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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 012 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 21 septembre 2006

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    S'il vous plaît, nous allons commencer.
    J'aimerais tout d'abord présenter quelqu'un qui est nouveau dans cette salle, Justin Vaive. Il est là-bas, dans le coin. Justin est en formation parce qu'Eugène aurait apparemment l'intention de prendre sa retraite, un jour. Il est intéressant de souligner qu'Eugène avait été formé par le père de Justin qui travaille aujourd'hui pour le gouvernement de la Colombie-Britannique. On reste en famille.
    Quoi qu'il en soit, bienvenue, Justin.
    Je souhaite aussi la bienvenue à nos invités. J'aimerais lire ce document pour que les représentants des ministères sachent exactement quel est leur rôle ici. Le document a été préparé par Eugène et permettra de clarifier la situation pour tout le monde.
    Des questions ont été posées au sujet du rôle des représentants des ministères, de la Santé et de l'Environnement, pendant ces audiences. Fondamentalement -- et ceci a été accepté par les ministères -- les lignes directrices pour les participants sont les suivantes.
    Premièrement, les participants ne sont pas tenus de faire de déclaration préliminaire ou d'exposé car le temps est limité.
    Deuxièmement, les participants peuvent intervenir, par l'intermédiaire de la présidence, pour éclaircir certaines questions ou s'ils jugent qu'une déclaration est fausse dans les faits. Ils peuvent donc apporter les éclaircissements.
    Troisièmement, on s'attend à ce que les participants répondent au meilleur de leur capacité aux questions posées par les membres du Comité, verbalement ou par écrit.
    Quatrièmement, le greffier enverra dans des délais convenables un préavis concernant les sujets devant être discutés à chaque séance. Les ministères auront ainsi amplement le temps de se préparer et de déterminer quels sont les fonctionnaires appropriés.
    Y a-t-il des remarques? Êtes-vous satisfaits?
    M. Cullen.
    Ce document a-t-il été distribué, monsieur le président?
    Non.
    Pourrait-il l'être ?
    Certainement.
    Y a-t-il d'autres questions ou commentaires à ce sujet? il s'agit simplement de fixer clairement les règles pour que les représentants des ministères sachent bien quel est leur rôle. Nous pouvons envoyer ce document à tout le monde.
    Je souhaite la bienvenue à nos invités. Nous allons poursuivre notre examen de la LCPE. Comme vous le savez, nous nous sommes entendus pour organiser des tables rondes durant lesquelles les personnes intéressées pourront nous présenter leur point de vue. Nous entamons donc la ronde suivante, qui sera la première de cet automne.
    Je vais vous donner la parole dans l'ordre indiqué à l'ordre du jour. Nous commençons avec l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques.
    Je m'appelle Gordon Lloyd et je suis vice-président, Questions techniques, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques.
    Je remercie le comité de m'offrir l'occasion de participer à cette table ronde pour discuter du terme «toxique » employé dans la LCPE. Je voudrais faire aussi quelques remarques sur la liste des substances commercialisées. Je pensais que cette question était à l'ordre du jour et je n'irai pas dans les détails. Je veux faire aussi quelques remarques sur la catégorisation de la liste intérieure des substances.
    Quand je me suis présenté devant vous en mai dernier, j'ai mentionné que l'ACFP -- l'industrie des produits chimiques -- souhaitait une LCPE appuyant les mesures prises par ses membres pour améliorer continuellement la gestion de l'environnement et la santé, ce qui est le thème de notre initiative de gestion responsable. J'ai dit aussi à ce moment-là que la gestion responsable englobe une série d'initiatives lancées par l'ACFP dans les années 1980 pour répondre aux préoccupations du public au sujet des produits chimiques. Elle s'est maintenant étendue à l'échelle internationale.
    Les questions sur lesquelles se penche le comité sont importantes pour atteindre les objectifs de mise en oeuvre efficace et réaliste d'une Loi aidant à renforcer ce que doivent faire nos membres pour améliorer leurs activités dans le cadre de la gestion responsable.
    La question essentielle que je vais aborder aujourd'hui est la catégorisation de la liste intérieure des substances, domaine où je pense que le Canada est un chef de file mondial. Comme il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine, je pense qu'il est important d'en discuter au sein de ce comité, et je vais le faire après avoir abordé brièvement deux autres questions.
    Premièrement, au sujet du terme « toxique », l'ACFP, lors de sa comparution de mai dernier, et d'autres organisations ont dit qu'il pose de sérieux problèmes à cause de son effet de stigmatisation. Je crois comprendre que la plupart des membres du comité conviennent qu'il faut résoudre cette question. Nous sommes heureux de voir qu'elle fait l'objet de votre examen.
    Notre recommandation est très simple. Nous pensons qu'il faut remplacer « toxique », notamment dans les dispositions opérationnelles de la partie 5, par quelque chose comme « substance correspondant aux critères de l'article 64 ».
    Le gouvernement précédent s'était déjà engagé dans cette voie dans son dernier projet de loi budgétaire. Il aurait conservé le mot « toxique » à l'article 65, concernant la quasi-élimination, mais ce mot se serait retrouvé sans définition. Je crois que cela aurait causé des problèmes fondamentaux dans l'application de la Loi puisque que la quasi-élimination serait passée d'une approche fondée sur le risque à une approche fondée sur le danger. Je serais très heureux de vous donner plus de détails sur notre position concernant la quasi-élimination mais je crois comprendre que vous avez prévu une table ronde distincte à ce sujet et c'est peut-être plutôt là qu'il faudra en parler.
    Ce qui compte, c'est que remplacer l'adjectif « toxique » dans la LCPE par une expression comme « substance correspondant aux critères de l'article 64 » réglerait ce problème de stigmatisation. Cela préserverait l'intégrité de la Loi avec son approche fondée sur le risque et je pense -- ce qui est important, comme M. Cullen l'avait souligné l'autre fois -- que cela préserverait aussi la validité des pouvoirs constitutionnels.
    Si je comprends bien, quand ils ont soulevé cette question l'autre fois, les avocats du ministère de la Justice s'étaient penchés sur plusieurs solutions. Quand ils ont proposé d'utiliser l'expression « correspondant aux critères de l'article 64 », je crois qu'ils l'ont fait parce qu'ils avaient conclu que cela ne minerait pas la validité constitutionnelle de la Loi. Et, comme je l'ai déjà dit, c'est très important pour nous.
    Notre deuxième remarque -- et je serai bref à ce sujet -- concerne la liste dite « des substances commercialisées ». Il s'agit au fond des substances qui sont touchées par la Loi et, aussi, de ce que sont les nouvelles substances.
    L'ACFP recommande de modifier la Loi afin que les substances de la liste des substances commercialisées et les substances similaires soient considérées comme des substances nouvelles, éventuellement en les ajoutant à la liste intérieure des substances ou par un autre mécanisme qui pourrait être formulé pour les reconnaître comme des substances existantes.
    La liste intérieure des substances est une liste qui a été conçue pour identifier les substances utilisées commercialement au Canada lorsque l'obligation d'évaluer les nouvelles substances a été intégrée à la LCPE, et pour faire la distinction entre les substances existantes et les nouvelles. La liste des substances commercialisées est en fin de compte une liste contenant des substances qui étaient régies par la Loi sur les aliments et drogues. Comme ce sont des substances commercialisées, elles doivent être traitées comme des substances existantes mais, à cause de difficultés d'ordre technique reliées à la LCPE, elles ne peuvent l'être actuellement. Quoi qu'il en soit, ce ne sont manifestement pas de nouvelles substances.
(0905)
    Nous recommandons de modifier la LCPE afin de donner plus de souplesse au ministre au sujet du traitement des substances qui ne sont pas nouvelles mais sont plutôt des substances existantes. Et ceci pourrait s'appliquer à la liste des substances commercialisées ainsi que dans d'autres domaines. Si tel était le cas, l'approche retenue pour utiliser les outils de catégorisation appliqués à la LIS pourrait aussi être appliquée à ces autres substances. On pourrait identifier toutes les substances commercialisées qui ont besoin d'une attention et d'une gestion additionnelles, comme l'achèvement de la catégorisation l'a fait jusqu'à présent pour les substances qui sont maintenant dans la LIS.
    Finalement, je voudrais aborder ce que j'estime être l'achèvement remarquable de l'initiative de catégorisation. La question qui se pose au comité -- les angles gouvernement-industrie -- est de savoir quoi faire des résultats de la catégorisation. Je crois que c'est ça la question fondamentale. La catégorisation s'est achevée la semaine dernière. Le gouvernement n'a pas encore publié tous les détails et mon interprétation n'est donc peut-être pas absolument exacte et à jour mais l'industrie et les associations environnementales ont bénéficié de séances d'information durant ce processus, parfois séparément et parfois ensemble, et je pense que ça a bien marché. Je crois que nous avons beaucoup appris sur le processus et sur la manière dont il doit fonctionner. Si je comprends bien, les 23 000 substances commercialisées au Canada et faisant partie de la LIS -- c'est un chiffre approximatif -- ont maintenant été examinées et triées. Elles ont fait l'objet d'un triage.
    La conclusion de la catégorisation est que 19 000 substances environ ne sont pas susceptibles d'avoir des effets néfastes sur la population ou sur l'environnement, selon les connaissances actuelles. De la même façon que les dispositions de notification des substances nouvelles satisfont les Canadiens en ce qui concerne la sécurité des nouveaux produits chimiques, les Canadiens devraient conclure qu'il y a environ 19 000 substances qui peuvent être considérées comme étant « sûres » Certes, on hésite toujours à employer l'adjectif « sûr » dans ces discussions car rien n'est jamais absolument sûr, mais c'est une bonne manière d'envisager ces substances comme groupe.
    Il reste donc environ 4 000 substances qui, après avoir été évaluées, seront probablement classés dans la catégorie des substances sûres ou, si l'on juge qu'elles sont toxiques ou qu'elles méritent l'adjectif qu'on appliquera dans la LCPE aux substances qui seront ajoutées à l'annexe 1, pourront faire l'objet d'une réglementation.
    Sur la base des informations que nous avons recueillies durant l'été, nous croyons comprendre qu'il y a quelque 4 000 substances qui doivent encore être évaluées, dont un millier environ n'ont pas besoin d'études supplémentaires. On a conclu cette année qu'elles ne sont pas susceptibles de causer de problèmes à la population ou à l'environnement, ce qui veut dire qu'elles pourront être mises de côté ou être classées dans ce que j'appelle la catégorie des produits chimiques sûrs. Il s'ensuit qu'il restera environ 3 000 substances à évaluer.
    Nous croyons comprendre que ceci se fera au moyen d'une liste de priorité continuellement mise à jour, ce qui est compréhensible. Tout ne peut pas être fait d'un seul coup. Ce sera une tâche très difficile. Un échéancier a été mis au point à l'échelle mondiale au moyen d'une entente à laquelle sont parvenus les chefs d'État à Johannesburg, en 2000, et il a été repris dans une déclaration de Dubaï sur la gestion sûre des produits chimiques. L'échéancier va jusqu'en 2020 et son objectif est d'assurer la production de produits chimiques minimisant les effets préjudiciables à la santé humaine et à l'environnement. C'est un échéancier serré, certes, mais la chose est faisable.
    Il s'agit vraiment d'un problème mondial. Le Canada met l'accent sur la coopération internationale, ce que nous approuvons. Avec la catégorisation qu'il vient de terminer et l'évaluation de suivi à laquelle il procède actuellement, le Canada sera un chef de file mondial dans ce domaine et aura beaucoup à offrir aux États-Unis, à l'Europe et aux autres pays de l'OCDE. En contrepartie, ces pays ont beaucoup à nous apprendre. Les États-Unis et l'OCDE, en particulier, aidés par le Conseil international des associations chimiques, dont l'ACFP fait partie, a beaucoup travaillé sur les substances produites en grosse quantité, ce qui lui a permis de recueillir beaucoup de données qui pourraient être utiles au Canada dans son travail sur les résultats de la catégorisation.
(0910)
    Si l'Europe réussit à faire adopter sa législation REACH et à la mettre en application, et si celle-ci s'avère efficace malgré son caractère apparemment extrêmement complexe et lourd, nous espérons que le Canada pourra profiter d'une certaine coopération avec l'Europe, mais cela reste encore une inconnue. Nous avons lancé un projet qui est en cours de réalisation mais il y a eu en Europe un débat qui n'a pas encore produit de résultats.
    J'ai aussi mentionné la contribution de l'industrie mondiale des produits chimiques à ce qui se fait dans le monde au sujet des produits fabriqués en grosse quantité. Nous nous sommes efforcés d'aller au-delà en formulant une stratégie mondiale des produits placés sous gestion responsable qui a été lancée à cette conférence de Dubaï où l'objectif de 2020 dont je parlais a été adopté. C'était il y a cinq ou six mois et nous continuons à en fixer les détails. Cela devrait être très utile à l'industrie canadienne et au gouvernement pour l'évaluation post-catégorisation.
    J'ai réussi à mettre la main aujourd'hui seulement sur un document que nous avons produit et je vais le remettre au greffier pour qu'il soit distribué à tous les membres du comité. On y décrit cette initiative de manière plus détaillée et cela peut vous intéresser.
    Que ferons-nous des résultats de la catégorisation? Selon l'ACFP, je crois, la réponse est de maintenir le cap avec le processus établi dans le cadre de la LCPE en 1999 et qu'Environnement Canada et Santé Canada peuvent suivre. Nous avons un programme ambitieux qui est à l'avant-garde sur le plan mondial et s'est avéré réaliste jusqu'à présent. L'objectif d'achèvement de la catégorisation le 14 septembre a été atteint mais cela ne représente qu'une partie de ce qu'exige la LCPE car il y a encore l'étape d'évaluation à terminer. Cette prochaine étape d'évaluation sera beaucoup plus difficile à réaliser mais nous pourrons tirer parti à ce sujet des partenariats, de l'impulsion acquise, de la coopération internationale, de l'autorité législative claire que nous avons et des outils scientifiques qui ont été élaborés dans le cadre de la catégorisation et qui ont fondé notre succès jusqu'à présent.
    Je crois donc que le message que nous voulons adresser au comité est qu'il faut laisser avancer ce processus sans changer de cap. C'est quelque chose qui fonctionne bien et qui n'a pas à être modifié.
    Merci beaucoup de votre attention. J'espère que ces quelques remarques vous seront utiles.
(0915)
    Merci beaucoup, M. Lloyd, et merci d'avoir respecté l'horaire.
    J'ai cette boîte magique devant moi qui me permet de suivre l'horaire à la seconde près. Elle marche très bien et j'ai vu que vous êtes resté dans les temps. J'invite les autres témoins à faire aussi bien.
    M. Graham, de l'Institut canadien des engrais.
    Je m'appelle Clyde Graham et je suis vice-président, Stratégie et alliances, de l'Institut canadien des engrais.
    Je remercie le comité de nous avoir invités à venir traiter de la question de la stigmatisation de l'adjectif « toxique ».
    L'industrie canadienne des engrais contribue pour à peu près 6 milliards de dollars par an à l'économie du Canada et emploie environ 12 000 personnes. Ses ventes aux agriculteurs sont évaluées à environ 2,5 milliards de dollars par an. C'est la somme que les agriculteurs consacrent à l'achat d'engrais chaque année. En outre, c'est une industrie d'exportation importante puisque 75 p. cent de sa production totale est destinée à plus d'une quarantaine de pays.
