvez vos membres et comment vous les recrutez.

M. Steve Sullivan: Nous sommes une toute petite organisation. Il y a deux employés, y compris moi-même. Lorsque je dis que nous sommes un organisme national, j'entends par là que nous aidons des victimes de partout au pays. Nous n'avons pas de membres. Nous n'exigeons pas de cotisations. Les gens ne versent rien pour faire partie de notre organisation. Nous aidons tout simplement les victimes qui s'adressent à nous. Je suis le premier à le reconnaître que vu notre taille modeste, il y a probablement plus de victimes qui ne savent rien de notre existence qu'il y en a qui nous connaissent. Nous ne demandons pas d'argent aux victimes. Personne ne nous appartient.

Mme Sue Barnes: Donc vous n'avez pas de conseil d'administration, ou quoique ce soit du genre?

M. Steve Sullivan: Nous avons un conseil. En font partie des représentants des associations de police évidemment, puisqu'elles nous fournissent le financement, mais également de groupes de victimes, comme victimes de violence et CAVEAT—précédemment CAVEAT.

Mme Sue Barnes: Très bien. Vous parlez beaucoup dans votre mémoire des audiences de la Commission des libérations. En lisant ce mémoire j'ai constaté que c'était l'un de vos principaux sujets d'intérêt. Demandez-vous que le gouvernement fédéral finance la présence de chaque victime à une audience de libération conditionnelle?

M. Steve Sullivan: Pour de nombreuses victimes, ce n'est pas une question financière. Par exemple, comme vous le savez, il y a plusieurs établissements pénitenciers à Kingston en Ontario et donc ce n'est pas une question financière qui empêche les victimes d'assister aux audiences. Toutefois, si le délinquant est transféré ailleurs au pays, le coût devient prohibitif. Nous demandons la création d'un fonds pour les cas où les victimes ont besoin d'aide financière. Il y a un fonds semblable pour les familles qui veulent assister aux audiences en vertu de l'article 745. Ce n'est pas à la disposition de tous. C'est pour les familles qui peuvent démontrer avoir besoin d'aide. C'est surtout pour les familles dans des situations extrêmes, où un délinquant a été transféré à l'autre bout du pays et le voyage est tout simplement prohibitif.

Mme Sue Barnes: Je veux être sûre d'avoir bien compris, même si vous avez un conseil d'administration, vous n'avez pas de membres?

M. Steve Sullivan: Nous n'avons pas de membres, non.

Mme Sue Barnes: Voilà toutes mes questions, merci.

Le président: Merci.

Monsieur McCallum.

M. John McCallum (Markham, Lib.): Merci.

J'ai deux questions. L'une s'adresse à M. Alper. J'ai passé une grande partie de ma carrière dans le monde universitaire et donc naturellement, je suis en faveur de la recherche. Toutefois, j'ai du mal à comprendre le raisonnement de votre proposition, puisque vous prétendez qu'elle vise à fournir une source d'évaluation experte autonome et crédible sur les sciences et à assumer une forte présence canadienne dans le monde des sciences. Or, nous avons déjà une société royale; nous avons déjà beaucoup d'organismes qui représentent diverses disciplines universitaires qui, on le suppose, font déjà tout cela. Je ne comprends pas très bien. Il me semble que vous voulez rajouter un autre niveau, et je me demande si cela ajoutera grand-chose à l'effort total. Mais peut-être n'ai-je pas bien saisi.

• 1650

M. Howard Alper: Cette proposition vise à transformer les sociétés ou groupes fondateurs d'origine. La Société royale, l'Académie canadienne des sciences, des arts et des lettres, l'Académie canadienne du génie et ce qui est l'Académie canadienne des sciences médicales réunies deviendraient les Académies nationales. Les Académies nationales chapeauteraient le tout. On réunirait ainsi les compétences, l'expertise de ces divers groupes qui individuellement n'ont pas tous ces atouts, à moins que ce ne soit d'une façon très ciblée. Voilà pourquoi on a créé des académies nationales aux États-Unis. C'était il y a à peine cinq ans—même si l'Académie nationale des sciences est très ancienne, et l'Académie du génie a environ 40 ans, et les sciences médicales environ le même âge.

Je pense qu'il y a une valeur et une importance à avoir accès à une réserve de talent aussi diverse, qui peut s'attaquer aux questions d'actualité quelles qu'elles soient.

M. John McCallum: Une question supplémentaire. Si ce nouvel organisme est le résultat de la fusion de trois organismes existants, pourquoi lui faut-il 10 millions de dollars de plus par an?

M. Howard Alper: Parce qu'à l'heure actuelle, il est impossible de faire faire des évaluations par des spécialistes, sauf exceptionnellement. Il n'y a pas de ressources pour faire quoi que ce soit. Voilà la réalité.

M. John McCallum: Vous voulez dire que les trois organismes actuels ne font pas d'évaluations?

M. Howard Alper: Oui, en effet. La Société royale ne reçoit aucun appui gouvernemental. Actuellement, elle est en déficit, ça je peux vous le dire. C'est la même chose pour l'Académie canadienne du génie. La situation est donc tout à fait différente. Comme je l'ai mentionné plus tôt, la Royal Society au Royaume-Uni touche de 60 à 65 millions de dollars par an du gouvernement.

