NDDN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la défense nationale
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 14 juin 2018
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Soyez les bienvenus au Comité de la défense.
Ce matin, nous accueillons Son Excellence Mme Ala Beleavschi, ambassadrice de la République de Moldavie, qui vient témoigner sur l'agression de son pays en particulier et de la région en général par la Russie et, peut-être, sur la coopération, quelle qu'elle soit, qui s'instaure dans la région entre la Moldavie, la Géorgie et l'Ukraine.
Comme vous le savez, Excellence, les Ukrainiens viennent de témoigner devant nous; ils ont fait le point pour nous sur l'actualité dans la région. Quel dommage que nous ayons appris que les choses empiraient au lieu de s'améliorer.
Sur ce, je vous cède la parole. Prenez tout le temps nécessaire pour expliquer à notre comité les relations entre la Moldavie et la Russie. Nous pourrons ensuite vous questionner.
Je vous remercie d'être ici.
Merci beaucoup. Je suis heureuse de disposer d'assez de temps pour vous informer un peu sur l'évolution de la situation en Moldavie, tout d'abord en ce qui concerne les menaces à la sécurité de mon pays et, également, de toute la région.
Monsieur le président, messieurs les vice-présidents, mesdames et messieurs, je suis vraiment honorée de venir témoigner devant votre estimé comité. Puis-je d'abord et surtout vous remercier, monsieur le président, de m'accorder cette possibilité. Hier seulement, mon ministre des Affaires étrangères a conclu une visite très fructueuse au Canada. Quel privilège et quel honneur pour nous d'avoir pu discuter avec le président Fuhr des préoccupations de la Moldavie! C'est en sortant de cette rencontre que, en fait, cette idée a germé. Monsieur le président, je vous remercie encore tellement de votre invitation.
Peut-être, avez-vous déjà eu la chance d'examiner les cartes que j'ai fournies, et vous avez peut-être déjà remarqué la taille minuscule de la Moldavie par rapport à ses voisins. C'est un facteur géographique et géopolitique très important. Après avoir regagné son indépendance en 1991, par suite de la dissolution de l'Union soviétique, la République de Moldavie a été admise aux Nations unies en 1992, en qualité d'État souverain et indépendant. Cependant, les tensions entre le nouvel État et sa région orientale, la Transnistrie, située à la frontière avec l'Ukraine, ont augmenté. Si la Transnistrie s'inquiétait tellement de l'évolution de la situation au début des années 1990, c'était qu'elle s'opposait à sa séparation de l'Union soviétique et qu'elle craignait de disparaître, ce qui est arrivé à l'Union soviétique.
Depuis, après une courte guerre de quelques mois, la Moldavie a pu conclure, en juillet 1992, un cessez-le-feu avec la Fédération de Russie, laquelle a laissé ses forces sur le territoire de la Transnistrie sous prétexte de protéger un important stock de munitions et de fournitures qui datait de la Seconde Guerre mondiale.
Nous sommes parvenus à garantir ce cessez-le-feu. Vingt-six ans plus tard, les forces militaires russes, le prétendu groupe opérationnel des forces russes, restent stationnées sur le territoire de la Moldavie, en Transnistrie. Leur présence sur le territoire moldave est illégale et contraire à la Charte des Nations unies, au document fondateur de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, au droit international et à la constitution moldave, qui interdit le stationnement de troupes étrangères sur le territoire moldave sans le consentement du pays hôte.
Qui aurait cru que, près de trois décennies après son indépendance, notre république devrait encore lutter pour conserver son intégrité, son indépendance et sa souveraineté et que, au lieu de se concentrer sur les réformes économiques et démocratiques et la marche vers une démocratie fonctionnelle, elle continuerait, au contraire, d'être exposée à de multiples menaces contre sa souveraineté, son indépendance et la sécurité nationale?
La région séparatiste réclame l'indépendance et la reconnaissance internationale, mais, à l'exception des trois pays séparatistes de la région postsoviétique, c'est-à-dire l'Ossétie du Sud, l'Abkhazie, et le Nagorno-Karabakh, la communauté internationale n'a pas reconnu l'indépendance autoproclamée de ces États.
Ce régime sécessionniste profite du généreux appui financier, politique et militaire de Moscou. La région a accueilli plus de 1 400 soldats des forces opérationnelles russes. Comme je l'ai dit, il ne faut pas confondre ces forces opérationnelles et les soi-disant forces de maintien de la paix, qui comprennent la Russie, la Moldavie, des représentants du régime sécessionniste de Transnistrie et 10 observateurs de l'Ukraine. En fait, elles ne se conforment pas aux normes de l'OSCE ni à celles des Nations unies pour le maintien de la paix.
Ne confondons pas les deux. Mille quatre cents Russes des forces opérationnelles russes stationnent sur ce territoire, sous prétexte de protéger 20 000 tonnes de munitions datant de la Seconde Guerre mondiale. À propos, c'était le plus grand stock en Europe de l'Est. Ce l'est encore.
À propos, nous n'avons pas accès à la plus grande partie de ces munitions et nous ne pouvons même pas en dresser l'inventaire. Nous ignorons combien on pourrait en transporter ou, faute de pouvoir le faire, combien on pourrait en détruire sur place. Nous ne possédons pas ces renseignements. La mission de l'OSCE en Moldavie n'a pas non plus accès à ce stock.
Bien que la Fédération de Russie se soit engagée, à maintes reprises, à retirer ses troupes de la région et à respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale de la République de Moldavie, la situation est très différente. Malgré toutes les tentatives de mon pays pour convaincre la Russie de retirer ses troupes et de se conformer à ses obligations internationales, déterminées au sommet de l'OSCE d'Istanbul, en 1999, ses troupes et les munitions restent sur place.
De plus, le groupe opérationnel russe se livre régulièrement avec les paramilitaires de Transnistrie à des exercices militaires communs, qui augmentent même en intensité. L'année dernière, seulement, ils en ont exécuté plus de 300 en commun en Transnistrie, en contravention au droit international et aux clauses du cessez-le-feu. De plus, l'armée russe continue d'enrôler des recrues dans la population locale de Transnistrie, et la Russie a lancé une vaste campagne de distribution de passeports russes dans la population de la région, dans une tentative d'extension du soi-disant monde russe à l'étranger. C'est cousu de fil blanc: elle veut légitimer sa défense des droits des citoyens russes.
La présence de soldats et de munitions russes sur le territoire moldave posent de graves menaces pour la région, elle est un acte de mépris pour la souveraineté et l'indépendance de notre république et elle sape les efforts internationaux en vue d'une résolution pacifique du conflit transnistrien. La menace d'escalade et d'une déstabilisation de la sécurité de notre pays et des pays voisins, particulièrement l'Ukraine, est très grande.
Les gouvernements de la Moldavie ont sans cesse réclamé le retrait inconditionnel des troupes russes de notre territoire, puisque leur stationnement n'est ni licite ni consenti par le pays hôte. Je suis donc particulièrement heureuse et honorée d'exprimer, à partir de cette tribune importante, la haute appréciation de mon gouvernement à l'égard de la solidarité démontrée par le Canada avec les tentatives de la Moldavie de promouvoir une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies sur le retrait complet et inconditionnel des troupes militaires étrangères de son territoire.
Récemment, le Canada, en décidant de coparrainer cette résolution, est devenu le premier pays à le faire. L'exemple a fait boule de neige: aujourd'hui, la résolution compte neuf coparrains. Elle sera l'objet d'un débat le 22 juin, très bientôt donc. J'espère que nous aurons ainsi la possibilité de soulever le problème à ce haut niveau, bien que, évidemment, nous ne puissions en prévoir l'issue, parce que la Russie a certainement pourvu à empêcher la proposition de cette résolution.
De plus, la Moldavie reste très vulnérable aux menaces hybrides contre sa sécurité, son information et sa cybersécurité, ce qui confirme la nécessité, pour elle, d'augmenter ses capacités de défense. Avec une active de 6 500, l'armée moldave reste en grande partie non entraînée et sous-équipée par rapport aux 7 500 combattants de la force transnistrienne appuyée par Moscou, sans compter, bien sûr, les troupes opérationnelles russes stationnées dans la région.
L'année dernière, le gouvernement pro-européen et pro-occidental de Moldavie a adopté sa stratégie de défense nationale, qui comprend notamment l'engagement d'augmenter l'entraînement des militaires moldaves en vue de leur participation aux opérations internationales de maintien de la paix. Un bataillon moldave, le 22e, s'acquitte d'une mission au Kosovo. Auparavant, sous le commandement de l'OTAN, nous avons participé au maintien de la paix au Liberia et en Côte d'Ivoire. Nous sommes prêts aussi à envisager d'envoyer notre bataillon au Mali.
