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Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la défense nationale.
Nous sommes réunis aujourd’hui pour discuter, en compagnie de nos témoins, du Canada et de la défense de l’Amérique du Nord, ainsi que de l’évaluation de la sécurité et de la menace, notamment en ce qui a trait à l’état de préparation de la défense aérospatiale de la région canadienne du NORAD.
Pour l’occasion, nous accueillons le contre-amiral Scott Bishop, directeur général, Politique de sécurité internationale et Stephen Burt, chef adjoint du renseignement de la Défense, Commandement du renseignement des Forces canadiennes, tous les deux du ministère de la Défense nationale. Nous accueillons également David Drake, directeur général, Bureau de la sécurité internationale et du renseignement, ministère des Affaires mondiales.
Messieurs, nous vous sommes reconnaissants d’avoir pris le temps de venir témoigner devant le comité.
Vous disposerez chacun de 10 minutes, tout au plus, pour nous présenter votre exposé. Nous commencerons par les deux représentants du MDN, suivi de M. Drake, d’Affaires mondiales Canada. Messieurs Burt et Bishop, vous avez la parole, dans l’ordre qui vous plaira.
Merci d’avoir accepté notre invitation.
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Merci, monsieur le président, de m’avoir invité à comparaître devant ce comité alors que vous entreprenez l’étude de ce sujet, selon nous, très important.
Je suis le contre-amiral Scott Bishop, directeur général de la Politique de sécurité internationale au quartier général de la Défense nationale. Je relève du sous-ministre adjoint des Politiques et suis responsable de la gestion de nos relations de défense bilatérales et multilatérales, y compris, bien entendu, notre relation très importante avec les États-Unis d’Amérique. J’espère que mes remarques vous aideront dans vos travaux sur la défense et la sécurité de l’Amérique du Nord.
J’aimerais d’abord vous donner un aperçu général de certaines initiatives clés et vous souligner certains éléments clés de notre coopération en matière de défense et de sécurité avec les États-Unis, y compris notre participation au Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord, mieux connu sous le nom de NORAD.
[Français]
Comme vous le savez, le gouvernement s'est engagé à entreprendre un examen de la politique de défense qui considérera les priorités du Canada en matière de défense et sera le moteur de notre stratégie pour répondre à l'environnement de sécurité dynamique et aux incertitudes de l'avenir. La défense de l'Amérique du Nord figurera presque assurément avec prééminence dans l'Examen de la politique de défense, puisqu'elle a toujours été une tâche immuable et permanente des Forces armées canadiennes.
[Traduction]
C’est pourquoi les Forces armées canadiennes travaillent à assurer l'interopérabilité de nos systèmes avec ceux des États-Unis et que nous sommes en mesure de mener des opérations dans l’ensemble du spectre des conflits. Pour ce faire, nous menons des exercices militaires conjoints réguliers, échangeons du personnel et pratiquons une coopération étroite en tant que partenaires à part entière sur pratiquement tous les enjeux importants liés à la défense en Amérique du Nord. À tout moment, plus de 700 membres des Forces armées canadiennes servent aux États-Unis. Environ 300 d’entre eux se consacrent à la mission du NORAD, dont 147 au quartier général du NORAD, à Colorado Springs, et des dizaines d’autres à plusieurs autres endroits aux États-Unis.
Notre ministre et le secrétaire d’État à la Défense des États-Unis se rencontrent régulièrement, au Canada et à Washington, ainsi que dans le cadre des réunions de l’OTAN et dans divers autres forums organisés ailleurs dans le monde. Outre cet engagement des hauts dirigeants, un large éventail d’institutions et d’ententes bilatérales contribuent à maintenir et à approfondir notre relation de défense.
Le plus important de ces forums est la Commission permanente mixte de défense (CPMD) qui se réunit régulièrement depuis 1940. Elle sert de forum bilatéral pour discuter de questions stratégiques et formuler des conseils en ce qui concerne la défense du territoire et la sécurité intérieure, y compris les enjeux militaires internationaux ayant une incidence sur la défense continentale. Pour s’adapter aux changements qui surviennent dans le milieu de la défense et de la sécurité, la composition de la Commission a évolué considérablement au cours de la dernière décennie et demie. Plus particulièrement, elle compte maintenant des représentants d’autres ministères et organismes de sécurité et des nouvelles structures de commandement militaire de nos deux pays.
