:
C'est un honneur d'être invité à parler aux députés, aux membres de ce comité. Je vous remercie de cette invitation, et je suis frappé par le fait qu'il y a probablement des personnes ici qui en savent autant que moi sur les chemins de fer et les transports. Je tiendrai compte de cela dans mon allocution et mes explications.
Le secteur ferroviaire canadien est un élément clé de l'économie canadienne et du développement du Canada. Comme le savent tous les Canadiens, ce sont les chemins de fer qui ont uni ce pays. Les chemins de fer transportent environ 24 p. 100 de toutes les exportations en provenance du Canada, et également une part importante du fret interne, environ 60 p. 100 des marchandises en tonnes.
Ce que l'on sait moins à propos du secteur ferroviaire au Canada, c'est que malgré tous les débats et les discussions ainsi que les changements en matière de technologie et d'infrastructure, nous avons l'un des chemins de fer les plus efficaces au monde. Les taux de fret canadiens sont un peu plus bas que les taux américains, ce qui veut dire que nous avons l'un des coûts de fret en tonne-kilomètre qui est l'un des plus bas au monde. Notre transport ferroviaire des marchandises est vraiment très efficient.
Une des raisons pour cela, bien entendu, c'est que certains de nos produits, comme les céréales, doivent parcourir des distances qu'on ne retrouve dans aucun autre pays au monde pour arriver jusqu'au port, sauf peut-être en Russie. C'est pour cela que nous devons nous assurer de notre compétitivité en tout temps.
L'Association canadienne des fournisseurs de chemins de fer compte environ 131 membres provenant des quelque 500 petits et grands — parfois très grands — fabricants et fournisseurs. Nous fournissons les services et les produits qui permettent aux chemins de fer canadiens de fonctionner. Afin de maintenir notre part de marché, nous nous assurons de fournir des produits novateurs qui répondent de façon précise aux besoins des chemins de fer canadiens. Cela est lié, par exemple, à l'efficacité énergétique, au fait d'être capable de fonctionner en hiver, d'avoir des produits qui marchent même lorsqu'il fait -40 ou -50 degrés. En effet, certaines des températures les plus basses enregistrées au Canada l'ont été dans le nord de l'Ontario, soit aux alentours de -70 degrés. Il n'est pas facile d'avoir des lubrifiants et des systèmes d'aérofreins qui fonctionnent avec de telles températures, mais nos chemins de fer réussissent à le faire, et nous sommes les gens qui leur fournissent les matériaux et l'équipement qui rendent cela possible. Nous sommes également en mesure d'exporter nos produits vers d'autres pays. Bien entendu, les États-Unis sont l'une de nos plus grandes sources d'activités.
Les membres de l'Association canadienne des fournisseurs de chemins de fer comptent plus de 60 000 employés. C'est un bassin de main-d'oeuvre important. Nous employons probablement plus de personnes que les chemins de fer. En d'autres termes, la main-d'oeuvre nécessaire à fabriquer les pièces utilisées par les chemins de fer, et cela va de la peinture jusqu'au génie-conseil, est encore plus importante que la main-d'oeuvre requise pour les chemins de fer eux-mêmes.
Toutes les mesures législatives prises par le gouvernement relatives au transport, à l'industrie et aux impôts affectent nos membres et notre industrie. Il est important que nous coopérions.
C'est notre toute première allocution devant ce comité, mais j'espère que nous serons invités souvent à l'avenir pour discuter des changements.
Nous avons une liste de points que nous estimons être des lacunes ou des désavantages dans les politiques gouvernementales existantes. Maintenant qu'il y a le libre-échange, nous sommes désavantagés à cause de la déduction pour amortissement applicable au matériel ferroviaire. Cela nous cause du tort, car les taux sont très différents entre le Canada et les États-Unis.
Une partie importante de notre matériel est achetée de l'autre côté de la frontière, et les États-Unis achètent également au Canada, et de ce fait, les sociétés de crédit-bail sont gravement touchées par la différence de la déduction pour amortissement.
