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J’aimerais ouvrir la séance.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, notre étude sur l’employabilité au Canada, j’aimerais profiter de l’occasion pour remercier tous les témoins de leur présence ici aujourd’hui. Il s’agit d’une problématique très sérieuse à laquelle nous sommes confrontés partout au pays, et nous avons commencé nos audiences ici sur la côte Est. Nous terminerons nos travaux dans la région cette semaine, puis, dans quelques semaines, nous nous dirigerons vers la côte Ouest pour y poursuivre nos audiences sur le même sujet. Nous vous remercions beaucoup, comme je l’ai dit, de votre présence ici.
Nous allons commencer avec Mme Keddy pendant sept minutes. Puis, nous entreprendrons la première ronde de questions et de réponses pendant sept minutes, suivie d’une deuxième ronde de questions pendant cinq minutes Voilà comment nous allons procéder aujourd’hui.
Sept minutes, ça passe assez vite, alors faites de votre mieux pour communiquer tous les éléments essentiels de votre message à l’intérieur de ce bref délai. Je vous ferai signe quand il vous restera une minute. Comme je l’ai dit, certains des témoins précédents ont passé quelques minutes à parler de leur organisme. Nous nous intéressons essentiellement aux recommandations et aux solutions, alors si vous pensez devoir couper quelque part, nous apprécierions que vous retranchiez les renseignements relatifs à votre organisme, que nous retrouverons dans l’information documentaire.
Une dernière chose, si vous avez apporté quoi que ce soit qui doit être traduit, ce sera traduit en temps opportun et envoyé aux membres du comité.
Sans plus tarder, madame Keddy, sept minutes, s’il vous plaît.
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Monsieur le président Allison, distingués membres du comité et collègues présentateurs, bonjour. C’est un privilège d’être ici pour vous parler des travaux de l’Atlantic Institute for Market Studies, plus précisément de nos recherches sur le marché du travail.
À première vue, l’article du Globe and Mail de jeudi dernier, qui soulignait l’arriéré de traitement de plus de 20 000 dossiers d’immigrants dû à l’existence de 40 postes vacants au sein de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, avait quelque chose d’ironique. Cependant, des données publiées récemment à la suite d’une enquête sur la situation des entreprises indiquent que 9 p. 100 des entreprises ont éprouvé des difficultés en raison d’un manque de main-d’œuvre qualifiée, et qu’une autre tranche de 5 p. 100 ont déclaré des difficultés liées à un manque de main-d’œuvre non qualifiée.
Dans ce contexte, l’arriéré de traitement des dossiers d’immigrants grève sérieusement notre économie, et l’on en trouve quelques exemples localement. Nous avons un vaste secteur de la restauration et de l’alimentation ici, en partie à cause du secteur du tourisme et en partie tout simplement parce que nous aimons beaucoup manger.
L’Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires vient tout juste de publier un rapport qui prévoit de fortes pénuries de main-d’œuvre dans l’ensemble du secteur. Dans ce secteur tertiaire, comme dans bien d’autres, la prestation des services ne peut pas être impartie à la Chine ou à l’Inde. Ces services doivent être fournis ici même, et non à partir de l’étranger.
L’école de commerce de Dalhousie a accueilli plus de recruteurs sur place le mois dernier qu’au cours de toutes les années précédentes. The Warren Group, une entreprise de camionnage, a récemment fait venir dix camionneurs d’Europe pour aider à combler le manque criant de camionneurs longue distance. À l’Île-du-Prince-Édouard, il y a 20 travailleurs invités russes qui travaillent dans une usine de transformation du poisson, et l’on en a demandé 20 de plus. Ce ne sont là que des exemples.
Suite aux demandes formulées par les entreprises partout dans la région, le gouvernement de chaque province de l'Atlantique dispose maintenant d’une politique d’immigration et, je crois, d’une entente avec Ottawa. Ces programmes de candidats des provinces permettent un traitement accéléré des dossiers des travailleurs requis. Cependant, l’immigration ne suffit pas. Nos taux de natalité ne compensent pas le vieillissement de la population. De plus, le profil des immigrants est à l’image de notre société, en ce sens que bon nombre de nos immigrants approchent eux aussi de la retraite.
Des études récentes ont montré que si les tendances actuelles se maintiennent, les provinces de l'Atlantique connaîtront un taux de chômage inférieur à 3 p. 100 dans dix ans. Comme vous le savez, 3 p. 100 correspond à peu près au plancher associé à des changements structurels et frictionnels du marché du travail. En-dessous de ce niveau, l’économie doit rétrécir.
Il s’agit d’une situation unique dans les provinces de l’Atlantique. On n’a jamais vu cela auparavant.
Nous devons nous défaire de l’idée que tout le monde doit être un ingénieur logiciel ou un biotechnicien. Bon nombre des emplois pour lesquels la pénurie de main-d’œuvre se fait déjà ressentir avec acuité au Canada sont des emplois de cols bleus qualifiés, semi-qualifiés ou non qualifiés. J’ai déjà mentionné les camionneurs, les travailleurs d’usines de transformation du poisson et les travailleurs du secteur de la restauration. Si les Canadiens ne sont pas disposés à exécuter les tâches correspondant à ces emplois, nous devrons réfléchir à la question de savoir comment nous verrons à les faire exécuter, puisque bon nombre d’entre elles ne peuvent pas être confiées à des sous-traitants étrangers et doivent nécessairement être exécutées près de chez nous.
Une partie de la solution consiste à donner suite à l’invitation lancée par le président Vicente Fox, qui a proposé que le Canada et le Mexique mettent sur pied un programme de travailleurs invités. Le Mexique est le partenaire oublié de l’ALENA, et pourtant, à une époque où le Canada et les États-Unis s’apprêtent à connaître une période de pénuries de main-d’œuvre, la présence d’un vaste bassin de main-d’œuvre sans emploi sur le pas de notre porte pourrait s’avérer une véritable manne. Cependant, nous ne devrions pas tenir ces travailleurs pour acquis. Tout comme les entreprises qui se font concurrence pour recruter davantage de travailleurs, le Canada devra faire face à la concurrence. Les travailleurs invités ou les immigrants les plus convoités sont très en demande partout. Ils disposent d’un éventail de choix de destinations plus vaste que jamais, offrant des niveaux de vie élevés et la sécurité personnelle. À tout le moins, nous devons nous doter de méthodes de reconnaissance accélérée des titres de compétence étrangers.
