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Merci, monsieur le président.
À titre de précision, M. MacLeod est président et avocat-conseil de Secunda Marine Services. Je n'ai pas cru nécessaire de venir accompagné de mon propre avocat.
Merci d'être venus en Nouvelle-Écosse et de nous avoir permis de nous faire entendre aujourd'hui.
Très rapidement, OTANS est une association commerciale qui représente environ 400 compagnies membres dans les Maritimes et à Terre-Neuve-et-Labrador. Ces entreprises fournissent des biens et services liés à l'énergie — surtout le pétrole et le gaz exploités en mer — bien que certaines se spécialisent en énergies renouvelables également. Environ 30 p. 100 de nos entreprises exportent leur production et sont parvenues à faire affaire avec les États-Unis, l'Europe et, dans une moindre mesure, l'Amérique du Sud et le Moyen-Orient.
Comme je l'ai dit, je suis accompagné de M. MacLeod de Secunda Marine. Secunda est membre de notre association et a son siège à Dartmouth. Elle a une flotte de navires annexes qui emploie de 300 à 400 Canadiens à Halifax et à Dartmouth et est présente dans le monde entier.
Je propose de vous présenter mes remarques liminaires et de vous laisser par la suite nous poser vos questions.
Votre tâche consiste à étudier la compétitivité canadienne. Notre rôle aujourd'hui est de traiter des mesures qui pourraient avoir des incidences graves sur notre compétitivité, non pas à l'échelle internationale, mais dans notre propre cour. Le Canada est un pays commerçant et nous sommes favorables à toutes les possibilités pour nos entreprises membres et nos employés d'entrer sur de nouveaux marchés. Cependant, nous voulons prévenir le comité des dangers qui guettent une industrie déjà fragile, l'industrie pétrolière et gazière au large des côtes, et des avantages économiques d'une entente de libre-échange potentielle avec l'AELE, l'Association européenne de libre-échange, pour notre région et notre pays.
Nous conclurons nos remarques par quelques observations sur la politique navale canadienne.
L'Association européenne de libre-échange se compose de quatre pays: la Norvège, l'Islande, la Suisse et le Liechtenstein. S'il y arrive, le Canada entrerait dans une soi-disant entente de libre-échange avec ces quatre petits pays européens. D'un point de vue philosophique, nous ne sommes pas opposés au libre-échange. Cependant, l'AELE ne permettrait pas de libéraliser le commerce et ne profiterait pas à l'économie canadienne, à notre avis. Cette initiative étroite nuirait gravement, au contraire, à certains secteurs de notre économie, non seulement l'industrie pétrolière et gazière au large des côtes du Canada atlantique mais également à l'industrie de la construction navale et, plus particulièrement, aux exploitants de navires hauturiers.
D'aucuns ont dit que le Canada était à la traîne derrière les États-Unis en matière d'ententes de libre-échange bilatérales avec d'autres partenaires du globe et que nous allions perdre du terrain si nous ne rattrapions pas notre voisin. Je peux vous assurer que les États-Unis ne signeraient jamais une entente sans une exclusion de la Loi Jones qui permettrait de réserver le commerce côtier américain aux navires construits aux États-Unis.
Il y a quatre ans, avec de nombreuses autres parties, y compris plusieurs gouvernements provinciaux, nous en sommes venus à la conclusion qu'une entente de libre-échange avec l'AELE ne profitait pas suffisamment au Canada. On nous a dit que les Norvégiens n'accepteraient pas une exclusion pour l'industrie de la construction navale et un tarif de 25 p. 100 sur les importations de navires. Sans une exclusion comme celle qui s'applique aux exploitants américains en vertu de l'ALENA, les chantiers navals et les exploitants de navires canadiens n'accepteront pas de signer une entente avec l'AELE.
Nous aimerions faire quelques observations au sujet de l'AELE, qui s'appliquent dans une certaine mesure aux discussions sur Singapour et la Corée. D'abord, quel est l'avantage d'une telle entente pour notre pays? Les ententes de libre-échange doivent profiter aux deux parties et engendrer des avantages économiques pour chacune. Lorsque nous avons demandé aux fonctionnaires du gouvernement du Canada les statistiques et les données sur l'analyse coûts-avantages d'une telle entente, ils n'ont rien pu nous fournir. Nous pensons que c'est parce que ces études n'existent pas. Les fonctionnaires ont également avancé qu'une entente avec l'AELE nous permettrait d'accéder au marché de l'Union européenne, mais nous n'avons reçu aucune explication sur la façon d'y arriver. Nous ne voyons aucun avantage de ce genre de négociations, sous leur forme actuelle, pour le Canada. Nous ne voyons pas comment une entente avec ce qui reste de l'Europe permettrait aux Canadiens d'entrer sur le marché européen.
En ce qui concerne les règles d'origine, en vertu des règles proposées — je sais que c'est compliqué pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas l'industrie de la construction navale, on exige seulement entre 35 et 50 p. 100 de contenu norvégien dans tout navire exporté de la Norvège au Canada. Cela permet aux Norvégiens de construire la coque des navires à l'étranger dans des pays où la main-d'oeuvre est bon marché, comme la Roumanie, et de les ramener en Norvège pour les armer. Par conséquent, de 50 à 65 p. 100 d'un navire soi-disant norvégien pourrait être construit à l'extérieur de ce pays mais considéré comme un navire norvégien pouvant entrer au Canada sans que les armateurs n'aient à payer de droits.
Un armateur canadien, en revanche, ne pourrait importer une coque semblable d'un pays à main-d'oeuvre bon marché et armer ce navire au pays sans avoir à payer des droits de 25 p. 100 sur cette coque lorsqu'elle est mise en service.
Il semble que les Norvégiens savaient très bien ce qu'ils voulaient lorsqu'ils sont arrivés à la table de négociation, mais les négociateurs canadiens ne semblaient pas avoir compris dans quoi ils s'engageaient.
Pour des raisons de politiques nationales, toutes les ententes de libre-échange comprennent ou permettent des exclusions précises pour des industries instables. En vertu de l'ALENA, les États-Unis ont réclamé une exclusion de l'industrie de la construction navale et de l'industrie du transport en vertu de la Loi Jones, qui empêche les navires canadiens ou construits au Canada de prendre part au commerce côtier des États-Unis. Les États-Unis ont voulu protéger ces secteurs. Étant donné que la Norvège a développé son secteur pétrolier et gazier au large des côtes grâce à des politiques très protectionnistes, nous pensons que le Canada devrait faire la même chose avec l'AELE.
En ce qui concerne le secteur extracôtier de la côte est du Canada, voire du Nord et de la Colombie-Britannique, il faut bien étudier cette entente avec l'AELE et y mettre un terme. Le développement de cette industrie dans les provinces de l'Atlantique représente la croissance économique la plus importante de la région depuis la fin de la guerre. Étant donné que cette industrie pétrolière et gazière n'en est qu'à ses premiers pas à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse et que la politique du gouvernement fédéral, actuel et passé, consiste à s'assurer que Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse soient les premiers bénéficiaires de ce secteur en vertu des ententes, il est tout à fait approprié de le réserver aux entreprises canadiennes.
Si les exploitants de navires norvégiens peuvent entrer sur notre marché aujourd'hui, ils viendront avec leurs compagnies d'appui, leurs industries des services et d'autres éléments de l'industrie pétrolière et gazière au large des côtes avec eux. Les Canadiens de l'Atlantique et tous les Canadiens seront désavantagés et craindront de faire faillite.
La Norvège dispose d'une industrie extracôtière très forte que nous envions beaucoup. Ces 30 dernières années, elle est devenue un des plus grands exportateurs de pétrole du monde. Les concurrents étrangers n'ont pas réussi à entrer sur le marché norvégien à cause des barrières non tarifaires, telles que des processus d'appel d'offres réglementés par le gouvernement qui permettent essentiellement de réserver les activités côtières aux compagnies norvégiennes. En outre, la fabrication des navires norvégiens est fortement subventionnée. Les exploitants de navires norvégiens jouissent également de régimes fiscaux très avantageux et de structures corporatives leur permettant de s'épanouir, grâce notamment à des politiques très protectionnistes et à un soutien important du gouvernement.
Aujourd'hui, ils veulent une entente de libre-échange avec le Canada. Il est évident que nous sommes désavantagés. Ce pays dispose d'environ 400 navires hauturiers de ravitaillement. Depuis 1997, on en a construit plus de 200 qui se sont ajoutés à la flotte. Si on les laisse accéder au marché canadien sans exiger des droits de 25 p. 100 sur les navires, les compagnies norvégiennes pourraient pratiquer le dumping et vendre leurs navires à prix réduit. Les exploitants canadiens, qui ont dû respecter le régime actuel et payer des navires américains ou canadiens onéreux ou encore verser des droits de 25 p. 100 pour des navires construits à l'étranger ne pourraient rester concurrentiels. En gros, nous aurons les mains liées et regarderons les Norvégiens exploiter les ressources canadiennes.