Aujourd’hui, des hauts représentants du ministère de la Défense nationale, d’Affaires mondiales Canada, du Bureau du Conseil privé et du ministère de la Sécurité publique assistent aux réunions de la Commission, en compagnie de la délégation américaine qui compte, elle aussi, des représentants de départements et organismes similaires. La Commission demeure l’entité consultative politico-militaire la plus importante pour les questions de défense et sécurité des deux pays et joue un rôle essentiel pour favoriser une discussion franche sur le large éventail de nouveaux enjeux susceptibles d’avoir une incidence sur la défense et la sécurité du continent.
En plus de la Commission permanente mixte de défense et des nombreux autres forums Canada-États-Unis axés sur les questions de défense, plus de 800 ententes et accords régissent la relation de défense au quotidien, y compris l’entente du NORAD. En soi, le NORAD est l’une des pierres angulaires de la relation de défense Canada-États-Unis et a évolué considérablement depuis sa création, en 1958. Néanmoins, il demeure le moyen par lequel nos deux nations défendent ensemble l’espace aérien de l’Amérique du Nord. Le Canada travaille étroitement avec les États-Unis pour assurer la capacité du NORAD à remplir efficacement ses trois missions, soit l’alerte aérospatiale, le contrôle aérospatial et l’alerte maritime.
Le NORAD joue également un rôle important dans la souveraineté et la sécurité du Canada. Il sert de moyen de dissuasion contre des attaques potentielles et offre une capacité de surveillance essentielle à la défense contre les approches vers l’Amérique du Nord. En tant que partenaire du NORAD, le Canada apporte une contribution importante à la défense des approches nordiques du continent. C’est pourquoi nous sommes engagés à protéger le statut du NORAD en tant qu’élément critique de la défense nord-américaine, mais aussi à contribuer à explorer les options possibles pour assurer la modernisation et l’évolution du NORAD afin de répondre aux défis actuels et émergents. L’examen des possibilités de renouvellement du Système d’alerte du Nord constitue un des éléments clés de ces efforts.
Afin de nous assurer d’être bien placés pour discuter de ces enjeux importants, nous avons établi des mécanismes qui nous permettent de réunir sur une base régulière tous les intervenants pertinents en matière de défense, tant civils que militaires, en compagnie de nos alliés américains, afin de discuter de ces enjeux.
[Français]
Outre la coopération dans le cadre du NORAD, une composante essentielle de notre relation de défense au quotidien est effectuée en vertu du Cadre de coopération dans l’Arctique des trois commandements. Les trois commandements regroupent le Commandement des opérations interarmées du Canada, le NORAD et le U.S. Northern Command. Les trois commandements sont la plateforme principale grâce à laquelle le Canada et les États-Unis collaborent pour se préparer et répondre aux situations d'urgences civiles, en particulier par le Plan d'assistance civile Canada-États-Unis. Le Plan d'assistance civile facilite le soutien de la force militaire d'un pays à celle de l'autre pour l'aider durant les catastrophes naturelles, des attaques terroristes ou d'autres crises.
Pour la planification en matière de défense, le Plan de défense interalliée fournit un cadre pour la défense combinée du Canada et des États-Unis. De manière similaire au Plan d'assistance civile, il fournit un cadre décrivant la manière dont les forces militaires d'un pays peuvent soutenir celles de l'autre. Dans les deux contextes, nos commandants régionaux ont établi des relations avec leurs collègues militaires américains de l'autre côté de la frontière pour garantir que nos pays peuvent s'appuyer l'un et l'autre au besoin. Pour garantir leur état de préparation, nos deux nations s'entraînent et prennent part ensemble à des exercices de manière continue.