M. John McCallum: Merci. Votre réponse est très claire. Je n'avais pas compris que c'était le cas.

Ma deuxième question s'adresse à M. Lacombe. Tout d'abord, sur un point technique, j'examinais vos tableaux et j'avais l'impression que lorsque la réduction de l'impôt des sociétés était pleinement en vigueur, notre taux d'imposition des sociétés serait inférieur à celui des États-Unis. D'après votre tableau, ce n'est pas le cas.

M. Barry Lacombe: Je pense qu'il faut faire une distinction entre les taux prescrits par la loi et les taux réels. Vous le savez sans doute mieux que moi. Oui, nous réduisons les taux prévus par la loi, mais par exemple, dans le secteur de l'acier, même après ces réductions, nous demeurons dans une situation non concurrentielle par rapport au secteur de l'acier américain. Il faut donc en tenir compte, comme vous le savez, puisque tous ces aspects influent sur le taux d'imposition réel. Lorsqu'on procède ainsi, surtout secteur par secteur, on constate que le secteur de la fabrication n'est pas dans cette situation.

M. John McCallum: Cela inclurait des éléments tels que l'impôt sur le capital.

M. Barry Lacombe: L'impôt sur le capital, la déduction pour amortissement dans divers secteurs, etc. Nous parlons du taux réel d'imposition.

M. John McCallum: Très bien. Voici ma dernière question. Je suis très ouvert à l'idée d'un taux d'imposition inférieur pour les sociétés. Je pense que ce serait très rentable puisque cela stimulerait la croissance, la productivité et tout le reste. Comme vous, j'estime que l'impôt sur le capital est une mauvaise taxe. Mais j'aimerais que vous nous donniez un sens des priorités. À l'heure actuelle, nous n'avons pas des quantités énormes d'argent à dépenser à n'importe quoi. S'il faut choisir disons entre une réduction de l'impôt sur le capital ou une réduction accélérée de l'impôt des sociétés, quel serait votre choix? Ou souhaitez-vous une réduction ou même l'élimination de l'impôt sur le capital même si cela signifie que le gouvernement accusera un déficit?

M. Barry Lacombe: Je vais vous donner ma réponse, monsieur McCallum. Je suis en faveur, manifestement, pour nombre de raisons, d'une réduction de l'impôt sur le capital ou de son élimination, notamment à cause des pressions actuelles sur le fisc et le montant de recettes qui seraient apparemment perdues si l'on éliminait l'impôt sur le capital. Je crois aussi que les recettes tirées d'un investissement accru que stimulerait l'abolition de l'impôt sur le capital, compenseraient en fait toute perte de recettes. Donc d'un point de vue dynamique, je ne pense pas que cela coûte de l'argent au gouvernement.

• 1655

Le président: Merci, monsieur McCallum.

Nous avons Roy Cullen, Albina Guarnieri, Gary Pillitteri, Lorne Nystrom et Scott Brison.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.

J'ai quelques questions à l'intention de M. Lacombe et de Mme Cook. Il ne semble pas y avoir grande justification, sur le plan politique, pour l'impôt sur le capital, mais cela représente en recettes fédérales environ 1,23 milliard de dollars, et trois fois cette somme pour les provinces. D'après ce qu'on me dit par exemple, au Québec, cela représente 1,2 ou 1,3 milliard de dollars par an. Où en sont vos discussions avec les provinces, et tout particulièrement avec le Québec? Peut-être pouvez-vous faire le point. Pensez-vous que si nous n'obtenons pas la collaboration des provinces, le gouvernement fédéral devrait agir seul en ce qui concerne l'impôt sur le capital?

Mme Fiona Cook (vice-présidente, Commerce international et relations gouvernementales, Association des produits forestiers du Canada; Coalition de réforme du régime fiscal des entreprises): En ce qui concerne le Québec, vous avez peut-être constaté qu'au sein de la coalition, on trouve le Conseil du patronat du Québec. Nous prévoyons des rencontres avec les fonctionnaires du ministère des Finances du Québec au cours des mois à venir pour parler de cette question.

Nous sommes convaincus que le gouvernement fédéral a la possibilité de faire preuve de leadership en ce qui concerne l'impôt sur le capital. La Colombie-Britannique a déjà agi et l'Ontario donne des signes prometteurs aussi, mais nous estimons que même si le Québec n'agit pas immédiatement dans ce sens, le gouvernement fédéral a la possibilité de faire preuve de leadership ici et d'envoyer un message.

M. Roy Cullen: Merci.

Je regardais aussi vos tableaux, celui qui est intitulé «Investissement direct étranger en Amérique du Nord». J'étais un peu perdu jusqu'à ce que je constate que ce tableau exclut l'investissement étranger direct intra-nord américain. Évidemment, il y a eu plusieurs acquisitions récemment par des entreprises américaines, West Coast Transmission, Anderson Exploration, et si on remonte à quelques mois, MacMillan Bloedel. Je sais que cela suscite certaines préoccupations. Ce n'est pas reflété ici, mais on pourrait presque faire valoir le contraire, à savoir que les investisseurs américains ont confiance dans le Canada. Il y a de nombreux aspects à ce débat. D'autres feront valoir que les investisseurs étrangers, les investisseurs américains, se procurent des avoirs au rabais, nous volant essentiellement certaines des perles de l'entreprise canadienne. Qu'est-ce qui est à l'origine de cela? Y a-t-il lieu de s'en préoccuper? Y a-t-il des interventions en matière de plan de politique, autre que l'AEIE ou quelque chose du genre—je vais vous dire quelles sont mes préférences—que le gouvernement devrait examiner ou dont il devrait se préoccuper?

