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S'il vous plaît, nous allons commencer.
J'aimerais tout d'abord présenter quelqu'un qui est nouveau dans cette salle, Justin Vaive. Il est là-bas, dans le coin. Justin est en formation parce qu'Eugène aurait apparemment l'intention de prendre sa retraite, un jour. Il est intéressant de souligner qu'Eugène avait été formé par le père de Justin qui travaille aujourd'hui pour le gouvernement de la Colombie-Britannique. On reste en famille.
Quoi qu'il en soit, bienvenue, Justin.
Je souhaite aussi la bienvenue à nos invités. J'aimerais lire ce document pour que les représentants des ministères sachent exactement quel est leur rôle ici. Le document a été préparé par Eugène et permettra de clarifier la situation pour tout le monde.
Des questions ont été posées au sujet du rôle des représentants des ministères, de la Santé et de l'Environnement, pendant ces audiences. Fondamentalement -- et ceci a été accepté par les ministères -- les lignes directrices pour les participants sont les suivantes.
Premièrement, les participants ne sont pas tenus de faire de déclaration préliminaire ou d'exposé car le temps est limité.
Deuxièmement, les participants peuvent intervenir, par l'intermédiaire de la présidence, pour éclaircir certaines questions ou s'ils jugent qu'une déclaration est fausse dans les faits. Ils peuvent donc apporter les éclaircissements.
Troisièmement, on s'attend à ce que les participants répondent au meilleur de leur capacité aux questions posées par les membres du Comité, verbalement ou par écrit.
Quatrièmement, le greffier enverra dans des délais convenables un préavis concernant les sujets devant être discutés à chaque séance. Les ministères auront ainsi amplement le temps de se préparer et de déterminer quels sont les fonctionnaires appropriés.
Y a-t-il des remarques? Êtes-vous satisfaits?
M. Cullen.
Je m'appelle Gordon Lloyd et je suis vice-président, Questions techniques, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques.
Je remercie le comité de m'offrir l'occasion de participer à cette table ronde pour discuter du terme «toxique » employé dans la LCPE. Je voudrais faire aussi quelques remarques sur la liste des substances commercialisées. Je pensais que cette question était à l'ordre du jour et je n'irai pas dans les détails. Je veux faire aussi quelques remarques sur la catégorisation de la liste intérieure des substances.
Quand je me suis présenté devant vous en mai dernier, j'ai mentionné que l'ACFP -- l'industrie des produits chimiques -- souhaitait une LCPE appuyant les mesures prises par ses membres pour améliorer continuellement la gestion de l'environnement et la santé, ce qui est le thème de notre initiative de gestion responsable. J'ai dit aussi à ce moment-là que la gestion responsable englobe une série d'initiatives lancées par l'ACFP dans les années 1980 pour répondre aux préoccupations du public au sujet des produits chimiques. Elle s'est maintenant étendue à l'échelle internationale.
Les questions sur lesquelles se penche le comité sont importantes pour atteindre les objectifs de mise en oeuvre efficace et réaliste d'une Loi aidant à renforcer ce que doivent faire nos membres pour améliorer leurs activités dans le cadre de la gestion responsable.
La question essentielle que je vais aborder aujourd'hui est la catégorisation de la liste intérieure des substances, domaine où je pense que le Canada est un chef de file mondial. Comme il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine, je pense qu'il est important d'en discuter au sein de ce comité, et je vais le faire après avoir abordé brièvement deux autres questions.
Premièrement, au sujet du terme « toxique », l'ACFP, lors de sa comparution de mai dernier, et d'autres organisations ont dit qu'il pose de sérieux problèmes à cause de son effet de stigmatisation. Je crois comprendre que la plupart des membres du comité conviennent qu'il faut résoudre cette question. Nous sommes heureux de voir qu'elle fait l'objet de votre examen.
Notre recommandation est très simple. Nous pensons qu'il faut remplacer « toxique », notamment dans les dispositions opérationnelles de la partie 5, par quelque chose comme « substance correspondant aux critères de l'article 64 ».
Le gouvernement précédent s'était déjà engagé dans cette voie dans son dernier projet de loi budgétaire. Il aurait conservé le mot « toxique » à l'article 65, concernant la quasi-élimination, mais ce mot se serait retrouvé sans définition. Je crois que cela aurait causé des problèmes fondamentaux dans l'application de la Loi puisque que la quasi-élimination serait passée d'une approche fondée sur le risque à une approche fondée sur le danger. Je serais très heureux de vous donner plus de détails sur notre position concernant la quasi-élimination mais je crois comprendre que vous avez prévu une table ronde distincte à ce sujet et c'est peut-être plutôt là qu'il faudra en parler.
Ce qui compte, c'est que remplacer l'adjectif « toxique » dans la LCPE par une expression comme « substance correspondant aux critères de l'article 64 » réglerait ce problème de stigmatisation. Cela préserverait l'intégrité de la Loi avec son approche fondée sur le risque et je pense -- ce qui est important, comme M. Cullen l'avait souligné l'autre fois -- que cela préserverait aussi la validité des pouvoirs constitutionnels.
Si je comprends bien, quand ils ont soulevé cette question l'autre fois, les avocats du ministère de la Justice s'étaient penchés sur plusieurs solutions. Quand ils ont proposé d'utiliser l'expression « correspondant aux critères de l'article 64 », je crois qu'ils l'ont fait parce qu'ils avaient conclu que cela ne minerait pas la validité constitutionnelle de la Loi. Et, comme je l'ai déjà dit, c'est très important pour nous.