Si une entreprise de crédit-bail américaine loue du matériel à des chemins de fer canadiens pour une raison particulière, il y a de forte chance pour qu'ils achètent leur matériel auprès d'un fournisseur américain, ce qui veut dire que ni le gouvernement canadien ni notre association ne pourra tirer quoi que ce soit de ce secteur, notamment en termes d'impôt sur le revenu des sociétés. Aucun emploi ne va être créé. Donc, il y a un effet de désincitation lorsqu'il s'agit de faire des achats de matériel au Canada.
Nous souhaiterions que la déduction pour amortissement applicable au matériel ferroviaire soit la même qu'aux États-Unis.
Nous devons investir dans des transports respectueux de l'environnement, c'est-à-dire qu'il faut continuer à améliorer l'efficacité énergétique. En tonne-kilomètre, notre efficacité est supérieure d'environ 500 p. 100 à celle des camions. C'est-à-dire que nous utilisons environ 20 p. 100 de la quantité de combustible utilisée par un camion pour la même tonne-kilomètre.
Cela est dû au matériel, aux routes, aux pneus, et au fait que des roues en acier sur les rails en acier représentent moins de friction, etc. De plus, les locomotives ont des moteurs beaucoup plus grands qui sont plus efficaces d'un point de vue énergétique. C'est un facteur important. Au cours des vingt dernières années, les chemins de fer et les fabricants de matériel ferroviaire ont réussi à augmenter l'efficacité de la consommation de combustible des locomotives de 7 p. 100 pour le même tonnage de transport de marchandises. Et nous pensons que d'autres améliorations sont possibles.
Nous devons examiner la possibilité d'utiliser plus de combustibles écologiques, tels que le biodiésel. Cela s'est fait de façon expérimentale. Ça fonctionne. La performance est parfaitement équivalente à celle du diésel fait à base de pétrole, et c'est un combustible qu'on peut facilement trouver au Canada et qui est durable, il ne disparaîtra jamais. Nous pouvons l'utiliser et nous pouvons le produire. On l'obtient à partir des restes de graisse dans le cadre de la transformation de la viande, et il y a de nombreuses sources. En fait, une des filiales de Maple Leaf Foods à Montréal est le plus grand producteur au Canada.
Ce sont des choses importantes en matière de recherche et développement.
La commercialisation de la recherche est également un sujet qui est important pour nous. Nous aimerions que nos membres participent plus à des programmes d'innovation et de recherche. Un programme comme le programme d'incitation au transport des marchandises n'était pas doté d'un budget important, mais c'était un pas dans la bonne direction.
Si d'autres programmes, comme le fonds pour le développement de la technologie ferroviaire, pouvaient s'appliquer à la recherche des fournisseurs qui peut être effectuée par les entreprises de matériel ferroviaire, ce serait une excellente utilisation des fonds débloqués dans le cadre de la taxe sur l'essence.
Dernièrement, j'aimerais parler des crédits d'impôt dans le cadre du programme d'incitation fiscale pour la recherche scientifique et le développement expérimental. Certains de nos membres ont beaucoup plus recours à ces crédits. C'est une bonne chose, car lorsque un crédit d'impôt encourage une entreprise à investir en R et D, lorsque la recherche et le développement sont terminés et que le produit conçu est vendu, le gouvernement y trouve son compte puisque l'argent revient sous forme de progrès économique et d'impôt sur le revenu. C'est donc une bonne chose.
Cependant, nous souhaiterions que ce programme soit plus facile à utiliser. Peut-être qu'Industrie Canada pourrait jouer le rôle d'intermédiaire pour obtenir ces crédits d'impôt, car les vérificateurs fiscaux de l'ARC ne connaissent pas bien le secteur et ont eu une approche défensive, c'est-à-dire qu'ils souhaitent réduire ces crédits ou encore les sélectionner de façon à ce qu'ils soient moins importants, et ce même lorsqu'ils ont déjà été approuvés et que l'entreprise a déjà débuté ses travaux de développement. D'ailleurs, je ne pense pas que les fonctionnaires de l'ARC seraient malheureux de voir cette responsabilité transférée à Industrie Canada, parce que c'est aussi un problème pour eux. Ils n'ont pas d'employés qualifiés pour évaluer ces demandes.
C'était un résumé sommaire des positions et des besoins de notre industrie. J'espère que nous aurons une discussion intéressante et que nous pourrons répondre à vos questions.