Une autre partie de la solution consiste à accroître la productivité. La question n’est pas de savoir si une entreprise est en mesure d’embaucher les gens dont elle pense avoir besoin, parce que personne ne trouvera les travailleurs dont il a besoin. Le problème consiste à tenter de déterminer si les entreprises et les gouvernements peuvent se moderniser en recourant aux technologies de l’information, à l’impartition de fonctions non essentielles, à une gestion plus rigoureuse, etc. Cela leur permet de réaliser leurs tâches essentielles tout en mobilisant moins de ressources au sein de la population active du pays. En réalité, on a besoin de beaucoup moins de gens pour faire ce qu’on doit vraiment faire, et on doit les rémunérer beaucoup mieux.
La productivité peut découler de nombreuses sources. Une des mesures clés consiste à éliminer les obstacles à la mobilité des travailleurs. Les exemples habituellement cités dans la documentation spécialisée sont les architectes, les comptables et les ingénieurs. Pourtant, mon épouse, par exemple, a dû suivre un cours complémentaire d’éducation de la petite enfance ici en Nouvelle-Écosse lorsque nous sommes arrivés de la Saskatchewan. Un rapport de recherche publié l’année dernière par l’OCDE classait le Canada bon dernier parmi les pays du G-7 au chapitre des obstacles à la mobilité de la main-d’oeuvre.
En passant, il n’y a rien à craindre de la déréglementation. Ne l’oublions pas: la pénurie de main-d’œuvre est la meilleure amie du travailleur. Les travailleurs entrent dans une ère de pouvoir de négociation important et qui ira croissant, et pas uniquement au plan des salaires. Par exemple, de nombreux camionneurs longue distance ont négocié une réorganisation des itinéraires de transport en une série de livraisons au terme de trajets de six heures. Ils n’ont plus besoin de quitter leurs familles pendant des mois entiers. Ils peuvent vivre à la maison et avoir une vie de famille normale.
En vue de maximiser le bassin de main-d’œuvre disponible, beaucoup de gens mettent la technologie à profit pour aider les personnes handicapées. Cela me rappelle un collègue qui m’a parlé d’une présentation PowerPoint faite par une personne aveugle. Le logiciel JAWS lit rapidement les diapositives au présentateur. Cela lui permettait d’adapter sa présentation aux besoins des membres de l’auditoire qui avaient besoin d’une aide visuelle.
Cela nous amène à l’élimination des différences régionales dans les régimes d’assurance-emploi et de soutien financier régional au développement des entreprises ainsi que dans bien d’autres régimes de subventions aux entreprises. L’opposition politique s’estompera beaucoup plus à mesure que les pénuries de main-d’œuvre s’étendront à l’échelle du pays. Il n’est plus nécessaire de quitter Mabou ou Bathurst pour Toronto ou Calgary. Il se peut très bien qu’il suffise d’aller à Moncton ou Halifax.
En vérité, Halifax pourrait profiter dès maintenant d’un tel afflux de travailleurs provenant de régions rurales. En 2005, le taux d’emploi à Halifax était plus élevé qu’à Toronto, Vancouver ou Montréal. La donne était différente à l’époque où les gens avaient une certaine sympathie, où l’on faisait valoir comme argument qu’il n’y avait pas d’emplois; mais à une époque de pénuries criantes de main-d’œuvre, les arguments moraux et économiques se rejoignent. Il n’y a aucune raison, ni d’ordre moral ni d’ordre économique, de payer des gens à ne rien faire ou de créer des emplois artificiels au prix d’impôts plus élevés alors même que de véritables entreprises viables doivent mettre de côté des plans de développement parce qu’elles manquent de travailleurs.
En bref, nous vivons une grave pénurie de main-d’œuvre, et la situation empire. L’immigration pourrait atténuer en partie le choc à court terme. Cependant, cela ne suffit pas. En outre, nous somme en concurrence pour attirer des immigrants et des travailleurs invités de qualité. Nous devons simplifier le processus à leur égard et reconnaître leurs compétences. D’ailleurs, nous devons reconnaître nos propres compétences et éliminer les obstacles à la mobilité de la main-d’œuvre. Nous devons identifier les catégories d’emplois dans lesquelles la main-d’œuvre se fait rare et les promouvoir avec dynamisme, et ce, qu’il s’agisse d’emplois qualifiés, semi-qualifiés ou non qualifiés.
Enfin, nous devons arrêter de financer des régimes régionaux qui freinent la résolution de ces problèmes pressants. Tous ces obstacles ont une incidence négative directe sur notre productivité et, à l’ère des chaînes d’approvisionnement mondiales concurrentes, la productivité règne en maître. Nous devons mettre à profit la technologie pour accroître notre population active et nous débrouiller avec moins de travailleurs.
Merci beaucoup de votre attention.
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Collègues présentateurs, et surtout distingués membres du comité, bonjour.
Je m’appelle Andreea Bourgeois. Je suis analyste principale des politiques à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante. Je représente plus de 11 500 membres au Canada atlantique. Je voudrais préciser que je parle au nom de nos membres en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et à l’Île-du-Prince-Édouard.
Étant donné que le temps est limité, je commencerai par la fin de ma présentation, soit les recommandations. La FCEI formule essentiellement trois recommandations, qui varieront selon la province, alors je vais vous présenter les recommandations générales, après quoi j’aborderai les chiffres relatifs aux provinces prises individuellement.