De plus, le conflit transnistrien continue de nuire globalement au développement politique et socioéconomique de la Moldovie. Le climat entretenant l'incertitude pour l'avenir du pays amène de larges pans de la population à se défier du gouvernement, et les transformations démocratiques auxquelles la société aspire la polarisent et provoquent une émigration.
Il importe donc de nous en tenir au programme de réforme entrepris par mon pays conformément à l'accord d'association que nous avons signé avec l'Union européenne, en 2014. Cet accord prévoit une association politique avec l'Union européenne et une pleine intégration économique. Dans le cadre de cet accord, nous avons signé des accords de libre-échange, la même année, en 2014. Nous avons même plus d'expérience dans nos échanges avec l'Union européenne qu'avec le Canada. Donc, si vous avez besoin d'aide, faites-nous simplement signe.
Bien sûr, le gouvernement moldave est bien conscient de l'importance des réformes dans notre pays. Je distingue ici deux objectifs stratégiques: la modernisation systématique en profondeur de notre pays par l'adhésion aux valeurs démocratiques, ce qui assurera la primauté du droit et l'existence d'une magistrature indépendante, d'une part; d'autre part, l'encouragement à la libre entreprise, l'appui aux PME et aux microentreprises et l'investissement constant dans la formation et l'éducation comme facteurs importants de croissance économique.
Simultanément, la restauration de la confiance mutuelle entre les populations des deux rives du Dniestr, qui démontrera à celle de la Transnistrie les bienfaits d'une collaboration plus étroite avec l'Europe, plus une orientation stratégique claire vers le développement et l'intégration du pays dans l'Europe pourront faire bénéficier notre société de ces fruits si nécessaires. Le conflit en cours dans l'est de l'Ukraine et l'annexion de la Crimée par la Russie entraînent aussi des risques majeurs pour la Moldavie. En même temps, la Russie peut, en tout temps, ouvrir un deuxième front à l'ouest de la frontière ukrainienne, ce qui prouve à quel point la sécurité de la Moldavie et celle de l'Ukraine sont liées.
Il est donc capital pour les deux voisins de collaborer étroitement à mieux contrer ces menaces. Le gouvernement de Moldavie continue d'appuyer l'Ukraine dans ses efforts pour désamorcer la crise dans le Donbass et résoudre le problème de Crimée par des moyens politiques et diplomatiques afin de restaurer la paix et de rétablir la souveraineté et l'intégrité territoriale de ce pays.
La République de Moldavie a condamné l'annexion de la presqu'île de Crimée par la Fédération de Russie et elle appuie la recherche, par l'Ukraine, d'une solution au conflit séparatiste dans le Donbass, conformément aux accords de Minsk.
Un bon exemple de cette coopération est l'Assemblée interparlementaire commune de Géorgie, de Moldavie et d'Ukraine — en fait créée la semaine dernière — pour constituer un front commun afin de mieux répondre aux menaces contre la sécurité. Nous l'avons aussi créée en vue de nous rapprocher de l'objectif national fixé pour mon pays, être encore plus près de devenir membre à part entière de l'Union européenne.
De plus, l'année dernière, a eu lieu un contrôle commun, par la Moldavie et le Canada, des frontières et des douanes lancé de concert avec la mission d'assistance de l'Union européenne aux frontières. Nous croyons vraiment pouvoir prendre pleinement le contrôle de la frontière entre la Moldavie et l'Ukraine, particulièrement dans sa partie transnistrienne.
Cette frontière commune avec l'Ukraine s'étire sur 405 kilomètres. Par un dialogue plus assidu avec l'Union européenne, grâce à la mise en oeuvre des accords d'association, la Moldavie, l'Ukraine et la Géorgie aspirent à devenir membres à part entière de l'Union européenne. À l'instar de la Géorgie et de l'Ukraine, la Moldavie a fait le choix stratégique de s'intégrer dans l'Europe. En fait, ce n'est plus une possibilité pour nos pays; c'est une nécessité vitale.
Nous espérons qu'en ces temps importants et — je n'exagère pas — critiques pour nos pays, nos partenaires et nos amis, l'Union européenne, le Canada et les États-Unis démontreront leur solidarité et leur appui indéfectibles. Nous accueillons donc chaleureusement les signaux récents d'ouverture du Canada à l'idée de considérer nos trois pays sous un prisme régional unique et d'adopter en conséquence une approche régionale commune. Je souhaite vous assurer de la volonté de mon gouvernement de s'engager de façon plus active dans ce dialogue important avec le gouvernement canadien.
Peut-être dois-je m'arrêter ici pour répondre à vos questions. Merci.
Merci beaucoup, Votre Excellence.
Je cède la parole à M. Robillard. Vous disposez de sept minutes pour votre première intervention.
[Français]
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier madame Beleavschi de sa présence ici ce matin. Je la remercie de répondre à nos questions.
Madame Beleavschi, que pensez-vous de l'entente sur le point de passage frontalier exploité conjointement, signée il y a deux mois par l'Ukraine et la Moldavie? Comment croyez-vous que cela pourrait toucher la sécurité intérieure des deux pays?
[Traduction]
L'entente sur le point de passage, uniquement frontalier et douanier, a été signée, comme je l'ai dit plus tôt, avec l'aide de la mission d'assistance de l'Union européenne aux frontières. Elle a été signée pour, par ce moyen, arrêter la contrebande de biens et d'armes et le trafic de personnes, qui se sont tellement amplifiés dans cette région.
Ensuite, nous voulions nous assurer que nous offrons à la région transnistrienne un guichet unique pour l'enregistrement de ses exportations et importations, en fait faciliter les échanges, par la suppression de leurs entraves bureaucratiques. Malgré les critiques acerbes du régime transnistrien et de la Russie, la mesure s'est révélée tout à fait efficace. Depuis juillet 2017, date de signature de l'accord, elle s'est révélée une vraiment bonne idée. De plus, c'est seulement à ce point de passage que nous avons institué ce contrôle commun, sur les neuf qui existent. Nous croyons, compte tenu de la volonté du gouvernement ukrainien d'intensifier sa coopération, que nous pourrons obtenir le contrôle total de ce territoire.
[Français]
Je vous remercie.
Voyez-vous la demande de la Russie de reconnaître la langue russe en tant que seconde langue officielle en Moldavie comme une illustration de son comportement agressif?
[Traduction]
D'après la constitution de la Moldavie, le russe a été largement considéré comme langue de communication interculturelle. Il n'a pas de statut officiel en Moldavie. Nous n'avons qu'une langue officielle, le roumain. L'usage du russe pour les communications interculturelles remonte à l'époque où nous faisions partie de l'Union soviétique. C'est chose du passé, dont nous n'avons pas besoin. La jeune génération ne parle pas russe. À l'exception des médias, qui appartenaient en grande partie à des canaux russes, ils ne parlent pas le russe ou ne l'apprennent pas à l'école. C'est donc un usage en recul en Moldavie. Seules les personnes âgées parlent principalement le russe. Je ne crois pas qu'on doive accorder un statut spécial au russe, vu que, particulièrement, la population de Moldavie comprend d'abord des Moldaves, les plus nombreux, puis les Ukrainiens. Pourquoi, alors, l'ukrainien? Les Ukrainiens ne revendiquent pas de statut particulier pour leur langue.
Voilà pourquoi nous avons décidé qu'il n'est plus justifié d'accorder un statut particulier au russe. En fait, la Cour constitutionnelle vient de confirmer que le moment est venu pour nous de nous débarrasser de cet article de la constitution. En fait, ce n'en est pas un article la constitution, mais de la loi sur les rapports linguistiques en Moldavie.
[Français]
Je vous remercie.
Pensez-vous que la région du Donbass, qui vit un conflit depuis 2014, connaîtra le même sort que la Transnistrie, séparée en 1992?
[Traduction]
Ce qui se produit aujourd'hui dans la région de l'Est de l'Ukraine ressemble malheureusement beaucoup à l'approche utilisée par Moscou en Transnistrie, en Moldavie. C'est visiblement dans l'intérêt de Moscou d'entretenir un conflit prolongé et latent sur notre territoire, pour des raisons évidentes. Tout d'abord, la Moldavie est utilisée comme zone tampon entre l'OTAN et l'Union européenne, qui s'arrête à la frontière occidentale de la Moldavie. Vous pouvez voir sur la carte que la Moldavie est bordée par la Roumanie, qui fait partie de l'OTAN et de l'Union européenne. La Russie tente en fait de garder le contrôle de la Moldavie, car elle utilisera cette influence chaque fois qu'elle verra une future menace potentielle sur son territoire, même si nous n'avons pas de frontière commune avec la Russie.