:
Merci beaucoup monsieur le président.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous informer au sujet des négociations d'un accord de libre-échange Canada-Corée, dont je suis le négociateur en chef pour le Canada.
Aujourd'hui, je suis accompagné de quelques collègues du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, David Plunkett, directeur général, Politique commerciale bilatérale et régionale; Marvin Hildebrand, directeur, Direction de l'accès aux marchés bilatéraux; Kendal Hembroff, directrice adjointe, Direction de l'accès aux marchés bilatéraux; et Cam MacKay, directeur adjoint, Politique commerciale régionale, et négociateur en chef adjoint de l'accord Canada-Corée.
[Français]
Avant d'aborder plus en détail les éléments de l'Initiative d'accord de libre-échange avec la Corée, permettez-moi de vous fournir un peu le contexte.
Les membres du comité connaissent très bien l'importance du commerce pour l'économie canadienne. En effet, il suffit de rappeler que près d'un emploi sur cinq au Canada dépend du commerce. Pour maintenir une croissance de l'emploi au pays et assurer sa prospérité, nous devons ouvrir nos marchés et créer davantage de débouchés pour les Canadiens qui font des affaires à l'étranger. Malheureusement, l'ensemble des négociations à l'OMC ont été suspendues cet été et nous ne savons pas encore quand elles reprendront.
[Traduction]
Simultanément, les principaux concurrents du Canada accélèrent la cadence, déjà très dynamique, de leurs négociations bilatérales. Ils veulent, et ils l'obtiennent, un accès préférentiel aux marchés dynamiques du monde entier, ce qui place les entreprises canadiennes en situation défavorable.
Comme l'a déjà dit à plusieurs reprises le ministre Emerson, le Canada n'a pas emboîté le pas. Ainsi, depuis le lancement, à la fin de 2001, de la ronde de négociations de l'OMC, les États-Unis ont signé des accords de libre-échange avec 15 autres pays, et le Canada n'en n'a conclu aucun. En réalité, nous sommes, parmi les principaux pays commerçants du monde, le seul qui n'ait signé aucun accord de libre-échange en cinq ans.
Même si certains médias ont laissé entendre dernièrement que cela n'avait pas d'importance et donc que la recherche de nouveaux accords de libre-échange n'était guère justifiée, il n'en reste pas moins qu'en ce qui concerne la négociation d'accords de libre-échange, ce que nous faisons par rapport aux autres peut avoir une incidence réelle sur la position concurrentielle de nos entreprises sur les marchés étrangers, et c'est effectivement le cas. Pour nos exportateurs ou pour nos investisseurs, ce n'est là nullement une considération théorique. Les entreprises canadiennes nous disent déjà qu'elles perdent des marchés, qu'elles perdent des ventes à l'étranger, et cela en raison de l'existence d'accords de libre-échange signés avec d'autres pays. Elles réclament du gouvernement qu'il égalise les chances.
En prospective, alors que nous allons continuer à renforcer nos liens dans le cadre de l'ALENA et continuer à essayer d'obtenir, à la table de l'OMC, des résultats positifs, il faut simultanément que nous mettions davantage l'accent sur notre programme régional et bilatéral, notamment sur des initiatives comme les négociations avec la Corée pour la signature d'un accord de libre-échange, dont je vais d'ailleurs immédiatement vous dire quelques mots.
Avec une population de 48 millions d'habitants et un PIB proche du billion de dollars, la Corée est le plus gros des tigres asiatiques et se range déjà à la 11e place dans les économies du monde. Cela fait que ces négociations pour la signature d'un accord bilatéral sont les plus ambitieuses que le Canada ait lancées il y a plus de 10 ans. Nous tentons d'obtenir avec la Corée un accord global et de très haut niveau copié sur le modèle de l'ALENA.
Dans le secteur fondamental de l'accès aux marchés pour nos produits, nos services et nos investissements, nous tentons d'obtenir fort ambitieusement une très grande libéralisation et une couverture complète. Dans le cas de la Corée, un domaine sur lequel nous continuons à insister, reste celui des barrières non tarifaires, par exemple les questions réglementaires et de transparence, puisque les intérêts canadiens nous ont bien dit que ces éléments étaient parmi les obstacles majeurs entravant l'accès au marché coréen. Pour l'essentiel, cette négociation consiste pour nous à améliorer les débouchés pour les entreprises canadiennes.
