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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous.
Je suis reconnaissant de l'occasion qui m'est offerte de vous présenter mon travail à titre d'ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes. Je vous propose un examen rapide des récents travaux de mon bureau, de certains de nos projets majeurs en cours et de l'importance de nos efforts axés sur les problèmes que vivent les militaires au moment de faire la transition vers la vie civile. Par la suite, je répondrai bien sûr avec plaisir à vos questions.
Mon bureau a été mis en place pour agir comme médiateur, mener des enquêtes et produire des rapports de façon neutre et objective sur des sujets liés au ministère de la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes. J'assume aussi le rôle de conseiller spécial du ministre.
Nos enquêtes, rapports et documents éducatifs ne visent aucunement à diminuer cette importante organisation. En tant qu'ombudsman, mon rôle est plutôt de faire des recommandations indépendantes, fondées sur des données probantes, dans le but de contribuer à l'amélioration substantielle et durable de la communauté de la défense. Il ne fait pas partie de mon mandat de discuter des théâtres d'opérations, de la politique stratégique de défense ou de l'approvisionnement militaire.
Il y a trois semaines, lors du Sommet des intervenants d'Anciens Combattants Canada, le commandant adjoint du Commandement du personnel militaire, le major-général Eyre, a déclaré que la sécurité de notre pays est menacée par des problèmes de personnel systémiques, car ceux-ci affectent directement le recrutement et la conservation des effectifs. J'ai longtemps soutenu que les politiques et procédures désuètes nuisent à la mobilisation d'une main-d'oeuvre compétente et dévouée.
Je suis maintenant à mi-parcours de mon mandat d'ombudsman et j'ai eu le privilège de rencontrer des membres de la communauté de la défense partout au pays. Partout où je vais, je rencontre des membres de l'équipe de la défense qui travaillent de manière consciencieuse et professionnelle pour protéger les Canadiens. Depuis 2014, mes rapports au ministre de la Défense nationale, qui ont été rendus publics, comprennent des recommandations sur une grande variété de sujets, notamment la priorité d'embauche à la fonction publique, les blessures de stress opérationnel, les options d'indemnisation et les évaluations médicales périodiques chez les réservistes, et une enquête sur les événements tragiques de Valcartier, en 1974.
Bon nombre des plaintes que nous recevons peuvent être résolues assez facilement. Le fait de faire carrière dans l'armée ne devrait pas, par exemple, entraîner pour un militaire des pertes financières déraisonnables dues à la vente de sa maison, lors d'une mutation. Le programme de garantie de remboursement des pertes immobilières a été créé à cette fin, mais il offre une protection insuffisante.
Cela peut s'arranger. Les militaires et leurs familles devraient être adéquatement protégés de l'impact des énormes variations du coût de la vie dans les régions où le ministère les envoie. L'indemnité différentielle de vie chère existe à cette fin, mais le ministère de la Défense nationale et le Conseil du Trésor se sont renvoyé la responsabilité à cet égard et elle n'a pas été mise à jour depuis 2008. Pourquoi?
Ces problèmes ne dépassent pas l'entendement et ne sont pas trop compliqués pour être résolus. L'armée qui a débarqué sur la plage Juno peut certainement déterminer si une miche de pain coûte plus cher à Shilo qu'à Esquimalt, Borden ou Bagotville. Nous ne pouvons pas continuer à jouer à la chaise musicale dans cette affaire. Nous devons nous asseoir et prendre une décision. En travaillant ensemble, nous savons ce qui pose problème et, dans la quasi-totalité des cas, nous savons comment le résoudre.
Au cours des prochains mois, je vais soumettre au ministre de la Défense nationale des rapports sur les soins reçus par les cadets malades et blessés. J'ai l'intention de faire la lumière sur le labyrinthe administratif auquel se heurtent les parents et tuteurs de ces jeunes lorsqu'une tragédie frappe pendant que ceux-ci sont sous la garde des Forces armées canadiennes.
Mon bureau effectue aussi un examen systématique des Rangers canadiens dont la vigilance et le service sont souvent méconnus dans les régions méridionales de notre pays. Dans ce rapport, je parlerai des problèmes chroniques de pénurie de personnel et de soutien en équipement, des difficultés en matière de rémunération et d'autres problèmes liés au personnel et à la logistique.
Enfin, après le Nouvel An, je prévois produire un rapport à partir de l'étude sur les commissions d'enquête militaires, que nous avons publiée en 2015. Élaborée en collaboration avec les Forces armées canadiennes, cette mise à jour abordera les problèmes que rencontrent les familles endeuillées pendant et après une commission d'enquête. Le rapport comprendra des recommandations concrètes visant à assurer le traitement respectueux de toutes les parties concernées.
Mesdames et messieurs, plus tôt cette année, le ministre de la Défense nationale a sollicité l'apport de divers intervenants pour l'examen de la politique de défense entrepris par le gouvernement. Mon bureau a préparé un mémoire exhaustif qui soulevait des préoccupations liées à notre personnel de la communauté de la défense en poste au pays et à l'étranger. J'espère sincèrement que ce mémoire est pris au sérieux aux échelons appropriés. J'aimerais aujourd'hui présenter ici certaines de nos constatations.
Un peu plus de la moitié de toutes les demandes que reçoit mon bureau sont liées aux enjeux entourant la transition de la vie militaire à la vie civile. Les membres des Forces armées canadiennes libérés pour des raisons médicales ou autres font face à un processus administratif colossal au moment de terminer leur carrière. Afin de décrire avec précision cette situation complexe, mon bureau, en partenariat avec le Bureau de l'ombudsman des vétérans, a produit, en septembre, une carte du processus de libération.
