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Merci, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole en premier. À l'école, j'étais toujours le premier — mon nom commence par un « A », de sorte que je figurais toujours au haut de la liste.
J'espère que cela n'a pas chamboulé votre ordre du jour. Quoiqu'il en soit, je vous suis reconnaissant de m'offrir la possibilité, voire le privilège, de m'adresser à vous aujourd'hui.
Tout d'abord, j'aimerais résumer mon exposé en soulignant d'emblée qu'une foule de bonnes activités de conservation sont menées par les Premières nations, les membres de l'industrie et les ONG sur nos territoires respectifs. Le moment est peut-être bien choisi pour reconnaître l'importance de la présente étude, du travail mené par le comité et de votre présence ici à titre de parlementaires, et pour vous remercier de m'avoir invité à participer à la réunion et à vous communiquer quelques réflexion découlant des questions que vous avez posées.
Au moment d'élaborer un plan de conservation national — un PCN —, le défi consistera à conserver une vision uniforme et cohérente qui s'appuie sur nos réussites. L'histoire et l'expérience nous ont appris que le gouvernement doit faire des Premières nations des partenaires à part entière, rien de moins, à défaut de quoi on risque de compromettre nos priorités communes.
L'organisation que je représente, à savoir l'Assemblée des Premières Nations, suggère que, au moment d'élaborer un PCN, nous adoptions un cadre général fondé sur le principe de l'utilisation durable des ressources environnementales. Pour que le PCN soit une réussite et donne suite aux questions touchant les priorités, il faut, selon nous, qu'il reconnaisse que les titres et droits ancestraux ou issus de traités des Premières nations constituent le fondement de la gestion des terres, et qu'il permette la création de partenariats avec l'industrie et les ONG. En outre, il doit fournir aux Premières nations des occasions de mettre en pratique et en commun leurs connaissances et leurs façons de faire ancestrales dans l'ensemble de leurs territoires traditionnels, et confirmer la participation des Premières nations aux échelons national, régional et communautaire pour garantir l'existence d'une démarche coordonnée. Je pourrais décrire cette dernière expression dans ma langue, mais je laisserai à M. Lunney l'occasion de le faire, de manière à tester sa maîtrise de la langue nuu-chah-nulth. Nous reviendrons peut-être là-dessus plus tard.
Les Premières nations mettent en pratique les principes de la conservation depuis des temps immémoriaux. Nous respections les principes de la durabilité bien avant que ce terme n'existe. L'idée de durabilité trouve son expression dans les diverses langues autochtones, et les Premières nations ont contribué à la faire connaître au monde entier. Rappelez-vous les premières discussions internationales tenues à Rio — il avait été question de la notion de durabilité et du fait qu'il était nécessaire que les peuples autochtones contribuent à sa définition pour la suite des choses
Pour les Premières nations, la durabilité a toujours consisté en un environnementalisme traditionnel unique, alors que les tenants de la conservation ont souvent cherché à protéger l'environnement en interdisant l'utilisation des ressources présentes dans l'environnement. Je pourrais citer de nombreux exemples pour illustrer cela, dont certains sont mêmes tirés de ma région d'origine, sur la côte Ouest de l'île de Vancouver.
Les Premières nations ont toujours été conscientes du fait que nous faisons partie intégrante de l'environnement. L'utilisation excessive des ressources va à l'encontre des principes de la conservation, mais celle-ci n'exige pas non plus que nous cessions complètement d'utiliser ces ressources. Notre prospérité est tributaire de notre capacité d'utiliser les ressources environnementales de façon équilibrée. Il s'agit là d'un principe qui s'applique non seulement aux Premières nations, mais également à toutes les sociétés et, en fait, à toutes les formes de vie terrestre.
Pour les Premières nations et l'ensemble des Canadiens, la question consiste à déterminer comment nous devons nous y prendre pour utiliser les ressources de façon durable. Nous avançons que le PCN devrait être axé sur le fait d'encourager l'utilisation durable des ressources environnementales, et faire ressortir l'importance de l'usage coutumier et durable des ressources par les Premières nations.
L'idée selon laquelle l'usage coutumier et durable devrait se trouver au cœur d'un plan national de conservation n'est pas nouvelle. Selon l'alinéa 10c) de la Convention sur la diversité biologique, le Canada doit « protéger et encourager l'usage coutumier des ressources biologiques conformément aux pratiques culturelles traditionnelles compatibles avec les impératifs de leur conservation ou de leur utilisation durable ».
Pour soutenir l'usage coutumier et durable des ressources, nous devons intégrer au PCN les deux piliers suivants: premièrement, la mise en pratique des connaissances traditionnelles et deuxièmement — ce qui est d'une importance cruciale —, la reconnaissance des droits autochtones ou issus de traités. Je ne saurais trop insister sur le deuxième élément.
Peu de gens savent que certaines des régions abritant la plus grande biodiversité dans le Sud de l'Ontario et au Canada ont quelque chose en commun. Il s'agit de régions qui ne sont pas particulièrement éloignées, et qui n'ont pas fait l'objet d'importantes mesures fédérales ou provinciales de protection environnementale. Bien sûr, les régions auxquelles je fais allusion sont celles où se trouvent des communautés des Premières nations.
Qu'est-ce qui explique la grande diversité des communautés des Premières nations? À coup sûr, cette diversité n'est aucunement attribuable au cadre fédéral de réglementation ni, du reste, à un quelconque objectif centralisé en matière de protection. En outre, très peu de Premières nations disposent de règlements administratifs officiels découlant de la Loi sur les Indiens portant spécifiquement sur la biodiversité. Ce qui explique cette grande diversité, c'est le fait que les Premières nations continuent de gérer leurs territoires de la même façon depuis d'innombrables générations.
De plus en plus, les Premières nations ont recours à la fois aux connaissances scientifiques et à leur savoir traditionnel pour gérer l'environnement dans l'ensemble de leurs territoires ancestraux. L'Assemblée des Premières Nations souligne que l'alinéa 8j) de la Convention sur la diversité biologique exige que le Canada « respecte, préserve et maintienne les connaissances, innovations et pratiques des communautés autochtones et locales ». Je songe ici à un groupe de scientifiques qui a vu le jour dans la région de la baie Clayoquot à la suite d'importants barrages routiers visant à protester contre les coupes à blanc pratiquées dans les territoires où j'habite. Ce groupe, composé de scientifiques et de chefs de nos communautés possédant des connaissances traditionnelles — dont l'un était mon propre père — a mené une initiative de grande envergure s'appuyant sur l'ensemble des principes que je viens de mentionner. Il existe donc des modèles dont nous pouvons nous inspirer.
