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Merci beaucoup. Merci de nous accueillir aujourd'hui pour parler de cet enjeu d'une très grande importance.
Je suis la présidente de la Fédération des femmes du Québec. Je suis accompagnée par Manon Monastesse, qui est la directrice d'un des groupes membres de la fédération, et on a voulu faire la présentation ensemble.
La Fédération des femmes du Québec a pour mandat de défendre les droits des femmes dans toutes les sphères de la vie sociale et politique. Nous représentons 175 organisations dans toutes les régions du Québec, y compris les régions rurales. Nous avons également 600 membres individuels.
Il y a maintenant plusieurs années, nous avons reçu le mandat, par la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence — c'est-à-dire la fondation mise sur pied par les familles des victimes du drame de Polytechnique —, de nous occuper de la commémoration le 6 décembre. Partout au Canada, des événements sont organisés, mais c'est nous qui avons reçu le mandat de la part de cette fondation pour organiser des événements de commémoration. Pour nous, la commémoration n'est pas là uniquement pour qu'on se souvienne des femmes qui sont tombées sous les balles du tueur il y a 20 ans, par exemple, mais pour qu'on se souvienne aussi des débats et des enjeux qui ont suivi et qui nous ont permis d'avoir un registre des armes à feu. Ce registre est en quelque sorte une réponse faisant suite à une campagne importante menée par des amis de victimes du 6 décembre.
Par conséquent, si nous intervenons ici aujourd'hui, au comité, c'est notamment dans l'esprit de maintenir le Registre canadien des armes à feu et de défendre ce testament et ces legs qui nous ont été apportés par les amis et la Fondation des victimes du 6 décembre contre la violence.
Vous pouvez imaginer que, dans la perspective des groupes de femmes, nous sommes particulièrement préoccupées par les aspects liés à la violence conjugale et à l'enregistrement des armes.
Je céderai donc tout de suite la parole à Manon Monastesse, qui travaille dans une fédération qui vient justement en aide aux femmes victimes de violence conjugale.
La fédération regroupe 41 maisons destinées aux femmes victimes de violence conjugale et en difficulté, au Québec. Il s'agit d'environ la moitié des maisons d'hébergement du Québec. Nous accueillons environ 10 000 femmes et enfants par année. La question de l'homicide conjugal, plus spécifiquement de l’uxoricide et de l’infanticide commis par un conjoint ou un ex-conjoint, est un enjeu majeur, au cœur de l'intervention auprès de la clientèle des maisons d'hébergement, que ce soit sur le plan de la sécurité ou de la prévention.
La Loi sur les armes à feu a permis d'importants progrès, notamment en diminuant le nombre d'agressions armées dans un contexte de violence conjugale ou familiale. Les carabines et les fusils de chasse sont les armes le plus souvent utilisées lors d'homicides conjugaux, pour la simple raison que les armes d'épaule sont celles qui sont le plus souvent présentes dans les foyers québécois, donc les plus facilement accessibles.
Vous comprendrez que, selon nous qui sommes signataires de ce mémoire qui a été déposé, le projet de loi envoie un dangereux message. Si les armes d'épaule n'ont pas besoin d'être enregistrées, est-ce à dire qu'elles ne constituent pas un réel danger? Trop d'exemples nous prouvent le contraire, notamment celui de Marie-Josée Desmeules, qui a été abattue par son mari au moyen de son arme de chasse en décembre 2009 à Saguenay. En plus d'augmenter le nombre de victimes, les carabines et les fusils de chasse augmentent le degré de létalité des attaques. Elles sont à prendre au sérieux, comme toutes les armes à feu.
Il faut comprendre que, depuis 1995 au Québec, la politique Prévenir, Dépister, Contrer la violence conjugale enjoint les policiers à assurer la sécurité et la protection des victimes ainsi que de leurs proches. On procède si possible à la saisie des armes à feu dès l'arrestation ou, à défaut de cela, on s'assure que les conditions de mise en liberté provisoire en prévoient la remise sans délai à un agent de la paix. Or c'est ce que font les policiers, au Québec. La première chose qu'ils font en arrivant sur les lieux, dans une situation de violence conjugale, est de vérifier si le conjoint ou l'ex-conjoint a des armes.
Même la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec, Mme Christine St-Pierre, a dit en entrevue que si Ottawa décidait de démanteler le registre national, la vie des policiers québécois et des victimes de violence conjugale serait mise en danger de façon non nécessaire. Selon nous, éliminer le registre ou le rendre inefficace a pour conséquence directe de priver les policiers d'un outil essentiel d'intervention et de prévention, et de mettre en péril la sécurité des femmes et des enfants que nous recevons dans nos maisons d'hébergement.
En terminant, nous voulons vous rappeler l'importance de l'actuel système de contrôle des armes par rapport à notre capacité d'aider les personnes victimes de violence conjugale. Nous vous demandons de rejeter ce projet de loi, notamment à cause des conséquences dangereuses qu'il y aurait sur la sécurité du public et, tout particulièrement, sur celle des femmes et des enfants que nous hébergeons.
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Bonjour, monsieur le président. Comment allez-vous aujourd'hui?
Mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous avoir invités à prendre la parole ici aujourd'hui.
Je m'appelle Charles Momy. Je suis président de l'Association canadienne des policiers. Je voudrais vous présenter, à ma droite, l'agente-détective Nadine Teeft, membre de la section de lutte contre le crime organisé, escouade contre les armes à feu et les gangs, au Service de police de Toronto, membre elle aussi de l'Association canadienne des policiers. Je vais présenter ma déclaration, ce qui devrait prendre cinq ou six minutes, monsieur le président, puis Nadine prendra les trois minutes qui restent environ pour terminer.
L'ACP est heureuse de pouvoir témoigner devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale à propos du projet de loi . Pour brosser le contexte, disons que l'Association canadienne des policiers est le porte-parole national de 41 000 membres du personnel policier travaillant en première ligne partout au Canada. Dans plus de 150 associations membres, notre association regroupe du personnel policier des services de police des villages et petites villes du Canada comme dans ceux des grandes villes. Cela comprend les services de police provinciaux, la GRC, la police des chemins de fer et les associations de policiers des premières nations.
Notre objectif consiste à travailler auprès des élus de tous les partis politiques à l'adoption de réformes utiles pour améliorer la sécurité de tous les Canadiens, et notamment celle de ceux qui ont juré de protéger nos collectivités. Depuis des décennies, les associations de policiers préconisent des réformes touchant notre système de justice au Canada. L'ACP a abattu un travail très positif à cet égard avec le gouvernement actuel, par l'appui et les idées qu'il a pu exprimer à propos de plusieurs projets de loi. De fait, durant la semaine, j'ai assisté à une table ronde organisée par Sécurité publique concernant la loi sur les empreintes génétiques, qui est un autre instrument dont disposent les policiers pour appréhender les criminels. Cependant, là où il s'agit du registre des armes d'épaule, nous faisons respectueusement valoir un avis différent sur la question.
Je ne suis pas là aujourd'hui pour submerger le comité d'informations statistiques. Les responsables du programme canadien des armes à feu de la GRC en ont déjà fourni une grande part, mais signalons que notre mémoire, que nous avons remis aux membres du comité, comporte des informations de cette nature.
En 2007, les responsables du programme canadien des armes à feu de la GRC ont sondé nos agents sur le terrain à propos de l'usage qu'ils font du registre canadien des armes à feu en direct. Au total, 56 services de police ont été sondés au Canada. Ce sont 408 agents de police qui ont participé à l'enquête dans l'ensemble; 262 d'entre eux étaient patrouilleurs, 64, enquêteurs criminels, et 82, superviseurs.
Voici les résultats de l'enquête: 92 p. 100 ont utilisé le registre canadien des armes à feu en direct, le RCAFED, 65 p. 100 ont dit l'utiliser quotidiennement; 73 p. 100 utilisent le RCAFED pour répondre aux signalements; 69 p. 100 ont affirmé que le RCAFED avait une incidence sur leur façon de réagir à un signalement; et, enfin, 74 p. 100 ont affirmé que l'usage du RCAFED est utile aux enquêtes et aux opérations policières.