Mais pourquoi la Corée en particulier? Pour commencer, la Corée présente pour le Canada un gros marché, très prospère et en croissance rapide, un marché stratégiquement situé dans l'une des régions économiques les plus dynamiques au monde. La Corée est déjà en importance le 7e débouché commercial pour le Canada. En fait, nous avons exporté davantage vers la Corée l'an dernier que nous ne l'avons fait vers le Brésil, l'Inde et la Russie confondus.
La Corée devient également, pour le Canada, un très gros marché pour l'industrie des services, un marché d'exportation qui a dépassé les 700 millions de dollars l'an dernier, et qui représente un flux d'investissements réciproque de 1,1 milliard de dollars. Un accord de libre-échange signé avec la Corée pourrait avoir pour effet d'intensifier les échanges bilatéraux grâce à l'élimination des barrières tarifaires, réglementaires et autres, qui actuellement entravent ce genre de possibilité.
La Corée a toujours des tarifs douaniers relativement élevés, 13 p. 100 en moyenne, contre 4 p. 100 seulement pour le Canada. Par conséquent, l'élimination de ces tarifs douaniers dans le cadre d'un accord de libre-échange multiplierait les potentialités pour le Canada et, du moins on pourrait l'affirmer, aurait un effet positif disproportionné pour le Canada.
Le marché coréen est particulièrement important pour deux secteurs de notre économie, l'agriculture et l'exploitation des ressources, et un accord de libre-échange devrait produire des gains dans toute une série de secteurs comme l'agroalimentaire, les pêches, les métaux et produits métalliques, et toute une palette de produits forestiers et de produits du bois, ainsi que le charbon et d'autres minéraux.
Rien que dans le secteur agricole, les tarifs douaniers coréens sont en moyenne de l'ordre de 53 p. 100, beaucoup plus élevés donc que les tarifs canadiens. Dans le secteur des pêches, ils représentent en moyenne 18 p. 100, alors que les nôtres sont à peine supérieurs à 1 p. 100. L'élimination des tarifs douaniers coréens ouvrirait donc manifestement d'importants débouchés à nos exportateurs.
Nous escomptons également des gains dans toute une série de secteurs industriels et manufacturiers, notamment les produits chimiques, l'aérospatiale et le matériel de transport urbain, les engrais, les pièces d'automobile, les produits pharmaceutiques, les produits de beauté, les bâtiments préfabriqués, les produits environnementaux, la machinerie et le matériel, pour ne citer que ceux-là.
Je crois qu'il s'agit là de certains des secteurs qui ont déjà appelé l'attention du comité.
Par ailleurs, nous sommes convaincus qu'il y a des débouchés possibles dans les secteurs axés sur les services, qui représentent au Canada à l'heure actuelle 80 p. 100 des nouveaux emplois. Il y aurait ainsi les services financiers, la technologie de pointe et les services à vocation environnementale.
Un accord de libre-échange offrirait également aux investisseurs canadiens une conjoncture plus sûre et plus prévisible en Corée, en plus de faciliter la venue au Canada d'investissements coréens. Cela aiderait à son tour les entreprises canadiennes à prendre plus facilement pied sur les marchés voisins comme la Chine et le Japon. En effet, les échanges intrarégionaux affichent une croissance exponentielle, de sorte que la Corée pourrait devenir, pour les entreprises canadiennes, une porte d'entrée fort importante.
[Français]
Comme je l'ai indiqué plus tôt, le programme des accords de libre-échange bilatéraux du Canada est également guidé par la nécessité de faire en sorte que les entreprises canadiennes puissent affronter la concurrence à armes égales.
La Corée est peut-être une nouvelle venue dans le monde des accords de libre-échange, mais elle a déjà conclu des accords avec 15 pays au cours des dernières années et tente activement d'en négocier d'autres avec de nombreuses nations. Les négociations de libre-échange que mène actuellement la Corée avec les États-Unis revêtent bien entendu un intérêt particulier pour le Canada étant donné le niveau d'intégration de nos industries dans certains secteurs, comme celui de l'automobile et la concurrence féroce que nous nous livrons avec les États-Unis sur les marchés mondiaux dans des domaines comme l'agriculture.
