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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier le comité de me donner l'occasion aujourd'hui de vous parler de cette question très importante pour les consommateurs qu'est le prêt sur salaire. J'aimerais vous présenter mon collègue, M. David Clarke qui, à titre d'agent principal des politiques, travaille sur cette question depuis plusieurs années déjà et est membre actif du comité fédéral-provincial-territorial des fonctionnaires chargé du dossier des prêts sur salaire.
Il me fera plaisir de répondre à toutes vos questions concernant l'historique de ce dossier, et en particulier les aspects fédéraux-provinciaux-territoriaux ou les questions de protection des consommateurs.
J'aurais quelques mots à dire, qui ne prendront pas très longtemps, sur ce dossier des prêts sur salaire. Le prêt sur salaire est un prêt à court terme, qui permet au consommateur d'emprunter plusieurs centaines de dollars pour une période de 10 jours à deux semaines. Le coût d'emprunt est très élevé, comme vous le savez probablement, en général de l'ordre de 40 à 75 $ pour un prêt de 300 $ pour deux semaines ou moins.
Ce type d'emprunt soulève des préoccupations dans la collectivité en général à cause bien entendu de son coût très élevé, mais aussi de pratiques d'octroi des prêts, et notamment la divulgation inadéquate des coûts et des modalités, ainsi que la reconduction des prêts, c'est-à-dire la structuration séquentielle des prêts qui se succèdent immédiatement, et l'accumulation des intérêts portés par le capital emprunté. Très rapidement, ce genre de prêt entraîne des coûts en spirale.
Cette industrie, qui a vu le jour aux États-Unis il y a quelque temps déjà, est un phénomène relativement récent au Canada. Elle a percé dans l'Ouest canadien au milieu des années 90, puis elle s'est rapidement répandue, en quelques années, dans l'est du pays. Cette industrie est aujourd'hui bien présente dans de nombreux centres urbains et compte environ 1 300 centres de service, un chiffre qui n'arrête pas d'augmenter. On estime que ce genre de prêt représente au minimum 1,3 milliard de dollars par an.
Le comité des mesures en matière de consommation appelle du nom de marché du crédit à la consommation parallèle tout le secteur du prêt sur salaire et des autres services financiers connexes. Cette question est devenue un sujet de discussion des instances fédérales-provinciales territoriales en Colombie-Britannique vers la fin des années 90. En 1998, à la demande de certaines provinces de l'Ouest, le comité fédéral-provincial-territorial des ministres de la Justice s'est penché sur ce marché parallèle qui comprend l'encaissement de chèques, l'hypothèque mobilière et le prêt sur gages. Les ministres de la Justice ont ensuite renvoyé la question au comité fédéral-provincial-territorial des ministres de la Consommation qui, à son tour, a demandé aux responsables du comité sur les mesures en matière de consommation d'étudier cette question pour lui.
[Français]
Depuis l'an 2000, les responsables du CMC suivent un plan de travail détaillé, dont on peut consulter I'essence sur Ie site Web du CMC : le www.cmcweb.ca. Parmi leurs travaux, notons la recherche faite par les responsables et d'autres personnes, par exemple M. lain Ramsay de l'Osgoode Hall Law School; une enquête sur les pratiques utilisées par l'industrie; une table ronde, tenue à Victoria, réunissant des représentants des gouvernements, de I'industrie, des groupes de protection des consommateurs et des universités.
[Traduction]
En 2001, les ministres de la Consommation des administrations fédérale-provinciales-territoriales se sont servis de ces travaux pour ordonner à leurs fonctionnaires d'élaborer des plans d'action dans différents domaines, notamment des lignes directrices sur les pratiques exemplaires pour l'industrie, des programmes d'éducation et de sensibilisation des consommateurs ainsi que des mécanismes de réglementation.
En 2003, une consultation publique nationale a été conduite sur le cadre juridique et les questions de protection des consommateurs concernant le marché du crédit à la consommation parallèle.
[Français]
En 2004, les ministres de la Consommation des administrations fédérale, provinciales et territoriales ont exprimé leur inquiétude quant aux pratiques abusives et aux coûts excessifs que subissent les consommateurs sur ce marché parallèle, par exemple Ie prêt sur salaire, I'encaissement de chèques et la location avec option d'achat. Ils ont demandé à leurs fonctionnaires d'entamer des travaux, axés surtout sur Ie prêt sur salaire, visant à élaborer un cadre de protection des consommateurs, notamment des mesures relatives à la question de la reconduction des prêts et aux prêts concomitants contractés auprès de plusieurs prêteurs, I'habitude du prêt sur salaire, les pratiques exemplaires de l'industrie et l'information des consommateurs sur Ie coût véritable de ce genre de prêts.
[Traduction]
En 2004 et 2005, une deuxième consultation publique nationale a eu lieu, portant cette fois précisément sur la réglementation des prêteurs sur salaire. Par la suite, des hauts fonctionnaires provinciaux et territoriaux ainsi que plusieurs ministres ont demandé officiellement au gouvernement fédéral de prendre des mesures législatives pour faciliter la réglementation de ce secteur. Comme vous le savez, à l'automne de 2006, le a ainsi été déposé au Parlement.
À ce jour, monsieur le président, deux provinces, le Manitoba et la Nouvelle-Écosse, ont déjà adopté des lois en prévision de l'adoption possible du . De nombreux reportages dans les médias ont fait état de l'intention de plusieurs administrations d'adopter, elles aussi, une certaine forme de réglementation.