Je sais que les membres du comité permanent ont entendu parler des objectifs d'Aichi en matière de biodiversité. J'aimerais dire quelques mots à propos de l'objectif 18, selon lequel les connaissances, innovations et pratiques traditionnelles des Premières nations qui présentent un intérêt pour la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique, ainsi que leur usage coutumier des ressources biologiques, soient respectées, intégrées et prises en compte dans le cadre des initiatives de conservation, avec la participation entière et effective des Premières nations. Nous faisons observer qu'il ne s'agit pas d'un objectif indûment rigoureux, et qu'il serait facilement réalisable dans le cadre du PCN.
De nombreuses Premières nations parviennent à mettre en pratique leurs connaissances traditionnelles tout en collaborant avec d'autres organisations, par exemple Parcs Canada, afin d'éduquer les Canadiens. La Première nation de Caldwell, la Première nation de Walpole Island et Parcs Canada administrent conjointement le parc national de la Pointe-Pelée, et collaborent pour accroître le contenu éducatif touchant les Premières nations. En accroissant le recours à leurs connaissances et la compréhension de leur culture au moyen de programmes d'éducation, et en participant davantage à l'administration des parcs, les Premières nations peuvent aider les Canadiens à entrer en contact avec la nature et à acquérir une meilleure compréhension de leurs cultures, de leurs langues et de leurs systèmes de connaissances. C'est tout à fait dans ce but que nous avons tenu la rencontre entre la Couronne et les Premières nations en janvier. Cette rencontre visait à nous permettre de discuter des relations qui ont donné naissance au pays et sont à l'origine des traités, et de la nécessité d'un retour à l'idée d'une meilleure compréhension entre les Premières nations et le reste du Canada.
Les Premières nations du Canada ont besoin d'environnements sains et d'un accès aux ressources naturelles afin de préserver leur culture et d'assurer leur subsistance. La durabilité est l'un des fondements de la réconciliation, car en l'absence d'un environnement sain, les Premières nations ne peuvent pas préserver leur culture ni en faire la promotion. De surcroît, les Premières nations ne peuvent pas exercer leurs droits, particulièrement leurs droits de récolte, si leurs environnements sont perturbés et si les espèces qu'ils abritent sont en voie d'extinction. Nous tenons à mettre l'accent sur le fait que les droits dont nous parlons sont absolument indissociables de la conservation, de l'usage coutumier et de l'utilisation durable. Nous affirmons que nous ne pouvons pas établir une distinction entre ces éléments — ils doivent demeurer liés de façon inextricable.
Cela est totalement compatible avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada a appuyée. J'attire votre attention sur l'article 29 de cette déclaration, où est énoncé un droit relatif à la conservation et à la protection des terres et des territoires des peuples autochtones, et où on invite les États à mettre en place des programmes visant la conservation et la protection de ces terres et territoires.
Selon l'article 24, les peuples autochtones ont le droit de préserver leurs plantes médicinales. Le PCN, sous la forme où on l'envisage actuellement, pourrait aisément respecter ces deux normes. Ce que l'on sait un peu moins, c'est que les droits ancestraux ou issus de traités des Premières nations constituent également de précieux outils de conservation des environnements essentiels.
Un autre résultat de la rencontre tenue en janvier dernier avec la Couronne tient à ce que le premier ministre a exprimé, au nom du gouvernement, le désir de collaborer avec les Premières nations afin que les droits issus de traités soient appliqués et que la reconnaissance des droits et des titres ancestraux se traduise dans les faits.
Les Premières nations sont obligées par leurs propres lois de gérer leur environnement pour veiller à ce que toutes les ressources soient extraites de l'environnement de façon respectueuse et selon les principes de la durabilité. On nous a toujours dit: « Ne prenez que ce dont vous avez besoin. » Il s'agit d'un précepte qu'on nous a tous inculqué. Si leurs droits sont reconnus, les Premières nations peuvent respecter leurs propres lois. Je pourrais donner de nombreux autres exemples, notamment celui d'un parc tribal de mon territoire natal qui a lui aussi vu le jour par suite des barrages routiers du début des années 1990, de la guerre de la baie Clayoquot, comme on l'appelle souvent.
Il existe bon nombre d'autres exemples. En Ontario, des Premières nations ont participé au processus visant la désignation par l'UNESCO de la portion est du lac Winnipeg comme site du patrimoine mondial. Bien sûr, il y a le parc des Gwaii Haanas, situé à Haida Gwaii, en Colombie-Britannique.
En conclusion, je dirai que, selon moi, un comité comme le vôtre sait déjà qu'il existe une multitude de modèles dont nous pouvons nous inspirer. Nous n'avons pas à réinventer la roue. Ce que nous devons faire, c'est demander à toutes les Premières nations, aux membres de l'industrie, au gouvernement et aux ONG de se pencher sur ce que nous pouvons faire.
Une stratégie nationale doit respecter et reconnaître les titres et droits ancestraux ou issus de traités des Premières nations, et soutenir ces dernières au moment où elles mettent en pratique leurs connaissances traditionnelles. Le respect rigoureux de ces droits est un outil qui contribue à une préservation efficace et une utilisation durable. L'inobservation de ces droits constituera un obstacle, et entravera les progrès. Un dialogue constructif à l'échelle nationale peut rendre tout cela possible, mais seulement si les Premières nations y participent à part entière.
En terminant, je vais répéter les trois principales recommandations de l'Assemblée des Premières Nations à l'intention du comité permanent. Premièrement, la gestion des terres et la création de partenariats avec l'industrie et les ONG passent par le respect des titres et droits ancestraux ou issus de traités des Premières nations. Deuxièmement, il faut donner l'occasion aux Premières nations de mettre en pratique et en commun leurs connaissances et leurs façons de faire traditionnelles dans l'ensemble de leurs territoires ancestraux. Troisièmement, il faut confirmer la participation des Premières nations aux échelons national, régional et communautaire afin de garantir adoption d'une démarche coordonnée.