Plus récemment, nous avons appris que la Corée et l'Union européenne examinaient la possibilité de négocier un accord commercial bilatéral. Il ne fait aucun doute que tout cela fait monter les enjeux pour nous et souligne l'importance de préserver la compétitivité canadienne sur cet important marché.
[Traduction]
Où en sommes-nous actuellement? Depuis le début des négociations en juillet 2005, nous avons eu avec la Corée sept séries d'entretiens, grosso modo à intervalles de deux mois. La plus récente a eu lieu la semaine dernière ici à Ottawa, et la prochaine est prévue pour la semaine du 20 novembre à Séoul.
Nous avons bien avancé déjà, mais nous sommes maintenant arrivés au point où, dans les deux camps, on commence à aborder des questions délicates. Le Canada insiste pour obtenir un débouché plus facile sur les marchés coréens très protégés que sont l'agriculture, la pêche et les produits forestiers, et la Corée essaie d'obtenir du Canada des réductions plus rapide de ses tarifs douaniers dans des secteurs manufacturiers vulnérables comme l'automobile. Aucun échéancier n'a été fixé pour l'issue de ces entretiens, et le ministre Emerson a dit bien clairement que ce que nous voulions, c'était un bon accord avec la Corée, et non pas un accord à la va-vite.
J'aimerais maintenant vous parler si vous voulez bien du secteur automobile, un volet donc de ces négociations qui a manifestement retenu le plus l'attention ici au Canada. Étant donné l'importance du secteur automobile pour l'économie canadienne et nos rapports commerciaux d'ensemble avec la Corée, le gouvernement consacre une attention toute particulière à tout ce qui concerne ce secteur dans ces négociations.
Nous avons créé au sein de l'équipe qui négocie avec la Corée un groupe de travail consacré exclusivement au dossier automobile, et pour faciliter les négociations, nous avons constitué ici au Canada un groupe consultatif pour le dossier de l'automobile. Ce groupe se réunit régulièrement de manière à ce que le point de vue de l'industrie soit parfaitement compris et puisse dans toute la mesure du possible être traduit à la table de négociation. Les activités de ce groupe sont par ailleurs complétées par d'autres réunions entre le gouvernement et l'industrie, et cela à tous les niveaux.
Ce matin encore, le ministre Emerson était en pourparlers avec des représentants de l'industrie automobile sur toute une palette de dossiers commerciaux dont l'accord de libre-échange avec la Corée. Il y a deux semaines, le ministre a eu une rencontre que je qualifierais de positive et de constructive avec une délégation des travailleurs canadiens de l'automobile conduite par son président, M. Buzz Hargrove.
Nous n'avons donc pas pêché par absence de dialogue avec l'industrie, et le point de vue de celle-ci a largement été pris en compte lorsque nous avons préparé le terrain en vue des négociations. Ainsi, le secteur automobile canadien nous avait fait part de certaines préoccupations au sujet d'une série de barrières non tarifaires qui rendent difficile l'accès au marché automobile coréen. C'est la raison pour laquelle le gouvernement nous a pressés d'accorder la priorité, à la table de négociation, aux barrières non tarifaires.
Simultanément, l'industrie automobile canadienne s'était inquiétée des répercussions possibles de la disparition du tarif douanier frappant les automobiles importées suite à la négociation d'un accord de libre-échange avec la Corée. Les membres du comité savent peut-être qu'au mois de septembre, le gouvernement a rendu publiques deux études qui concluaient que la signature d'un accord de libre-échange avec la Corée aurait des répercussions négatives très faibles pour le secteur canadien de l'automobile.
La première étude, qui a été mentionnée par le président, a été conduite par Industrie Canada et est arrivée à la conclusion que la production canadienne afficherait une diminution annuelle moyenne inférieure à 1 000 unités, ce qui représente 0,04 p. 100 des 2,6 millions de véhicules que nous produisons chaque année au Canada.
Cette évaluation d'Industrie Canada est corroborée par une seconde étude, commandée celle-là par Affaires étrangères et Commerce international Canada, qui fut réalisée par le professeur Johannes Van Biesebroeck de l'Université de Toronto, un chercheur de renom dont la spécialité est l'analyse économique dans l'industrie automobile.