[Traduction]
J’aimerais aussi parler brièvement de l’Arctique. Même si les paysages géographique et géopolitique sont complexes et évoluent rapidement, il n’existe pour le moment aucune menace militaire contre le Canada dans l’Arctique. Toutefois, la Défense nationale a un rôle important à jouer dans le Nord, surtout en soutien aux activités pangouvernementales dans la région, et au moyen d’opérations de surveillance et de souveraineté.
Là encore, notre relation avec les États-Unis est d’une importance capitale. Outre le NORAD en ce qui a trait aux responsabilités communes dans le Nord, nous profitons du Cadre de coopération tripartite dans l’Arctique entre le COIC, le NORAD et le US Northern Command. Ce cadre établit des domaines de coopération précis au chapitre de la sûreté et de la sécurité dans l’Arctique et de la planification en ce qui concerne la défense de l’Amérique du Nord.
En terminant, j’aimerais insister sur le fait que notre relation de défense avec les États-Unis a toujours été d’une importance capitale pour le Canada. Alors que nous nous tournons vers l’avenir et sommes confrontés à un environnement de la menace qui demeure volatile, imprévisible, chaotique et ambiguë, cette relation particulière reste d’une grande importance pour nos deux pays, car la défense et la sécurité du Canada et des États-Unis dépendront du maintien de notre collaboration en tant que partenaires à part entière dans la défense de l’Amérique du Nord.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de nous avoir invités à témoigner devant vous ce matin. C'est avec grand plaisir que je m'adresse à vous aujourd'hui pour vous faire part de notre point de vue sur les menaces auxquelles fait face l'Amérique du Nord.
[Traduction]
Avant d’amorcer mon exposé, j’aimerais prendre un instant pour souligner le grave événement survenu ce matin à Bruxelles, en Belgique. Évidemment, il sera question du terrorisme dans mon exposé, mais je serai heureux de répondre à toutes vos questions. Cette situation évolue. Nous recevons des informations de minute en minute, la plupart de sources ouvertes, comme les médias. Donc, je n’en sais pas plus que vous pour le moment, mais je serai heureux de répondre à vos questions sur le sujet.
Avant de parler des menaces possibles contre le Canada, tel que nous les envisageons, je souhaite mettre en contexte le rôle du Commandement du renseignement des Forces armées canadiennes, ou le COMRENSFC, comme nous l’appelons. Le rôle du COMRENSFC consiste à aider le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes à faire des choix judicieux dans l’exercice de leurs fonctions. Qu’il soit question de la conduite d’opérations en Arctique, de fournir du soutien pendant des événements comme les Jeux olympiques de Vancouver ou de mener des opérations militaires outre-mer, les Forces armées canadiennes ont besoin des renseignements les plus précis et à jour afin de réaliser leurs objectifs militaires et d’assurer la sécurité et la protection de leur personnel.
Le renseignement de la défense est aussi une composante essentielle de la capacité du gouvernement du Canada à prendre des décisions éclairées en ce qui a trait à la Défense, à la sécurité nationale et aux affaires étrangères. Dans l’accomplissement de notre mandat, je peux affirmer avec fierté que notre capacité de renseignement est de calibre mondial et qu’elle offre les outils requit, jour et nuit, 365 jours par année, pour procurer à nos dirigeants un avantage en matière d’information lorsqu’ils prennent ces décisions. Le renseignement est un des principaux facteurs de la réussite opérationnelle.
J’aimerais également souligner que nous profitons de relations productives avec nos partenaires pangouvernementaux et que nous travaillons étroitement avec le Bureau du Conseil privé, la GRC, le SCRS, le CSTC, la Sécurité publique et Affaires mondiales Canada. Vous et les Canadiens que vous représentez pouvez être certains que les organisations du renseignement s’assurent de promouvoir les intérêts du pays en matière de défense et de sécurité.
Le Canada a également une solide relation de renseignement de défense avec le Groupe des cinq, qui comprend l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et les États-Unis. Les bureaux de liaison permanents établis à Ottawa, à Washington, à Londres et à Canberra aident à gérer cette relation.
