Au nom des 3,2 millions de membres du Congrès du travail du Canada, je tiens à vous remercier de nous permettre de présenter notre avis sur le projet de loi , une loi qui abrogerait le registre des armes d'épaule.
Le CTC s'oppose au projet de loi C-391. Nos membres ont débattu la question du contrôle des armes à feu lors de nos congrès et les délégués ont appuyé diverses formes de contrôle des armes au Canada, ce qui nous a amenés à appuyer la création du registre des armes à feu en 1995.
Nous savons que le débat sur le contrôle des armes à feu et sur le registre des armes à feu peut aviver les passions, mais nous devons le replacer dans son contexte.
La grande majorité de Canadiens ne possèdent pas d'armes à feu. Tout comme en 1995, il y a aujourd'hui des raisons convaincantes qui militent en faveur d'un registre national des armes à feu: faire respecter les exigences en matière d'entreposage sûr, veiller à ce que les propriétaires d'armes à feu soient tenus de rendre compte de toutes les armes qu'ils possèdent, y compris les armes à feu sans restrictions dont les carabines et les fusils de chasse; obliger les propriétaires d'armes à feu à déclarer les armes manquantes ou volées; réduire le commerce illégal de carabines et de fusils de chasse; donner aux policiers et aux premiers intervenants des outils modernes pour protéger leur santé et leur sécurité et pour faciliter la prise de mesures préventives; retracer les armes volées jusqu'à leurs propriétaires légitimes.
Depuis la création du régime il y a 10 ans, les premiers intervenants et les policiers disent que ce régime est efficace et que la base de données est consultée des milliers de fois par jour par des policiers de tout le pays de sorte que ces détracteurs ne peuvent plus dire qu'il ne sert à rien.
Dans les cas de violence familiale ou mettant en danger la vie d'un enfant, les policiers et les travailleurs sociaux peuvent consulter le registre pour évaluer la situation dans laquelle ils devront intervenir, prendre des précautions et être prévenus d'avance de ce qui pourrait les attendre de l'autre côté de la porte. Je peux dire, en ma qualité d'ex-travailleuse sociale, que le registre m'aurait été très utile quand je faisais des interventions d'urgence.
Nous savons que les carabines et les fusils de chasse sont les armes que l'on trouve le plus fréquemment dans les résidences. Quand une arme se trouve sur les lieux, cela accroît de nombreux facteurs de risque que le registre permet d'atténuer puisqu'il donne aux premiers intervenants des renseignements essentiels: le nombre d'armes qui se trouvent dans la résidence et, ce qui est plus important, la nature de l'arme. Cela leur permet d'évaluer les risques qu'ils courent eux-mêmes et qui pèsent sur d'autres, particulièrement dans les cas de violence familiale.
Les carabines et les fusils de chasse sont les armes les plus souvent utilisées dans les cas de violence familiale. Ce sont les armes les plus souvent utilisées pour le suicide, particulièrement chez les jeunes, et ce sont les armes les plus souvent utilisées pour tuer des policiers.
Nous savons que dans un cas très médiatisé, une arme enregistrée laissée sur les lieux du meurtre de quatre agents de la GRC à Mayerthorpe, en Alberta, a pu être retracée jusqu'à son propriétaire grâce au registre. Le propriétaire a été reconnu coupable de complicité dans le meurtre de ces agents.
Le registre revêt nettement une grande importance dans le travail des forces policières et des premiers intervenants du pays. Nous savons que des erreurs ont été commises lors de la création du registre des armes d'épaule. La vérificatrice générale a fait état de dépassement de coûts en 2002 bien que la plupart des dépenses aient été engagées au titre de la mise en oeuvre des dispositions de la loi de 1995 relatives aux permis et non pas au titre du registre lui-même.
Il y a toujours des coûts imprévus quand l'on crée un nouveau programme, comme le gouvernement l'a appris récemment. Selon un article paru la semaine dernière dans le Globe and Mail, la nouvelle Loi du gouvernement fédéral sur l'adéquation de la peine et du crime coûtera aux provinces environ 90 millions de dollars sur les deux prochaines années et 2 milliards de dollars sur cinq ans, selon le ministre de la Justice Vic Toews, tandis que le directeur parlementaire du budget, Kevin Page, calcule pour sa part que les coûts pourraient se situer entre 7 et 10 milliards de dollars sur cinq ans.
Seul le temps nous le dira, mais que vous soyez d'avis que l'argent consacré à la mise en place du régime de permis et du registre des armes à feu a été de l'argent bien dépensé ou non, l'argent a été dépensé. Les coûts de fonctionnement actuels rapportent des dividendes, particulièrement en ce qui a trait à l'accès à la base de données que les policiers de tout le pays consultent des milliers de fois par jour.
La grande majorité des propriétaires d'armes à feu de ce pays sont respectueux de la loi. Ils continuent d'enregistrer leurs armes à feu malgré les efforts déployés par ce gouvernement au cours des dernières années pour rendre le registre inutile. Comme l'a dit un membre d'un syndicat affilié du CTC récemment lors du congrès de son syndicat qui débattait une résolution de soutien au registre des armes d'épaule — et je cite — « Je suis fier d'être chasseur et je suis fier d'enregistrer ma carabine. »
Comme de nombreuses personnes l'ont dit, l'enregistrement des armes à feu n'est pas une tâche lourde, surtout quand on la compare aux règlements auxquels doivent se conformer les propriétaires de véhicules. Il faut un permis pour conduire une voiture. Il faut renouveler son permis tous les ans. Dans de nombreuses provinces, vous devez faire vérifier les émissions de votre voiture avant de pouvoir renouveler votre permis. La loi vous oblige à porter votre ceinture de sécurité en voiture. Vous devez souscrire une assurance sans quoi vous ne pouvez pas conduire votre voiture. Dans certaines provinces, vous ne pouvez pas parler au téléphone cellulaire pendant que vous conduisez et dans d'autres provinces, vous devez acheter des pneus d'hiver et les installer sur votre voiture.
Par contraste, les propriétaires d'armes doivent détenir un permis. Le permis peut être révoqué si vous ne respectez pas les règles de prudence. Il faut enregistrer les armes à feu quand on les achète. Il faut les entreposer de façon sûre.
En 1995, une majorité de Canadiens se sont dits en faveur d'une loi encore plus stricte sur le contrôle des armes à feu que la loi en vigueur. Il en est de même aujourd'hui. Nos propres sondages réalisés par Vector Research en janvier de cette année continuent de démontrer que la majorité des Canadiens souhaitent l'interdiction totale des armes à feu. La Loi sur les armes à feu de 1995 est un exemple de compromis typiquement canadien, qui fait l'équilibre entre les intérêts de ceux qui préconisent des contrôles plus stricts sur les armes à feu et ceux qui préfèrent moins de restrictions.
Le projet de loi élimine cet équilibre, il élimine l'outil utilisé par les policiers pour travailler en toute sécurité, élimine l'outil qui garantit la sécurité de nos collectivités et qui nous a aidés à réduire le nombre de morts par carabines et fusils de chasse.
Patty Ducharme utilisera le temps qui reste.
L'Alliance de la Fonction publique du Canada représente 172 000 travailleurs et travailleuses d'un océan à l'autre, y compris les 238 fonctionnaires qui travaillent pour le registre fédéral des armes à feu au Nouveau-Brunswick et nous sommes fiers d'être membres du Congrès du travail du Canada.
Notre syndicat appuie le contrôle des armes à feu. Il appuie aussi le registre des armes à feu qui s'est avéré important et qui a fait ses preuves. L'abrogation du registre des armes d'épaule ne sert à rien et nous pressons le comité de voter contre le projet de loi et de rejeter les amendements qu'il propose pour les raisons qui suivent.
Nous vous avons remis un mémoire écrit et je vais donc vous en présenter les points saillants.
Nous croyons que le registre des armes d'épaule est un outil utile dans la lutte contre la violence faite aux femmes. L'enregistrement des armes d'épaule contribue à améliorer la santé et la sécurité du public et le contrôle des armes à feu aide les policiers à faire leur travail.