    Nos membres fabriquent des aliments pour les végétaux. Les engrais sont essentiels à l'agriculture canadienne et à la production d'aliments sains. Les engrais sont bénéfiques, sont sources de vie, existent dans la nature et ne sont pas foncièrement toxiques.
    La LCPE, la loi fondamentale du Canada sur l'environnement, contient une liste de substances jugées toxiques. L'ammoniac dissout dans l'eau et l'ammoniac gazeux -- deux formes d'engrais azotés -- figurent sur la liste. Le chlorure de potassium, ou potasse, qui sert à saler les routes, a fait l'objet du processus d'inscription mais n'a finalement pas été inscrit.
    Cela n'est pas cohérent. Il n'y a aucune raison de stigmatiser par l'adjectif « toxique » des produits qui donnent la vie, comme les engrais à l'ammoniac ou à la potasse, qui sont des éléments nutritifs pour les plantes et qui contribuent à la production d'aliments sains sur les fermes canadiennes. Comme beaucoup de produits bénéfiques, les engrais doivent être utilisés correctement pour respecter l'environnement mais ce ne sont pas foncièrement des produits toxiques.
    L'Institut canadien des engrais a déjà présenté cet argument devant votre comité l'an dernier quand un amendement destiné à retirer l'adjectif « toxique » de la LCPE avait été inclus dans le projet de loi budgétaire. Lorsque ce comité a rejeté l'amendement, en grande mesure parce qu'il était relié au projet de l'ancien gouvernement de réglementer les gaz à effet de serre, les députés ont reconnu à l'unanimité dans le rapport du comité qu'il y avait là un problème. Voici un extrait de ce rapport :
Le Comité reconnaît qu’employer le terme « toxique » à l’égard de chaque substance qui respecte les critères énoncés à l’article 64 de la LCPE pose des problèmes. Désigner comme « toxiques » des substances telles que l’ammoniac dissous dans l'eau (qui figure dans la liste des substances toxiques) et le sel de voirie (qui correspond aux critères, mais ne figure pas dans la liste) sème la confusion chez les Canadiens, qui emploient ces produits dans des circonstances fort différentes, et peut donner injustement une mauvaise réputation à des produits fabriqués par l’industrie canadienne.
    En mars 2005, le président du Conseil canadien des ministres de l'environnement, l'honorable Kerry Morash de la Nouvelle-Écosse, a écrit au ministre fédéral de l'Environnement Stéphane Dion et au ministre fédéral de la Santé Ujjal Dosanjh pour exposer la position des provinces sur la nécessité de réformer la LCPE dans le cadre de la révision quinquennale. L'une de leurs revendications explicites était d'utiliser un autre adjectif que « toxique » pour éviter les effets et les stigmatisations qui s'y rattachent.
    Ce que veut savoir le public, c'est quelle est la source précise des problèmes environnementaux. La pollution résulte des activités humaines rejetant des produits et des substances dans l'environnement. Pour certaines substances, il n'y a aucun niveau de sécurité si elles sont libérées dans l'environnement. Dans beaucoup d'autres cas, la pollution provient du fait que des produits ou substances utiles ont été libérés dans l'environnement au mauvais endroit, au mauvais moment ou en trop grande concentration.
    Produire des listes de substances dites toxiques est un exercice bureaucratique inutile. Stigmatiser inutilement des produits bénéfiques est antiproductif. Ce dont a besoin le Canada, c'est d'une loi mettant en oeuvre une stratégie environnementale axée sur l'identification de problèmes précis et encourageant à formuler et à mettre en oeuvre des plans de gestion économiquement et environnementalement durables. La planification environnementale des activités agricoles et l'adoption des meilleures pratiques de gestion, conformément au Cadre stratégique fédéral-provincial pour l'agriculture, sont de bons exemples à suivre.
    Il était stérile pour Environnement Canada d'effectuer un examen long et coûteux pour voir si l'ammoniac devait figurer parmi les substances toxiques de l'annexe 1 de la LCPE. Les vrais objectifs doivent être des problèmes environnementaux très précis,comme les usines d'épuration municipales rejetant dans les rivières des eaux usées à forte concentration d'ammoniac aqueux qui tue les poissons. Il serait beaucoup plus logique d'identifier les sources précises de cette pollution et de collaborer avec les villes et les municipalités pour résoudre ce problème à la source. Bien que le contexte d'inscription de l'ammoniac dans la liste était énoncé dans les documents généraux accompagnant l'avis officiel, le potentiel de dommage à la réputation publique de nos produits est tout à fait réel.
    Le gouvernement et l'industrie ont besoin d'un cadre pour dresser des plans de gestion conjointe de l'environnement qui soient efficaces, réalistes, publics et transparents. Un bon exemple en est donné par le plan de gestion du sel routier.
    La LCPE instaure un climat de confrontation axé sur un étiquetage négatif qui entrave en fait la bonne gestion de l'environnement. Par exemple, en disant que des produits à usage commercial sont toxiques, on gaspille des ressources rares dans des conflits inutiles. Il serait beaucoup plus productif de mettre en oeuvre des systèmes de gestion de l'environnement en coopération dans l'intérêt de tous les Canadiens.
(0920)
    Nous sommes sérieusement préoccupés par notre aptitude à vendre sur les marchés étrangers si le gouvernement désigne sans raison nos produits comme étant toxiques. Par exemple, le Canada est le premier producteur mondial de potasse. Ce marché est très concurrentiel et de nombreux pays réglementent attentivement leurs systèmes de production agricole. Si le chlorure de potassium est désigné comme étant toxique, nos concurrents étrangers risquent d'essayer de décourager nos clients d'acheter notre potasse en disant que notre propre gouvernement la juge toxique. C'est une question très délicate dans le secteur alimentaire, qui a souvent été victime d'accusations non scientifiques influençant l'opinion publique et engendrant des barrières commerciales.
    En dernière analyse, notre industrie a trois recommandations simples à formuler. Premièrement, ne plus dire que certains de nos produits sont toxiques. Deuxièmement, préciser clairement le contexte des cas dans lesquels une substance a besoin d'être gérée. Troisièmement, veiller à ce que la LCPE soit axée sur les situations où le besoin d'intervention est clairement nécessaire. Une réglementation conditionnelle constituerait une mauvaise bonne politique publique.
    Le fait que la LCPE ait débouché sur la désignation de l'ammoniac comme produit toxique alors qu'il s'agit d'une substance qui est une source de vie et qui est essentielle à l'agriculture canadienne témoigne clairement de la nécessité de modifier la Loi.
    Je voudrais ajouter que, même si notre principale préoccupation au sujet de la LCPE concerne l'utilisation de l'adjectif « toxique », notre expérience a été relativement positive en ce qui concerne la gestion souhaitée par le gouvernement, qui a été assurée volontairement et par le truchement du ministère de l'Agriculture. Nous avons d'excellentes relations sur ce dossier avec ce ministère et avec celui de l'Environnement. Notre problème concerne la stigmatisation des produits et votre comité peut nous aider à le résoudre.
    Merci beaucoup, M. Graham.
    M. Benevides, de PollutionWatch.
    Les membres du comité savent que PollutionWatch est un projet conjoint de mon organisation, l'Association canadienne du droit de l'environnement, et de Environmental Defence, et nos rôles respectifs sont précisés au début de notre mémoire. Je dirai simplement que nos organisations ont participé activement au processus de catégorisation des substances depuis 1999, lorsqu'il a débuté, et que les associations écologiques ont contribué à obtenir le degré de participation qui a permis de le faire avancer.
    Il va sans dire que nous pensons que les résultats sont très importants, tout comme ce qu'on en fera, et nous préciserons notre pensée à ce sujet dans un instant.
    Je dois dire dès le départ que nous tenons à réfuter le plus vigoureusement possible certain des postulats énoncés par M. Graham et M. Llyod. Toutefois, comme nous n'en aurons pas le temps pendant notre déclaration liminaire, j'espère que vous poserez des questions à ce sujet et que nous aurons l'occasion d'y répondre.
    Le reste de notre exposé sera présenté par ma collègue, Fe de Leon, qui va discuter de son expérience dans l'exercice de catégorisation, et par Aaron Freeeman, qui va traiter de la définition de l'adjectif « toxique ».
    Je crois comprendre que deux représentants du Pembina Institute for Appropriate Development, ainsi que le professeur Lynda Collins, de la faculté de droit d'Ottawa, viendront mardi prochain devant votre comité pour parler de cet adjectif. Je vais essayer de ne pas leur voler la vedette.
    En ce qui concerne la LIS, c'est Fe de Leon, qui fait des recherches pour l'ACDE, qui va vous en parler.
(0925)
    Bonjour tout le monde. Je vous remercie de me permettre de témoigner devant votre comité pour parler de mon expérience dans le processus de catégorisation de la LIS.
    Comme l'a dit mon collègue, le processus de catégorisation a débuté en 1999. Le principal objectif de l'article 73 de la LCPE était d'aider le gouvernement à cerner les substances utilisées au Canada depuis plusieurs décennies ayant besoin d'une attention accrue. Le gouvernement avait constaté que, dans le processus d'examen de l'ancienne LCPE, la méthode d'évaluation et de gestion des substances n'était plus efficiente et qu'il fallait beaucoup de temps pour que des mesures soient prises sur les substances dangereuses. On disposait par ailleurs de très peu d'informations sur la toxicité de milliers de produits chimiques utilisés au Canada. Des études commençaient à montrer que certaines substances persistent pendant un certain temps dans l'environnement par un phénomène de bioaccumulation, et qu'il y a aussi de nombreux produits chimiques qui sont reliés à des troubles de la reproduction et des troubles du développement, ainsi que des problèmes respiratoires qui perturbent les fonctions hormonales. Les données de biosurveillance que nous avons vues au cours des derniers mois et années renforcent la nécessité de surveiller ces produits chimiques de beaucoup plus près.
    La santé des enfants est devenue une question préoccupante du point de vue de l'exposition aux produits chimiques toxiques. Nous trouvons des produits chimiques dans les Grands Lacs et dans l'Arctique, c'est-à-dire là où il n'y a normalement pas d'activité industrielle.
    L'adoption de mesures au sujet des substances a été lente au cours des deux dernières décennies et le gouvernement canadien n'a pas été en mesure de produire un rapport indiquant les progrès réalisés en matière de stratégies sur les toxines. Les efforts déployés par le gouvernement pour évaluer les produits chimiques n'ont pas été assez rapides et il faut maintenant prendre des mesures immédiates au sujet des produits les plus inquiétants.
    Les produits chimiques qui préoccupaient le plus les décideurs et les parties prenantes sont les 23 000 produits figurant sur la liste intérieure des substances. Ce sont des produits qui sont commercialisés depuis des décennies et qui ont fait l'objet de rapports entre 1984 et 1986. Ils sont utilisés de toutes sortes de manières, notamment dans des applications industrielles, dans des travaux de recherche et de développement et comme intermédiaires ou catalyseurs pour la formation d'autres produits chimiques, et on les trouve en grand nombre dans des produits et articles d'usage quotidien.
    En vertu de la LCPE, les substances de la LIS sont évaluées différemment de celles qui sont entrées sur le marché après 1986. Le processus de catégorisation est destiné à identifier les produits chimiques de la LIS qui appellent une attention accrue du gouvernement. Quand un produit est inscrit sur la LIS, on a très peu d'informations, comme je l'ai dit, notamment sur sa toxicité et sur les effets qu'il peut avoir sur la santé.
    Le processus de catégorisation comporte des critères très précis. Les produits chimiques qui sont persistants, bioaccumulatifs ou foncièrement toxiques, ou ceux qui posent les plus grands dangers sur le plan de la santé humaine et des organismes non humains, sont ceux qui font l'objet de la catégorisation. Sur la base de ces critères très restreints, le gouvernement, pendant le processus d'examen de sept ans, ne s'est pas efforcé d'obtenir de nouvelles données de toxicité pour prendre ses décisions de catégorisation. Malgré certaines de ces limites, le processus a permis d'identifier 4 000 produits chimiques exigeant l'attention du gouvernement. C'est un premier pas crucial. Ces chiffres sont très importants.
    Comme ces substances ne sont pas connues comme ayant des propriétés explicitement dangereuses et qu'elles continuent d'être utilisées dans le commerce canadien, le défi, pour le gouvernement, sera de formuler une réponse adéquate aux résultats de la catégorisation. Les projets initiaux du gouvernement au sujet des 4 000 auront une incidence profonde sur la manière dont les produits chimiques seront évalués et gérés au Canada pendant des décennies. On peut sans doute affirmer que le processus de catégorisation place aujourd'hui le Canada à la croisée des chemins.
    La LCPE prévoit certaines mesures bien précises à prendre après la catégorisation. Ainsi, plusieurs substances doivent faire l'objet d'une évaluation préalable des risques. La façon dont ces évaluations sont menées et les délais applicables soulèvent toutefois de nombreuses interrogations.
    La LCPE comporte également un certain nombre d'outils de réglementation nécessaires pour assurer une protection efficace de l'environnement et de la population, notamment le pouvoir d'interdire et d'éliminer certains de ces produits chimiques.
(0930)
    Mon collègue, Hugh Benevides, va maintenant prendre quelques minutes pour exposer notre vision de la manière dont le gouvernement doit utiliser les résultats de la catégorisation.
    Merci.
    Comme Fe et d'autres témoins l'ont dit, l'achèvement de l'exercice de catégorisation n'est pas un succès sans importance et il est tout à fait particulier au Canada. Toutefois, comme Fe l'a laissé entendre, ce n'est en réalité que le début d'un processus comportant encore des étapes importantes : poursuivre l'examen de ces substances puis prendre des mesures de réglementation à leur sujet.
    Il y a dans notre document une très courte liste des mesures que nous réclamons au sujet de ces produits. Je ne vais pas dans les détails puisqu'ils sont précisés dans plusieurs de nos documents : dans un mémoire de PollutionWatch adressé à votre comité en juin dernier, ainsi que dans deux lettres -- trois, en fait -- la première envoyée en juin à deux ministres de la LCPE et aux sous-ministres, et la deuxième envoyée vendredi dernier aux deux mêmes ministres, ainsi qu'à votre comité au début de cette semaine. Je ne sais pas si elles ont été traduites et si vous les avez entre les mains. Quoi qu'il en soit, à part les mesures précises que nous réclamons, leur élément fondamental est qu'il est essentiel que la teneur des listes et les résultats de la catégorisation soient communiqués au public.
    Par conséquent, nous demandons à votre comité d'écrire aux ministres pour leur demander quand ce sera fait, et pour leur demander de comparaître devant vous pour répondre à cette question. Comme l'a dit Fe, on n'a pas beaucoup de nouvelles données sur ces substances et il est temps de prendre des mesures concrètes.
    Il y a d'autres recommandations plus précises que vous verrez dans la lettre que nous vous avons envoyée ainsi que dans le texte de notre mémoire.
    Votre mémoire a été traduit et tout le monde en a reçu un exemplaire.
    Très bien. Parfait.
    Les éléments qui suivent sont précisés dans notre mémoire -- une action rapide, l'adoption de règlements sur les substances les plus inquiétantes et celles qui ont les critères les plus sérieux, et des échéanciers exécutoires. Selon nous, c'est vraiment la seule manière de maintenir l'impulsion engendrée par l'achèvement de cet exercice.