Un travail considérable et de longue haleine a permis aux discussions fédérales-provinciales-territoriales sur le prêt sur salaire d'en arriver là où nous sommes aujourd'hui. Je répondrai maintenant avec plaisir à toutes vos questions à ce sujet.
Merci, monsieur le président.
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Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de m'offrir l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui pour parler du projet de loi . Nous appelons ce projet de loi le projet de loi sur les prêts sur salaire, car c'est bien de cela qu'il s'agit.
Je voudrais demander au comité de bien vouloir m'excuser mais mon intervention sera faite uniquement en anglais.
Étant donné que mon collègue du ministère de l'Industrie nous a déjà parlé de l'industrie du prêt sur salaire et des discussions stratégiques qui ont mené à l'élaboration du projet de loi, je vais me contenter de vous dire quelques mots seulement sur la structure du projet de loi et le cadre juridique dans lequel il s'inscrit.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-26 sont tout à fait explicites. Elles créent essentiellement une exemption soustrayant les provinces et les territoires qui désirent réglementer l'industrie du prêt sur salaire et qui présentent une demande dans ce sens au gouvernement fédéral de l'application de l'article 347 du Code criminel qui limite le taux d'intérêt maximum qui peut être appliqué à un prêt quel qu'il soit n'importe où au Canada. Cette disposition est intitulée Taux d'intérêt criminel. L'exemption en question s'appliquera donc aux provinces et territoires qui ont décidé de réglementer le secteur des prêts sur salaire et qui ont donc fait une demande à cet égard au gouvernement fédéral.
Le projet de loi modifie le Code criminel en définissant les prêts sur salaires aux fins de l'exemption. Je vais vous lire cette définition. Elle n'est pas simple, parce qu'il n'est ni simple ni facile de dire uniquement ce qu'est un prêt sur salaire, même si nous savons généralement tous de quoi il s'agit lorsqu'on n'y est confronté. Cette définition est la suivante :
« prêt sur salaire » s'entend d'une opération par laquelle une somme d'argent est prêtée en échange d'un chèque postdaté, d'une autorisation de prélèvement automatique ou de paiement futur de même nature et à l'égard de laquelle ne sont fournis aucun cautionnement ni autre sûreté sur des biens ou autorisation pour découvert de compte; sont toutefois exclus les prêts sur gages ou sur marges, les lignes de crédit et les cartes de crédit.
Nous donnons donc une définition reposant essentiellement sur quelques indices simples — comme un chèque postdaté ou un paiement du même ordre, mais également en disant ce qu'un prêt sur salaire n'est pas. Le reste de la définition se trouve dans une autre disposition dans laquelle les types de prêts qui peuvent faire l'objet d'une exemption sont rigoureusement circonscrits.
Cette définition garantit que seule la catégorie de conventions de prêts est visée par la définition du prêt sur salaire, et donc par exemption. Par exemple, les conventions de prêts par carte ou par ligne de crédit ne seraient pas visées par la définition du prêt sur salaire.
L'essence des modifications proposées se trouve aux paragraphes 347.1(2) à 347.1(4), car c'est dans ces dispositions que se trouve l'exemption de l'article 347. Ces dispositions précisent quelles conventions de prêts sur salaire sont visées par l'exemption de l'application de l'article 347.
Par ailleurs, le paragraphe 347.1(2) précise des conditions devant être remplies pour qu'une telle exemption s'applique. Pour commencer, nous définissons le prêt sur salaire, et ceci est en fait le reste de la définition du prêt sur salaire aux fins de la disposition concernant l'exemption qui prescrit ceci : « la somme d'argent prêtée en vertu de la convention est d'au plus 1 500 $ et la durée de celle-ci est d'au plus soixante-deux jours ».
Cela est évidemment le scénario type du prêt sur salaire dont vous a parlé mon collègue du ministère de l'Industrie, c'est-à-dire un petit prêt accordé à court terme. En réalité, les chiffres cités par la loi représentent un peu un extrême puisque, d'après ce que je sais, la moyenne de ces prêts serait plutôt de 300 $ sur 10 jours. Ce sont donc des montants relativement modiques qui sont prêtés pour un terme relativement court, de sorte qu'un prêt de 1 500 $ pour 62 jours serait vraiment un cas extrême de prêt sur salaire qui pourrait faire l'objet d'une exemption.
Ensuite, le prêteur sur salaire « est titulaire d’une licence ou de toute autre forme d’autorisation expresse délivrée sous le régime des lois de la province lui permettant de conclure cette convention ». Cela signifie que c'est la province qui va se charger de réglementer de haut en bas tous les prêteurs sur salaire assujettis à l'exemption. Cela signifie nécessairement que la province en question s'est dotée de mesures législatives de protection du consommateur qui régissent les prêts sur salaire. Cependant, la nature de ces mesures législatives est généralement laissée à la discrétion de la province. Il n'y a que quelques conditions préalables à l'implantation d'une telle loi, et il faut également que la loi en question prescrive un plafond pour les coûts d'emprunt qui peuvent être effectivement exigés de l'emprunteur.
La troisième exigence pour que l'exemption s'applique est que la province dans laquelle le prêteur exerce ses activités ait été désignée par le gouverneur en conseil. Il s'agit simplement d'un processus permettant d'avoir l'assurance que la province a bien promulgué sa loi, ou que la loi existe déjà et qu'elle en a informé le gouverneur en conseil en lui demandant de lui accorder l'exemption. À partir de là, l'exemption est en vigueur.