Merci de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous.
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Merci de m'avoir invitée ici.
Je suis membre du comité de l'environnement de l'Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes. Je suis donc ici pour représenter l'industrie. Nous vous sommes reconnaissants de nous donner l'occasion d'être ici.
Pour l'essentiel, durant mon exposé, je passerai en revue ces cinq questions. Commençons par la première.
Nous estimons que le PCN doit veiller à conserver la biodiversité des espèces et des ressources naturelles dans tout le pays. Dans ce cadre, il fait la promotion de la conservation et de la protection des espaces verts en milieu urbain. Il devrait établir des normes et des politiques qui éduquent les aménageurs, les entreprises et la population sur la conservation des espaces verts.
À nos yeux, le PCN doit poursuivre quatre objectifs. Premièrement, il doit établir des politiques pour protéger les écosystèmes tant en milieu urbain qu'en milieu rural. Deuxièmement, il doit créer des réseaux d'espaces verts partout au Canada. Troisièmement, il doit éduquer les aménageurs et la population sur les pratiques de conservation et les avantages que rapportent la protection des espaces verts. Quatrièmement, il doit favoriser la remise en état et la mise en valeur des terres.
Le principe directeur qui devrait orienter le PCN est celui du développement durable, qui consiste à respecter les besoins actuels sans compromettre ceux des générations à venir, et à adopter des principes de croissance intelligente. L'initiative sur les sites durables est fondée sur l'idée selon laquelle tout paysage a le potentiel d'améliorer et de régénérer ses écoservices. Il s'agit d'une initiative dans le cadre de laquelle nous allons au-delà des sites qui font habituellement l'objet de mesures de conservation, et nous attaquons à une tâche plus difficile, à savoir celle de restaurer les sites endommagés. Beaucoup de nos membres participent à la restauration d'anciens sites contaminés.
Une autre ligne directrice concerne l'infrastructure verte vivante et l'aménagement à faible impact écologique. En d'autres termes, il s'agit d'intégrer des plantes et des espaces verts au processus d'urbanisme, et de faire des plantes un élément utile de l'infrastructure. En un mot, nous devons composer avec la nature plutôt que de la recouvrir de béton.
Les priorités en matière de conservation qui devraient être intégrées à un PCN doivent porter sur la survie des diverses espèces de la faune et de la flore afin de maintenir la biodiversité dans les milieux tant ruraux qu'urbains. Cela signifie qu'il faut protéger les habitats et empêcher la détérioration du sol, de l'air et de l'eau.
L'Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes croit que le PCN doit insister fortement sur le milieu urbain. À l'heure actuelle, celui-ci élimine les espaces verts et réduit les habitats des plantes et des animaux. Comme un nombre croissant de Canadiens vivent en milieu urbain, les gens se dissocient de plus en plus de la nature. Le fait d'accorder un intérêt particulier au milieu urbain peut permettre de restaurer les terres dégradées, de créer et de maintenir les habitats et de rapprocher les gens de la nature de manière à ce qu'ils constatent la valeur de l'environnement naturel et apprécient les espaces préservés situés à l'extérieur des villes où ils habitent. En faisant une priorité de l'infrastructure verte vivante, le PCN favorisera un lien plus étroit avec la nature et permettra la coexistence de la conservation et des activités économiques. L'infrastructure verte vivante peut créer de l'espace où les plantes et les animaux sont florissants et peuvent se déplacer à l'intérieur des frontières urbaines.
L'aménagement à faible impact écologique peut exploiter les plantes et les espaces verts pour réduire la pression sur l'infrastructure municipale et assurer la gestion des eaux pluviales pendant les précipitations. Ce type d'aménagement vise à utiliser les plantes pour gérer les ruissellements avant qu'ils ne se déversent dans les égouts municipaux. Cela peut aider à réalimenter les nappes souterraines pour conserver nos ressources en eau, tout en contribuant à verdir l'espace urbain. L'aménagement à faible impact écologique peut signifier d'utiliser les parcs pour recueillir l'eau de pluie ou reverdir les terrains de stationnement pour créer plus d'endroits où capter les ruissellements et délimiter les autos des piétons. Cela a pour effet de créer des quartiers plus adaptés aux besoins des piétons.
La protection des espaces verts en milieu urbain peut aussi contribuer à purifier l'air et, si l'emplacement de ces espaces verts est bien pensé, à réduire la consommation énergétique des édifices. Cela peut nous aider à conserver nos ressources énergétiques et à atténuer les effets des changements climatiques, que nous pouvons déjà observer, par exemple, l'effet d'îlot thermique urbain et l'accroissement des émissions de CO2.
Le PCN doit établir des normes de « zéro perte nette en arbres » et de protection du couvert d'arbres au Canada, particulièrement dans les villes. Quelques États des États-Unis, par exemple le New Jersey, ont mis ces politiques en oeuvre. Tout arbre enlevé doit être remplacé.
Les normes doivent également fixer un minimum de parcs et d'espaces verts par personne. Toutes les collectivités doivent avoir accès à la même proportion d'espace vert, selon la taille de sa population. Tout nouvel édifice ou nouveau revêtement dur devrait être compensé par un volume approprié de nouvelle végétation ou de couvert végétal.
Pour mettre en oeuvre ces priorités, nous croyons qu'il faut effectuer des recherches pour repérer les endroits sensibles et uniques à conserver, protéger et restaurer dans les milieux urbains ou ruraux. Le Canada doit créer un réseau d'espaces protégés et veiller à la préservation d'espaces verts, qui peuvent comprendre les parcs et les espaces urbains. L'utilisation d'espaces verts en milieu urbain constitue une occasion unique de combler le fossé qui sépare notre réseau actuel d'espaces protégés et les nouveaux écosystèmes que nous prévoyons protéger dans le cadre du PCN. La restauration d'écosystèmes dégradés, comme celle de terrains industriels contaminés et le recours aux principes de l'initiative sur les sites durables représente d'autres moyens de mettre en oeuvre ces priorités.