Premièrement, nous recommandons au gouvernement de s’assurer que les initiatives gouvernementales ont une incidence positive, et non négative, sur le phénomène des pénuries croissantes de main-d’œuvre. Je vais vous donner un exemple d’une excellente initiative qui a été très bien accueillie par les propriétaires de petites entreprises — les subventions fédérales à l’apprentissage. Ce programme a connu un vif succès. J’ai reçu de nombreux appels téléphoniques de gens qui me demandaient quand vous comptez l’élargir. C’est là une des choses qui ont vraiment bien fonctionné. Le programme a été mis en oeuvre très rapidement et l’on a indiqué clairement aux gens comment procéder pour formuler une demande.
Deuxièmement, nous recommandons de privilégier les démarches et les politiques à plusieurs niveaux. Je vais élaborer sur ce que mon collègue vient tout juste de dire, et je vais vous donner un exemple de ce que j’entends par l’inclusion de partenaires provinciaux dans cette équation. Disons que tout le monde dans toutes les provinces de l’Atlantique parle d’immigration ces jours-ci. Vous avez le pouvoir d’accroître l’immigration et de promouvoir l’immigration dans ces provinces. Cependant, la formation linguistique est une chose qui doit se faire en partenariat avec les ministères provinciaux responsables de l’éducation. Il serait préférable que ceux-ci soient informés au préalable, plutôt qu’après le fait, lorsque l’on décide de promouvoir l’immigration ici.
Troisièmement, nous recommandons que les entreprises comprennent qu’elles ont véritablement un rôle à jouer. Elles savent qu’elles sont responsables, et nous ne demandons pas de financement; elles ne demandent pas d’argent. Il s’agit d’une solution qui, à vrai dire, vous mettra aussi en cause, de même que les ministères de l’Éducation des provinces et toute une gamme d’autres partenaires ainsi que les propriétaires d’entreprises eux-mêmes.
Je pense que le moment est venu pour le gouvernement fédéral d’assumer un rôle de grand frère et d’informer et de sensibiliser les propriétaires d’entreprises au sujet des façons d’atteindre leurs objectifs. Je parle de la région. Comme vous le savez sans doute, les provinces de l’Atlantique ont connu une bonne performance ces dernières années; cependant, elles accusent encore un retard par rapport à la moyenne canadienne.
Les projections en matière d’emploi y sont toutefois extrêmement prometteuses, comme en témoigne le fait que 67 p. 100 des entreprises dans les provinces maritimes prévoient créer de nouveaux emplois à temps plein et 78 p. 100 d’entre elles prévoient créer de nouveaux emplois à temps partiel au cours de l’année à venir.
Cependant, ces entreprises sont aux prises avec des pénuries de main-d’œuvre. Je sais que les chiffres peuvent paraître relativement négligeables à comparer, par exemple, à ce qu’on entend dans l’ouest du Canada, mais il y a quelques années, les chiffres se situaient dans les 20 p. 100. Or, à l’heure actuelle à l’Île-du-Prince-Édouard, la plus petite province, 47,5 p. 100 des propriétaires d’entreprises se plaignent de pénuries de main-d’œuvre. C’est considérable pour l’Île. Auparavant, ils se situaient dans les 20 p. 100; ce chiffre a maintenant plus que doublé.
Au Nouveau-Brunswick, on parle de 42 p. 100. En Nouvelle-Écosse, 31,3 p. 100. Ce sont des chiffres considérables pour la région.
Un de nos rapports publiés l’année dernière, fondé sur des données recueillies sur deux ans, indiquait qu’il y a des taux de vacance à long terme. À un moment ou un autre, une entreprise aura un poste vacant. C’est dans la nature des choses. Il y a vacance à long terme lorsqu’un poste est vacant depuis plus de quatre mois. Or, ces taux de vacance ont persisté en 2004 et en 2005, et ils ont augmenté de 3,1 à 3,7 p. 100. Pour vous donner une idée, le taux de vacance au Nouveau-Brunswick est le troisième taux en importance au Canada. Bien sûr, il y a l’Alberta et la Colombie-Britannique qui affichaient un taux supérieur, puis la Saskatchewan, suivie du Nouveau-Brunswick.
Je ne pense pas que l’on devrait attendre que ce phénomène s’aggrave autant ici dans les Maritimes que dans l’Ouest avant de prendre des mesures concrètes pour aider les propriétaires d’entreprises.
Par ailleurs, lorsqu’on les a interrogés au sujet de l’avenir, les entrepreneurs semblaient optimistes. C’est dans cet esprit qu’ils dirigent leurs entreprises. Cependant, ils étaient très pessimistes au chapitre de l’emploi. Quant à savoir s’ils croient que la situation s’améliorera ou s’aggravera, 70 p. 100 ont dit qu’il deviendrait plus difficile d’employer des gens au cours des cinq prochaines années. Ils trouvent déjà cela difficile, mais quand ils ont dit « plus difficile », cela nous a vraiment effrayés.
Simplement pour vous donner une idée de l’ampleur du phénomène des vacances à long terme, au cours de l’année 2005 seulement, on dénombrait 2 500 emplois vacants à l’Île-du-Prince-Édouard. C’est peut-être peu vu d’Ottawa. Cela correspond probablement à un grand immeuble d’appartements, mais c’est beaucoup à l’échelle de l’économie de l’Île. En Nouvelle-Écosse, il y avait 12 000 emplois — là, on peut parler d’un joli petit nombre d’immeubles à appartements — qui auraient pu être comblés par des travailleurs.
Les propriétaires d’entreprises ne restent pas là, les bras croisés, à attendre que quelqu’un règle leurs problèmes. Ce qu’ils font, évidemment, c’est qu’ils embauchent des gens sous-qualifiés et ils les forment. Ils répartissent les responsabilités parmi les employés qu’ils ont, et ainsi de suite.
Et pire, certains laissent passer des occasions d’affaires. Il y a une forte probabilité qu’un propriétaire d’entreprise dans les Maritimes laisse passer une occasion d’affaires. On ne sait tout simplement plus vers qui se tourner, alors on préfère refuser une nouvelle commande.
Je voulais vous dire ce qu’il y a de propre à cette région. Tandis que partout au Canada, la difficulté la plus souvent évoquée en matière d’embauche est le manque de candidats possédant la formation, l’expérience ou les compétences requises, la réponse la plus probable dans les Maritimes à la question de savoir pourquoi il est difficile d’embaucher est que, d’abord et avant tout, on ne dispose pas des ressources nécessaires pour accorder une rémunération plus élevée. C’est très difficile de faire concurrence.