En ce qui concerne les politiques tarifaires, une entente avec l'AELE, si elle était adoptée, irait à l'encontre de la politique de construction navale fédérale. Le gouvernement du Canada considère la croissance du secteur gazier et pétrolier au large des côtes comme un élément clé dans la croissance de l'industrie de la construction navale. Par ailleurs, la politique de la construction navale est fondée sur l'idée selon laquelle l'industrie extracôtière canadienne va continuer d'évoluer et de profiter aux Canadiens. Ainsi, en vertu de cette entente de libre-échange, un concurrent étranger puissant pourrait entrer de façon injuste sur le marché canadien avant que notre industrie ne puisse se mettre en route et acquérir des bases solides.
Nous attendons toujours une réponse du gouvernement, surtout de ses fonctionnaires, à certaines questions pertinentes. Nous aimerions que, à votre retour à Ottawa, vous posiez également ces questions et en partagiez les réponses.
D'abord, où est l'analyse coûts-avantages et les détails qu'implique une entente comme celle-ci? Ce n'est pas que nous n'aimons pas la réponse, c'est tout simplement que les fonctionnaires sont incapables ou refusent de nous répondre.
Lorsque nous demandons directement quels secteurs de l'économie canadienne profiteraient de cette entente de libre-échange, nous n'obtenons aucune réponse. Cela fait cinq ans que nous interrogeons les fonctionnaires et nous ne savons toujours rien. C'est un acte de foi. Un pays ne peut entrer dans ce genre de négociations sans avoir établi des objectifs précis et informer les Canadiens des avantages et des inconvénients potentiels d'une telle mesure.
Comme je l'ai dit plus tôt, nous pensons que des négociations commerciales avec l'AELE contrediraient la politique fédérale qui vise à s'assurer que Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse sont les principaux bénéficiaires de la croissance du secteur pétrolier et gazier au large des côtes, conformément aux lois fédérales et provinciales que l'on appelle les accords. Cette initiative nuirait gravement non seulement aux armateurs et aux chantiers navals, mais aussi aux entreprises de services et aux entreprises de soutien du secteur extracôtier émergent, fournisseurs des chantiers navals et des armateurs canadiens.
Non seulement cette initiative nuirait aux chantiers navals et aux armateurs, elle nuirait également aux entreprises de services et entreprises de soutien du secteur extracôtier émergent, fournisseurs des chantiers navals et des amateurs canadiens. Ce sont les personnes que je représente ici aujourd'hui. Nous représentons le secteur de la construction navale et les armateurs du Canada atlantique, mais également une vaste chaîne d'approvisionnement qui, à notre sens, est en danger.
Pour être francs, nous croyions en avoir fini avec cette question il y a plusieurs années, lorsqu'elle a été mise de côté, mais il semble que ça ne soit pas le cas. Nous exhortons le comité à poser nos questions au gouvernement et à insister pour qu'il fasse une analyse détaillée et transparente de cette initiative avant de l'adopter.
Merci beaucoup.
Le sujet à l'étude porte sur le secteur manufacturier et la compétitivité au Canada. Il peut paraître un peu curieux qu'une société de services comme Secunda Marine, qui possède et exploite des navires, vienne ici parler du secteur manufacturier, mais nous utilisons des bateaux qui sont construits et manufacturés; par conséquent, les politiques mises en oeuvre à propos des bateaux ont une incidence sur notre activité. Il se trouve que le régime mis en place a entraîné un ensemble de circonstances telles que notre société s'est lancée dans la fabrication de navires pour rester concurrentielle.
Je voudrais vous présenter notre société: nous sommes les propriétaires exploitants d'une flotte de 16 navires qui naviguent dans le monde entier. Notre port d'attache est Dartmouth, en Nouvelle-Écosse. Notre société est à 100 p. 100 néo-écossaise et canadienne, et elle est établie ici, à Halifax et Dartmouth. Nous travaillons sur le marché intérieur ainsi que sur le marché international. En concurrence avec les Norvégiens,nous travaillons dans le golfe du Mexique, dans la mer du Nord, au large de l'Afrique occidentale et ici. Nous connaissons la concurrence et nous savons à quel point les Norvégiens sont bien placés dans notre secteur.
Le Canada applique une politique de tarifs élevés aux industries du transport maritime et de la construction navale. J'aimerais tenter de vous expliquer que la Norvège, quant à elle, applique une vaste gamme de politiques et d'initiatives pour soutenir la vigueur de son transport maritime et de ses activités à l'étranger. Dans le projet de négociations avec l'Association européenne de libre-échange — à savoir la Suisse, le Liechtenstein, l'Islande et la Norvège, c'est principalement la Norvège qui nous préoccupe. Le fait est que s'il fallait choisir le concurrent le plus fort de notre secteur pour lui ouvrir nos portes et le laisser prendre l'avantage sur nous, ce concurrent serait la Norvège. La démarche n'a donc rien de logique.
J'ai ici toute une liste de questions que je pose aux gens du gouvernement depuis trois mois. Mme Denise Verreault, qui gère Verreault Navigation au Québec, a bien résumé la situation: Qu'est-ce que cela réserve au Canada? Qu'est-ce que cela nous réserve? Personne ne peut répondre à ces questions. On nous dit que nous sommes en retard sur les États-Unis dans un certain nombre d'accords de libre-échange que nous avons négociés, ou qu'il faut se ménager un accès au marché européen. Ce à quoi je réponds: Comment va-t-on pouvoir accéder au marché européen à partir de pays qui ne font pas partie de la CEE? Et s'ils ne font pas partie de la CEE, en particulier dans le cas de la Norvège, c'est parce qu'ils veulent préserver leurs politiques protectionnistes et qu'ils refusent de se conformer aux politiques de libéralisation du commerce imposées par la CEE.
J'ai l'impression que dans les couloirs de l'immeuble Leaster B. Pearson, quelqu'un a décidé de s'occuper des accords de libre-échange. C'est un sujet passionnant pour un nouveau ministre. Lançons donc ce ballon d'essai et regardons-le aller. C'est ainsi qu'un projet que nous pensions mort et enterré il y a quatre ans est en train de sortir du tombeau comme Lazarre. Nous voici de nouveau obligés de nous mobiliser pour expliquer la situation à une nouvelle équipe de négociateurs commerciaux qui ne connaissent rien à notre secteur d'activité. Le nouveau négociateur en chef est entré en fonction il y a trois semaines et il est allé négocier la disparition de notre industrie en Norvège.
Quoi qu'il en soit, permettez-moi de revenir sur quelques questions évoquées tout à l'heure par Paul.
En ce qui concerne la taille de notre société et nos activités à l'étranger, ces dernières sont d'une extrême importance pour la Nouvelle-Écosse. Notre société a réussi à exporter dans le monde entier une technologie et un savoir-faire élaborés ici même. Notre actif est évalué à plus de 300 millions de dollars. L'année dernière, nos revenus ont atteint 95 millions de dollars. Nous employons plus de 450 personnes ici à Halifax ainsi que dans toutes les petites collectivités rurales du Canada atlantique. Halifax n'est pas la seule à en profiter; c'est aussi le cas de petites localités comme Sheet Harbour, Mabou, Shelburne et des petites villes de l'Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick. Les retombées économiques de notre industrie ne se limitent pas à un seul endroit. Elles couvrent toute la région et elles ont donc un effet considérable.
Au cours des 15 dernières années, nous avons investi plus de 160 millions de dollars dans d'importantes activités de post-transformation et de conversion de navires. Nous entreprenons ces activités à cause de la politique de tarifs élevés. Nous importons un navire de faible valeur, nous payons des droits modestes sur cette faible valeur et nous améliorons ce navire pour en augmenter la valeur au Canada — c'est ce qu'on appelle de l'apport de compétence — pour ne pas avoir de forts montants de droits à payer.
Une image vaut mille mots, et comme ce n'est ni du français, ni de l'anglais, je pense que tout le monde accepte que je fasse circuler quelques photos pour vous montrer ce que nous faisons. Tout cela concerne directement la question des règles d'origine.
La photo du haut est celle d'une coque de fabrication russe que nous avons achetée et que nous avons fait venir au Canada. Nous avons acheté deux de ces navires. En neuf mois, au chantier naval de Dartmouth, nous avons converti ces deux navires pour en faire celui qui apparaît sur la photo du bas. Depuis six ou sept ans, ce navire dessert le projet Terra Nova de Petro-Canada.
Voilà un exemple de la façon dont notre société fonctionne dans la structure actuelle des tarifs élevés pour importer des navires au Canada et pour les améliorer ici même, car nous devons nous accommoder des 25 p. 100 qu'il faut payer à l'importation d'un navire construit en dehors du Canada. Si nous faisions construire un navire en Norvège, à Singapour ou ailleurs, nous pourrions le faire venir ici, payer un droit de 25 p. 100 et le faire naviguer. Évidemment, tout cela est difficile à financer et fait augmenter le coût des projets.