     Étant donné l'horaire, je vais donner la parole à Aaron Freeman pour la conclusion de notre déclaration.
    Merci beaucoup.
    Je voudrais parler brièvement de l'utilisation de l'adjectif « toxique » et des préoccupations exprimées à ce sujet par d'autres témoins.
    Je pense qu'il est important de comprendre d'abord le sens de l'adjectif « toxique » à la fois dans le contexte de la LCPE et de manière générale. Cet adjectif ne signifie pas seulement, comme d'aucuns l'affirment, que quelque chose est un poison grave pour l'être humain. Cette définition limitée ne concorderait pas avec sa définition scientifique ni avec son sens courant pour le public. La préoccupation de l'industrie semble supposer que l'adjectif « toxique » ne concerne que les cas graves touchant la santé humaine alors qu'une substance peut aussi être toxique pour l'environnement, comme c'est le cas de plusieurs des produits donnés en exemple par l'industrie. L'adjectif peut aussi être relié à la santé humaine par le truchement de l'environnement, comme ce serait le cas, par exemple, d'une substance persistante et bioaccumulative.
    La position de l'industrie semble faire fi du fait que la toxicité dépend de la dose. L'adjectif « toxique » tel qu'il est employé dans la LCPE s'applique à toute une série de substances qui, selon la définition de l'industrie de ce qui est dangereux ou un poison, sont effectivement toxiques dans certains contextes. C'est pour ces raisons qu'il est tout à fait légitime d'utiliser l'adjectif « toxique » dans l'approche de réglementation de la LCPE.
    Deuxièmement, il y a de bonnes raisons de politique pour maintenir la désignation toxique. Il existe des substances actuellement gérées en vertu de la LCPE qui sont réglementées depuis plus de trois décennies -- par exemple, les BPC. Ces substances, ainsi que d'autres réglementées plus récemment -- PERC, TCE, chlorure de vinyle, etc. -- figurent dans la liste des substances toxiques et sont aussi assujetties à la politique de gestion des substances toxiques du gouvernement du Canada qui reste la politique de réglementation fondamentale des substances dangereuses.
    Au plan international, toxique est l'adjectif utilisé pour décrire les substances réglementées en vertu d'ententes auxquelles le Canada est partie, comme la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, la Convention de Rotterdam sur les pesticides et les produits chimiques dangereux, et Agenda 21 adopté lors du Sommet de la Terre de 1992. Qualifier ces substances toxiques d'autre chose provoquerait un décalage entre la LCPE et les régimes administratifs et réglementaires associés pour gérer ces substances, au Canada et internationalement.
    Finalement, dans l'esprit du public, chacun comprend, même si ce n'est que dans son subconscient, que les substances toxiques font partie des plus dangereuses. Chacun s'attend donc à ce que le gouvernement y réagisse de manière adéquate, et éliminer ou affaiblir l'adjectif réduirait le souci de les réglementer de manière adéquate.
    L'autre question est de savoir si affaiblir l'adjectif toxique menacerait la constitutionnalité de la LCPE. Notre position est qu'il est bien établi que la LCPE possède le pouvoir constitutionnel nécessaire pour réglementer les substances nuisant à l'environnement. Toutefois, considérant l'historique de cette Loi et d'autres lois environnementales, il est quasiment inévitable qu'il y aura contestation au titre de la Constitution si l'on offre la moindre ouverture. Je crois qu'un tel défi échouerait mais il pourrait facilement emporter le gouvernement fédéral et d'autres parties dans des batailles juridiques longues et coûteuses, ce qui exigerait des ressources qui seraient bien mieux utilisées à assurer la bonne application de la Loi.
    Si l'on modifie l'adjectif « toxique », je crois que le risque de telles poursuites sera élevé. J'invite à cet égard le comité à se pencher sur l'arrêt de la Cour suprême au sujet d'Hydro-Québec, qui est le plus important dans ce domaine. À cette occasion, la Cour a jugé que les dispositions réglementaires de la LCPE relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Si la décision avait été différente et avait confirmé les décisions des tribunaux inférieurs, les dispositions de réglementation qui constituent l'assise de l'efficacité de la LCPE auraient probablement été invalidées.
    Vous trouverez plus de détails sur cet arrêt dans mon mémoire mais il est absolument clair que « toxique » était l'une des raisons pour lesquelles la Cour a jugé que le gouvernement fédéral pouvait légitimement user de son pouvoir de droit pénal pour appliquer la LCPE. La Cour s'est fondée sur des précédents canadiens et internationaux concernant les substances et les régimes de gestion des substances toxiques et il est clair qu'elle a attaché beaucoup d'importance dans son arrêt au fait que la Loi concerne des substances qui sont jugées toxiques. En termes simples, elle a conclu que la Loi est constitutionnellement valide parce qu'elle porte sur des choses qui sont toxiques -- pas n'importe quelles choses mais des choses toxiques.
(0935)
    Les juges dissidents ont également exprimé une opinion sur l'adjectif « toxique ». En bref, si cet adjectif n'avait pas été présent dans la LCPE pour en préciser le sens, cela aurait pu élargir la portée de la Loi et, peut-être, renforcer l'opinion minoritaire qu'elle était inconstitutionnelle.
    Au sujet d'un autre argument présenté plus tôt et voulant que l'adjectif « toxique » contient à la fois un élément de santé humaine et un élément environnemental, le juge La Forest a souligné dans l'arrêt d'Hydro-Québec l'importance de réduire la pollution pour préserver la santé humaine mais aussi pour protéger l'environnement. Il a également abordé dans son arrêt la question du dosage en disant que la quantité, la concentration ou l'état peuvent rendre une substance toxique.
    L'arrêt d'Hydro-Québec a réglé la question de la constitutionnalité de cette partie de la LCPE. Il convient de se demander si l'on devrait ouvrir la porte à un autre défi constitutionnel qui pourrait facilement entraver la mise en application de la Loi pendant des années.
    Pour toutes ces raisons, je dis à votre comité qu'il est à la fois inutile et dangereux d'éliminer ou de modifier l'adjectif « toxique » de la LCPE. La meilleure manière de répondre aux préoccupations de l'industrie serait de communiquer efficacement avec le public sur la nature et l'usage des substances mises sur le marché, et d'assurer une application juste et efficiente de la LCPE.
    Je vous remercie de votre attention.
(0940)
    Merci, M. Freeman.
    Nous allons commencer avec M. Godfrey.
    Merci, monsieur le président,
    Avant de commencer les questions, il conviendrait peut-être de souligner la présence de la personne qui vient d'être élue pour diriger le Parti vert du Canada, et j'en profite pour lui adresser nos félicitations.
    M. Graham, j'ai le sentiment que vous nous avez adressé un message contradictoire. C'est en tout cas le message que j'ai reçu. En effet, vous dites être préoccupé par l'utilisation du mot « toxique » qui a un effet de stigmatisation, mais vous dites en même temps que, sur le plan administratif, vous avez eu une expérience très positive avec Agriculture Canada et Environnement Canada.
    Je me demande s'il vous serait possible de quantifier d'une manière quelconque le coût pour les entreprises de l'utilisation du mot « toxiques »? Cette stigmatisation a-t-elle concrètement nui à vos affaires?
    C'est une question intéressante. À cette étape, il n'y a probablement pas de coût que l'on puisse mesurer, si ce n'est pour dire que notre industrie a maintenant le fardeau de venir devant le comité pour traiter de ces questions de manière continue, et de communiquer de la même manière avec le public lorsque des préoccupations apparaissent sur des choses telles que les aliments biologiques.
    En qualifiant nos produits de « toxiques », on impose à notre industrie le fardeau de démontrer qu'ils sont sûrs, utiles, etc. Tant que cette stigmatisation existera, nous serons obligés par le gouvernement de défendre la réputation de nos produits.
    Je voudrais parler de la différence entre la stigmatisation et sa gestion. Pendant l'établissement de la liste, le gouvernement n'est jamais venu nous dire : « Nous voulons inscrire vos produits sur la liste des produits toxiques de la LCPE parce que vous ne les gérez pas correctement et qu'il y a des problèmes dans l'agriculture à cause de cela -- parce que nous voulons que vous fassiez quelque chose de différent ».
    Voilà le problème fondamental. Que veut-on que l'on fasse d'autre quand on dit que l'ammoniac est toxique? Rien. Une fois que la stigmatisation existe, on ne nous demande pas de faire autre chose que ce que nous faisons déjà. Ça semble être un simple exercice théorique.
    J'aimerais dire en ce qui concerne cette question de validité constitutionnelle que la manière dont devrait normalement fonctionner une fédération, lorsqu'un tel problème apparaît, par exemple un problème de gestion des eaux usées, qu'il ne me semble pas très productif pour le gouvernement fédéral d'exercer sa compétence en utilisant le mot « toxique » devant les tribunaux. Si nos municipalités n'ont pas d'argent pour construire des usines de traitement des eaux usées, il serait bien préférable que le gouvernement lance un programme d'infrastructure pour leur donner les fonds nécessaires au lieu d'entreprendre un exercice scientifique pour dresser une liste. Personne ne veut que des eaux usées soient déversées dans nos rivières et l'on ferait donc mieux de s'attaquer au problème en coopération avec les provinces.
    À mon avis, il s'agit dans bien des cas d'une compétence partagée mais je crois que le gouvernement fédéral choisit la solution de facilité en exerçant sa compétence plutôt qu'en travaillant en coopération avec les provinces. C'est ça qu'il faudrait faire pour l'environnement.
    Voyez-vous, je connais un peu cette question d'infrastructure et je peux vous assurer qu'il y a plusieurs solutions différentes au problème.
    J'aimerais donner la parole à M. Benevides sur cette question puisqu'il a dit qu'il aimerait avoir la chance de donner quelques réponses.
    Pourriez-vous, monsieur, pour réfuter les arguments de l'industrie, utiliser un exemple concret, par exemple celui de la potasse ou de l'ammoniac?
(0945)
    Merci.
    Les choses que je voulais aborder concernent non seulement cette question mais d'autres aussi. Je conviens certainement, tout d'abord, que le contexte, comme l'a dit Aaron, varie d'un usage à un autre. Le contexte détermine tout quand il s'agit de voir quand et comment on utilise l'ammoniac, par exemple.
     Deuxièmement, je pense qu'il y a deux choses qui sont absolument justes et exactes dans ce qu'a dit M. Graham. La première est qu'il nous incombe, a-t-il dit, de faire face aux conséquences de l'inscription d'une substance pour toutes les bonnes raisons scientifiques et juridiques. C'est en effet à l'industrie qu'appartient le fardeau de manière légitime.
    En outre, comme il l'a dit, le gouvernement ne les a jamais accusés de mauvaise gestion. C'est vrai -- et c'est aussi tout à fait légitime car le processus d'évaluation et d'examen avec ses conséquences en vertu de la LCPE concerne la substance même. Ce n'est pas une question de personnes agissant mal.
     Voilà pourquoi je tiens à dire, finalement, qu'il est important de comprendre que la stigmatisation de l'adjectif toxique s'attache aux produits, pas aux gens.
    Je demande au gouvernement de continuer à assurer cet équilibre entre toutes les raisons, les bonnes raisons exposées par Aaron, de poursuivre un processus très rigoureux et constitutionnellement valide et d'identifier ce qui est toxique, d'une part, et les mesures que doivent ensuite prendre les partisans du processus en réponse à ces résultats. Je crois que le régime est très bien équilibré, et c'est ce que reflète l'arrêt de la Cour suprême du Canada. Il a évolué au cours des années.
    M. Graham, si vous n'aimez pas l'adjectif « toxique » mais que vous êtes sensible aux arguments avancés par les autres qui réclament quelque chose d'assez puissant pour résister à un défi constitutionnel, que proposez-vous d'autre?
    Je crois que je laisserai le gouvernement décider. Je ne suis pas avocat, vous savez.
    La question est de savoir quel est le pouvoir d'un mot. L'action n'est-elle pas plus forte que les mots? Le bon sens me dit que le problème n'est pas d'apposer des étiquettes mais d'agir. L'étiquette n'a aucune valeur pour qui que ce soit.
    M. Freeman, voulez-vous parler d'action et de mots?
    Certainement.
    Si j'en crois le témoignage de M. Graham, les mots ont certainement un pouvoir énorme, en tout cas pour lui et pour les autres participants à ce processus.
    L'adjectif « toxique » s'inscrit dans un régime global traitant des substances dangereuses. Si vous enlevez l'étiquette et parlez d'autre chose, ce sera malhonnête. Plus important encore, on suscitera la confusion au niveau réglementaire, au niveau administratif et au niveau de la communication publique car personne ne comprendra plus ce que vous faites ni comment votre action concorde avec d'autres programmes nationaux qui traitent de choses que nous disons toxiques et avec les accords et programmes internationaux qui traitent de choses que nous disons toxiques. Cela débouchera sur toutes sortes de problèmes concernant comment nous devons réagir à ces choses.
    Je suis prêt à dire qu'aucune des substances dont nous avons parlé est réellement toxique. Elles sont toxiques dans des contextes particuliers. L'ammoniac est toxique dans un milieu aquatique, dans certaines conditions, mais l'ammoniac n'est pas toxique en permanence, dans tous les contextes et dans toutes les applications.
    À mes yeux, la solution est de communiquer efficacement ce qu'on fait avec la substance. Je n'ai pas de preuves pour justifier ce que je vais dire mais je ne pense pas que la plupart des Canadiens considèrent que les engrais sont des toxines.
    À part ça, quand M. Graham se plaint que le fardeau appartienne à l'industrie, je lui réponds que c'est tout à fait justifié quand on parle d'une substance qui est toxique dans certains contextes. J'estime que la réponse est de communiquer efficacement ce qu'est cette substance et ce qu'on peut en faire, et d'appliquer efficacement et de manière efficiente le régime de réglementation.
(0950)
    Une autre remarque sur le contexte. En ce qui concerne les substances dont nous parlons, le contexte des produits de consommation n'est pas envisagé dans la LCPE alors que nous pensons qu'il pourrait et devrait l'être. Ce sont les effets cumulés et synergiques des milliers de substances auxquelles nos enfants sont exposés dans leur vie quotidienne dont il faut tenir compte par le truchement de cette législation, étant donné que la législation mise en application par Santé Canada prétendument pour régir les produits dangereux ne le fait pas. Elle le fait d'une manière et à une échelle très limitées, en grande mesure après coup. Or, c'est la LCPE qui est le texte adéquat pour ce faire, avec le leadership de Santé Canada.
    J'invite donc le comité à considérer qu'il s'agit là d'un contexte qui appelle des amendements.
    Merci.
    M. Bigras.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je tiens tout d'abord à saluer les membres du comité.
    Avant de parler de l'essence même de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, j'aimerais vous rappeler que nous avons adopté celle-ci le 14 septembre 1999. Le gouvernement disposait alors d'une période de temps limitée pour procéder à la catégorisation des substances existantes. Par conséquent, le gouvernement devait terminer son inventaire des 23 000 substances actuellement disponibles il y a une semaine, le 14 septembre 2006. Il devait y avoir un inventaire détaillé. Nous avons appris par l'intermédiaire des médias que le gouvernement avait terminé cette évaluation. Nous avons même appris que cette liste contiendrait tout près de 4 000 mauvais élèves, dont 400 substances considérées toxiques.
    La question que je pose à M. Moffet est simple. S'engage-t-il, en toute transparence, à déposer officiellement au comité, dans les prochains jours, l'inventaire, la liste des produits jugés toxiques ?