Une campagne d'éducation peut sensibiliser davantage la population à l'égard de la protection et de la conservation des espaces verts. Par exemple, notre industrie a participé au nettoyage du parc St. James, à Toronto. Ce parc avait été endommagé par des manifestants qui l'avaient occupé l'automne dernier. Il s'agit d'un espace auquel la communauté accorde une grande valeur. L'industrie a saisi la balle au bond et a contribué à sa remise en état. Il s'agit d'un exemple d'espace vert qui a été pris en charge, mais il est toujours précieux pour la communauté et doit être protégé.
Nous estimons que le processus de consultation doit mettre à contribution des chercheurs, l'industrie et la population. Nous pouvons avoir recours aux outils et aux recherches déjà menées par la Direction générale des services agroenvironnementaux d'Agriculture et Agro-alimentaire Canada, laquelle s'est penchée sur les moyens que nous devons prendre pour nous adapter aux changements climatiques, et qui a formulé des prédictions sur la manière dont le climat pourrait modifier nos écozones. Cela pourrait avoir pour effet de réorienter nos priorités en ce qui a trait au PCN.
Il faut continuer de mobiliser des organisations comme l'Association canadienne des pépiniéristes et des paysagistes, qui possèdent l'expertise et les outils requis en matière d'horticulture environnementale. Notre industrie peut contribuer à la préservation et à la remise en état de nos terres, et aider les Canadiens à continuer de valoriser la nature, ce qui constitue la meilleure façon dont le PCN peut se révéler efficace.
Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Le témoin s'exprime en inuktitut.]
Merci de nous avoir invitées ici aujourd'hui.
Quelque 55 000 Inuits vivent dans l'Arctique canadien, notre terre natale que nous appelons l'Inuit Nunangat, et qui est un élément essentiel de l'identité de notre peuple. Nous devons transmettre aux futures générations d'Inuits une terre qui continuera à leur fournir ce dont ils ont besoin. À cette fin, les ententes sur les revendications territoriales, les pratiques de récolte et les systèmes de gestion de la faune des Inuits ont tous été conçus pour faire en sorte que les ressources fauniques soient administrées de façon durable. La conservation de la faune concerne non seulement des questions liées à la nourriture, mais également des questions liées au développement économique, par exemple, les produits de la faune, le tourisme et le commerce. Une vision viable et contemporaine de la conservation devrait veiller à ce que nous exploitions nos ressources fauniques de façon humaine et écologiquement responsable, et ce, sans engendrer d'obstacle artificiel.
Dans l'Arctique, une économie globale équilibrée passe par la vitalité de l'économie fondée sur les ressources renouvelables. Nous nous réjouissons à la perspective de faire la promotion de l'ensemble de nos activités et de nos produits liés à la faune, et de répondre à la demande constante et durable dont ils font l'objet. Nous avons beaucoup insisté là-dessus. La contestation juridique de l'interdiction d'importation des produits dérivés du phoque imposée par l'Union européenne, de même que les efforts que nous avons déployés pour promouvoir l'utilisation durable et la conservation, constituent de bons exemples de notre détermination. Comme c'est le cas dans tous les domaines, la planification et l'élaboration de politiques en matière de conservation doivent être cohérentes, fondées sur de principes judicieux, axées sur la réalisation objectifs rigoureux et mises en oeuvre suivant de solides éléments probants.
Dans le but de constituer un bassin d'éléments probants, les Inuits continuent de prôner une plus vaste reconnaissance du savoir qu'ils possèdent sur l'environnement et la faune de l'Arctique. À nos yeux, nos connaissances sont inestimables, mais elles doivent également être un élément essentiel de la collaboration avec le gouvernement et les autres intervenants dans les secteurs de la recherche, de la gestion, de la prise de décisions et de l'élaboration de politiques. Nous déployons des efforts afin que les connaissances des Inuits soient valorisées et reconnues tant au Canada qu'à l'étranger. Le reste du monde ne prendra pas au sérieux un plan de conservation visant l'Arctique n'ayant pas élaboré et mis en oeuvre avec la participation pleine, entière et juste des Inuits, ou qui n'accorde pas une place centrale aux besoins et aux idées de ces derniers.
La recherche d'une démarche axée sur la collaboration a donné lieu à quelques agréables précédents. À l'échelon national, les Inuits ont collaboré avec Environnement Canada dans le cadre de processus liés à la Loi sur les espèces en péril et la CITES. Des relations de travail également productives ont été établies avec des gouvernements territoriaux et des organismes de cogestion de l'Arctique afin d'examiner une diversité de questions et de problèmes liés à la faune. Nous collaborons avec le gouvernement du Canada pour défendre la chasse aux phoques, et nous lui sommes reconnaissants du soutien qu'il nous fournit à ce chapitre.
Cela dit, les gouvernement fédéral, provinciaux, territoriaux et autochtones pourraient en faire davantage pour que les opinions et les intérêts des Inuits constituent un élément plus important des processus, des projets et des résultats pertinents. Nous pouvons nous attendre à ce que les défis et les mesures d'incitation deviennent de plus en plus complexes au moment où nous nous efforçons d'établir un juste équilibre entre la conservation des ressources naturelles — les terres, les océans et la faune — et le développement industriel. Au Canada, les controverses actuelles en ce qui a trait aux pipelines servant à l'exploitation des sables bitumineux et au forage pétrolier dans l'Arctique illustrent bien cela.
Les Inuits de la région circumpolaire ont récemment présenté au monde entier quelques principes clés devant orienter les mesures que nous prenons pour établir ce juste équilibre dans l'Arctique tout en respectant leurs droits et leurs valeurs. Un PCN devrait souscrire expressément à la déclaration sur les principes en matière d'exploitation des ressources dans la région circumpolaire qu'ont publiée les Inuits et qui s'intitule A Circumpolar Inuit Declaration on Resource Development Principles in Inuit Nunaat. J'ai amené quelques exemplaires de cette importante déclaration, et je crois qu'ils ont été remis à la greffière.