Notre deuxième remarque -- et je serai bref à ce sujet -- concerne la liste dite « des substances commercialisées ». Il s'agit au fond des substances qui sont touchées par la Loi et, aussi, de ce que sont les nouvelles substances.
L'ACFP recommande de modifier la Loi afin que les substances de la liste des substances commercialisées et les substances similaires soient considérées comme des substances nouvelles, éventuellement en les ajoutant à la liste intérieure des substances ou par un autre mécanisme qui pourrait être formulé pour les reconnaître comme des substances existantes.
La liste intérieure des substances est une liste qui a été conçue pour identifier les substances utilisées commercialement au Canada lorsque l'obligation d'évaluer les nouvelles substances a été intégrée à la LCPE, et pour faire la distinction entre les substances existantes et les nouvelles. La liste des substances commercialisées est en fin de compte une liste contenant des substances qui étaient régies par la Loi sur les aliments et drogues. Comme ce sont des substances commercialisées, elles doivent être traitées comme des substances existantes mais, à cause de difficultés d'ordre technique reliées à la LCPE, elles ne peuvent l'être actuellement. Quoi qu'il en soit, ce ne sont manifestement pas de nouvelles substances.
Nous recommandons de modifier la LCPE afin de donner plus de souplesse au ministre au sujet du traitement des substances qui ne sont pas nouvelles mais sont plutôt des substances existantes. Et ceci pourrait s'appliquer à la liste des substances commercialisées ainsi que dans d'autres domaines. Si tel était le cas, l'approche retenue pour utiliser les outils de catégorisation appliqués à la LIS pourrait aussi être appliquée à ces autres substances. On pourrait identifier toutes les substances commercialisées qui ont besoin d'une attention et d'une gestion additionnelles, comme l'achèvement de la catégorisation l'a fait jusqu'à présent pour les substances qui sont maintenant dans la LIS.
Finalement, je voudrais aborder ce que j'estime être l'achèvement remarquable de l'initiative de catégorisation. La question qui se pose au comité -- les angles gouvernement-industrie -- est de savoir quoi faire des résultats de la catégorisation. Je crois que c'est ça la question fondamentale. La catégorisation s'est achevée la semaine dernière. Le gouvernement n'a pas encore publié tous les détails et mon interprétation n'est donc peut-être pas absolument exacte et à jour mais l'industrie et les associations environnementales ont bénéficié de séances d'information durant ce processus, parfois séparément et parfois ensemble, et je pense que ça a bien marché. Je crois que nous avons beaucoup appris sur le processus et sur la manière dont il doit fonctionner. Si je comprends bien, les 23 000 substances commercialisées au Canada et faisant partie de la LIS -- c'est un chiffre approximatif -- ont maintenant été examinées et triées. Elles ont fait l'objet d'un triage.
La conclusion de la catégorisation est que 19 000 substances environ ne sont pas susceptibles d'avoir des effets néfastes sur la population ou sur l'environnement, selon les connaissances actuelles. De la même façon que les dispositions de notification des substances nouvelles satisfont les Canadiens en ce qui concerne la sécurité des nouveaux produits chimiques, les Canadiens devraient conclure qu'il y a environ 19 000 substances qui peuvent être considérées comme étant « sûres » Certes, on hésite toujours à employer l'adjectif « sûr » dans ces discussions car rien n'est jamais absolument sûr, mais c'est une bonne manière d'envisager ces substances comme groupe.
Il reste donc environ 4 000 substances qui, après avoir été évaluées, seront probablement classés dans la catégorie des substances sûres ou, si l'on juge qu'elles sont toxiques ou qu'elles méritent l'adjectif qu'on appliquera dans la LCPE aux substances qui seront ajoutées à l'annexe 1, pourront faire l'objet d'une réglementation.
Sur la base des informations que nous avons recueillies durant l'été, nous croyons comprendre qu'il y a quelque 4 000 substances qui doivent encore être évaluées, dont un millier environ n'ont pas besoin d'études supplémentaires. On a conclu cette année qu'elles ne sont pas susceptibles de causer de problèmes à la population ou à l'environnement, ce qui veut dire qu'elles pourront être mises de côté ou être classées dans ce que j'appelle la catégorie des produits chimiques sûrs. Il s'ensuit qu'il restera environ 3 000 substances à évaluer.
Nous croyons comprendre que ceci se fera au moyen d'une liste de priorité continuellement mise à jour, ce qui est compréhensible. Tout ne peut pas être fait d'un seul coup. Ce sera une tâche très difficile. Un échéancier a été mis au point à l'échelle mondiale au moyen d'une entente à laquelle sont parvenus les chefs d'État à Johannesburg, en 2000, et il a été repris dans une déclaration de Dubaï sur la gestion sûre des produits chimiques. L'échéancier va jusqu'en 2020 et son objectif est d'assurer la production de produits chimiques minimisant les effets préjudiciables à la santé humaine et à l'environnement. C'est un échéancier serré, certes, mais la chose est faisable.