[Traduction]

    À qui posez-vous votre question?

[Français]

    Elle s'adresse à M. Moffet.

[Traduction]

    En effet, M. Bigras, le gouvernement a terminé l'exercice de catégorisation. L'exigence purement juridique était d'achever ce processus et c'est ce que vient de faire le gouvernement.
    Les résultats de la catégorisation ont été diffusés au public il y a déjà un certain temps. Ils sont extrêmement détaillés et ils ont été communiqués par CD-ROM aux diverses parties prenantes. Depuis un an, nous distribuons des sortes de mises à jour itératives.
    En ce qui concerne les conséquences de la catégorisation -- je crois vous avoir entendu dire, ou M. Benevides, que nous sommes à la croisée des chemins -- le gouvernement prend les résultats au sérieux. Les résultats ont donné au gouvernement une quantité considérable d'informations qui lui permettront de prendre certaines décisions très importantes et de s'engager dans certaines voies importantes.
     Je crois que les deux ministres ont prévu d'annoncer leurs intentions dans les prochaines semaines. Je crois qu'ils ont dit publiquement qu'ils feront cette annonce dans quelques semaines.

[Français]

    Est-il au moins possible d'obtenir cet inventaire? Plusieurs services de recherche qui travaillent au Parlement tentent d'obtenir cette liste, cet inventaire. Vous nous confirmez qu'un tel inventaire existe et qu'il a été distribué à un certain nombre de personnes. Premièrement, est-il possible pour nous d'obtenir cet inventaire?
    Deuxièmement, compte tenu des résultats dont vous disposez, quand prévoyez-vous déposer un plan visant à réduire ces polluants au Canada? Combien de temps devrons-nous attendre avant d'avoir un plan d'action portant sur cette question?
(0955)

[Traduction]

    Les résultats de la catégorisation sont disponibles et nous pouvons remettre aux membres du comité et aux chercheurs les données qui ont été rendues publiques. J'en prends l'engagement.
    Ce qui suivra à partir de maintenant fait l'objet de discussions entre les ministres et je crois comprendre qu'ils ont l'intention de faire une annonce dans deux ou trois semaines. Je ne peux pas vous donner de date ferme mais nous ne parlons pas ici d'un long délai. C'est une question importante que les ministres doivent résoudre avec leurs collègues.
    M. Benevides, avez-vous quelque chose à ajouter?
    M. Moffet a évidemment raison de dire que ce qui était exigé par la Loi, c'était strictement de mener l'exercice et de l'achever. Toutefois, c'est un exercice qui a duré sept ans alors qu'on ne manquait pas de préavis sur le fait qu'il fallait l'achever. Ces substances existent depuis 20 ans ou plus. Ils étaient sur cette liste... ou c'est en tout cas la définition de la liste.
    Il est intéressant de constater que c'est votre comité qui avait modifié la législation pour fixer une date limite. Nous n'aurions pas eu cette limite de sept ans si le comité ne l'avait pas fixée, ce qui renforce la nécessité d'inclure des dispositions exécutoires dans la Loi si l'on veut que les choses soient faites.
    En ce qui concerne le fait que les informations sont disponibles et sont distribuées, il y a évidemment eu certaines difficultés pour les obtenir mais il s'agit d'informations extrêmement complexes. En plus des obligations réglementaires et des mesures que nous réclamons, nous voulons que le gouvernement agisse pour éduquer le public sur ses substances et sur leurs effets potentiels. La démarche qui prévaut actuellement est axée sur l'idée de donner un choix au public, ce qui me semble inacceptable car les gens n'ont même pas les outils essentiels pour savoir quels peuvent être les risques.
    Finalement, nous ne pouvons qu'applaudir et appuyer la demande de M. Bigras concernant un plan d'action.
    M. Bigras.

[Français]

    J'aimerais poser une autre petite question à M. Freeman. Les représentants des fabricants de produits chimiques du Canada nous proposent ce matin de remplacer le terme « toxique » par une référence aux substances correspondant aux critères de l'article 64. Selon ces représentants, les conseillers du gouvernement affirmeraient même que cela n'entraînerait pas une contestation de la validité constitutionnelle de la loi. Je sais que ce matin, vous avez fait l'exégèse du jugement d'Hydro-Québec, qui a eu un impact considérable sur le Québec, comme vous le savez. Je voulais savoir ce que vous pensez de cet avis du gouvernement qui va peut-être à l'encontre de votre analyse.