Je vais parler brièvement de l'expérience de nos membres — de l'Alliance de la Fonction publique du Canada — qui travaillent pour le registre des armes à feu. Nos membres qui travaillent au registre fournissent de l'information sur la loi et facilitent l'enregistrement, la délivrance de permis et le transfert de propriété des armes à feu. Ils peuvent recevoir en une journée au centre d'appel entre 75 et 120 appels et ils nous disent que les gens avec qui ils interagissent appuient aussi en général le programme. Ces travailleurs ont une expérience directe de l'importance de ce registre.
Comme le dit Charline Vautour qui travaille au service de l'application des exceptions:
Nous constatons des résultats tous les jours. Nous savons que le registre est utile à cause de la multitude d'usages qu'on en fait. Il sert dans les enquêtes policières, lorsque les policiers se rendent au domicile de quelqu'un, dans les situations de violence conjugale, dans les affaires judiciaires. Les premiers intervenants médicaux l'utilisent pour vérifier s'il y a des armes dans une maison et les pompiers, s'il y a des explosifs. Lors d'un incendie, une arme d'épaule peut fondre tout simplement, mais les munitions, elles, peuvent être très dangereuses.
L'abolition du registre constituerait un grand bond en arrière. Tous les dossiers seraient supprimés. Cela aurait des conséquences négatives et dangereuses.
Nous admettons que la plupart des propriétaires sont enregistrés et ont fait enregistrer leurs armes. Bien entendu, la plupart des Canadiens appuient le contrôle des armes à feu, un récent sondage Léger révélant que 59 p. 100 des Canadiens estiment que le registre des armes à feu est un bon investissement.
Me demandez-vous d'arrêter, monsieur?
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Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité et les autres témoins.
Je m'appelle Kevin Gaudet. Je suis directeur fédéral de la Fédération canadienne des contribuables. Nous sommes une organisation nationale sans but lucratif et non partisane qui compte plus de 74 000 membres dans tout le pays. Nous avons des bureaux en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, à Toronto et à Ottawa, et bientôt dans le Canada atlantique. La Fédération canadienne des contribuables a pour mandat de préconiser des taxes et impôts plus faibles, moins de gaspillage et la responsabilisation du gouvernement. Nous faisons ce travail depuis longtemps puisque nous fêterons cette année notre 20e anniversaire. Nous n'acceptons pas d'argent du gouvernement et nous ne donnons pas de reçus aux fins de l'impôt.
J'aimerais saisir cette occasion pour remercier les membres de la Fédération canadienne des contribuables dont les contributions m'ont permis de venir ici aujourd'hui témoigner. Nous avons refusé l'offre du comité de rembourser nos dépenses. Nous nous en sommes plutôt remis au soutien de nos membres. Je suis ravi d'être ici aujourd'hui pour parler en leur nom pour me prononcer contre le registre des armes d'épaule qui n'est que gaspillage et en faveur de son abrogation, grâce au projet de loi de Mme Hoeppner, le .
J'aimerais aussi saisir cette occasion pour remercier le président du comité au nom de la Fédération canadienne des contribuables pour le travail qu'il fait sur ce dossier depuis des années et pour remercier les membres du comité qui ont voulu que nous comparaissions.
Monsieur le président, tous les membres du comité et leurs partis respectifs doivent être félicités d'avoir autorisé un vote libre grâce auquel ce projet de loi a pu être renvoyé au comité. Les votes libres sont l'un des éléments clés d'une démocratie qui fonctionne comme elle le doit. N'eût été du soutien des députés du Nouveau Parti démocratique et du Parti libéral qui se sont joints aux conservateurs pour voter en faveur de ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, nous ne serions pas ici aujourd'hui pour participer à ce débat raisonné. Tous les députés méritent d'être félicités de leur courage et de leur conviction.
Nous sommes d'avis que la même approche ouverte et libre devrait continuer d'être respectée à la Chambre lorsque le projet de loi fera l'objet d'un vote après l'étape de la troisième lecture. C'est un privilège dont jouissent les députés depuis des décennies. C'est une pratique qui devrait jouer dans tous les cas sans exception après la troisième lecture de ce projet de loi.
Étant donné qu'il s'agit d'un sujet très conversé, de nombreuses personnes ont demandé qu'il y ait un compromis et je suis d'accord. J'estime que c'est ce que propose le projet de loi de Mme Hoeppner. Il permet un compromis raisonnable pour les propriétaires d'armes à feu responsables et fiables et nous l'appuyons. Ce projet de loi est un compromis puisque de nombreux propriétaires d'armes à feu responsables et fiables auraient préféré voir davantage de changements concernant les armes de poing, les permis et d'autres restrictions. Quand il est devenu apparent qu'un projet de loi comportant de tels changements n'obtiendrait pas le soutien de la majorité à la Chambre, le projet de loi a été déposé au Sénat. Il était mal conçu et risquait d'aboutir à la création d'un nouveau registre des armes à feu dans chaque province. Heureusement, il n'a pas réuni l'appui de la majorité.
Par conséquent, ce projet de loi a été déposé. Le projet de loi de Mme Hoeppner offre un compromis, ayant abandonné tous les autres changements sauf celui-ci: l'abrogation du registre des armes d'épaule qui n'est que pur gaspillage. Le registre des armes d'épaule a entraîné d'énormes dépenses inutiles et s'est avéré un placebo lourd qui donne la fausse impression d'assurer la sécurité du public. Ce qui est plus important, le registre des armes d'épaule a été un véritable trou noir financier depuis sa création en 1995 par le ministre de la Justice de l'époque, Allan Rock. Il a coûté bien au-delà de deux milliards de dollars et le chiffre final reste inconnu.
Certains soutiennent que les coûts de fonctionnement annuels du registre ne sont que de trois millions de dollars. C'est faux. Ce chiffre ne reflète pas le véritable total des coûts directs ni d'ailleurs les coûts indirects. En réalité, le registre coûte aux contribuables plus de 106 millions de dollars par année et on ne peut connaître le chiffre final. Comme l'a signalé la vérificatrice générale, pas une mais bien deux fois, c'est un énorme gaspillage des deniers publiques pour un programme qui fait si peu pour assurer la sécurité des Canadiens. Toutes ces dépenses inutiles résultent du fait que l'on a fourni au Parlement de fausses informations quand le projet de loi a été adopté.
Il y a par ailleurs le fait que les Canadiens ne savent même pas si ce chiffre de deux milliards de dollars reflète le coût total. En 2002, la Fédération canadienne des contribuables a présenté à la vérificatrice générale, Sheila Fraser, une pétition portant plus de 14 000 signatures demandant que son bureau fasse une vérification du programme. Elle l'a fait et elle a constaté un étonnant gaspillage.
Lors de la deuxième vérification du programme, en 2006, Mme Fraser a découvert que bien que les coûts aient augmenté bien au-delà de ce qu'avait autorisé le Parlement et au-delà de ce que le gouvernement avait promis publiquement, les montants réels restaient cachés des législateurs et du public. La vérificatrice générale a conclu que le fait d'avoir caché ces coûts enfreignait la loi et violait les propres pratiques comptables du gouvernement. Cela signifiait par ailleurs que le pouvoir constitutionnel du Parlement de décider de l'utilisation des deniers publics avait été usurpé par des bureaucrates. Le comité devrait plutôt consacrer ses efforts à un examen de cette situation.
En 2006, mon prédécesseur a remis au ministre de la Sécurité publique de l'époque, M. Day, une autre pétition qui, cette fois, portait plus de 28 000 signatures demandant l'abrogation du registre des armes d'épaule qui n'est que pur gaspillage.
On peut lire dans le rapport de la vérificatrice générale de décembre 2002: « Depuis le début du Programme, l'information financière présentée au Parlement a été insuffisante. » La vérificatrice générale dit que le Parlement a été induit en erreur en 1995 et amené à croire que le programme ne coûterait que deux millions de dollars nets. Les Canadiens pourraient ne jamais connaître le coût total et véritable de ce programme.