Nous avons toujours affirmé que les services policiers utilisent le registre canadien des armes à feu. Est-ce que chaque policier qui se trouve au pays le consulte? Bien sûr que non. Sont-ils des milliers à le consulter? Il est tout à fait possible que ce soit le cas. Quoi qu'il en soit, nous pouvons dire avec certitude que, en 2009, il y a eu quatre millions de consultations du RCAFED, dont 45 p. 100 en lien automatique avec le CIPC. Les 55 p. 100 qui restent sont des interrogations particulières liées le plus souvent à des cas de violence conjugale.
Le registre canadien des armes à feu permet d'assurer la sécurité dans nos collectivités, point à la ligne. Je suis là pour affirmer que le registre des armes d'épaule représente un des nombreux instruments à la disposition des policiers. La banque de données génétiques et le registre des délinquants sexuels sont deux autres exemples. Tous les policiers utilisent-ils tous les instruments en question, le registre des délinquants sexuels ou la banque de données génétiques? Vraisemblablement, non. Le registre est un outil précieux qui est très utile aux enquêtes et à la prévention de la criminalité, et qui nous permet d'avoir des collectivités plus sûres. Permettra-t-il de résoudre chaque crime commis avec une arme à feu? Empêchera-t-il toute mort due à l'utilisation d'une arme à feu ou servira-t-il à résoudre toute affaire du genre? Bien sûr que non, tout comme le Code criminel n'empêche pas le meurtre ou l'agression sexuelle.
Comme les carabines et les fusils de chasse sont les armes à feu qu'on retrouve le plus souvent chez les gens, ce sont les armes à feu auxquelles les policiers ont le plus souvent affaire lorsqu'ils sont appelés à intervenir dans le cas d'une querelle de ménage ou d'un cas de violence conjugale. La semaine dernière, des policiers retraités de Winnipeg sont venus déclarer au comité — que la plupart des vrais criminels — les membres de gang et de groupes criminels organisés — n'enregistrent pas leurs armes à feu. Nous sommes d'accord avec eux.
Les usages que la police fait du registre sont nombreux; permettez-moi de vous citer quelques cas. Par exemple, ce sont des éléments d'information tirés du registre qui ont permis d'arrêter de condamner deux hommes pour complicité dans le meurtre de quatre agents de la GRC à Mayerthorpe, en Alberta, en 2005, grâce en particulier à une vérification portant sur une carabine dûment enregistrée trouvée sur les lieux du crime, une arme à feu sans restriction. L'élément d'information a été versé dans le dossier de la preuve qui a permis de condamner les deux hommes au bout du compte.
Le registre a-t-il sauvé la vie des quatre agents de la GRC en question? Non, ce n'est pas le cas, mais il a quand même permis de traduire les responsables en justice.
Deuxième exemple: un détachement de la GRC a recouru avec profit à l'ENSALA après avoir intercepté un suspect en possession de quatre armes d'épaule dans son véhicule. Comme le suspect répondait de façon évasive aux questions posées, les enquêteurs ont cru que les armes à feu étaient peut-être volées. L'ENSALA a effectué des vérifications dans le RCAFED et a déterminé que les quatre armes à feu étaient enregistrées au nom d'un résident de l'endroit et non pas de l'homme qui les avait en sa possession.
La police a communiqué avec le propriétaire enregistré, qui travaillait à l'extérieur de la ville. Il a déclaré que, à sa connaissance, toutes ses armes à feu étaient entreposées de manière sécuritaire dans sa maison. La police s'est rendue chez lui et a découvert des éléments de preuve confirmant qu'une personne avait pénétré par effraction dans la maison et que les 16 armes d'épaule qu'il possédait avaient été volées. Une enquête subséquente a permis de récupérer les 12 autres armes d'épaule qui se trouvaient entre les mains du suspect.
Où les armes à feu en question auraient-elles abouti si nous n'avions pas arrêté cet homme? Peut-être entre les mains de véritables criminels. Qu'est-ce que ces derniers auraient prévu en faire? Je vous laisse le soin de tirer vos propres conclusions sur ce point. Je pourrais continuer longtemps à donner des exemples de la façon dont les policiers consultent le registre des armes à feu, mais je me contenterai de vous exposer quelques faits.
Le registre des armes à feu est maintenant en place. Il n'en est pas aux étapes de la planification; nous n'en sommes pas au début du projet. Le registre est opérationnel. Il fonctionne, aujourd'hui même. Se prononcer en faveur du projet de loi C-391 n'aura pas pour effet de récupérer les sommes d'argent investies au départ dans la création du programme. On nous affirme sans cesse que l'élimination du registre des armes d'épaule signifierait pour les Canadiens une économie d'à peu près quatre millions de dollars par année.
En tant que policiers, nous assumons la responsabilité de la sécurité de nos collectivités sur le terrain même. La sécurité des enfants, des femmes et des hommes de tout le Canada représente toujours une question capitale dans notre travail. En outre, j'ai aussi la responsabilité d'assurer la sécurité de mes agents. À l'Association canadienne des policiers, la sécurité des collectivités et des policiers eux-mêmes motive notre opposition au projet de loi C-391. Beaucoup d'idées erronées ont circulé à propos de la question, qui a semé la perplexité chez les Canadiens, dont les politiciens et même nos membres, à l'occasion.
Permettez-moi de faire valoir un dernier point, tandis que j'arrive au terme de mon exposé. Comme bon nombre d'entre vous, j'ai un permis de conduire. Ce document me permet d'utiliser un véhicule, véhicule qui est immatriculé, donc enregistré. Pour vous donner un exemple rapidement, si je devais arrêter le président pour excès de vitesse après la séance d'aujourd'hui, je vous dirais que M. Breitkreuz serait appelé à produire son permis de conduire et je vous dirais aussi que son véhicule serait aussi immatriculé.
À moi qui suis policier, cela me permet de confirmer que le véhicule conduit par M. Breitkreuz lui appartient bel et bien ou encore qu'il s'agit d'un véhicule volé ou d'un véhicule qui sert à une autre fin que celle prévue ou qui a été utilisé pour une autre activité criminelle quelconque. Ce sont les exemples que j'emploie pour parler des permis et de l'enregistrement, qu'il s'agisse des véhicules que l'on trouve au pays ou des armes à feu qu'on trouve au pays.
Permettez-moi de céder la parole à ma collègue Nadine Teeft, qui vous présentera ses observations durant les quelques minutes à venir.
Je m'appelle Nadine Teeft et je suis membre du Service de police de Toronto depuis presque 20 ans. En ce moment, je fais partie de l'escouade intégrée contre les armes à feu et les gangs.
Si je regarde le nombre total d'armes à feu saisies par le Service de police de Toronto, toutes armes confondues, pour 2007, 2008 et 2009, je vois une constante: presque la moitié des armes à feu peuvent être retracées à des Canadiens qui les possédaient de façon légale avant qu'elles ne soient détournées vers le marché des armes à feu illicite et finissent par servir à commettre un acte criminel.
La proportion de 50 p. 100 ainsi notée d'une année à l'autre représente une statistique choquante. Pour contrer cette tendance, le registre constitue un instrument utile aux projets policiers visant à faire respecter la loi. L'utilisation d'armes à feu ayant d'abord appartenu légitimement à certaines personnes pour commettre des crimes au pays est ce qui a motivé au départ la création du registre des armes à feu au Canada.
L'idée consistait à croire que le fait d'attribuer des permis aux propriétaires d'armes à feu individuels aurait pour effet d'accroître leur responsabilité. Les propriétaires, croyait-on, se conformeraient à la réglementation sur l'entreposage sécuritaire des armes. Ainsi, ils seraient mieux à même de reconnaître les risques et responsabilités de celui qui possède une arme à feu et, étant connus des autorités, ils seraient dissuadés de refiler leurs armes à feu de propriété légitime à quelqu'un qui n'est pas autorisé à en faire usage ou à en être le propriétaire.
À titre de policière sur le terrain, je consulte le registre tous les jours. Démarche fructueuse qui m'a permis de saisir près de 1 600 armes à feu depuis un an et demi. Toutes les armes à feu en question étaient entre les mains de personnes qui n'étaient pas autorisées à les posséder; certaines d'entre elles provenaient de personnes qui n'avaient pas entreposé leur arme à feu de manière sécuritaire. Cela comprend des fusils d'assaut et des armes à feu sans restriction ou des armes d'épaule.