Nous avons donc échafauder notre société autour de la politique actuelle. Mais le plus étonnant, c'est qu'en vertu des règles d'origine qui vont s'appliquer dans le cadre de l'accord avec l'Association européenne de libre-échange auquel Paul a fait allusion, un chantier naval norvégien pouvait importer une coque de Roumanie, par exemple, la faire aménager en Norvège avec du matériel norvégien par des travailleurs norvégiens, et ce navire pourrait avoir... Le seuil n'a pas encore été fixé, mais nous avons entendu divers chiffres. Ce navire pourrait avoir un contenu non norvégien de 35 à 65 p. 100 et s'il est importé au Canada, il sera considéré comme navire norvégien dans le cadre de l'Association européenne de libre-échange et sera donc exempt de droits.
Encore une fois, il s'agit d'un contenu non norvégien de 35 à 60 p. 100 dans un navire norvégien importé au Canada qui aura le même statut qu'un navire construit au Canada. Si nous voulons construire le même genre de navire en important une coque qui va recevoir 95 p. 100 de contenu canadien en valeur ajoutée, nous devrons quand même payer des droits sur la coque importée. C'est ridicule.
Cet exemple montre bien, à mon sens, que nos négociateurs et nos fonctionnaires responsables de la politique industrielle ne comprennent pas vraiment la situation et sont en train de négocier et de prendre des décisions concernant notre industrie sans en apprécier véritablement les conséquences.
J'en reviens à la question de Mme Verreault: Qu'est-ce que cela nous réserve? Personne ne peut nous le dire. S'il y avait des gagnants et des perdants, on pourrait comprendre. Il y aurait des gains pour un secteur et des pertes pour un autre. Mais il semble qu'aucun secteur n'ait quoi que ce soit à gagner de l'accord avec l'Association européenne de libre-échange. Pourquoi faut-il conclure cet accord? J'ai l'impression qu'on s'est engagé dans la négociation des accords de libre-échange sans tenir compte de leurs conséquences. Mais qu'on soit en affaires ou qu'on soit un pays, qui que l'on puisse être et quoi qu'on fasse, il faut avoir une raison pour agir. Et j'ai l'impression qu'actuellement, cette raison fait défaut.
Il y a quelques semaines, le consortium de M. Irving et des représentants de notre société ont rencontré le ministre de l'Industrie pour parler de l'avenir des chantiers navals et de l'industrie maritime. À cette occasion, nous avons formulé plusieurs propositions. Avant de les évoquer brièvement, j'aimerais vous donner la réalité norvégienne.
La Norvège construit des navires depuis une vingtaine ou une trentaine d'années grâce à des subventions. Elle applique une politique d'approvisionnement très protectrice. Elle a un régime de réglementation qui protège le secteur de la construction navale au profit des industriels norvégiens. Sa politique fiscale est semblable à un partenariat limité qui favorise l'investissement auprès des sociétés propriétaires de navires, ce qui attire les investisseurs. Ici, au Canada, pour notre activité à forte intensité de capitaux, nous ne bénéficions pas d'un régime semblable. Il faudrait étudier et réviser toute une gamme de mesures avant d'éliminer la politique de tarifs élevés qui s'applique aux chantiers navals et aux exploitants de navires.
Les Norvégiens ont toute une gamme de mesures de soutien de leur secteur maritime, alors que la seule politique de soutien en vigueur au Canada va être éliminée et nous allons nous retrouver à la merci d'un concurrent international très puissant et très dynamique.
C'est pour moi un plaisir d'être parmi vous ce matin et de vous livrer notre point de vue sur cet important sujet.
Je m'appelle Jim Irving et je suis le président de J.D. Irving Limitée. Si vous ne la connaissez pas, c'est une société du Nouveau-Brunswick. Nous sommes en affaires depuis 1882 et nous gérons une société totalement intégrée de produits forestiers, de produits d'emballage, de construction navale, de commerce de détail, de transport et de transformation alimentaire. Nous avons plus de 15 000 employés au Canada et aux États-Unis. Nos principaux marchés sont situés aux États-Unis et au Canada, et nos sièges sociaux se trouvent à Saint John et à Moncton.
J'ai un document à vous distribuer, mais on me signale qu'il n'est pas conforme et je vais donc essayer d'en tirer le meilleur parti. J'espère qu'on pourra vous le distribuer dans le courant de la matinée une fois qu'il aura été traduit. Je sollicite donc votre indulgence.
Il y a trois choses essentielles dont nous voudrions vous parler ce matin: il faut favoriser l'investissement et les technologies nouvelles, il faut conclure des accords commerciaux concernant les chantiers navals et le secteur maritime, et il faut favoriser l'amélioration de la productivité et l'acquisition de compétences.
Je vais vous présenter un tableau, si vous le voulez bien. Le premier concerne le domaine des produits forestiers, dans lequel nous sommes présents. C'est un secteur industriel important au Canada, ainsi qu'au Nouveau-Brunswick. Mes trois ou quatre premiers acétates donnent une information contextuelle qui pourrait bien s'appliquer à n'importe quel secteur industriel, que ce soit l'automobile en Ontario, le secteur minier ou tout autre secteur manufacturier et exportateur au Canada.
Le premier tableau montre l'importance du secteur des produits forestiers pour le Nouveau-Brunswick. Il fait apparaître toutes les provinces canadiennes et indique que le secteur forestier représente environ 9 p. 100 de l'économie du Nouveau-Brunswick. Nous faisons partie du secteur des produits forestiers du Canada, celui qui dépend le plus du secteur manufacturier.
Je vais passer directement au troisième acétate, qui montre la dépendance du Nouveau-Brunswick à l'égard du secteur manufacturier. Dans l'ensemble des provinces canadiennes, le Nouveau-Brunswick se classe au troisième rang à cet égard. C'est ce qu'illustre le quatrième acétate, consacré à l'investissement au niveau mondial. Mais avant de vous le montrer, j'aimerais vous donner davantage d'information.
Les produits forestiers sont un secteur à forte intensité de capitaux; c'est ce qui apparaît sur ce quatrième acétate, qui montre les augmentations de capitaux et les dépenses d'investissement à l'échelle mondiale, ainsi que le classement du Canada à cet égard. Les chiffres sont exprimés en milliards de dollars. On montre 13 milliards de dollars pour l'Asie entre 2000 et 2007. Il s'agit des investissements dans le secteur des produits forestiers, des pâtes et papiers: sur cette période, on a 13 milliards de dollars pour l'Asie, 7 milliards de dollars pour l'Amérique du Sud, plus de 12 milliards de dollars pour l'Europe, 3,3 milliards de dollars pour les États-Unis et à peine plus de 1 milliard de dollars pour le Canada. Encore une fois, cela montre les dépenses d'investissement à l'échelle mondiale dans le secteur des produits forestiers, où le Canada a toujours occupé une place de premier plan à l'échelle mondiale.
Ce tableau est un peu plus détaillé. Il montre le taux des dépenses d'investissement en Amérique du Nord dans le secteur des pâtes et papiers. Celui-ci fait apparaître l'investissement en proportion de l'amortissement. Comme vous le savez sans doute, il faut investir à peu près 100 p. 100 de l'amortissement pour rester en activité. Ce tableau montre la situation canadienne à partir de 1975 avec plus de 200 p. 100, et la situation actuelle, en 2001, avec moins de 50 p. 100. En 1975, l'industrie investissait un taux d'environ 225 p. 100. Aujourd'hui, en 2001, cet investissement est tombé à peine au-dessus de 50 p. 100.
On voit donc qu'en Amérique du Nord, au Canada et aux États-Unis, l'amortissement n'est pas réinvesti. On en réinvestit moins de la moitié, et il y a donc une grave situation de déclin quant à l'investissement dans ce secteur industriel à forte intensité de capitaux.
Que peut-on y faire? C'est la question fondamentale qui va servir de toile de fond à notre exposé de ce matin. Ce que nous recommandons — et cela n'est pas nouveau, nous l'avons dit à maintes reprises mais nous n'avons pas obtenu gain de cause — consiste à augmenter la déduction pour amortissement, et on passerait du taux actuel de 30 p. 100 d'amortissement dégressif à un taux éventuel de 50 p. 100 d'amortissement linéaire.
En fait, il est ici question du taux d'imposition auquel nous sommes assujettis. Lorsqu'on est en affaires aujourd'hui, on amortit l'équipement de son usine. Cet amortissement est déduit de la facture fiscale de l'année en cours. Ce que nous préconisons — et c'est une formule qui s'est déjà appliquée au Canada — c'est qu'on puisse faire une dépense d'immobilisations, en accélérer l'amortissement et en déduire une plus grande partie dès la première année. L'impôt versé à Ottawa sera effectivement inférieur pour cette année-là. La facture fiscale sera moins élevée, mais la société aura investi dans une nouvelle technologie. Selon la structure fiscale en place, le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial recevra ses recettes fiscales à une date ultérieure — le report sera peut-être de deux ou trois ans, mais ces recettes vont arriver tôt ou tard. Le résultat, c'est qu'au lieu d'avoir des entreprises qui n'investissent pas, qui vont fermer leurs portes et qui vont provoquer toutes les difficultés économiques et sociales qu'occasionnent les fermetures, on aura des entreprises dotées d'une technologie de pointe et d'une forte assise industrielle, en particulier dans le secteur manufacturier.
