:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invité, avec Gerri Sinclair et André Tremblay, à comparaître devant le comité pour parler du rapport que nous avons préparé en tant que membres du groupe d'étude sur le cadre réglementaire des télécommunications. Malheureusement, M. Sinclair et M. Tremblay avaient déjà pris des engagements et n'ont pas pu se joindre à moi aujourd'hui. Ils m'ont demandé de représenter le groupe et de faire de mon mieux pour assister le comité dans ses délibérations.
Notre groupe d'étude a été mis sur pied en avril 2005 pour entreprendre la première étude détaillée et complète qui ait été jamais faite, depuis une trentaine d'années, de la politique et de la réglementation canadiennes en matière de télécommunications. Nous avions pour mission de mener une enquête indépendante couvrant trois grands domaines, à savoir le cadre réglementaire des télécommunications, l'accès aux services à large bande et de télécommunications de pointe, et l'adoption par les Canadiens des technologies de l'information et des communications. Nous étions assistés d'un secrétariat incluant certains des principaux experts et consultants en télécommunications du pays. Nous avons reçu des mémoires écrits d'un vaste éventail d'intervenants canadiens du secteur des télécommunications. Nous avons organisé plusieurs tribunes publiques et rencontré des experts canadiens et internationaux du secteur des télécommunications, des représentants des organismes de réglementation, des décideurs politiques et des membres du grand public.
Nous avons présenté notre rapport final le 22 mars de l'année dernière. Un bon nombre de nos recommandations s'inscrivent dans trois grands thèmes. Le premier est la nécessité de clarifier les objectifs de la politique et de la réglementation canadiennes en matière de télécommunications.
[Français]
Nous avons proposé que les objectifs des politiques actuelles contenues dans la Loi sur les télécommunications soient clarifiés afin de mettre l'accent sur trois objectifs principaux: premièrement, promouvoir un accès abordable à des télécommunications de pointe dans toutes les régions du Canada; deuxièmement, atteindre certains objectifs sociaux spécifiques et importants comme l'accès aux télécommunications pour les personnes handicapées, améliorer la sécurité publique, protéger la vie privée et limiter la nuisance publique causée par les réseaux de télécommunication; et troisièmement, améliorer l'efficience des marchés des télécommunications et la productivité de l'économie canadienne.
[Traduction]
Les deux premiers objectifs ne sont pas radicalement différents de ceux que poursuivent habituellement les organismes de réglementation canadiens. Dans un cas comme dans l'autre, il s'agit de fournir aux Canadiens un accès abordable aux télécommunications. Néanmoins, notre rapport suggère également la nécessité d'insister davantage sur une troisième série d'objectifs reliés à l'efficience et à la productivité de l'économie.
Un deuxième thème qui revient dans notre rapport est que la politique de télécommunications devrait miser au maximum sur les forces du marché pour atteindre les objectifs de la politique de télécommunications du Canada. Il faudrait réduire l'intervention réglementaire dans les domaines où les forces du marché peuvent être aussi ou plus efficaces.
Un troisième thème du rapport est que, lorsque le marché n'atteint pas les objectifs importants de la politique de télécommunications, il faudrait recourir à des initiatives politiques et à une réglementation mieux ciblées pour atteindre ces objectifs.
Cela fait maintenant presque un an que notre groupe d'étude a publié son rapport final. Ce rapport a reçu un bon accueil de la part de l'industrie, des cercles politiques et des médias. La plupart des commentateurs ont dit que nos recommandations étaient opportunes et tenaient compte des besoins canadiens de même que des tendances, des politiques et de la réglementation des télécommunications au niveau international.
Le gouvernement a pris certaines mesures importantes pour commencer à donner suite à nos recommandations. Comme l'article 8 de la Loi sur les télécommunications l'y autorise, il a notamment adressé au CRTC une instruction en matière de politique lui demandant d'interpréter les objectifs assez généraux et parfois contradictoires de cette loi d'une façon plus orientée vers le marché.
Cette directive se fonde sur celle que le groupe avait recommandée et elle raproche davantage la politique du gouvernement canadien à l'égard de la réglementation du secteur des télécommunications des politiques de nos partenaires commerciaux.
De plus, les décrets du gouvernement concernant le service VoIP et le cadre d'abstention de la réglementation vont dans le même sens que notre recommandation de miser davantage sur les forces du marché lorsque cela permet d'atteindre les objectifs de la politique canadienne en matière de télécommunications et de réduire la réglementation lorsqu'elle nuit à la réalisation de ces objectifs.