Nous savons, grâce à la vérificatrice générale et au réseau anglais de la SRC, qu'il a déjà coûté plus de deux milliards de dollars. La gestion de ce programme a été désastreuse. Selon la vérificatrice générale, 70 p. 100 de tous les crédits approuvés par le Parlement pour la création et la gestion de ce programme provenaient de budgets supplémentaires des dépenses. Comme vous, les parlementaires, le savez, cela montre à quel point la gestion du programme échappait à tout contrôle puisque ces dépenses n'avaient pas été budgétisées.
Le rapport de la vérificatrice générale est cinglant. Il fait état de gaspillage et de mauvaise gestion à une échelle immense. Un extrait important du rapport de vérification se lit comme suit:
À notre avis, l'information financière fournie par le ministère pour les fins de la vérification ne présente pas fidèlement les coûts du Programme pour le gouvernement. Notre examen préliminaire nous a permis de relever des lacunes importantes dans cette information. Par conséquent, nous avons interrompu la vérification de ces données...
La vérificatrice générale souligne que les coûts ont dépassé un milliard de dollars, selon le ministère. Et elle ajoute qu'il s'en faut de beaucoup que le coût soit complet.
La vérificatrice générale souligne par ailleurs que les activités du programme ne visent plus les propriétaires présentant un risque élevé, mais mettent davantage l'accent sur la réglementation et l'application des contrôles à l'égard de tous les propriétaires et de leurs armes à feu. Le ministère a conclu qu'en conséquence le programme était devenu trop complexe et trop coûteux et qu'il devenait difficile pour les propriétaires de s'y conformer. Fait important à rappeler, la vérificatrice générale dit: « Le ministère n'a pas déclaré non plus au Parlement l'ensemble des coûts du Programme, comme l'exige la politique de réglementation du gouvernement. »
Par conséquent, le réseau de la SRC a présenté une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir de plus amples renseignements sur l'ensemble des coûts. Le réseau a fait un reportage diffusé en février 2004 selon lequel les véritables coûts du programme s'élevaient à plus de deux milliards de dollars et que c'était du pur gaspillage. Les Canadiens ne sauront jamais à combien s'élèvent les coûts véritables de ce gaspillage. Nous ne savons pas non plus à combien s'élèvent les coûts directs et accessoires annuels du programme.
La GRC dit consacrer 8,4 millions de dollars à l'enregistrement. Laissons de côté un instant la foi que nous devons accorder à ce chiffre. Contentons-nous de l'ajouter aux 98 millions de dollars de frais de fonctionnement annuels pour d'autres programmes connexes tels que décrits dans le rapport de recherche détaillé élaboré par la Bibliothèque du Parlement en 2003 et l'on constate que les coûts de fonctionnement totaux pour ce registre qui n'est que du gaspillage s'élèvent à 106 millions de dollars par année. Bien entendu, nous ne connaissons pas les coûts réels pour la GRC puisque les coûts de fonctionnement du registre ont systématiquement et délibérément été faussés.
Dans son rapport de vérification de 2006, la vérificatrice générale mentionne plusieurs exemples de pratiques comptables irrégulières dont le but était de cacher ces dépenses au Parlement. Un exemple se chiffre à 17 millions de dollars et l'autre, à 22 millions de dollars. Elle note en 2006 que les gestionnaires avaient l'intention de continuer d'utiliser des pratiques comptables qui permettaient de cacher ces chiffres.
Nous ne connaissons pas non plus les véritables sentiments des agents de la GRC. Le 5 mai de cette année, le sous-commissaire Killam a fait distribuer à tous les commandants une note de service qui dépassait les bornes concernant le projet de loi de en leur ordonnant, à eux et à tous leurs employés, de se taire et de ne pas prendre position. Étant donné cette culture de la muselière à la GRC, nous ne connaîtrons probablement jamais les coûts véritables de la gestion de ce registre inutile et nous ne connaîtrons pas non plus le véritable sentiment des agents.
La seule façon de mettre les contribuables à l'abri de ce fouillis, c'est que le comité et le Parlement mettent fin à ce registre des armes d'épaule inutile.
Merci de m'avoir écouté.
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Merci beaucoup de m'avoir invitée à témoigner. Je tenterai d'aborder des questions qui n'ont pas encore été soulevées et de me limiter au temps qui m'est imparti.
La Coalition pour le contrôle des armes est un organisme sans but lucratif qui a été fondé à la suite de la tuerie de l'École polytechnique. Sa position sur la réglementation des armes à feu, y compris le soutien des mesures visant l'émission de permis pour tous les propriétaires d'armes à feu et l'enregistrement de toutes les armes à feu, reçoit l'appui de plus de 300 organismes de partout au Canada, y compris tous les principaux organismes de sécurité publique, de même que l'Association canadienne de santé publique, les principaux groupes de prévention des blessures, les organisations de défense des victimes, le mouvement ouvrier et d'autres groupes. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de m'exprimer au nom des membres qui représentent la Coalition.
Mon exposé portera sur quelques points clés. J'espère que nous aurons le temps, au cours de la période des questions, d'aborder certaines des allégations problématiques qui ont déjà été faites.
De par leur nature même, toutes les armes à feu peuvent tuer. Certains tentent de faire la distinction entre, d'une part, les carabines et les fusils de chasse et, d'autre part, les armes de poing. Cette distinction est valable dans une certaine mesure, car les armes à autorisation restreinte — et plus particulièrement les armes de poing — sont plus faciles à dissimuler que les carabines et les fusils de chasse. Cependant, on a entendu de nombreuses affirmations qui laissaient croire que les carabines et les fusils de chasse ne tuaient pas. Ce n'est tout simplement pas vrai.
En fait, selon les données sur la question, les carabines et les fusils de chasse sont les armes à feu le plus souvent utilisées dans les cas de suicide, de violence familiale et de meurtre d'agents de police au Canada. L'expression « fusils pour la chasse au canard » est parfois employée pour laisser entendre que ces armes à feu sont comme des jouets. Mais il ne faut pas oublier que, si ce projet de loi est adopté, les Ruger Mini-14, la puissante arme semi-automatique utilisée lors de la tuerie de l'École polytechnique, n'aura plus à être enregistrée. Ce sera aussi le cas des fusils de tireurs d'élite, qui permettent d'atteindre une cible à deux kilomètres et de percer des vestes en Kevlar.
Il importe également de comprendre que la Loi sur les armes à feu a été adoptée non seulement comme un outil de lutte contre le crime, non seulement comme un outil servant à la police, même si c'était clairement un des objectifs visés, mais on a également adopté la Loi sur les armes à feu sous l'impulsion d'organismes de santé publique et de prévention des blessures de partout au Canada, des organismes qui, comme le premier ministre du Canada, voulait mettre l'accent sur la prévention du suicide. Vous trouverez, dans le mémoire, une liste d'organismes qui préconisent la mise en place de mesures de contrôle plus strictes concernant les carabines et les fusils de chasse — les armes à feu utilisées le plus souvent dans les cas de suicide — parce qu'il s'agit des armes qu'on peut obtenir le plus facilement; ces armes doivent être enregistrées pour renforcer les dispositions relatives au permis.
Les facteurs de risque relatifs aux suicides et aux homicides sont très semblables. C'est en partie pour cette raison que 50 p. 100 des cas de violence familiale où une arme à feu entre en jeu se termine par un suicide. C'est aussi pour cette raison que de nombreuses fusillades largement médiatisées se sont aussi conclues par un suicide.
Dans la partie de la loi qui concerne l'attribution de permis, les dispositions sur l'examen préalable sont essentielles pour que l'on puisse régler ce problème. Comme la Cour suprême l'a clairement indiqué, le renforcement des dispositions sur l'attribution de permis passe obligatoirement par l'enregistrement de toutes les armes à feu:
Les dispositions relatives à l'enregistrement ne peuvent être retranchées de la loi. Les dispositions relatives aux permis obligent quiconque possède une arme à feu à obtenir un permis; les dispositions relatives à l'enregistrement exigent l'enregistrement de toutes les armes à feu. Ces catégories de dispositions de la Loi sur les armes à feu sont étroitement liées au but visé par le Parlement, la promotion de la sécurité par la réduction de l'usage abusif de toutes les armes à feu. Ces deux catégories sont partie intégrante et nécessaire du régime.