[Traduction]

    Je pense que c'est une question ouverte. Je pense, comme mon organisation, que la LCPE est valide sur le plan constitutionnel. Cela dit, je ne suis certainement pas prêt à vous donner un avis définitif sur la question de savoir si l'utilisation d'un autre adjectif que « toxique » rendrait la Loi anticonstitutionnelle. Je ne le pense pas, cependant.
    En revanche, étant donné la jurisprudence, cela créerait une ouverture suffisamment grande pour d'autres poursuites. Étant donné l'historique de cette Loi et des autres lois environnementales au Canada et ailleurs, il y a fort à parier qu'il y aurait de nouvelles poursuites si cette porte était ouverte.
    Voici certaines des raisons pour lesquelles je pense que cela ouvrirait la porte. L'arrêt d'Hydro-Québec était un arrêt avec dissidence -- majoritaire à cinq contre quatre. Les tribunaux inférieurs avaient jugé différemment. Les juges dissidents autant que les juges majoritaires ont accordé un poids considérable à l'adjectif « toxique ». Ils ont souligné plusieurs fois que cette question concernait des substances toxiques. Ils ne se sont pas attardés sur la question de savoir si l'utilisation d'un autre adjectif aurait produit une décision différente mais on peut très certainement déduire des deux jugements que cet adjectif a joué un rôle important dans leur raisonnement.
    Il se peut qu'un des cinq juges prendrait une décision différente. Il serait difficile de savoir ce qui a amené chacun d'entre eux à prendre sa décision. Je ne peux donc pas offrir d'opinion définitive à ce sujet et je serais très sceptique si quelqu'un le faisait avec un jugement aussi serré.
(1000)

[Français]

    Ma prochaine question s'adresse à M. Graham ou à M. Lloyd.
    Que pensez-vous de l'argument relativement fort de M. Freeman, selon qui le changement que vous proposez créerait un écart entre la réglementation canadienne et les normes internationales? N'est-ce pas un argument convaincant? Votre suggestion n'ouvre-t-elle pas la porte à un dangereux précédent?

[Traduction]