Quand on fabrique et qu'on exporte, on est exposé à la force du dollar canadien, aux fluctuations des devises et au prix élevé de l'énergie. Il faut beaucoup d'énergie pour fabriquer un produit et pour le commercialiser, et le fabricant est confronté, comme tout le monde, à une concurrence mondiale féroce. Ce sont là des problèmes fondamentaux qui touchent toutes les entreprises manufacturières, et je suis sûr qu'on vous en a parlé tout au long de votre tournée. Vous allez encore en entendre parler. Les industries seront peut-être différentes, mais elles connaissent toutes les mêmes problèmes.
Il s'agit là, à notre avis, d'un élément fondamental qu'il faut intégrer à notre secteur manufacturier. Le Canada doit faire preuve d'un plus grand dynamisme. La législation fiscale ne doit pas être conçue pour procurer à l'État un maximum de recettes, quitte à ce que les entreprises ne puissent plus réinvestir. Ottawa dispose d'excédents considérables. De toute évidence, les finances sont bien gérées, mais si le Canada veut se montrer progressiste et déterminé — c'est effectivement ce dont le secteur manufacturier a besoin — il doit adapter sa structure fiscale en conséquence.
Prenons l'exemple de la déduction pour amortissement sur les bâtiments des usines: avec le taux d'amortissement actuel de 4 p. 100, il faut 57 ans pour amortir 90 p. 100 de l'immobilisation. Avec un taux dégressif de 30 p. 100, neuf ans suffirait à amortir environ 95 p. 100 de l'immobilisation. Nous nous berçons d'illusions passéistes en pensant qu'on peut amortir des immeubles à un rythme aussi lent. Il n'y a plus rien, aujourd'hui, qui fonctionne encore à cette vitesse. Le pays a une occasion extraordinaire à saisir, à condition que les bonnes décisions soient prises.
À l'heure actuelle, en vertu des règles relatives aux biens prêts à être mis en service, si les propriétaires d'une usine de transformation de poisson, d'une usine d'automobiles en Ontario, d'une usine de pâte et papier en Colombie-Britannique ou d'un navire décident de faire un investissement majeur, ils ne peuvent commencer à amortir cet investissement qu'une fois que celui-ci entre en service, c'est-à-dire au bout de 10, 18 ou 24 mois. Ils ont dépensé de l'argent, ils ont assumé tous les coûts, mais ils ne peuvent pas déduire d'amortissement de leur facture fiscale. Autrefois, c'est la règle du « prêt à l'emploi » qui s'appliquait.
Si je décide, à la Saint-Sylvestre, de dépenser... Prenez n'importe quel chiffre. M. MacLeod décide à la Saint-Sylvestre d'acheter un nouveau navire. Il va faire une bonne affaire — disons 50 millions de dollars. Il pourrait prendre l'amortissement sur ce navire au titre de l'année en cours pour le déduire de son revenu imposable. Il a pris un engagement.
Pourvu que l'engagement soit pris, que le bon d'achat soit signé et qu'un contrat ait été conclu, il peut commencer à amortir le bien acheté. Même s'il n'en a pas encore pris possession, il peut commencer à l'amortir dès aujourd'hui, après 18 mois ou 24 mois.
C'est une forme de financement. C'est du financement intelligent. C'est ce qui se fait dans d'autres parties du monde. Cette méthode n'est pas passible de droits compensateurs et n'est pas considérée comme une forme de subventionnement. Elle est en pratique dans d'autres parties du monde.
Je pense que nous laissons passer une occasion en or: a) il faudrait modifier le taux d'amortissement et faire preuve d'une grande détermination; et b) si vous réussissez à faire modifier la loi, il faudrait veiller à ce que l'investisseur puisse bénéficier de cet amortissement dès qu'il a pris un engagement, et non pas lorsqu'il va pouvoir utiliser le bien acheté. C'est un changement subtil mais considérable quant au succès de l'investissement.
Toujours en ce qui concerne l'amortissement, nous appliquons la règle des six mois. Au titre de l'année où l'on achète un bien, on ne peut déprécier celui-ci que pour une période de six mois. Abolissons cette règle; faisons en sorte que dès l'achat du bien, on puisse l'amortir de façon très énergique. On ne pourra peut-être pas le faire dans tous les secteurs, mais le secteur manufacturier, qui exporte et qui nécessite beaucoup d'investissements, devrait être favorisé à cet égard.
Voilà notre exposé. J'espère ne pas avoir accaparé votre temps de façon excessive. J'aurais quelques autres arguments concernant l'accélération du taux d'amortissement.
En ce qui concerne le pouvoir de régénération au Canada, nous pensons qu'il faut résolument aider les gens qui veulent réinvestir dans la biomasse, ainsi que les secteurs qui disposent de déchets de bois, notamment celui des pâtes et papiers. Lorsqu'ils modifient leur usine pour utiliser la biomasse ou l'énergie éolienne, ils devraient obtenir un traitement de faveur.
Tout le monde se soucie de l'environnement, de l'écologie, mais l'énergie éolienne coûte très cher. Il faut se montrer tout à fait résolu et proposer un régime fiscal qui permettra d'amortir l'investissement éolien dès la première année, peut-être même à 150 p. 100, de façon à attirer les investisseurs vers ce domaine à forte intensité de capitaux. Autrement, il ne se passera rien. L'énergie est trop coûteuse et elle n'est pas pratique pour l'industrie.
J'ai une brève explication concernant le piégeage du carbone. Le Canada bénéficie de 120 millions d'hectares de forêt. On peut y piéger 100 millions de tonnes de dioxyde de carbone par an. Mais le gouvernement a pour cela trois choses à faire. Tout d'abord, il faut réglementer les émissions de dioxyde de carbone. Il faut en déterminer les niveaux futurs et mettre cartes sur table, de façon que chacun puisse planifier. Il faut également permettre l'échange des crédits de carbone. Il faut créer un marché à cet effet. Ou bien, on pourrait créer un système de compensation où ces crédits pourraient être échangés; à notre avis, voilà l'essentiel.
Je ne vais pas parler des accords commerciaux avec l'Association européenne de libre-échange. Don et Paul ont fait le point sur la question, et je n'y reviendrai pas.
Mon sujet suivant concerne l'acquisition de connaissances et l'amélioration de la productivité de la main-d'oeuvre canadienne. Je recommande au gouvernement du Canada de créer une catégorie de revenus non imposables pour les incitatifs accordés aux employés. Un employé pourrait recevoir un maximum de prime non imposable de 2 500 $, sous réserve qu'il ne gagne pas plus, par exemple, de 50 000 $ par an. Il faut que tout le monde pense davantage à la productivité, et c'est l'argent qui motive. Ce n'est pas tout, mais il faudrait susciter plus d'enthousiasme. Voilà donc la proposition que je veux formuler.
Supposons, par exemple, qu'on offre actuellement un blouson de 50 $ à un employé qui a battu un record de production ou de sécurité. Il existe actuellement deux catégories de 700 $ par an. Si quelqu'un reçoit un cadeau de 50 $, ce montant sera imputé à la catégorie des 700 $ non imposables. Il faudrait l'éliminer, et la remplacer par une catégorie d'un montant global de 700 ou 1 000 $ qui pourrait servir à remercier un employé pour ses efforts en matière de santé, de sécurité ou de productivité.
Il faudrait montrer davantage ce que l'on fait. Soyons fiers de nos réalisations. Il faut fêter les victoires et les faire connaître à tout le monde. Si quelqu'un gagne un prix de sécurité ou de production, ça ne devrait pas être pour lui un fardeau fiscal. Il ne devrait pas recevoir de T4. J'estime que l'avantage ne devrait pas être imposable. Il faut faire preuve de hardiesse dans ce domaine.
En ce qui concerne la santé et la mieux-être, nous préconisons une formule proactive. Employeurs et employés devraient être récompensés de façon différente. Le gouvernement devrait l'admettre et favoriser une plus grande participation de l'employeur à des programmes certifiés de mise en forme physique, d'abandon du tabagisme ou de perte de poids en lui accordant une exonération fiscale lorsqu'il rembourse à ses employés leurs frais d'inscription à ces programmes. L'employeur qui propose des programmes de ce genre...
Les employés de notre société peuvent, à titre volontaire, consulter un médecin une fois par an avec leur conjoint. Une fois par an, ils peuvent faire analyser leur sang, vérifier leur cholestérol et examiner toutes leurs fonctions vitales. Soixante-dix pour cent de nos employés sont des cols bleus et bien souvent, quand ils vont consulter un médecin, il est trop tard. Nous disons non, il faut...