Si l'Association canadienne des chefs de police et l'Association canadienne des policiers, qui représente les agents de police, ont soutenu l'enregistrement des armes à feu et l'émission de permis en 1991, appui qui a aidé à l'adoption de la loi en 1995, c'est en partie parce qu'il y avait des lacunes dans la loi qui existait à l'époque.
Bon nombre de personnes ici présentes ont allégué que l'autorisation d'acquisition d'armes à feu était suffisante, et que l'obtention d'un permis n'était pas nécessaire. Seul le tiers des propriétaires d'armes à feu avaient une autorisation d'acquisition d'armes à feu en règle. L'un des principaux problèmes de l'ancien système d'autorisation d'acquisition d'armes à feu était que, même si on devait conserver un registre des ventes et des transactions d'armes à feu, on ne consignait pas combien d'armes à feu une personne avait achetées à moins que la police examine les dossiers de chaque armurerie. Cela voulait dire que les propriétaires d'armes à feu pouvaient acquérir autant de carabines et de fusils de chasse qu'ils le voulaient, tout en respectant la loi. Si ces carabines et fusils de chasse étaient donnés, vendus ou volés, et qu'ils se retrouvaient dans de mauvaises mains, rien ne permettait de remonter la piste jusqu'au premier propriétaire. C'est pour cette raison que le renforcement des dispositions de la Loi sur les permis passe nécessairement par l'enregistrement. Les personnes ici qui affirment soutenir l'émission de permis doivent aussi, logiquement, soutenir l'enregistrement, qui est essentiel au renforcement des dispositions relatives aux permis.
Il est aussi important de souligner le fait que la police utilise l'enregistrement pour retirer les armes à feu des mains de personnes qui peuvent présenter un risque pour elles-mêmes ou pour autrui. Je sais que vous avez entendu le témoignage de l'Association canadienne des policiers et que vous entendrez celui de l'Association canadienne des chefs de police, et c'est pourquoi je ne m'éterniserai pas sur ce point. Je rappellerai simplement que nous savons que, presque immédiatement après la fusillade survenue au collège Dawson, quelqu'un a proféré des menaces semblables sur Internet, et le registre des armes à feu a aidé la police à identifier la personne en question et à lui retirer ses armes à feu. On a observé d'autres cas où le registre s'était révélé un outil essentiel dans la condamnation de personnes qui avaient commis des crimes graves.
Dans le débat sur les armes à feu, certains ont également allégué que le soutien de la réglementation des armes à feu, et en particulier du registre, était un débat purement urbain. En fait, ce n'est pas le cas. Les groupes qui appuient les dispositions sur les permis et l'enregistrement sont très variés: on compte notamment de grands organismes nationaux, des organisations de femmes en milieu rural, des organismes de prévention du suicide et le Conseil albertain de prévention des blessures. Les témoignages offerts par ces groupes et les données recueillies permettent donc d'infirmer l'allégation selon laquelle cette question est uniquement une création des grandes villes.
Dans mon mémoire, j'explique clairement que les taux de décès et de blessures imputables aux armes à feu au Canada sont en général plus élevés dans les régions où l'accès aux armes à feu est plus facile, même si l'opposition à la loi est plus forte dans ces régions.
J'aimerais aussi attirer votre attention sur ce que démontrent les taux de décès et de blessures imputables aux armes à feu, de même que les taux d'homicides commis à l'aide d'une carabine ou d'un fusil de chasse et les taux de violence entre partenaires intimes. Les taux sont importants. Certains membres du comité parlent de chiffres. Il est donc important d'examiner les chiffres calculés par tranche de 100 000 habitants.
Ce que nous voyons, c'est que, depuis 35 ans, la baisse des taux de décès et de blessures imputables aux armes à feu s'est faite parallèlement au renforcement des contrôles sur les armes à feu. Il est toujours très difficile de démontrer des liens de cause à effet dans le cas de phénomènes complexes tels que la criminalité ou le suicide, mais les données semblent démontrer que ces contrôles plus stricts nous ont permis d'améliorer considérablement notre bilan de sécurité, par comparaison à la situation qui prévalait au début des années 1970.
J'aimerais attirer l'attention du comité sur le fait que les dispositions de ce projet de loi n'éliminent pas simplement les dispositions sur l'enregistrement qui avaient été mises en vigueur en 1995...
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Merci, monsieur le président.
Collègues du Parlement, bonjour.
J'aimerais d'abord, à titre d'introduction, vous tracer un peu mes origines. Je suis originaire de l'Abitibi-Témiscamingue. Pour ceux qui sont de l'Ouest canadien ou des territoires plus éloignés, l'Abitibi-Témiscamingue est un territoire au nord-ouest du Québec principalement reconnu pour la chasse et la pêche.
Vous comprendrez que, très tôt dans ma jeunesse, les armes à feu et la pratique de la chasse faisaient partie du quotidien de ma famille — je viens d'une famille de trappeurs. Je n'ai pas de préjugé défavorable par rapport aux chasseurs, loin de là. C'est pourquoi je veux absolument vous indiquer, au départ, ma position par rapport à la chasse, entre autres. Je n'ai pas vécu, dans ma vie personnelle ou familiale, des événements traumatisants, hormis le meurtre de ma fille, qui a été perpétré par un prédateur sexuel — il l'a assassinée en l'étranglant.
Par ailleurs, ma position ou les commentaires que je vais émettre cet après-midi peuvent paraître un peu contradictoires, comme je suis moi-même le fondateur d'une association pour les personnes assassinées ou disparues, c'est-à-dire l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues. Elle comprend aujourd'hui au-delà de 600 familles membres dont le décès ou le meurtre d'un des leurs est survenu au moyen d'une arme à feu de façon exceptionnelle.
Ce qui me dérange un peu dans le débat sur les armes à feu, c'est qu'actuellement, cela relève plus d'un débat d'opinion que d'un débat scientifique. Je l'ai constaté lorsque j'ai reçu à mon bureau, au Sénat, il y a tout juste deux semaines, un groupe de la Coalition pour le contrôle des armes. J'ai vu combien il était difficile de discuter, ou même d'évaluer le programme comme tel. Lorsqu'on remettait en question des éléments du registre des armes à feu, on était automatiquement perçu comme étant insensible à la violence faite aux femmes, on était presque dans le camp des ennemis. Ce qui est dommage dans ce dossier, c'est qu'on s'est campé pour ou contre, et personne n'a regardé entre les deux.
C'est un sujet très délicat à débattre, surtout lorsqu'on remet en question certains éléments de ce fichier. Je l'ai dit au départ, je ne suis pas du tout contre la libre circulation des armes à feu, loin de là; je suis pour une forme de contrôle des armes à feu, mais pas à n'importe quel prix.
Ce que je vous soumets cet après-midi, ce sont des opinions. Comme on est dans un débat d'opinion, je vous émets les miennes. Ce ne sont pas les opinions d'un expert, mais celles de quelqu'un qui a déjà vécu avec des armes à feu et qui a fréquenté des familles dont un membre a été assassiné. Je vous parle en me basant sur mon vécu par rapport à ça.
Je considère le registre des armes à feu avant tout comme un outil de travail pour les policiers. C'est un outil qui vient protéger leur santé au travail, et tous les corps policiers qui sont venus vous présenter leur mémoire l'ont admis. C'est d'abord un outil qui protège les policiers. Je crois même qu'une directive oblige les policiers à vérifier dans le registre des armes à feu si une arme à feu risque de se trouver dans la propriété qu'ils vont visiter. Lorsqu'on dit qu'il y a 10 000 vérifications quotidiennes, c'est que les policiers sont obligés de le faire pour se protéger.
Quant à considérer le registre des armes à feu comme un outil efficace de prévention de la criminalité ou des homicides, je me pose de sérieuses questions. Il n'existe aucune démonstration scientifique claire que le registre des armes à feu a eu une influence sur la prévention de la criminalité.
La baisse du nombre d'homicides et de suicides au Canada a débuté en 1979. Si on regarde la courbe des homicides et des suicides, on remarque qu'elle décline depuis 1979. Le registre a été adopté en 1992 et il n'a aucunement provoqué un déclin plus rapide. La baisse s'est maintenue constante indépendamment de l'existence ou non du registre. Donc, avant de prétendre que cet outil a contribué à la baisse de la criminalité, il faut être très prudent.