Mme Fiona Cook: Je pense qu'il y a lieu de s'inquiéter lorsque de plus en plus d'entreprises américaines achètent effectivement des actifs au Canada. Cela signifie que les décisions désormais ne sont plus prises au Canada. Beaucoup de sièges sociaux sont établis aux États-Unis, donc la plupart des décisions sont prises aux États-Unis. Par conséquent, je crois que sur le plan stratégique, certainement de quoi se préoccuper. Je ne sais pas vraiment quelle devrait être la solution.

Je crois aussi que vous avez fait une remarque pertinente lorsque vous avez dit que cela est pratiquement contraire à l'intuition, que cela va à l'encontre de l'argument selon lequel nous n'avons pas d'actifs concurrentiels, mais je crois que nous devons reconnaître que cela est attribuable en grande partie au taux de change, et c'est une autre question.

M. Roy Cullen: Mais si je suis une entreprise américaine... Lorsque j'étais dans le secteur privé, lorsqu'on examinait une transaction, on faisait une analyse de rentabilisation à moyen et à long terme. Donc, si vous achetez et qu'en plus le gouvernement accorde quelques gâteries, si je puis m'exprimer ainsi, cela améliore votre analyse de rentabilisation, mais votre analyse de rentabilisation devrait être solide dès le départ. En partant du même principe, si vous achetez des actifs à meilleur marché aujourd'hui en raison du taux de change du dollar entre le Canada et les États-Unis, il faut sûrement voir plus loin et se dire que le dollar américain est probablement surévalué et qu'un jour ce déséquilibre va changer. Je reconnais que simplement en fonction des flux monétaires actualisés, basés sur votre investissement, les chiffres semblent plus logiques lorsque vous achetez des actifs à ce prix. Est-ce que cela correspond davantage à des investissements stratégiques, ou les gens sont-ils à la recherche d'avantages à court terme. Que se passe-t-il dans les faits ici au niveau commercial?

M. Barry Lacombe: Je pense que ces deux éléments interviennent sur le plan commercial. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que ce serait l'analyse de rentabilisation, mais je dois avouer que vous soulevez une série intéressante de questions quant à la situation des investissements directs étrangers, représentée de façon assez détaillée, pratiquement secteur par secteur. Je soupçonne qu'une bonne partie des investissements directs étrangers servent à acheter des choses au Canada qu'on ne peut pas obtenir aux États-Unis, dans le secteur des ressources naturelles en particulier, et je pense que nous devrions rester vigilants et que nous devons faire ce genre d'analyse. J'estime que le taux de change favorise particulièrement ce genre de chose mais de toute évidence, comme vous le signalez, il y a d'autres phénomènes aussi qui interviennent. Il y a la proximité des marchés, la facilité des transports. Il faut reconnaître que le Canada présente un environnement très stable sur le plan des capitaux d'investissement étrangers, surtout les capitaux d'investissement qui proviennent des États-Unis. Nos cadres d'action se ressemblent beaucoup.

• 1700

J'estime donc qu'il est nécessaire de procéder à une vaste analyse des investissements directs étrangers, pour déterminer ce qui se passe et où cela se passe, et ce qui détermine ces décisions. Je soupçonne qu'une bonne partie de ces investissements servent à l'achat de ressources naturelles. Je dirais que très peu de ces investissements pourraient être qualifiés de nouveaux investissements destinés à améliorer le «stock de capital national» du Canada, la productivité et ce genre de chose. Je crois qu'il serait intéressant de faire ce que vous proposez, monsieur Cullen, et ce serait à notre avis une initiative utile.

Pour nous, la situation est préoccupante. Les membres de la coalition sont en train d'examiner où se font ces investissements. De toute évidence, selon l'opinion d'un certain nombre de membres de la coalition, le Canada ne reçoit pas la part des investissements qu'il aurait reçu autrefois dans ces secteurs. Je n'aime pas utiliser cette expression, mais lorsqu'on rachète quelque chose, cela entraîne certaines conséquences, et lorsqu'on investit dans quelque chose de nouveau, cela entraîne d'autres conséquences. Je dirais que l'accent est mis davantage sur les fusions et les acquisitions plutôt que sur la stimulation de l'activité économique, si je peux m'exprimer ainsi, au Canada.

M. Roy Cullen: Oui. Je vous remercie.

Le président: La parole est à Mme Guarnieri, puis à M. Pillitteri.

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Sullivan, tout d'abord laissez-moi vous féliciter du travail difficile mais très nécessaire que vous faites quotidiennement pour obtenir justice pour les victimes dans ce pays. On dit souvent qu'une personne devient d'abord une victime de crime, puis une victime de l'injustice et, enfin, une victime de la pauvreté. Je suis sûre que vous avez constaté directement ce qui se passe dans les familles frappées par une tragédie. Elles deviennent incapables de poursuivre leurs carrières, leurs commerces, elles se résignent au chômage, puis elles sombrent dans la pauvreté.