Dans le contexte actuel, les marchés d'accès local fixe, y compris le marché des services VoIP, sont très concurrentiels. Un vaste éventail de fournisseurs de services bien équipés et bien financés s'efforcent de fournir aux Canadiens des services qui sont parmi les meilleurs et les moins chers au monde. Les nouveaux arrivants sur les marchés locaux des télécommunications, y compris les câblodiffuseurs canadiens, se sont révélés être d'excellents fournisseurs de services à large bande et maintenant de services VoIP qui peuvent facilement concurrencer les entreprises de télécommunications titulaires comme Bell Canada et Telus.
Le groupe d'étude a reconnu que le CRTC, Industrie Canada et les autres décideurs politiques du gouvernement avaient travaillé fort pendant 20 ans pour que les marchés des télécommunications canadiens soient parmi les plus concurrentiels et dynamiques au monde. Aujourd'hui, nos fournisseurs de télécommunications de la plupart des segments du marché produisent le genre de services de pointe à faible coût dont nous avons besoin pour maintenir et accroître le bien-être économique et social du Canada.
Le groupe d'étude a jugé essentiel que le secteur des télécommunications local soit davantage orienté vers le marché et moins réglementé pour que les Canadiens puissent profiter du potentiel qu'offrent les nouvelles technologies de télécommunications. Les marchés d'aujourd'hui sont très dynamiques et les technologies et les tendances sont de plus en plus mondiales. Il serait très risqué pour le Canada d'exiger, ou de permettre que nos organismes de réglementation élaborent des politiques visant à soutenir une technologie ou un modèle commercial particulier, et cela aux dépens des autres afin d'établir une structure prédéterminée. Tel a pourtant été l'effet de certaines politiques de réglementation du CRTC au cours des années passées.
Certaines des politiques de réglementation intrusives du Conseil visaient à soutenir les entreprises de services locaux concurrents qui comptaient beaucoup sur la revente de services de gros par les compagnies de téléphone titulaires. Entre-temps, l'industrie canadienne de la câblodiffusion est devenue un fournisseur solide et prospère de services de télécommunications concurrentiels sans avoir obtenu un soutien important sur le plan de la réglementation. Ce sont les joueurs du marché et non pas l'organisme de réglementation qui ont réussi à apporter au Canada les avantages de la concurrence.
Cette expérience, et celle des autres pays que nous avons étudiés, illustrent pourquoi notre groupe d'étude a recommandé que la réglementation des marchés locaux des télécommunications soit davantage axée sur le marché. L'expérience indique également pourquoi nous croyons que le gouvernement a eu raison de mettre en oeuvre certaines de nos recommandations de déréglementer les marchés d'accès local.
Nous félicitons le gouvernement d'avoir entamé une réforme de la politique canadienne en matière de télécommunications, néanmoins, mes collègues et moi-même sommes convaincus que le gouvernement et le Parlement devraient terminer le travail commencé.
Je voudrais aborder certains des principaux domaines dans lesquels nous croyons que le gouvernement canadien et le Parlement devraient agir de toute urgence.
Premièrement, nous croyons qu'il est grand temps que le Canada modernise sa Loi sur les télécommunications de façon à répondre aux exigences des télécommunications du XXIe siècle. La plupart de nos partenaires commerciaux l'ont fait depuis longtemps. Nous avons adopté une nouvelle Loi sur les télécommunications en 1993 et j'ai eu le privilège d'être le conseiller juridique externe en chef pour cette loi, mais je peux vous dire quelles étaient nos instructions. Nous étions chargés de mettre à jour, mais non pas de modifier le cadre réglementaire de base établi pour les compagnies de téléphone et télégraphe du Canada dans la Loi sur les chemins de fer de 1906. Nous devions seulement ébaucher quelques initiatives nouvelles telles que les restrictions touchant la propriété étrangère et l'annulation d'une décision de la Cour fédérale pour établir le pouvoir d'abstention de la réglementation. Plusieurs modifications ont été apportées à la loi depuis 1993, notamment en ce qui concerne les licences pour les services internationaux et le télémarketing, mais il n'y a pas eu de changements dans l'approche législative fondamentale de la réglementation économique du secteur des télécommunications depuis 1906, depuis un peu plus de 100 ans.