Conformément à cette déclaration et pour de nombreuses autres raisons judicieuses, il faudrait que l'Inuit Nunangat — la terre natale des Inuits — soit désignée, dans le cadre d'un PCN, en tant que région distincte et revêtant une importance de premier plan, qui englobe l'Arctique québécois, le Labrador et l'Arctique territorial. Cela signifie que l'on doit considérer les régions terrestres et marines de l'Arctique comme des éléments à part entière d'un plan régional de l'Arctique.
Les ententes sur les revendications territoriales des Inuits illustrent bien qu'il est possible de régler de façon extrêmement intégrée les problèmes liés aux régions terrestres et marines. De la même manière que les priorités des Inuits doivent se trouver au cœur du volet d'un PCN portant sur l'Arctique, les Inuits doivent jouer un rôle de premier plan dans le cadre de l'élaboration et de la mise en oeuvre d'un tel plan. De multiples raisons péremptoires justifient cela: des raisons de nature juridique et politique, les droits issus des revendications territoriales, le devoir de la Couronne de consulter et de chercher à prendre des mesures d'accommodement, les normes internationales en matière de droits de la personne et des raisons d'ordre politique et moral. Les Inuits s'attendent à cela, et n'exigent rien de moins. Il y a également des raisons d'ordre pratique, stratégique et commercial. Les Inuits représentent des partenaires créatifs et fiables en matière de commerce et d'élaboration de politiques.
Nous avons besoin de lois et de politiques prudentes, efficaces et modernes pour régir l'exploration et l'exploitation pétrolière et gazière dans l'Arctique, surtout dans les zones marines. Les régions doivent avoir le dernier mot sur la question de savoir si l'on devrait autoriser l'extraction minière de l'uranium dans certaines régions de l'Arctique. Les projets industriels importants doivent obtenir l'approbation des instance politiques régionales et nationales, et ce, même avant un transfert officiel de pouvoirs accrus en matière d'exploitation des ressources naturelles. Au Groenland, on préconise ce type de démarche bilatérale.
Un PCN doit favoriser et accélérer la mise en oeuvre complète des ententes sur les revendications territoriales des Inuits, y compris leurs objectifs fondamentaux et leurs dispositions portant spécifiquement sur les terres, la faune, l'accès aux ressources et la gestion de ces dernières. Dans l'Arctique, la santé humaine et la santé environnementale se chevauchent et s'interpénètrent. Un volet sur l'Arctique d'un PCN doit placer à l'avant-plan le bien-être des communautés inuites, et devrait comprendre des mesures visant à combler le fossé profond et inadmissible qui sépare les Inuits des autres Canadiens en matière de santé.
Un PCN devrait énoncer qu'une utilisation rationnelle et durable des ressources, surtout des ressources fauniques, ne peut pas se plier aux exigences des extrémistes qui défendent les droits des animaux et souhaitent anéantir les sources de revenus des Autochtones, ni respecter les droits des peuples autochtones uniquement lorsqu'ils sont exercés de manière pittoresque ou folklorique totalement séparés des réalités des économies modernes, mixtes et monétaires. Un PCN doit tenir tête aux gouvernements et aux organisations de l'étranger qui font fausse route et ont adhéré aux idées dénaturées et irrationnelles des chantres des droits des animaux.
Un PCN doit respecter les connaissances des Inuits et les autres formes de savoir autochtone, et plaider en faveur d'un financement public et privé adéquat des organisations autochtones qui s'efforcent de conserver, de bonifier, de mettre en pratique et de communiquer les connaissances des Autochtones. À cette fin, j'encourage les décideurs à consulter le centre de connaissances Inuit Qaujisarvingat, fondé par Inuit Tapiriit Kanatami afin de créer des liens entre la communauté scientifique et les détenteurs du savoir inuit.
Un PCN doit contribuer à soutenir la diversité culturelle au sein des populations humaines, de même que la diversité génétique au sein des populations non humaines.
À notre époque, la réussite des systèmes d'éducation est inséparable de la viabilité culturelle. Le maintien de la continuité culturelle passe par un ensemble de politiques qui rendent possible la mise en place d'un ambitieux système d'éducation et de formation dans l'Arctique. Nous cherchons à obtenir un maximum de soutien des organisations des secteurs public et privé, sans égard aux frontières administratives ou géographiques.
Mon exposé est un peu long. J'imagine que la greffière en possède la version papier. Vous dites qu'il me reste une minute?
Pour conclure, je dirai que, selon moi, le volet sur l'Arctique du PCN devrait s'intégrer au sein d'un plus vaste ensemble de politiques nationales axées sur le développement durable dans l'Arctique et ailleurs. Le PCN doit faire partie d'une initiative internationale cohérente touchant la conservation et, de façon générale, l'environnement. À ce sujet, j'ai trois autres pages à vous communiquer.
Merci beaucoup de m'avoir permis de m'adresser à vous.
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Bonjour, monsieur le président, membres du comité et témoins. Au nom de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario, de nos 100 000 membres et de nos 675 organisations membres de l'Ontario, je suis heureux d'avoir l'occasion de me présenter devant vous aujourd'hui pour formuler des commentaires sur la création d'un plan national de conservation.
Comme bon nombre d'organisations qui ont témoigné, la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario — la FPCO — a participé, plus tôt cette année, aux discussions de la table ronde présidée par le ministre et Mme Rempel. La FPCO est l'un des plus importants organismes de bienfaisance sans but lucratif du secteur de la conservation de l'Ontario et, en fait, du Canada, et, à ce titre, elle collabore avec tous les échelons de gouvernement, les établissements universitaires, le secteur privé, des ONG, Canards Illimités, la Fédération canadienne de la faune, ses sociétés affiliées dans les provinces et les territoires, les Premières nations et des membres du grand public pour protéger, préserver et améliorer nos précieuses ressources naturelles, plus particulièrement les poissons et les populations fauniques et leurs habitats respectifs.
La FPCO participe, entre autres au programme de sensibilisation à l'égard des espèces envahissantes, au conseil ontarien sur les plantes envahissantes, au programme de reconstitution des stocks de saumons de l'Atlantique du lac Ontario et au programme d'intendance des cours d'eau. L'ensemble de nos activités sont orientées par le fait que nous croyons fermement aux politiques publiques, aux dispositions législatives et réglementaires et aux normes qui visent à conserver nos ressources pour les générations actuelles et futures, et qui sont fondées sur les plus solides connaissances scientifiques disponibles.