On n'a qu'à penser aux événements qui ont eu lieu au Collège Dawson — on en a parlé un peu plus tôt — ou à l'École Polytechnique de Montréal, ou encore aux derniers policiers qui ont été tués par balles. Toutes les armes utilisées étaient enregistrées. Au Collège Dawson, l'arme utilisée était presque considérée comme une arme de chasse. N'y aurait-il pas lieu d'allonger la liste des armes interdites? C'est une question que je me pose. Selon des données provenant de la Colombie-Britannique, 80 p. 100 des armes à feu saisies dans cette province sont illégales. Qu'il y ait un registre ou qu'il n'y en ait pas, le problème des armes illégales sera toujours présent.
Ce que je cherche à faire, c'est provoquer un débat ou une réflexion sur la prévention de la criminalité. Au Canada, les assassinats connaissent une forte diminution, tout comme les homicides commis à l'aide d'une arme à feu. Par contre, les homicides commis à l'aide d'une arme de poing ou d'une arme blanche ont augmenté de 35 p. 100 depuis 2000. Les cas de disparition de personnes ont augmenté de 40 p. 100 au cours des six dernières années. Ce sont les dépenses nécessaires pour maintenir le Registre canadien des armes à feu que je remets en question. On parle ici de millions de dollars. Est-ce à cet endroit qu'il est le plus efficace d'investir pour prévenir la criminalité? Les armes à feu ne représentent que 2,4 p. 100 des instruments utilisés dans le cas des homicides.
Le Canada a adopté la Loi sur les armes à feu, qui rend le chasseur ou le propriétaire de l'arme responsable de son enregistrement. Comparer le Registre canadien des armes à feu à un permis de conduire est périlleux, dangereux, et quelquefois malhonnête. Au Québec, on paie 500 $ par année pour l'enregistrement d'un permis de conduire. C'est le gouvernement qui est responsable de la gestion du registre. Ce sont en grande partie des bénévoles qui travaillent au Registre canadien des armes à feu. Le chasseur ne paie qu'une fois. Pour que le Registre canadien des armes à feu soit efficace et à jour, il faudrait que chaque propriétaire d'arme à feu paie 100 $ par année. C'est la réalité. Le registre des permis de conduire est efficace parce que ce système est bien financé.
À mon avis, ce registre sera toujours défaillant, si ce n'est que parce que la mise à jour de la liste des propriétaires d'armes à feu sera toujours défaillante. Comme pour la plupart des systèmes et des registres du Canada, on connaîtra toujours des dépassements de coûts. Vous n'avez qu'à penser à la carte d'assurance-maladie du Québec. Pour l'informatiser, on a presque doublé les coûts initiaux. Pensez à SYGBEC, le système gouvernemental québécois qui gère l'information gouvernementale. Il a aussi connu des dépassements de coûts. Dès qu'un système est informatisé, il faut s'attendre à ce qu'il y ait des dépassements de coûts. C'est inévitable.
Monsieur le président, je vais terminer en disant qu'il faut dédramatiser l'importance du Registre canadien des armes à feu à l'égard de la criminalité. Quand on regarde la courbe descendante des homicides et des suicides, qui est constante depuis 1979, on s'aperçoit que le registre n'a pas pour effet de provoquer une baisse encore plus rapide de ces taux.
En tant que sénateur, je me demande ceci: s'il faut investir plusieurs dizaines de millions de dollars dans la prévention de la criminalité, ne serait-il pas préférable de les investir ailleurs que dans le registre, puisqu'on n'a pas pu prouver que celui-ci avait un impact sur la prévention de la criminalité?
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, de me donner l'occasion de participer à ce débat. Je peux voir que le débat de cet après-midi est déjà très relevé.
Je ne suis pas ici simplement pour lire une lettre; je suis ici en personne. Je sais que vous avez déjà entendu bien des témoignages, non seulement dans le cadre de ces réunions, mais aussi tout au long du débat sur le registre des armes à feu.
Je dirais que la très grande majorité des participants à ce débat partagent les mêmes préoccupations. Nous voulons tous vivre dans une société sûre et exempte de criminalité. Nous voulons que ceux qui commettent des crimes soient arrêtés et que le système judiciaire fonctionne bien.
La vraie question est la suivante: que se passera-t-il si ce projet de loi est adopté? Que se passera-t-il en matière de prévention de la criminalité, d'administration de la justice, de mise en état d'arrestation des criminels et de poursuites en justice?
Je vous soumets très respectueusement que ce projet de loi ne réglera rien. En fait, il risque de miner les efforts de ceux qui sont responsables de la prévention, de l'application de la loi et des poursuites.
J'ai pu constater, à diverses reprises, qu'on débattait des mérites et des limites de l'un ou l'autre des outils servant à l'application de la loi. Il ne s'agit pas ici de perfectionner un outil, qu'il s'agisse d'un registre, d'une loi ou d'une approche. Un tel outil n'existe pas. Aucun outil à lui seul ne peut être parfait. La question qu'il faut se poser, c'est la suivante: Est-ce que l'outil en question contribue de manière substantielle à la solution? Les données montrent clairement que le registre des armes à feu contribue de manière substantielle à la solution. Il est consulté près de 11 000 fois par jour. Près de 11 000 fois par jour, ceux et celles qui sont en première ligne de l'application de la loi au Canada le consultent.
Certains diront que bon nombre de ces consultations sont automatiques. Elles se font en parallèle à d'autres vérifications. Mais on ne consulterait pas le registre s'il était inutile, s'il ne contenait pas des renseignements importants, des renseignements qui non seulement peuvent protéger l'agent qui répond à l'appel, l'agent qui évalue le risque, mais des renseignements qui peuvent également aider en matière d'application de la loi et d'enquête.
Les données contenues dans le registre des armes à feu aident à procurer des motifs raisonnables aux agents qui en ont besoin pour obtenir des mandats de perquisition ou de saisie. Elles aident grandement les enquêteurs à obtenir les renseignements dont ils ont besoin pour identifier les personnes qui ont commis certains crimes.
Mais ces données n'aident pas seulement les agents. En tant que procureur général de l'Ontario, je suis responsable des procureurs de la Couronne qui entament des poursuites, des procureurs de la Couronne qui doivent trancher des questions et présenter des allégations au système judiciaire, c'est-à-dire au juge de paix et aux autres juges qui doivent décider si une personne peut être libérée après avoir été arrêtée, si elle doit être détenue dans l'attente d'une audience sur la libération sous caution, si sa détention doit se poursuivre ou si elle peut être libérée sous certaines conditions. Les données du registre aident à prendre de telles décisions.
Non, le registre n'est pas parfait. Mais si jamais vous trouvez l'outil parfait, faites-le-moi savoir. Dans un système où des hommes et des femmes font de leur mieux jour après jour, vous ne trouverez probablement pas d'outil parfait. Mais le registre est utile; il permet de savoir qui est enregistré comme propriétaire d'armes à feu, quel type d'armes ces personnes possèdent, si une personne peut être libérée et confiée à la garde d'une autre qui se présente comme garant ou caution, et qui pourrait avoir accès à une arme à feu.
Il s'agit là de renseignements très importants. Le registre est-il parfait? Non, il n'est pas parfait, mais il est très utile, tout comme le sont les renseignements qu'utilisent les personnes qui prennent des décisions sur les libérations conditionnelles et le prononcé d'une sentence. Ces sentences peuvent comprendre des périodes de probation ou de surveillance dans la collectivité. Les renseignements qui aident à déterminer si une personne arrêtée peut retourner vivre dans un foyer où il y a des armes à feu sont importants — ils ne sont pas parfaits, mais importants.
Je suppose par ailleurs qu'il faut poser la question suivante: Si on se débarrasse du registre, qu'est-ce qui va le remplacer? Les parrains du projet de loi estiment-ils que le contenu du registre n'est jamais pertinent? Ou croient-ils que ce contenu pourrait être remplacé d'une certaine façon, et si c'est le cas, comment? La question des permis n'est que le premier élément à considérer.
