SECU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
CANADA
Comité permanent de la sécurité publique et nationale
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 3 juin 2010
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La 23e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale est ouverte. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-391, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu (abrogation du registre des armes d'épaule), renvoyé devant le comité le mercredi 3 mars 2010.
Nous continuons le débat sur la motion qui a été présentée.
Je constate dans mes notes que M. Rathgeber avait la parole et je l'invite à continuer.
Un rappel au règlement, monsieur le président. D'habitude, nous prévoyons assez de temps pour traiter des motions qui ont été annoncées au comité avec au moins deux jours de préavis. Malheureusement, la cloche avait commencé à sonner au moment où nous allions traiter de la motion que j'avais annoncée avec deux jours de préavis.
Je suis tout à fait prêt à laisser le débat continuer mais j'aimerais avoir l'assurance que les 15 dernières minutes de la séance seront consacrées à la motion que j'avais annoncée dans les règles deux jours à l'avance. Nous sommes saisis d'une motion présentée en cours de séance, par opposition à des motions portées à l'attention du comité avec deux jours de préavis, conformément aux règles.
Bien. Je vais suspendre la séance une minute pour consulter le greffier. Permettez-moi de dire auparavant que j'avais compris que nous étions saisis de la motion qui avait été présentée dans les 15 premières minutes et à laquelle nous avions consacré toute la séance. Nous avions prévu 15 minutes en début de séance pour les motions et...
Non. Si vous vérifiez l'ordre du jour, vous aviez réservé 15 minutes mais c'était seulement pour l'une des deux motions.
Je viens maintenant d'apprendre qu'il y a en réalité une troisième motion qui a été présentée au comité...
Reprenons.
Le greffier m'indique que les motions sont généralement traitées par consensus. Si nous ne pouvons pas trouver un accord, nous pourrions consacrer les cinq dernières minutes, ou toute période que vous pensez appropriée, pour en traiter mais il faudra un consensus.
S'il n'y a pas de consensus, nous pourrions prévoir du temps lors d'une réunion future, mardi prochain, par exemple, ou le jour qui conviendra aux membres du comité.
À vous de décider. Voulez-vous traiter de la motion dans les cinq dernières minutes de la séance d'aujourd'hui ou préférer-vous en traiter lors d'une prochaine séance?
M. Norlock.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je fais partie de ce comité depuis quatre ans et demi, je crois, et quand le député de l'opposition, M. Wrzesnewskyj, affirme que la tradition du comité... Depuis quatre ans et demi que je fais partie du comité, cela n'a pas nécessairement été l'habitude.
Ça arrive parfois. D'autres fois, les travaux ordinaires du comité ont préséance, ou il y a un accord et le comité passe à autre chose jusqu'à ce qu'il soit approprié de traiter de ça. Je pense que c'est ce que le greffier vous a dit.
Et je pense qu'il a raison.
Il est inexact de dire que quelque chose reflète l'habitude de ce comité, de dire que nous traitons toujours des avis de motion ou des motions qui ont été présentées 48 heures à l'avance.
Je ne sais pas s'il est nécessaire de poursuivre ce débat. Je pourrais vous demander de voter. Nous pourrons traiter de la motion dans les cinq dernières minutes d'aujourd'hui s'il y a consensus
M. MacKenzie.
Pour que tout le monde ait sa chance, nous devrions reporter cela à mardi. Nous serons saisis ce jour là du rapport sur le système correctionnel et je pense qu'il serait bon d'attendre jusqu'à ce moment-là.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je voudrais profiter de l'occasion pour demander que ma motion soit aussi entendue mardi prochain. J'ai déjà déposé une motion.
Vu qu'on étudiera la motion de M. Wrzesnewskyj mardi prochain, j'aimerais aussi qu'on étudie la motion que j'ai déposée depuis quelque temps.
[Traduction]
Le greffier n'a dit que trois motions ont été présentées au comité. Je propose que nous les examinions à la fin de la séance de mardi. Nous aurons peut-être besoin d'une demi-heure pour les trois. Êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Bien. Nous mettrons cela à l'ordre du jour de mardi prochain, à 17 heures, monsieur le greffier.
Revenons maintenant au sujet...
Quelle est la troisième, monsieur le président?
Le président: M. Holland...
M. Joe Comartin: Je n'ai pas de problème à moins que...
Vous l'avez probablement reçue à votre bureau. Je n'ai pas les textes sous les yeux mais il y en a trois.