Dans votre exposé, vous avez mis l'accent sur les ressources pour l'accès à l'information. Je me demande si vous pourriez nous éclairer à ce sujet. Ces familles parviennent-elles à obtenir des fonds fédéraux? Dans la négative, où de tels programmes devraient-ils être établis ou comment peut-on les améliorer s'ils existent déjà?

M. Steve Sullivan: Les programmes qui offrent une aide aux victimes de crime à d'autres égards, telle qu'une aide psychologique, sont assurés par les provinces. Pratiquement chaque province a une commission d'indemnisation des victimes d'acte criminel, auprès de laquelle les victimes de crimes avec violence peuvent demander une aide financière pour enterrer un être cher ou recevoir du counseling psychologique. Les femmes, par exemple, qui tombent enceinte à la suite d'une agression sexuelle peuvent obtenir de l'aide pour élever l'enfant, si elle décide de le garder. Autrefois, ces programmes bénéficiaient d'une aide fédérale, mais elle a pris fin il y a un certain nombre d'années, au début des années 1990 je crois. Jusqu'à présent, à ma connaissance, il n'existe aucun financement direct de la part du gouvernement fédéral ni aucune initiative fédérale à l'intention des victimes de crime.

Mme Albina Guarnieri: Suite à la tragédie du 11 septembre, qui reste gravée dans notre esprit, nous en sommes à nous demander sur quel type d'aide les familles des victimes peuvent compter, autre que l'aide offerte par les organismes de bienfaisance. Nous avons tous entendu parler de ces histoires d'horreur où des gens se sont vus incapables de payer leurs hypothèques et ont connu d'énormes difficultés financières par suite de ces événements tragiques. Il m'est apparu que le Canada n'est sans doute pas plus préparé que les États-Unis semblaient l'être pour ce qui est de fournir de l'aide. Pouvez-vous nous donner des idées de programmes qu'à votre avis le gouvernement fédéral pourrait envisager et qui serviraient de filet de sécurité pour les familles frappées par des événements tragiques?

• 1705

M. Steve Sullivan: Les événements survenus aux États-Unis sont tout à fait uniques.

Je tiens à mentionner que pour les infractions qui ont lieu au Canada, il existe ce que l'on appelle une suramende compensatoire. Le gouvernement fédéral a prévu une disposition dans le Code criminel selon laquelle si une amende est versée, un pourcentage de ce montant peut être versé aux provinces pour le financement de leurs services aux victimes.

De toute évidence, dans ce type de crime, personne ne paiera de suramende compensatoire.

Je crois que l'Ontario a réservé trois millions de dollars pour aider les familles dans cette province. On ignore le nombre de victimes qui proviennent du Canada. Mais il ne fait aucun doute que ces familles auront besoin d'une aide financière. Selon des circonstances, certaines devront ramener leurs êtres chers au Canada pour qu'ils y soient enterrés. Certains ont des familles à élever. Donc beaucoup de gens auront définitivement besoin d'une forme quelconque d'aide financière. Comme je l'ai déjà dit, on ignore exactement quel en est le nombre. Ce crime étant tellement singulier, il n'y aura pas d'autres types de programmes pour aider ces gens. On ne sait même pas si ces personnes pourront présenter une demande en vertu du régime d'indemnisation des victimes d'acte criminel étant donné que ces infractions n'ont pas eu lieu au Canada. Il s'agit d'actes criminels tellement particuliers qu'il reste à voir le genre d'aide auquel les familles pourront avoir accès.

Mme Albina Guarnieri: J'ai une dernière brève question. Vous avez indiqué plus tôt que certains programmes ont cessé d'être financés au début des années 1990. Connaissez-vous certains de ces programmes et y en a-t-il parmi eux que nous devrions envisager de rétablir pour aider les victimes d'acte criminel?

M. Steve Sullivan: Je parlais du financement assuré par le passé par le gouvernement fédéral pour aider les commissions provinciales d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Par exemple, l'Ontario recevait un certain montant du gouvernement fédéral destiné à ce programme. Ce financement a pris fin au début des années 1990. Je crois qu'au moins une province de la côte Est a complètement cessé d'offrir une aide financière aux victimes.

Mieux les victimes deviennent informées et plus on insiste sur les droits des victimes—nous en avons parlé tout à l'heure—plus il y a de victimes qui ont accès à ces programmes. Mais il faut reconnaître que les victimes ne reçoivent pas beaucoup d'argent de ces programmes. Je ne veux pas dire qu'elles essaient de faire de l'argent. Mais pour ce qui est d'avoir accès aux services d'aide psychologique, par exemple, les sommes prévues sont loin d'être importantes et par conséquent la durée des services d'aide psychologique offerts est limitée.

Mme Albina Guarnieri: Je vous remercie de ces précisions.

Le président: Merci.

Nous avons maintenant M. Pillitteri, puis Mme Bennett.

M. Gary Pilliterri (Niagara Falls, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président, et je souhaite la bienvenue à nos témoins.

Une question en particulier a attiré mon attention. Il s'agit de l'agriculture. Le gouvernement du Canada appuie l'agriculture au moyen de subventions. Elles sont minimes comparativement à l'aide dont bénéficie l'agriculture aux États-Unis et en Europe. Cependant, il existe des provinces qui reçoivent une aide supplémentaire, en particulier la province de Québec.