[Français]
Passons maintenant au sujet dont il est question, soit les menaces contre l'Amérique du Nord. Je suis heureux d'avoir l'occasion d'aider à situer le Comité et de contribuer à la préparation du prochain rapport sur notre vision du contexte au sujet des menaces actuelles. Le Commandement du renseignement des Forces canadiennes consacre la majeure partie de ses énergies aux menaces militaires étrangères et au soutien des opérations des Forces canadiennes à l'étranger.
[Traduction]
Nous définissons les menaces comme étant composées à la fois d’une intention et d’une capacité. Selon nous, un groupe qui souhaite causer du tort au Canada, sans toutefois en avoir les moyens, ne représente pas une menace. Ainsi, après avoir décelé une intention de la part d’un acteur étranger de nuire au Canada, l’appareil du renseignement doit surveiller toute avancée sur le plan des capacités afin de déterminer si cet acteur représente une menace. Il est parfois difficile de surveiller ou de prévoir des changements sur le plan des capacités, mais cela est généralement possible, avec une marge d’erreur raisonnable. Il est plus difficile d’évaluer une intention réelle ou grandissante, mais cela demeure possible. Toutefois, la prédiction d'une intention est très risquée. Bien qu’un État puisse ne montrer aucune hostilité tandis qu’il renforce une capacité, celle-ci, une fois acquise, demeure dans son arsenal, peu importe les changements qui surviennent dans son calcul politique et ses intentions.
En gardant cette définition à l’esprit, je peux affirmer qu'à l'heure actuelle, nous ne voyons aucun acteur étatique ayant à la fois la capacité et l’intention de nuire au Canada par la voie militaire. Néanmoins, nous jugeons très inquiétants la prolifération et l’usage potentiel d’armes de destruction massive, ou ADM, y compris les armes chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires, ainsi que le développement de missiles balistiques capables d’atteindre l’Amérique du Nord. Les états inquiétants, comme l’Iran et la Corée du Nord, continueront fort probablement de tenter d’acquérir, de renforcer et d’améliorer leurs capacités en matière d’armes de destruction massive et de missiles balistiques.
La double nature de la plupart des technologies biologiques et de nombreuses technologies chimiques rendent difficile la surveillance des programmes d’armement et d’approvisionnement liés à ces équipements. De plus, l’application alléguée des technologies nucléaires et véhicules de lancements spatiaux à des fins civiles peut cacher des intentions militaires. Cependant, il est important de souligner que, selon nous, seuls des états pourraient maîtriser la complexité des systèmes de lancement de missiles balistiques.
L’arsenal de missiles actuels de l’Iran n’a ni la portée ni la complexité nécessaires pour atteindre des objectifs situés en Amérique du Nord. Grâce au plan d’action conjoint P5+1 pour l’Iran, nous estimons que la possibilité de développement d’armes nucléaires clandestines est grandement compromise et qu’elle serait vraisemblablement détectée si elle se concrétisait.
Par contre, la Corée du Nord a explicitement affirmé vouloir être en mesure de cibler l’Amérique du Nord à l’aide de missiles nucléaires. Nous savons que le pays travaille activement à la conception de missiles balistiques pouvant atteindre l’Amérique du Nord, mais nous ignorons s’il est parvenu à développer une arme efficace. La déclaration récente de la Corée du Nord sur la mise à l’essai réussie d’une arme thermonucléaire, ou bombe H, n’est pas fondée. Néanmoins, l’histoire de ce pays démontre des efforts continus en vue de développer une capacité viable en matière d’armes nucléaires, et nous continuerons d’assurer une surveillance étroite.
[Français]
Aujourd'hui, le terrorisme demeure évidemment au premier plan de notre attention à titre de menace à la sécurité de l'Amérique du Nord. Bien que les principaux organismes du gouvernement du Canada chargés de la lutte contre le terrorisme au pays soient la GRC et le SCRS, les Forces armées canadiennes sont prêtes à jouer un rôle pour soutenir leurs partenaires de la gestion des urgences dans l'ensemble du Canada. Nous travaillons également de près avec eux et d'autres partenaires pour assurer la sécurité de nos membres du personnel et de l'infrastructure des Forces armées canadiennes.