M. Holland.
Merci, monsieur le président.
La dernière fois que nous nous sommes réunis dans cette pièce, nous avons débattu d'une motion du député d'Ajax--Pickering disant « que le Comité, conformément à l’article 97.1(1) du Règlement, recommande que la Chambre des communes ne poursuive pas l’examen du projet de loi C-391, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu (abrogation du registre des armes d’épaule), Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu (abrogation du registre des armes d’épaule) » et je souligne la fin « car il a entendu suffisamment de témoignages selon lesquels ce projet démantèlera un outil de promotion et d’amélioration de la sécurité publique et de la sécurité des policiers canadiens ».
À mon avis, les témoignages que nous avons recueillis vont largement à l'encontre de l'idée exprimée dans la motion de M. Holland. J'ai d'ailleurs rappelé certains de ces témoignages mardi. En fait, quand nous avons levé la séance, mardi, j'étais en train de parler de l'incident de Mayerthorpe.
Comme les membres du comité s'en souviennent sans doute, l'incident de Mayerthorpe avait été invoqué par M. Blair, chef de la police de Toronto et président de l'Association canadienne des chefs de police, comme exemple de situation dans laquelle le registre des armes d'épaule aurait d'une certaine manière contribué à la sécurité des agents de première ligne, ce que j'avais trouvé très, très remarquable.
J'attire votre attention sur la revue de l'ACCP, l'Association canadienne des chefs de police, où l'on invoque effectivement le massacre de Mayerthorpe à l'appui de cette position, c'est-à-dire en faveur du registre des armes d'épaule et contre le projet de loi de Mme Hoeppner. En voici un court extrait:
À la suite de l'assassinat de quatre agents de la GRC, celle-ci a employé les informations du Système canadien d'enregistrement des armes à feu pour conclure qu'une arme d'épaule trouvée sur les lieux appartenait à une personne ayant un permis. Cela a aidé la police à focaliser son enquête et à identifier et faire condamner deux complices.
Certes, cela est exact, mais ce n'était pas la question.
Vous vous souviendrez, monsieur le président, que la question que j'avais posée au chef Blair concernait précisément la sécurité des policiers de première ligne. Je parlais du massacre de Mayerthorpe, événement tragique qui s'est produit en mars 2005 à deux heures et demie au nord-ouest d'Edmonton, la ville où j'habite. Je me souviens très bien de ce jour là. M. Roszko avait deux armes non enregistrées.
Je ne savais pas que les délibérations de ce comité suscitaient beaucoup d'intérêt. Une personne qui avait écouté mardi mon explication de l'incident de Mayerthorpe a voulu corriger ma méconnaissance des armes à feu. Je conviens au demeurant que je ne connais peut-être pas aussi bien les noms et modèles des armes à feu que je le pourrais.
Cet interlocuteur — je ne vais pas l'identifier — a dit être un ami du frère de l'un des agents de police abattus. Il a vu les séquelles du massacre sur les familles de ces agents et il tient toujours à s'assurer que les gens qui discutent de ces questions possèdent des informations exactes. Bien qu'il accepte certainement ma prémisse, il a tenu à corriger mon manque d'information sur les armes à autorisation restreinte ou prohibées.
Le fusil qu'a utilisé James Roszko était un Heckler and Koch 91, la version civile d'un fusil d'assaut militaire. Il n'existe pas de fabricant d'armes à feu appelé Koch and Hegel, le nom que j'avais mentionné mardi. Il m'a dit: « Bien que vous ayez raison de dire que le Heckler and Koch 91 est semi-automatique, il est en fait nommément prohibé au titre des prohibitions par décret du conseil du C-68 ».
« Pour être précis, a-t-il ajouté, les fusils G3 et leurs variantes, dont les Heckler and Koch HK 91, HK 91 A2, HK 91 A3, HK G3 A3, HK G3 A3 ZF, HK G3 A4... » sont des armes prohibées, pas des armes à autorisation restreinte. En outre, selon l'énoncé des faits accepté dans l'affaire Cheeseman-Hennessey, l'arme à feu donnée à Roszko était un fusil de chasse à verrou et à lunette, pas un fusil de chasse ordinaire, comme je l'ai dit par erreur mardi.
Cela ne change cependant rien aux faits. Le fait est que M. Roszko, qui n'avait aucun respect de la loi, aucun respect de l'ordre public et, en fin de compte, aucun respect de lui-même — il a fini par s'enlever la vie —, n'avait pas enregistré ces deux armes très dangereuses, le Heckler and Koch 91 et l'autre, une arme de poing Beretta de 9 mm.