Les principes de l'obtention de cette désignation sont très clairs, et il sont définis explicitement au paragraphe 347.1(3). La désignation sera faite à la demande du lieutenant-gouverneur en conseil de toute province — c'est-à-dire le Conseil des ministres de la province en question — et signifie alors que la province en question a adopté des mesures de protection des consommateurs pour protéger les bénéficiaires d'un prêt sur salaire.
Cela représente simplement une description générale du fait que la province doit avoir pris des mesures pour protéger les consommateurs qui s'appliquent à ce genre de prêt sur salaire.
La seule condition particulière est que les mesures en question doivent comprendre un plafond pour le coût total du prêt sur salaire. Cela viendra alors remplacer le plafond de 60 p. 100 qui est actuellement prescrit par l'article 347. Cette disposition garantit le plafonnement du coût total d'un tel emprunt tout en donnant aux provinces et aux territoires la latitude nécessaire pour déterminer quel devrait être ce plafond.
Le processus de désignation exige de la province qu'elle écrive au ministre fédéral de la Justice pour l'informer qu'elle s'est dotée d'une loi et qu'elle demande la désignation. Si, sur recommandation du ministre fédéral de l'Industrie, le ministre de la Justice est d'avis que la province répond aux exigences, on recommandera au gouverneur en conseil d'accorder l'exemption. Ce processus devrait être relativement simple.
Par ailleurs, le paragraphe 347.1(4) prévoit un processus de révocation de la désignation d'une province. Je ne m'attends pas vraiment à ce que cela devienne nécessaire une fois qu'une province aura décidé de réglementer les prêts sur salaire, et que ces provinces veulent ultérieurement revenir sur cette décision, mais si c'est le cas, il y aura deux possibilités: soit que la province ou le territoire en fait la demande, soit que la mesure de protection du consommateur n'existe plus, en l'occurrence parce que la loi a été abrogée.
Comme vous le savez, la Constitution accorde aux gouvernements provinciaux et territoriaux la compétence en matière de protection du consommateur en vertu de leurs pouvoirs dans le domaine de la propriété et des droits civils. C'est à ce palier de gouvernement-là qu'on trouve les mécanismes appropriés pour assurer la protection des consommateurs; d'ailleurs, des mesures de protection du consommateur à cet égard sont déjà en place partout au Canada. Pour certains cas même, on trouve des mesures qui s'appliquent déjà à certaines composantes du monde des prêts sur salaire — mais pas de façon aussi complète que vous l'a expliqué mon collègue —, mesures qui ont déjà été promulguées dans deux provinces au moins.
Le n'oblige pas les provinces à adopter des mesures de protection des consommateurs appropriées, et il ne les en empêche pas non plus. Ce texte concerne simplement l'applicabilité de l'article 347 à ces conventions particulières que sont les prêts sur salaire et permet une exemption qui serait sinon interdite en vertu de l'article 347. Tout cela est conforme aux pouvoirs constitutionnels qui sont accordés au gouvernement fédéral en matière de droit pénal.
Voilà donc l'assise de l'article 347. Si une province ou un territoire souhaite soustraire ces prêts à l'application de l'article 347, il lui suffit simplement d'avoir une loi en ce sens et de demander une exemption.
Monsieur le président, ce projet de loi est nécessaire pour donner aux provinces toute la latitude nécessaire afin de réglementer le secteur des prêts sur salaire. Au cas contraire, l'article 347 interdirait toute activité de prêt assorti d'un taux supérieur à 60 p. 100, comme mon collègue vient de vous l'expliquer. C'est cela la nature même des petits prêts à court terme. La définition de l'intérêt que donne l'article 347 est fort large et couvre la totalité de l'intérêt et des frais associés en cause — pas uniquement l'intérêt, mais également les coûts associés — en donnant un taux d'intérêt annuel composé maximum. Aucun prêteur sur salaire ne peut se conformer ou se conforme d'ailleurs à ce plafond de 60 p. 100.
Il s'agit donc simplement ici d'ouvrir la porte en permettant aux provinces de réglementer ce secteur, en permettant à celui-ci d'exister, et en fixant des limites appropriées au coût d'emprunt, tout en mettant en place d'autres mesures réglementaires pour assurer une protection appropriée aux consommateurs qui effectuent ce genre d'emprunt.
Merci, monsieur le président.
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Effectivement, nous avons devant nous un projet de loi dont l'intention, au bout du compte, peut être souhaitable. Mais dans les faits, le gouvernement du Québec a, depuis longtemps, une loi qui gère la question des prêts et qui prévoit un taux maximum de 35 p. 100, comme je peux l'affirmer présentement.
Plus tôt, j'ai fait référence à l'onglet 4, mais on peut lire la même chose à l'onglet 5 du document déposé. Je vous lis le texte qui figure à l'onglet 4 sur l'article 2, paragraphe 347.1(3) :
Cette modification établit la procédure grâce à laquelle une province est désignée par le gouvernement fédéral.
La désignation est faite, à la demande de la province, si cette dernière fait la preuve qu'elle a adopté des mesures législatives qui protègent les bénéficiaires de prêts sur salaire et qui fixent un plafond au coût total des prêts.
Viennent ensuite les raisons des modifications :
La désignation d'une province par le gouvernement fédéral est nécessaire pour permettre l'exemption des prêteurs sur salaire de l'application des dispositions de l'article 347 du Code criminel.
L'obligation de faire la preuve de l'existence de mesures législatives qui protègent les consommateurs, notamment un plafond au coût total des prêts, fait en sorte que la province a adopté des mesures de protection des consommateurs avant qu'une exemption de l'application de l'article 347 soit accordée.