    Je me demande si Gordon, qui est avocat, pourrait répondre car mes connaissances constitutionnelles ne sont pas étendues.
    Avec plaisir car l'une des choses qui me préoccupent est l'affirmation de M. Freeman que les traités et démarches à l'échelle internationale concordent avec ceux du Canada. À mon avis, c'est tout simplement faux. Il existe à mon avis au Canada une démarche tout à fait particulière dans la manière dont nous utilisons l'adjectif « toxique » et dans le sens que nous lui attribuons à l'article 64. Quand nous participons à des tribunes internationales, nous sommes continuellement obligés d'expliquer ce que veut dire cette Loi. La Convention de Stockholm à la négociation de laquelle j'ai beaucoup participé -- et je n'ai pas mon ordinateur avec moi pour faire une recherche de mot -- n'est pas fondée sur le mot « toxique ». Ce n'est pas vrai. Même chose pour la déclaration de Rio. Si vous prenez les termes du mémoire que je vous ai lu -- c'était dans la déclaration de Dubaï et dans le texte du Sommet de Johannesburg en 2000 -- vous n'y trouverez pas non plus cet adjectif.
    Nous avons donc ici un terme uniquement canadien. Je crois que si nous changeons les choses, contrairement à ce que dit M. Freeman, nous serons en fait en plus grande harmonie avec ce que font les autres à l'échelle internationale. La question posée sur la situation intérieure est légitime. Allons-nous mettre la LCPE en péril? L'industrie a déjà présenté au comité dans le passé des exemples de stigmatisation, et le terme actuellement employé pose certains problèmes dont nous essayons de tenir compte. L'ACFP dit que c'est un problème et nous ne voulons pas perdre la validité constitutionnelle de la Loi fédérale. Nous nous en remettons aux avocats fédéraux qui sont parvenus à cette conclusion quand ils ont proposé la terminologie que j'ai suggérée dans le projet de loi budgétaire du dernier gouvernement. Le comité aurait peut-être intérêt à demander à ces avocats fédéraux ce qu'ils en pensent. J'ai lu aussi la décision des BPC.
    Mon opinion -- et je pense qu'elle concorde avec celle de M. Freeman -- est que ce genre de changement ne porterait pas atteinte à la validité constitutionnelle des pouvoirs fédéraux. Comme lui, toutefois, je ne saurais en jurer. Je ne peux vous donner d'opinion définitive. Je crois que vous devriez consulter les avocats fédéraux qui ont réfléchi attentivement à la question.
    M. Cullen, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais rester sur le même sujet. Durant ces audiences, j'essaye d'évaluer les témoignages du point de vue de monsieur tout le monde, c'est-à-dire d'une personne qui lirait nos procès-verbaux et essaierait de comprendre de quoi nous parlons et en quoi cela pourrait changer sa vie si le gouvernement prenait ses décisions -- on peut toujours espérer -- en fonction des recommandations de ce comité.
    Comme on ne sait pas quelles seraient les conséquences de l'élimination d'un adjectif comme « toxique », l'application du principe de prudence devrait nous amener à nous demander pourquoi prendre un risque. Pourquoi risquer de retarder considérablement la mise en oeuvre d'une loi qui est destinée à rendre notre environnement, notre écosystème, plus sain, simplement pour enlever un mot et le remplacer par une série de mots plus vagues? Ces mots seront ensuite appliqués à des produits chimiques que nous jugeons de manière intuitive comme étant foncièrement toxiques et dangereux. Je suis sensible à la frustration des sociétés d'engrais, entre autres, mais pourquoi s'engager dans cette voie et prendre ce risque alors que notre intention à tous autour de cette table est d'éliminer les substances dangereuses de notre environnement?
(1005)
    Je vais répondre parce que je pense que c'est une question politique.
    Je pense que les députés se doivent de formuler les lois avec bon sens. Sinon, il faudra absolument être avocat pour devenir député. Si les gens voulaient n'envoyer que des avocats au Parlement, c'est ce qu'ils feraient. Vous êtes tous ici, originaires de milieux différents, pour agir avec bon sens. C'est l'adjectif « toxique » lui-même qui est vague car il s'applique à tout un éventail de produits dont certains sont foncièrement toxiques mais seulement dans certains contextes. Dans certains cas, ils sont toxiques pour l'environnement, dans d'autres, pour la santé humaine et, dans d'autres encore, à condition d'une exposition très longue en petites quantités. Certaines de ces substances sont extrêmement toxiques. Je pense que c'est l'adjectif lui-même qui est vague.
    Les trois ou quatre catégories que vous venez de mentionner ne sont-elles pas toutes importantes? Si une substance tombe dans la catégorie de la bioaccumulation, si elle est relativement toxique pour l'être humain, si elle cause de graves dégâts sur le plan environnemental... toutes ces catégories que vous venez de mentionner, dans mon esprit de simple citoyen, me semblent correspondre à un certain degré de toxicité et de préoccupation.
    Mais ce qui est important n'est-il pas la possibilité pour le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux d'agir ensemble pour gérer ces problèmes dans l'intérêt du public, au lieu d'essayer d'appliquer un mot, cinq lettres, à ce très large éventail de substances qui sont utilisées et sont dans l'environnement? Je pense que le rôle des parlementaires doit être de se demander qu'est-ce qui a du bon sens. Ensuite, les avocats seront chargés de rédiger un texte qui a du bon sens.
    Je vais vous demander votre avis sur ce qui suit, ainsi qu'à M. Moffet.
    Maintenant que nous avons terminé cet exercice de triage qui a duré sept ans et a traîné jusqu'à la 11e heure -- et je ne critique pas ici le travail de M. Moffet ou de M. Glover car je suis sûr qu'ils n'avaient pas les ressources qu'ils auraient voulues pour terminer plus rapidement -- pensez-vous qu'il est important d'agir sur le plan législatif pour mettre en application le fruit de ce travail?
    S'ils examinent ce processus, beaucoup de Canadiens se demanderont pourquoi il a fallu sept ans simplement pour trouver quelles sont les substances préoccupantes, et ils constateront que nous n'avons pas le pouvoir législatif de forcer le gouvernement à produire des plans d'action pour réagir.
    Je partage les frustrations des écologistes au sujet de la longueur du processus mais je pense qu'il est très difficile aux parlementaires de résoudre les questions administratives, et c'est la mise en oeuvre administrative de la législation qui pose problème dans le cas présent. Le gouvernement a-t-il les ressources et capacités nécessaires pour mettre en application cet énorme processus qu'exige la Loi?
    Vous pouvez adopter toutes les lois que vous voulez, il faudra quand même que le gouvernement et les ministères, ainsi que le public, aient la capacité nécessaire pour agir. Il y a des limites à ce qu'on peut faire avec des lois. Le simple fait d'adopter une loi ne garantit pas que le gouvernement peut produire les résultats.
    Je crois que ceci offre une bonne occasion à M. Moffet ou à M. Glover. Je relis nos lignes directrices pour les représentants des ministères. Je sais que vous ne pouvez pas dire que le gouvernement ne vous a pas donné assez de ressources pour faire votre travail. Ce ne serait pas approprié. Toutefois, si je vous disais que le gouvernement ne vous a pas donné les ressources nécessaires pour faire votre travail en temps opportun -- je vous renvoie au deuxième point -- serait-ce factuellement inexact?
    Une voix : Vous avez bien dit que vous n'êtes pas avocat, M. Cullen?
    Mr. Nathan Cullen: Je ne suis pas avocat. En fait, j'ai fait campagne sur le fait que je ne le suis pas.
(1010)
    M. Lloyd et M. Freeman aimeraient faire une brève remarque, après quoi nous passerons à M. Moffet.
    Mais je viens de poser une excellente question. C'était l'une de mes meilleures.
    Peuvent-ils répondre, après quoi nous passerons à M. Moffet?
    D'accord. N'oubliez pas que je vous disais cela avec un certain humour.
    Ceci donnera peut-être à M. Moffet le temps de penser à une bonne réponse.
    Je ne ferai que quelques brèves remarques.
    Au sujet de ce qui est vague, je suis d'accord avec M. Graham. « Toxique », c'est vague. Qu'est-ce que ça veut dire? Ce que ça veut dire se trouve dans l'expression que nous recommandons et c'est ce que les avocats fédéraux ont trouvé : correspond aux critères de l'article 64. Je pense que c'est vraiment une solution simple et élégante au problème.
    L'industrie a beaucoup réfléchi à l'adjectif qu'on pourrait employer pour remplacer « toxique », et diverses propositions ont été faites. Ce n'était pas notre idée, c'était l'idée d'un avocat fédéral, et il me semble que ça règle ce problème d'expression trop vague. C'est précis. C'est descriptif. Il y a des choses qui correspondent aux critères de l'article 64 et elles sont exprimées en termes de danger pour l'être humain ou de danger pour l'environnement. Je pense que ça ajoute de la clarté dans ce contexte.
    Je me sens comme ce débat, et je crains que ça prenne trop de temps alors que l'intention reste la même. Le risque que vous avez exprimé, vous-même et M. Freeman, concernant l'éventualité de retarder encore plus le passage à l'action, me préoccupe, et j'espère qu'il préoccupe aussi les autres membres du comité.
    J'attendais avec impatience --
    M. Freeman veut dire quelques mots.
    Nous passerons à M. Moffet.
    Je ne voudrais pas voler de temps au député sans son autorisation.
    Parlez rapidement.
    Je voudrais répondre à l'affirmation que l'adjectif « toxique » est trop vague, argument qui n'a même pas été avancé dans l'affaire d'Hydro-Québec, ou en tout cas pas avec succès. J'aimerais évoquer les remarques d'un de mes collègues de l'ACFP, Amir Attaran, qui occupe la chaire de recherche canadienne en droit, en santé de la population et en politique de développement global à l'université d'Ottawa. Il dit ceci :
La définition scientifique de la toxicité porte simplement sur l'aptitude de la substance à causer la mortalité ou la morbidité de n'importe quelle espèce à n'importe quelle concentration, sans tenir compte aucunement de son aptitude à le faire à la suite d'une exposition ordinaire ou prévisible.
Il ajoute que la définition de la toxicité dans la LCPE restreint cette définition en ajoutant la probabilité que la substance entrera dans l'environnement, et il la restreint encore plus en évoquant la probabilité que la substance aura ensuite des effets néfastes.
    Donc, je conclus que nous avons en fait une définition très précise qui est tout à fait appropriée pour la LCPE. Je ne pense pas que cet adjectif soit trop large ou trop vague dans le cadre de la LCPE. Il est vrai, comme l'a dit M. Lloyd un peu plus tôt, que cette définition n'est pas exactement la même que celle des régimes internationaux. Je serais très heureux de remettre aux membres du comité une liste de certains de ces régimes que j'ai évoqués dans mes remarques.
    Maintenant, monsieur Cullen, vous pouvez poser votre très bonne question à M. Moffet, pour laquelle nous vous donnons une minute supplémentaire.
    La question a été posée. Elle concerne les ressources et l'application... C'est le triage, je suppose.
    En fait, je pense avoir entendu trois questions et je vais essayer de répondre aux trois.
    La première concerne les ressources consacrées à la catégorisation pour qu'elle ait pris sept ans. Cela peut sembler long. Je ne pense pas qu'il vaille la peine de discuter du caractère adéquat ou non des ressources disponibles. Le fait est que le travail a été fait.
     J'estime que c'est un accomplissement remarquable -- non pas que j'aie eu quelque chose à y voir mais il y a beaucoup de gens dans les deux ministères à qui l'on doit ce succès. Je dis cela parce qu'aucun autre pays au monde n'a accompli la même chose. Ça nous a peut-être pris sept ans mais il y a d'autres pays ayant beaucoup plus de ressources qui ne l'ont pas encore fait. C'était une tâche monumentale et il était inévitable qu'elle prendrait beaucoup de temps.
    Pour ce qui est de la suite, je pense que deux questions ont été posées. Vous avez dit, M. Cullen, qu'on n'a pas indiqué dans la Loi ce qu'il faudra faire ensuite. En réalité, il est prévu dans la LCPE que les deux ministères effectueront l'évaluation de chaque substance identifiée comme correspondant aux critères du processus de catégorisation. Donc, les plans que les deux ministres ont l'intention d'annoncer doivent être conformes à cette obligation, au minimum.
(1015)
    Ma question portait plus sur tout le temps qu'exigera cette évaluation. Comme nous parlons de 4 000 produits chimiques, combien de temps a-t-il fallu en moyenne pour arriver à cette étape et dresser un plan exhaustif qui convienne à l'industrie et à toutes les autres parties prenantes?
    Cette question est légitime. Aucune limite de temps n'est prévue dans la Loi pour le processus d'évaluation.
    Pour ce qui est des ressources, nonobstant les lignes directrices du début, je ne pense pas qu'il m'appartienne de dire si elles étaient adéquates ou non. Je réitère ce que M. Glover et moi-même avons dit lors de témoignages antérieurs, c'est-à-dire que la vitesse à laquelle nous pourrons travailler -- je parle ici des ministères, collectivement -- et la vitesse à laquelle nous pourrons faire le travail nécessaire au sujet de ces 4 000 substances dépendront en partie des ressources qui nous seront fournies. Cela dépendra aussi des leçons que nous avons apprises durant l'exercice de catégorisation, des stratégies que nous adopterons, de la collaboration que nous pourrons obtenir de l'industrie et, comme l'a souligné M. Lloyd, d'autres pays.
     Les ressources mises à notre disposition détermineront la vitesse à laquelle nous pourrons travailler.
    M. Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    Je pense que cette série de témoignages est très utile car elle nous permet de recueillir des opinions contradictoires.
    M. Moffet, je m'adresse à vous. Nous avons entendu M. Freeman et M. Lloyd parler du risque de contestation constitutionnelle de la LCPE si on enlève le mot « toxique ». Qu'en pensez-vous? Le ministère a-t-il un avis à ce sujet?
    Voulez-vous savoir quelles seraient les conséquences constitutionnelles du remplacement de ce mot dans la Loi?
    Quel serait le risque? M. Freeman et M. Lloyd nous ont dit que cette possibilité existe mais tous deux pensent qu'elle aurait peu de chances de succès. Qu'en pense le ministère?
    Je crois utile de rappeler d'abord que le gouvernement précédent avait proposé de modifier la Loi et que cela n'avait posé aucun problème au ministère.
    Cela ne veut pas dire qu'il n'y a aucun risque à vouloir modifier la Loi. Je pense que nous savons, comme plusieurs témoins l'ont dit, que le régime établi dans la LCPE pour identifier, évaluer et gérer les substances a été examiné par la Cour suprême du Canada qui l'a jugé constitutionnel dans l'ensemble. Si nous modifions ce régime, nous nous exposons à un certain risque, je suppose.
    Notre opinion est que le risque associé au remplacement de ce mot précis ne serait pas élevé, mais il est très difficile de prévoir avec exactitude quel serait le résultat étant donné que ce régime a été mis à l'épreuve devant les tribunaux mais pas ses éléments individuels.
    Vous convenez donc avec les autres témoins qu'il y a un risque?
    Permettez-moi de souligner que je ne m'exprime pas ici au nom du ministère de la Justice. Je comprends que ceci peut sembler un peu technique mais c'est le ministère de la Justice qui donne des avis juridiques. J'essaie seulement de refléter les avis que nous avons reçus -- et, je pense, la position du ministère -- indiquant qu'il y aura inévitablement un certain risque si l'on modifie un élément quelconque du régime.
    Cela dit, je pense que notre position durant cet examen est qu'il y a certaines modifications que l'on peut envisager afin d'améliorer le régime et que le risque de contestation pourra être minimisé si elles sont apportées avec prudence.
(1020)
    Bien.
    M. Benevides pour une brève remarque.
    Au sujet du fait qu'un plan d'action différent pourrait peut-être convenir au ministère de la Justice, je reviens à la discussion touchant le rôle des députés -- avocats ou non, nous pouvons les traiter de la même manière. À mon avis, ceci est l'un des rôles fondamentaux du député; on ne peut pas séparer artificiellement les impératifs constitutionnels des impératifs sociaux. Dans le cas présent, le pouvoir du mot a été établi au cours des années grâce à ce régime.
    De même, si l'on considère que l'utilisation d'un autre mot procède d'un rôle administratif différent de l'impératif constitutionnel et de la nécessité pour le gouvernement de communiquer ceci au public, on ne peut pas non plus séparer les deux.
    Le rôle du député est de constater que, toutes choses étant prises en compte, la meilleure chose est de conserver la terminologie.
    Allez y, M. Warawa.
    Merci.
    J'aimerais changer un peu l'orientation du débat. Je comprends ce que vous dites. Je conclus qu'il y a un consensus sur l'idée qu'il y aurait un risque à changer le mot. Je comprends ce qu'on dit sur la perspective internationale au sujet du mot « toxique ».
    Les évaluations réalisées au Canada sont fondées sur l'évaluation du risque plutôt que l'évaluation du danger. S'il y a uniformité dans l'approche internationale des évaluations, si c'est fait différemment, on peut alors avoir un résultat différent.
    Je comprends ce que vous dites, M. Moffet, ainsi que ce que disent les autres témoins sur la manière dont les substances sont évaluées au Canada par rapport à la manière dont elles le sont internationalement.
    M. Glover voudra peut-être aussi intervenir dans cette discussion.
    Essentiellement, les deux ministères suivent des protocoles d'évaluation du risque normalisés à l'échelle internationale. Ces processus sont donc mis au point par les évaluateurs de risque de l'OCDE. Les méthodes sont partagées et normalisées le plus possible.
    Il y a deux raisons à cela : assurer la bonne qualité du travail et nous permettre de partager des résultats pour ne pas faire deux fois la même chose.
    Cela dit, il y a certaines choses qui sont particulières à chaque pays. Au Canada, par exemple, nous avons des usages différents et une géographie différente. En outre, depuis la semaine dernière, nous travaillons à partir d'une base d'informations différente de celles de tous les autres pays. Autrement dit, les évaluations seront faites à partir des informations issues de la catégorisation. Nous partageons ces informations avec les autres pays et, dans la mesure où ceux-ci utilisent les mêmes substances, ils pourront aussi travailler à partir de ces données. Quoi qu'il en soit, nos évaluations partiront de ça et non pas de zéro.
    Les autres témoins sont-ils d'accord avec ça?
    Oui. Le monde entier utilise une approche axée sur le risque. Le problème -- et je cite ici le professeur de l'université d'Ottawa dont on parlait tout à l'heure -- est que, quand nous parlons aux autres pays de l'approche canadienne, nous sommes obligés d'aller au-delà de la confusion suscitée par le mot « toxique ». Une fois que nous avons expliqué son utilisation dans l'article 64, il est clair pour tout le monde que nous utilisons tous une approche fondée sur le risque. En tout cas, leur interprétation du mot « toxique » est exactement celle que mentionnait le professeur de l'université d'Ottawa : c'est une approche fondée sur le danger.
    Quand on explique aux gens la LCPE avec sa définition particulière et sa prise en compte de l'exposition, ils comprennent que ce que nous faisons au titre de l'article 64 est axé sur le risque, tout comme ce qu'ils font. C'est là que l'adjectif pose problème. C'est parce que les gens interprètent le mot « toxique » de la même manière que le professeur de l'université d'Ottawa : c'est une approche fondée sur le danger. Si les gens comprenaient les complexités de la LCPE -- que ce n'est pas en réalité une approche fondée sur le danger et qu'elle tient compte de l'exposition et du risque -- alors, je ne pense pas que nous aurions ce problème. Mais la plupart des gens, même de bon sens, ne comprennent pas les complexités de la LCPE.
    C'est là que le caractère vague de l'adjectif pose problème, parce qu'il y a un décalage entre son interprétation traditionnelle, qui concerne le danger, et son interprétation dans la LCPE, qui concerne le risque.
(1025)
    M. Freeman.
    Je voudrais intervenir brièvement sur cet aspect et je pense que mes collègues interviendront sur les autres.
    Très respectueusement, je ne pense pas que ce soit l'interprétation courante de « toxique ». Je crois qu'il y a des définition différentes dans les différents régimes de réglementation mais, selon les définitions ordinaires des dictionnaires, ça désigne quelque chose qui est un poison et qui cause du mal. Ça peut être un poison pour l'être humain ou pour l'environnement. Quant à dire qu'il y a un consensus sur le sens de cet adjectif, je crois que c'est un peu spécieux.
    Je pense que nous avons défini cet adjectif dans la LCPE d'une manière particulière qui convient à ce régime de réglementation. D'autres pays l'ont défini différemment mais je ne pense pas que notre définition ait quoi que ce soit d'anormal par rapport au sens courant du mot.
    À mon avis, cette question est un peu une fausse piste dans ce contexte. Bien qu'on ait généralement adopté une démarche fondée sur le risque, il faut bien admettre -- et ceci est plus proche d'une démarche fondée sur le danger -- que le principe de précaution est de plus en plus présent dans le droit international et a été validé au Canada même. La raison pour laquelle une démarche fondée sur le danger, ou qui tend dans cette voie, est plus proche du principe de précaution est qu'on parle ici de prendre des mesures de prévoyance quand on a l'indication d'un danger possible.
    Je veux faire le lien avec l'exercice de catégorisation. C'est que cet accomplissement monumental du Canada -- tout le monde en convient -- n'a de sens que si, conformément au principe de précaution, nous accélérons ces évaluations et prenons des mesures concrètes au sujet des substances les plus dangereuses, avec des échéanciers obligatoires. Voilà à mon avis où se situe le lien : si nous voulons rester un chef de file, nous devons nous demander où il conviendrait d'adopter une démarche plus fondée sur la précaution, au vu des propriétés dangereuses de certaines substances dans certains contextes.
    Merci, M. Warawa. Nous allons maintenant entamer le deuxième tour.
    Je rappelle aux témoins et aux membres du comité que nous passons maintenant à des tranches de cinq minutes. Soyez aussi brefs que possible pour permettre au plus grand nombre possible de députés de poser leurs questions.
    M. Silva.
    Merci, monsieur le président.
    Nous entendons parler tous les jours de cancers et de nouvelles maladies. Nous nous demandons quelle en est l'origine et bien des scientifiques ne le savent pas vraiment dans tous les cas. Il n'empêche que la manière dont nous utilisons et étiquetons de nombreuses substances inquiète beaucoup la population. La catégorisation -- comment nous définissons les choses -- est extrêmement importante pour arriver à définir le droit environnemental qui permettra de s'attaquer au problème. Les mots ne sont donc pas sans importance, tout comme les catégorisations. C'est pourquoi je m'inquiète de voir qu'on envisage d'affaiblir ce type de catégorisation et de définition.
    Tout ce qu'on dit les témoins de ce matin était très intéressant. Je pense qu'ils nous ont présenté des points de vue très intéressants. J'encourage vivement le gouvernement.
    M. Moffet pourrait peut-être dire quelques mots sur le fait que le gouvernement va jouer un rôle très important dans l'élaboration de ces différents plans d'action et catégorisations, et nous dire aussi comment il va établir un ordre de priorité. Il est certain que tout plan d'action du gouvernement devra comprendre un volet d'éducation.
    Je veux savoir comment le gouvernement va répondre aux préoccupations que nous avons tous face à l'apparition de tous les nouveaux cancers dans notre société. Je crois qu'il est très important de ne pas affaiblir ces définitions, de quelque manière que ce soit, mais plutôt de les renforcer.
(1030)
    Je ne sais pas vraiment quelle est la question. Si vous me demandez quels sont nos plans, je ne peux que répéter que les ministres ont l'intention de les annoncer bientôt. Ce que je peux dire, cependant, c'est que...
    Je pense avoir clairement demandé s'il y aurait un programme d'éducation du public. Va-t-on affaiblir la Loi? Je crois que c'était la question que j'essayais de vous poser. Est-ce que ça va venir bientôt, oui ou non?
    Un élément essentiel du plan qui sera annoncé, quel qu'il soit, sera d'éduquer le public et d'essayer d'expliquer les résultats des catégorisations.
    Le travail qu'ont fait les ministères pour achever la catégorisation et pour conseiller les ministres sur la marche à suivre est fondé sur la Loi actuelle, sous réserve des recommandations de votre comité.
    Y aura-t-il un affaiblissement de la Loi?
    Pas à ma connaissance.
    M. Khatter, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Comme je n'ai pas encore pris la parole, je vais me présenter. Je m'appelle Kapil Khatter, je suis médecin de famille et je fais aussi partie de PollutionWatch.
    Je voudrais dire deux choses. La première est que nous attendons avec impatience le plan d'action du gouvernement et que nous sommes conscients du travail remarquable qui a été fait sur la catégorisation, ce qui fait de nous un chef de file mondial. Je crois toutefois qu'il est important d'admettre que nous devons aussi devenir un chef de file mondial sur le contrôle concret des substances dangereuses, et je crois que nous n'en sommes pas encore là. Si nous voulons nous attaquer à l'augmentation des cancers, de l'asthme, etc., nous devrons devenir un chef de file mondial en matière de contrôle des substances dangereuses.
    En ce qui concerne la manière dont nous qualifions les choses, je ne veux pas laisser passer l'affirmation de M. Lloyd selon qui les 19 000 substances non catégorisées sont des substances sûres. Ça me fait sourire car je me doutais, il y a sept ans, que c'est ce qui arriverait et qu'on dirait que les substances non catégorisées sont des substances sûres. Le gouvernement n'a jamais dit que ce sont des substances sûres. Ce sont simplement des substances ne correspondant pas à certains critères -- persistance, bioaccumulation, toxicité inhérente, grand volume de production et potentiel d'exposition.
    Ce que nous savons, c'est qu'il y a d'autres possibilités dans la LCPE et on nous a toujours assuré qu'il y aurait ces autres possibilités pour traiter les 19 000 autres substances si l'on constatait qu'elles sont potentiellement toxiques mais ne correspondent pas exactement aux critères de la catégorisation. Quand nous parlons de renverser le fardeau de la preuve, il est important que l'on finisse par obtenir des données sur ces substances pour montrer qu'elles sont réellement sûres car certaines d'entre elles sont transportées dans des contenants portant une tête de mort. Il se trouve simplement qu'elles ne correspondent pas aux critères précis de la catégorisation.
    Il importe de rester sceptique à l'égard de toutes les substances tant qu'on n'a pas de preuves suffisantes qu'elles sont sûres.
    M. Lussier.