Il s'agit vraiment d'un problème mondial. Le Canada met l'accent sur la coopération internationale, ce que nous approuvons. Avec la catégorisation qu'il vient de terminer et l'évaluation de suivi à laquelle il procède actuellement, le Canada sera un chef de file mondial dans ce domaine et aura beaucoup à offrir aux États-Unis, à l'Europe et aux autres pays de l'OCDE. En contrepartie, ces pays ont beaucoup à nous apprendre. Les États-Unis et l'OCDE, en particulier, aidés par le Conseil international des associations chimiques, dont l'ACFP fait partie, a beaucoup travaillé sur les substances produites en grosse quantité, ce qui lui a permis de recueillir beaucoup de données qui pourraient être utiles au Canada dans son travail sur les résultats de la catégorisation.
Si l'Europe réussit à faire adopter sa législation REACH et à la mettre en application, et si celle-ci s'avère efficace malgré son caractère apparemment extrêmement complexe et lourd, nous espérons que le Canada pourra profiter d'une certaine coopération avec l'Europe, mais cela reste encore une inconnue. Nous avons lancé un projet qui est en cours de réalisation mais il y a eu en Europe un débat qui n'a pas encore produit de résultats.
J'ai aussi mentionné la contribution de l'industrie mondiale des produits chimiques à ce qui se fait dans le monde au sujet des produits fabriqués en grosse quantité. Nous nous sommes efforcés d'aller au-delà en formulant une stratégie mondiale des produits placés sous gestion responsable qui a été lancée à cette conférence de Dubaï où l'objectif de 2020 dont je parlais a été adopté. C'était il y a cinq ou six mois et nous continuons à en fixer les détails. Cela devrait être très utile à l'industrie canadienne et au gouvernement pour l'évaluation post-catégorisation.
J'ai réussi à mettre la main aujourd'hui seulement sur un document que nous avons produit et je vais le remettre au greffier pour qu'il soit distribué à tous les membres du comité. On y décrit cette initiative de manière plus détaillée et cela peut vous intéresser.
Que ferons-nous des résultats de la catégorisation? Selon l'ACFP, je crois, la réponse est de maintenir le cap avec le processus établi dans le cadre de la LCPE en 1999 et qu'Environnement Canada et Santé Canada peuvent suivre. Nous avons un programme ambitieux qui est à l'avant-garde sur le plan mondial et s'est avéré réaliste jusqu'à présent. L'objectif d'achèvement de la catégorisation le 14 septembre a été atteint mais cela ne représente qu'une partie de ce qu'exige la LCPE car il y a encore l'étape d'évaluation à terminer. Cette prochaine étape d'évaluation sera beaucoup plus difficile à réaliser mais nous pourrons tirer parti à ce sujet des partenariats, de l'impulsion acquise, de la coopération internationale, de l'autorité législative claire que nous avons et des outils scientifiques qui ont été élaborés dans le cadre de la catégorisation et qui ont fondé notre succès jusqu'à présent.
Je crois donc que le message que nous voulons adresser au comité est qu'il faut laisser avancer ce processus sans changer de cap. C'est quelque chose qui fonctionne bien et qui n'a pas à être modifié.
Merci beaucoup de votre attention. J'espère que ces quelques remarques vous seront utiles.
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Je m'appelle Clyde Graham et je suis vice-président, Stratégie et alliances, de l'Institut canadien des engrais.
Je remercie le comité de nous avoir invités à venir traiter de la question de la stigmatisation de l'adjectif « toxique ».
L'industrie canadienne des engrais contribue pour à peu près 6 milliards de dollars par an à l'économie du Canada et emploie environ 12 000 personnes. Ses ventes aux agriculteurs sont évaluées à environ 2,5 milliards de dollars par an. C'est la somme que les agriculteurs consacrent à l'achat d'engrais chaque année. En outre, c'est une industrie d'exportation importante puisque 75 p. cent de sa production totale est destinée à plus d'une quarantaine de pays.
Nos membres fabriquent des aliments pour les végétaux. Les engrais sont essentiels à l'agriculture canadienne et à la production d'aliments sains. Les engrais sont bénéfiques, sont sources de vie, existent dans la nature et ne sont pas foncièrement toxiques.
La LCPE, la loi fondamentale du Canada sur l'environnement, contient une liste de substances jugées toxiques. L'ammoniac dissout dans l'eau et l'ammoniac gazeux -- deux formes d'engrais azotés -- figurent sur la liste. Le chlorure de potassium, ou potasse, qui sert à saler les routes, a fait l'objet du processus d'inscription mais n'a finalement pas été inscrit.
Cela n'est pas cohérent. Il n'y a aucune raison de stigmatiser par l'adjectif « toxique » des produits qui donnent la vie, comme les engrais à l'ammoniac ou à la potasse, qui sont des éléments nutritifs pour les plantes et qui contribuent à la production d'aliments sains sur les fermes canadiennes. Comme beaucoup de produits bénéfiques, les engrais doivent être utilisés correctement pour respecter l'environnement mais ce ne sont pas foncièrement des produits toxiques.
L'Institut canadien des engrais a déjà présenté cet argument devant votre comité l'an dernier quand un amendement destiné à retirer l'adjectif « toxique » de la LCPE avait été inclus dans le projet de loi budgétaire. Lorsque ce comité a rejeté l'amendement, en grande mesure parce qu'il était relié au projet de l'ancien gouvernement de réglementer les gaz à effet de serre, les députés ont reconnu à l'unanimité dans le rapport du comité qu'il y avait là un problème. Voici un extrait de ce rapport :
Le Comité reconnaît qu’employer le terme « toxique » à l’égard de chaque substance qui respecte les critères énoncés à l’article 64 de la LCPE pose des problèmes. Désigner comme « toxiques » des substances telles que l’ammoniac dissous dans l'eau (qui figure dans la liste des substances toxiques) et le sel de voirie (qui correspond aux critères, mais ne figure pas dans la liste) sème la confusion chez les Canadiens, qui emploient ces produits dans des circonstances fort différentes, et peut donner injustement une mauvaise réputation à des produits fabriqués par l’industrie canadienne.