À l'onglet 5, on dit ce qui suit au sujet de l'article 2, paragraphe 347.1(4) :
Cette modification permet de révoquer la désignation d'une province, pour l'application de cet article, dans deux situations : 1) à la demande de la province désignée ou 2) lorsque les conditions préalables sur lesquelles était fondée la désignation ne sont plus en vigueur.
Cette disposition fait en sorte que l'article 347 du Code criminel s'applique de nouveau aux conventions de prêt sur salaire qui auraient pu être exemptées auparavant parce que la désignation de la province constitue une condition préalable à l'exemption de l'application de l'article 347 du Code criminel.
J'ai voulu établir que, dans le cas du Québec — et c'est la raison d'être de l'amendement —, nous souhaitions que la loi soit amendée de façon à nous assurer que d'aucune façon la législation provinciale doive recevoir la bénédiction du gouvernement fédéral.
Nous sommes d'accord sur le fait que le gouvernement informe la province qu'il a adopté une telle loi, mais nous ne pensons pas que cette province doive demander la bénédiction du gouvernement fédéral. Or, le libellé actuel pose problème à cet égard.
J'ai communiqué avec le cabinet du ministre à Québec pour connaître sa position, et on me l'a donnée verbalement. J'espère la recevoir par écrit prochainement. J'espère également que le ministre québécois interviendra auprès du ministre de l'Industrie du Canada afin que nous puissions nous assurer que le gouvernement fédéral ne votera pas une loi dans un domaine qui relève depuis longtemps de la compétence du Québec, celui de la protection des consommateurs.
Compte tenu des arguments qui précèdent, il m'apparaît important d'accepter l'amendement.
Dans son discours, M. Jenkin a parlé du conseil qui réunit les provinces et le gouvernement fédéral et qui étudie cette question depuis plusieurs années. Il a également parlé des provinces qui souhaitaient une telle loi le plus tôt possible. Cependant, il n'est fait mention nulle part que le gouvernement du Québec est d'accord sur cette loi. Il m'apparaîtrait inapproprié d'adopter cette loi sans l'accord du gouvernement du Québec.
Dans la réalité, cette loi fera en sorte qu'une province, qui a décrété un taux maximum de 35 p. 100, aura besoin de la bénédiction du gouvernement fédéral. Je suis d'accord avec M. Bartlett pour dire que ce n'est pas l'intention du texte de loi. Cependant, mon expérience en tant que législateur m'a appris que l'intention d'un texte est une chose et que l'interprétation qu'en font les juges en est une autre. Les juges n'interprètent pas les interprétations : ils interprètent ce qui est écrit. Or, d'après le texte et l'information que le ministère nous a remise, une évaluation sera nécessaire avant de désigner une province.
À la lecture de cela, je me demande si ce n'est pas le premier ministre, à la fin, qui va en déterminer la pertinence. En effet, on dit que c'est le gouverneur en conseil et, donc, d'une certaine façon, c'est le Conseil des ministres qui va donner la responsabilité.
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Merci, monsieur le président. Je vais expliquer mon amendement à nouveau et le mettre en contexte.
À la cinquième ligne de la motion de M. Carrie, on peut lire ceci :
Dans l'ensemble, les provinces appuient le projet de loi C-26 parce qu'il leur donne l'option de réglementer les prêts sur salaire en soustrayant a l'article 347 du Code criminel celles qui mettent en place des mesures pour protéger les emprunteurs.
Le projet de loi ne devrait pas s'appliquer au Québec, car l'option qui lui est offerte ne respecte pas son droit de gérer le droit des consommateurs. Il pose des conditions qui imposent un encadrement et une évaluation par le gouvernement fédéral dans un domaine où cela n'a jamais été et n'est toujours pas nécessaire. Ce serait différent si la loi était écrite de façon à ce que le Québec puisse tout simplement informer le fédéral qu'il a une loi, tout comme les autres provinces pourraient le faire. Si les autres provinces préfèrent vraiment envoyer tous leurs projets de loi au fédéral et lui demander s'il sont conformes à l'article 347, je suis prêt à accepter ce fédéralisme asymétrique. Je n'ai pas d'objection à ce que les provinces aient besoin d'une bénédiction particulière du fédéral, mais je veux que le Québec ne soit pas obligé de se plier à ce genre de pratique.
J'essaie de me souvenir quand l'Office de la protection du consommateur a été créé. Mes plus vieux souvenirs sont ceux de Mme Payette qui avait interdit la publicité pour les enfants. L'Office de la protection du consommateur a probablement été institué par un gouvernement libéral à Québec, celui de Jean Lesage ou de Robert Bourassa. Je m'excuse de ne pas connaître mon histoire suffisamment pour le savoir. D'une façon ou d'une autre, il s'agissait de mesures très progressistes, très dynamiques, comme cela a aussi été le cas lors de la création du service de garderies qui était en avance sur la pratique qui avait cours dans le reste du Canada.
Je crois que quelqu'un — M. Bartlett ou M. Jenkin — a dit que cette pratique s'est développée aux États-Unis dans les années 1990. Au Québec, cette pratique était antérieure à cela, ce qui démontre la différence entre les deux logiques.
La législation actuelle essaie de rendre légale une pratique, tout simplement parce que dans plusieurs provinces, on s'est rendu compte que cela débordait et qu'on avait des comportements illégaux sur lesquels on n'avait pas de prise. Au Québec, on a développé cette prise et on a développé une pratique. On a un taux maximum de 35 p. 100. Aujourd'hui, on se fait dire qu'il faudrait obtenir une autorisation du gouvernement fédéral pour réaliser cela. C'est pourquoi il m'apparaît très difficile qu'on puisse adopter la motion telle quelle, d'autant plus que la motion en soi dit qu'on est déjà prêt à voter. Pourtant, on n'a entendu aucune province et aucun autre témoin que les officiels, et on n'a même pas entendu les témoins répondre aux questions des députés.