La situation actuelle en Transnistrie et ce conflit latent donnent à la Russie un bon exemple de ce qu'elle peut faire avec la région du Donbass. Nous avons averti nos amis ukrainiens de la soi-disant menace de la Transnistrie dans le Donbass. La Russie préférerait que cette région fasse l'objet d'un conflit prolongé, car elle l'utilisera chaque fois qu'elle en aura besoin.
Merci.
Merci, monsieur le président.
Votre Excellence, nous sommes toujours heureux de vous voir. Je vous suis reconnaissant de tout ce que vous faites pour veiller à ce que nous, les parlementaires, soyons informés des problèmes auxquels fait face la Moldavie en Transnistrie et des défis auxquels vous êtes confrontés au niveau national.
Je sais que nous avons souvent parlé de l'occupation continue de la Transnistrie par les forces russes. La dernière fois que nous nous sommes parlé, nous avons discuté de la mission de surveillance de l'OSCE là-bas. Qui est responsable de cette mission?
Eh bien, si je ne me trompe pas, aujourd'hui, la Grande-Bretagne est responsable de cette mission, mais je peux me tromper. Je sais que les Américains ont été responsables pendant quelques mandats consécutifs.
C'est intéressant, car les intervenants de la mission de l'OSCE comprennent visiblement l'objectif principal, c'est-à-dire, trouver une solution pacifique et à long terme au conflit transnistrien. Ils ont aussi entamé un dialogue avec le régime transnistrien, même s'ils ont un accès très limité à ce territoire, ce qui signifie que leurs possibilités sont très limitées.
Nous menons régulièrement des consultations dans le cadre de ce qu'on appelle le format 5 + 2. Ce format a été créé pour trouver une solution pacifique au conflit. Malheureusement, les négociations ne produisent pas toujours des résultats clairs ou concluants.
Aujourd'hui, la présidence de l'OSCE est assumée par l'Italie, et le représentant politique de l'OSCE dans le format 5+2 est l'ancien ministre des Affaires étrangères de l'Italie, Franco Frattini qui, en passant, est un bon ami de Sergei Lavrov, le ministre des Affaires étrangères russes. Ils l'ont mentionné à plusieurs reprises. Il tente donc de jouer un rôle constructif. Nous avions espéré que les choses progresseraient davantage pendant sa présidence.
Récemment, nous avons signé cinq protocoles d'entente avec la Transnistrie. Ces protocoles ont été signés à la même période l'année dernière, sous la présidence autrichienne. Nous avons signé des accords sur des questions telle la reconnaissance des diplômes transnistriens. Nous avons également signé un accord qui donne aux Moldaves de la rive droite du Dniester le droit de cultiver leurs terres, qui sont malheureusement situées en Transnistrie.
Ce n'est pas encore fait, mais nous avons signé un accord et nous avons tenté de mettre en oeuvre ce protocole de facto.
Oui?
Nous avons également signé un accord qui permet aux automobilistes de la Transnistrie de participer à la circulation internationale grâce à des plaques d'immatriculation spéciales. La région avait autrefois ses propres plaques, mais elles n'étaient reconnues nulle part. Cela nous donne également la possibilité de pouvoir, au moins, identifier les participants dans la circulation internationale. En effet, nous avons dû résoudre de nombreux problèmes lorsqu'une personne était impliquée dans un accident ou dans une autre situation à l'étranger. Nous recevions toujours ces signaux de la Transnistrie.
Ce sont donc quelques éléments. De plus, le rétablissement des télécommunications entre les deux rives du Dniester était l'une des...
La population de la Transnistrie est d'environ un demi-million d'habitants. Selon nos données, au sein de cette population, environ 360 000 personnes détiennent un passeport de la Moldavie. Depuis 2014, lorsque la Moldavie a été le premier pays de la région à établir un régime sans visa avec l'Union européenne, le nombre de demandes de passeport moldave a augmenté chez les habitants de la Transnistrie.
Mais ces personnes ont aussi un passeport russe. Comme je vous l'ai dit, une énorme campagne est en cours pour distribuer des passeports russes. Ces gens ont également un passeport ukrainien, même si cela va à l'encontre de la loi ukrainienne, car l'Ukraine ne permet pas les citoyennetés multiples, contrairement à la Moldavie, où c'est un droit. Ces personnes peuvent donc utiliser n'importe quel passeport à n'importe quel moment, mais elles ne participent pas aux élections. Si elles souhaitent voter, elles doivent se rendre sur la rive droite du Dniester pour participer aux élections. Les bureaux de scrutin ne seraient pas ouverts là-bas.
Le Parlement de la Moldavie a maintenant adopté une loi pour offrir une élection mixte, ce qui signifie que la moitié sera fondée sur la représentation proportionnelle et l'autre moitié sera une élection par circonscription, donc une liste nominative — comment appelez-vous cela?
Oui, exactement, un seul député, ce qui permettra cette fois à la Transnistrie d'avoir un représentant ou une représentante au Parlement national.
J'aimerais maintenant aborder la question militaire. La Moldavie a-t-elle établi des partenariats de défense avec des pays occidentaux?
La Moldavie est officiellement, et selon la constitution, un pays neutre. Cela dit, nous coopérons pleinement avec l'OTAN. L'an dernier, le gouvernement de la Moldavie a décidé d'ouvrir un bureau de liaison avec l'OTAN en Moldavie, une décision qui a été vertement critiquée par une partie de la population et surtout par nos amis de l'Est, ou du Nord-Est. Toutefois, nous avons tenté de les convaincre que par l'entremise de ce qu'on appelle « IPAP », c'est-à-dire l'initiative des plans d'action individuels pour le Partenariat de l'OTAN... Nous avons tenté de prouver que l'OTAN fait un excellent travail pour former et équiper notre armée nationale, afin de la renforcer et de consolider ses capacités de défense.
Merci beaucoup, monsieur le président. Madame l'ambassadrice, je vous souhaite la bienvenue.
J'aimerais revenir à la mission de l'OSCE, que M. Bezan a qualifiée de mission de surveillance. Je crois qu'il s'agit d'un mandat de négociation plutôt qu'un mandat de surveillance. C'est ce que je comprends.
Toutefois, le mandat vise à faciliter les pourparlers directs entre la Transnistrie et la Moldavie. Vous avez mentionné le nombre d'accords concrets que vous avez réussi à conclure.
Le chef de la mission, Michael Scanlan, a fait une déclaration en mai. J'aimerais vous lire une partie de cette déclaration:
Au cours des derniers mois, Chisinau et Tiraspol ont démontré un engagement sincère à faire progresser le processus de règlement. C'était parfaitement visible à tous les niveaux de négociations, de la série de réunions intenses des groupes de travail menées par les négociateurs en chef jusqu'à l'engagement personnel des dirigeants moldaves et transnistriens.
C'est une déclaration un peu plus positive selon laquelle des progrès sont réalisés dans ces pourparlers directs qui mèneront éventuellement à un règlement, ce qui fera en sorte que la Russie n'aura plus la possibilité d'exploiter ce conflit.
En effet, il y a une seule forme officielle de négociation, et c'est le processus 5+2. Le chiffre 5 représente la Moldavie, le régime transnistrien, l'Ukraine, l'OSCE et à titre d'observateurs, nous avons l'Union européenne et les États-Unis.
Manifestement, nous n'éliminons pas le fait que nous devons dialoguer davantage avec les autorités transnistriennes, afin de gagner leur confiance, car elle a été grandement érodée. Notre gouvernement a entamé un dialogue avec la région transnistrienne pour lancer ce processus, car il y a plusieurs points abordés dans les négociations. Le troisième point est appelé le point politique, mais nous en sommes encore loin, car le point politique signifie que nous devons commencer à négocier le statut juridique de la Transnistrie. Nous considérons que son statut juridique consiste à lui accorder une grande autonomie à l'intérieur des frontières internationalement reconnues de la Moldavie. Mais nous sommes loin d'avoir atteint ce point. Nous croyons que les deux points qui concernent principalement les enjeux économiques et sociaux serviront à établir cette confiance mutuelle. C'est la raison pour laquelle nous croyons que nous avons réalisé des progrès avec l'adoption de ces cinq protocoles l'année dernière. Nous sommes sur le point d'adopter deux autres protocoles cette année, afin que les populations des deux rives du Dniester puissent vraiment se rendre compte que nous sommes très ouverts et que nous créons tous les préalables nécessaires pour qu'elles se sentent appuyées. En effet, ces gens font partie de la Moldavie. Ils forment notre population. Nous ne pouvons pas les laisser de côté. Nous ne pouvons pas ne pas tenir compte de leurs problèmes, et nous tentons donc d'être aussi constructifs et productifs que possible dans notre dialogue direct. C'est la vérité.