En mars 2005, le président du Conseil canadien des ministres de l'environnement, l'honorable Kerry Morash de la Nouvelle-Écosse, a écrit au ministre fédéral de l'Environnement Stéphane Dion et au ministre fédéral de la Santé Ujjal Dosanjh pour exposer la position des provinces sur la nécessité de réformer la LCPE dans le cadre de la révision quinquennale. L'une de leurs revendications explicites était d'utiliser un autre adjectif que « toxique » pour éviter les effets et les stigmatisations qui s'y rattachent.
Ce que veut savoir le public, c'est quelle est la source précise des problèmes environnementaux. La pollution résulte des activités humaines rejetant des produits et des substances dans l'environnement. Pour certaines substances, il n'y a aucun niveau de sécurité si elles sont libérées dans l'environnement. Dans beaucoup d'autres cas, la pollution provient du fait que des produits ou substances utiles ont été libérés dans l'environnement au mauvais endroit, au mauvais moment ou en trop grande concentration.
Produire des listes de substances dites toxiques est un exercice bureaucratique inutile. Stigmatiser inutilement des produits bénéfiques est antiproductif. Ce dont a besoin le Canada, c'est d'une loi mettant en oeuvre une stratégie environnementale axée sur l'identification de problèmes précis et encourageant à formuler et à mettre en oeuvre des plans de gestion économiquement et environnementalement durables. La planification environnementale des activités agricoles et l'adoption des meilleures pratiques de gestion, conformément au Cadre stratégique fédéral-provincial pour l'agriculture, sont de bons exemples à suivre.
Il était stérile pour Environnement Canada d'effectuer un examen long et coûteux pour voir si l'ammoniac devait figurer parmi les substances toxiques de l'annexe 1 de la LCPE. Les vrais objectifs doivent être des problèmes environnementaux très précis,comme les usines d'épuration municipales rejetant dans les rivières des eaux usées à forte concentration d'ammoniac aqueux qui tue les poissons. Il serait beaucoup plus logique d'identifier les sources précises de cette pollution et de collaborer avec les villes et les municipalités pour résoudre ce problème à la source. Bien que le contexte d'inscription de l'ammoniac dans la liste était énoncé dans les documents généraux accompagnant l'avis officiel, le potentiel de dommage à la réputation publique de nos produits est tout à fait réel.
Le gouvernement et l'industrie ont besoin d'un cadre pour dresser des plans de gestion conjointe de l'environnement qui soient efficaces, réalistes, publics et transparents. Un bon exemple en est donné par le plan de gestion du sel routier.
La LCPE instaure un climat de confrontation axé sur un étiquetage négatif qui entrave en fait la bonne gestion de l'environnement. Par exemple, en disant que des produits à usage commercial sont toxiques, on gaspille des ressources rares dans des conflits inutiles. Il serait beaucoup plus productif de mettre en oeuvre des systèmes de gestion de l'environnement en coopération dans l'intérêt de tous les Canadiens.
Nous sommes sérieusement préoccupés par notre aptitude à vendre sur les marchés étrangers si le gouvernement désigne sans raison nos produits comme étant toxiques. Par exemple, le Canada est le premier producteur mondial de potasse. Ce marché est très concurrentiel et de nombreux pays réglementent attentivement leurs systèmes de production agricole. Si le chlorure de potassium est désigné comme étant toxique, nos concurrents étrangers risquent d'essayer de décourager nos clients d'acheter notre potasse en disant que notre propre gouvernement la juge toxique. C'est une question très délicate dans le secteur alimentaire, qui a souvent été victime d'accusations non scientifiques influençant l'opinion publique et engendrant des barrières commerciales.
En dernière analyse, notre industrie a trois recommandations simples à formuler. Premièrement, ne plus dire que certains de nos produits sont toxiques. Deuxièmement, préciser clairement le contexte des cas dans lesquels une substance a besoin d'être gérée. Troisièmement, veiller à ce que la LCPE soit axée sur les situations où le besoin d'intervention est clairement nécessaire. Une réglementation conditionnelle constituerait une mauvaise bonne politique publique.
Le fait que la LCPE ait débouché sur la désignation de l'ammoniac comme produit toxique alors qu'il s'agit d'une substance qui est une source de vie et qui est essentielle à l'agriculture canadienne témoigne clairement de la nécessité de modifier la Loi.
Je voudrais ajouter que, même si notre principale préoccupation au sujet de la LCPE concerne l'utilisation de l'adjectif « toxique », notre expérience a été relativement positive en ce qui concerne la gestion souhaitée par le gouvernement, qui a été assurée volontairement et par le truchement du ministère de l'Agriculture. Nous avons d'excellentes relations sur ce dossier avec ce ministère et avec celui de l'Environnement. Notre problème concerne la stigmatisation des produits et votre comité peut nous aider à le résoudre.
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Merci, monsieur le président.
Les membres du comité savent que PollutionWatch est un projet conjoint de mon organisation, l'Association canadienne du droit de l'environnement, et de Environmental Defence, et nos rôles respectifs sont précisés au début de notre mémoire. Je dirai simplement que nos organisations ont participé activement au processus de catégorisation des substances depuis 1999, lorsqu'il a débuté, et que les associations écologiques ont contribué à obtenir le degré de participation qui a permis de le faire avancer.