Donc, par quoi remplacer le registre? Et pourquoi rejeter le point de vue de ceux qui jurent que le contenu du registre est important? Pourquoi voulez-vous les priver de ces renseignements? Pourquoi voulez-vous priver ceux qui sont responsables des poursuites de l'accès à des renseignements qu'ils jugent si importants?
Aucun outil n'est parfait. En fait, les agents de police et les procureurs de la Couronne consultent chaque jour des renseignements dont l'exhaustivité et la crédibilité sont variables. Mais ils tiennent compte de cette réalité dans chaque cas traité. Qu'il s'agisse d'un agent d'infiltration qui consulte les renseignements fournis par un informateur ou d'un procureur de la Couronne qui évalue les témoignages d'un professionnel ou d'un autre témoin, lesquels peuvent être contradictoires, l'évaluation de l'information se fait constamment. Ce qui est vraiment utile, c'est l'information, et non le refus de l'information, le refus même d'analyser l'information.
Je n'ai jamais rencontré de professionnels de première ligne qui a refusé de consulter des renseignements qui étaient mis à sa disposition. Je n'ai encore rencontré personne qui n'était pas intéressé à obtenir plus de renseignements. Avant d'être au gouvernement, j'ai travaillé pendant 25 ans dans le milieu et je n'ai jamais rencontré de telles personnes. Les gens veulent savoir. Ils peuvent ensuite déterminer, selon leur propre jugement personnel et professionnel, la validité des renseignements, ce qui est extrêmement important.
Dans le cas du registre des armes à feu, il ne s'agit pas de dénigrer les propriétaires d'armes à feu, quels qu'ils soient. Pour les propriétaires d'armes à feu, l'enregistrement constitue une contrainte minimale. Lorsqu'un outil présente une contrainte minimale, mais qu'il permet d'obtenir des renseignements très importants, je crois bien humblement que nous ne devrions pas refuser son maintien, sa mise à jour, son renforcement.
En conclusion, je rappelle que des malheurs peuvent arriver à de bonnes personnes. Des armes à feu se font voler. Elles se retrouvent en circulation. Un criminel peut être arrêté avec sur lui une arme volée, et l'enquête peut faire la lumière non seulement sur le premier crime, mais aussi sur d'autres, et il est très important de pouvoir remonter la piste de l'arme volée afin de résoudre ces crimes et de déterminer, à la suite de l'arrestation, comment évaluer la personne qui se trouve au bout de la piste.
Bref, du point de vue du gouvernement de l'Ontario, du point de vue du procureur général, le registre devrait être maintenu, et le projet de loi ne devrait pas être adopté.
Le registre devrait-il être renforcé? Absolument. Devrait-il être amélioré? Absolument. Mais il faut le maintenir. Il contribue grandement à la protection de la population, non seulement en Ontario mais, je crois, partout au Canada.
Merci beaucoup.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, chers collègues et témoins.
Je m'appelle Duane Rutledge. Je suis un agent du Service de police de Glasgow en Nouvelle-Écosse. Je suis dans ma trentième année de service. J'ai été policier les deux tiers de ma vie. J'ai travaillé dans le service de police général, la lutte antidrogue, à la Section des enquêtes générales, dans celle des crimes majeurs, j'ai été agent d'infiltration et je suis membre de l'Équipe d'intervention d'urgence. À l'heure actuelle, je suis maître-chien. Je manie des armes à feu depuis l'âge de 8 ans, à la chasse et au travail.
Je remercie le comité de me donner l'occasion de m'exprimer sur cette question controversée, quelle que soit ma position. En tant que citoyen ordinaire, cela confirme ma confiance dans notre système, le fait de pouvoir participer à l'élaboration et à la modification des lois de notre pays sans crainte de représailles ni de sanctions. Dans la plupart des pays cela n'est pas possible. Je suis reconnaissant envers le gouvernement du Canada et la population canadienne pour notre système de justice ouvert et universel.
Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter du registre des armes d'épaule et pour ma part, je suis venu vous dire pourquoi j'estime qu'il n'a pas atteint son objectif. À mon avis, c'est un échec pour ce qui est de protéger les citoyens et d'aider les services de police à assurer la sécurité des collectivités et à arrêter les criminels.
Je pense que pour comprendre cela il faut revenir au début, à la façon dont le gouvernement de l'époque a présenté le registre aux Canadiens. La façon qu'il a été présenté au public est l'un des plus grands problèmes: on prétendait que l'enregistrement permettrait à la société de vivre en plus grande sécurité. On a dressé les régions rurales contre les centres urbains, les propriétaires contre ceux qui n'avaient pas d'armes. Son coût astronomique a suscité l'opposition même de ceux qui n'étaient pas propriétaires d'armes à feu.
Au départ, le registre était perçu comme une taxe imposée aux propriétaires d'armes à feu. Ce sont les Canadiens des régions rurales qui étaient en grande partie ciblés.
Ce n'est pas un système fiable. Certaines personnes enregistrent leurs armes à feu, certains enregistrent quelques armes à feu et un grand nombre de personnes n'enregistrent rien. Cela a créé une économie clandestine.
En outre, les personnes qui ont des permis uniquement de possession peuvent avoir en leur possession des armes à feu qui ne sont pas enregistrées en leur nom, des armes appartenant à d'autres personnes. Il n'y a aucun moyen de le savoir, peu importe le système qui existe, car personne ne suit ces mouvements.
Dans la plupart des cas, les personnes visées par cette loi sont des chasseurs, des sportifs, des collectionneurs, les gens des régions rurales — essentiellement, des Canadiens honnêtes, soit la plupart des citoyens de ce pays. D'après mon expérience, un grand nombre de Canadiens n'ont pas adhéré à ce programme au départ, ce qui a suscité une économie clandestine d'armes à feu. Mais, ce qui est plus important, d'après mon expérience, c'est que les criminels ne participent même pas au registre.
Les personnes qui enregistrent une arme savent que cela ne suffit pas pour assurer leur sécurité ou celle des autres. C'est une fonction administrative. Cela ne rend pas une arme à feu sans danger. Pour ce qui est de l'enregistrement du numéro de série, ce n'est pas cela qui empêchera l'utilisation d'un couteau ou d'un bâton de baseball pour faire mal à quelqu'un.
Ce sont les personnes qui ont l'intention de causer du mal à autrui qui inquiètent le plus les policiers. Au bout du compte, dans tout homicide commis dans ce pays, le dénominateur commun, c'est l'être humain.
Le maniement et l'entreposage sécuritaires, de même que l'éducation du public, est la meilleure solution. La loi la plus utile adoptée dans ce pays depuis que je suis né est celle qui impose l'entreposage séparé des armes à feu et des munitions. En outre, cette loi prévoyait la formation en matière de sécurité et sur le maniement et l'entreposage des armes à feu. Je crois que cela a entraîné une réduction d'un grand nombre d'incidents.
Je ne crois pas que la solution soit l'interdiction de la propriété privée, ce qui inquiète la plupart des propriétaires d'armes à feu, car seule la police, les militaires et les criminels se retrouveraient alors en possession d'armes à feu. Je me rappelle ma première réaction en 1996-1997, lorsque ce projet de loi sur les armes à feu a été annoncé. J'avoue qu'au départ, j'étais un peu mécontent. Je n'étais pas en faveur et j'ai pensé que je devais parler à d'autres personnes avant de venir ici, car mon opinion n'a pas vraiment changé depuis ce temps.
J'ai donc pris le temps, avant de venir ici, de parler à mes collègues des milieux policiers, à la fois au niveau fédéral — qu'on a parfois essayé de bâillonner — et au niveau local. J'ai parlé au service des poursuites. J'ai parlé à un juge. J'ai parlé à la dame qui dirige notre maison de transition locale. J'ai parlé à des personnes qui ont des casiers judiciaires pour savoir ce qu'ils pensaient du système.
Je savais ce que moi j'en pensais et j'ai pensé qu'il y avait peut-être quelque chose qui m'échappait. Après avoir conversé avec eux, la chose est très claire. Ils sont peu nombreux à croire que cela protège le public. Quelques-uns d'entre eux croient que le registre a une certaine utilité. La majorité des personnes à qui j'ai parlé ne le croient pas.