[Traduction]
Enfin, concernant le cyberespace, les deux champs d’intérêt du COMRENSFC sont les menaces qui influent sur la capacité de fonctionnement des Forces armées canadiennes et les cybercapacités des acteurs militaires étrangers. L’aspect général des cybermenaces, c’est-à-dire celles qui touchent le Canada en général et qui sont proférées par des acteurs non militaires, relève du ministère de la Sécurité publique.
Certains états pourraient exploiter les réseaux informatiques à des fins de collecte de renseignements stratégiques. Pour être clair, cela signifie simplement qu’ils pourraient utiliser les ordinateurs pour espionner le Canada. Ils pourraient aussi utiliser la reconnaissance des réseaux en prévision d’attaques de réseaux informatiques planifiées ou anticipées, c’est-à-dire qu’ils pourraient examiner notre système informatique afin qu’au moment où nous nous défendons, ils puissent effectuer une cyberattaque rendant nos systèmes de commandement et de contrôle inutilisables. Ils pourraient également utiliser des attaques de réseaux visant des données et des réseaux de communications privés et gouvernementaux sur lesquels nous nous appuyons.
Le COMRENSFC s’intéresse à tous ces types d’incidents puisqu’ils ont une incidence sur la capacité de fonctionnement des Forces armées canadiennes.
[Français]
Monsieur le président, c'est sur ces mots que je termine ma présentation. Je remercie beaucoup les membres du comité de m'avoir écouté. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je suis heureux d’être ici aujourd’hui pour discuter des considérations en matière de politique étrangère associées à la défense de l’Amérique du Nord.
Dans un premier temps, j’aimerais vous expliquer brièvement mon rôle au sein d’Affaires mondiales Canada.
[Français]
À titre de directeur général de la sécurité internationale et du renseignement d'Affaires mondiales Canada, je suis responsable de la gestion du volet de la politique internationale du Canada qui se rapporte aux relations de défense et de sécurité. Notre direction générale est également chargée des relations avec nos autres alliés et partenaires bilatéraux, de même qu'avec les principales organisations multilatérales de sécurité comme l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. Ajoutons à cela les engagements qu'a pris le Canada à l'égard de la coalition de lutte contre l'État islamique dirigée par les États-Unis.
De plus, notre direction générale coordonne au ministère toutes les questions liées à la promotion des positions du Canada pour lutter contre le crime et le terrorisme internationaux. Elle fournit également des conseils sur certaines initiatives de programmes à l'appui de ces objectifs.
[Traduction]
Permettez-moi de faire le point sur la politique internationale du Canada en réponse aux menaces potentielles qui planent sur le continent nord-américain. Je passerai ensuite aux activités du Canada à l'extérieur de l'Amérique du Nord qui visent à contrer ces éventuelles menaces avant qu'elles ne nous atteignent.
J'aimerais commencer par dire qu'au-delà des prérogatives incontestables de mes collègues de la Défense nationale et de la Sécurité publique sur la souveraineté et la sécurité intérieure, Affaires mondiales Canada est d'avis que la sécurité de l'Amérique du Nord est au cœur des étroites relations économiques bilatérales qui assurent la prospérité du Canada comme des États-Unis.
Près de 25 % du PIB du Canada est tributaire de nos exportations aux États-Unis. Comparativement, nos exportations à destination de tous les autres pays ne génèrent que 6 % du PIB du Canada. En 2015, le commerce annuel de biens et de services entre le Canada et les États-Unis a atteint près de 881 milliards de dollars. Les exportations canadiennes à destination des États-Unis ont été d'environ 450 milliards de dollars, soit plus de 72 % du total des exportations canadiennes. Le Canada a importé pour 431 milliards de dollars de biens et services des États-Unis, soit plus de 64 % du total de nos importations. Des biens et des services dont la valeur dépasse les 2,4 milliards de dollars traversent chaque jour la frontière entre le Canada et les États-Unis.