J'ignore si c'est parce qu'ils ont pressenti il y a des années ce qui allait se passer en particulier dans le secteur des produits laitiers, mais aujourd'hui la province de Québec est à l'origine d'environ 48 p. 100 de la totalité des produits laitiers du Canada. Elle fait l'envie du reste du Canada. Elle profite du meilleur secteur de l'agriculture qui existe aujourd'hui au Canada car c'est l'unique secteur vraiment garanti et qui offre une bonne qualité de vie aux agriculteurs.

Cela dit, pourquoi avez-vous fait l'observation selon laquelle si les subventions au Québec sont si élevées, c'est peut-être parce que le Québec est responsable de certaines composantes agricoles à l'extérieur du Québec? Je peux vous assurer qu'aucun secteur agricole ne voudrait qu'une province assume la responsabilité d'autres provinces. C'est une remarque qui a été faite à Suzanne Tremblay. Pourriez-vous m'expliquer pourquoi vous avez dit que le Québec pourrait être responsable d'autres provinces? Je ne connais aucun cas de ce genre. Ou vous ai-je mal compris lorsque vous avez dit qu'elle reçoit des subventions aussi élevées à cause d'une réaction d'autres régions du Canada?

• 1710

M. Serge Lebeau: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

[Français]

J'ai dit que le gouvernement du Québec avait suppléé, depuis une dizaine d'années, à la baisse des subventions du gouvernement fédéral qu'on a connue au cours des 10 dernières années. Je disais que le total des subventions au Québec, compte tenu de l'apport du gouvernement provincial du Québec et du gouvernement fédéral, avait diminué de façon moins importante que dans les autres provinces, mais que c'est quand même la province de Québec qui a dû suppléer à la baisse de subventions du gouvernement fédéral, ce qui n'a pas été nécessairement le cas dans d'autres provinces. J'ai cité l'exemple de la Colombie-Britannique.

Le secteur laitier n'est pas très hautement subventionné, comme je l'ai expliqué, étant donné que la fixation du prix ne se fait pas en fonction d'un programme de sécurité du revenu comme le CRSN ou d'autres types de programmes comme celui-là. Elle se fait en fonction du coût de production. Donc, c'est le consommateur qui paie le produit qu'il consomme. Il n'y a pas de subvention à ce niveau-là. Donc, le Québec n'appuie pas l'ensemble des autres provinces dans ce sens-là.

Tout ce que j'ai dit, c'est que le fléchissement était peut-être moins important au Québec que dans les autres provinces, parce que le gouvernement du Québec avait comblé le manque à gagner au niveau des subventions. Mais encore là, la subvention totale au Québec est nettement inférieure aux subventions aux États-Unis et dans les pays d'Europe. Le Québec n'a pas été capable de suppléer complètement à la baisse des subventions du gouvernement fédéral.

[Traduction]

M. Gary Pillitteri: Je le sais, mais le gouvernement fédéral prévoit des subventions, aussi faibles soient-elles, qui s'appliquent à l'échelle du pays. Elles ne sont pas plus faibles ou plus élevées dans une région particulière du pays. Oui, il s'est retiré, mais c'est au Québec que le taux de subvention est le plus élevé dans le secteur agricole comparativement au reste du Canada. C'est tout simplement ce que je voulais dire.

Je vous remercie.

Le président: Madame Bennett, c'est à vous.

Simplement pour votre information, il y a aura un vote à 17 h 30 et la sonnerie débutera à 17 h 15, donc tenez-en compte lorsque vous posez vos questions.

La parole est à Mme Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Ma question, monsieur le président, s'adresse à M. Sullivan. Suite aux événements du 11 septembre, beaucoup de gens se demandent si on offrira une thérapie aux gens victimes du syndrome de stress post-traumatique et à ceux qui ont été témoins de ces événements. Comment votre organisation s'occupe-t-elle des besoins en matière de thérapie des victimes d'actes criminels?

M. Steve Sullivan: Nous ne sommes pas des conseillers ni des thérapeutes. Nous intervenons habituellement lorsque les victimes ont un problème avec le système judiciaire à différents niveaux, que ce soit au niveau de la libération conditionnelle ou de la Couronne, ce genre de choses. Nous les aidons à obtenir entre autres de l'information. Comme vous le savez peut-être, on a déterminé que ce dont ont le plus souvent besoin de nombreuses victimes de crime, c'est d'information. Elles ont besoin de comprendre les choses. Par exemple, le Service correctionnel s'intéresse de plus en plus à des programmes de justice réparatrice et des programmes de réconciliation entre la victime et le contrevenant, car bien des victimes considèrent que ces programmes répondent à leurs besoins en matière d'information. Le contrevenant est la seule personne qui peut répondre à des questions personnelles du genre «pourquoi vous en êtes-vous pris à moi». En ce qui concerne les conseillers et les thérapeutes, il existe d'autres organisations qui offrent plus directement ce genre de service. Pour notre part, nous agissons surtout comme service d'aiguillage pour les familles.

Mme Carolyn Bennett: Quelle méthode utilisez-vous pour offrir votre service d'aiguillage? Est-il disponible sur le Web? Possédez-vous la capacité au niveau local de le faire? D'après mon expérience, si ces personnes ne reçoivent pas l'aide d'un thérapeute, elles ont alors de toute évidence encore plus besoin de tous ces autres services. Que fait votre organisation pour s'assurer qu'elles obtiennent la meilleure aide psychologique possible?