D'autres personnes qui ont témoigné avant moi ont abordé la question de la nécessité de restaurer et de protéger les zones humides. M. Wong vous a parlé de la création de parcs nationaux et des zones marines protégées, et M. Hummel, des forêts boréales, éléments importants de la conservation et de la création d'un plan national en la matière. Plutôt que de répéter ce qui'ils ont dit ou d'y donner suite, j'utiliserai le temps dont je dispose pour parler d'un élément qu'il sera tout aussi important de prendre en considération au moment d'élaborer le PCN, à savoir les menaces provenant de diverses sources qui pèsent sur nos populations de poissons et nos populations fauniques.
La semaine dernière, j'ai eu le privilège de me présenter devant le Comité permanent des pêches et de océans pour discuter de la nécessité d'une initiative visant les espèces aquatiques envahissantes, qui menacent de précieuses populations de poissons et leur habitat, ont une incidence sur la qualité de l'eau, sont en concurrence avec les autres espèces pour les sources de nourriture et qui, au bout du compte, supplantent bien souvent les espèces autochtones. Cela vaut également pour les espèces envahissantes terrestres, les plantes et les insectes qui menacent aussi bien les zones humides que les forêts.
En lisant la transcription des autres témoignages qui ont été présentés, j'ai constaté que l'on a souvent mentionné que les espèces envahissantes étaient un phénomène qui exigeait une attention particulière. Durant son témoignage, le sous-ministre adjoint Keenan a fait allusion plusieurs fois à la menace posée par ces espèces, mais, à ma connaissance, aucun des autres témoins n'a établi un quelconque lien entre cette question et l'élaboration d'un PCN.
Notre environnement et nos écosystèmes nous fournissent de multiples avantages importants pour la qualité de vie et le bien-être économique des Canadiens. L'établissement et la propagation d'espèces exotiques envahissantes ont des répercussions sur notre environnement, notre économie et l'ensemble de la société. La gravité de cette menace s'accroît à un rythme alarmant, et les mesures de gestion et de contrôle que nous devons prendre — avec des moyens limités — ont souvent des résultats plus ou moins concluants. Comme nos mesures de prévention et de détection sont insuffisantes, de nouvelles espèces envahissantes continuent d'arriver ici. Le coût économique entraîné au Canada par seulement 16 espèces est estimé à quelque 34,5 milliards de dollars par année.
Depuis plus de 10 ans, le gouvernement du Canada a déployé des efforts en vue de mettre en place une démarche axée sur la collaboration en élaborant des stratégies, des cadres et des recommandations touchant les espèces envahissantes. Toutefois, chaque jour, nous continuons d'observer les dégâts causés par ces espèces envahissantes, que ce soit dans les forêts de la Colombie-Britannique, dans les eaux du bassin des Grands Lacs ou dans les océans contigus à nos côtes. Les témoins qui m'ont précédé ont tous mentionné des idées intéressantes pouvant être intégrées au PCN, mais j'ai constaté que la plupart d'entre eux ont évité d'aborder la question des ressources requises pour la réussite d'un tel plan.
Il me semble quelque peu paradoxal que, au moment où nous discutons de l'élaboration d'un PCN, les gouvernements du pays, y compris le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario, adoptent des budgets comportant des mesures d'austérité, qui ont déjà eu une incidence sur le financement requis pour faire face aux menaces liées à la préservation de nos ressources. Je mentionnerai, par exemple, la suppression soudaine du financement prévu pour la deuxième et la troisième années du Programme de partenariat des espèces exotiques envahissantes d'Environnement Canada.
Nos voisins du Sud continuent de dépenser plus de un demi-milliard de dollars par année pour lutter contre les espèces envahissantes, et quelque 50 millions de dollars pour les seuls plans d'atténuation liés à la carpe asiatique dans les Grands Lacs. Ce qui manque, ce sont les ressources requises pour mettre adéquatement en oeuvre les plans à une échelle suffisante pour qu'ils puissent avoir une incidence notable sur le cours des choses, et tout plan national devra tenir compte de cela.
La menace que posent les espèces envahissantes aquatiques et terrestres va de pair avec la menace que posent pour la survie de nos populations fauniques des maladies comme la maladie débilitante chronique, qui a déjà causé des dommages incommensurables à des populations de chevreuils dans l'Ouest canadien et dans plusieurs États américains, et qui touche également le wapiti, l'orignal et peut-être le caribou.
Depuis une bonne dizaine d'années, la FPCO et la Fédération canadienne de la faune disent aux gouvernements que la menace que pose la maladie débilitante chronique des cervidés doit être prise au sérieux et que des mesures de lutte contre la propagation de cette maladie et d'autres maladies qui touchent la faune ailleurs au pays doivent être prises. Jusqu'à maintenant, les recommandations sont restées lettres mortes, mais la lutte contre des maladies qui pourraient décimer de vastes populations d'animaux doit être prise en compte dans le cadre de l'élaboration de tout plan national de conservation des ressources naturelles.
Un peu partout, les gouvernements cherchent à mettre en valeur des sources d'énergie nouvelles, certaines administrations s'empressant par exemple d'adopter de nouvelles technologies comme l'énergie éolienne, mais on réfléchit peu aux répercussions de ces innovations sur les populations de poissons et d'animaux et sur l'habitat. L'installation de ce qu'on appelle des parcs d'éoliennes, sur la terre ferme et sur des plans d'eau, se fait en grande partie sans tenir compte des effets néfastes sur les pêcheries et la faune.
En Ontario, des centaines de nouveaux barrages construits pour alimenter de petites collectivités doivent entrer en activité au cours des prochaines années. Ce qui se passe généralement dans ce cas, ici comme ailleurs, c'est que les ressources halieutiques sont affectées par les installations du genre, qui détruisent l'habitat et bloquent le passage aux poissons, et pourtant, on n'en tient pas vraiment compte dans le cadre de la planification.