[Français]

    Ma question s'adresse à M. Graham, mais j'aimerais bien que M. Glover intervienne aussi.
    Vous avez mentionné, monsieur Graham, que les fertilisants n'étaient pas toxiques. Par contre, présentement au Québec, un phénomène se manifeste dans les grandes étendues d'eau, notamment la baie Missisquoi du lac Champlain et le lac Archambault. Je parle ici du développement des algues bleues. Or, Santé Canada considère qu'elles sont toxiques.
    Si les fertilisants ne sont pas toxiques mais qu'ils provoquent la croissance d'algues bleues, que devons-nous penser de la gestion du problème causé par ces algues?
(1035)

[Traduction]

    Les éléments nutritifs -- azote, phosphate, potassium -- existent naturellement dans l'environnement. On les trouve partout dans le cycle de vie.
    Il y a beaucoup de sources d'éléments nutritifs qui peuvent causer des problèmes dans l'eau. Les eaux usées des municipalités qui ne sont pas traitées contiennent encore des éléments nutritifs, et même quand elles sont traitées. Les écoulements de lisier du bétail des grandes fermes d'élevage causent aussi... Le phosphore, par exemple, existe en grande quantité dans le sol. Quand les municipalités et les gouvernements provinciaux drainent des marais et aménagent des canaux de drainage pour éviter les inondations, ça produit énormément d'érosion et le phosphore qui se trouve naturellement dans le sol s'en va dans les lacs et les rivières.
    Certaines quantités d'engrais se perdent peut-être durant l'épandage mais les agriculteurs subissent des pressions économiques énormes quand ils utilisent des engrais, qui leur coûtent très cher, pour s'assurer qu'ils restent là où ils les déposent. Quiconque fait quoi que ce soit dans l'environnement, notamment en agriculture, doit savoir que ces choses doivent être gérées avec les meilleures méthodes de gestion.
    Les produits sont-ils foncièrement toxiques? Comme le disait le groupe environnemental, en parlant de la définition du dictionnaire, s'agit-il de poisons? Non.
    M. Benevides.
    Merci, monsieur le président.
    Une remarque : avec certaines substances toxiques au milieu des années 1970, c'est la question des éléments nutritifs et de la croissance des algues et de la pollution des éléments nutritifs qui a suscité l'élaboration de la Loi fédérale sur les contaminants de l'environnement. La partie de la Loi qui a été intégrée à la LCPE est toujours dans la Loi et cette question est donc régie par la Loi.
     Le comité pourra peut-être se demander si la partie de la LCPE concernant les éléments nutritifs est encore adéquate.

[Français]

    J'aimerais entendre un commentaire de la part du ministère de la Santé.

[Traduction]

    M. Glover.
    Comme on l'a déjà dit ce matin, le contexte est particulièrement important.

[Français]

    Nous avons discuté de la question du contexte, qui est essentiel pour développer un plan d'action visant un problème spécifique.

[Traduction]

    C'est donc ici une question de contexte. Comme certains l'ont dit ce matin, avec l'exemple de l'ammoniac, il est important, quand on évalue les substances et qu'on prend des décisions fondées sur le risque, de répondre de manière appropriée. Je crois que la question importante concerne les mesures particulières qui contribuent à un problème particulier, c'est-à-dire que nous devons nous demander si nous sommes sûrs d'avoir pris les bonnes mesures de réglementation pour réagir.
    Il ne fait aucun doute que, si certaines utilisations posent des problèmes particuliers, nos scientifiques les étudieront et nous donneront les informations dont nous avons besoin pour nous permettre de réglementer adéquatement, sans généraliser.
    Merci.
    Très brièvement, M. Lussier.

[Français]

    Ma deuxième question s'adresse à M. Lloyd et porte sur les substances à risque contenues dans les produits de consommation. Les tissus et les vêtements importés sont des produits qui m'inquiètent tout particulièrement car ils contiennent toutes sortes de nouvelles substances inconnues comme des antitaches, des antistatiques, des produits antifroissants ou de pressage permanent. Votre objectif est de régler d'ici 2020 les problèmes des 3 000 substances évaluées.
    Ces nouveaux produits qui seront introduits dans la chaîne de consommation font-ils partie de ces substances, sans parler des colorants ajoutés aux bonbons, etc.?
(1040)

[Traduction]

    Je peux peut-être préciser à M. Lloyd que quelqu'un d'autre occupera cette salle à 11 heures. L'association des consommateurs viendra témoigner mardi et sera peut-être mieux à même de répondre à ces questions sur les nouveaux produits de consommation.
    Voulez-vous attendre jusqu'à mardi, M. Lussier?
    Très bien.
    Je passe à M. Cullen.
    Merci, monsieur le président.
    Les 1 700 produits chimiques relevant de la Loi sur les aliments et drogues ne sont pas mentionnés. On avait dit qu'il y aurait les 23 000 plus les 1 700 mentionnés à certaines occasions.
    Je me demande si M. Glover pourrait répondre.
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    La LCPE s'applique à un large éventail de substances. Nous avons parlé aujourd'hui de la liste intérieure des substances, et c'est la catégorisation des 23 000. La Loi porte également sur les nouvelles substances. Chaque année, les deux ministères se penchent sur environ 800 nouvelles substances.
    Nous travaillons aussi avec d'autres textes de loi, comme la Loi sur les aliments et drogues et la Loi sur les produits antiparasitaires. Certaines de ces substances se prêtent à des usages multiples, comme additifs alimentaires ou d'autres choses. Il y a un lien entre ces usages et il est impératif que les lois soient appliquées en coopération. Ça ne fait pas partie de la catégorisation ni de la liste intérieure des substances mais il y a du travail qui se fait au sujet des substances de la LAD.
    Plus par curiosité qu'autre chose, je regarde le rapport de 2002 de la Commissaire à l'environnement qui soulève un certain nombre de préoccupations et de problèmes avec le processus de la liste. Dans sa description, elle constate qu'il y aura probablement sur la liste le nombre exact de substances qui ont été déclarées inscrites il y a deux semaines. Il semble assez étrange que l'on ait pu être aussi précis il y a quatre ans quant au nombre total de substances énumérées, alors qu'il a fallu quatre ans de plus pour les inscrire sur la liste.
    Ceci montre qu'une date limite est très importante pour ce que le comité envisage comme mesures gouvernementales à l'avenir. Si le but de tout ce processus est de faire disparaître ces substances de notre environnement et que le gouvernement va de l'avant avec des plans qu'il annoncera bientôt sans date limite, ce sera simplement un exercice futile pour donner le change au public.
    Je voudrais poser une question sur le classement international de l'OCDE. Je pense que M. Khatter et M. Freeman ont dit que le Canada n'est pas un chef de file mondial sur le plan de l'atténuation des effets des substances. Quelle preuve en avez-vous?
    Veuillez m'excuser, la preuve de...
    On a dit tout à l'heure que le Canada n'est pas un chef de file mondial. Nous sommes devenus un chef de file mondial en dressant potentiellement une liste des substances et en déterminant lesquelles sont lesquelles mais nous ne sommes pas un chef de file mondial en ce qui concerne leur élimination de l'environnement.
    C'est peut-être parce que j'ai dit que la tâche énorme de catégorisation n'était qu'une première étape. Être un chef de file mondial pendant la première étape n'est pas suffisant parce que ça ne mène pas le processus à son terme.
    Y a-t-il un autre pays qui fasse mieux pour contrôler les substances -- surtout les substances toxiques -- en ce moment?
    M. Cullen, je crois que vous avez parlé à un certain moment d'un rapport dans lequel on comparait les pays de l'OCDE sur le plan des émissions et selon lequel le Canada est près du dernier rang dans la plupart des domaines.
    Cela dit, nous constatons que l'Europe agit au sujet de diverses substances toxiques, comme celles utilisées dans la fabrication de produits cosmétiques et les phtalates. Elle adopte des règlements et, de notre côté, nous disons quelque chose comme : « Nous n'avons pas de règlement à l'heure actuelle étant donné que les entreprises finiront par les retirer volontairement du marché parce que l'Europe aura agi à leur sujet ».
    Je crois que cette tendance est de plus en plus répandue. Nous sommes très en retard et les autres font le travail pour nous. Nous disons : « Nous n'avons pas vraiment à agir maintenant parce que les entreprises vont de toute façon retirer ces produits à cause de l'harmonisation des marchés ». C'est une tendance continue qui n'est pas encourageante.
    Mme de Leon.
    J'ajoute simplement que, si vous examinez les propositions européennes concernant REACH, la possibilité existe que l'Europe s'attaque beaucoup plus rapidement à ce genre de questions. Il serait très regrettable que l'exercice de catégorisation nous fasse prendre du retard. Nous devrions être capables de faire au moins certains efforts pour combler ces lacunes dans nos démarches, surtout en ce qui concerne les toxines des produits de grande consommation.
    Je recommande aussi que l'on fasse des efforts pour chercher des produits de remplacement sûrs, ce qui ne se fait pas. Nous avons certainement soulevé le problème en ce qui concerne les décisions de catégorisation. Quand va-t-on lancer cette discussion, dans le processus?
(1045)
    M. Freeman.
    Je suis désolé de revenir avec PollutionWatch mais, selon une étude récente des pays de l'OCDE, le Canada est 29e sur 29 pays industrialisés en ce qui concerne la dispersion des composés organiques volatils, 27e sur 28 pour les oxydes de soufre, 26e sur 28 pour les oxydes d'azote, 28e sur 28 pour le monoxyde de carbone, 12e sur 14 pour les substances épuisant l'ozone, et 27e sur 29 pour les gaz à effet de serre.
    Si nous examinons la situation de notre plus grand partenaire commercial, par exemple autour des Grands Lacs, nous constatons que les usines canadiennes rejettent dans cette région 93 p. cent plus de polluants atmosphériques que leurs homologues américaines.
    Dans pratiquement tous les domaines, nous prenons de retard.
    Merci, monsieur Cullen.
    M. Harvey.