Vous me faites signe d'arrêter, monsieur le président.
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Nous vous demandons de préserver le statu quo jusqu'à ce que vous obteniez une réponse sur les avantages ou les inconvénients de l'accord pour le Canada. Nous avons entendu dire que ce projet n'avait jamais été soumis au Cabinet. Comme vous le savez, il y a littéralement des centaines de propositions qui circulent dans l'administration fédérale. Cet accord a été évoqué auprès de ministres des gouvernements précédents ainsi que du gouvernement actuel. Dans l'immédiat, ce que nous souhaitons...
Je suis certain que vous rencontrez toutes sortes de gens qui vous disent: « Il faut tout changer, sauf notre petit créneau à nous ». Et nous ne voulons pas faire d'ironie ni en faire toute une histoire, mais le véritable problème, c'est que nous n'avons jamais réussi à obtenir la moindre analyse des avantages de cet accord pour l'ensemble du pays, que ce soit par les canaux officiels ou autrement. Nous pourrions comprendre si quelqu'un nous disait que l'accord offre des perspectives considérables à l'aéronautique, à l'industrie pharmaceutique, à l'industrie des pâtes et papier ou à quelque autre secteur. Mais nous n'avons jamais pu obtenir une telle analyse.
Des hauts fonctionnaires nous ont dit que trois produits canadiens pourraient être avantagés par cet accord: ce sont la viande de cheval, les radis et les frites. Je n'invente rien. Cela figure officiellement dans les comptes rendus des réunions avec des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Le problème, c'est que nous n'avons jamais pu obtenir la moindre explication. Notre secteur n'est pas le seul à se poser des questions. Je sais que ce dossier intéresse également les gouvernements de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Écosse et, je crois, du Québec.
La véritable préoccupation, dans le milieu où je travaille, ce sont les navires d'approvisionnement. Il faut comprendre que l'exploitation pétrolière et gazière en haute mer est une industrie transnationale. Il faut des organismes et des sociétés multinationales disposant de ressources importantes pour faire de la prospection et de l'exploitation. Nous le comprenons. Il y a des sociétés internationales qui travaillent ici. Nous avons réussi à en concurrencer plusieurs, et on constate aujourd'hui que cette industrie nous apporte un avantage économique qui commence à prendre de l'importance. Les bateaux d'approvisionnement font partie intégrante de ce secteur d'activités. Les plates-formes ont besoin de matériel électronique et hydraulique, elles ont besoin de combustible, elles ont besoin de denrées alimentaires pour leurs employés et elles ont besoin de travailleurs spécialisés. Elles sont fournies en partie par mes sociétés de Terre-Neuve et de Nouvelle-Écosse mais surtout par celles de la Nouvelle-Écosse. Ce qui nous préoccupe véritablement, ce sont les bonnes vieilles habitudes, à savoir que l'on s'adresse de préférence à quelqu'un que l'on connaît. Et nous avons de bonnes raisons de penser que c'est ce que vont faire les Norvégiens.
Le deuxième élément, c'est que leurs navires sont déjà payés. Ces navires ont été construits à la faveur d'une politique très protectionniste. Il est impossible de pénétrer le marché norvégien. Et à ma connaissance, les ministères de l'Industrie, des Affaires étrangères et du Commerce international n'ont aucun plan pour faire tomber ce mur.
Je ne peux pas me prononcer au nom d'Atlantic Towing ou de Secunda Marine, mais je sais que Secunda a bien su faire face à la concurrence dans le monde entier, sauf qu'elle ne peut pas faire d'affaires en Norvège. Le ministère des Affaires étrangères ne nous dit pas comment nous allons pouvoir nous introduire en Norvège, mais il ne nous cache rien de la façon dont les Norvégiens vont s'introduire au Canada. Voilà notre problème.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens également à remercier tous les témoins de s'être joints à nous.
Je dois vous dire qu'en tant que personne qui adore la viande chevaline, les radis et les frites, je pense que nous devrions examiner d'un peu plus près cet accord de libre-échange.
Tout comme mon collègue, je dois dire que c'est vraiment la première fois que j'entends parler de cet accord de libre-échange. Je vous remercie de nous en avoir parlé.
Avez-vous des idées? Comme je viens d'Oshawa, je suis bien au courant de l'accord de libre-échange avec la Corée et de ce qu'en pense le secteur automobile. Je tiens également à ce que vous sachiez que j'ai parlé aux ministres compétents, et si cet accord de libre-échange n'est pas équitable, ils ne veulent certainement pas conclure un accord qui sera mauvais pour le Canada.
J'ai une question à ce sujet. Avez-vous des idées à proposer à propos d'un accord de libre-échange qui serait plus équitable, par exemple, dans le cadre des mécanismes de règlement des différends et des obstacles non tarifaires dont vous avez parlé? C'est l'une de mes questions.
Ma deuxième question, c'est que le nouveau gouvernement a annoncé l'acquisition de matériel de défense d'une valeur de 13 milliards de dollars. Je me demandais ce que cela signifie pour vous et si vous avez des propositions quant à la stratégie à suivre à cet égard.
La troisième chose dont je voulais vous parler, c'est que vous dites qu'il faut prendre des mesures très énergiques en ce qui concerne la déduction pour amortissement, et je suis tout à fait d'accord avec vous. Lorsque nous avons de tels excédents, nous considérons qu'il s'agit d'une fiscalité excessive, et nous aimerions que cet argent reste dans les poches des entreprises et de ceux qui créent des emplois.
Vous avez mentionné l'idée de l'acquisition des compétences pour les catégories non imposables de mesures incitatives à l'intention des employés, de même que l'aspect de la santé et du bien-être. Je me demandais si vous pouviez nous fournir plus de précisions à cet égard, parce que je considère que ce sont de très bonnes idées.
Ce sont mes trois questions pour celui d'entre vous qui voudrait y répondre en premier.
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J'essaierai de répondre à la première concernant l'AELE.
J'aimerais simplement vous situer un peu le contexte. Il y a environ quatre ans, le gouvernement précédent a proposé de conclure un accord de libre-échange avec l'Association européenne de libre-échange. Appuyés par le Parti conservateur, le Bloc, le NPD, ainsi que chaque gouvernement provincial de la région atlantique du Canada, nous avons réussi à convaincre le ministre de l'Industrie de l'époque que cela n'avait aucun sens. Ce projet a été suspendu. Nous pensions que le dossier était clos. Or, avec l'arrivée du nouveau gouvernement, les fonctionnaires ont présenté à nouveau cette proposition pour qu'on l'étudie et qu'on en discute, et il y a environ trois semaines, les négociations ont repris avec l'AELE.
Nous avions mis fin à ce projet déjà. Aujourd'hui on le ressuscite, donc nous sommes en train de revivre le même scénario, si je puis dire. Tous ceux à qui nous parlons considèrent que ce projet n'a aucun sens, et que nous devons y mettre fin. Donc, on consacre énormément d'énergie, de temps et d'investissement à essayer de communiquer cette information.
En ce qui concerne le déroulement du processus, et lorsque l'on essaie d'aborder les enjeux, je suppose qu'il est impossible d'avoir une négociation commerciale avec un ministère de façon isolée, particulièrement lorsque votre concurrent a établi un certain nombre de cadres stratégiques qui appuient l'industrie. Donc, tout d'abord, il faut que le ministère de l'Industrie sache quelles en sont les conséquences. Nous lui avons demandé qui seront les gagnants et qui seront les perdants et si une analyse a été faite. La réponse c'est qu'il l'ignore, et non. C'est la première chose qu'il faut faire.
Le ministère du Commerce international doit rassembler cette information et décider s'il est raisonnable, compte tenu des paramètres fournis par l'information dont nous disposons, de poursuivre le processus. Y a-t-il des gagnants? Y a-t-il des perdants? Quels en sont les avantages? Ce travail n'a pas été fait.
Certains des autres avantages stratégiques dont dispose la Norvège, par exemple, consistent en un arrangement fiscal à l'intention des sociétés qu'on appelle une entreprise KS. Essentiellement, cela est plus ou moins équivalent à un arrangement semblable à une société de commandite qui permet à des investisseurs privés d'investir dans un navire. Elles peuvent alors déduire de leur autre revenu l'amortissement et les pertes à un taux élevé de 150 p. 100 de sorte qu'elles sont en mesure d'attirer des investissements dans une entreprise à prédominance de capital.
Il y a aussi des questions comme celles que j'ai abordées en ce qui concerne les règles d'origine. Le négociateur commercial ne comprenait même pas ce que cela signifiait ni les conséquences d'une telle chose jusqu'à il y a environ deux semaines, lorsque je me suis mis à lui écrire pour lui expliquer en quoi consistait le processus. Il faut faire une analyse à l'échelle du gouvernement de l'impact que cela aura sur l'élimination de la politique de tarif élevé, compte tenu des cadres stratégiques en vigueur dans le pays avec lequel nous négocions un accord de libre-échange. Si ce pays a quatre ou cinq politiques différentes et que nous éliminons celles dont nous disposons ici, il faut alors qu'on dispose au moins d'outils équivalents pour pouvoir exercer une concurrence contre les concurrents étrangers qu'on amène sur notre propre marché.