On ne peut pas envisager l'adoption d'un plan de conservation national sans aborder du tout la grande question du financement. Je ne dis pas qu'il faille se tourner chaque fois vers les gouvernements comme s'ils étaient la seule source de financement pour les projets dans le domaine de l'environnement. Bien au contraire, nous croyons que la plupart des organisations, y compris la nôtre, reconnaissent le fait que l'époque où l'on quémandait auprès du gouvernement est révolue.
Nous sommes devant ce que les auteurs d'un article récent sur le financement des programmes relatifs aux poissons, à la faune et à la conservation ont appelé la tempête parfaite, c'est-à-dire que différents événements ont créé ensemble une crise touchant le financement de ces programmes. On ne peut envisager l'adoption d'un plan de conservation national sans tenir compte de la situation budgétaire actuelle, pas plus qu'un plan de ce type ne peut être appliqué avec succès sans les ressources nécessaires pour le faire.
Dans son rapport de 2007 intitulé Faire moins avec moins ainsi que dans un rapport plus récent, le commissaire à l'environnement de l'Ontario a décrit l'insuffisance chronique des dépenses en Ontario au ministère de l'Environnement et au ministère des Ressources naturelles. À l'heure actuelle, ces deux ministères, qui sont à l'avant-plan de la protection de l'environnement et des ressources naturelles dans la province, ne comptent que pour 1 p. 100 du budget du gouvernement provincial.
Sur le terrain, l'effet de cette limitation des dépenses a été profond, et pas seulement en Ontario. Il y a 30 ans, la direction générale de la faune du Manitoba comptait 105 employés; aujourd'hui, elle en compte 35. En Ontario, les répercussions peuvent être encore plus importantes. Le ministère des Ressources naturelles de l'Ontario a déjà compté 5 800 employés à temps plein, et son effectif est maintenant passé à 3 300 employés et va encore fondre avec les mesures de limitation des dépenses qui vont être appliquées bientôt.
À l'échelon fédéral, le Service canadien de la faune, autrefois admiré pour son expertise et la portée de ses activités, n'est plus qu'un spectre de lui-même. Concrètement, les compressions vont se faire sentir, et elles vont toucher des programmes de base. Il va y avoir une réduction des activités d'intendance et du financement versé dans le cadre de partenariats. Il va y avoir moins de partenariats stratégiques, et non plus.
Un nouveau modèle d'intendance va être mis au point en Ontario, et le MRN va limiter sa participation dans les domaines où d'autres organisations, comme la nôtre, sont actives. Le programme Intendance environnementale Ontario, qui est un grand modèle de partenariat communautaire, est menacé d'être complètement vidé de sa substance.
Je pense que c'est M. Hummel qui a fait remarquer à juste titre que la plupart des programmes de conservation qui ont bien fonctionné au Canada étaient le fruit de partenariats entre des ONG et le secteur privé. Dans le contexte que je viens de décrire, les partenariats du genre sont de plus en plus susceptibles d'être la voie de l'avenir.
Le programme de restauration du saumon de l'Atlantique dans le lac Ontario de la FPCO en est un exemple. Avec la collaboration d'ONG, du secteur privé et d'établissements universitaires, nous avons fourni la majeure partie du financement du programme qui, jusqu'à maintenant, a permis de remettre 4 millions de poissons dans le lac Ontario.
Malgré les sombres prévisions budgétaires dans certains domaines, des choses positives se passent, et je dois dire que l'engagement du gouvernement fédéral à mettre en place un plan de conservation national fait partie de ces choses. Nous sommes heureux de voir que le gouvernement fédéral prend l'initiative dans ce domaine, nous qui lui demandons de le faire depuis un certain temps.
Nous avons relevé à l'occasion de la table ronde l'utilisation de l'expression « faire en sorte que les Canadiens soient davantage en contact avec la nature », qui figurait dans le document préparatoire. Pour que cela se fasse, nous devons savoir comment les Canadiens voient la nature. Nous sommes contents de constater qu'Environnement Canada publiera bientôt son rapport tant attendu sur l'importance de la nature pour les Canadiens à l'occasion du Congrès national pour la conservation des poissons et de la faune, que nous allons tenir à Ottawa à la fin du mois. Nous avons remis des copies de l'ordre du jour de l'événement à la greffière du comité.
Je sais qu'il ne me reste presque plus de temps, monsieur le président.
L'élaboration d'un plan de conservation national comporte de nombreux avantages.
Pour conclure, je dirais, avec tout le respect que je vous dois, que les chasseurs et les pêcheurs sont d'ardents défenseurs de la nature. M. Hummel a dit un peu la même chose, avec une pointe d'ironie, lorsqu'il a affirmé devant le comité que les chasseurs et les pêcheurs « ne sont pas des incarnations du diable sur le plan environnemental ».
Le modèle nord-américain de conservation de la faune, qui sous-tend la gestion des populations d'animaux sauvages sur le continent depuis la fin des années 1800, a vu le jour grâce aux pressions effectuées par des chasseurs qui voyaient la nécessité d'un équilibre entre l'utilisation durable et de sages principes de conservation. Ce modèle a été mis de l'avant par Roosevelt et Laurier, et il est à la base du régime de conservation de la faune en vigueur aujourd'hui.
Nous espérons pouvoir continuer de participer aux débats concernant l'adoption d'un plan de conservation national. Merci de nous avoir invités à témoigner devant vous aujourd'hui.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier tous les témoins de l'importante contribution qu'ils apportent dans le cadre du débat.
Le point de vue général qu'il nous a été suggéré d'adopter et certaines des choses dont nous devrions nous préoccuper à l'égard du plan de conservation national, ce sont la conservation, évidemment, l'établissement de liens, les écosystèmes, les corridors fauniques, la restauration des habitats et aussi l'établissement de liens entre les gens et les habitats, ce qui est une préoccupation de plus en plus importante compte tenu de l'urbanisation et du fait que de plus en plus de gens sont déconnectés.
Monsieur Farrant, de la Fédération des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario, vous avez parlé du fait que les chasseurs et les pêcheurs sont en contact avec la faune. Je veux vous dire que nous reconnaissons ce fait. Vous êtes aux premières loges. En fait, vous êtes en contact avec l'environnement. Vous faites partie des Canadiens qui sortent pour vrai et visitent les régions sauvages. Nous sommes reconnaissants de votre contribution à cet égard. En fait, l'observation est à la base de la science. Les observations directes sont donc quelque chose de très précieux.