Le registre est un outil de travail utile et nécessaire qui prouve que le régime de permis à lui seul ne suffit pas à la tâche. J'utilise le registre comme source d'information servant à justifier des mandats que je rédige pour assurer la sécurité publique. Cela m'a permis de retirer plusieurs armes à feu de maisons des gens pour empêcher des cas de violence.
J'ai saisi les armes à feu de personnes faisant l'objet d'une ordonnance d'interdiction ou d'une révocation de permis pour des raisons liées à la santé mentale ou à des accusations au criminel. La consultation du registre était la seule façon de déterminer si la personne en question possédait une arme à feu.
À Toronto, l'arme d'épaule n'est peut-être pas l'arme de choix des gangs dont la violence fait les manchettes. Tout de même, ne vous méprenez pas: les habitants de la ville de Toronto ne meurent peut-être pas tous aux mains de tueurs maniant une arme d'épaule, mais ils sont certainement les victimes d'actes criminels commis par des personnes dont l'arme d'épaule est l'arme de choix. Depuis un an et demi à Toronto, des centaines de personnes ont été les victimes de vol à main armée dans les magasins du secteur du détail où le criminel utilisait une arme d'épaule.
Les carabines et les fusils de chasse...
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Les carabines et les fusils de chasse représentent une certaine proportion des armes à feu saisies en rapport avec des actes criminels. Chaque fusil tronçonné est à l'origine d'une arme à feu sans restriction. Les armes à feu, dont les carabines et fusils, peuvent servir à des fins légitimes, mais ils peuvent être mal utilisés aussi, et c'est souvent le cas.
Quelles que soient les raisons qui motivent leur choix, on ne peut passer sous silence le fait que les armes d'épaule servent à commettre des crimes violents et, pour tout à fait les mêmes raisons qui motivent l'existence du registre pour les armes à feu interdites et à autorisation restreinte, il devrait exister pour les armes à feu sans restriction.
Nous avons actuellement un seul et unique registre national des armes à feu, où figurent toutes les armes à feu. Une arme pourvue d'un canon peut être mortelle. Quelle que soit sa catégorie, une arme à feu demeure une arme à feu, et tant que nous ne pourrons dire que les armes d'épaule ne posent aucune menace pour la collectivité que nous servons, il est impératif que toutes les catégories d'armes à feu soient enregistrées au nom des personnes voulues, sans aucune exception.
J'ai grandi dans une famille de chasseurs, et la famille de mon mari est adepte du tir sportif. Je comprends la passion des gens, je ne m'oppose pas à la propriété légitime d'armes à feu et je ne cherche pas à faire des personnes qui possèdent légalement une arme à feu des criminels.
Chaque propriétaire d'arme à feu a légalement la responsabilité de se conformer aux exigences énoncées dans la Loi sur les armes à feu en s'assurant de posséder les permis nécessaires en rapport avec ses armes à feu et en entreposant celles-ci de manière sécuritaire à l'abri du vol et d'une mauvaise utilisation. Or, la seule façon de garantir la conformité avec les exigences est l'application de la loi.
L'utilisation des armes à feu à des fins criminelles constitue un problème grave. Le phénomène a un impact dévastateur sur la vie des victimes, des familles et des collectivités de tout le pays. Les incidents liés aux armes à feu sont devenus une occurrence presque quotidienne.
Je suis reconnaissante du fait d'avoir reçu une merveilleuse formation et d'avoir à ma disposition d'excellents outils qui me permettent de faire mon travail efficacement et de protéger la collectivité que je sers. J'en suis reconnaissante à la fin de chaque journée quand je rentre chez moi auprès de ma famille. La sécurité des policiers et la sécurité de tous les Canadiens seront compromises si le registre des armes à feu cesse d'inclure tous les renseignements sur les armes à feu concernant les titulaires de permis.
Je vous en prie: ne me retirez pas un outil de travail précieux que j'utilise tous les jours en tant que policière active sur le terrain. N'ouvrons pas la voie au marché des armes à feu illicites qui fera que des gens vont vendre ou donner leurs armes à feu à n'importe qui, en sachant que l'arme en question ne pourra jamais être retracée jusqu'à eux.
Merci.
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Merci de m'avoir invité aujourd'hui.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, c'est un honneur pour moi de défendre aujourd'hui devant le comité le projet de loi . Je crois comprendre que je suis le premier Autochtone à comparaître devant votre comité, ce qui est très décevant.
Monsieur le président, c'est depuis longtemps que nous nous opposons au registre des armes d'épaule au Yukon, voire dans le Nord dans son ensemble, depuis la création même du registre en 1993. La création du registre était prévue dans le projet de loi C-68, loi concernant les armes à feu et certaines autres armes. Le texte a reçu la sanction royale en 1995.
Je veux lire pour le compte rendu une motion présentée à l'assemblée législative du Yukon le 14 décembre 1994 par feu Johnny Abel, ex-député des Vuntut Gwitchin. La motion se lit comme suit:
[Traduction] La présente assemblée est d'avis que les modifications proposées de la loi fédérale sur les armes à feu devant être présentées au Parlement du Canada en février 1995 ne répondent pas aux besoins des Canadiens du Nord et ne correspondent pas à leur style de vie;
L'Assemblée législative du Yukon invite vivement le ministre fédéral de la Justice, l'honorable Allan Rock, à s'abstenir d'adopter les modifications proposées en la matière tant qu'elles ne satisfont pas aux besoins des Canadiens du Nord.
La motion a été adoptée à l'unanimité. Les paroles de M. Abel demeurent actuelles. Il a dit:
À Toronto, les gens ne vont pas chasser le rat, ni n'ont besoin d'aller chasser le caribou comme les gens d'Old Crow. S'ils ont faim, ils s'en vont simplement à la plus proche épicerie. L'épicerie des gens d'Old Crow, c'est la nature elle-même, notre territoire traditionnel: la plaine Old Crow.
Pour mes commettants, l'arme à feu est un outil. Il nous faut un fusil pour chasser et pour tirer de la nature les fruits qu'elle offre. Pour faire son travail, le menuisier a besoin d'outils comme le marteau et la scie. Pour faire son travail, le mécanicien a besoin d'outils comme la clé à molette et le tournevis.
Mes commettants sont des chasseurs. Nous avons besoin d'armes à feu pour faire notre travail.
Monsieur le président, depuis que le député Johnny Abel a présenté sa motion en 1994, l'assemblée législative du Yukon a accueilli d'autres motions opposées au registre des armes d'épaule, mais toujours en vain. Le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut — tout le Nord du Canada — sont unis dans leur appel en faveur de l'élimination du registre des armes d'épaule. Tandis que je vous parle aujourd'hui, les trois premiers ministres du Nord se réunissent à Whitehorse, et je suis sûr qu'ils discuteront de l'élimination du registre des armes d'épaule.
Monsieur le président, je suis là aujourd'hui pour parler au nom des Yukonnais et dire que le registre des armes d'épaule, qui est inutile et inefficace, doit toucher à sa fin. Le registre force des citoyens respectueux des lois à enregistrer leurs outils de travail, qui leur servent souvent à assumer leurs responsabilités quotidiennes dans la vie. Le registre cible les personnes qui vivent de la nature — les citoyens, éleveurs, agriculteurs, chasseurs et pourvoyeurs des premières nations — et non pas les criminels que l'on souhaite viser. L'enregistrement ne vaut que pour ceux qui respectent la loi. Les gens qui entendent commettre un crime à l'aide d'une arme à feu ne vont pas l'enregistrer.
La loi à l'origine du registre devait permettre, espérait-on, de réduire la criminalité violente. Habituellement, ce sont des armes de poing et d'autres armes passées en contrebande qui servent aux activités des organisations criminelles, notamment au trafic de la drogue, non pas les fusils de chasse. La violence conjugale, la violence envers les femmes est un problème dans notre société. Malheureusement, l'enregistrement des fusils de chasse ne modifiera pas cette dimension dysfonctionnelle de notre société. Dans la plupart des cas, c'est la force physique qui est employée pour violenter les femmes.