À l'instar de l'étude d'Industrie Canada, celle du professeur Van Biesebroeck a conclu qu'un accord de libre-échange entre le Canada et la Corée n'aurait qu'un impact très modeste sur le niveau des importations en provenance de la Corée, en l'occurrence moins de 10 p. 100, et que cela serait en grande partie compensé par une diminution des importations d'autres provenances. L'étude conclut par conséquent qu'un accord de libre-échange entre nos deux pays ne produirait qu'une diminution infime de la production automobile au Canada, en l'occurrence 2 137 véhicules, ou 0,08 p. 100 de l'ensemble de notre production.
En même temps, l'étude fait valoir que les exportations vers la Corée de pièces d'automobile produites au Canada devraient profiter d'une élimination des tarifs douaniers, et elle prévoit donc une augmentation des exportations de pièces d'origine canadienne qui devraient être de l'ordre de 8 à 12 p. 100. Les deux études offrent le même constat principal, en l'occurrence un très faible impact sur la production canadienne en raison d'une série de facteurs : le tarif douanier relativement bas de 6,1 p. 100, la prépondérance des importations sur notre marché, qui représente environ les trois quarts des ventes, et le fait que la Corée ne représente que 8 p. 100 du marché en volume.
:
Merci beaucoup. Effectivement, nous devons noter que les conclusions de l'étude du syndicat sont diamétralement opposées non seulement aux nôtres, mais à celles de l'étude qui a été effectuée par le professeur Van Biesebroeck.
Je vous dirais que nos économistes ont effectivement pu y jeter un coup d'oeil et qu'ils ont trouvé dans cette étude du syndicat un assez grand nombre de faiblesses méthodologiques, et je vais simplement vous en signaler quelques-unes.
L'étude des TCA exclut l'agriculture. Or, c'est le secteur pour lequel nous pourrions attendre les plus gros gains, de sorte que cette omission fausse manifestement les résultats.
L'étude du syndicat pose en effet que le Canada n'a pas d'autre partenaire commercial, que chaque dollar d'importations nouvelles en provenance de la Corée déplace un dollar produit au Canada. Mais nous savons fort bien qu'il n'en va pas ainsi. En réalité, et surtout dans le secteur automobile, pour lequel trois quarts du marché intérieur va aux importations, il faudrait s'attendre à ce que toute augmentation des importations en provenance de Corée se fasse au détriment d'autres importations, plutôt que de la production intérieure. Mais tout cet élément est absent de l'étude des TCA.
En ce qui concerne maintenant le chiffre très important des pertes d'emplois mentionnées par cette étude, qui a d'ailleurs fait les manchettes, ce chiffre ne repose pas sur une analyse des échanges entre le Canada et la Corée, pas du tout, il s'agissait simplement d'une extrapolation de l'évolution d'ensemble de nos échanges commerciaux avec tous les pays avec lesquels nous avons un accord de libre-échange, et cela depuis le premier jour des accords en question, et ce chiffre a été greffé à celui de nos échanges actuels avec la Corée. Cette hypothèse part du principe qu'il n'y a aucun facteur autre que l'accord de libre-échange qui influe sur l'augmentation des échanges commerciaux, facteurs comme la croissance de l'économie, l'évolution du taux de change, les modalités des échanges commerciaux, les améliorations technologiques, etc.
Ainsi, par exemple, ce que nous importons de la Chine, pays avec lequel nous avons un accord de libre-échange, a considérablement augmenté, mais plus de la moitié de cette augmentation est attribuable à la hausse du prix du cuivre. Or, dans leur analyse, les TAC ont immédiatement greffé cela à une augmentation présumée des importations en provenance de Corée.
Je pourrais vous donner bien d'autres exemples, mais toute l'étude repose en fait sur une vision intrinsèquement mercantiliste du monde, une vision selon laquelle exporter c'est bien et importer c'est mal, et je ne pense pas que nous puissions être d'accord sur ce genre de perspective. La plupart des économistes diraient que les gains d'efficience économique qu'un accord de libre-échange devrait produire sont la résultante d'une augmentation des exportations et des importations.