Si on donne la permission à de poser des questions aux témoins, on pourrait faire une parenthèse dans le débat sur la motion, et je suis certain qu'il aurait des questions complémentaires à poser.
La question du respect de la compétence de la province est très importante. Je lisais une lettre du Conseil des consommateurs du Canada. Son point de vue est différent du mien, mais il soulève aussi la question de la pertinence d'adopter cet amendement au Code criminel rapidement comme on le fait présentement. Il dit que cela va entraîner toutes sortes de pratiques différentes d'une province à l'autre. Je n'ai rien contre le fait d'avoir des pratiques différentes d'un bout à l'autre du Canada, mais je pense qu'on a besoin de prendre beaucoup plus de temps pour l'adopter. Je ne pense pas que la question doive être réglée d'ici Noël ou le Jour de l'An. On a besoin d'approfondir le débat.
J'aimerais beaucoup que le comité cherche à obtenir l'avis formel du gouvernement du Québec sur cette question. Si le comité acceptait d'écrire au responsable du gouvernement du Québec ou au ministre des Affaires intergouvernementales pour connaître son opinion et qu'en bout de ligne, le gouvernement du Québec vous informait qu'il n'a aucune objection face au projet de loi et qu'il peut s'en accommoder, on verrait alors quelle attitude on adopterait. Je trouverais cela plus raisonnable que de passer le bulldozer.
Vous savez, il y a une différence d'un projet de loi à l'autre. Quand on en a parlé pendant 14, 25, 38 ou 75 heures, qu'il y a eu 250 amendements et qu'on a fait le tour, il est possible qu'on en parle simplement pour étirer le temps.
Dans mon cas, c'est le premier débat auquel je participe sur ce projet de loi. Nous en sommes à la première heure de débat en comité. Et si je me souviens bien, ce projet de loi a été envoyé au comité par la Chambre des communes en vue d'y être étudié, de sorte que nous puissions aller au fond de la question.
En ce sens, il y deux éléments importants. Il y a d'abord le respect des champs de compétence qui, au bout du compte, est important; mais c'est un cadre. Ensuite, la façon de fonctionner à cet égard sera-t-elle satisfaisante?
Imaginez cette situation: après l'adoption d'une loi, un citoyen ou un groupe d'entreprises du Québec écrit au premier ministre Harper pour lui demander de modifier la loi existante au Québec parce qu'il ne réussit pas à convaincre le gouvernement du Québec de la corriger. On intervient ainsi auprès du premier ministre fédéral pour faire révoquer la désignation prévue dans le document. Dans quel genre d'imbroglio nous retrouverions-nous si nous ouvrions le débat à cette possibilité? Ce ne serait pas satisfaisant, à mon avis.
Par ailleurs, si on écrivait la loi de façon à ce que soit indiqué que l'on n'a qu'à déposer la loi existante au Québec, qu'à informer de l'existence d'une loi au Québec, on n'ouvrirait alors pas la porte à cette possibilité. M. Harper, en recevant la lettre du Québécois, pourrait dire que cela ne relève pas de sa responsabilité, qu'il n'a fait que constater l'existence d'une loi au Québec, et il pourrait suggérer qu'on règle cela au Québec. Selon moi, tel serait le vrai esprit du fédéralisme autour de cette question.
Ainsi que c'est écrit, nous ouvrons la porte à de potentielles pressions exercées sur les députés fédéraux pour en venir à changer la loi au Québec. C'est un peu malsain par rapport à la pratique courante dans ce champ d'activité. L'amendement se situe à l'intérieur de cette phrase.
Dans la prochaine phrase, on dit ceci :
Je propose que le comité poursuive l'examen article par article du projet de loi en se fixant l'objectif de le terminer et de le renvoyer à la Chambre dans la formule initiale dès aujourd'hui.
Il m'apparaît que mon premier amendement — à l'exception du Québec — rende un peu caduque la deuxième phrase. En effet, comment pourrions-nous, aujourd'hui, décider à ce comité que nous avons déjà réglé toute cette question, alors que nous ne l'avons même pas analysée? Je n'ai pas entendu un député ici me donner son opinion sur cette question, me dire que cela avait du bon sens ou non ou qu'il croit que le gouvernement du Québec est suffisamment protégé à cet égard.
M. McTeague semble vouloir donner son opinion en disant qu'il est prêt à voter, mais ce n'est pas mon cas.
C'est pour protéger les consommateurs, monsieur Crête.
M. Paul Crête: Oui, je suis d'accord avec vous là-dessus. Effectivement, en ce qui concerne la protection des consommateurs... Parlons de la protection des consommateurs. Depuis quelque 40 ans, il existe au Québec une loi sur la protection des consommateurs. Cette loi a passé le test de plusieurs générations différentes et a suscité beaucoup de débats sociaux. À cet égard, nous trouvons que nous avons la maturité nécessaire pour décider de quelle façon ces choses se font.
Des pratiques culturelles peuvent différer d'une province à l'autre sur cette question. Par exemple, je pense à une province qui a été formée initialement par des gens issus de certaines communautés, et pour lesquelles le crédit et la question financière sont très importants : la Nouvelle-Écosse. Les Écossais, entre autres, ont largement contribué à créer le système bancaire canadien. Il peut y avoir en Nouvelle-Écosse une approche différente de celle de la Colombie-Britannique. Cela dépend des populations établies dans chacun des territoires.