Au Canada, les meurtriers emploient le plus souvent une arme tranchante pour commettre leur crime. En 2008, c'est un couteau qui a servi contre 6 p. 100 des victimes des crimes violents. À titre de comparaison, 3 p. 100 des crimes violents ont été commis au moyen d'un bâton ou d'un instrument contondant, et 2 p. 100, au moyen d'une arme à feu. Les données proviennent d'un article de Statistique Canada intitulé Les couteaux et les crimes violents au Canada, 2008.
Je suis venu vous parler aujourd'hui de la vie dans le Nord canadien et du fait que les armes d'épaule y sont utilisées tous les jours par bon nombre de Yukonnais. Dans le Yukon rural, un fusil constitue peut-être la seule défense possible contre l'attaque de nombreux prédateurs. Le fusil est un outil dont se servent les citoyens ruraux pour se protéger quand ils sortent pour subvenir aux besoins de leur famille, faire de la prospection, pêcher et faire de la cueillette. Aux yeux de nombreux Yukonnais, le fusil est un moyen à employer pour nourrir ses enfants, les aînés et, dans certains cas, la collectivité.
Aux yeux de certains, l'enregistrement et le coût qu'il suppose entraîneront une détresse financière. Il est question de citoyens respectueux des lois qui ont utilisé leur fusil de manière sécuritaire toute leur vie durant.
J'aimerais maintenant vous faire part de mon expérience d'une vie passée à utiliser les armes d'épaule dans le territoire du Yukon.
On m'a inculqué la valeur d'un fusil à un très jeune âge, qu'il s'agisse d'un fusil de calibre .22 ou .30-06. On m'a appris à respecter et à honorer les fusils. J'ai chassé des lapins et des tétras à l'âge de neuf ans, et j'ai tué mon premier orignal à l'âge de 13 ans.
Monsieur le président, les gens des premières nations ont vécu sous l'emprise des gouvernements fédéraux pendant des centaines d'années — seulement les premières nations. Quel autre groupe est assujetti à une loi comme la Loi sur les Indiens?
Cela est garanti, nous avons le droit de chasser et de nourrir nos familles. Peut-on croire que ce système de registre a diminué ces droits-là? En tant qu'aîné d'une première nation, je crois que c'est bien le cas. Il est difficile pour les gens des premières nations de posséder une arme à feu. Je sais qu'il y a à Teslin, au Yukon, un aîné auquel on a retiré son fusil, et il lui a fallu deux ans de bataille devant les tribunaux pour le ravoir. On le lui a enlevé parce qu'il n'était pas enregistré. C'est incroyable. Qu'est-ce qui pourrait bien arriver maintenant?
Monsieur le président, le registre des armes d'épaule a même une incidence négative sur nos cérémonies traditionnelles. Par exemple, quand quelqu'un meurt, nous tenons un potlatch commémoratif un an plus tard. À l'occasion de cette cérémonie, nous offrons des cadeaux au clan adverse. Le cadeau le plus honorable qu'on puisse donner à cette cérémonie, c'est un fusil. Nous ne pouvons le faire et nous ne le faisons pas, nous ne le faisons plus, et cela blesse notre esprit. C'est encore une loi qui nous est imposée et qui mine notre fierté.
Mesdames et messieurs les membres du comité permanent, je dois vous demander pourquoi personne ne consulte les premières nations à propos de questions importantes comme celles-ci. Y a-t-il quelqu'un à Ottawa qui sait vraiment en quoi cela touche les gens des premières nations partout au Canada? C'est une autre façon de nous dénigrer, c'est presque comme si nous n'avions pas d'importance, comme si nous n'avions rien à dire dans cette histoire.
En parlant d'avoir quelque chose à dire, monsieur le président, j'ai aussi entendu le leader libéral à Ottawa dire à tous les membres de son parti de sauver le registre. Si tel est le cas, c'est non seulement les premières nations qui ne pourront dire ce qu'elles ont à dire, mais aussi la majorité des citoyens du Yukon. Nous n'avons qu'un porte-parole au Parlement, et il est membre du Parti libéral. Il faut se demander: et la démocratie dans tout cela?
Je pourrais vous en parler pendant des jours, mais le temps qui m'est alloué est limité. Tout de même, je vais résumer la situation comme suit. Premièrement, pour les membres des premières nations et d'autres personnes au Yukon, le fusil présente la valeur la plus élevée qui soit, c'est un objet précieux au point d'être une nécessité pour vivre des fruits de la terre, c'est plus précieux que les diamants ou l'or. Ensuite, on n'a pas consulté les premières nations pour savoir en quoi cette loi aurait une incidence sur nos droits en tant qu'Autochtones et nos cérémonies traditionnelles. Enfin, nous ne connaissons pas le montant d'argent qui a été consacré à cette loi jusqu'à maintenant. Nous avons entendu dire que ce sont des milliards de dollars. La seule réaction que nous puissions avoir, c'est de dire que nous aurions pu utiliser cet argent-là pour rénover nos maisons.
Selon nous, cette loi a été écrite pour les grandes villes du Sud, sans que personne ne réfléchisse à ceux qui vivent des fruits de la terre. Dans les familles des premières nations, les fusils sont passés à la génération suivante lorsque quelqu'un meurt. J'ai reçu un des fusils de mon père lorsqu'il est mort. Nous ne pouvons plus faire cela.
Notre seule voix au Yukon est mise en péril par la discipline de parti chez les libéraux. Je dis cela avec tout le respect que je dois à Larry, car, sincèrement, je crois qu'il appuierait ses commettants et voterait en faveur du projet de loi .
Mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui. Je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée de me faire entendre. Il a fallu beaucoup de courage pour venir ici aujourd'hui, car je ne vous connais pas et que vous êtes beaucoup plus puissants que moi, mais il fallait que je le fasse. Il y a un ami qui m'a approché à la cérémonie du potlatch il y a deux jours. Je le citerai: « Quand tu iras à Ottawa, tu diras à ces gens-là que ce ne sont pas les armes à feu qui tuent. Ce sont les maudits crétins qui pointent une arme à feu chargée sur quelqu'un et tirent sur la gâchette. »
Je demande respectueusement à tous les membres du comité, de tous les partis, d'appuyer le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu.
Merci beaucoup.
Monsieur le président, j'avais des documents à déposer, mais ils n'étaient pas traduits en français. Les membres du comité vont les recevoir d'ici quelques jours. Merci.
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Merci. J'apprécie de pouvoir être là. Il est assez génial d'être canadien et de participer à un exercice démocratique. C'est assez génial pour moi de pouvoir faire cela; je vous remercie donc de me permettre d'être là aujourd'hui.
Je veux parler un peu de la situation que nous voyons, moi et mes collègues policiers, dans la localité où nous travaillons. La ville d'Abbotsford compte 135 000 habitants et 210 policiers. Nous sommes situés à 70 kilomètres à l'est de Vancouver. C'est la première localité qui n'est pas vraiment une banlieue de Vancouver. Elle se trouve au milieu de la vallée du Fraser. Abbotsford, de fait, est la plus grande municipalité de la Colombie-Britannique dans le sens où elle occupe 140 milles carrés, dont les terres agricoles représentent une bonne part.
À propos de la question en jeu, en 2008, il y a eu 58 meurtres dans la vallée du Fraser et dans le Lower Mainland. En 2009, il y en a eu 56. C'est deux années-là, nous nous sommes retrouvés au beau milieu de guerres des gangs. De fait, Abbotsford s'est trouvé au cœur même de ces guerres de gang. Je suis encore à essayer d'élucider l'affaire, mais ce que je suppose, c'est que Vancouver a réussi à repousser certaines cultures illégales jusque dans la vallée, là où les terres agricoles se prêtent mieux à la dissimulation des bâtiments des grandes cultures illégales, de sorte que nous nous sommes retrouvés avec des centaines d'entre elles. En grandissant à Abbotsford, certains jeunes hommes ont évolué dans cette industrie qui leur a rapporté beaucoup d'argent, et les gangs ont prospéré. Je me suis joint au Service de police d'Abbotsford en tant que chef il y a deux ans de cela et j'essaie encore de comprendre comment cette localité agricole a fini par se retrouver au cœur de cette histoire.