À titre de preuve anecdotique, vous savez que le gouvernement fédéral est un employeur très important dans la région. Il offre une rémunération et des avantages très intéressants. Il est très difficile pour les petites entreprises de lui faire concurrence. Pourtant, elles ont besoin des mêmes effectifs qualifiés que tout le monde.
L’autre raison évoquée était qu’il y a trop peu de gens dans les environs qui cherchent du travail. C’étaient des entrepreneurs dans le nord du Nouveau-Brunswick qui tenaient ces propos. Où pensent-ils que les employés s’en sont allés? Ils sont partis dans l’Ouest, alors évidemment, ils s’en ressentent. La problématique diffère de celle que l’on observe dans l’Ouest, mais ils sont aussi touchés.
La troisième raison est la nature du travail. La réalité dans les Maritimes, c’est qu’il y a beaucoup de travail saisonnier et temporaire. Une entreprise ne peut pas exploiter une usine de transformation du poisson plus que quelques semaines par année — si elle a de la chance, de mai à octobre; autrement, on parle d’une saison de seulement douze semaines dans l’année. Que font les employés après cela?
Ces raisons sont plus susceptibles d’être évoquées comme des difficultés très importantes ici dans les Maritimes que dans le reste du Canada.
La prochaine diapositive parle de formation. Dans les faits, lorsqu’une entreprise emploie une personne qui est sous-qualifiée, qui n’a pas l’expérience ou les compétences requises, elle la forme. Il est très courant au Canada atlantique de donner une formation non structurée. Il est très facile de trouver les endroits où l’on donne une formation structurée; cependant, dans la région, on préfère que les employés soient formés par les fournisseurs de l’entreprise, par un mentor au sein de l’entreprise ou par quelqu’un d’autre qui a plus d’expérience. Il est beaucoup moins courant dans cette région du pays d’envoyer un employé suivre une formation à l’extérieur.
Évidemment, les trois principales mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour contribuer à résoudre le problème de pénurie de main-d’œuvre consistent à alléger le fardeau fiscal — ce qui permettrait aux entreprises de disposer de plus de ressources pour rémunérer leurs employés et pour investir dans la formation; rééquilibrer les programmes sociaux, comme l’assurance-emploi, et réduire les charges sociales; et donner plus d’information sur les points d’accès à la formation.
Merci.
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Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler de l’employabilité au Canada.
Je suis Keith Messenger et je suis analyste de la planification stratégique et des politiques à la Direction des compétences et de l’apprentissage du ministère de l’Éducation de la Nouvelle-Écosse.
L’employabilité est un élément essentiel de l’avenir économique et social du Canada. Comme bien d’autres provinces et administrations, la Nouvelle-Écosse est confrontée à une multitude de défis touchant sa main-d’œuvre actuelle et future.
J’aimerais parler aujourd’hui d’une initiative provinciale clé destinée à contribuer à relever ces défis: le Cadre des compétences et de l’apprentissage de la Nouvelle-Écosse. De plus, je présenterai quelques points saillants des réalisations de la dernière année et ce que nous aimerions faire pour l’avenir.
Produit en 2002, le cadre devait contribuer à surmonter plusieurs difficultés liées à au marché du travail et à l’éducation qui faisaient obstacle à la création d’une main-d’œuvre équilibrée, qualifiée et compétente. Au nombre de ces difficultés, je mentionnerai la population vieillissante et décroissante de même que le relèvement des exigences de la plupart des emplois en matière d’études et de formation. Parmi les difficultés liées à l’éducation, mentionnons un nombre de plus en plus grand de personnes sans diplôme d’études secondaires de même que les nombreuses personnes sachant à peine lire et compter.
Le cadre vise trois objectifs: premièrement, satisfaire aux besoins en compétences du marché du travail de la Nouvelle-Écosse; deuxièmement, offrir un meilleur accès au marché du travail et des mesures de soutien plus efficaces aux Néo-Écossais; et troisièmement, renforcer le système de possibilités d’apprentissage continu de la Nouvelle-Écosse.
Le rapport annuel 2005-2006 de Skills Nova Scotia met en lumière une liste impressionnante de succès de la Nouvelle-Écosse à l’égard de la réalisation de ses objectifs en matière de compétences.
Comme on l’indique dans le rapport, les réalisations des 21 ministères, organismes et offices provinciaux de même que des partenaires engagés du milieu des affaires, de l’industrie, des établissements d’enseignement, des organismes communautaires et du milieu syndical témoignent de l’effet des mesures qui s’imposaient pour aider la Nouvelle-Écosse à développer une population active de calibre mondial tout à fait prête à tirer parti des possibilités actuelles et futures.
En ce qui concerne le premier objectif, pour satisfaire aux besoins en compétences du marché du travail de la Nouvelle-Écosse, on doit prendre le pouls des besoins immédiats, prochains et futurs du marché du travail de la Nouvelle-Écosse. L’élaboration de politiques et de programmes adaptés aux besoins dépend de la disponibilité de renseignements opportuns et précis sur le marché du travail qui guident le processus décisionnel relatif au marché du travail.
Les tables rondes réunissant les PDG des plus grandes compagnies de la Nouvelle-Écosse figurent parmi les points saillants des réalisations de la dernière année. Un projet de recherche a été entrepris pour mieux comprendre les répercussions de l’évolution démographique de la Nouvelle-Écosse sur les politiques économiques et sociales. Le Nova Scotia Labour Market Review, qui présente les statistiques principales sur le marché du travail en Nouvelle-Écosse, a été publié. De nombreux programmes d’études et de formation ont été mis en œuvre pour combler les pénuries et les lacunes relatives aux compétences nécessaires dans le marché du travail. L’élaboration de politiques et de programmes destinés à promouvoir des milieux de travail sûrs et sains, des normes d’emploi équitables et des relations de travail stables s’est poursuivie. Nous avons également fait des progrès considérables en mettant au point un mécanisme permettant de reconnaître les titres de compétences internationaux et d’aider les immigrants à comprendre la marche à suivre pour exercer leur profession en Nouvelle-Écosse.