Oui, sauf à titre de membre de l'OSCE.
À votre avis, y a-t-il des façons par lesquelles le Canada pourrait appuyer les progrès vers un règlement avec la Transnistrie? Le Canada peut-il faire quelque chose pour faciliter la signature d'autres accords?
Comme je l'ai mentionné, le Canada a beaucoup appuyé les tentatives de la Moldavie pour résoudre le problème. C'est le cas depuis que je me souviens... J'étais en poste à Washington lors de ma première mission diplomatique, et je me souviens du soutien très ferme du Canada à l'égard de l'intégrité territoriale et de l'indépendance de la Moldavie. Comme je l'ai mentionné, un exemple récent est la décision de coparrainer la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU sur le retrait complet et inconditionnel des troupes étrangères sur le territoire. Toutefois, je crois également que le renforcement des capacités de défense de la Moldavie serait très apprécié de mon gouvernement, car c'est le rôle que nous pouvons très clairement voir le Canada assumer.
Je sais que le Canada ne ménage pas les efforts pour fournir de l'équipement et des activités de perfectionnement à l'armée ukrainienne. Nous souhaitons vraiment pouvoir participer aux projets élaborés par le Canada en Ukraine. Par exemple — et il y a longtemps que je le demande, c'est-à-dire depuis que je suis venue ici — si le Canada pouvait voir la Moldavie dans le contexte régional commun et se rendre compte que la Moldavie a les mêmes problèmes sur le plan historique et qu'elle fait face aux mêmes menaces, et s'il pouvait traiter les deux pays dans un contexte régional commun, cela pourrait être très utile.
J'aimerais ajouter une dernière chose. Je sais que le président lèvera maintenant ce papier blanc ou ce drapeau blanc, mais j'aimerais vous dire quelque chose. Sous le régime Ianoukovitch, c'est-à-dire le régime précédent en Ukraine, il y avait très peu de coopération entre les deux pays. De plus, l'Ukraine devait malheureusement jouer la carte de Moscou dans le conflit transnational. Mais la situation est complètement différente aujourd'hui. En effet, les deux pays coopèrent et se comprennent bien entre eux.
À l'heure où le Canada s'engage grandement à aider l'Ukraine, si votre pays inclut la Moldavie dans cette aide, vous ne rendrez pas simplement votre pays plus présent en Moldavie. En effet, vous faciliterez également la communication à différents niveaux et dans différents domaines. Vous pouvez réunir des experts afin qu'ils puissent collaborer. Cela profitera à l'Ukraine, à la Moldavie et à l'ensemble de la région.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, madame l'ambassadrice. Je suis heureux que vous soyez des nôtres. Je vous remercie de votre temps.
J'aimerais savoir si vous avez des éléments supplémentaires dans le même domaine. Je ne veux pas trop modifier l'orientation des questions. Si vous souhaitez ajouter quelque chose sur l'analyse régionale, je serai heureux d'entendre vos réflexions à cet égard.
Merci beaucoup.
Nous avons récemment eu de bonnes raisons de croire que le gouvernement du Canada comprend bien, tout d'abord, que trois pays — la Moldavie, l'Ukraine et la Géorgie — font face aux mêmes problèmes et aux mêmes menaces. On comprend de plus en plus que ces trois pays doivent être traités de la même façon.
Nous espérons effectivement que le gouvernement du Canada adoptera une approche commune en ce qui concerne nos pays. Les signes que nous avons observés et la visite de mon ministre des Affaires étrangères il y a quelques jours ont prouvé que les discussions que nous avons eues sont sur la bonne voie.
Merci beaucoup.
J'aimerais poursuivre la série de questions sur l'aspect régional, mais j'aimerais en élargir la portée pour parler de l'Union européenne de façon plus générale. Comme vous le savez, le Canada entretient des liens très étroits avec l'Union européenne, non seulement dans le contexte de l'AECG récemment conclu, mais également à de nombreux autres égards.
J'aimerais revenir sur une déclaration faite en 2013. En effet, dans son rôle de vice-premier ministre russe, Dmitry Rogozin a déclaré que si la Moldavie tentait de se rapprocher de l'Union européenne, elle pouvait dire adieu à la Transnistrie. Dans quelle mesure cette déclaration est-elle toujours vraie? À votre avis, que peut faire l'Union européenne au sein du triangle formé par le Canada, l'Union européenne et la Moldavie, afin de réagir, peut-être, à cette situation épineuse?
M. Rogozin occupait un poste très intéressant à l'époque où il a fait cette déclaration. En effet, il avait été nommé par le président Poutine à titre d'envoyé spécial pour la Transnistrie — ni plus ni moins. En parallèle, il était président du comité de coopération économique Moldavie-Russie. C'était nécessaire pour qu'il voyage le plus souvent possible en Moldavie, en utilisant le prétexte de sa présidence du comité mixte sur l'économie. Toutefois, chaque fois qu'il se rendait en Transnistrie, il participait à toutes sortes d'activités visant à célébrer l'indépendance de la Transnistrie.
Manifestement, la Moldavie ne pouvait pas tolérer ce comportement, surtout parce qu'il insultait, de toutes sortes de façons, la dignité du peuple moldave. En fait, c'était l'une des insultes les moins graves, car il avait aussi utilisé un langage insultant et impoli à l'égard des pouvoirs constitutionnels de la Moldavie et de sa population. Je ne vous citerai pas ses paroles, mais aujourd'hui, il n'est pas le bienvenu en Moldavie. Manifestement, les problèmes ne se sont pas arrêtés là.
Le rôle de l'Union européenne est énorme. Ce n'est pas seulement le fait que nous ayons signé un accord d'association avec l'Union européenne; nous considérons qu'il s'agit d'un plan pour nos réformes. En fait, cet accord établit des étapes très claires que la Moldavie doit franchir pour se conformer aux normes européennes et être admissible, un jour, à l'intégration complète dans l'Union européenne.
Nous ne sommes pas naïfs. Nous comprenons qu'il y a une lassitude évidente relativement à l'élargissement de l'Union européenne, mais l'accord d'association nous a donné un objectif national que nous nous efforçons d'atteindre. L'Union européenne joue un rôle de plus en plus important dans le format de négociation 5+2 en fournissant des services d'expert-conseil et en tentant de faire participer les Transnistriens à des activités qui permettront de les convaincre qu'un avenir européen est beaucoup mieux pour eux que ce que la Russie a à leur offrir.
Si vous souhaitez que je vous fournisse un peu plus de détails, je répondrai avec plaisir à une telle question. J'aimerais beaucoup parler de ce que fait l'Union européenne pour la Transnistrie aujourd'hui. C'est très important.
Puis-je le faire, monsieur le président?
D'accord. Bien.
Premièrement, en signant l'accord d'association, la Moldavie n'a pas exclu la Transnistrie des dispositions de l'entente. Aujourd'hui, la Transnistrie exporte plus de 70 % de ses produits vers le marché européen, et seulement 12 % vers le marché russe. C'était autrefois complètement différent puisqu'il y a quelques années, la Russie était le principal marché de la région. Les entreprises qui s'y trouvent voient manifestement l'avantage.
Deuxièmement, pour la population transnistrienne, la possibilité de voyager librement dans l'Union européenne est un autre avantage. Ces gens comprennent que nous devons collaborer avec l'Europe. Nous espérons que les entreprises transnistriennes exerceront des pressions sur leur régime pour ne pas se distancier de la Moldavie, de façon à plutôt rechercher une orientation commune.
C'est une réflexion stratégique fort importante pour nous tandis que nous tissons des liens économiques avec l'Europe.
En effet.
Nous allons maintenant passer aux interventions de cinq minutes. Le premier intervenant est le député Rioux.
Jean, la parole est à vous.
Je vais m'exprimer dans ma langue.
[Français]
Je vous remercie de votre présence. Vous nous éclairez sur la situation.
Le lien avec l'Ukraine est très intéressant. Comme vous le savez déjà, la Défense canadienne est très présente.
Vous avez répondu à une de mes questions, qui touchait l'économie. D'après ce qu'on m'a dit, 70 % des échanges se font avec l'Europe. Ce changement a été rapide. Quelle est la base de votre économie? Quels sont les principaux produits? Sur quoi se fonde votre PIB?
On parle souvent de la présence russe. Si on ne tient pas compte de la présence militaire, quel pourcentage de votre population est russe?