Quoi qu'il en soit, en 2008 et encore une fois en 2009, dès que Statistique Canada présente la donnée, Abbotsford était et demeure la capitale du meurtre au Canada. Nous avons enregistré 11 meurtres l'an dernier, dans une petite localité qui compte 135 000 habitants. Deux de ces meurtres ne sont pas recensés chez nous à proprement parler, parce qu'ils ont été commis à 50 mètres de chez nous dans une réserve qui relève de la GRC, mais c'était deux garçons de l'une de nos écoles secondaires qui ont été tués; ils avaient 18 et 17 ans. Ce sont nos meurtres, ils font partie des 11 meurtres commis. Huit des meurtres en question sont liés à des histoires de gang et de drogues.
C'est donc notre grand problème. J'imagine que ce que viens de dire est assez évident, mais c'est quand même à cela que nous devons nous atteler. Nous venons de créer une escouade de lutte contre les gangs. Je passe beaucoup de temps dans les écoles à parler aux jeunes. Nous prenons toutes sortes de mesures de prévention, mais nous sommes en difficulté. Je viens de finir un dénombrement. Il y a 130 membres de gangs qui vivent dans la région d'Abbotsford ou qui y exercent leur métier. Nous en avons dressé la liste pour pouvoir les cibler.
Un des faits dont il faut tenir compte, c'est que les frères Bacon ont grandi à Abbotsford et y vivent toujours. Vous avez peut-être entendu ce nom-là. Ce sont les chefs du gang des Red Scorpion, qui est devenu le gang que les autres gangs voulaient éliminer, si bien qu'il y a beaucoup d'actes de violence qui ont fini par être commis sur notre territoire, même si ça s'inscrivait dans une lutte plus vaste.
Environ 90 p. 100 des armes à feu utilisées dans les fusillades sont des armes de poing ou des fusils d'assaut transportées illégalement depuis l'État de Washington, de l'autre côté de la frontière. Abbotsford est un de ces endroits où il y a long bout de frontière qui est laissé sans protection. Beaucoup de gens font de la randonnée dans les montagnes, si vous voulez, en traversant notamment ce que nous appelons l'« avenue zéro ». Ils traînent de la cocaïne, de la marijuana et des armes de poing. Nos difficultés ont surtout trait à l'utilisation du genre d'armes dont j'ai parlé, et je veux souligner cela aux membres du comité: voilà ce à quoi nous faisons vraiment face, du moins dans mon coin du pays.
C'est un problème dynamique qui gagne en ampleur. Ce n'est pas une situation statique, et je crois que c'est à cause des armes à feu au Canada que la guerre des gangs a été si violente.
Je suis devenu policier jeune, et ma femme ne s'est jamais inquiétée de moi. Mon jeune fils est policier à Vancouver, et ma femme me demande s'il est sain et sauf presque toutes les deux semaines. Je n'ai plus de réponse brillante à donner à cette question, étant donné qu'il tombe sur des armes de poing beaucoup plus souvent que je n'ai eu à le faire moi-même.
Que peut-on faire? Avec tout le respect que je vous dois, je vous dirai que je comprends l'attention portée à la question des armes d'épaule, dont je vais parler dans un instant, mais je crois que nous devons prendre du recul et élaborer un programme global de contrôle des armes à feu au Canada. Je crois que le moment est venu d'examiner la situation. À mon avis, nous sommes en difficulté. Cela a beaucoup à voir avec nos voisins américains. Cela à beaucoup à voir avec les problèmes de drogues avec lesquels nous nous débattons.
Je suis d'avis que nous avons adopté une mauvaise approche face aux armes de poing. Je porte sur moi une arme de poing. Elle est conçue pour une seule fin, soit de tirer sur un être humain. À mon avis, personne ne devrait porter une telle arme à moins que son métier consiste à protéger le public et qu'il soit essentiel qu'il puisse s'en servir. Je crois que ça devrait être interdit dans tous les cas. À propos de cette idée de tir sur cible de la part de propriétaires particuliers d'armes de poing, je crois que le Canada n'a pas adopté la bonne approche.
Les fusils d'assaut ne devraient jamais se retrouver entre les mains d'un particulier. Il n'y a tout simplement rien qui justifie cela. On peut bien créer, si on le veut, des régimes spéciaux pour qu'ils puissent être utilisés dans les clubs de tir, mais je pense qu'ils ne devraient jamais, au grand jamais, se retrouver dans la maison d'un particulier.
Je crois que nous devrions prendre des mesures pour simplifier les pouvoirs des services de police de façon à ce nous puissions être plus efficaces dans nos perquisitions et nos saisies, qu'il s'agisse des pouvoirs qui nous sont conférés par voie de mandat aux termes du Code criminel, qui sont démesurément complexes par rapport à ce qui se fait dans tous les autres pays industrialisés — les pouvoirs qui nous sont conférés par voie de mandat sont incroyablement complexes dans tous les secteurs — ou, aussi, les pouvoirs de perquisition sans mandat dont nous disposons.
La violence familiale est un enjeu énorme qui me préoccupe. C'est l'une de nos six priorités, dans notre collectivité. C'est un enjeu sur lequel nous mettons l'accent. C'est un véritable problème. L'une des choses que nous devrions faire à ce sujet, ce serait d'exercer un beaucoup plus grand contrôle sur les personnes qui détiennent un permis de possession et d'acquisition. Nous devrions en faire beaucoup plus.
J'ai un ami qui souhaitait obtenir un permis de possession et d'acquisition. Quelqu'un m'a appelé dans le cadre de la vérification de ses antécédents, et le commis qui était à l'autre bout du fil m'a posé des questions lamentables et fermées pour savoir qui était cette personne et si elle devrait ou non posséder un permis de possession et d'acquisition. Si l'un de mes enquêteurs devait un jour poser ce type de questions, je demanderais qu'il soit congédié. Le commis m'a simplement demandé: « Est-ce que cette personne a tendance à être violente? Si elle possédait une arme, pensez-vous qu'elle tuerait des gens? » Évidemment, je connaissais les bonnes réponses, celles que je devais donner si je voulais que mon ami obtienne un permis.
Ce n'est pas comme ça qu'on mène une entrevue. Ce n'est pas comme ça qu'on découvre les problèmes associés à une personne.
Il faudrait investir plus d'argent et avoir davantage recours à des spécialistes pour déterminer qui devrait posséder un permis de possession et d'acquisition. Il faudrait faire beaucoup plus de vérifications auprès de sources ouvertes sur Internet, par l'entremise des réseaux sociaux. S'il vous plaît, investissons davantage dans cette partie du système.
J'ai trouvé intéressant ce qu'a dit le détective de Toronto à propos de l'excellent travail qui est fait là-bas en ce qui concerne le contrôle des armes à feu et des enquêtes effectuées pour faire la chasse aux armes à feu. Cet important investissement a commencé à être effectué à Toronto à la suite du meurtre d'une jeune fille. J'aimerais beaucoup que de tels montants d'argent soient investis en Colombie-Britannique et dans le reste du Canada sans qu'il y ait un incident horrible comme élément déclencheur.
Nous sommes inondés par des armes à feu américaines de grande qualité et nous sommes incapables de mettre fin à ce flux. C'est difficile. Je sais que la frontière est ouverte, mais nous devons agir à ce sujet et effectuer des enquêtes pour partir à la recherche de ces armes à feu.
En Colombie-Britannique, il y a 909 000 armes à feu enregistrées, et 76 000 d'entre elles appartiennent à des personnes dont le permis de possession et d'acquisition est expiré. Nous ne nous occupons pas du système qui a été conçu pour permettre une surveillance de tout cela. Pourquoi donc?
Je crois que le registre existe pour les bonnes raisons, mais il y a tout de même deux problèmes importants au sujet du registre.