Comme s'en souviendront les membres du comité, ce qui n'était au départ qu'une action civile de reprise de possession d'une camionnette est devenu en 24 heures, plus ou moins, le pire massacre de toute l'histoire de la GRC.
Lorsque les agents civils d'application de la loi ont eu du mal à avoir accès au véhicule pour le saisir, ils ont fait appel à la GRC. Celle-ci est allée aider l'huissier de justice civil et, durant la tentative de saisie, elle a découvert une opération assez considérable de culture de marijuana. Elle a obtenu des mandats et a saisi les plants de marijuana puis, je suppose, a attendu le retour de M. Roszko pour l'arrêter.
Les choses ont ensuite terriblement dérapé. M. Roszko est revenu en douce sur sa ferme, sans se faire repérer par les quatre agents de la GRC, et il est allé dans une hutte Quonset où il avait caché le Heckler and Koch 91. Je pense qu'il avait probablement son Beretta sur lui. Quoi qu'il en soit, quand les agents se sont dirigés vers la hutte, il les a abattus l'un après l'autre dans un massacre tragique et horrible qui est encore aujourd'hui l'un des pires événements dans les annales du crime au Canada.
Il y a plusieurs leçons à tirer du massacre de Mayerthorpe. Premièrement, Roszko n'avait pas enregistré ces armes à feu. Donc, si la GRC avait effectué une recherche dans le registre canadien des armes à feu avant d'entrer dans cette hutte Quonset — il n'est pas clairement établi qu'elle ait fait une telle recherche —, elle aurait obtenu des informations inexactes puisque le registre lui aurait dit que M. Roszko n'avait pas d'armes à feu enregistrées.
Ce que nous savons, c'est que la GRC et les Albertains ont rendu hommage à ces quatre agents de police courageux par des vidéos, en organisant des parties de hockey de charité pour aider les familles et en créant à Mayerthorpe le Fallen Four Memorial.
Cela dit, ces quatre policiers n'étaient pas très préparés à faire face à un adversaire fortement armé qui s'était caché avec deux armes non enregistrées. Il est donc tout à fait erroné de prétendre que le massacre de Mayerthorpe confirme l'idée que le registre des armes d'épaule rehausse la sécurité des agents de police de première ligne.
Il est vrai que, des mois et des années plus tard... En fait, on a trouvé une troisième arme, un fusil de chasse enregistré au nom du grand-père d'un certain Shawn Hennessey. La GRC a pu établir le lien entre ce fusil enregistré, qui n'avait pas été utilisé, et M. Hennessey. Ensuite, au moyen d'une opération-piège très élaborée et très coûteuse à la « Mr. Big », elle a pu poursuivre et faire condamner M. Hennessey et son beau-frère, Dennis Cheeseman, pour complicité dans l'assassinat des quatre policiers. Hennessey et Cheeseman sont maintenant sous les verrous, quelque part dans un pénitencier fédéral.
Je conviens que le registre des armes d'épaule a facilité l'enquête sur les complices mais il n'a absolument pas du tout protégé les agents de première ligne qui ont été tragiquement, tragiquement assassinés par un individu qui se moquait totalement de la loi et qui n'avait pas enregistré ses armes à feu.
En ce qui concerne la motion, j'ai dit mardi — et je vais réitérer mon opinion — que je soupçonne qu'elle a en fait été rédigée il y a plusieurs mois, avant la tentative déployée par M. Holland pour charger cette liste de témoins d'adversaires du projet de loi C-391 car, s'il avait en fait pu produire sa liste de témoins sans la modifier, nous aurions peut-être recueilli des témoignages écrasants contre le projet de loi.
Mais, bien sûr, par diverses manoeuvres procédurières et, finalement, des négociations avec Mme Mourani, qui a été très utile, nous avons réussi à dresser une liste de témoins équilibrée. Nous avons recueilli des témoignages pour et contre le registre des armes d'épaule, et pour et contre le projet de loi C-391.
Les témoignages que j'ai entendus — la très grande prépondérance des témoignages — confirment l'argument de Mme Hoeppner selon lequel le registre des armes d'épaule a fort peu contribué, voire pas du tout, à réduire la criminalité. C'est un énorme cauchemar bureaucratique pour ceux qui sont obligés de s'y conformer. Il a coûté cher. Son coût actuel prête beaucoup à controverse mais nous savons très bien que son budget originel a été dépassé de plus d'un milliard de dollars.