Il va sans dire que nous pensons que les résultats sont très importants, tout comme ce qu'on en fera, et nous préciserons notre pensée à ce sujet dans un instant.
Je dois dire dès le départ que nous tenons à réfuter le plus vigoureusement possible certain des postulats énoncés par M. Graham et M. Llyod. Toutefois, comme nous n'en aurons pas le temps pendant notre déclaration liminaire, j'espère que vous poserez des questions à ce sujet et que nous aurons l'occasion d'y répondre.
Le reste de notre exposé sera présenté par ma collègue, Fe de Leon, qui va discuter de son expérience dans l'exercice de catégorisation, et par Aaron Freeeman, qui va traiter de la définition de l'adjectif « toxique ».
Je crois comprendre que deux représentants du Pembina Institute for Appropriate Development, ainsi que le professeur Lynda Collins, de la faculté de droit d'Ottawa, viendront mardi prochain devant votre comité pour parler de cet adjectif. Je vais essayer de ne pas leur voler la vedette.
En ce qui concerne la LIS, c'est Fe de Leon, qui fait des recherches pour l'ACDE, qui va vous en parler.
Bonjour tout le monde. Je vous remercie de me permettre de témoigner devant votre comité pour parler de mon expérience dans le processus de catégorisation de la LIS.
Comme l'a dit mon collègue, le processus de catégorisation a débuté en 1999. Le principal objectif de l'article 73 de la LCPE était d'aider le gouvernement à cerner les substances utilisées au Canada depuis plusieurs décennies ayant besoin d'une attention accrue. Le gouvernement avait constaté que, dans le processus d'examen de l'ancienne LCPE, la méthode d'évaluation et de gestion des substances n'était plus efficiente et qu'il fallait beaucoup de temps pour que des mesures soient prises sur les substances dangereuses. On disposait par ailleurs de très peu d'informations sur la toxicité de milliers de produits chimiques utilisés au Canada. Des études commençaient à montrer que certaines substances persistent pendant un certain temps dans l'environnement par un phénomène de bioaccumulation, et qu'il y a aussi de nombreux produits chimiques qui sont reliés à des troubles de la reproduction et des troubles du développement, ainsi que des problèmes respiratoires qui perturbent les fonctions hormonales. Les données de biosurveillance que nous avons vues au cours des derniers mois et années renforcent la nécessité de surveiller ces produits chimiques de beaucoup plus près.
La santé des enfants est devenue une question préoccupante du point de vue de l'exposition aux produits chimiques toxiques. Nous trouvons des produits chimiques dans les Grands Lacs et dans l'Arctique, c'est-à-dire là où il n'y a normalement pas d'activité industrielle.
L'adoption de mesures au sujet des substances a été lente au cours des deux dernières décennies et le gouvernement canadien n'a pas été en mesure de produire un rapport indiquant les progrès réalisés en matière de stratégies sur les toxines. Les efforts déployés par le gouvernement pour évaluer les produits chimiques n'ont pas été assez rapides et il faut maintenant prendre des mesures immédiates au sujet des produits les plus inquiétants.
Les produits chimiques qui préoccupaient le plus les décideurs et les parties prenantes sont les 23 000 produits figurant sur la liste intérieure des substances. Ce sont des produits qui sont commercialisés depuis des décennies et qui ont fait l'objet de rapports entre 1984 et 1986. Ils sont utilisés de toutes sortes de manières, notamment dans des applications industrielles, dans des travaux de recherche et de développement et comme intermédiaires ou catalyseurs pour la formation d'autres produits chimiques, et on les trouve en grand nombre dans des produits et articles d'usage quotidien.
En vertu de la LCPE, les substances de la LIS sont évaluées différemment de celles qui sont entrées sur le marché après 1986. Le processus de catégorisation est destiné à identifier les produits chimiques de la LIS qui appellent une attention accrue du gouvernement. Quand un produit est inscrit sur la LIS, on a très peu d'informations, comme je l'ai dit, notamment sur sa toxicité et sur les effets qu'il peut avoir sur la santé.
Le processus de catégorisation comporte des critères très précis. Les produits chimiques qui sont persistants, bioaccumulatifs ou foncièrement toxiques, ou ceux qui posent les plus grands dangers sur le plan de la santé humaine et des organismes non humains, sont ceux qui font l'objet de la catégorisation. Sur la base de ces critères très restreints, le gouvernement, pendant le processus d'examen de sept ans, ne s'est pas efforcé d'obtenir de nouvelles données de toxicité pour prendre ses décisions de catégorisation. Malgré certaines de ces limites, le processus a permis d'identifier 4 000 produits chimiques exigeant l'attention du gouvernement. C'est un premier pas crucial. Ces chiffres sont très importants.
Comme ces substances ne sont pas connues comme ayant des propriétés explicitement dangereuses et qu'elles continuent d'être utilisées dans le commerce canadien, le défi, pour le gouvernement, sera de formuler une réponse adéquate aux résultats de la catégorisation. Les projets initiaux du gouvernement au sujet des 4 000 auront une incidence profonde sur la manière dont les produits chimiques seront évalués et gérés au Canada pendant des décennies. On peut sans doute affirmer que le processus de catégorisation place aujourd'hui le Canada à la croisée des chemins.