Nous avons publié ce document d'information pour que nos commettants, le public canadien, les dirigeants et les législateurs tels que vous connaissent mieux ce processus qui est à la racine de nombreux problèmes entourant la transition. J'en ai remis des exemplaires à votre comité.
Conformément à la lettre de mandat du ministère de la Défense nationale et à la directive nous amenant à collaborer avec le ministre des Anciens Combattants afin de réduire la complexité et transformer la prestation des services, mon bureau a aussi publié récemment deux rapports qui recommandent la simplification du processus de libération pour les militaires qui font la transition vers la vie civile.
Dans le premier rapport rendu public au début septembre, je recommande que les Forces armées canadiennes déterminent si une maladie ou une blessure a été causée ou aggravée par le service militaire de la personne, et que cette constatation soit considérée par Anciens Combattants Canada comme une preuve suffisante à l'appui d'une demande de prestations.
Quand il rend une décision en vertu de la nouvelle Charte des anciens combattants, Anciens Combattants Canada, en tant qu'administrateur, s'appuie en majeure partie sur des documents produits par les Forces armées canadiennes. Ces preuves sont principalement les dossiers médicaux du militaire et éventuellement d'autres documents relatifs à sa carrière. Étant donné que les Forces armées canadiennes ont le contrôle sur la carrière du militaire et la responsabilité à l'égard de sa situation médicale tout au long de cette carrière, une telle décision pourrait et devrait être considérée comme une preuve suffisante à l'appui de la demande de prestations du militaire.
Le deuxième rapport, aussi publié en septembre, propose un nouveau modèle de prestation de services pour les membres en voie d'être libérés. Le rapport comprend trois recommandations simples et réalisables.
Premièrement, les Forces canadiennes devraient retenir les militaires en voie d'être libérés pour raisons médicales jusqu'à ce que tous les avantages et toutes les sources de prestations aient été mis en place. Deuxièmement, on devrait établir un point de contact unique, un service de conciergerie, pour tous les militaires libérés pour raisons médicales, afin de les aider à faire la transition. Troisièmement, les Forces armées canadiennes devraient élaborer un outil électronique capable de donner aux militaires, avant même leur libération, l'information nécessaire pour qu'ils puissent mieux comprendre la gamme de tous les avantages qui peuvent leur être offerts.
Ces trois recommandations sont fondées sur des faits probants et elles sont axées sur les militaires et leurs familles. Elles sont faciles à comprendre et pourraient être mises en oeuvre rapidement, si l'on décidait de le faire.
Ma recommandation sur la détermination par les Forces armées canadiennes de l'attribution au service d'une maladie ou blessure, combinée à un changement au modèle de prestation de services, pourrait réduire de 50 % ou plus les délais pour obtenir des prestations auprès d'Anciens Combattants Canada.
Mesdames et messieurs, je crois sincèrement que la mise en place de ces recommandations permettrait de changer les choses.
L'amélioration du processus de transition devrait être une mission au succès garanti. Je crois que de nombreux rapports publiés par mon bureau servent de référence solide pour des changements au sein des Forces armées canadiennes et auront des effets positifs à Anciens Combattants Canada.
On a récemment rapporté qu'il y a un arriéré de 11 500 demandes à Anciens Combattants Canada. Cela veut dire que de nombreux militaires en cours de libération subiront un stress psychologique et financier de modéré à extrême, dans l'attente de la décision concernant leur dossier. Plusieurs passeront entre les mailles du filet. Pour plusieurs, c'est déjà le cas.
En tant qu'ancien ombudsman adjoint des vétérans, j'ai vu fluctuer cet arriéré des demandes à Anciens Combattants, mais jamais par plus de quelques milliers. Les problèmes ne sont pas liés au personnel. Ils sont liés aux processus. La refonte du modèle de prestation de services apportera des changements concrets et positifs pour ceux et celles qui ont servi leur pays, qui ont vécu des sacrifices et des souffrances en notre nom.
Je veux conclure mon témoigne en soulignant un thème présent dans une grande partie de notre travail, soit la parité des avantages sociaux pour tous ceux et celles qui portent l'uniforme. Le concept de parité des avantages sociaux n'est pas nouveau. Toutefois, durant mes quatre années comme ombudsman adjoint des vétérans et mes deux années et demie comme ombudsman des Forces armées canadiennes, cette iniquité fait constamment surface. Que ce soit dans la force régulière ou dans la réserve, chez les Rangers canadiens ou les Rangers juniors canadiens, les cadets, voire les anciens combattants, les disparités demeurent.
J'ai toujours maintenu qu'un soldat est un soldat, un aviateur est un aviateur et un marin est un marin. Dès qu'on enfile l'uniforme, on est au service du Canada. Si on est blessé pendant qu'on porte l'uniforme, au service du Canada, le traitement reçu devrait être le même pour tous.
J'ai promis aux militaires en service et retraités partout au pays que je défendrai avec force la parité des avantages sociaux. J'ai produit un certain nombre de rapports comprenant des recommandations appuyées sur des données probantes à propos de ce qui doit être revu. Il suffit de les mettre à exécution.
Je doute qu'il y ait parmi vous des députés qui n'ont aucun membre des Forces armées canadiennes ni aucun employé civil de la Défense, actif ou retraité, vivant ou travaillant dans sa circonscription. Vous jouez un rôle crucial dans leur vie, tout comme mon bureau, et j'ai plaisir à travailler avec plusieurs d'entre vous sur les enjeux touchant le personnel, qu'il s'agisse d'enjeux individuels ou systémiques. Je crois que j'ai le devoir de vous tenir au courant de mes activités, afin que vous puissiez en toute confiance diriger vos commettants vers mon bureau lorsqu'ils ont l'impression de ne plus savoir vers qui se tourner.
Monsieur le président, distingués membres du Comité, je vous remercie et je me tiens prêt maintenant à répondre à vos questions.