L'approche législative encore en vigueur conférait à la Commission des chemins de fer et à ses successeurs, y compris le CRTC, de vastes pouvoirs pour prendre les mesures qu'ils jugeaient appropriées pour atteindre deux objectifs très vagues: faire en sorte que les tarifs soient « justes et raisonnables » et que les services de télécommunications soient fournis sans « discrimination injuste ». Le CRTC s'est acharné à appliquer ces deux objectifs généraux pour réglementer le téléphone, et maintenant le secteur des télécommunications. Ils sont à la base d'un ensemble complexe de règlements économiques que les commissaires du CRTC peuvent juger bon de modifier, sans que le gouvernement ou le Parlement n'ait un rôle à jouer. Par exemple, ces deux mêmes objectifs généraux ont servi, au cours des années, à justifier à la fois les monopoles et la concurrence dans le secteur des télécommunications. La loi n'a jamais changé. Voilà pourquoi le groupe d'étude a recommandé d'adopter une nouvelle Loi sur les télécommunications de façon à établir un cadre réglementaire bien clair.
Je n'ai pas le temps de décrire toutes nos recommandations en détail. Nous le faisons dans notre rapport. J'aimerais simplement en souligner quelques éléments.
Premièrement, quoi qu'on puisse penser des décrets que le gouvernement a récemment pris pour modifier les décisions du CRTC, personne ne croit, je pense, dans une démocratie industrialisée moderne, que le pouvoir politique devrait s'ingérer régulièrement dans le processus décisionnel d'un organisme de réglementation des télécommunications qui est à la fois indépendant et professionnel. De nombreux observateurs estiment que le gouvernement a eu raison de modifier l'orientation politique du Conseil en ce qui concerne le service VoIP et l'abstention locale. Néanmoins, à plus long terme, le gouvernement et le Parlement devraient élaborer des directives plus claires qui devraient être administrées par un organisme de réglementation indépendant et professionnel, et il faudrait le faire dans une loi.
Ensuite, notre groupe d'étude a recommandé que les nouvelles mesures de réglementation établies dans la Loi sur les télécommunications s'alignent davantage sur la politique de concurrence que sur les principes de réglementation des entreprises de services publics qui exercent un monopole. Telle est la tendance que l'on constate clairement dans la législation des États-Unis, du Royaume-Uni, de l'Europe et de nos autres partenaires commerciaux.
Nous avons également remarqué que tous les pays industrialisés reconnaissent l'importance de conserver un organisme de réglementation des télécommunications indépendant et professionnel, en dehors des autorités régissant la concurrence. La Nouvelle-Zélande, qui est le seul pays à faire exception à cette règle, a déclaré que ses tentatives visant à compter uniquement sur la législation régissant la concurrence en général ont été un échec et elle a récemment rétabli un organisme de réglementation des télécommunications spécialisé dans ce domaine.
Par conséquent, après avoir examiné les pratiques exemplaires au niveau international, nous avons recommandé une formule assez simple pour pouvoir appliquer les politiques à l'égard des télécommunications et de la concurrence au secteur des télécommunications. Nous avons proposé de réunir les compétences du CRTC et du Bureau de la concurrence au sein de ce que nous avons appelé un « Tribunal de la concurrence en télécommunications », ou TCT. Nous pensons que c'est la solution la plus efficace pour élaborer et appliquer des bonnes politiques économiques à la réglementation de l'industrie des télécommunications. Le TCT serait une façon pratique de combiner les compétences du CRTC dans le domaine des télécommunications avec celles du Bureau de la concurrence sur le plan de l'économie de la concurrence.
Dans notre rapport, nous avons recommandé d'autres approches législatives pour aligner le Canada sur la réglementation adoptée par les pays de l'OCDE en matière de télécommunications ou pour lui permettre de jouer un rôle de chef de file à cet égard.
Enfin, notre groupe d'étude a recommandé un certain nombre de nouvelles initiatives politiques pour répondre aux besoins du Canada au XXIe siècle. Notre principal conclusion était que le Canada devrait miser au maximum sur les forces du marché pour atteindre les objectifs importants de la politique de télécommunications canadienne, mais nous avons aussi recommandé qu'au cas où le marché n'atteindrait pas ces objectifs, le gouvernement et les organismes de réglementation devraient recourir à des initiatives politiques et réglementaires plus intelligentes et mieux ciblées pour y parvenir.