Par conséquent, il est primordial que nous entretenions une relation de confiance mutuelle, fondée sur l'assurance qu'aucune menace potentielle ne proviendra de l'un ou l'autre pays, ou ne transitera par l'un ou par l'autre, afin d'assurer la pérennité de la relation libre et ouverte qui unit actuellement le Canada et les États-Unis.
En outre, la géographie de l'Amérique du Nord impose une collaboration bilatérale étroite entre le Canada et les États-Unis. Nous partageons la plus longue frontière au monde, fait qui motive notre étroite collaboration internationale quant aux mesures de sécurité qui sont prises de part et d'autre. Nous sommes pratiquement entourés de côtes accidentées, une réalité qui favorise la collaboration canado-américaine sur le plan maritime et qui a entraîné en 2006 l'expansion du mandat du NORAD aux alertes maritimes.
Aussi, l'immense Arctique canadien et ses voies d'accès revêtent indéniablement une importance géostratégique pour la défense du Canada comme des États-Unis, comme l'amiral Bishop vient de le dire. Voilà donc pourquoi nous avons investi des ressources importantes dans la défense du Nord.
Dans un contexte de restrictions croissantes des ressources, et compte tenu des coûts opérationnels élevés dans le Nord et sur de grandes distances, les avantages que tire le Canada de son étroite collaboration avec les États-Unis et du partage des coûts sont évidents. Si les impératifs de la défense exigent toujours que des décisions délicates soient prises au sujet des investissements militaires, le Canada serait obligé de prendre des décisions stratégiques extrêmement difficiles pour ses investissements militaires sans l'étroite collaboration en matière de défense qui le lie aux États-Unis.
Comme il a été mentionné, un des principaux éléments de la défense de l'Amérique de Nord est le NORAD, un poste de commandement binational doté d'un personnel civil et militaire canadien et américain. Cette organisation est unique au monde et fait partie des priorités du Canada depuis sa création en 1958. Elle est également considérée comme une priorité de la politique étrangère. Par exemple, Affaires mondiales Canada affecte un conseiller politique au poste de Colorado Springs, qui relève directement du commandant du NORAD.
[Français]
Au cours des dernières décennies, la situation géopolitique dans laquelle évolue le NORAD a changé, amenant l'organisation à modifier ses rôles et ses responsabilités en conséquence. .
Parmi ces modifications figure l'ajout de la surveillance de l'espace aérien intérieur depuis les attaques du 11 septembre et l'ajout, comme je viens de le dire, des alertes maritimes en 2006 pour garantir une surveillance et une évaluation continues du domaine maritime nord-américain.
[Traduction]
Affaires mondiales Canada travaille toujours en étroite collaboration avec la Défense nationale, le ministère de la Défense et le département d'État des États-Unis pour veiller à ce que le NORAD soit capable d'évolution et de modernisation et puisse s’attaquer aux nouvelles menaces. Cette collaboration comprend le soutien de consultations bilatérales visant à examiner l'infrastructure, l'organisation et la planification requises pour la défense conjointe de l'Amérique du Nord.
L'amiral Bishop a parlé de la Commission permanente mixte de défense Canada-États-Unis. Je ne vais pas répéter les éléments importants qu'il a fait valoir, mais je préciserai qu'il s'agit évidemment d'une organisation qui touche vraiment les deux pays. Aussi, la Commission a accueilli dernièrement des membres de la Sécurité publique et du Bureau du Conseil privé, afin d'étendre la collaboration et d'élargir les sujets de discussion.
[Français]
Si nos relations avec les États-Unis constituent une priorité évidente, je souhaite partager une plus vaste perspective et souligner que nous avons une préférence marquée pour la prévention à la source des menaces contre l'Amérique du Nord en utilisant tous les outils diplomatiques et militaires dont dispose le Canada.
[Traduction]
Cela comprend les efforts diplomatiques qui permettent un engagement sur la scène internationale pour désamorcer les tensions chaque fois qu'il est possible de le faire, entre autres par la promotion de la sécurité, la non-prolifération et le désarmement nucléaires, ainsi que par l'aide au développement, les programmes de maintien de la sécurité, le renforcement des capacités, et les opérations de maintien de la paix.