La LCPE prévoit certaines mesures bien précises à prendre après la catégorisation. Ainsi, plusieurs substances doivent faire l'objet d'une évaluation préalable des risques. La façon dont ces évaluations sont menées et les délais applicables soulèvent toutefois de nombreuses interrogations.
La LCPE comporte également un certain nombre d'outils de réglementation nécessaires pour assurer une protection efficace de l'environnement et de la population, notamment le pouvoir d'interdire et d'éliminer certains de ces produits chimiques.
Mon collègue, Hugh Benevides, va maintenant prendre quelques minutes pour exposer notre vision de la manière dont le gouvernement doit utiliser les résultats de la catégorisation.
Comme Fe et d'autres témoins l'ont dit, l'achèvement de l'exercice de catégorisation n'est pas un succès sans importance et il est tout à fait particulier au Canada. Toutefois, comme Fe l'a laissé entendre, ce n'est en réalité que le début d'un processus comportant encore des étapes importantes : poursuivre l'examen de ces substances puis prendre des mesures de réglementation à leur sujet.
Il y a dans notre document une très courte liste des mesures que nous réclamons au sujet de ces produits. Je ne vais pas dans les détails puisqu'ils sont précisés dans plusieurs de nos documents : dans un mémoire de PollutionWatch adressé à votre comité en juin dernier, ainsi que dans deux lettres -- trois, en fait -- la première envoyée en juin à deux ministres de la LCPE et aux sous-ministres, et la deuxième envoyée vendredi dernier aux deux mêmes ministres, ainsi qu'à votre comité au début de cette semaine. Je ne sais pas si elles ont été traduites et si vous les avez entre les mains. Quoi qu'il en soit, à part les mesures précises que nous réclamons, leur élément fondamental est qu'il est essentiel que la teneur des listes et les résultats de la catégorisation soient communiqués au public.
Par conséquent, nous demandons à votre comité d'écrire aux ministres pour leur demander quand ce sera fait, et pour leur demander de comparaître devant vous pour répondre à cette question. Comme l'a dit Fe, on n'a pas beaucoup de nouvelles données sur ces substances et il est temps de prendre des mesures concrètes.
Il y a d'autres recommandations plus précises que vous verrez dans la lettre que nous vous avons envoyée ainsi que dans le texte de notre mémoire.
Je voudrais parler brièvement de l'utilisation de l'adjectif « toxique » et des préoccupations exprimées à ce sujet par d'autres témoins.
Je pense qu'il est important de comprendre d'abord le sens de l'adjectif « toxique » à la fois dans le contexte de la LCPE et de manière générale. Cet adjectif ne signifie pas seulement, comme d'aucuns l'affirment, que quelque chose est un poison grave pour l'être humain. Cette définition limitée ne concorderait pas avec sa définition scientifique ni avec son sens courant pour le public. La préoccupation de l'industrie semble supposer que l'adjectif « toxique » ne concerne que les cas graves touchant la santé humaine alors qu'une substance peut aussi être toxique pour l'environnement, comme c'est le cas de plusieurs des produits donnés en exemple par l'industrie. L'adjectif peut aussi être relié à la santé humaine par le truchement de l'environnement, comme ce serait le cas, par exemple, d'une substance persistante et bioaccumulative.
La position de l'industrie semble faire fi du fait que la toxicité dépend de la dose. L'adjectif « toxique » tel qu'il est employé dans la LCPE s'applique à toute une série de substances qui, selon la définition de l'industrie de ce qui est dangereux ou un poison, sont effectivement toxiques dans certains contextes. C'est pour ces raisons qu'il est tout à fait légitime d'utiliser l'adjectif « toxique » dans l'approche de réglementation de la LCPE.
Deuxièmement, il y a de bonnes raisons de politique pour maintenir la désignation toxique. Il existe des substances actuellement gérées en vertu de la LCPE qui sont réglementées depuis plus de trois décennies -- par exemple, les BPC. Ces substances, ainsi que d'autres réglementées plus récemment -- PERC, TCE, chlorure de vinyle, etc. -- figurent dans la liste des substances toxiques et sont aussi assujetties à la politique de gestion des substances toxiques du gouvernement du Canada qui reste la politique de réglementation fondamentale des substances dangereuses.
Au plan international, toxique est l'adjectif utilisé pour décrire les substances réglementées en vertu d'ententes auxquelles le Canada est partie, comme la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, la Convention de Rotterdam sur les pesticides et les produits chimiques dangereux, et Agenda 21 adopté lors du Sommet de la Terre de 1992. Qualifier ces substances toxiques d'autre chose provoquerait un décalage entre la LCPE et les régimes administratifs et réglementaires associés pour gérer ces substances, au Canada et internationalement.
Finalement, dans l'esprit du public, chacun comprend, même si ce n'est que dans son subconscient, que les substances toxiques font partie des plus dangereuses. Chacun s'attend donc à ce que le gouvernement y réagisse de manière adéquate, et éliminer ou affaiblir l'adjectif réduirait le souci de les réglementer de manière adéquate.
L'autre question est de savoir si affaiblir l'adjectif toxique menacerait la constitutionnalité de la LCPE. Notre position est qu'il est bien établi que la LCPE possède le pouvoir constitutionnel nécessaire pour réglementer les substances nuisant à l'environnement. Toutefois, considérant l'historique de cette Loi et d'autres lois environnementales, il est quasiment inévitable qu'il y aura contestation au titre de la Constitution si l'on offre la moindre ouverture. Je crois qu'un tel défi échouerait mais il pourrait facilement emporter le gouvernement fédéral et d'autres parties dans des batailles juridiques longues et coûteuses, ce qui exigerait des ressources qui seraient bien mieux utilisées à assurer la bonne application de la Loi.