Quant au deuxième objectif, pour que le cadre des compétences de la Nouvelle-Écosse soit couronné de succès, il est essentiel de coordonner les programmes et les services offerts aux Néo-Écossais pour les aider à faire des choix de carrière et d’emploi. À cette fin, nous devons fournir des services et des ressources d’orientation et de counselling en emploi et assurer l’accès à l’éducation et à la formation pour tous les Néo-Écossais.
Au cours de la dernière année, nous avons élargi l’accès aux services d’orientation au moyen d’un éventail de ressources imprimées, magistrales et interactives. Nous avons créé des publications et des documents de référence pour aider les étudiants, les enseignants, les conseillers et les parents et élargi le site Web sur les carrières de la Nouvelle-Écosse en y ajoutant des sections sur le perfectionnement professionnel et l’emploi de même que d’autres renseignements propres au marché du travail de la Nouvelle-Écosse.
Le programme Educate to Work, un projet pilote de création d’emplois, et une nouvelle subvention destinée aux membres de familles à faible revenu qui deviennent étudiants pour la première fois fournissent des possibilités d’apprentissage en milieu de travail et renforcent les possibilités d’emploi pour les bénéficiaires d’aide au revenu et les personnes à faible revenu. Des programmes destinés aux groupes sous-représentés dans le marché du travail sont subventionnés.
Notre troisième objectif, la promotion d’une culture d’apprentissage continu en Nouvelle-Écosse, est une condition préalable au développement constant d’une main-d’œuvre qualifiée et compétente. En 2005-2006, nous avons fait de grands progrès pour encourager des attitudes positives à l’égard de l’apprentissage afin de préparer les Néo-Écossais à connaître du succès, peu importe l’étape où ils en sont dans leur vie.
En 2005-2006, nous avons financé des programmes d’éducation et d’alphabétisation adaptés aux étapes de développement de l’enfant. Un programme intitulé « Options and Opportunities », destiné à exposer davantage les étudiants de niveau secondaire à des choix de formation et de carrière qui s’offrent à eux après l’obtention de leur diplôme, a été mis à l’essai.
Nous avons mis au point des programmes d’éducation et de stages coopératifs pour offrir à nos jeunes une expérience de travail précieuse et des heures de stages. Rien qu’en 2005-2006, environ 500 apprenants adultes ont obtenu leur diplôme d’études secondaires grâce à la Nova Scotia School for Adult Learning, ce qui porte à près de 2 000 le nombre total de diplômés depuis 2001. La plupart de ces apprenants adultes ont poursuivi leurs études et trouvé de meilleures possibilités d’emploi.
Les travaux de construction du campus Metro du Nova Scotia Community College et de rénovation des campus existants ont commencé. Ces travaux porteront la capacité du système collégial de la Nouvelle-Écosse à environ 10 000 places d’ici 2007.
Le cadre des compétences de la Nouvelle-Écosse est un catalyseur efficace pour créer des partenariats stratégiques et des possibilités pour les partenaires de travailler main dans la main au service de programmes qui satisfont à des besoins communs. Le fruit de ces collaborations entre l’industrie, le milieu des affaires et le gouvernement est un effort plus ciblé et soutenu pour élaborer et offrir les programmes et les services dont nous avons besoin pour développer une main-d’œuvre qualifiée, compétente et souple.
À l’avenir, une initiative de maintien en fonctions, de recrutement, de rapatriement et de recyclage contribuera à garantir que l’offre satisfait à la demande dans le marché du travail de la Nouvelle-Écosse et nous pensons que le gouvernement fédéral peut y contribuer en aidant grandement la province à mettre en œuvre ses programmes par une nouvelle approche de l’Entente sur le développement du marché du travail, l’EDMT, en confiant la responsabilité à la province et en mettant en œuvre une entente sur un partenariat de développement du marché du travail, une EPMT, pour laisser la latitude nécessaire d’affecter des fonds aux employés à risque, aux groupes sous-employés et sous-utilisés et à d’autres clients non admissibles à l’AE.
Il n’y a pas de solution universelle. Les programmes fédéraux sont appréciés, mais ils doivent être souples et adaptables pour être efficaces dans les systèmes et les marchés locaux. L’éducation et la formation sont les pierres d’assise de la productivité et la Nouvelle-Écosse a besoin de l’aide fédérale pour mettre en œuvre des initiatives quoi améliorent la productivité, individuelle et autre.
Je vous remercie beaucoup.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président et je vous remercie tous d’être venus aujourd’hui.
Je veux féliciter l’Université Acadia de sa participation à votre programme, surtout compte tenu que ma fille en est à sa première année d’études dans votre établissement. Cela étant dit, je dois vous dire que j’ai acquis un tout nouveau respect pour M. Kymlicka quand j’ai remarqué sa bague marquée d'un X, qui montre qu’il est un diplômé de la première université de premier cycle au pays, sur laquelle ma fille n’a pas arrêté son choix, pour une quelconque raison. C’est son choix. Ce sont toutes deux d’excellentes universités, qui sont toutes deux en Nouvelle-Écosse, bien entendu.
J’ai beaucoup de questions. Je commencerai par M. Kymlicka, si vous me permettez.
Je suis d’accord avec l’attention que vous accordez aux immigrants et à leur importance pour notre région, ce qui ne fait aucun doute. En fait, j’ai bien aimé l’article que Brian Crowley a écrit il y a quelques années dans lequel il disait que nous devions être une société accueillante. Ce n’est pas suffisant d’être tolérant envers les immigrants; nous devons faire en sorte qu’ils se sentent les bienvenus. C’est une affaire de cœur quand vous déménagez dans un nouvel endroit, et nous devons le comprendre et nous assurer que les gens se sentent les bienvenus dans toutes nos collectivités. C’est l’un de nos défis.