M. Steve Sullivan: Nous travaillons en collaboration avec les services aux victimes offerts par la police et l'État dans les différentes collectivités du pays. Nous pouvons communiquer avec ces services et leur demander ce qui existe dans leurs collectivités. Il y a aussi l'Association canadienne de justice pénale, qui publie une brochure chaque année indiquant les services offerts d'un bout à l'autre du pays. Donc nous avons d'autres groupes sur le terrain qui peuvent nous aider à trouver les services qui existent dans la collectivité. Très souvent, nous constatons, par exemple dans le cas de victimes d'homicide, qu'elles feront appel à des groupes de personnes en deuil. Car la dynamique est très différente lorsque quelqu'un vous enlève un être cher, comparativement à la mort d'un être cher dans un accident: non pas que la situation soit plus tragique dans un cas que dans l'autre, mais la dynamique est très différente. Beaucoup de gens trouvent réconfortant de pouvoir communiquer avec d'autres personnes qui ont vécu la même chose. À l'aide de la liste de victimes dont nous nous sommes occupés, nous pouvons aussi aider à faciliter ce genre de contact.

• 1715

Mme Carolyn Bennett: Au moment de la prise en charge, demandez-vous toujours à ces personnes si elles reçoivent un soutien psychologique?

M. Steve Sullivan: Oui. Lorsque les victimes nous téléphonent, elles nous indiqueront habituellement pourquoi elles nous appellent, mais nous leur demandons si elles ont eu accès aux services offerts dans la collectivité, si elles ont communiqué avec les services de l'État ou les services offerts par la police, et si on les a dirigées vers les services appropriés. Très souvent, nous constatons que les victimes ne savent même pas qu'il existe des services à leur intention offerts par l'État, par exemple. Donc, la communication avec les victimes de la part de la police et de l'État à propos des services disponibles au tout début présente de graves lacunes. Je dois avouer que j'aimerais que nous puissions en faire beaucoup plus. Comme je l'ai mentionné, notre effectif est de deux personnes. C'est pourquoi nous tâchons d'avoir accès aux services qui existent partout au pays, fournis par les gouvernements provinciaux.

Le président: Je vous remercie, monsieur Sullivan.

Les deux derniers intervenants sont M. Nystrom, suivi de M. Brison.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je poserai de très brèves questions à deux de nos témoins aujourd'hui.

[Français]

Monsieur Lebeau, je me souviens très bien de Jacques Proulx, qui venait souvent ici il y a 10 ou 15 ans. J'ai beaucoup d'admiration pour l'Union des producteurs agricoles. Même si je viens de la Saskatchewan, je suis au courant de votre situation.

[Traduction]

Je voulais savoir quels conseils vous pourriez donner au comité. L'industrie céréalière connaît une crise assez grave, comme vous l'avez dit, dans les Prairies, aggravée par la grande sécheresse qui nous a frappés cette année. À votre avis, combien d'argent faudrait-il prévoir au budget pour les provinces agricoles dans l'ensemble du Canada? De toute évidence, vous êtes un spécialiste en ce qui concerne le Québec, mais je suis sûr que vous entretenez de bonnes relations avec les organisations agricoles un peu partout au pays. Nous avons beaucoup de problèmes à faire concurrence aux subventions américaines dont bénéficie l'industrie céréalière, aux subventions européennes dans cette même industrie, sans compter certains des problèmes dont vous avez parlé. Mais selon vous, quel est le chiffre global approximatif que nous devrions recommander au ministre des Finances?

[Français]

C'est une question très facile.

M. Serge Lebeau: Ce sera simple et court: un bon programme de sécurité du revenu. Le programme actuel n'est pas aussi opérationnel qu'il devrait l'être. Il est très difficile pour les producteurs de toucher la pleine compensation pour les pertes qu'ils peuvent encourir. Il y a des délais et il y a deux niveaux: un programme en cas de catastrophe et un premier programme de sécurité du revenu. Il y a peu de liens entre les deux. Il y a des lacunes entre les deux niveaux. Je pense qu'il faut travailler à cela et qu'il faut peut-être arrêter de comparer la situation actuelle à la situation des deux ou trois dernières années qui, dans le fond, a été très mauvaise. Comment voulez-vous faire déclencher un programme quand vous comparez la moyenne des trois dernières années, qui est très mauvaise, à une année qui est encore mauvaise?

Le meilleur conseil que je pourrais vous donner, et c'est d'ailleurs ce que je disais dans le mémoire, où vous pouvez retrouver les indications, c'est de travailler au programme de sécurité du revenu. À cet égard, il y a un comité consultatif qui relève du ministère de l'Agriculture fédéral. Il y a des recommandations, et je pense que si le ministre de l'Agriculture canadien suivait les recommandations du comité, on verrait la lumière au bout du tunnel.

[Traduction]

M. Lorne Nystrom: Ma question s'adresse à M. Gorman, qui est président de la Canadian Federation for Promoting Family Values. Je voulais vous poser des questions semblables à celles que Mme Barnes a posées à M. Sullivan. Qui finance votre organisation? Combien de personnes en font partie? Je veux en profiter pour poser aussi ma dernière question: quelle est votre définition des valeurs familiales? Quand je dis votre définition, je veux dire la façon dont votre organisation définit les valeurs familiales.