Si l'on modifie l'adjectif « toxique », je crois que le risque de telles poursuites sera élevé. J'invite à cet égard le comité à se pencher sur l'arrêt de la Cour suprême au sujet d'Hydro-Québec, qui est le plus important dans ce domaine. À cette occasion, la Cour a jugé que les dispositions réglementaires de la LCPE relèvent de la compétence du gouvernement fédéral. Si la décision avait été différente et avait confirmé les décisions des tribunaux inférieurs, les dispositions de réglementation qui constituent l'assise de l'efficacité de la LCPE auraient probablement été invalidées.
Vous trouverez plus de détails sur cet arrêt dans mon mémoire mais il est absolument clair que « toxique » était l'une des raisons pour lesquelles la Cour a jugé que le gouvernement fédéral pouvait légitimement user de son pouvoir de droit pénal pour appliquer la LCPE. La Cour s'est fondée sur des précédents canadiens et internationaux concernant les substances et les régimes de gestion des substances toxiques et il est clair qu'elle a attaché beaucoup d'importance dans son arrêt au fait que la Loi concerne des substances qui sont jugées toxiques. En termes simples, elle a conclu que la Loi est constitutionnellement valide parce qu'elle porte sur des choses qui sont toxiques -- pas n'importe quelles choses mais des choses toxiques.
Les juges dissidents ont également exprimé une opinion sur l'adjectif « toxique ». En bref, si cet adjectif n'avait pas été présent dans la LCPE pour en préciser le sens, cela aurait pu élargir la portée de la Loi et, peut-être, renforcer l'opinion minoritaire qu'elle était inconstitutionnelle.
Au sujet d'un autre argument présenté plus tôt et voulant que l'adjectif « toxique » contient à la fois un élément de santé humaine et un élément environnemental, le juge La Forest a souligné dans l'arrêt d'Hydro-Québec l'importance de réduire la pollution pour préserver la santé humaine mais aussi pour protéger l'environnement. Il a également abordé dans son arrêt la question du dosage en disant que la quantité, la concentration ou l'état peuvent rendre une substance toxique.
L'arrêt d'Hydro-Québec a réglé la question de la constitutionnalité de cette partie de la LCPE. Il convient de se demander si l'on devrait ouvrir la porte à un autre défi constitutionnel qui pourrait facilement entraver la mise en application de la Loi pendant des années.
Pour toutes ces raisons, je dis à votre comité qu'il est à la fois inutile et dangereux d'éliminer ou de modifier l'adjectif « toxique » de la LCPE. La meilleure manière de répondre aux préoccupations de l'industrie serait de communiquer efficacement avec le public sur la nature et l'usage des substances mises sur le marché, et d'assurer une application juste et efficiente de la LCPE.
Je vous remercie de votre attention.
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C'est une question intéressante. À cette étape, il n'y a probablement pas de coût que l'on puisse mesurer, si ce n'est pour dire que notre industrie a maintenant le fardeau de venir devant le comité pour traiter de ces questions de manière continue, et de communiquer de la même manière avec le public lorsque des préoccupations apparaissent sur des choses telles que les aliments biologiques.
En qualifiant nos produits de « toxiques », on impose à notre industrie le fardeau de démontrer qu'ils sont sûrs, utiles, etc. Tant que cette stigmatisation existera, nous serons obligés par le gouvernement de défendre la réputation de nos produits.
Je voudrais parler de la différence entre la stigmatisation et sa gestion. Pendant l'établissement de la liste, le gouvernement n'est jamais venu nous dire : « Nous voulons inscrire vos produits sur la liste des produits toxiques de la LCPE parce que vous ne les gérez pas correctement et qu'il y a des problèmes dans l'agriculture à cause de cela -- parce que nous voulons que vous fassiez quelque chose de différent ».
Voilà le problème fondamental. Que veut-on que l'on fasse d'autre quand on dit que l'ammoniac est toxique? Rien. Une fois que la stigmatisation existe, on ne nous demande pas de faire autre chose que ce que nous faisons déjà. Ça semble être un simple exercice théorique.
J'aimerais dire en ce qui concerne cette question de validité constitutionnelle que la manière dont devrait normalement fonctionner une fédération, lorsqu'un tel problème apparaît, par exemple un problème de gestion des eaux usées, qu'il ne me semble pas très productif pour le gouvernement fédéral d'exercer sa compétence en utilisant le mot « toxique » devant les tribunaux. Si nos municipalités n'ont pas d'argent pour construire des usines de traitement des eaux usées, il serait bien préférable que le gouvernement lance un programme d'infrastructure pour leur donner les fonds nécessaires au lieu d'entreprendre un exercice scientifique pour dresser une liste. Personne ne veut que des eaux usées soient déversées dans nos rivières et l'on ferait donc mieux de s'attaquer au problème en coopération avec les provinces.
À mon avis, il s'agit dans bien des cas d'une compétence partagée mais je crois que le gouvernement fédéral choisit la solution de facilité en exerçant sa compétence plutôt qu'en travaillant en coopération avec les provinces. C'est ça qu'il faudrait faire pour l'environnement.