Vous avez mis l’accent sur les immigrants et sur la façon dont nous devons en attirer davantage dans notre région pour résoudre ou combler notre pénurie de main-d'oeuvre et de travailleurs qualifiés. Toutefois, je n’ai pas entendu parler des gens qui sont d’une certaine façon marginaux et qui ont été laissés de côté, comme les adultes qui ont besoin d’alphabétisation, ou de recyclage, etc. pour faire partie de notre population active. Il me semble qu’il y a là un rôle pour l’État à l’égard de ce genre de programmes et j’aimerais savoir ce que vous en pensez.
Deuxièmement, vous dites qu’il est illogique de payer des gens pour rester chez eux, etc. Permettez-moi de parler un peu des travailleurs plus âgés. À St. John’s lundi, nous avons eu le témoignage de la FFAWU qui, bien sûr, défend les pêcheurs et les travailleurs de l’industrie de la pêche. Ils ont parlé de femmes qui ont 58 et 60 ans qui ont travaillé toute leur vie sur des planchers de béton, les mains dans l’eau froide, à découper du poisson et qui souffrent maintenant d’arthrite et de maux de dos. Elles ne sont vraiment pas à même de se spécialiser en physique quantique ou comme informaticiennes, etc.
Que proposez-vous que nous fassions avec des personnes comme elles? Quel genre de programmes de soutien…? Devons-nous mettre en œuvre des programmes de soutien du revenu? Affirmeriez-vous vraiment qu’elles doivent déménager et trouver un nouvel emploi et acquérir de nouvelles compétences?
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Merci, monsieur le président.
Bonjour et merci d'être présents afin d'apporter votre expertise et votre contribution au débat et à la recherche que nous faisons présentement.
Lorsqu'on parle de travailleurs âgés, deux problèmes se posent. Celui auquel on s'attaque régulièrement, c'est celui de maintenir au travail les travailleurs âgés qui sont toujours aptes à l'emploi et pour lesquels il existe des emplois. Je pense que les travailleurs âgés seront d'accord. Les gens qui ont travaillé toute leur vie ont appris à travailler. Cela fait partie du sens qu'ils donnent à leur vie. J'y reviendrai.
Ceux pour qui je voudrais parler présentement, ce sont ceux pour lesquels il n'y a maintenant plus d'issue. Pour eux, on dirait qu'un noeud gordien se pose chaque fois que l'on s'adresse au gouvernement et, souvent, au patronat. Ce sont des personnes qui ne peuvent plus travailler, pour des raisons tout à fait objectives. Elles sont rendues au bout de leur capacité de travailler. Je vous donnerai l'exemple dont une dame a parlé plus tôt.
Tout récemment, j'ai rencontré une quarantaine de femmes qui avaient toutes plus de 40 ans de métier dans des usines de poisson. Elles avaient commencé à y travailler à l'âge de 15, 16 ou 17 ans. Elles sont maintenant âgées entre 50 et 60 ans. Une quarantaine de ces femmes se trouvaient devant moi qui avaient toutes commencé à travailler en même temps et qui n'étaient plus capables de travailler. Elles m'ont dit qu'on les faisait travailler trois mois par année et que ces mois de travail étaient devenus synonymes d'un terrible labeur. Elles ne voulaient pas entendre parler d'aller travailler ailleurs: elles n'en sont plus capables. Elles ont travaillé chaussées de bottes de caoutchouc toute leur vie, dans l'humidité, à transborder constamment des charges pesant de 25 à 30 livres souvent jusqu'à concurrence de 2 000 livres par jour. Donc, leur dos est en mauvais état.
Qu'est-ce qu'on fait avec ces gens? De quelle façon les soutient-on? Ce sont des personnes qui, de façon objective, ne peuvent plus travailler à cause de l'état de leur corps.
De façon aussi objective, d'autres personnes se trouvent dans une situation similaire. Je pense à des personnes comme celles qui ont travaillé à l'usine de Whirlpool de Rivière-du-Loup, où elles ont fabriqué des cuisinières toute leur vie. Or, on a fermé leur entreprise. Ce sont des gens qui sont encore capables de travailler. Ils n'ont pas travaillé fort comme les femmes dont j'ai parlé plus tôt, mais ils ne sont plus capables de trouver un emploi. Cette usine est fermée depuis deux ans. Il y avait là une cinquantaine de travailleurs de plus de 55 ans. Deux d'entre eux se sont suicidés. Ils n'aiment pas qu'on en parle, mais il faut le faire. Après deux ans, il n'y a plus d'assurance-emploi, il n'y a plus rien.
Je vous donne l'exemple d'un monsieur de 57 ans. Il a reçu deux ans de formation payée par le gouvernement. Il s'est recyclé et a fait 92 demandes d'emploi. Il a obtenu une entrevue, et on ne l'a pas retenu parce qu'il était trop vieux, lui a-t-on dit. C'est un monsieur avec une bonne tête, une bonne carrure, capable de travailler et qui a envie de travailler. Il est découragé. Je ne sais pas ce qu'il est devenu. Je pourrais vous donner plusieurs exemples semblables.
Ce sont donc là deux situations objectives où des travailleurs âgés ne peuvent pas travailler. Qu'est-ce qu'on fait avec eux? Le gouvernement s'objecte à accorder un soutien au revenu pour ces gens. C'est incompréhensible. Qu'est-ce qui leur reste? L'aide sociale. Après l'aide sociale, que leur reste-t-il? Pour obtenir des prestations d'aide sociale, il faut qu'ils dépensent tous leurs revenus gagnés. Souvent, ce n'est pas grand-chose, bien que ce soit tout le travail d'une vie. Je m'arrête là.
J'interpelle, entre autres, les gens du patronat: M. Kymlicka et le représentant des petites entreprises. Qu'est-ce qu'on fait avec les gens dont j'ai parlé plus tôt? Est-ce qu'on les ignore, ou si on leur vient en aide, sachant que la caisse de l'assurance-emploi dégage des surplus chaque année?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie tous ceux qui sont venus et qui ont donné un exposé cet après-midi. Nous apprécions votre perspicacité et votre point de vue.