M. Michael Gorman: Le principal revenu de la Canadian Federation for Promoting Family Values provient des cotisations volontaires de ses membres. Lorsque nous allons recueillir nos données, nous invitons les gens à contribuer financièrement s'ils le souhaitent. C'est ainsi que nous procédons.

Nous avons 1 500 membres.

Je crois que vous aviez une troisième question.

M. Lorne Nystrom: Comment votre fédération définit-elle les valeurs familiales?

M. Michael Gorman: Si seulement je le savais. Il faut que ça reste dans l'abstrait. On emploie l'expression d'une manière presque générique pour englober tout ce qu'une famille voudrait être, qu'il s'agisse d'une exploitation agricole familiale, d'une entreprise familiale, ou d'un retraité qui a sa famille et ses préoccupations. Ce sont vos valeurs individuelles à titre de personne physique plutôt que morale. Ce sont vos croyances au sein de l'unité familiale, abstraction faite des valeurs d'entreprise. Parfois, certains d'entre nous peuvent utiliser deux poids, deux mesures, voire trois. Or, les valeurs familiales sont vos seules vraies mesures.

• 1720

M. Lorne Nystrom: Il pourrait donc y avoir beaucoup de diversité au sein de la famille. Il ne s'agirait pas que de l'homme, de la femme, des deux enfants et du chien.

M. Michael Gorman: En effet, il pourrait s'agir de n'importe quoi. Aujourd'hui? Les relations bizarres?

Le président: Et vous croyiez ne pas avoir de définition.

La parole est à M. Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC/RD): Pourriez-vous nous aider à définir «coalition» et «parti»? Excusez-moi, je ne faisais que plaisanter.

Ma première question s'adresse à M. Lacombe. Nous sommes d'accord sur l'imposition des gains en capital. Avez-vous examiné l'impact de l'imposition des gains en capital et du blocage des capitaux qui se produit et qui s'est produit lorsque les impôts sur les gains en capital empêchent beaucoup de sociétés, surtout les sociétés en voie de fusion, d'avoir accès aux capitaux dont elles ont besoin pour croître? J'aimerais entendre vos observations là-dessus, mais aussi sur une réorientation vers un élargissement de l'assiette fiscale relative aux taxes de consommation au Canada, c'est-à-dire imposer la consommation plutôt que le revenu, puisque beaucoup d'économistes s'accordent pour dire que du point de vue de l'impact économique, une croissance positive en découlerait.

À propos des inquiétudes relatives à une mainmise américaine sur des sociétés dans lesquelles les Canadiens détiennent des intérêts—M. Cullen en discutait plus tôt—je dirais que la faiblesse de notre dollar y est pour beaucoup. Évidemment, la faiblesse du dollar reflète la productivité, et sans doute l'une des meilleures façons d'améliorer la productivité serait d'améliorer ou d'augmenter les investissements, ce qui découlerait de votre notion de réduire les impôts sur le capital. Ce serait utile d'avoir votre réponse là-dessus, et ensuite j'ai une autre question.

M. Barry Lacombe: Je ferai de mon mieux, monsieur Brison. Il faudra que je me dérobe à certaines de vos questions, puisque je représente une coalition. J'espère que vous comprenez.

M. Scott Brison: Ou un parti.

M. Barry Lacombe: Voilà. J'espère que vous accepterez cela.

Tout d'abord, nous sommes manifestement d'accord pour dire que toute chose qui augmente les investissements mènera à une hausse de la productivité et du niveau de vie.

Pour ce qui est de l'imposition des gains en capital, la coalition ne s'est pas penchée sur cette question. Nous nous sommes limités à l'impôt du revenu des sociétés et à l'impôt sur le capital. Nous n'y sommes donc pas encore arrivés. De même, vous posez d'excellentes questions concernant l'idée de privilégier les taxes de consommation aux autres formes d'imposition, mais au nom de la coalition, en tant que coalition, nous n'avons pas encore vraiment entamé cette discussion-là.

Comme nous avons dit, en réponse à M. Cullen, nous croyons qu'il est évident que la valeur du dollar canadien influe sur les investissements américains au Canada. Le taux de change y est pour beaucoup. Il va sans dire que toute chose que nous pouvons faire pour augmenter la productivité et la performance de notre économie aura un impact positif sur le taux de change.

Je m'excuse de ne pas avoir pu répondre à quelques questions.

M. Scott Brison: Ça va.

Une petite question à l'intention de M. Gorman. Votre quatrième recommandation, c'est que les fonctionnaires et les éducateurs possèdent des antécédents en matière de libre entreprise avant d'accéder à des postes de cadre supérieur. Proposez-vous que—bien que cela ne relève pas vraiment de la compétence fédérale de toute façon—un directeur d'école devrait avoir une certaine expérience de la libre entreprise avant d'entrer en fonction?

M. Michael Gorman: Tout à fait. Il se trouve que vous frappez juste... Il se trouve justement que mon épouse est directrice d'école, tout comme ses frères et soeurs.