[Français]

    Il est parfois facile d'élargir le débat, mais je pense que le premier sujet de discussion a été l'utilisation du terme « toxique ». Nous avons différents points de vue, et personne ne lui donne la même signification. Nous n'arrivons pas à une conclusion, d'autant plus que si on parle de changements linguistiques, le mot « toxique » n'a peut-être pas le même sens en français qu'en anglais, en espagnol ou en chinois, par exemple lorsqu'on parle d'exportations.
    L'utilisation d'une définition, plutôt que d'un seul mot, vous poserait-elle problème, monsieur Freeman?

[Traduction]

    Je suis désolé.

[Français]

    Si on utilisait une définition plutôt que le mot « toxique », uniquement, cela poserait-il problème, selon vous? Je parle de la définition de l'article 64 où on indiquait ce qu'était la toxicité.

[Traduction]

    Je ne suis manifestement par un expert de la langue française. Je crois que les sens sont comparables ou similaires.
    Le mot « toxique » pourrait avoir un sens différent en français. Ça pourrait être différent en anglais ou dans n'importe quelle autre langue. Quand nous exportons, si nous inscrivons « toxique » sur les boîtes, ça n'a pas le même sens en Angleterre ou en Allemagne.
    Si nous utilisions la définition de l'article 64, dont on parlait il y a quelques minutes, serait-ce acceptable à vos yeux?
    Voulez-vous une réponse?
    Monsieur le président, je pense que c'est un domaine où l'on doit faire la part des choses. L'une des différences vient du fait que les autres pays dont nous parlons n'ont pas le même contexte constitutionnel que nous et, tout d'abord -- je sais bien que ce n'est qu'une expression -- nous n'indiquons pas sur les boîtes que les substances sont toxiques. Ce n'est pas ce qui est important à ce sujet, même si je sais qu'il y a des problèmes ailleurs pour les consommateurs. Je pense que le principal problème est de savoir comment faire le mieux possible dans le contexte canadien.
    M. Glover, vous avez un problème?
     Le comité sera peut-être heureux d'apprendre que le Canada est un chef de file mondial à de nombreux égards dans la mise en oeuvre d'un système internationalement harmonisé d'étiquetage et de classification. Nous avons adopté certains diagrammes pour éviter le genre de programmes dont le député vient de parler et nous travaillons activement avec nos partenaires internationaux pour nous assurer qu'il y aura un système mondial harmonisé.
    Je suis cependant d'accord avec ceux qui disent que, quand on parle de la LCPE et de l'adjectif « toxique », ça s'applique à notre situation intérieure. Au palier international, nous nous efforçons d'harmoniser de façon à éviter la confusion dont le député vient d'évoquer la possibilité, et qui existe certainement actuellement mais que nous essayons de corriger.
    M. Harvey, vous avez la parole.

[Français]

    On sait qu'indiquer le terme « toxique » sur un produit peut causer de graves problèmes pour l'exportation. Cela peut avoir des conséquences économiques, surtout pour ce qui est du potassium, un produit largement utilisé. D'ailleurs, je crois savoir que dans ce cas précis, il n'y a pas de produit de remplacement. Si j'ai bien compris, le problème relatif au potassium en est davantage un de gestion que d'utilisation. Est-ce exact?
(1050)

[Traduction]

    Ce problème est particulièrement pertinent dans le cas d'une substance naturelle. Le potassium qu'un pays importe du Canada est le même qu'il produit sur son propre territoire, s'il en produit, et il me semble assez simple de dire que du potassium, c'est du potassium. C'est ce que nous dirions à nos partenaires commerciaux -- notre potassium n'est pas moins sûr que le leur.
    M. Moffet, voulez-vous faire une remarque?
    Veuillez m'excuser, M. Graham, vous pouvez intervenir.
    Les problèmes phytosanitaires dans le domaine commercial sont légendaires et ce sont les plus difficiles à résoudre. Il y a un risque à inscrire « toxique » sur les produits que nous exportons. Il n'y a que quelques pays qui exportent du chlorure de potassium.
    Pour revenir à la question de M. Godfrey sur le fardeau imposé à l'industrie, quand je parle d'industrie, je parle de l'agriculture en général. En fin de compte, ce sont les agriculteurs produisant les aliments qui utilisent nos produits et ce sont eux qui seront obligés de prouver que leur système est sécuritaire et que leurs aliments sont sains. Voilà pourquoi l'étiquette « toxique » concernant les produits utilisés dans l'agriculture doit être utilisée avec une grande prudence et de manière judicieuse. Je ne pense pas que la manière dont la Loi a été appliquée -- et je crois que ceci est relié à la manière dont la Loi est rédigée et aux outils qui s'y trouvent -- l'a été en tenant compte des besoins de l'agriculture.
    Il y a au Canada des gens qui font la promotion de systèmes agricoles différents et, en fin de compte, ce sont les agriculteurs qui auront le fardeau d'expliquer au public pourquoi ils utilisent un produit que le gouvernement du Canada qualifie, selon l'expression de l'autre groupe, de produit toxique ou, selon le dictionnaire, de poison.
    Je ne pense pas que les Canadiens tiennent à ce qu'on leur dise à tort que les aliments qu'ils consomment ont été produits en utilisant des substances toxiques.
    Je vais demander à M. Scarpaleggia et à M. Vellacott de poser leurs questions dans l'espoir que nous pourrons obtenir les réponses et finir à temps.
    Merci, monsieur le président.
    Je reste sur le même sujet. Quand vous achetez un produit sur lequel on indique qu'il y a du potassium, je ne sache pas qu'il soit indiqué entre parenthèses qu'il est « toxique ». Comment le public saurait-il donc même qu'il est toxique selon la LCPE au Canada? Deuxièmement, l'alcool est toxique sous sa forme pure mais ça n'empêche pas les gens d'acheter de la bière et du whisky, par exemple. Vous pouvez répondre si vous voulez.
    Ma deuxième question concerne votre suggestion de cibler les effluents à la source au lieu d'utiliser une démarche générale comme la LCPE et la toxicité. Je crois que ça pourrait déboucher sur des conflits juridiques car je crois me souvenir qu'il y a à Victoria, par exemple, des gens qui disent que la ville n'a pas besoin d'usine de traitement des eaux usées alors que d'autres disent le contraire. Il y a quelques mois, si je me souviens bien, le ministre de l'Environnement, M. Dion, avait dit : « Si vous ne voulez rien faire, je vais imposer un règlement en vertu de la LCPE ».
    Je constate que vos propositions soulèvent des contradictions et des conflits juridiques. Vous pouvez peut-être répondre à ces deux questions.
    Puis-je demander à M. Vellacott de poser aussi sa question et nous aurons ainsi toutes les réponses en même temps?
    J'aimerais qu'il y ait un échange entre M. Lloyd et M. Freeman sur une remarque du représentant de Santé Canada, M. Glover.
    Cela me ramène à la remarque de M. Freeman disant que nous sommes actuellement synchronisés avec la communauté internationale en ce qui concerne la terminologie utilisée, etc. -- c'est du moins ce que j'ai compris -- et que, si nous enlevons le mot « toxique » et commençons à modifier cette nomenclature, nous ne serons pas synchronisés.
    En revanche, M. Lloyd, qui a été aux mêmes conférences, a insisté sur le fait qu'il y a actuellement des définitions différentes dans la communauté internationale -- c'est ce que j'ai compris -- et que nous ne sommes donc pas du tout synchronisés. Il y a donc là une contradiction. Peut-être vouliez-vous dire quelque chose de différent? Ensuite, M. Glover a dit que le Canada est le chef de file de l'harmonisation. Cela semble confirmer ce que disait M. Lloyd. J'aimerais avoir vos réactions à ces commentaires.
(1055)
    Je peux peut-être dire au comité que nous aurons aussi une journée internationale plus tard durant laquelle nous accueillerons des spécialistes internationaux à qui nous demanderons aussi d'interpréter le mot « toxique ».
    Allez-y, messieurs.
    Pour répondre à votre question secondaire au sujet des municipalités, je ne suis pas ici pour parler des municipalités mais je dis simplement que nous avons été étonnés d'entendre le gouvernement fédéral dire qu'il a trouvé difficile de gérer un problème situé au niveau municipal, puisque les municipalités sont des créations des provinces. Le gouvernement fédéral ne peut pas dire quoi faire à une municipalité. Seule la province peut le faire. Donc la LCPE est entrée en jeu.
    Mon argument est qu'il pourrait y avoir un conflit juridique. Quelqu'un pourrait dire que le gouvernement fédéral n'a pas le pouvoir de réglementer ces effluents.
    Bien sûr, et je comprends ça, mais quel est le vrai problème? Le problème est que je ne pense pas qu'il y ait à Victoria des gens qui pensent que leurs eaux usées ne devraient pas être traitées avant d'être rejetées dans l'océan. Bien au contraire. Le problème est que ça coûte très cher et qu'ils n'ont pas l'argent. Pourquoi le ministre fédéral de l'Environnement ne prend-il pas langue avec le ministre de l'Environnement de la Colombie-Britannique ou avec le ministre des Affaires municipales pour voir avec eux comment ces usines de traitement des eaux usées pourraient être financées? Voilà le problème.
    Dire aux gens de faire certaines choses quand ils n'ont pas l'argent nécessaire n'a pas grand sens.
    Mais l'industrie ne dit-elle pas toujours que c'est trop cher?
     Ce n'est pas l'industrie, ce sont les gens de Victoria qui payent la facture des eaux usées municipales.
    Pour ce qui est de l'industrie, c'est le contraire. Nous n'avons pas de problème à gérer nos produits. Nous n'avons pas de problème à améliorer cette gestion et les agriculteurs sont très désireux de s'assurer que leurs produits sont bien gérés sur le plan environnemental. Donc, l'étiquette « toxique  n'a aucun impact.
    Nous faisons déjà beaucoup d'efforts avec les gouvernements de toutes les provinces pour assurer la bonne gestion des éléments nutritifs, et nous savons parfaitement qu'ils doivent être gérés. La stigmatisation résultant de l'adjectif « toxique » n'a aucune incidence sur ce processus. Elle n'a rien changé.
    Je dis simplement qu'il y a dans la législation un décalage entre ce processus d'étiquetage et ce que le gouvernement s'efforce d'obtenir. Ce qu'il faut, c'est une approche beaucoup plus pragmatique.
    Cela dit, le problème, à nos yeux, est que la stigmatisation de nos produits est négative. Elle nuit à l'agriculture canadienne et j'estime que c'est ça qu'il faut changer.
    M. Freeman, vous vouliez faire une remarque?
    Oui, je veux répondre à la question de M. Vellacott et, peut-être, suggérer un certain terrain d'entente.
    Quand je disais qu'on trouve le mot « toxique » dans les conventions internationales et les régimes étrangers, je ne voulais pas dire que leur définition est identique à celle de la LCPE. Il y a des définitions différentes parce que la nature de l'adjectif est telle qu'il s'applique à des choses qui sont dangereuses ou sont des poisons. Il faut donc préciser la définition si l'on veut utiliser cet adjectif dans un dispositif de réglementation.
    Il y a effectivement des définitions différentes. La question est de savoir si elles vont carrément à l'encontre de l'interprétation commune de cet adjectif et s'il est approprié de dire que certains produits toxiques sont dangereux ou sont des poisons dans certains contextes.
    Eh bien, je crois que nous allons conclure là-dessus. L'autre comité attend notre départ.
    Je tiens à remercier nos témoins.
    Avant de lever la séance, M. Warawa veut dire un mot.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais annoncer au comité que la ministre participera à la séance du 5 octobre et répondra volontiers à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.