Au cours de mes 30 années d'expérience, j'ai vu beaucoup de violence. Dans la vaste majorité des cas, l'arme utilisée était un couteau ou une arme blanche, et non pas un fusil. La plupart des criminels ne choisissent pas un fusil de chasse comme arme en raison de leur taille; lorsqu'ils s'en servent, c'est après en avoir scié le canon, les transformant ainsi en arme prohibée.
Dans les années 1930, les armes de poing étaient enregistrées et les actes de violence commis avec armes de poing continuent d'augmenter, même aujourd'hui. L'utilisation des armes de poing et des armes automatiques dans les villes, par les gangs et le crime organisé, est l'un des phénomènes qui semble connaître la plus forte croissance dans ce pays.
En d'autres mots, je n'hésite aucunement à dire qu'à mon avis, le registre des armes d'épaule n'aide pas la police à freiner la violence ni à protéger les collectivités contre la violence. Il n'y a aucune preuve que le registre en soi ait permis de sauver une seule vie.
Je suis déçu que cette question soit maintenant si politisée. J'ai entendu certains citer ici les chefs de police et aussi l'Association canadienne de la police professionnelle. Que je sache, l'Association canadienne des policiers n'a pas sondé ses membres, dans ma région, pour déterminer leur opinion sur cette question. De nombreuses personnes l'ont été dans le but de les bâillonner et d'essayer de les empêcher d'exprimer pleinement leurs opinions sur cette question. C'est injustifié dans notre pays. Comme je le disais, tout le monde devrait pouvoir exprimer son opinion, qu'elle soit pour ou contre, et lorsque quelqu'un prétend représenter quelqu'un d'autre, il devrait d'abord les sonder pour connaître pleinement leur point de vue. Je sais que dans la police, cela n'a pas été fait, peu importe ce que d'aucuns vous diront, et il y a eu pas mal de pression politique pour que les gens se taisent sur ce sujet.
Mon propre chef n'a pas hésité à dire ce qu'il pense. Il devait comparaître devant ce comité, mais maintenant, il ne le fera pas. Je lui ai parlé, mais si vous voulez savoir pourquoi il ne comparaîtra pas, vous devrez lui parler vous-mêmes. Je sais pourquoi il ne vient pas. Moi, je suis venu à titre personnel pour représenter les personnes à qui j'ai parlé.
Comme je le disais, je crois que le registre n'a pas atteint les objectifs prévus. Les commentaires incendiaires par des représentants de ces associations qui qualifient les policiers qui ne partagent pas leur point de vue de policiers anonymes, de mangeurs de beignes, qui traînent dans les cafés sont déplacés; de tels propos ne servent à rien, que ce soit à ce niveau ou à celui des représentants des chefs de police ou de l'Association canadienne des policiers.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
Je suis professeur émérite à l'Université Simon Fraser. Je suis ici à titre personnel, en tant que criminologue pour présenter des faits, pas des mythes; des faits, pas des émotions.
Dans cet exposé, je montrerai brièvement que les affirmations des opposants au projet de loi sont manifestement fausses ou trompeuses. Pour plus de détails, je vous invite à lire mon mémoire qui a déjà été distribué aux membres du comité. Il se trouve également sur le site Web du Social Science Research Network, le SSRN.
Il est faux de prétendre que le registre des armes d'épaule est essentiel à la police puisque les autorités le consultent 10 000 fois ou plus par jour. Ceux qui disent cela confondent le registre des armes d'épaule avec le Registre canadien des armes à feu en direct, le RCAFED. L'honorable Peter Van Loan, en novembre 2009, alors qu'il était ministre de la Sécurité publique, a analysé les données des services de police et a constaté que dans 97 p. 100 des cas, lorsque les autorités consultent le RCAFED, elles cherchent de l'information sur le propriétaire, non pas sur l'arme à feu. Cela concerne l'octroi d'un permis et non pas l'enregistrement.
Le projet de loi ne propose pas de modifier le régime d'octroi des permis. Le registre des armes d'épaule contient seulement de l'information sur les armes à feu. Contrairement à ce qu'ont affirmé certains témoins, il n'indique aucunement où se trouve cette arme à feu ni qui en est le propriétaire.
La principale question que nous devons examiner est celle de l'efficacité du registre, plutôt que de nous demander si les armes à feu sont dangereuses. Il est simpliste de mettre l'accent sur les armes à feu. Cela ne tient pas compte du problème de la substitution. Les meurtriers sont opportunistes. C'est particulièrement vrai pour ceux qui tuent leur conjoint ou conjointe.
Il est malhonnête de prétendre que le meilleur moyen pour sauver des vies est d'inventer une nouvelle bureaucratie au coût de 2 milliards de dollars vouée uniquement à retracer les armes d'épaule et de dépenser encore des millions de dollars chaque année pour entretenir l'illusion que nous faisons quelque chose alors que ce n'est manifestement pas le cas. Il n'y a aucune donnée convaincante qui permette de dire que le registre des armes d'épaule a eu le moindre effet sur les taux d'homicide, de suicide ou de violence conjugale. Par contre, la vérification des demandeurs de permis et la formation des propriétaires d'armes à feu, ce que nous faisons depuis les années 1970, ont prouvé leur efficacité.
Le registre des armes d'épaule n'a pas été créé avant 2001; pas en 1995, comme certains ont voulu vous le faire croire. Depuis 2001, les taux d'homicide sont restés essentiellement stables, même si le taux d'homicide avait beaucoup diminué depuis le début des années 1990. Le registre des armes d'épaule n'a sauvé aucune vie.
Les armes à feu utilisées pour commettre des crimes violents sont rarement des armes volées. Il y a des divergences entre les études, certaines disent 1 p. 100, d'autres vont jusqu'à 17 p. 100. Ce n'est pas la majorité des armes à feu utilisées pour commettre un crime. Presque toutes les armes à feu utilisées lors de crimes violents sont des armes de contrebande. La contrebande est un problème au Canada, en Australie et au Royaume-Uni. C'est de là que viennent les armes à feu utilisées pour commettre des crimes, ce ne sont pas celles des citoyens.
Les taux de suicide baissent graduellement depuis deux décennies. Les suicides commis au moyen d'une arme à feu ont également diminué, alors que les suicides par pendaison ont fortement augmenté. Certains disent que c'est une réussite. En 1991, 3 500 personnes se sont enlevé la vie; en 2005, 3 700. Le registre des armes d'épaule n'a sauvé aucune vie.
Seize pour cent des personnes qui se suicident utilisent une arme à feu. Près de la moitié se pendent. On ne le saurait jamais à entendre les témoins qui sont contre le projet de loi. La pendaison, l'empoisonnement au monoxyde de carbone, la noyade et les blessures par balle ont des taux de mortalité pratiquement identiques. Éliminez-en un, les autres restent. Mais attention, nous pourrions créer une bureaucratie de 2 milliards de dollars pour chacune de ces méthodes.
Certains disent que le coût du registre des armes d'épaule est minime, puisqu'il s'élève seulement à 4 millions de dollars, mais c'est une sous-estimation énorme. Cet argent serait extrêmement utile s'il était consacré à des programmes plus efficaces comme la prévention du suicide, les cliniques communautaires pour les conjointes et conjoints victimes de violence, les programmes de traitement de la toxicomanie. Il est décevant que des groupes de femmes et même des groupes de professionnels de la santé ferment les yeux sur les vrais problèmes pour attiser la peur des armes à feu.
Aucun pays ne peut établir de liens de causalité entre l'adoption de nouvelles lois sur le contrôle des armes à feu et une baisse des taux d'homicide, de suicide ou de voies de fait graves. Je vous invite à lire l'article que j'ai rédigé avec le criminologue Don Kates, publié par Harvard, qui est également disponible sur le site du SSRN. Les recherches du National Academy of Sciences et des Centers for Disease Control d'Atlanta confirment que j'ai raison.
Il est difficile de comprendre pourquoi les chefs de police appuient le registre des armes d'épaule. Le RCAFED est tellement bourré d'erreurs que les simples policiers mettraient en danger leur vie s'ils s'y fiaient. C'est le problème classique des bases de données: inepties en entrée, merveille en sortie. La police devrait être mieux avisée.