D'abord, je crois fermement que le registre est abominablement inexact. Je discute avec mes enquêteurs et avec mes spécialistes des armes à feu, et ce qu'ils me disent, l'un après l'autre, c'est que, chaque fois qu'ils ont essayé de l'utiliser, ils ont constaté que l'information qu'il contient n'est pas exacte. Je crois que la raison pour laquelle nous ne sommes pas partis à la recherche des personnes dont les permis sont expirés, dans ma province, c'est parce que, quand nous avons essayé de le faire, nous avons constaté que l'information concernant les permis expirés et les armes à feu se trouvant dans une résidence était erronée. Il y a là un problème. Je ne fais pas du tout confiance au système actuel.
À la suite d'une discussion que j'ai eue avec mes propres spécialistes, je crois — c'est une estimation complexe, comme celle que je pourrais faire concernant le nombre d'installations de culture qui existent à l'heure actuelle à Abbotsford — qu'il y a bien plus d'un million d'armes d'épaule, facilement, au Canada, qui ne sont pas inscrites de quelque façon que ce soit. Le système est un échec.
Ce que je constate, c'est donc que mes enquêteurs ne se fient pas vraiment au registre. Ils sont obligés de vérifier dans le système quand il y a un cas de violence familiale, parce que nous devons utiliser tous les outils à notre disposition, mais je crois qu'un système qui présente des failles, c'est encore pire que l'absence de système. Si nous ne pouvons pas corriger le problème associé au registre des armes d'épaule, je pense, en tout respect, qu'il faudrait le mettre au rebut.
L'autre chose que j'aimerais dire — et je n'aurais peut-être pas été au courant s'il n'y avait pas eu d'incident —, c'est que le recours au droit pénal pour garantir le contrôle des armes à feu s'est révélé un échec cuisant. Il y a maintenant, littéralement, des centaines de milliers de Canadiens qui commettent une infraction criminelle parce que leur arme n'a pas été enregistrée ou parce que leur permis de possession et d'acquisition est expiré. C'est là une façon horrible de miner l'efficacité d'un système très important dans notre pays. Je pense donc que, si nous voulons aller de l'avant, il faut aussi modifier ce système.
Voici, au fond, ce que je veux dire à propos du problème du registre des armes d'épaule comme élément faisant partie du système général qui vise à régler le problème du contrôle des armes à feu, problème auquel nous faisons vraiment face: nous devons conserver ce registre seulement si nous sommes en mesure de corriger ces lacunes. Il existe depuis longtemps, mais si nous n'allons pas nous assurer de posséder un registre des armes d'épaule exact dans ce pays, je pense que ça ne devrait pas être à nous de régler ce problème.
Je serais prêt à me fier au CIPC seulement si je pensais qu'il est efficace, et je serais prêt à me fier à ce registre seulement si je pensais qu'il est efficace.
Merci.
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Merci beaucoup de me donner l'occasion de venir vous rencontrer, à titre de représentant du Collège Dawson, pour discuter du contrôle des armes à feu. Notre comité a été mis sur pied quelques jours après l'attaque qui a eu lieu au Collège Dawson le 13 septembre 2006.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais dire quelque chose au député assis derrière le chef Bob Rich. J'ai écouté ses commentaires à propos de ses préoccupations à titre de représentant des indigènes du Nord, et j'éprouve beaucoup de sympathie pour ce qu'il nous a expliqué, à tous, aujourd'hui. Je dois dire, cependant, que ses propos illustrent bien le sentiment de victimisation qu'éprouvent les peuples du Nord, de même que les chasseurs et les agriculteurs.
Je crois que, si on s'attarde à ce sentiment de victimisation, on constate qu'il a beaucoup été encouragé par des porte-parole du gouvernement qui ont parlé, encore et encore, de l'argent qui est gaspillé et de milliards de dollars... pourtant, le registre a fait l'objet d'un examen de la part de la vérificatrice générale et d'autres personnes.
C'est vrai, la mise sur pied du registre a coûté extrêmement cher. C'est un problème que nous devrions laisser à d'autres; nous pouvons fouiller le passé et peut-être découvrir qui est à blâmer, mais le système existe maintenant. Sa mise sur pied ou son financement présentait peut-être des failles, et il est certain que son financement est insuffisant.
Le chef Bob Rich affirme qu'il ne peut appuyer le système si on ne peut pas le réparer. Évidemment, on peut réparer le système. Si on devait construire une maison formidable mais dépasser de beaucoup notre budget, quelle personne saine d'esprit irait dire que, comme la maison ne fonctionne pas bien — la plomberie fonctionne mal, l'électronique n'est pas très bonne, le toit fuit — il faudrait se débarrasser de la maison? Qui ferait appel à une telle logique?
Je trouve ce discours à propos de la victimisation très regrettable. S'il est si difficile d'utiliser le registre, c'est qu'il faut le modifier. J'ai un collègue qui m'a raconté que ça lui avait pris des mois pour faire enregistrer une arme. C'est là une difficulté. J'espère que le gouvernement ne privera pas le registre de financement et de personnel à un point tel que les gens continueront à se sentir victimisés.
Je vais maintenant parler du Collège Dawson. Vous êtes nombreux à être au courant de ce terrible incident qui est survenu en 2006. J'étais là, ce jour-là, et j'ai vu certains de ces visages que vous voyez sur cette photo. Le Collège Dawson compte environ 7 500 étudiants, enseignants et membres du personnel. Les étudiants ont fui l'immeuble, des coups de feu ont été entendus, et les policiers sont arrivés. Des armes étaient brandies un peu partout. C'était terrible de voir le regard des jeunes. C'est une chose qui ne devrait jamais arriver.
Ce jour-là, il s'est produit une véritable tragédie. Dix-neuf personnes ont été blessées et, malheureusement, l'une d'entre elles est décédée. Je connais les parents de la fille qui se trouve dans le cercueil. Si vous aviez pu les rencontrer et voir leur visage — et je suis sûr que bon nombre des professionnels ici présents les ont vus — ce sont des visages que vous ne voulez pas voir. Il n'y a pas de mots pour les décrire. Le désespoir et l'angoisse de ces personnes leur font vivre un cauchemar constant; pourtant, elles ont appuyé notre comité, elles en sont devenues membres et ont joué un rôle actif, et sont même venues à Ottawa en novembre 2006 pour participer à une conférence de presse nationale.
Pourquoi les parents de cette jeune fille sont-ils venus à Ottawa? Le registre n'a pas empêché la mort de leur fille, mais la perte qu'ils ont subie et la violence qui a eu lieu ce jour-là leur a permis de comprendre à quel point il était important que les Canadiens soient moins à risque d'être victimes d'un acte de violence commis à l'aide d'une arme à feu. C'est ce qui est important.
Trois jours après l'incident, le a dit, à la radio de CBC, que le registre des armes à feu n'avait pas empêché l'attaque au Collège Dawson. Je m'excuse, mais c'est une déclaration tout à fait ridicule. Je ne peux pas croire que le premier ministre a dit une telle chose.
Après avoir entendu ces propos, nous avons, des étudiants, des enseignants et moi, mis sur pied notre comité. Nous nous sommes penchés sur la question du contrôle des armes à feu au Canada. Nous avons écouté des professionnels qui avaient quelque chose à dire à ce sujet. J'ai communiqué avec l'ancien dirigeant de l'Association canadienne des chefs de police. J'ai communiqué avec les contrôleurs des armes à feu.
Toutes les personnes ici présentes qui ont une très vaste expérience de ce domaine ne disent pas qu'il faut se débarrasser du registre. Je ne pense pas que ce que dit le chef Bob Rich, c'est qu'il faut se débarrasser du registre; ce qu'il dit, c'est qu'il faut régler les problèmes qui y sont associés ou s'en débarrasser. C'est bouleversant de penser qu'un gouvernement envisagerait une telle chose. Un système sert à réglementer les huit millions d'armes qui y sont enregistrées, et nous voulons nous débarrasser de ce système?
Nous savons tous ce qui s'est passé avec la déréglementation au cours des dernières années. Vous vous souvenez de la débâcle financière aux États-Unis? C'était à cause d'une déréglementation. Vous vous souvenez de l'important déversement de pétrole dans le golfe? C'était à cause de la déréglementation. Et maintenant, nous parlons de déréglementation des armes à feu.