Il y a un certain nombre de domaines dans lesquels nous avons jugé ces initiatives nécessaires. Je vais les énumérer très rapidement.
Premièrement, nous avons recommandé que le CRTC soit clairement autorisé à ordonner la suppression de certains des obstacles qui s'opposent encore à l'arrivée de nouveaux concurrents sur le marché des télécommunications, des obstacles tels que les restrictions existantes touchant l'accès aux poteaux téléphoniques et électriques, aux tours, aux toitures, au câblage des immeubles et aux biens publics afin de favoriser une meilleure concurrence entre les concurrents existants et nouveaux.
Deuxièmement, nous avons recommandé d'utiliser les politiques à l'égard du spectre radio pour mettre un spectre adéquat à la disposition des entreprises nouvelles et existantes afin de fournir des services de télécommunications de pointe et concurrentiels aux Canadiens de toutes les régions.
Ensuite, pour protéger les consommateurs vulnérables dans les marchés des télécommunications plus concurrentiels et moins réglementés, nous avons recommandé un certain nombre d'initiatives.
La première consiste à légiférer pour obliger les compagnies de téléphone à continuer de fournir le service téléphonique de base et à ne pas abandonner leurs clients.
Deuxièmement, nous avons recommandé d'établir un nouveau type de bureau du protecteur du citoyen, qui serait appelé Agence de protection des usagers des services de télécommunications, pour donner suite aux plaintes déposées par les clients, aussi les particuliers que les petites entreprises, contre tout fournisseur de services de télécommunications et pas seulement ceux qui sont actuellement réglementés. Nous inspirant de modèles bien acceptés qui existent aux États-Unis, en Australie et ailleurs, nous avons recommandé que cette agernce soit autofinancée, indépendante, établie par l'industrie et assujettie aux lignes directrices du CRTC.
Enfin, en ce qui concerne les consommateurs, nous avons recommandé de confirmer dans la loi le droit des consommateurs canadiens d'accéder aux applications et au contenu publiquement disponibles sur Internet par l'entremise de tous les réseaux de télécommunications publics qui fournissent un accès à Internet.
Dans la même optique, nous croyons que le marché continuera de fournir aux Canadiens des services à large bande parmi les meilleurs au monde. Il ressort néanmoins de notre étude qu'en ce qui concerne un petit nombre de localités, souvent les communautés des premières nations et des régions isolées, il est peu probable que le marché fournira des services à large bande. Nous avons donc recommandé le programme U-CAN ou « ubiquité Canada » pour assurer l'accès aux services à large bande dans ces régions.
Enfin, compte tenu de la stagnation de la productivité canadienne et du faible niveau d'adoption des technologies de l'information et des communications, le groupe d'étude a recommandé un certain nombre de politiques gouvernementales pour promouvoir ces technologies, surtout au sein des PME.
Pour résumer, le groupe d'étude considère que ses diverses recommandations sont équilibrées et constituent les éléments d'un nouveau cadre politique. Ce cadre politique devrait entraîner une déréglementation dans les domaines où ce sont les forces du marché qui permettront le mieux d'atteindre les objectifs politiques à long terme du Canada tout en apportant des politiques et une réglementation intelligentes et ciblées dans des domaines où les forces du marché sont insuffisantes.
Nous espérons que le gouvernement et les autres intervenants de l'industrie feront preuve de persévérance pour terminer ce que le rapport du groupe d'étude a commencé, pour faire du Canada un chef de file des politiques de télécommunications et en assurant ainsi le succès de notre secteur des télécommunications pendant de nombreuses années à venir.
[Français]
Je reste disponible pour fournir autant d'information que possible afin d'aider et d'alimenter les réflexions des membres du comité.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup de nous avoir invités à venir nous exprimer aujourd'hui devant le comité.
Je m'appelle Kirsten Embree. La Canadian Association of Internet Providers m'a demandé de me présenter aujourd'hui devant vous pour vous entretenir de la question de la déréglementation des télécommunications.
La Canadian Association of Internet Providers ou CAIP, comme nous l'appelons, est l'une des plus importantes associations de fournisseurs Internet de toute l'industrie. Elle représente à la fois les grands et les petits fournisseurs de services Internet commerciaux, de même que des sociétés et d'autres organisations qui oeuvrent dans le secteur de la fourniture de services Internet.