Affaires mondiales Canada détient des programmes clés en matière de sécurité, tels que le Programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes, qui permet de renforcer la capacité des États bénéficiaires à prévenir l'activité terroriste dans le monde et à y réagir, et le Programme visant à renforcer les capacités de lutte contre la criminalité, qui sert à améliorer la capacité des États bénéficiaires à prévenir et à contrer les menaces que posent les organisations criminelles transnationales, en particulier dans les Amériques.
[Français]
En outre, par l'entremise d'une gamme d'ententes multilatérales et bilatérales, le Canada consacre également ses efforts diplomatiques aux problèmes issus des organisations criminelles transnationales et des migrations illégales, ainsi qu'à la lutte contre l'extrémiste violent, entre autres par le soutien qu'apporte le Canada à la coalition de lutte contre l'État islamique dirigée par les États-Unis.
[Traduction]
Enfin, le Canada est également membre de divers organismes multilatéraux qui visent à prévenir l'escalade des conflits par des mesures de coopération militaires et diplomatiques, d'établissement de la confiance et de dissuasion. Parmi ces organismes figurent les Nations unies, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'Organisation des États américains et le Forum régional de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est. La participation du Canada à ces organismes offre souvent des avantages additionnels comme une meilleure connaissance de la situation, de la formation et des occasions d'effectuer conjointement des exercices.
Chez Affaires mondiales Canada, nous collaborons étroitement avec nos collègues de la Défense nationale pour veiller à ce que nos orientations stratégiques et politiques soient en parfaite harmonie avec les intérêts canadiens, et à ce que nos relations bilatérales et multilatérales accroissent la sécurité tant en Amérique du Nord que sur le plan mondial.
[Français]
Je vous remercie.
:
C'est une question que je ne peux pas esquiver, en ma qualité d'amiral. C'est vraiment une excellente question.
L'accord sur le NORAD a été modifié, il y a quelques années, pour englober, dans son mandat, l'alerte maritime, la surveillance des approches maritimes de l'Amérique du Nord. C'est un élément de mission très important.
Je vous assure que le NORAD accorde beaucoup d'attention aux approches maritimes de l'Amérique du Nord, tout comme nous, dans les Forces armées canadiennes. Nous sommes très préoccupés par ce qui se passe dans nos eaux, celles des trois océans qui bordent le Canada. Nous collaborons avec les Américains pour nous faire une idée commune de ce qui se passe dans nos approches continentales. Nous utilisons notre équipement naval, comme vous pouvez vous l'imaginer, mais nous utilisons aussi beaucoup les systèmes de surveillance depuis l'espace, y compris la mission de la constellation de RADARSAT du Canada.
C'est un aspect très important du NORAD et, visiblement, pour le Canada et ses forces, nous tenons à bien savoir qui fréquente nos eaux et ce qu'il y fait.
:
Je vais répondre en anglais, car je ne connais pas tous les acronymes en français. Notre organisme utilise beaucoup d'acronymes.
Nous avons des membres qui collaborent avec les forces armées, navales et aériennes américaines et le Corps des Marines des États-Unis dans le pays. Il me faudrait beaucoup de temps pour nommer tous les endroits où nous sommes présents. Pour vous donner une idée du niveau d'intégration et de coopération, nous avons des membres qui, comme je l'ai dit, sont en poste au quartier général du NORAD, agissent à titre de commandants adjoints, et un grand nombre de Canadiens font partie de ce personnel.
De plus, des Canadiens jouent des rôles de premier plan dans les unités américaines. Par exemple, chacun des cinq corps américains comprend un adjoint canadien de niveau une étoile, qui est intégré dans la structure de commandement. Cela démontre toute la confiance des États-Unis envers le Canada.
Un grand nombre de personnes travaillent avec des unités américaines. Dans les escadrons AWACS, nous disposons d'une présence considérable. Certains de nos membres travaillent au Pentagone. Un grand nombre suivent des cours militaires aux États-Unis, ce qui couvre beaucoup de choses : entraînement, formation professionnelle et collèges militaires.