[Traduction]
Traditionnellement, la Moldavie exportait vers l'Est. Pour ce qui est des principaux produits, le pays a toujours été considéré comme le verger de l'Union soviétique. L'agriculture et l'industrie alimentaire comptent parmi nos plus grands secteurs d'activité. En Moldavie, nous cultivons et produisons des fruits et légumes biologiques. Nous avons de bons vins puisque nos sols conviennent très bien à cet usage. Nous cultivons des raisins de très bonne qualité.
En outre, nous comprenons qu'un pays agricole est toujours à la merci des conditions climatiques, en particulier de nos jours, avec ces énormes changements climatiques.
La Moldavie a désormais un secteur des TI très fort, et nous fournissons des logiciels à de grandes entreprises internationales telles que Microsoft. La Grande-Bretagne importe des logiciels de chez nous; c'est le plus gros acheteur de nos produits informatiques.
Nous développons également les industries qui produisent des câbles pour les voitures. Nous fournissons d'ailleurs des câbles à BMW et à Volkswagen. Cette activité se déroule dans les neuf zones d'activité économique libre, où nous offrons de très bons incitatifs fiscaux aux pays ou aux entreprises qui souhaitent exercer leurs activités sur le territoire moldave.
Aujourd'hui, les plus grandes entreprises allemandes, comme Dräxlmaier, sont en activité en Moldavie pour produire ces câbles de voiture. Nous avons deux entreprises japonaises qui ont créé des milliers d'emplois, ce qui contribue à garder la population moldavie au pays, en particulier les jeunes. Ces gens restent donc plutôt que de quitter le pays. Malheureusement, près d'un million de personnes sur une population de 4,5 millions ont quitté le pays à la recherche d'un emploi.
En fait, ces grandes entreprises internationales créent des emplois, de sorte que les gens restent en Moldavie. Alors que le processus est loin d'être terminé, c'est ainsi que nous imaginons notre avenir: l'industrie des TI, le secteur de la production, et l'industrie agroalimentaire, qui demeure bien sûr puisque nous avons les sols les plus fertiles d'Europe. La Moldavie compte près de 90 % de sol noir, qu'on appelle tchernoziom. Voilà où nous nous voyons en ce moment.
En passant, j'ai commencé en disant que nous exportions traditionnellement vers le marché de l'Est. Aujourd'hui, 67 % de nos exportations aboutissent en Union européenne.
Pour ce qui est de la population, sa composition est très similaire à celle que nous observons aujourd'hui en Transnistrie. La majeure partie de la population et le principal groupe ethnique est, bien sûr, les Moldaves. Les Ukrainiens occupent le deuxième rang. Environ 70 % de la population est moldave, puis nous avons des Ukrainiens, des Russes et une petite minorité du nom de Gagaouze, qui est une très modeste population turcophone. Ils représentent 0,3 % de la population.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à l'ambassadrice qui comparaît devant notre comité.
Au fil des ans, nous avons vu la Russie étendre son influence sur d'autres nations, que ce soit par la désinformation, l'utilisation d'Internet ou tout autre moyen à sa disposition. Je crois maintenant savoir que la Moldavie a adopté des lois interdisant la propagande pour combattre celle de la Russie ou de quiconque. Pouvez-vous nous parler de cette nouvelle loi?
Je ne vous dirai pas que la loi a été très populaire au pays, mais nous devions l'adopter. Malheureusement, en raison de la guerre hybride menée en Ukraine, nous n'avons pas été à l'abri de la propagande. La Russie s'est ingérée dans nos élections pendant plusieurs années.
Les élections présidentielles de 2016 l'ont clairement démontré. Une vaste campagne de désinformation a été lancée dans les médias sous contrôle russe. Nous avons donc dû prendre des mesures, sans quoi la population se faisait laver le cerveau par les chaînes et les programmes diffusés sur les médias contrôlés par la Russie.
L'année dernière, nous avons rédigé une loi. On l'appelle la loi interdisant la propagande, mais ce sont en fait des modifications au code audiovisuel qui interdisent la diffusion, sur le territoire de la Moldavie, de programmes de nouvelles, d'analyses et de toutes sortes qui imposent l'opinion russe sur ce qui se passe dans le monde, y compris en Moldavie.
En réalité, la loi ne visait pas seulement la Russie. Officiellement, on parle des modifications à la loi qui interdisent la diffusion de programmes provenant de pays qui n'ont pas signé la Convention européenne sur la télévision transfrontière. La Moldavie en fait partie, mais pas la Russie.
Aujourd'hui, notre population a accès à toutes sortes de publicités et de programmes de la Russie qui présentent un contenu culturel, disons, mais ni aux nouvelles ni aux programmes d'analyses. Il est vrai que la loi a été critiquée et, nous aussi. Nous violons bel et bien le droit d'accès libre à l'information, mais qui a le droit d'imposer sa vision sur ce qui se passe, et de faire subir un lavage de cerveau à notre population? L'opinion est polarisée aujourd'hui en raison de ces activités que la Russie a menées et qu'elle continue malheureusement à mener sur notre territoire.
En outre, la Russie utilise énormément les médias sociaux. Les Russes ont créé un vaste réseau d'organisations non gouvernementales. Ils publient des blogueurs qui écrivent spécifiquement sur la Moldavie afin de présenter des renseignements erronés et de fausses nouvelles sur ce qui se passe en Moldavie, et de montrer les partis prorusses sous un angle favorable. Le président représente ce parti, et il n'est pas étonnant qu'il ait remporté les élections en 2016.
Je sais que beaucoup de communications entre particuliers se font sur Facebook et toutes ces autres plateformes. C'est ainsi que la jeune génération communique. Y a-t-il des contraintes lorsque les personnes échangent entre elles leurs opinions sur ces médias? J'essaie de comprendre jusqu'où va la loi. Cible-t-elle seulement les médias?
Seuls les médias sont visés. En passant, tout le monde est tout à fait libre d'exprimer son opinion. Nous prônons la liberté de réunion. Nous sommes libres d'exprimer nos opinions de toutes les façons, y compris sur les médias sociaux.
Chaque parlementaire a un calendrier très précis de rencontres avec la population. Ils se rendent dans les régions pour rencontrer les gens. Le gouvernement s'engage à examiner chaque pétition et à y répondre; ce sont des demandes écrites d'information émanant de la société civile et de la société dans son ensemble. Chaque ministère gouvernemental répond à toutes sortes de demandes d'information concernant les salaires, les revenus, et ainsi de suite, même si ce n'est pas pratique ou agréable pour certains. Nous avons une loi qui rend l'information transparente. Les fonctionnaires ont une responsabilité par rapport à leurs revenus. Nous remplissons les déclarations, puis la société y a accès. Les gens savent exactement tout ce qui concerne leurs revenus et leurs finances.
Ce ne sont là que quelques exemples, bien sûr.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame l'ambassadrice, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d'être avec nous.
Vous en avez peut-être parlé, mais je m'intéresse à la relation entre les Moldaves et les Ukrainiens. J'aimerais connaître la relation qui lie les pays que la Russie menace d'agression, et la façon dont ils se mobilisent. Quelle est la nature de cette relation? Il y a physiquement une ligne de troupes qui semble vous enlever l'accès à 80 % de votre frontière commune avec l'Ukraine. Y a-t-il une relation entre l'Ukraine et les pays qui l'entourent?
Oui. Si vous parlez de relations interpersonnelles, elles sont excellentes. Tout d'abord, c'était traditionnellement la région où les Moldaves passaient leurs vacances. Mon bon ami, l'ambassadeur de Moldavie en Ukraine, m'a parlé du nombre de passages frontaliers. Je crois qu'il y en a eu quatre millions en 2016. Certains étaient pour des raisons personnelles, puisque nous avons de nombreuses familles mixtes, et les liens de parenté sont très étroits. Nous avons également des entreprises avec l'Ukraine. Comme je l'ai mentionné, nous passons nos vacances là-bas. Il y a une très bonne entente entre nos deux peuples. C'est comme ça depuis toujours. Malgré tous les problèmes avec la Transnistrie, et en dépit de ceux qui étaient au pouvoir auparavant en Ukraine, les relations se sont maintenues. Le seul fait que quatre millions de personnes traversent la frontière est éloquent. Nous avons seulement 3,5 millions d'habitants aujourd'hui. Vous pouvez donc imaginer la fréquence à laquelle nous traitons avec les Ukrainiens.