La presque totalité des membres de la CAIP sont des fournisseurs de services Internet indépendants, ce qui signifie qu'ils ne sont affiliés, en raison de leur propriété, avec aucune compagnie de téléphone titulaire ou entreprise de câblodistribution. Par conséquent, le point de vue de la CAIP sur la question de la déréglementation des télécommunications lui est propre. En effet, ce point de vue est très orienté vers l'expérience des nouveaux venus dans le marché, qui doivent concurrencer des exploitants titulaires de très grande envergure et jouissant de moyens financiers considérables.
Avant de vous faire part de notre point de vue sur le sujet de la déréglementation des télécommunications, nous avons pensé qu'il serait utile de vous donner un bref aperçu du marché canadien des services Internet.
En 2005, les revenus produits par la prestation de services Internet au Canada ont atteint 4,5 milliards de dollars, ce qui représente une hausse de 8,8 p. 100 par rapport au chiffre de 4,2 milliards atteint en 2004. En 2005, le nombre de ménages bénéficiant d'un abonnement donnant accès à Internet a atteint huit millions, ce qui représente 64 p. 100 de tous les ménages canadiens. Quant au nombre de ménages bénéficiant d'un accès Internet haute vitesse, il a atteint le chiffre de 6,4 millions de ménages, soit 51 p. 100 de tous les ménages canadiens, une amélioration par rapport à 43 p. 100 atteint l'année précédente.
À première vue, ces statistiques semblent dépeindre une situation très enviable pour le secteur des services Internet, mais la réalité pour ceux qui exercent la concurrence dans ce marché est tout autre, et nous en arrivons rapidement au point où nous commençons à nous demander si le Canada a pris les bonnes décisions pour favoriser la concurrence et le choix des consommateurs dans ce segment de marché.
Le rapport de surveillance des télécommunications 2005 du CRTC présente un tableau qui montre les abonnements résidentiels aux services Internet selon le type de fournisseur d'accès. Nous avons pris ce tableau et l'avons transformé en diagramme à secteurs afin de montrer encore plus clairement ce qui se passe dans ce segment du marché.
Pour le compte rendu, notre analyse montre que 54 p. 100 de tous les abonnés à Internet en 2004 avaient pris un abonnement avec le service de modem haute vitesse des sociétés de câblodistribution, 42 p. 100 avaient pris un abonnement avec les services de modem DSL haute vitesse des compagnies de téléphone, et seulement 4 p. 100 des abonnés avaient fait appel à un fournisseur indépendant de services Internet haute vitesse.
Durant le peu de temps qui me reste, j'aimerais vous faire part de ce qui, selon la CAIP, n'a pas fonctionné dans la déréglementation du marché des services Internet, et vous expliquer pourquoi nos membres ne détiennent que cette misérable part de marché de 4 p. 100.
Comme vous le savez peut-être, le CRTC a décidé de s'abstenir de réglementer les services Internet au détail des compagnies de téléphone titulaires et des entreprises de câblodistribution vers la fin des années 1990. Malheureusement, il n'existait aucun régime complet en place, à l'époque, pour permettre aux fournisseurs de services Internet d'avoir accès à tous les services et installations sous-jacents qui sont nécessaires pour fournir des services Internet haute vitesse à leurs propres clients utilisateurs finals.
Les entreprises de câblodistribution qui offrent des services de gros de modem câble n'ont déposé leurs tarifs que depuis deux ou trois ans, et ce, malgré le fait que ces sociétés avaient mis sur le marché leurs propres services haute vitesse il y a plus de dix ans de cela. Quant aux compagnies de téléphone, elles ont soit évité de déposer leurs tarifs pour leurs services ADSL de gros ou encore elles ont fixé des prix tellement élevés que les fournisseurs de service Internet indépendants se sont retrouvés dans une situation classique de compression de marge.
Les concurrents doivent avoir accès aux installations et aux services sous-jacents essentiels à des prix établis en fonction des coûts et sans avoir à absorber les majorations de prix exorbitantes que les entreprises titulaires vont toujours choisir d'imposer, sans la surveillance réglementaire du CRTC. Nous vous prions instamment de prendre ces facteurs en considération lors de vos délibérations, et aussi, d'adopter une approche plus globale de la question de la déréglementation des télécommunications, à l'instar du groupe d'étude sur le cadre réglementaire des télécommunications, afin d'éviter d'avoir à imposer des mesures correctives à la pièce qui ne créeront que des problèmes en bout de ligne.