Ce serait ce que je propose.
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Il faut comprendre que la mer du Nord comporte deux secteurs distincts: le secteur britannique et le secteur norvégien. Nous travaillons sans problème dans le secteur britannique. Il est ouvert, il est régi par les règles de la CEE pour ce qui est de l'approvisionnement et ainsi de suite, et cela élimine le protectionnisme. En ce qui concerne le secteur norvégien, personne n'y travaille à moins qu'il ne reste absolument aucun navire norvégien pour faire le travail.
Il est très difficile de réglementer une mentalité. Il faut comprendre à quoi correspond le transport de marchandises en haute mer pour les Norvégiens. Il y a 4 millions de personnes qui vivent dans un État unitaire dans une petite zone géographique. C'est l'équivalent du pétrole pour l'Alberta, du secteur automobile pour Oshawa, les pâtes et papier pour certaines régions du Québec, etc. C'est une industrie extrêmement importante et depuis 30 ans la Norvège a établi un marché extrêmement efficace et extrêmement protégé grâce au processus de réglementation. Il n'existe aucun tarif, et il n'existe probablement rien par écrit qui empêche les exploitants étrangers d'y travailler, mais ils ne le font pas.
En Norvège, il existe une société pétrolière réglementée par le gouvernement, qui s'appelle Statoil et qui appartient à 80 p. 100 au gouvernement norvégien. Cette société qui participe au développement possède le droit de participer au processus d'approvisionnement et à l'approbation des projets de développement. De plus, il existe en Norvège une direction des hydrocarbures qui est un organisme gouvernemental semblable à nos offices des hydrocarbures extracôtiers, qui réglemente le développement des régions extracôtières. Donc, lorsqu'un promoteur se présente, la direction établit un plan de développement qui comporte toutes sortes d'éléments comme des considérations d'ordre environnemental, la méthode de forage de développement, l'ampleur du projet, le contenu et ainsi de suite.
Les Norvégiens sont très prudents et approuvent des projets qui sont dans l'intérêt de la Norvège. Si un promoteur prévoit utiliser des navires norvégiens, des plates-formes en mer norvégiennes, etc., son projet sera approuvé. Très souvent, il y aura des retards dans le développement s'il n'existe pas de capacité dans le secteur norvégien. Supposons qu'il n'y ait plus de place dans un chantier naval. Le projet ne sera approuvé alors qu'au prochain cycle, dans six mois ou un an, lorsqu'il y aura de la place dans le chantier. J'appelle cela Norway Inc., et c'est le produit d'une culture et d'une mentalité homogènes, et de l'importance que revêt le secteur de la construction navale et des ressources pétrolières et gazières pour ce pays. Ils considèrent que personne d'autre ne peut faire un aussi bon travail qu'eux et c'est pourquoi ils agissent ainsi.
Il suffit de regarder le secteur britannique et le secteur norvégien. Le secteur norvégien est établi, dirigé et exploité par la Norvège. Un point c'est tout. Pour sa part, le secteur britannique de la mer du Nord est ouvert au monde entier.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue en Nouvelle-Écosse. Je tiens à vous remercier vivement de nous rendre visite à Halifax. Je me réjouis de l'occasion que cela me donne de vous faire part de quelques-unes des idées des manufacturiers de la Nouvelle-Écosse.
Le comité est sans doute au courant du travail effectué par les Manufacturiers et exportateurs du Canada, les MEC. Ainsi, vous avez dû entendre parler de notre initiative de consultation 20/20, lancée il y a quelques années. Notre premier vice-président, M. Jayson Myers, a déjà témoigné devant votre comité et son apport a été pris en compte dans votre rapport d'étape de juin 2006.
Ce dont je peux vous parler aujourd'hui, c'est du point de vue des manufacturiers et exportateurs de la Nouvelle-Écosse. D'entrée de jeu, je dirai une évidence, à savoir qu'en ce qui concerne la fabrication, ce n'est ni l'Ontario ni le Québec ici, et qu'à cause de cela, on nous connaît mal. Même certains des acteurs sociaux de la Nouvelle-Écosse ignorent l'apport et l'incidence du secteur manufacturier de notre province.
Dans une population de moins d'un million de personnes, les manufacturiers, y compris mon collègue et les autres témoins entendus aujourd'hui, fournissent 55 000 emplois bien rémunérés et offrant d'excellents avantages sociaux. Notre secteur constitue donc une part considérable de notre économie, à peu près 10 p. 100 de l'activité économique. En proportion, c'est l'équivalent du même secteur en Alberta et en Colombie-Britannique, ce qui n'est donc pas négligeable. Notre tâche à nous est de rappeler cela à tous nos intervenants, y compris au gouvernement. Par conséquent, je vous remercie de nous avoir invités aujourd'hui.
Pour revenir à nos différences régionales, j'aimerais souligner le fait qu'en Nouvelle-Écosse, le secteur manufacturier est largement rural, comme c'est probablement aussi le cas dans d'autres régions des provinces de l'Atlantique. Nous sommes aussi représentés dans la région urbaine de Halifax, mais surtout dans les régions rurales. Nos entreprises là-bas constituent une part importante de l'économie de ces municipalités et de la province. Je le répète, notre tâche est de rappeler ces faits à tous les décideurs.
Bien entendu, l'un des principaux objectifs des MEC est de refléter l'intérêt et les préoccupations de nos membres. Nous le faisons de diverses manières. À ce propos, je me reporterai ici à un document, malheureusement non disponible en français, car nous n'avons eu qu'un préavis de trois jours, mais dont je recommande vivement la lecture. Il s'intitule Balancing Business in Global Markets. Vous le connaissez sans doute. Il est le fruit de l'enquête annuelle qu'effectuent les MEC au sujet des questions qui préoccupent la gestion.
Le document est très complet. Il comporte à peu près 1 000 réponses obtenues des manufacturiers dans l'ensemble du Canada. Certaines des réponses les plus récentes vous intéresseraient sans doute. Elles pourraient par exemple permettre de mettre à jour votre rapport de juin dernier.
Vous ne serez guère étonnés d'apprendre que des prix de revient à la hausse sont le plus lourd fardeau du secteur manufacturier. Bien entendu, cela comprend les taxes et le prix de l'énergie; rien de surprenant à cela. Il faut aussi ajouter un autre problème, provenant celui-là des fluctuations du dollar canadien.
Par ailleurs, dans l'ensemble de notre pays, on se plaint d'une pénurie de travailleurs qualifiés, mais le problème est particulièrement aigu ici, en Nouvelle-Écosse. Sur le plan démographique, notre main-d'oeuvre est vieillissante et cela est une source de grande préoccupation. Nos membres nous signalent avoir de la difficulté à recruter même les travailleurs non qualifiés. Ici, dans l'Est, les travailleurs, tant les qualifiés que les non-qualifiés, sont très attirés par l'effort remarquable de l'économie albertaine. Mes collègues des autres régions de l'Atlantique font face aux mêmes problèmes.
Si l'occasion nous en est donnée plus tard, j'aimerais vous parler des initiatives que notre organisme a prises pour résoudre cela. L'une s'appelle « icosmo », un mécanisme en direct grâce auquel nous jumelons nos entreprises et celles de l'Alberta. L'autre est une rencontre très ciblée de vendeurs et d'acheteurs qui se tiendra en Alberta et que nous allons appuyer. Encore une fois, notre mission et, tout particulièrement la mienne, est de favoriser la prospérité de nos entreprises ici même tout en leur donnant aussi plus de débouchés ailleurs au Canada.
Pour revenir à la série de difficultés auxquelles nous faisons face et qui nous préoccupent le plus, l'effet cumulatif des taxes et impôt est un grave problème, car bien sûr, il fait monter le coût de la main-d'oeuvre. Vous pouvez comprendre que cela nous affecte beaucoup. En outre, nous sommes préoccupés par l'éventualité d'un ralentissement de la croissance américaine car cela aurait de lourdes conséquences pour notre situation.
J'aimerais aussi vous parler de la collaboration entre 21 associations industrielles ayant des liens avec le secteur de la fabrication et les MEC, car cela mérite toujours qu'on s'en réjouisse. Ces groupes représentent chacun des grands secteurs de la fabrication, dont la construction automobile, l'aérospatiale, l'exploitation minière, l'exploitation forestière et les produits de consommation. Ils ont préparé un mémoire et une lettre à l'intention du premier ministre. La lettre a été envoyée le 7 courant. Je vous l'ai fournie en français et en anglais, et j'espère que vos membres la liront.