L'influence peut se faire sentir ailleurs. Par exemple, le Mouvement Desjardins — les Caisses populaires Desjardins — réalise actuellement, quelque part en Afrique, le microcrédit promu par un Bangladais qui vient de gagner le prix Nobel de la paix. Cette pratique des 35 p. 100, au Québec, a été beaucoup inspirée par la façon de faire du Mouvement Desjardins qui, initialement, a voulu s'organiser pour éliminer les prêts usuraires. Lorsque M. Desjardins a créé le Mouvement Desjardins, il voulait s'assurer que le prêteur usurier d'un village perde son marché. Il voulait trouver une autre façon d'occuper ce marché. Il a créé le Mouvement Desjardins, ce qui a permis aux gens de déposer leur argent, de gagner un peu d'intérêts et d'avoir un compte régulier.
Dans la foulée de ce mouvement, le gouvernement du Québec a décidé de créer une loi en s'inspirant de la législation qui existait déjà et a déterminé que le taux maximum qu'on pouvait appliquer à ce genre de pratique était de 35 p. 100.
Cette loi existait avant même que la tendance nord-américaine se développe et que la pratique soit proposée par le projet de loi. Le projet de loi est davantage souhaité par les prêteurs que par les emprunteurs, contrairement à la législation québécoise. Au Québec, ce sont les gens de la base qui ont voulu que la pratique développée par le Mouvement Desjardins soit la même, afin de s'assurer que personne ne se retrouve dans une situation invivable à cause de cela. C'est de cette façon que la Loi sur la protection du consommateur a été créée.
Le gouvernement fédéral propose un projet de loi qui, selon ma compréhension, a été alimenté beaucoup plus par les entreprises qui consentent ce genre de prêts, car elles tiennent à ce que le cadre de leurs opérations soit légal. Elles ont tout à fait le droit de le souhaiter. Elles pourraient souhaiter aussi qu'un cadre uniforme s'applique dans tout le pays, comme elles pourraient souhaiter que ce cadre se développe différemment d'une province à l'autre. C'est une réalité.
Je pense que l'amendement, en ce sens, est très justifié. Il n'y a pas lieu d'adopter une mesure législative de ce genre, qui imposerait au Québec l'obligation de demander l'aval du gouvernement fédéral.
Je vais vous donner le détail de ce que je présenterais si l'amendement était accepté. Après avoir analysé ce projet de loi, nous avons déposé quatre amendements. Le premier a pour but de clarifier la définition des prêts sur salaire et n'a pas nécessairement rapport au problème de la compétence, mais il créerait tout de même des régimes distincts, selon le montant du prêt, avec toutes les conséquences néfastes que cela pourrait entraîner. Les trois autres amendements ont un seul objectif: enlever le droit de veto que s'arroge le gouvernement fédéral dans un secteur qui ne relève pas de sa compétence : celui de la protection des consommateurs.
Dans la version actuelle de la loi, le gouvernement fédéral non seulement oblige une province qui veut légiférer sur les prêts sur salaire à instaurer un système de licences, mais permet à Ottawa d'imposer sa vision de ce qu'est une loi qui protège les consommateurs. On vient faire par la bande ce qu'on n'a pas pu faire directement. On peut venir influencer...
Plus tôt, je donnais l'exemple de quelqu'un du Québec qui pourrait intervenir auprès du premier ministre fédéral pour obtenir que la législation québécoise soit changée. Mais il pourrait aussi y avoir des gens ayant développé leur industrie dans d'autres provinces du Canada qui pourraient écrire au premier ministre du Canada pour lui dire qu'ils veulent entrer dans le marché québécois, mais que pour ce faire, il faudrait s'assurer que la législation québécoise soit la même que celle du reste du Canada.
En allant dans ce sens, on exercerait une pression sur une autorité qui ne devrait pas pouvoir être influencée de la sorte. Ces gens ont le droit de vouloir influencer les législateurs québécois pour qu'ils modifient la Loi sur la protection du consommateur, mais comme législateur au gouvernement fédéral, je ne veux pas permettre que ce genre de pression soit exercée sur le gouvernement fédéral plutôt que sur le gouvernement du Québec.
Un de nos amendements, qui porte le numéro 2524665, porte justement sur la question des licences et est plus souple, permettant aux provinces de choisir de quelle manière elles désirent autoriser les entreprises de prêts sur salaire. Ainsi, plutôt que d'imposer un système de licences, notre version permet aux provinces d'autoriser de la manière qu'elle juge la plus efficace les entreprises pouvant oeuvrer dans ce secteur.
Un autre amendement, le 2524712, vise à abroger une condition qui est imposée en retard par le gouvernement fédéral. D'une part, le gouvernement fédéral n'a pas de compétence en matière de protection du consommateur et n'a pas, via l'analyse des lois du Québec et des provinces, à y imposer ses buts.
Un autre amendement, le 2524742, est du même ordre. Il vise à empêcher le fédéral d'exercer un droit de veto sur les lois du Québec et des provinces, et de leur retirer arbitrairement le pouvoir de légiférer sur l'industrie des prêts sur salaire. Le gouvernement du Québec est un gouvernement responsable. Il a été élu par la population, il a un mandat de la population, il a à coeur la protection de ses citoyens et citoyennes et il a tout à fait le droit de prendre toutes les mesures qu'il juge indiquées pour réglementer l'industrie.