Bonjour. Je m'appelle John Piercy et je représente aujourd'hui la Canadian Cable Systems Alliance (la CCSA). Je suis membre du conseil d'administration de la CCSA et président de son Comité sur la réglementation des télécommunications. Je suis également président de Mountain Cablevision, d'Hamilton, en Ontario, un membre corporatif de la CCSA.
La CCSA représente plus de 90 petites compagnies indépendantes de câblodistribution qui exercent leurs activités dans toutes les régions du Canada. Plusieurs d'entre elles sont des entreprises familiales qui desservent de petits centre ruraux.
Les membres corporatifs de la CCSA sont les seuls compétiteurs potentiels dotés d'installations dans pratiquement tous les marchés qu'ils desservent. Ce projet d'ordonnance les inquiète grandement.
Permettez-moi de vous expliquer pourquoi. Le projet d'ordonnance, tel qu'il est actuellement rédigé, permet à la compagnie de téléphone titulaire de demander l'abstention dès qu'un deuxième compétiteur doté d'installations pénètre le marché. Cette condition sera donc remplie dès qu'un câblodistributeur offrira le service téléphonique, et la compagnie de téléphone titulaire se qualifiera pour l'abstention. À ce moment-là, le câblodistributeur local aura peu ou pas de clients pour ses services téléphoniques. La comopagnie de téléphone titulaire sera toutefois dès lors autorisée à présenter des offres alléchantes à ses clients qui lui feront part de leur intention de changer de fournisseur pour s'abonner au service du compétiteur câblodistributeur.
Par ailleurs, le projet d'ordonnance propose aussi d'éliminer les règles de reconquète dès que l'ordonnance entrera en vigueur. Une fois ces règles de reconquète éliminées, le titulaire pourra décider de ne présenter des offres intéressantes qu'aux clients qui l'informent de leur intention de s'abonner auprès d'un compétiteur. La majorité des clients de ces compagnies de téléphone ne recevraient donc pas de telles offres et seuls quelques rares clients obtiendraient des réductions de prix ou de nouveaux services.
Aucun autre secteur commercial n'impose à un compétiteur d'informer le joueur dominant dans son marché que l'un de ses clients souhaite mettre fin à son service. Or, dans l'industrie de la téléphonie, le compétiteur doit toujours demander au joueur dominant de transférer le numéro de téléphone du client avant de pouvoir le servir.
Pendant le processus de transfert du numéro, la compagnie de téléphone titulaire peut cibler le client qui a demandé le transfert et lui faire une meilleure offre avant même qu'il ait l'occasion d'essayer le service du compétiteur. Bien qu'une telle pratique enfreigne actuellement les normes reconnues par l'industrie, nous savons qu'elle est tout de même assez courante. Sans les règles de reconquête, il y a peu de chance qu'un compétiteur puisse démontrer à quel moment l'offre de reconquête a réellement été présentée.
Si ce projet d'ordonnance est adopté dans sa forme actuelle, plusieurs de nos membres ne pénétreront pas le marché. Les perspectives commerciales seront tout simplement trop sombres.
Notre recommandation au Ministre est relativement simple. Conserver le test de la puissance commerciale pour tous les marchés qui ne font pas partie des 10 principaux marchés identifiés dans le projet d'ordonnance. Lorsque les titulaires pourront démontrer, à l'aide du test actuel du Bureau de la concurrence, qu'ils n'ont plus de position dominante sur le marché, ils pourront être soustraits à la réglementation. Les restrictions de reconquête doivent demeurer en place jusqu'à ce qu'un marché donné ait été soustrait à l'application de la réglementation.
Une telle approche assurerait une compétition durable des entreprises dotées d'installations dans les petits marchés du Canada. Si le projet d'ordonnance n'est pas révisé, les clients résidentiels et les petites et moyennes entreprises de ces collectivités n'auront pas accès à des offres concurrentielles. Ils continueront à payer les prix plus élevés qu'ils ont toujours payés et leur situation risquera même d'empirer. Sans une base viable de clients résidentiels, nos membres ne pourront jamais lancer un service téléphonique durable et concurrentiel pouvant être offert aux entreprises locales.
Les changements que nous proposons auraient pour effet de maintenir en place le processus réglementaire rationalisé et la dépendance accrue envers les forces du marché, tout en favorisant la compétition viable dans des marchés où il n'y aurait autrement aucune compétition.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'exprimer le point de vue de la CCSA et suis disponible pour répondre à vos questions.