Vous avez mentionné les relations intergouvernementales. J'ai parlé aujourd'hui des parlements qui décident d'unir leurs forces. Les mêmes tentatives, les mêmes efforts sont aujourd'hui déployés pour collaborer à l'échelle exécutive et gouvernementale. Vous savez, le président Porochenko vient de notre région. Il parle d'ailleurs roumain. Il en est très fier et, quand les dirigeants se rencontrent, il passe très souvent au roumain pour nous parler, juste pour montrer qu'il a beaucoup en commun avec notre pays et qu'il n'a pas oublié ses racines.
Devez-vous traverser la frontière dans la partie nord du pays, ou pouvez-vous la traverser librement pour aller en Ukraine et en revenir?
Nous n'avons pas que le segment transnistrien de la frontière, où nous avions des problèmes. En fait, toute la frontière s'étend sur plus de 1 000 kilomètres, de sorte que nous voyageons évidemment.
Pour l'instant, nous ne sommes pas admis dans la région de Transnistrie, et nous ne traversons pas la frontière à cet endroit.
Ce n'est pas seulement nous qui sommes touchés. Je peux vous dire que les responsables n'ont, bien sûr, pas le droit d'y aller, même s'ils ont de la famille dans la région. De temps en temps, certains veulent visiter les tombes de leurs proches dans la région de Transnistrie, mais ils n'y sont pas autorisés. L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ou OSCE, n'est pas autorisée à y aller non plus.
Nos déplacements sont en effet très limités sur ce territoire.
La région est tellement peu sûre que nous préférons passer par d'autres postes frontaliers.
En passant, puisque nous avons une aussi bonne entente avec les Ukrainiens, ceux-ci « fermaient les yeux », si je peux m'exprimer ainsi, sur ce qui se passait dans ce segment de Transnistrie, en matière de contrebande et d'équipement militaire apporté sur leur territoire pour renflouer les forces opérationnelles russes en Transnistrie. Aujourd'hui, ce n'est plus possible. Peu importe ce que la Russie veut faire, elle doit passer par un territoire contrôlé par les autorités légitimes de la Moldavie. C'est là qu'ils rencontrent de sérieux problèmes.
La seule situation où l'Ukraine autoriserait l'accès est que, si la Russie décide de retirer ses troupes, le pays leur ouvrira un corridor. C'est le seul endroit où elle leur permettra de traverser les frontières.
C'est exact.
Nous avons accès à la mer Noire par un petit segment d'environ 400 mètres sur la rivière Danube. C'est navigable, mais c'est aujourd'hui bloqué.
Votre Excellence, je regarde le drapeau de la Transnistrie, et je remarque qu'il porte encore la faucille et le marteau. Je crois que c'était la dernière région de l'ancienne Union soviétique à enfin reconnaître l'effondrement du régime. La région a-t-elle fini par reconnaître l'effondrement de l'Union soviétique?
La Transnistrie avait refusé de reconnaître l'effondrement de l'Union soviétique en 1991. En quelle année a-t-elle fini par le reconnaître?
Ces gens s'opposaient farouchement à la dissolution de l'Union soviétique parce qu'ils croyaient que leur région serait beaucoup plus limitée, disons, avec la Russie. Ils n'ont pas de frontière commune avec la Russie. Bien sûr, ils se sont rendu compte, à l'époque où l'Union soviétique a été démantelée, qu'ils auraient des problèmes à poursuivre la communication avec la Russie. C'est ce que je crois.
Ils ont essayé de reconnaître des entités autoproclamées comme l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie.
Vous verrez partout une architecture de style soviétique et des monuments de Vladimir Lénine dans tout le pays. Si vous allez en Transnistrie, vous vous trouverez dans l'ancienne Union soviétique, et il y a des drapeaux russes avec le drapeau rouge de Transnistrie. Vous constaterez qu'il y a beaucoup de vestiges du passé là-bas.
Oh, non. En fait, c'est malheureusement un système très corrompu géré par des oligarques. Les entreprises russes s'intéressent clairement à la Transnistrie, notamment parce qu'elle possède une aciérie qui comptait pour une part importante de l'économie moldave dans son ensemble. Avant que la Transnistrie ne se sépare — c'est du moins ce qu'elle prétend — de la Moldavie, 40 % de toute l'industrie moldave provenait de là. C'était une région fortement industrialisée de la Moldavie, et sa perte a été un coup dur pour notre économie.
En même temps, la Transnistrie est fortement soutenue financièrement et subventionnée par Moscou.
Je vais vous donner un exemple de ce qui se passe. Vous pouvez imaginer que la Transnistrie a du mal à survivre aujourd'hui, en particulier avec l'Ukraine qui coopère avec la Moldavie, et qui ne leur permet pas de se livrer à des activités de contrebande. La Russie fournit du gaz à l'ensemble du territoire moldave, et à la Transnistrie aussi. Or, nous achetons le gaz russe à environ 300 dollars américains par 1 000 mètres cubes, alors que les Transnistriens « l'achètent » à 80 dollars. Cet argent n'est toutefois pas versé à la Russie. On leur a donc donné du gaz, qu'ils ont utilisé. L'argent qu'ils doivent à la Russie a servi à payer les salaires visant à préserver la sphère sociale, et la Russie a refilé la dette à la Moldavie. Aujourd'hui, nous avons donc une dette de près de 7 milliards de dollars envers la société russe Gazprom. De ce chiffre, 94 % sont attribuables à la Transnistrie.
En fait, la Russie ne reconnaît pas que la Transnistrie est séparée. Elle dit que la région fait partie de la Moldavie en raison de cette dette.
Je vous ai peut-être donné trop de détails, mais j'espère que vous comprendrez comment tout cela fonctionne. Le secteur de l'énergie sert de levier.
En passant, nous essayons maintenant de diversifier notre marché d'approvisionnement en énergie, et nous construisons un gazoduc pour relier la Roumanie à la Moldavie afin de moins dépendre de l'énergie russe, au moins.
Merci beaucoup.
C'était très intéressant, je vous en remercie.
Aimeriez-vous poursuivre la conversation sur la sécurité énergétique, et nous en parler un peu plus? Bien sûr, je suis persuadée que l'énergie est à la base de tout ce que vous voulez faire.
Oui, absolument, surtout le gaz, comme je l'ai déjà souligné. Nous dépendons beaucoup des importations de gaz. En fait, tout le gaz consommé en Moldavie est importé.
En ce qui a trait à l'électricité, nous ne produisons que 20 % de notre électricité. Celle-ci est produite à la centrale de Transnistrie. Les autorités utilisent le gaz russe pour faire fonctionner la centrale.
Nous avons aussi tenté de diversifier ce marché. Auparavant, nous signions des contrats avec des fournisseurs ukrainiens, ce qui attirait les critiques immédiates des autorités à Tiraspol et à Moscou selon lesquelles nous tentions de fermer le robinet à la région de Transnistrie. Ils parlaient d'un embargo économique contre Transnistrie. Il s'agit, en réalité, de l'une des principales sources de revenus pour leurs budgets.
C'est une question très délicate et très difficile à résoudre. Nous ne voulons pas être mis en cause pour avoir tenté de limiter la région de Transnistrie ou de l'avoir soumis à des pressions économiques. Nous devons trouver un équilibre et, pour cela, nous devons adopter des politiques très sages.
Excellent.
J'aimerais revenir à certaines des perspectives régionales dont vous parlez. Vous avez parlé de la possibilité de conclure un accord entre les trois pays. Pourriez-vous nous parler de la relation qui existe entre votre pays et l'Ukraine et la Georgie relativement au partage de renseignements et à la formation des troupes, notamment, et la forme que pourrait prendre une telle entente? Quelle serait la structure de cette entente?
Pour le moment, comme je l'ai souligné, nous avons un accord parlementaire, disons. La coopération entre les services du renseignement et les services frontaliers des trois pays est très bonne, même si nous ne partageons aucune frontière directe avec la Georgie. La coopération ministérielle est aussi très bonne.
J'ignore si une entente précise a été signée à ce sujet, mais je sais que la coopération est très bonne. Lors de la visite de notre ministre des Affaires étrangères au Canada, nous avons discuté de la possibilité d'accentuer la coopération entre les services du renseignement pour le partage d'informations, ce qui nous aiderait, d'abord, à moderniser l'armée, et donnerait à la Moldavie les moyens nécessaires pour mieux comprendre les menaces qui se pointent, surtout les menaces voilées venant de l'extérieur.
Nous espérons sincèrement que c'est une mesure avec laquelle le Canada pourra aider la Moldavie afin de régler les problèmes qui existent.
Je sais que nous participons à la formation des Ukrainiens ou que nous travaillons avec l'Ukraine...
Je le sais. Je ne cesse de frapper à la porte du gouvernement du Canada pour qu'il lie des Moldaves à ces projets.