Ce ne sont pas des outils de jardinage. Ce ne sont pas des outils mécaniques. Ce sont des armes conçues pour lancer un projectile à grande vitesse vers une cible. Bon nombre d'entre elles, comme celle-ci, sont faites pour tuer des gens. La carabine que vous voyez sur cette image est une Beretta Cx4 Storm. Elle a été utilisée pour semer la destruction au Collège Dawson.
Quand Stockwell Day, qui était le ministre de la Sécurité publique à l'époque, s'est rendu au Collège Dawson, il a dit à notre comité que cette arme n'avait pas sa place entre les mains d'un civil. Il a fait cette déclaration en 2006. Nous lui avons demandé d'ajouter cette arme à la liste des armes prohibées. Il a répondu qu'il verrait ce qu'il peut faire. C'était il y a quatre ans, et l'arme n'est toujours pas sur la liste. La Ruger Mini-14, qui a été utilisée pour les meurtres commis à l'École Polytechnique n'y est pas non plus.
Je crois que le gouvernement s'est montré grandement irresponsable en ce qui concerne le contrôle des armes à feu au Canada. Il s'est passé une chose peu après ma rencontre avec Stockwell Day: il m'a envoyé une lettre parce que je lui avais demandé de l'information. Dès le premier paragraphe, il parlait de Gary Mauser. Gary Mauser est l'éminence grise derrière la tentative des Conservateurs d'éliminer le registre.
Voici une photo de Gary Mauser. Gary Mauser est professeur. Il fait beaucoup de recherches sur les armes à feu. Stockwell Day m'a envoyé de nombreux rapports de recherche rédigés par cet homme. Cet homme ne devrait pas être celui qui décidera de la politique du Parti conservateur en ce qui concerne le registre des armes d'épaule au Canada. Cet homme souhaite que les Canadiens aient le droit de porter des armes dissimulées, comme c'est le cas aux États-Unis. Est-ce que c'est ce que souhaitent les Canadiens? Si nous nous débarrassons du registre, ce sera peut-être la prochaine étape. Ce sera peut-être l'objet d'une autre politique conservatrice. Peut-être que les citoyens qualifiés devraient pouvoir porter une arme dissimulée sur eux.
J'ai une dernière photo à vous montrer. Pour certaines personnes, c'est à cela que ressemble le paradis. C'est une photo de Honolulu, à Hawaii. Pourquoi est-ce que je vous montre cette photo? Étonnamment, c'est l'un des États des États-Unis qui a un dossier admirable en ce qui concerne le contrôle des armes à feu. Hawaii est l'un des États américains qui compte un taux très faible de violence et d'homicides commis à l'aide d'une arme à feu. À Hawaii, toutes les armes doivent être enregistrées, y compris les carabines et les fusils de chasse. Cela mérite d'être souligné.
Mais même Hawaii n'a pas un aussi bon dossier que le Canada. Notre système est plutôt bon. Il n'est pas si mauvais. Le registre n'est pas le meilleur élément du système, ni un élément très important, mais il est essentiel. Tout doit être inclus.
J'encourage le gouvernement à laisser aller les choses. Cela va tout simplement trop loin.
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Je vais le faire, monsieur.
J'aimerais, au nom de l'Association canadienne des médecins d'urgence, vous remercier et remercier les membres du comité de nous avoir invités et de nous donner l'occasion de vous faire connaître un point de vue qui est, à notre avis, différent, sur toute cette question. Je vais faire les présentations. La Dre Carolyne Snider est médecin d'urgence et chef de l'équipe de traumatologie à l'hôpital St. Michael's à Toronto, en plus de faire de la recherche dans le domaine de la prévention des blessures.
Nous avons probablement des rôles un peu complémentaires en ce qui concerne les services d'urgence. Je suis un médecin de famille en région rurale qui dirige le service d'urgence dans une petite ville. Je ne pense pas que Carolyn possède d'armes, mais moi, j'en possède; vous obtiendrez donc, je crois, une combinaison intéressante de nos points de vue sur la médecine d'urgence et sur le contrôle des armes à feu au Canada.
L'ACMU est la société nationale spécialisée qui s'occupe de la médecine d'urgence. Elle représente plus de 1 800 médecins dans l'ensemble du pays qui ont un intérêt pour la médecine d'urgence ou qui la pratiquent. La médecine d'urgence a évolué, depuis sa reconnaissance comme spécialité il y a 30 ans. Au départ, elle se concentrait uniquement sur l'évaluation des patients gravement malades ou blessés, mais, au fil du temps, nous avons commencé à mettre l'accent de plus en plus sur des éléments comme la recherche, la conception de systèmes et la prévention des blessures. Les blessures demeurent une préoccupation importante pour notre association, mais, au sujet de cette préoccupation constante, nous nous sommes rendu compte que notre capacité collective de traiter une blessure à titre de fournisseurs de soins de santé au sein de notre économie actuelle a été grandement exagérée. C'est pourquoi la prévention revêt une importance encore plus grande pour nous.
Nos membres s'inquiètent toujours des blessures et des décès par balle, et c'était vrai dès 1994-1995, quand nous avons soutenu initialement le projet de loi C-68. Ils ont insisté pour que leurs associations professionnelles, que nous représentons, soutiennent vigoureusement les efforts de réduction du nombre tragique de victimes d'une mauvaise utilisation des armes à feu. Nous avons pris la position de tête dans les appels en faveur de la déclaration obligatoire des blessures par balle au Canada et nous soutenons toujours vigoureusement les clauses de la Loi sur le contrôle des armes à feu en tant qu'ensemble logique de règlements pour minimiser le risque de blessures et de décès reliés aux armes à feu au Canada.
Les blessures sont un enjeu important de sécurité publique. Elles sont la principale cause de décès chez les personnes âgées de 1 à 44 ans, et la plupart des décès attribuables à des blessures surviennent avant même que nous ayons eu l'occasion d'intervenir. Les blessures surviennent à la maison ou sur la route. Elles représentent un lourd fardeau économique en raison non seulement des coûts médicaux directs, mais aussi des coûts de réadaptation et de la souffrance humaine connexe.
Les médecins, les infirmiers et les infirmières d'urgence au Canada, tout comme les chirurgiens traumatologues, sont actifs pour sensibiliser les législateurs au rôle qu'ils peuvent jouer dans la prévention des blessures. Nous avons la ferme conviction que ces efforts de sensibilisation, jumelés à des lois comportant une conscience sociale, se traduiront par des changements sociétaux positifs, la prévention de blessures et des vies sauvées.
Nous vous demandons instamment de voir les clauses de la Loi sur les armes à feu dans leur forme actuelle non pas comme des éléments d'un projet de loi sur le contrôle des armes à feu, mais plutôt comme des éléments clés d'une loi socialement responsable sur la santé et la sécurité publique. On a constaté une réduction de la mortalité attribuable aux armes à feu au Canada depuis l'introduction de règlements sur les armes à feu en 1991 et en 1995, et nous ne voyons aucune raison majeure — aucune raison tout court, de fait, sur le plan de la sécurité publique — pour modifier en profondeur des règlements si efficaces.
Vous avez devant vous notre mémoire et notre document d'information. Je crois que nous connaissons tous les taux de possession d'armes au Canada. Il faut souligner que le taux de possession d'une arme à feu est plus élevé en régions rurales et, surtout, que les régions rurales, dont les territoires et les collectivités du Nord, sont celles où il y a le plus grand taux de décès dû à une arme à feu, généralement à une arme d'épaule.
Par exemple, en Ontario, en 2004-2005, on comptait 8,7 visites à l'urgence sur 100 000 qui étaient attribuables à une blessure par balle dans les collectivités du nord de la province, soit un nombre beaucoup plus élevé que la moyenne provinciale, qui était de 5,3 visites à l'urgence sur 100 000 dans le sud de l'Ontario.
Les armes à feu sont une cause importante de blessures et de décès au Canada. En 2005, 818 Canadiens ont été tués par l'emploi d'armes à feu et, malgré l'accent que les médias ont mis sur le crime de façon générale, 72 p. 100 de ces décès reliés à des armes à feu ont été des suicides; il s'agit donc en grande partie d'une question de prévention du suicide.