La dernière partie du paragraphe 4 parle de donner un droit de veto sur la justesse des mesures de protection du Québec et des provinces.
Pour nous, le gouvernement fédéral n'a ni l'expertise ni la compétence pour analyser si les lois sur la protection des consommateurs les protègent adéquatement. Il revient au Québec et aux provinces de déterminer le régime de protection des consommateurs.
Pour toutes ces raisons, je pense que l'amendement que j'ai proposé est intéressant et devrait être retenu par cette assemblée. Si d'autres députés veulent intervenir sur cette question, ils pourraient le faire immédiatement.
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À mon avis, si on adoptait mon sous-amendement, on pourrait alors recevoir tous les témoins pertinents. Ensuite, on pourrait procéder au vote. Je vais vous lire la lettre du Consumers Council of Canada. Excusez la qualité de mon anglais.
[Traduction]
La lettre est datée du 11 décembre 2006. En objet, le projet de loi . Elle est adressée au président et aux membres du comité de l'Industrie et des sciences et de la technologie. Je cite :
Le Conseil des consommateurs du Canada tient à signaler aux membres du comité qu'il a de graves inquiétudes en ce qui concerne la modification proposée au Code criminel.
Le Conseil des consommateurs du Canada estime qu'au nom de l'intérêt des consommateurs canadiens, il faut que le gouvernement fédéral établisse les taux d'intérêt perçus sur les prêts de complaisance, communément appelé prêts sur salaire.
Si la modification proposée est adoptée, les provinces fixeront des niveaux de frais différents pour de tels prêts. En effet, certaines provinces ne demanderont pas au gouvernement fédéral la permission d'établir un taux et par conséquent la pratique de percevoir des taux criminels perdurera. Cela ne sert pas les intérêts des consommateurs et cela va à l'encontre des rapports d'harmonisation préparés actuellement.
Le Conseil des consommateurs du Canada estime également que pour servir l'intérêt des consommateurs il faudrait que les banques et les caisses d'épargnes offrent des produits de prêts de convenance.
Nous vous exhortons donc à garder à l'esprit l'intérêt des consommateurs à l'occasion de la modification du Code criminel.
[Français]
Je voulais préciser que le Conseil des consommateurs du Canada pourrait être invité à témoigner. On pourrait également inviter les banques, les caisses populaires et les coopératives d'épargne. En effet, en matière de gestion des fonds bancaires, ce sont des acteurs pertinents. Pour ce qui est de la lettre du gouvernement du Québec, ce n'est pas un avis officiel et je ne peux pas vous en faire part mot à mot. Toutefois, je suis convaincu que le ministre du gouvernement du Québec va entrer en contact avec le ministre de l'Industrie du Canada ou le ministre de la Justice, de façon à faire connaître son opinion.
Je ne vous lirai pas cet avis intégralement, mais je vous assure qu'il existe. Vous devez me faire confiance à ce sujet. En gros, on dit ne pas avoir de réserves sur le fond de la question, mais vouloir s'assurer que la prérogative et les lois du Québec vont être respectées. Je pense que le processus de désignation administrative devrait être retiré, ce qui permettrait d'assurer le respect de la compétence du Québec en matière de protection du consommateur. Selon moi, cette lettre confirme à quel point il serait important d'inviter ces gens à titre de témoins.
C'est pourquoi mon sous-amendement parle de la possibilité de recevoir tous les témoins pertinents. Il y en a d'autres. J'ai mentionné le Conseil des consommateurs du Canada, mais il pourrait y avoir aussi l'Union des consommateurs. Il serait pertinent d'entendre l'opinion des gens qui proposent ce système, ceux qui nous ont rencontrés et insisté pour qu'une loi soit adoptée en ce sens. On pourrait peut-être inviter également les citoyens qui connaissent cette réalité et voir si certains d'entre eux désirent nous dire comment ils vivent la chose et comment ils envisagent la possibilité que le taux maximum soit de 35 p. 100 au Québec et d'un autre ordre ailleurs.
Pour moi, le fond de la question est qu'on a ici un projet de loi qui mérite d'être adopté. Je souhaite qu'il le soit le plus tôt possible, en autant qu'il respecte la compétence du Québec. Jusqu'à maintenant, les avis que j'ai obtenus ne m'indiquent pas que c'est le cas. C'est pourquoi je souhaite que des témoins comparaissent. On pourrait également recevoir des constitutionnalistes neutres et un expert juridique afin de savoir s'il serait pertinent que les amendements proposés soient considérés.
Il me semble que nous avons entre les mains de quoi faire une bonne analyse de tout le projet de loi. Mon sous-amendement a comme effet de bonifier la proposition. Celle-ci dit qu'il faudrait voter le plus vite possible en ayant toute l'information nécessaire. Or, selon moi, on n'a pas l'information requise, pour le moment. C'est pourquoi je souhaite que ce sous-amendement soit proposé. Je ne sais pas si M. McTeague va en appeler de la validité de sa propre proposition. Il pourrait peut-être décider qu'elle n'est pas conforme au Règlement et vouloir en présenter une autre.
Au-delà de tout ce qui touche la procédure parlementaire, il serait important que les membres de ce comité comprennent que le gouvernement du Québec a une responsabilité à cet égard, qu'il a une compétence à cet égard, et que la façon dont le projet de loi est rédigé ne satisfait pas le gouvernement du Québec.
Ce n'est pas le séparatiste que je suis que cela ne satisfait pas, ce ne sont pas seulement les fédéralistes du Québec que cela ne satisfait pas, c'est le gouvernement du Québec, le gouvernement élu par la population du Québec. C'est lui qui exprime, par l'entremise du ministère de la Justice, son opposition à ce que le projet de loi soit adopté dans sa forme actuelle.