Pendant un moment, j’ai réellement cru que j’étais de retour en Alberta quand on a parlé de l’insuffisance de main-d’œuvre. Mais lorsque vous avez commencé à parler des personnes âgées non incluses dans la population active, je me suis rendu compte que je n’étais peut-être pas en Alberta et que ce qui se passe ici correspond à ce qui se passait en Alberta voilà plusieurs années.
Je sais par expérience qu’en Alberta, en particulier dans ma région d’origine, on fait asseoir les personnes âgées autour de la table et elles sont incluses dans la population active par nécessité. Dans notre situation, nous avons un chômage négatif. Il y a des milliers et des milliers d’emplois vacants et tous ont un emploi, y compris les personnes âgées.
Par nécessité, les employeurs se sont adressés à ces gens qui résistaient peut-être avant de venir travailler. Ils sont allés les chercher. Franchement, nous acceptons encore les curriculum vitæ et si quelqu’un connaît une personne âgée qui désire travailler, elle sera tout à fait la bienvenue à Grande Prairie pour y poser sa candidature. Nous les accueillons chaleureusement. Je parle un peu en plaisantant, car je sais que les gens veulent demeurer dans la collectivité où ils ont beaucoup investi. Nous sommes au courant de cela.
Je recommande d’adopter toute stratégie qui vise à inciter les employeurs à encourager les personnes âgées à faire partie de la population active. Ce sont des gens peut-être moins enclins à s’installer dans une nouvelle collectivité. Si nous pourvoyons les postes dans les collectivités où il reste des personnes âgées sans emploi, il se pourrait alors que certains jeunes se montrent plus intéressés à déménager. Ce peut être une stratégie. Quels sont vos points de vue à ce sujet?
Il nous faut examiner la question des travailleurs âgés, mais également le fait que dans certaines régions, particulièrement dans de nombreuses collectivités ici, mais également dans l’Ouest, un très grand nombre de postes demeurent vacants. Je ne sais pas comment il faudrait s’y prendre, car je ne crois pas, comme on l’a suggéré, que la solution consiste à payer les gens pour rester à la maison. Il doit bien y avoir une autre façon de faire.
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Permettez-moi de répondre; je ne suis pas tout à fait d’accord avec les études menées par l’OCDE, car je sais par expérience qu’il est beaucoup plus facile d’évaluer une formation structurée. Particulièrement dans les Maritimes, on a tendance à donner une formation non structurée. À l’Île-du-Prince-Édouard, par exemple, il y a de nombreux agriculteurs. On n’y envoie pas quelqu’un dans une salle de cours pour apprendre comment traire une vache; on va plutôt s’asseoir et le lui montrer. J’ai été élevée en milieu urbain et je ne sais donc pas comment traire une vache. Ils vont vous l’expliquer et prendre le temps qu’il faut.
Les études de l’OCDE sont valables pour établir des comparaisons, mais c’est difficile pour quelqu’un qui possède une petite ou une moyenne entreprise. Nous sommes cinq personnes ici. Vous pourriez aujourd’hui être en train de recevoir une formation et nous serions obligés de répondre au téléphone. C’est donc vraiment un point de vue différent.
Je vais donner l’impression de répéter la même rengaine, mais vous avez demandé s’il existe des moyens d’inciter les employeurs à former les travailleurs âgés. Certainement, en réduisant les cotisations sociales s’ils dépensent ces sommes pour dispenser une formation. Il y a quelque temps, le Programme pour l’embauche de nouveaux travailleurs donnait de bons résultats. Il incitait les employeurs à embaucher de nouveaux employés. Maintenant, ce serait le contraire, si c’est possible. Je suis certaine que votre compétence est plus étendue que la mienne à ce sujet.
Permettez-moi de répondre à la première question que vous avez posée, mais différemment. Il est vrai qu’en Alberta, il y a beaucoup de chômage négatif. Il y a trop d’emplois et pas assez de personnes pour les pourvoir, etc. Récemment, je consultais les chiffres de Statistique Canada et j’ai été étonnée d’apprendre que c’est en Alberta que les femmes se joignent le moins à la population active. Je me suis dit que ce devait être une erreur. J’ai donc relu le passage et c’était vrai. Il semble que ce soit au Québec que les femmes se joignent le plus à la population active. Le motif est très facile à trouver — il est donné deux pages plus loin et c’est le système de garderies.
Il y a des facteurs sur le marché qui ont des effets différents que le simple fait de pouvoir obtenir un d’emploi. Le système de garderies du Québec incite les femmes à retourner travailler beaucoup plus tôt après avoir donné naissance à leurs enfants; je ne dis pas si c’est une bonne ou une mauvaise chose, c’est tout simplement ainsi que ça se passe. Ce système n’existe pas en Alberta et de nombreuses femmes ont tendance à rester au foyer. J’ai été très étonnée de constater que la province qui offre tous ces emplois bien rétribués ne peut motiver les gens à poser leur candidature sur le marché du travail.
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Merci, monsieur le président.
À mon tour, j'aimerais vous remercier d'être devant nous cet après-midi. Je dois vous dire que les discussions que vous avez soulevées sont intéressantes. J'en suis à mon deuxième mandat comme député fédéral. On vient de commencer, soit il y a quelques mois, à travailler à toute la question de l'employabilité. De plus en plus, il y avait une drôle de perception. On aurait dit que certaines personnes au pays pensaient que dans les Maritimes, dans les provinces Atlantiques — je suis du Nouveau-Brunswick —, on n'avait pas de difficulté à trouver des employés. C'était comme s'il y avait trop d'employés pour le nombre d'emplois disponibles. Or, je pense que c'est plutôt le contraire qui est en train de se produire. En tout cas, je suis content de vous entendre parler de cela.
Je me souviens qu'à une séance du Comité des ressources humaines tenue il y a quelques mois, un député du côté du gouvernement avait dit que le fédéral devrait mettre des initiatives financières en place pour inciter des gens des provinces Atlantiques à aller en Alberta. Je pense que ce serait seulement de prendre un problème et de le déplacer, ce qui entraînerait encore plus de difficultés. Je suis content que ce député ne soit pas parmi nous aujourd'hui, car il aurait certainement grimacé. Quoi qu'il en soit, il saura que je l'ai dit encore une fois.