J'aimerais brièvement en parcourir les recommandations. Vous êtes sans doute au courant de celle demandant une déduction pour amortissement de deux ans pour l'investissement en nouvelles technologies de fabrication et de transformation et dans les technologies énergétiques, environnementales, de l'information et des communications qui y sont associées.
Une autre propose que le gouvernement maintienne son engagement de réduire les taux d'imposition des sociétés à 18,5 p. 100 d'ici 2011 et entreprenne de le réduire de 1,5 p. 100 supplémentaire à 17 p. 100 d'ici 2012.
Le groupe recommande aussi d'améliorer le crédit d'impôt à la recherche scientifique et au développement expérimental, appelé le RS&DE, pour rendre les crédits remboursables, les exclure du calcul de l'assiette, permettre la collaboration internationale en R-D et inclure les coûts de brevetage.
Il demande ensuite un crédit d'impôt à la formation pouvant être crédité contre les primes d'assurance-emploi.
En dernier lieu, le groupe recommande d'appliquer la Loi sur les frais d'utilisation pour rendre le gouvernement davantage redevable et de demander aux ministères d'adopter des processus réglementaires compétitifs sur le plan international comme premières étapes d'un processus visant à rendre les régimes réglementaires plus efficaces, rapides et efficients.
J'espère que les membres du comité auront la chance de lire et d'étudier ce texte.
À l'échelle nationale, nous nous intéressons à certaines initiatives prises récemment par le gouvernement sur la côte Ouest lorsqu'il a annoncé l'Initiative de la porte d'entrée Asie-Pacifique. Notre organisme salue cette décision qui, à ses yeux, aidera considérablement le commerce canadien à devenir compétitif sur le plan international. Notre président national, l'honorable Perrin Beatty, a ensuite préconisé quelque chose qui viendrait en quelque sorte s'ajouter à cela, une stratégie de logistique nationale. À nos yeux, cela permettrait au Canada de jouer un rôle clé à l'échelle nord-américaine par rapport à cette grande initiative. Cette deuxième étape comprendrait non seulement les principaux intervenants mais aussi les manufacturiers, les expéditeurs, les ports et même les aéroports ainsi que les transports routiers et ferroviaires, les entreprises d'entreposage, les télécommunications et la sécurité à la frontière. Encore une fois, il s'agit de concevoir une stratégie de logistique nationale.
Dans la région de l'Atlantique, le transport maritime peut être le catalyseur du développement économique. Plus tard, lorsque vous effectuerez des visites sur le terrain, je crois que vous constaterez vous-mêmes nos avantages. Les ports libres de glace en sont certainement un ainsi que leurs coûts plus faibles et leurs temps de transit plus courts par rapport aux ports de New York et à d'autres situés sur le littoral nord-est. Nous sommes aussi en mesure d'élargir nos activités de transfert des conteneurs sur rail et de transfert direct à la barge ici à Halifax. Ailleurs en Nouvelle-Écosse, nous avons aussi la possibilité de construire des installations portuaires spécialisées de transbordement par eau; ce serait à Port Hawkesbury.
On trouve donc beaucoup d'avantages ici et, à notre avis, le transport maritime peut stimuler énormément l'économie régionale.
Je remercie le comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Je m'efforcerai à la concision, ne prenant qu'environ sept minutes, avec un peu de chance.
Je vais commencer par la principale préoccupation de presque chaque secteur de l'industrie canadienne: la pénurie de main-d'oeuvre. C'est du jamais vu pour notre génération et il est temps de s'en occuper sérieusement.
Dans dix ans, en Nouvelle-Écosse, le taux de chômage sera à zéro. Actuellement, à l'Île-du-Prince-Édouard, nous avons des travailleurs invités dans nos usines de transformation du poisson. Actuellement, au Nouveau-Brunswick, nous faisons venir d'Europe des travailleurs pour le camionnage à longue distance.
Nous sommes confrontés à cette réalité et il faut aujourd'hui trouver une solution. L'immigration n'est pas la solution. Si on s'y prend bien, l'immigration peut contribuer à régler le problème, mais ce n'est certainement pas la panacée.
Dans le bassin actuel d'immigrants, nous trouvons des gens qui nous ressemblent beaucoup pour ce qui est de l'âge, des compétences, de la répartition et de la classe sociale. Il nous faut des immigrants entrepreneurs plus jeunes, suivant un ancien modèle. Il faut bien examiner nos programmes de travailleurs invités, comme cette invitation récente faite aux Mexicains pour qu'ils s'inscrivent à un programme de travailleurs invités: c'est un bassin de travailleurs prêts au travail, qui font déjà partie de l'ALENA au moment où le Canada et les États-Unis sont confrontés à une grave pénurie de main-d'oeuvre.
Il faut que ce genre de choses soit facilité, et non pas compliqué. Il faut aussi envisager les avantages à long terme de nos efforts visant à hausser le taux de natalité au pays, un peu comme le Québec l'a fait, avec succès. Mais ce qui est plus immédiat et plus urgent pour le comité, c'est de se pencher sur le remaniement des nombreux programmes provinciaux et fédéraux destinés à résorber le surplus de main-d'oeuvre des années 70.
Prenons l'exemple de l'assurance-emploi, dont les prestations vont probablement au-delà des besoins. Nous avons accès à des prestations d'assurance-emploi à répétition, qui peuvent créer un mode de vie. Les prestations sont différentes selon les régions, de manière à ce que les gens restent dans des régions de faible chômage, mais ils ne sont pas aussi productifs qu'ils pourraient l'être. Il faut revoir nos fonctions publiques, beaucoup trop lourdes. Elles maintiennent en poste des gens qui pourraient être plus productifs dans le secteur privé. Il faut examiner de près, aussi, nos universités et le secteur de l'enseignement postsecondaire. Ils prennent souvent trop de temps pour enseigner les compétences dont nos jeunes ont besoin, et requièrent énormément de main-d'oeuvre pour y arriver, ce qui écarte ces deux groupes de notre bassin de main-d'oeuvre.
N'oublions pas que les diplômes universitaires ne sont pas nécessaires pour tous. Il n'y a pas que les ingénieurs en logiciel qui peuvent faire 100 000 $ par année. Penchons-nous aussi sérieusement sur les subventions en fonction de l'emploi et les prêts à remboursement conditionnel. Il nous faut des entreprises productives et non des programmes de création d'emplois artificiels. Il faudrait peut-être songer à récompenser la suppression d'emploi ou concentrer nos avantages fiscaux en fonction de l'importance de la production par employé, plutôt que sur le simple nombre d'employés.
Si chaque province réduisait la taille de sa fonction publique pour qu'elle corresponde à la moyenne nationale, il y aurait 133 000 travailleurs de plus prêts à l'emploi. Si les cinq provinces les plus à l'est avaient un taux de participation équivalent au taux national, nous aurions 156 000 travailleurs de plus, à l'échelle nationale. En plus de tous ces efforts, il faut cesser de pénaliser les personnes qui veulent travailler. Prenons l'exemple des retraités, qui perdent des prestations de retraite s'ils reviennent au travail. Leur taux effectif marginal d'imposition est élevé pour toute rémunération acquise après la retraite. On peut en dire autant des assistés sociaux qui reviennent au travail. Leur taux d'imposition est le plus élevé du pays. Dans certains cas, le taux effectif marginal d'imposition est de 100 p. 100 et on peut ainsi dire que chaque dollar gagné au travail est en fait perdu.
Au-delà de ces questions, il faut reconnaître que le vieillissement de la population et la pénurie de main-d'oeuvre ne sonnent pas le glas au Canada. La solution se trouve dans l'amélioration de la productivité. Nous parlons de productivité depuis plus d'une décennie, et il faut se demander comment il se fait que nous ne puissions pas encore nous réjouir d'avoir vu à l'avance ce qu'il nous fallait faire.
La réponse est toute simple. C'est le capital qui alimente la productivité et nos politiques actuelles ne favorisent pas l'investissement.
En moyenne, les taxes fédérales et provinciales sur le capital tournent autour de 4 à 6 p. 100, ce qui est mieux qu'aux États-Unis, où elles sont d'environ 40 p. 100. Nous prélevons en moyenne 36 p. 100, mais le taux effectif marginal d'imposition pour chaque dollar d'investissement supplémentaire est plus élevé que partout ailleurs. En effet, ailleurs, on encourage cet investissement supplémentaire. Ici, il est taxé. Voilà pourquoi nous avons le plus faible rendement sur les revenus fiscaux en pourcentage du PIB, pour le milieu des affaires. Il y a un écart de 1 à 1,5 p. 100 entre le Canada et les États-Unis entre l'investissement réel, et un écart semblable pour l'investissement en R-D.
Quand le capital s'enfuit et que la main-d'oeuvre est rare, on obtient des résultats négatifs. L'écart entre notre PIB par habitant et celui des États-Unis s'élargit plutôt que de se combler.