C'est exact. Nous participons ensemble à des exercices de formation, très souvent sous la direction des États-Unis ou de l'OTAN. La Moldavie participe toujours à ces exercices dans la région, tout comme l'Ukraine et la Georgie.
Oui, monsieur le président, j'aimerais intervenir brièvement. J'aimerais avoir un peu plus d'informations sur l'histoire de la région de Transnistrie. Pourquoi cette région est-elle si spéciale? Pourquoi continue-t-elle de soutenir l'Union soviétique et cette idéologie? Existe-t-il une différence culturelle et historique entre les Moldaves et Transnistriens?
Oui. L'histoire nous apprend qu'avant de se joindre à l'empire russe, le pays était composé principalement de Moldaves, suivi d'Ukrainiens. Vous savez que la Moldavie fait partie du monde latin. Notre langue fait partie du groupe de langue romane. Depuis 1997, nous faisons partie de la Francophonie. Il y a effectivement des différences avec le monde slave, mais, pourtant, les populations de la Moldavie coexistent pacifiquement. Nous formons une société très multiculturelle.
À mon avis, lorsque la sixième guerre entre la Russie et la Turquie a éclaté, en 1792, une entente a été conclue selon laquelle le territoire — qui s'appelait à l'époque Bessarabia et dont une partie forme aujourd'hui la région de Transnistrie — appartenait à l'Ukraine. Cela explique pourquoi les Ukrainiens forment le deuxième groupe ethnique en importance au pays. Les habitants coexistent encore pacifiquement aujourd'hui, mais le sentiment selon lequel cette partie du pays appartient toujours au monde slave demeure.
En 1924, le territoire a quitté l'Ukraine pour devenir indépendant et a adopté le nom de la République socialiste soviétique moldave. Il s'agissait d'un territoire largement autonome au sein de la république soviétique. Donc, encore aujourd'hui, les gens ne soutiennent rien qui aurait un lien avec nos affinités avec la culture romane.
Oui, ce sentiment persiste et rien n'est oublié. Les Moldaves constituent la minorité ethnique la plus importante en Transnistrie, mais les deux autres, les Ukrainiens et les Russes, forment ensemble la population de langue russe et sont plus nombreux que les Moldaves.
Je vais partager mon temps d'intervention avec M. Yurdiga.
Madame l'ambassadrice, vous avez dit, dans votre exposé, que l'armée moldave est sous-entraînée et sous-équipée. L'armée moldave mène-t-elle des exercices avec la Roumanie ou avec tout autre pays voisin?
Comme je l'ai souligné, nous souhaitons vraiment assurer la formation de notre armée nationale et l'équiper de façon à disposer d'une armée professionnelle composée de soldats contractuels. Nous souhaitons vraiment aussi équiper notre armée de façon à pouvoir participer de manière plus efficace à des opérations internationales de maintien de la paix. À cet égard, il y a à peine quelques semaines, dans le cadre d'un comité parlementaire sur la défense, une entente de coopération a été conclue entre la Moldavie et la Roumanie. La Roumanie a accepté de nous conseiller sur la modernisation de notre armée, de nous fournir des renseignements et de nous aider à entraîner nos bataillons de maintien de la paix.
Nous avons convenu de joindre nos forces et de créer des bataillons mixtes avec la Roumanie afin de participer à des opérations conjointes de maintien de la paix. Il s'agit de développements très intéressants. De plus, la coopération entre les ministres nationaux de la défense est très bonne. Si je ne m'abuse, après avoir été nommé, le ministre de la Défense de la Moldavie s'est d'abord rendu en Belgique — bien entendu, au siège de l'OTAN, à Bruxelles —, et ensuite à Bucarest.
La constitution de la Moldavie, faisant du pays un pays neutre, vous interdit-elle d'acheter des armes d'autres pays?
Le pays ne peut acheter des armes que pour sa propre défense. Le statut de pays neutre autorise la Moldavie à s'assurer d'abord qu'elle est prête à intervenir en cas de risque. Les armes ne servent qu'à la défense du pays. La participation du pays à des opérations de maintien de la paix ne contredit en rien son statut de pays neutre, car, selon nous, il s'agit d'une façon d'entraîner notre armée et d'apporter une contribution, car la Moldavie croit sincèrement qu'elle doit passer d'un pays « consommateur de solutions de sécurité » à un pays « fournisseur de solutions de sécurité ». Pour cela, nous devons disposer d'une armée bien entraînée. C'est tout ce que je peux dire sur le sujet.
J'aimerais simplement revenir aux questions que je posais plus tôt. Les lois sur la propagande limitent-elles les sondages d'opinion publique, un droit démocratique important?
Je reçois chaque jour les résultats de toutes sortes de sondages d'opinion publique. Je ne comprends pas d'où viennent les chiffres parfois et je ne sais pas lequel de ces sondages est le plus juste. Ils sont vraiment nombreux; il n'y a pas de restrictions. Soit dit en passant, il y a plusieurs organisations non gouvernementales qui réalisent des sondages d'opinion, même des organisations étrangères, surtout pour montrer à quel point la population appuie le Parti soviétique ou le gouvernement, ou quelle est l'opinion de la population au sujet de la situation en Moldavie. Cela aide à rédiger les bonnes politiques. Il n'y a pas de limites.
Merci beaucoup. Je suis heureuse de vous revoir, Votre Excellence.
J'aimerais obtenir des précisions: vous avez dit qu'en Moldavie, il y avait 6 500 membres du personnel militaire actif pour une population de 4,5 millions de personnes dans une zone qui vit le même type d'agression, si je puis dire, de la part de la Russie.
Quelles initiatives sont en place pour recruter les membres des forces armées moldaves? Est-ce que tous les adultes doivent faire un service militaire pendant un certain nombre d'années? Comment recrutez-vous vos membres?
Nous venons tout juste de parler de la disposition de la constitution qui traite de la neutralité de la Moldavie. Le gouvernement ou le président de l'époque, surtout l'ancien président du Parti communiste de Moldavie, avait même pris des mesures pour réduire l'armée nationale, en prétendant qu'étant donné sa neutralité, le pays n'avait pas besoin d'une grande armée qui, bien sûr, coûte beaucoup plus cher.
On a réduit l'armée. Aujourd'hui, nous recrutons. Tous les jeunes des 18 ans sont obligés de faire leur service. Il y a certaines exceptions et le recrutement peut être reporté si une personne est inscrite à l'université, par exemple. On peut retarder le service jusqu'à ce que la personne ait terminé ses études, mais elle doit quand même passer par un certain entraînement. Aujourd'hui, nous croyons que ce n'est toujours pas un outil très efficace. Il nous faut une armée professionnelle; que les gens en assument la responsabilité et qu'ils signent un contrat s'ils veulent s'enrôler dans l'armée, pour un an ou deux. On discute de cela.
Puisque le recrutement est obligatoire, que ce soit après les études universitaires ou à l'âge de 18 ans, combien de temps les gens doivent-ils rester dans les forces armées? Est-ce une période obligatoire de deux ans?
Vous dites que pour un pays qui a 27 ans et qui est assez jeune, les deux principaux objectifs sont la modernisation systématique de la Moldavie et le soutien à l'entrepreneuriat, en misant surtout sur la formation et l'éducation. Quelles sont les grandes priorités de la Moldavie en matière de modernisation? Il n'est jamais uniquement question de défense: il y a la politique, la gouvernance et bien d'autres choses. Quelle serait la priorité, selon vous, en ce qui a trait à la modernisation systématique?
L'accord d'association compte des chapitres très précis sur toutes les sphères d'activités et prévoit des mesures très concrètes qui doivent être prises pour réformer l'économie nationale et le secteur de la justice, qui a malheureusement besoin d'une attention immédiate.
En passant, c'est l'une des raisons pour lesquelles lorsque je frappe à la porte du gouvernement canadien, je dis toujours que vous devez utiliser votre grande expérience démocratique et partager votre expertise avec nos tribunaux, parce que nous devons assurer leur transparence. Parfois, on a l'impression qu'il s'agit d'un État au sein d'un État. Malheureusement, le système judiciaire est assez corrompu et c'est pourquoi le gouvernement a décidé de prendre cette mesure très difficile d'augmenter les salaires, mais d'exiger une reddition de compte afin de veiller à ce qu'il n'y ait plus de corruption dans le système judiciaire et que tout soit transparent. La réforme du système judiciaire sera l'une des priorités du gouvernement moldave.