Lorsque vous avez mentionné, madame Bourgeois, qu'il y aura dans l'avenir près de 12 000 emplois au Nouveau-Brunswick, c'est clair que c'est important pour les travailleurs, si on compte les gens qui ont la possibilité de travailler.
Vous avez mentionné, madame Bourgeois, la question de la discrimination. Je crois que Mme Danica ou Mme Keddy a mentionné que la discrimination ne devrait pas existé, mais elle existe toujours. C'est se mettre la tête dans le sable comme une autruche que de dire qu'il ne faut pas faire de discrimination parce que c'est contraire à la loi. Or, tout le monde en fait, mais personne ne le dit. Je pense que le problème est là. C'est vrai qu'une femme qui est à l'âge d'avoir des enfants peut être victime de discrimination. C'est le cas aussi des jeunes qui n'ont pas assez d'expérience, des personnes âgées qui n'ont peut-être plus les capacités physiques que certains employeurs recherchent. Mais il faudra un jour que les employeurs comprennent que chacun peut apporter un élément positif à une entreprise, qu'il s'agisse d'une femme, d'un jeune ou d'une personne âgée. Tous et chacun peuvent apporter des choses positives.
Vous êtes du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard. Madame Bourgeois, vous représentez la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Lorsque vous avez fait votre évaluation, vos études, avez-vous tenu compte, parmi les 12 000 emplois au Nouveau-Brunswick et, peut-être, dans les autres régions des Maritimes, des travailleurs saisonniers? Si oui, quel pourrait être le risque — et j'invite tous et chacun qui le veulent à répondre à ma question — associé au recyclage de ces travailleurs dans un emploi permanent qui n'existe pas présentement? Qu'arrive-t-il l'année suivante, la saison suivante? Que fait-on pour combler le poste de travail qui était occupé par un travailleur saisonnier? La réalité est qu'il y a encore des gens au pays qui oublient ou qui ne savent pas que le poisson n'est pas pêché à Toronto, que le deux-par-quatre n'est pas scié pas au centre-ville de Montréal, et je pourrais continuer. Il faut véhiculer ce message, le répéter maintes et maintes fois. Une étude a été faite dans une école de Toronto dans le cadre de laquelle on demandait aux enfants d'où provenaient les citrouilles. Les jeunes répondaient qu'elles provenaient de chez Loblaws. Donc, il y a une non-compréhension de la réalité canadienne, pancanadienne, d'un bout à l'autre du pays. Peut-être que nous, dans les régions rurales, nous attardons un peu plus à comprendre l'ensemble du pays, mais c'est une réalité de tous les jours.
Je vais cesser de parler, car le président va me dire que le temps à ma disposition est écoulé. Je vais vous laisser répondre à mes questions, s'il vous plaît.
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Merci, monsieur le président.
Je veux revenir sur une affirmation ou une information que M. Kymlicka a donné plus tôt à l'effet qu'il n'y avait pas de travailleurs immigrants au Canada parce que les teamsters avaient empêché qu'il y en ait. C'est ce que j'ai compris. J'essaie de voir ce qu'il voulait dire, car au Québec, qui n'est pas encore séparé... Cela viendra peut-être, mais il fait toujours partie du Canada.
Des voix: Ah, ah!
M. Yves Lessard: Je disais donc qu'au Québec, des milliers de travailleurs mexicains viennent chaque année, et ce, particulièrement depuis le milieu des années 1980. Ils travaillent parfois dans des conditions assez pénibles. Ce sont des emplois qui ne sont pas convoités par les Québécois; ils viennent donc pallier un manque de main-d'oeuvre. Ils viennent faire les semences chez les maraîchers et ils restent pour la récolte. Ils sont donc là pour une période d'environ six mois. Maintenant, ces travailleurs parlent de se syndiquer parce qu'ils réalisent qu'on les exploitent carrément; pas tous, mais plusieurs d'entre eux.
Donc, il me manque probablement des informations en ce qui concerne le reste du Canada. Je ne savais pas que ce n'était pas permis ailleurs au Canada.
Je reviendrai sur la question des travailleurs âgés. Notre collègue conservateur a touché un peu la difficulté associée à la mobilité. Les gens qui ont travaillé et ont élevé leur famille dans un endroit donné, dans une ville, dans une communauté sont près de toute leur famille, de leurs amis. Dans ce cas, bien sûr, ce sera difficile pour eux d'aller travailler en Alberta, par exemple, pour deux ou trois ans, si c'est le temps qu'il leur reste à travailler.
Une fois qu'on a fait le tour du jardin et qu'on a réalisé toutes ces difficultés qui se posent aux travailleurs âgés, on constate toute la richesse de ce potentiel, de ce savoir et de ce savoir-faire.
N'y aurait-il pas lieu de définir une politique d'embauche littéralement pour les travailleurs âgés qui s'appuierait sur un certain nombre de caractéristiques que vous avez soulevées vous-mêmes, à savoir quelles sont les compétences et l'expérience qu'ils ont acquises, et adaptée aussi par rapport à leur réalité quant au temps et à leur contribution à l'emploi?
Ce matin, avec quelqu'un d'autre, je parlais de mentorat. Ne pourrait-on pas demander à ces gens, non pas nécessairement de faire le même travail, mais d'apprendre aux autres à le faire, de soutenir les plus jeunes, de les encadrer, et ce, pour des périodes de temps peut-être plus courtes? Ce n'est pas nécessaire qu'ils travaillent 40 heures par semaine. Ils n'ont plus les mêmes besoins, mais par ailleurs, ils ont toujours besoin d'un revenu, de se sentir valorisés. Surtout, ils ont ce besoin fondamental d'être conscients de contribuer à la société. Lorsque quelqu'un n'a pas la sensation d'être utile, on sait où cela peut mener.
Telle est ma question: n'y aurait-il pas lieu d'établir une politique adaptée aux travailleurs âgés et qui tienne compte de la contribution qu'ils peuvent apporter?