Quand on manque de capital et de main-d'oeuvre, il est clair qu'il faut faire une priorité de l'investissement judicieux. Il faut investir dans la recherche et le développement, les nouvelles technologies et les nouveaux secteurs industriels. Nous avons certainement fait des progrès dans ce domaine, n'est-ce pas? D'après une mesure que j'ai vue récemment, le Canada offre le meilleur régime fiscal pour la R-D au sein des pays du G-7: des crédits d'impôt, un amortissement fiscal accéléré et une définition plus large des coûts admissibles. Le problème, c'est que notre investissement dans la R-D est surtout axé vers les secteurs gouvernementaux et universitaires.
En 2003, les dépenses en R-D gouvernementales et universitaires étaient au même niveau que pour le secteur privé. Aux États-Unis, par contre, il y en a trois fois plus dans le secteur privé. Songez-y, en vous rappelant qu'on admet généralement que les universités ne sont pas douées pour la mise en marché. Elles se sont sans doute améliorées au cours des dernières années, mais c'est surtout grâce à une collaboration avec le secteur privé.
Il faut rééquilibrer l'investissement dans la R-D. Il peut y en avoir dans le secteur privé. Quand on pense à une mise en marché rapide et pratique, et à une application généralisée, il est préférable que la R-D se fasse dans le secteur privé. Un petit manufacturier d'un secteur de la Nouvelle-Écosse m'a récemment présenté cette idée. Il a proposé qu'on songe non seulement à augmenter les crédits d'impôt pour la R-D, mais qu'on les assortisse d'un autre crédit associé à la production. Ainsi, si un crédit d'impôt en R-D permet la création d'un produit qui est mis en marché, cet exercice donnera droit à une deuxième récompense. Voici son explication: « Vous faites de la R-D pour quelque chose de nouveau, vous recevez un incitatif. Vous produisez quelque chose de nouveau et vous recevez un incitatif ». Voilà pour l'innovation, la technologie, la fabrication. L'avantage supplémentaire, c'est que certains de nos manufacturiers actuels, même des PME, pourraient commencer à investir dans la R-D, ce qui susciterait plus d'innovation, plus d'investissement et plus de production.
Il reste que même avec un équilibre idéal entre la main-d'oeuvre, le capital et les mesures incitatives pour la R-D, il demeure encore difficile de mettre en marché les produits, et bien honnêtement, dans cette région, c'est souvent impossible. Par exemple, les ports de la côte Est sont devenus le parent pauvre dans l'expansion commerciale alimentée par le commerce en Asie. Mais des occasions d'affaires concrètes se présentent de notre côté avec les navires post-Panamax et post-Panamax plus, et d'autres encore plus grands, qui viennent répondre à la demande, sur nos deux côtes. C'est, encore une fois, une question de marchés.
Une route à double voie vers le centre du pays nous éloigne de nos marchés plutôt que de nous en rapprocher. Le CN l'a reconnu en augmentant son service ferroviaire vers le Midwest. Il faut faire de même en augmentant la capacité de transport routier et aérien et en améliorant la réglementation de manière qu'elle soit plus cohérente afin de permettre la circulation des marchandises aux frontières provinciales, nationales ainsi qu'entre les États américains. Ainsi, il nous faut pouvoir charger un train routier, soit un camion avec deux remorques, à Yarmouth ou à Halifax et le faire rouler jusqu'à Buffalo sans un détour de 500 ou 1 000 milles vers le nord pour éviter les routes mal entretenues ou celles sur lesquelles ne peuvent circuler ces véhicules. Dans notre région, par exemple, ces véhicules ne peuvent circuler qu'entre Moncton et Saint John.
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Je tiens à remercier le comité, monsieur le président, de me donner cette occasion de vous parler.
Comme je suis de New Glasgow, j'imagine que c'étaient à des gens comme moi que faisaient allusion les deux témoins précédents quand ils parlaient de la Nouvelle-Écosse rurale. Je vous demande votre indulgence.
Parlons un peu de Maritime Steel. C'est une société manufacturière installée en Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard. À Dartmouth, nous produisons des ponts et d'autres structures en acier. Nous avons une fonderie moderne à New Glasgow, en Nouvelle-Écosse. Nous fabriquons du matériel de transformation des aliments et du poisson ainsi que d'autres structures en acier inoxydable à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous venons de terminer la production de matériel dans une centrale nucléaire pour une société albertaine.
Maritime Steel exerce des activités à New Glasgow depuis 104 ans et y emploie actuellement 150 personnes. Nous avons à peine 25 employés à Dartmouth, actuellement, à cause d'un ralentissement du secteur des structures et nous avons 35 travailleurs à l'Île-du-Prince-Édouard. Le secteur des structures est en déclin. La fonderie est toutefois très occupée, de même que nos installations de Charlottetown.
Parlons du climat commercial. Maritime Steel and Foundries Limited a été durement touché par un marché compétitif qui en a limité la croissance au cours des cinq dernières années. Actuellement, la fonderie a réussi à porter ses ventes à un niveau record, malgré un déclin à long terme de ce secteur et malgré les conditions récentes du marché.
Dans les années 60, il y avait environ 1 000 fonderies au Canada. Il n'y en avait plus que 500 dans les années 80 et elles sont maintenant au nombre d'environ 150. Bon nombre de fonderies du Haut-Canada, ou de l'Ontario, si vous préférez, ont récemment fermé leurs portes et cela donne un idée des problèmes que nous vivons.
Je vais vous décrire les circonstances qui ont un effet négatif sur notre organisation, et qui pourraient continuer d'en avoir. Les deux témoins précédents y ont déjà fait allusion.
Comme nous exportons la plupart de nos produits aux États-Unis, la valeur relativement élevée de notre devise et la rapidité de son appréciation ont eu une incidence tant sur nos recettes que sur nos marges de profit.
La concurrence de pays disposant d'une main-d'oeuvre à faible coût, comme la Chine, l'Inde, le Mexique, sont une menace constante pour notre croissance et notre prospérité.
L'énergie coûte cher, tant pour le secteur du transport qu'en termes de coût direct. Cela coûte aussi de plus en plus cher de satisfaire aux normes réglementaires, particulièrement compte tenu du resserrement des règles environnementales, ce qui fait augmenter le coût de nos produits.
La pénurie de main-d'oeuvre dans l'est du Canada, en raison de la migration des travailleurs qualifiés et techniques vers l'Ouest, a aussi réduit notre compétitivité.
La concurrence des sociétés américaines situées plus près de notre clientèle signifie que nos marges de profit s'amenuisent, compte tenu du coût de transport de nos produits vers ces marchés.
Nous avons quelques suggestions pour aider les manufacturiers canadiens à être concurrentiels dans cet environnement.
Nous proposons que les collèges communautaires soient incités à donner davantage de formation industrielle formelle, destinée aux travailleurs de la production, et que cela se fasse en collaboration avec l'industrie et les syndicats, là où les travailleurs qualifiés sont syndiqués. Nous avons vu en ce sens de belles réussites dans les provinces de l'Atlantique, des précédents qui ont permis à des prestataires d'assurance-emploi et d'aide sociale de réintégrer la population active.
Nous proposons aussi d'encourager et de simplifier les programmes de partenariat entre l'industrie et le secteur universitaire en matière de R-D. Il s'agit de développer une culture propice au partage réciproque des immobilisations et de l'expertise, afin de renouveler le secteur de l'acier, dans notre région du pays, qui était autrefois un employeur important pour les Canadiens.
Troisièmement, il faut s'assurer que les manufacturiers canadiens auront accès à des combustibles à prix modique, ce qui leur donnerait un avantage concurrentiel. Je vais vous donner un exemple précis, et qui se rapporte à Maritime Steel: un gazoduc passe à quelques milles de notre usine de New Glasgow et nous, ainsi que d'autres entreprises du secteur, n'y avons pas accès. Cela signifie que nous dépendons de propane à coût plus élevé pour une bonne partie de nos besoins de fabrication. Chaque dollar supplémentaire que vous payez en combustible réduit la marge de profit et la compétitivité sur le marché.
Quatrièmement, nous proposons que le gouvernement aide les entreprises canadiennes au moyen d'études de marché et d'aide technique supplémentaire pour faire correspondre la capacité de production du Canada atlantique et d'ailleurs au Canada avec les besoins industriels de l'Alberta. L'Association des manufacturiers canadiens travaille d'ailleurs à une mesure de ce genre, que j'applaudis. Nous espérons que cela sera avantageux pour les entreprises des Maritimes, mais aussi du Québec et de l'Ontario, tout en satisfaisant l'insatiable appétit de croissance de l'Alberta.
Cinquièmement, il faut voir à ce que la réglementation environnementale soit fondée sur des données scientifiques solides. Dans bien des cas, nous constatons que notre province a tendance à adopter des règles ou des mesures semblables à celles d'autres administrations, qui nous touchent directement, qui nous coûtent très cher.
Encore une fois, merci de m'avoir donné l'occasion de vous parler. Voilà qui termine mon exposé.