Nous devons veiller à offrir toutes les conditions nécessaires aux entrepreneurs, surtout aux petites et moyennes entreprises, afin de garantir que l'argent qu'elles investissent et que les entreprises qu'elles exploitent soient sous l'égide de l'État. Ainsi, nous leur offrons le cadre juridique nécessaire pour leur permettre de travailler librement et d'être appuyées par le gouvernement.
L'investissement dans l'éducation et la seule façon de bâtir un avenir pour notre pays. Notre pays est considéré comme l'un des meilleurs en ce qui a trait à la qualité de l'enseignement. Notre population est multilingue. Nous parlons plusieurs langues. À part le moldave, les gens parlent très souvent le russe. Ils parlent l'anglais, le français, l'espagnol, l'italien et l'allemand. Nous vivons dans une société multilingue où les gens qui terminent leurs études n'ont pas accès à des emplois concurrentiels bien rémunérés, et quittent le pays à la recherche d'une meilleure vie et de meilleurs emplois. L'investissement dans l'éducation et la création d'emplois pour ces gens, afin qu'ils restent au pays, sera peut-être le troisième ou le quatrième objectif de mon gouvernement.
J'ai l'impression que vous allez voir notre processus démocratique en action dans une minute, mais je veux être certain qu'il n'y ait plus de questions afin que nous présentions quelques motions.
Tout d'abord, je tiens à vous remercier tous pour vos questions.
Madame l'ambassadrice, je vous remercie de votre présence.
Je vais conclure dans un instant, mais nous devons entendre des motions. Je vous remercie de votre patience. Monsieur Bezan, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Je ne sais pas si le Comité le sait, mais en novembre 2014, la Chambre avait adopté la motion suivante à l'unanimité:
Que la Chambre réitère l’appui soutenu du Canada à l’égard de la liberté, de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit partout dans le monde; qu’elle réaffirme le soutien du Canada à l’égard de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la République de Moldova, ainsi que de l’inviolabilité de ses frontières; qu’elle encourage les efforts de la République de Moldova en vue de faire progresser ses réformes démocratiques; qu’elle affirme le droit souverain de la République de Moldova d’établir ses propres partenariats sans coercition ou pressions externes; qu’elle prenne note du fait que la République de Moldova a signé un accord d’association visant à établir une vaste zone de libre-échange avec l’Union européenne le 27 juin 2014 et l’a ratifié le 2 juillet 2014; qu’elle accueille favorablement la décision de la République de Moldova de poursuivre dans la voie de l’intégration européenne.
Dans la même veine, je propose que le Comité permanent de la défense nationale encourage le gouvernement du Canada à faire ce qui suit:
1. Que le gouvernement du Canada négocie un accord en matière de défense et de sécurité avec la République de Moldova.
2. Que le gouvernement du Canada ajoute la Moldova à la Liste des pays désignés (armes automatiques).
3. Que le gouvernement du Canada envoie une mission d’observation électorale en Moldova pour les élections parlementaires de novembre 2018.
Merci beaucoup.
Est-ce que je peux me permettre un commentaire? Ce n'est pas une question, mais je vais seulement dire que les élections parlementaires approchent; elles se tiendront à la fin du mois de novembre. Ce sera encore une fois un choix géopolitique. La population est très polarisée au sujet de l'orientation à suivre: une coopération plus étroite avec l'Europe ou le retour au passé soviétique.
Est-ce que je peux vous demander d'appuyer une autre motion qui demande la tenue d'élections démocratiques, libres et transparentes, pour commencer? Ensuite, il faut signaler l'appui du Parlement canadien à l'égard des efforts de la Moldavie pour réformer le pays et pour intégrer l'espace européen de valeurs communes. Cela représenterait un appui très concret de la part du Canada et du Parlement.
Je vous demande de lever la main et d'appuyer la motion. Je communique avec le Groupe d'amitié parlementaire Canada-Moldavie et nous comprenons clairement la nécessité de telles motions.
Avant de passer à la discussion sur la motion, sur le plan de la procédure, cela ne peut pas se rendre à la Chambre sans qu'on en fasse rapport, selon la greffière. Nous pouvons en parler, mais nous devons tenir compte de quelques points. J'ai une idée de la motion que présentera Sven, et ensuite il faut parler de temps, parce que vous dites qu'il faut adopter la motion dans un délai précis.
En effet, comme l'a dit l'ambassadrice, les élections se tiendront à l'automne. Il faut que le gouvernement s'active maintenant.
D'accord. Étant donné le temps dont nous disposons avant la fin de la session — et je sais ce que nous vous avons déjà demandé de faire —, nous pourrions accorder la priorité à cette motion. En théorie, si Sven présente une motion de rapport à la Chambre, cela pourrait être une recommandation. Nous pourrions demander à la greffière de mettre de côté le rapport sur l'Ukraine, parce que cette question est plus urgente, et que nous voulons l'aborder avant la fin de la session pour répondre à vos préoccupations.
D'accord, alors allez-vous retirer votre motion et le laisser présenter la sienne?
M. James Bezan: Oui, c'est ce que vous avez décidé.
Le président: Alors elle est irrecevable, en gros.
J'invoque le Règlement. Notre témoin a parlé de quelques motions aussi. Comment seront-elles intégrées?
Je recommande que nous laissions M. Spengemann présenter sa motion. Nous pourrons en discuter plus longuement à ce moment-là, puis nous pourrons prendre une décision.
Monsieur Spengemann, allez-y.
Merci, monsieur le président.
Vous avez bien deviné ce que j'allais proposer. Je propose que le Comité demande aux analystes de préparer un rapport sur la séance d'aujourd'hui avec l'ambassadrice, et qu'il soit déposé à la Chambre.
Je propose que les trois recommandations que je viens de faire en fassent partie, en plus d'autres commentaires de l'ambassadrice.
Nous devons rester dans notre domaine, même si parfois, nous nous promenons du côté des affaires étrangères.
Je crois que dans le rapport, nous pouvons reprendre vos commentaires, madame l'ambassadrice, afin d'aider le processus démocratique et de faire de l'intégration européenne de la Moldavie.
Je crois que nous nous éloignons grandement de notre mandat à titre de Comité de la défense dans les recommandations proposées par M. Bezan. Je ne les ai pas devant moi, mais je trouve cela difficile, parce qu'à mon avis nos recommandations doivent aborder l'appui du Canada à l'égard de la mission de l'OSCE qui vise un règlement négocié. Je m'opposerais à un rapport qui ne présenterait pas une telle recommandation.
D'accord. Comme c'est le cas pour tous nos rapports, nous pourrons négocier les recommandations lorsque nous serons rendus là. Mais il semble y avoir une volonté de présenter un rapport à la Chambre. Donc, à moins qu'il y ait d'autres discussions à ce sujet, nous pouvons parler des détails de toutes les recommandations lorsque nous verrons le rapport. Pour le moment, j'aimerais que nous votions sur la motion présentée par M. Spengemann.
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Nous allons en rester là, à moins que vous vouliez ajouter quelque chose.
Allez-y, Cheryl.
Monsieur le président, l'autre jour, j'ai présenté une motion qui avait été imprimée à titre de recommandation. Je l'ai quelque peu reformulée, parce que lorsque je l'avais présentée, on a cru qu'elle était incomplète pour une raison quelconque ou qu'elle constituait une objection à l'étude du rôle de l'intelligence artificielle dans l'armée. J'en ai donc élargi un peu la portée et j'aimerais la présenter avant que nous partions, afin que les analystes puissent y penser pendant l'été, au cas où le Comité déciderait de procéder à l'étude.
Non. C'est une nouvelle motion. J'ai donné l'avis de 48 heures. Je propose que le Comité permanent de la défense nationale entreprenne une étude sur l'utilisation de l'intelligence artificielle dans les véhicules aériens, marins ou terrestres sans pilote, les systèmes d'armes robotiques de développement technologique et l'analyse du personnel des Forces canadiennes, et que le Comité entreprenne la planification de l'étude au cours des dernières étapes de l'étude sur le maintien de la paix, afin de la commencer immédiatement après.
D'accord, je comprends que vous présentez cette motion. J'en prends note.
Est-ce que vous retirez la motion précédente?
D'accord, c'est noté.
Madame l'ambassadrice, nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui. Je suis heureux de savoir que le Comité fera rapport à la Chambre pour souligner le comportement inacceptable, illégal et belliqueux de la Russie dans la région. Je crois aussi que le rapport saura orienter les futures décisions du gouvernement du Canada sur la région et sur la Moldavie, la Géorgie et l'Ukraine. Je suis heureux que ce soit consigné au compte rendu et que cela fasse l'objet d'un rapport à la Chambre.
Donc, à moins que quelqu'un veuille ajouter quelque chose, je vais lever la séance.
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