La GRC soutient que le coût actuel d'exploitation du registre est de 4,1 millions de dollars. Selon la Fédération canadienne des contribuables, ce chiffre est absurde. Elle estime que le coût réel, sur une base amortie, est plus proche de 106 millions de dollars.
Quoi qu'il en soit, ça fait beaucoup d'argent — 106 millions de dollars, c'est beaucoup d'argent — et nous savons que ce n'est pas 4,1 millions de dollars. Ceux qui avancent ce chiffre faussent le débat, monsieur le président, pour la raison suivante.
Chacun sait — et je pense que même les témoins et, je le soupçonne, les députés de l'opposition l'admettront probablement — que le registre sous sa forme actuelle est inefficace. Nous savons que près de la moitié, si ce n'est la moitié, des armes à feu du Canada ne sont pas enregistrées. Dieu merci, il y a une amnistie des poursuites depuis 2006, je crois.
Beaucoup, beaucoup d'armes à feu ne sont pas enregistrées, que ce soit par négligence, par décision consciente ou à cause de l'amnistie et, partant, de l'immunité contre des poursuites, ou par mépris flagrant de la loi, ce qui est l'explication majoritaire lorsqu'il s'agit du crime organisé et des criminels endurcis. Quelle que soit la raison, le registre ne saurait prétendre — même ses thuriféraires en conviennent — refléter avec exactitude toutes les armes à feu du Canada.
Il va falloir dépenser des millions et des millions de dollars pour remédier à cette situation si le projet de loi est rejeté. Le Parti libéral, à ma surprise, n'a proposé aucun amendement parce que son chef a lancer un ballon d'essai en parlant d'abolir les sanctions pénales des récalcitrants pour les remplacer par une simple contravention, comme pour une personne transgressant le code de la route en faisant de la vitesse ou en ne respectant pas un signal d'arrêt — quelque chose qui ne serait pas accompagné d'une sanction pénale. Je m'attendais à voir un amendement à ce sujet mais il n'y en a pas.
Nous verrons peut-être apparaître un autre projet de loi avec cet amendement pour décriminaliser le fait de ne pas enregistrer son arme à feu mais, quoi qu'il en soit, si le projet de loi C-391 est rejeté et que le registre des armes d'épaule est maintenu sous sa forme actuelle — ou sous n'importe quelle forme, d'ailleurs —, on peut prévoir qu'il faudra dépenser des millions et des millions de dollars, mais peut-être pas 1 milliard, pour le mettre à jour et le rendre le moindrement exact du point de vue de l'état actuel de propriété des armes à feu dans ce pays. Ça va coûter cher, quel que soit le chiffre que vous choisissez d'accepter.
Évidemment, la vérificatrice générale a comparu devant ce comité et a sévèrement critiqué le registre des armes d'épaule lors de sa création. C'est elle qui avait identifié le milliard de dollars de dépenses excédentaires et l'inefficacité du registre. Elle n'est pas revenue sur la question depuis. Je pense que son nom figurait sur la liste des témoins de l'opposition. Il ne figurait en tout cas pas sur la nôtre. Je ne sais lequel des trois partis d'opposition voulait convoquer Mme Fraser. Quoi qu'il en soit, elle n'a pas particulièrement conforté leurs arguments que le registre des armes d'épaule fonctionne actuellement de manière efficiente et que les contribuables en ont pour leur argent, tout simplement parce qu'elle n'a pas réétudié le dossier.
Les témoignages que j'ai entendus, et je suis sûr que M. Holland, s'il se réveille, me dira qu'il en a un souvenir différent...
M. Mark Holland: Vous faites de l'obstructionnisme. Que voulez-vous que je fasse?
Une voix: Vous avez un travail à faire, M. Holland. Vous avez un travail à faire.
Des voix: Oh!
Le président: À l'ordre.
M. Brent Rathgeber: Étant donné que M. Holland dit explicitement dans sa motion que le comité « a entendu suffisamment de témoignages selon lesquels ce projet démantèlera un outil de promotion et d’amélioration de la sécurité publique et de la sécurité des policiers canadiens », j'ai pensé qu'il serait instructif pour le comité, avant de passer au vote, de faire le point sur certains des témoignages que nous avons recueillis.
Le premier témoin fut Candice Hoeppner, députée de Portage—Lisgar. Comme elle est l'auteure du projet de loi, elle a certes un point de vue bien arrêté mais son témoignage a mis plusieurs points en lumière.