En parlant de notre présence substantielle aux États-Unis, je crois qu'il est également important de souligner que ce pays envoie beaucoup d'officiers d'échange au Canada pour qu'ils travaillent avec nos forces militaires. La possibilité pour des Canadiens de collaborer avec les Américains aux États-Unis et pour des Américains de collaborer avec les Canadiens ici leur permet, de façon efficace, de mieux comprendre les façons de procéder de l'autre pays dans les opérations ainsi que sa culture. Lorsque nous menons des opérations ensemble, notre force de combat s'améliore.
Il s'agit d'une collaboration très étroite. Les 700 personnes sont réparties aux États-Unis, y compris en Alaska, et dans les territoires américains.
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C'est une très bonne observation.
Évidemment, nous avons les chasseurs à réaction qui jouent un rôle important à l'OTAN, et des ressources de ravitaillement en vol, comme nous l'avons dit, compte tenu des distances à parcourir. Les Forces canadiennes utilisent également d'autres ressources aériennes pour mener des opérations de surveillance. Nous avons des aéronefs de patrouille maritime, qui effectuent régulièrement des missions de surveillance aux abords des côtes Est et Ouest du Canada.
Nous effectuons des missions dans l'Arctique canadien pour examiner non seulement la masse terrestre de l'Arctique, mais également les voies d'accès maritimes et les eaux de l'archipel Arctique. Nous collaborons également avec d'autres ministères du gouvernement qui ont besoin d'aéronefs pour mener des missions de surveillance et de patrouille. Nous faisons donc équipe avec eux et nous utilisons ces aéronefs pour mener des activités de surveillance.
Comme nous l'avons dit, nous avons, dans le cadre de notre partenariat avec les États-Unis... L'une de nos forces au Canada, ce sont nos connaissances dans le domaine spatial. Nous nous servons considérablement de l'espace pour contribuer aux activités de surveillance, particulièrement celles qui visent les gens qui se trouvent dans nos eaux. La Marine, dans les voies d'accès au Canada par l'Atlantique et le Pacifique, a une très bonne vue d'ensemble de ce que nous appelons la connaissance du secteur maritime. Le niveau de fidélité est très élevé, pour ce qui est des navires qui sont présents dans nos eaux et leur destination.
C'est difficile, compte tenu de l'étendue de l'espace que nous devons examiner, mais nous mobilisons toutes nos ressources, et nous collaborons avec tous nos organismes partenaires du gouvernement pour optimiser les ressources qu'ils utilisent afin de brosser le meilleur portrait possible de ce qui se passe sur notre territoire
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Tout d'abord, je formulerais la question autrement pour ce qui est des drones.
Les drones se sont avérés indispensables dans le cadre des opérations militaires. Pratiquement tous les pays occidentaux aux vues similaires aux nôtres font l'acquisition d'engins télépilotés pour soutenir leurs opérations militaires. Ces engins sont particulièrement utiles aux missions de renseignement, de reconnaissance et de surveillance, pour lesquelles il est nécessaire d'avoir une plateforme aéroportée, munie de capteurs, qui peut s'attarder dans une région donnée. Ces avions sans pilote ont fait leurs preuves dans d'innombrables opérations menées au cours des 10 dernières années, notamment en Afghanistan pour apporter un soutien au Canada.
En réalité, les drones offrent un potentiel militaire que la plupart des pays cherchent à obtenir, et le Canada ne fait pas exception. Nous avons le projet JUSTAS, qui vise à examiner nos besoins opérationnels relativement aux avions sans pilote utilisés pour mener des missions de surveillance ou de reconnaissance.
Quant à savoir si ces drones devraient être armés ou non, je crois que c'est une autre question à laquelle on s'attaquera dans le cadre de l'examen de la politique de défense. Je pense que c'est une très bonne question à aborder dans ce genre d'examen. D'un point de vue militaire, je dois dire que les drones armés sont un outil utile aux commandants militaires en mission, comme d'autres systèmes d'armes. Quant à savoir si le Canada devrait posséder ce genre de capacité, je crois que c'est une question stratégique très importante à laquelle on devrait s'attaquer dans le cadre de l'examen de la politique de défense.