Vu le temps limité dont nous disposons, je vais devoir poser des questions à un autre témoin. Je dois m'adresser au chef national, parce que la région que je représente, qui fait environ 9 000 kilomètres carrés, et les terres ancestrales du chef national se recoupent en bonne partie.
Chef Atleo, je veux aborder brièvement la question des Nuu-chah-nulth et de notre propre région.
Dans la baie Barkley, j'ai vu des sites de pêche ancestraux qui remontent d'après certaines estimations à près de 10 000 ans, où vos ancêtres pêchaient dans certains secteurs... et l'habitat du poisson là-bas, où ils amenaient le poisson vers certains secteurs pour ensuite clore ceux-ci et pêcher le poisson.
Vous vous occupez de la gestion de la faune sur la côte, et votre peuple le fait depuis des années. Un terme que nous entendons à l'occasion ici et qui est issu de votre culture, c'est une expression de la langue nuu-chah-nulth qui est selon moi une idée très intéressante... si je prononce bien, c'est: Hishuk ish tsawalk. Corrigez-moi si je prononce mal. Littéralement, cela signifie « tout est un », c'est-à-dire que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous, si j'ai bien compris.
Pouvez-vous nous parler un peu des activités traditionnelles que mène votre peuple dans votre région?
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Certainement. C'est pour cette raison que je voulais vous laisser cela.
Hishuk ish tsawalk. C'est très bien. Je suis content que vous fassiez un effort pour nous intéresser et reprendre une expression qui signifie tant pour mon peuple. On retrouve cette idée dans d'autres langues autochtones, l'idée d'interconnexion et celle que j'ai évoquée tout à l'heure: ne prendre que ce dont on a besoin.
Il y a des histoires extraordinaires au sujet de l'utilisation des fascines dans les territoires nuu-chah-nulth et de vieilles histoires qui étaient racontées aux enfants au sujet d'un ours qui avait détruit la fascine, ce qui avait engendré une dispute entre les gens de l'endroit et l'ours au sujet de l'utilisation du poisson, puis un périple vers le territoire de l'ours, où l'ours a alors enlevé sa fourrure pour révéler qu'il était en fait un être humain, et ils ont dû négocier et en arriver à une entente quant à la façon d'utiliser les ressources.
Les vieilles idées et les façons traditionnelles de voir la relation entre les animaux et le milieu, comment ceux-ci sont utilisés de façon durable à un endroit comme Nuu-chah-nulth... Je suis content que vous parliez de mon territoire, parce qu'il y a plusieurs éléments là-bas qui sont liés à ce que vous faites. Il y a un site du patrimoine mondial de l'UNESCO. Il y a un traité qui a été conclu dans un cadre de négociation moderne, où la question des titres et des droits ancestraux et une vision de l'avenir des territoires convergent dans les négociations.
Il reste encore à appliquer et à conclure des ententes ou encore à mettre en oeuvre des traités dans la plupart des régions du Canada. La convergence des droits dans un territoire comme le mien, où des coupes à blanc étaient autrefois pratiquées, et, dans le cas de 21 rivières sur 27, ces coupes allaient jusqu'au bord de la rivière... L'une de ces rivières, c'est la rivière Atleo, et c'est le territoire de ma propre famille. On y voit d'importants stocks de poissons qui étouffent à cause du manque de connexion, du manque de hishuk ish tsawalk, de l'absence de lien entre les différents régimes de gestion des ressources qui existent à un endroit comme la baie Clayoquot.
Ainsi, les Premières nations... À l'époque, il y avait des barrages routiers. Il s'agit du comité scientifique dont j'ai parlé... Un exemple vraiment crucial, je crois. Monsieur Lunney, vous avez parlé de l'observation, qui est le fondement de la science. La nécessité d'établir un lien avec le savoir traditionnel des Premières nations est la chose sur laquelle j'insiste ici. C'est ce qui a donné naissance à un régime de gestion conjoint à Nuu-chah-nulth qui a été créé en collaboration avec les gouvernements. Cela a mené à la conclusion de nouvelles ententes officielles.
Tout cela est lié à notre intervention concernant la nécessité de faire valoir nos droits, ainsi que les points de vue traditionnels des Premières nations, dont M. Lunney a tiré une phrase qui décrit, dans l'une des 52 langues existantes, ce que cela signifie pour notre peuple. Il s'agit donc de restaurer les stocks de poissons à un endroit comme la baie Clayoquot. Il s'agit d'avoir voix au chapitre quant à ce qui se passe dans les territoires. Et je pense que vous pouvez par votre travail jouer un rôle crucial en insistant sur le message que transmet le rassemblement organisé par le gouvernement fédéral pour l'anniversaire de la guerre de 1812, c'est-à-dire que le pays est fondé sur une relation entre les Premières nations et les gens qui en sont venus à considérer le Canada comme leur pays.
Cette relation est fondée sur la conclusion de traités dans le respect et la reconnaissance mutuels, qui nous permettaient d'échanger avec beaucoup d'aise nos visions du monde, comme M. Lunney et moi le faisons, au sujet de hishuk ish tsawalket l'idée d'interconnexion. Toutefois, en faire un partenariat concret sur le travail et l'appliquer sur le territoire est quelque chose qui va être absolument nécessaire dans l'avenir.
Nous voyons de bons exemples de la chose. Je peux en citer qui ont trait à mon propre territoire. Il y en a. Et dans l'exposé que nous avons présenté au comité, il y a d'autres bons exemples dont nous devrions nous inspirer. Je vous encouragerais à envisager de placer cet élément au coeur de vos travaux à venir. Comme je l'ai dit, je pense que, sinon, nous allons continuer à nous retrouver dans ce cycle de conflit et de division profonde.
Il est temps que nous resserrions beaucoup les liens et que nous parlions de l'environnement vivant dans lequel nous évoluons: l'environnement dont nous tirons notre nourriture, la façon dont nous sommes liés, ce que nous faisons pour préserver la qualité de l'eau, nos relations avec les oiseaux et les animaux. Je pense que c'est un excellent point de départ pour établir des liens entre nous. Je vous en remercie donc.