Il y a des millions d'entrées inexactes ou absentes. Le plus frappant, c'est que moins de la moitié des armes d'épaule qui se trouvent au Canada sont inscrites au registre. Non seulement le registre n'aide pas la police, il fait pire: il l'induit en erreur. Les personnes qui enregistrent leurs armes à feu sont moins susceptibles d'être violentes que les Canadiens qui ne possèdent même pas d'armes à feu. Ce n'est pas étonnant. Les propriétaires d'armes à feu font l'objet de vérification par la police depuis 1979. On nous dit que 15 p. 100 des armes à feu utilisées pour commettre des homicides sont des armes d'épaule. Ce qu'on néglige de dire, c'est que pratiquement aucune de ces dernières n'est inscrite. À quoi le registre peut-il être utile?
Lors de mon passage au Collège de police de l'Ontario, l'un des professeurs m'a dit, en privé, que l'utilisation du registre est un bon moyen de mettre en danger la vie de bons policiers. Prenez le cas des quatre recrues de la GRC qui ont été abattues par James Roszko à Mayerthorpe, en Alberta. Ces armes à feu n'étaient pas inscrites au registre. Parce qu'ils se sont fiés au registre, ces jeunes hommes ont eu une fausse impression de sécurité. Le registre disait qu'il n'y avait pas d'armes à feu sur place: donc, il ne devait pas y en avoir. Lorsqu'ils se sont rendus sur place, ils se sont fait tuer. Une mauvaise formation a contribué au décès de ces recrues. Des policiers d'expérience savent que lorsqu'ils se rendent à un endroit où il pourrait y avoir de la violence, ils doivent toujours supposer qu'il y a une arme sur les lieux. Le registre n'est d'aucune utilité.
De même, les policiers ne peuvent pas se fier au registre pour identifier les armes qui se trouvent dans une résidence lorsqu'ils s'y rendent pour confisquer les armes en application d'une ordonnance d'un tribunal. La GRC a témoigné en cour qu'elle ne pouvait pas faire confiance au registre. Le registre n'est d'aucune utilité.
Ceux qui s'opposent au projet de loi C-391 affirment que le registre des armes d'épaule est important parce que les carabines et les fusils de chasse peuvent être utilisés pour des homicides familiaux. C'est une diversion. Le problème, c'est le meurtre d'un membre de la famille, pas le moyen utilisé. La plupart des armes à feu qu'utilisent les conjoints violents pour tuer leur femme sont illégales. Elles ne figurent pas dans le registre.
Depuis 1992, la loi interdit aux personnes ayant commis des actes de violence de posséder une arme à feu. Elles ne figurent même pas dans le RCAFED. Il n'y a aucune donnée empirique qui permette de dire que le registre des armes d'épaule a réduit le nombre de meurtres entre conjoints. Le tiers des homicides familiaux sont commis au moyen d'un couteau. Les carabines et les fusils de chasse sont utilisés beaucoup moins souvent — dans environ 18 p. 100 des cas. Pourquoi les personnes qui s'opposent au projet de loi C-391 ne s'inquiètent-elles pas des femmes tuées au moyen d'autres armes?
Ceux qui s'opposent au projet de loi C-391 disent que le nombre de meurtres entre conjoints commis avec une arme à feu a été divisé par trois depuis l'adoption de la loi, alors que les meurtres entre conjoints perpétrés d'une autre façon sont restés stables. C'est faux. Les meurtres entre conjoints avec ou sans armes à feu diminuent graduellement depuis le milieu des années 1970. Je le répète, le registre des armes d'épaule n'existe que depuis 2001. Voyez les tableaux 1 et 8 de mon mémoire.
Le projet de loi C-391 ne modifie pas les dispositions relatives aux permis et aux vérifications des demandeurs de permis. Il vise uniquement le registre des armes d'épaule. Ni ce registre ni l'octroi de permis ne sont très utiles à la police pour régler des affaires de meurtres entre conjoints. Dans la plupart des cas, l'accusé est immédiatement identifié.
Le registre des armes d'épaule est une diversion. Il détourne l'attention des problèmes graves comme les crimes commis par des gangs. Les homicides liés aux gangs augmentent depuis le début des années 1990. En 2008, environ un homicide sur quatre est lié aux gangs. Pratiquement tous ces crimes sont commis au moyen d'armes de poing illégales. Voyez à ce sujet les tableaux 2 et 3 de mon mémoire.
En terminant, je demande aux membres du comité de lire intégralement mon mémoire. Vous y trouverez les preuves qui corroborent tout ce que j'avance. Ce ne sont pas des articles de journaux que je cite.
Je suis en faveur de lois sur le contrôle des armes à feu à la condition qu'elles s'appuient sur des méthodes qui ont fait leurs preuves, et non pas sur des perceptions ou des craintes. Lorsqu'un programme du gouvernement ne fonctionne pas, il faut l'abolir plutôt que de le laisser drainer les ressources sans autres raisons que les emplois qu'il crée.
Enfin, je tiens à remercier le président du comité, ainsi que tous les membres, de m'avoir permis de démontrer que les affirmations des personnes qui s'opposent au projet de loi sont manifestement fausses ou trompeuses.
Merci.
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Mon temps est-il écoulé?
Le président: Il vous reste deux minutes.
Mme Shelly Glover: Oui? Très bien.
J'aimerais corriger quelques informations données dans le cadre de notre discussion. Nous avons appris très clairement récemment, au moment de la comparution du président de l'Association canadienne des policiers, qu'il n'avait pas, comme l'a dit le sergent Rutledge, sondé ses membres. Il a dit que neuf membres régionaux avaient pris la décision d'appuyer la position prise par le Parti libéral, le Bloc québécois et le NPD.
Je peux vous dire que lorsque j'étais dans la police et que le débat a vu le jour, nous avons sondé chacun de nos membres et il y en avait à l'époque 60 000. L'ACP n'en compte plus que 41 000. À l'époque, la très grande majorité des policiers disaient qu'ils croyaient le registre inefficace et qu'il n'allait pas les aider à combattre les crimes commis avec des armes à feu.
Pourquoi l'ACP n'a-t-elle pas inclus cette question lorsqu'elle a réalisé son sondage en 2010 dans lequel elle posait d'importantes questions au sujet du travail des policiers? C'est intéressant qu'elle n'ait pas posé cette question et pourtant, le président de l'ACP est venu ici et a fait état d'un sondage réalisé auprès des 75 000 policiers du pays au sujet de l'opportunité d'utiliser le registre des armes à feu et seulement 408 ont répondu qu'ils le consultaient. Quatre cent huit, c'est moins de 1 p. 100 des 41 000 membres de l'ACP, et beaucoup moins quand on pense au 75 000 policiers en service.
Il m'apparaît curieux, en ma qualité de policière, comme le pensent également de nombreux policiers qui ont comparu, qu'on ne nous ait jamais posé la question, alors qu'il y a des années, nous étions une grande majorité à dire que nous ne pensions pas que le registre permettrait de stopper les crimes commis avec des armes à feu.
Monsieur Rutledge, pourquoi croyez-vous qu'aucun sondage n'a été réalisé?
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Merci, monsieur le président.
Merci à l'ensemble des témoins. Je suis heureuse que vous ayez accepté notre invitation, tout comme mes collègues du Parti libéral du Canada.
Madame Cukier, on vous a demandé quelles seraient les économies qui découleraient de l'abolition du registre des armes à feu. À ma connaissance, la vérificatrice générale s'est déjà intéressée au coût du registre, ainsi qu'à la différence entre les coûts d'enregistrement et les coûts de permis, et par conséquent, les coûts d'enregistrement...
Je ne spécule pas, c'est ce qu'a dit la vérificatrice générale. Les Canadiens lui font confiance instinctivement et c'est pour ça que les parlementaires prennent très au sérieux sa vérification de nos dépenses. D'ailleurs, j'invite les Canadiens à visiter mon site Web pour prendre connaissance de mes dépenses.
Une voix: C'est déjà fait.
L'hon. Marlene Jennings: Pour revenir au coût, on parle de 4,1 millions de dollars. Est-ce exact?