M. Scott Brison: Est-elle au courant de votre recommandation?

M. Michael Gorman: Oui, et elle a dit que j'étais fou.

C'est précisément ce que je dis. Il en va de même pour les fonctionnaires. Je suis originaire d'Ottawa. J'ai passé beaucoup de temps ici, si bien que j'ai connu beaucoup de fonctionnaires. Par hasard, je suis tombé sur le domaine de l'éducation. Ce n'est pas que ma conviction personnelle, mais celle de la majorité des membres. Il y a des gens qui élaborent des politiques touchant la libre entreprise, qui ne savent pas de quoi ils parlent lorsqu'ils parlent de la libre entreprise—si tant est qu'ils en parlent, qu'ils savent, qu'ils ont la moindre idée de ce que c'est que la libre entreprise ou les principes qui la sous-tendent.

M. Scott Brison: Personnellement, mes antécédents sont dans la libre entreprise. Je crois effectivement qu'il y a un problème de manque de communication entre les deux solitudes, soit d'une part les sociétés et la libre entreprise dans le secteur privé du Canada, et la fonction publique d'autre part. Je suppose que je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous pour dire que tous les fonctionnaires doivent avoir des antécédents de libre entreprise, puisque si telle est votre position, je pense qu'on pourrait également avancer qu'il ferait du bien aux gens d'affaires de passer du temps...

• 1725

M. Michael Gorman: Eh oui, sans doute.

M. Scott Brison: Ce serait peut-être une façon utile et constructive d'aborder...

M. Michael Gorman: C'est sûr.

M. Scott Brison: Il faudrait comprendre dans les deux sens. La fonction publique attire certaines personnes qui ne fonctionneraient peut-être pas bien dans une entreprise, tout comme il y a des gens d'affaires qui seraient peut-être bien mieux dans la fonction publique. Il y a une différence entre l'éthique publique et l'éthique privée. Voilà ce que je voulais faire ressortir, mais je comprends ce que vous dites.

Une dernière question à propos de la politique agricole, monsieur Lebeau, à savoir la nature et la conception des mesures d'aide agricole. Beaucoup des mesures d'aide agricole sont, de par leur conception, très difficiles d'accès. Certaines d'entre elles—je crois que c'était la CSRN, et peut-être l'ACRA aussi—se calculent à partir de 70 p. 100 de la production des trois dernières années. Pour un agriculteur dans ma circonscription, dans la vallée de l'Annapolis en Nouvelle-Écosse, qui pourrait avoir vécu trois années de sécheresse, ce qui s'est produit d'ailleurs, 70 p. 100 de rien égale justement rien.

J'aimerais savoir ce que vous pensez des modalités de certains des programmes agricoles. Parfois on a l'impression que le gouvernement souhaite dire qu'il a injecté des milliards de dollars dans un programme, mais il fixe des conditions qui rendent presque toujours le programme impossible d'accès, ou difficile d'accès. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

[Français]

M. Serge Lebeau: C'est exactement ce que j'expliquais précédemment. Le CSRN est actuellement basé sur le revenu global de l'entreprise. C'est vraiment la moyenne—ce qu'on appelle la moyenne olympique—des cinq dernières années. On enlève la meilleure et on enlève la moins bonne. Ça, c'est le CRSN. Quant au PCRA, qui est le programme catastrophe, il est basé sur 70 p. 100 de la marge brute. C'est le deuxième niveau qui est à 70 p. 100.

Le problème, c'est qu'on se base uniquement sur la moyenne et sur la marge brute, alors qu'au Québec, on a un programme à deux étages, pourrait-on dire. Le premier est un programme de type CRSN, et le deuxième est le programme Assurance-stabilisation des revenus agricoles, qui est basé davantage sur le coût de production.

Ce programme n'a pas été établi en fonction du passé, mais bien en fonction de la situation actuelle. Quand le premier niveau n'est pas suffisant, c'est le deuxième niveau qui entre en jeu. Je pense que nos producteurs s'en sortent beaucoup mieux que les producteurs de l'Ouest, qui sont actuellement obligés de composer avec un programme qui est conçu pour le passé et qui ne répond pas vraiment à leurs besoins, compte tenu que les dernières années ont été mauvaises.

Je pense qu'il faut absolument regarder ça. C'est peut-être prétentieux de dire ça, mais il faudrait peut-être s'inspirer du programme qu'on a au Québec: le CRNS au premier niveau et le programme Assurance-stabilisation des revenus agricoles au deuxième niveau. Je pense que c'est un programme qui tient mieux la route et qui se déclenche mieux dans les moments de crise comme celui qu'on connaît actuellement.

[Traduction]

M. Scott Brison: Une dernière question. Est-ce que le programme RARB a mieux réussi à certains égards à faire parvenir de l'aide aux agriculteurs?

[Français]

M. Serge Lebeau: Je pense que oui. Je pense que c'est un programme qui tenait davantage compte de l'activité réelle de l'entreprise que le programme CSRN ou l'actuel PCRA.

[Traduction]

M. Scott Brison: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Malheureusement, il faut mettre fin à la discussion, car nous devons aller voter. Au nom du comité, je tiens à vous remercier sincèrement de vos observations.

Vous avez sans doute constaté que les témoins aujourd'hui représentaient divers points de vue. Pour vous donner une idée de ce qui nous attend, nous allons probablement entendre plus de 700 groupes pendant cette période, d'une diversité semblable à celle qu'on a vue aujourd'hui. Cela vous montre également le genre de compromis que nous devons parfois faire en tant que parlementaires afin d'en arriver aux bonnes décisions.

Encore une fois, merci beaucoup.

La séance est levée.

Haut de la page