Malgré la réduction impressionnante de la mortalité associée à la Loi sur les armes à feu, comme nous en discuterons plus tard brièvement, il reste beaucoup de travail à abattre pour réduire ce coût social tragique et ce gaspillage financier inacceptable. Selon nous, ce n'est pas le moment de penser à réduire les efforts en vue d'un meilleur contrôle des armes à feu.
Le suicide est la deuxième cause de décès en importance au Canada pour les personnes âgées de 10 à 34 ans, des jeunes gens dans la fleur de l'âge, et la neuvième cause de mortalité dans l'ensemble. En 2005, les décès par balle représentaient 15 p. 100 des suicides et, comme je l'ai mentionné précédemment, 72 p. 100 des décès par suicide sont associés à des armes à feu.
La majorité des suicides ne sont pas, de fait, prémédités; il s'agit plutôt de gestes de nature impulsive. L'accès à une arme à feu facilite le geste de se suicider. Si vous placez un fusil sur votre tempe et que vous appuyez sur la gâchette, vous avez 96 p. 100 de risque de mourir. Si vous prenez une surdose de médicaments, les risques sont beaucoup moins importants puisqu'ils sont de moins de 5 p. 100. Les tentatives de suicide par balle sont particulièrement mortelles.
Notre examen de la documentation, qui a mené à la position de l'ACMU sur le contrôle des armes à feu, nous a permis de constater que les suicides par balle ont chuté de 46 p. 100 au Canada depuis l'adoption du projet de loi de Kim Campbell en 1991 et de 35 p. 100 depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les armes à feu en 1995; nous estimons donc que les éléments de preuve sont clairs: le contrôle des armes à feu au Canada, qui s'effectue de diverses manières, a eu l'effet cumulatif de réduire les suicides par armes à feu au pays.
Je vais aller un peu plus vite. En ce qui concerne les homicides entre conjoints, le fait qu'il y ait une arme à feu à la maison est reconnu comme un facteur de risque. Nous savons que le taux d'homicides de conjoints est plus élevé de cinq fois contre les femmes que contre les hommes. On a utilisé une carabine ou un fusil de chasse dans 62 p. 100 des cas. On constate aussi que l'utilisation d'armes à feu dans les homicides entre conjoints a chuté de 36 p. 100 depuis l'adoption de la Loi sur les armes à feu puisqu'on est passé de 25 victimes en 1995 à 9 en 2008.
Nous ne connaissons rien au contrôle du crime. Nous nous en remettons à nos amis des diverses associations de policiers, mais nous constatons tout de même avec intérêt que, en ce qui concerne les homicides, même si la violence attribuable aux gangs a augmenté à Toronto et à Abbotsford, le taux d'homicides par balle dans la société canadienne a, en fait, beaucoup diminué depuis l'adoption du projet de loi C-68.
Je vais passer par-dessus la question des blessures accidentelles et celles du paradigme de la prévention des blessures. Je vais me contenter de dire que, à notre avis, les législateurs de notre pays ont un rôle à jouer en ce qui concerne les projets de loi en matière de santé publique.
Est-ce que j'ai encore du temps?
La question qu'il faut se poser, c'est: quel est le rôle du registre? C'est, pour nous, une préoccupation non pas philosophique mais bien pratique.
À titre de médecin d'urgence, que ce soit dans la région rurale de Perth ou dans le centre-ville de Toronto, nous rencontrons fréquemment des personnes qui arrivent à l'urgence avec l'idée de se suicider ou qui menacent de le faire. Ce sont bien souvent les policiers qui les amènent. Il est très difficile de déterminer qui est à risque de se suicider et qui ne l'est pas. C'est vraiment une décision très délicate, et nous avons sur les épaules un grand poids clinique. Nous ne voulons pas nous tromper.
Pour nous, c'est très pratique de savoir s'il y a une arme au domicile de la personne puisque cela nous aide à évaluer le risque de mortalité de la méthode que pourrait employer la personne. Le fait de pouvoir compter sur les forces policières qui peuvent nous confirmer que l'arme qui se trouvait dans un domicile en a été retirée nous aide beaucoup à prendre une décision quand nous envisageons de libérer un patient.
C'est la même chose dans les cas de violence conjugale. Des femmes arrivent à l'urgence, souvent accompagnées de policiers, et, encore une fois, nous devons garantir la sécurité de cette personne. Devrions-nous la renvoyer chez elle? Les policiers peuvent accéder au registre pour savoir si le propriétaire de la maison possède des armes à feu, ce qui constitue un aspect important.
Il s'agit, pour nous, de préoccupations d'ordre pratique. Tout cela n'a rien de philosophique.
Notre association a transmis un message très clair au cours des 10 ou 15 dernières années. Elle a soutenu de façon constante un contrôle efficace des armes à feu, plus particulièrement le projet de loi C-68. Il est difficile d'extraire les dispositions de ce projet de loi qui ont eu, plus particulièrement, un effet positif, mais l'expression cumulative du projet de loi s'est révélée positive.
Nous vous demandons avec insistance de ne pas abolir le registre. À notre avis, il s'agit d'un outil important pour garantir la santé et la sécurité de tous les Canadiens.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Bienvenue à vous tous. Votre contribution, aujourd'hui, est importante pour ce qu'on tente de faire concernant le contrôle des armes à feu, qui est, quant à moi, quelque chose d'extrêmement important.
Je veux davantage me pencher sur le volet de la violence, entre autres la violence conjugale et la façon dont les policiers peuvent utiliser ce registre dans des situations de violence conjugale et de suicide. Comme vous venez de le dire, il y a une tendance à la réduction actuellement. Cela dit, on ne dit pas que ce n'est que grâce au registre, mais plutôt qu'il y a plusieurs outils parmi lesquels le registre est un des plus importants à être utilisé en fait d'outil de prévention. Le volet qu'on oublie souvent, soit l'aspect de la prévention, se construit grâce à ça et profite à tous ceux qui doivent utiliser ce registre.
Si le registre n'est pas tout à fait à jour, je pourrais me demander si ce n'est pas à cause des conservateurs et de l'amnistie qu'ils ont mise en avant, qui empêche les gens d'enregistrer leurs armes. Cependant, avec le temps, si on réussit à le conserver et à enlever cette amnistie, on pourrait contrôler toutes ces armes, surtout les armes d'épaule.
En fait, on peut sauver des vies dans les situations de violence conjugale. Lorsqu'il est question de suicide, on peut aller chercher des armes. En cas de violence conjugale, le travail des policiers est de savoir comment s'y prendre quand ils savent qu'il y a des armes dans la maison.
Donc, je vais commencer avec vous sur la question des suicides, puis celle de la violence conjugale et, enfin sur celle des policiers.
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Je vais répondre à une partie des questions qui ont été soulevées et je vais ensuite passer la parole à Mme Monastesse.
Nous constatons qu'au Québec, par exemple, il y a 15 personnes sur 100 000 dans les régions, comme la région de Montréal, qui sont tuées avec des armes à feu, alors que dans le Nord du Québec, dans les régions rurales, les communautés inuites, c'est 78 personnes sur 100 qui sont tuées avec des armes à feu.
Ce matin même, j'étais en réunion avec des groupes de femmes, notamment Pauktuutit, un groupe de femmes inuites qui disent que leur priorité ultime, c'est de lutter contre la violence faite aux femmes dans le Nord. On sait que la présence d'armes à feu dans la maison, lorsqu'il y a violence conjugale, est un immense facteur de risque.
Par ailleurs, je suis déjà allée dans le Nord, j'y ai passé un certain temps. J'ai énormément de respect pour la culture de chasse des Inuits. Je pense que c'est extrêmement important que la culture inuite puisse continuer à exister, que les Inuits puissent avoir accès à la chasse, à l'eau et à la terre, pour leur nourriture. Cela dit, tous les instruments internationaux disent qu'il n'y a pas de coutumes ou de traditions qui peuvent justifier la mise à l'écart de moyens de lutte contre la violence faite aux femmes.
Donc, en tout respect de cette culture, il y a des femmes du YWCA du Yukon qui nous indiquent que l'enjeu de la violence envers les femmes est non seulement un risque de mort, mais est aussi utilisé comme une menace dans les cas de violence conjugale.
Manon, aurais-tu quelque chose à ajouter?