Une voix: Il y a la liste.
M. Paul Crête: Excusez-moi, j'ai été dérangé par un bruit.
Une voix: Il a dit qu'il voulait avoir la liste. Je suis d'accord là-dessus.
M. Paul Crête: Moi, cela ne me pose aucun problème. Je suis prêt à recevoir le ministre de la Justice du Québec. D'ailleurs, qu'on lui envoie l'invitation, et il va nous dire s'il est prêt ou non à comparaître. Il peut comparaître devant nous ou nous écrire une lettre pour que le texte que j'ai puisse prendre une forme plus officielle. Il peut aussi communiquer avec le ministre fédéral de l'Industrie, et à la suite de leurs discussions, le gouvernement pourra amender son projet de loi. On pourrait ainsi finir par adopter ce projet de loi pour que puisse se développer dans le reste du Canada une industrie du secteur du prêt sur salaire qui soit bien régie, bien adaptée à la réalité de chacune des provinces, mais qui, en même temps, respectera la compétence du Québec.
C'est l'esprit dans lequel mon sous-amendement a été proposé. Quand je dis « après que nous ayons reçu tous les témoins proposés par les députés », c'est pour compléter l'explication. Évidemment, s'il y a d'autres députés qui ont des témoins à proposer, je ne suis pas porteur de la vérité à cet égard. Si M. Vincent ou n'importe quel autre membre du comité a une liste de témoins à soumettre, il serait pertinent que cela puisse se faire de telle façon qu'on ait effectivement toute l'information nécessaire pour adopter une loi qui soit conforme à ce qu'elle devrait être.
C'est un peu ce que j'ai à dire sur mon sous-amendement tel qu'il est rédigé. J'aimerais, au moment où nous serons rendus au vote, qu'on nous relise la proposition de base, les amendements et le sous-amendement, pour que les membres du comité puisse les saisir correctement dans leur ensemble, avec toutes les nuances qu'ils contiennent, autant le sous-amendement et l'amendement que la proposition principale, lorsqu'elle sera modifiée.
Voilà ce que j'avais à dire au sujet de ce sous-amendement. Il me fera plaisir de prendre la parole par la suite sur l'amendement, je crois, de M. Colin Carrie. Selon ce qui va arriver...
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En effet, je ne parle que du sous-amendement.
Si le sous-amendement est adopté, il sera facile de voter en faveur de l'amendement. Par contre, si le sous-amendement n'est pas adopté, cela va changer toute la perspective. Je le mets de l'avant pour vous faire voir sa relation avec l'ensemble de la proposition qui est devant nous, qui peut être constructive si on respecte ce qui doit être respecté.
J'ai dit « les témoins proposés par les députés », sans préciser s'il s'agissait des députés membres du comité ou de l'ensemble des députés de la Chambre des communes, mais nous pourrions en décider en comité. En effet, des députés qui ne sont pas ici pourraient vouloir proposer des témoins. Le texte est imprécis à cet égard et je m'en excuse. Si le sous-amendement est adopté avec les mots « par les députés », le comité décidera comment gérer cela.
Si on dit « les témoins proposés par les députés », cela suppose qu'il faut un peu de temps pour les proposer. Il faudrait qu'on nous accorde entre 12 heures et 24 heures pour envoyer la liste formelle des gens qu'on aimerait entendre et pour que vous envoyiez des avis écrits. Cela évitera des discussions, des chicanes ou des mauvaises interprétations à propos de la pertinence des témoins retenus pour l'étude du projet de loi, à la suite des témoignages des fonctionnaires des ministères que nous avons reçus. L'écoute des témoins nous permettrait de peser le pour et le contre et de mieux juger cette question.
Nous avons entendu des fonctionnaires qui ont un devoir de responsabilité envers l'État fédéral et qui sont très dévoués à leur tâche. Je comprends très bien le point de vue qu'ils ont exprimé. Toutefois, en tant qu'élu, j'ai la responsabilité d'aller au-delà de ce que disent les experts et d'entendre aussi ce que d'autres personnes veulent nous communiquer, notamment sur le respect des compétences du Québec.
Par ailleurs, il serait important d'entendre l'opinion de témoins sur un certain amendement. Notre premier amendement clarifie la définition des prêts sur salaire. Dans la formulation actuelle, il m'apparaît que les prêts sur salaire n'auraient pas de plafond. Or les provinces ne pourraient légiférer que sur les prêts de moins de 1 500 $. Cela créerait des régimes distincts selon le montant du prêt, entraînant des conséquences néfastes. Il vaut mieux en établir les limites dans la définition même du prêt sur salaire.
Ne serait-ce que pour cet amendement, il serait important d'entendre des témoins. Je ne suis peut-être pas le seul à vouloir présenter des amendements au projet de loi. Peut-être M. Vincent ou d'autres députés voudront-ils en apporter aussi après que nous aurons entendu les témoins. Nous pourrons alors les ajouter afin de voir correctement la situation.
J'ai étudié beaucoup de projets de loi au Parlement. Je n'ai pas la prétention d'avoir la science infuse. Pensons au projet de loi C-55 sur le droit de la faillite de l'an dernier que nous avons adopté à toute vapeur. Tous les partis politiques ont donné leur appui. Nous avons fait tout cela dans la même journée, pour nous rendre compte ensuite que cette loi était inapplicable et qu'elle présentait un problème important. Je pense que la même chose se produit aujourd'hui.