Les choses que je voulais aborder concernent non seulement cette question mais d'autres aussi. Je conviens certainement, tout d'abord, que le contexte, comme l'a dit Aaron, varie d'un usage à un autre. Le contexte détermine tout quand il s'agit de voir quand et comment on utilise l'ammoniac, par exemple.
Deuxièmement, je pense qu'il y a deux choses qui sont absolument justes et exactes dans ce qu'a dit M. Graham. La première est qu'il nous incombe, a-t-il dit, de faire face aux conséquences de l'inscription d'une substance pour toutes les bonnes raisons scientifiques et juridiques. C'est en effet à l'industrie qu'appartient le fardeau de manière légitime.
En outre, comme il l'a dit, le gouvernement ne les a jamais accusés de mauvaise gestion. C'est vrai -- et c'est aussi tout à fait légitime car le processus d'évaluation et d'examen avec ses conséquences en vertu de la LCPE concerne la substance même. Ce n'est pas une question de personnes agissant mal.
Voilà pourquoi je tiens à dire, finalement, qu'il est important de comprendre que la stigmatisation de l'adjectif toxique s'attache aux produits, pas aux gens.
Je demande au gouvernement de continuer à assurer cet équilibre entre toutes les raisons, les bonnes raisons exposées par Aaron, de poursuivre un processus très rigoureux et constitutionnellement valide et d'identifier ce qui est toxique, d'une part, et les mesures que doivent ensuite prendre les partisans du processus en réponse à ces résultats. Je crois que le régime est très bien équilibré, et c'est ce que reflète l'arrêt de la Cour suprême du Canada. Il a évolué au cours des années.
Si j'en crois le témoignage de M. Graham, les mots ont certainement un pouvoir énorme, en tout cas pour lui et pour les autres participants à ce processus.
L'adjectif « toxique » s'inscrit dans un régime global traitant des substances dangereuses. Si vous enlevez l'étiquette et parlez d'autre chose, ce sera malhonnête. Plus important encore, on suscitera la confusion au niveau réglementaire, au niveau administratif et au niveau de la communication publique car personne ne comprendra plus ce que vous faites ni comment votre action concorde avec d'autres programmes nationaux qui traitent de choses que nous disons toxiques et avec les accords et programmes internationaux qui traitent de choses que nous disons toxiques. Cela débouchera sur toutes sortes de problèmes concernant comment nous devons réagir à ces choses.
Je suis prêt à dire qu'aucune des substances dont nous avons parlé est réellement toxique. Elles sont toxiques dans des contextes particuliers. L'ammoniac est toxique dans un milieu aquatique, dans certaines conditions, mais l'ammoniac n'est pas toxique en permanence, dans tous les contextes et dans toutes les applications.
À mes yeux, la solution est de communiquer efficacement ce qu'on fait avec la substance. Je n'ai pas de preuves pour justifier ce que je vais dire mais je ne pense pas que la plupart des Canadiens considèrent que les engrais sont des toxines.
À part ça, quand M. Graham se plaint que le fardeau appartienne à l'industrie, je lui réponds que c'est tout à fait justifié quand on parle d'une substance qui est toxique dans certains contextes. J'estime que la réponse est de communiquer efficacement ce qu'est cette substance et ce qu'on peut en faire, et d'appliquer efficacement et de manière efficiente le régime de réglementation.
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Comme je n'ai pas encore pris la parole, je vais me présenter. Je m'appelle Kapil Khatter, je suis médecin de famille et je fais aussi partie de PollutionWatch.
Je voudrais dire deux choses. La première est que nous attendons avec impatience le plan d'action du gouvernement et que nous sommes conscients du travail remarquable qui a été fait sur la catégorisation, ce qui fait de nous un chef de file mondial. Je crois toutefois qu'il est important d'admettre que nous devons aussi devenir un chef de file mondial sur le contrôle concret des substances dangereuses, et je crois que nous n'en sommes pas encore là. Si nous voulons nous attaquer à l'augmentation des cancers, de l'asthme, etc., nous devrons devenir un chef de file mondial en matière de contrôle des substances dangereuses.
En ce qui concerne la manière dont nous qualifions les choses, je ne veux pas laisser passer l'affirmation de M. Lloyd selon qui les 19 000 substances non catégorisées sont des substances sûres. Ça me fait sourire car je me doutais, il y a sept ans, que c'est ce qui arriverait et qu'on dirait que les substances non catégorisées sont des substances sûres. Le gouvernement n'a jamais dit que ce sont des substances sûres. Ce sont simplement des substances ne correspondant pas à certains critères -- persistance, bioaccumulation, toxicité inhérente, grand volume de production et potentiel d'exposition.
Ce que nous savons, c'est qu'il y a d'autres possibilités dans la LCPE et on nous a toujours assuré qu'il y aurait ces autres possibilités pour traiter les 19 000 autres substances si l'on constatait qu'elles sont potentiellement toxiques mais ne correspondent pas exactement aux critères de la catégorisation. Quand nous parlons de renverser le fardeau de la preuve, il est important que l'on finisse par obtenir des données sur ces substances pour montrer qu'elles sont réellement sûres car certaines d'entre elles sont transportées dans des contenants portant une tête de mort. Il se trouve simplement qu'elles ne correspondent pas aux critères précis de la catégorisation.
Il importe de rester sceptique à l'égard de toutes les substances tant qu'on n'a pas de preuves suffisantes qu'elles sont sûres.