Elle a dit que, statistiquement, les personnes qui ont un permis d'utilisation ou de possession d'une arme à feu sont en réalité 50 p. 100 moins susceptibles de commettre un crime que celles qui n'en ont pas. Elle a déclaré que le registre des armes d'épaule est au mieux un « outil d'enquête partiel » auquel les agents de police ne peuvent se fier, et que ce projet de loi — ceci est très, très important — n'abolira pas l'obligation d'obtenir un permis.
Mme Hoeppner a pris la parole en Chambre. Elle a exposé à la presse les mérites du projet de loi C-391. Elle a précisé, argument très valide et très convaincant, que son projet de loi n'aura strictement aucun effet, quel qu'il soit, sur les permis.
On a constaté un degré d'accord considérable de la part de tous les témoins sur le fait que c'est en matière de permis que les pouvoirs publics, les autorités étatiques, que ce soit la GRC, qui gère le registre des armes à feu, ou la police municipale... C'est par le mécanisme d'octroi des permis que les gens qui ne devraient pas être en possession d'armes à feu sont filtrés. Il faut se soumettre à une vérification de casier judiciaire. Il faut se soumettre à de rigoureux contrôles de sécurité. Si on ne passe pas les contrôles de sécurité et de casier judiciaire, on n'obtient pas de permis.
C'est donc le système d'octroi des permis qui permet de contrôler efficacement les armes à feu, monsieur le président. Ce n'est pas le registre des armes d'épaule, qui ne fait que révéler qui possède des armes, pas qui entre en contact avec elles. Comme l'ont dit maints témoins, il n'est utile que pour dénombrer les armes. C'est par l'octroi des permis que les gens qui ne devraient pas entrer en contact avec des armes se voient refuser un permis et, partant, le droit légal d'entrer en contact avec ces armes.
Je pense que Mme Hoeppner, comme d'autres, a tout à fait raison à ce sujet, et j'en profite d'ailleurs pour la féliciter et la remercier de tout le travail qu'elle a effectué sur ce dossier.
Nous avons ensuite entendu Rick Hanson, chef de la police de Calgary, qui a témoigné devant notre comité et devant le comité de la justice. Pour ceux d'entre vous qui ont pu oublier ses déclarations, je vais vous en lire quelques extraits:
Il est crucial de maintenir les sanctions criminelles pour la possession illégale d'armes à autorisation restreinte et d'armes prohibées, mais, à mon avis, le registre ne fait qu'effleurer le problème de la violence et des crimes commis à l'aide d'armes à feu au Canada.
En réponse à un député de l'opposition, le chef Hanson a dit que le Canada a besoin d'une « stratégie globale en matière d'armes à feu » mais que le registre « va trop loin ». Pour les criminels, a-t-il ajouté, le risque en vaut la peine parce que les conséquences sont minimes. La plupart des crimes commis à main armée le sont avec des armes de poing, dont une grande proportion entre au Canada en contrebande. S'il y a un problème d'armes à feu dans sa ville de Calgary, c'est certainement avec le crime organisé, tout comme dans la ville d'Edmonton, et dans la ville de Winnipeg de mon amie Mme Glover.
Voilà la clé, monsieur le président: aucun lien direct n'a été établi entre le registre actuel et le comportement des criminels. Je pense que c'est un argument très solide.
M. Holland aime dire qu'il n'y a que trois chefs de police rebelles dans tout le Canada et que le chef Blair s'exprime pour tous sauf ces trois-là. Statistiquement, il a peut-être raison mais, avant de décider comment nous allons voter sur cette motion recommandant à la Chambre de ne pas aller plus loin avec le projet de loi C-391, je pense qu'il conviendrait de faire une analyse qualitative de ce qu'ont dit les chefs respectifs, pas simplement de compter des mains.
Je pense qu'une analyse quantitative des chefs de police est insuffisante. Je pense qu'il nous incombe d'examiner la qualité de leurs arguments et de ce qu'ils disent.
Certaines personnes avaient beaucoup à dire à ce sujet. Nous avons entendu Jack Tinsley, qui a fait partie pendant 33 ans de la police de Winnipeg, dont 11 dans son équipe-choc. Il a témoigné que les drogues sont la cause sous-jacente de la plupart des crimes.
Les criminels ne demandent pas de permis de port d'armes et n'enregistrent pas leurs armes. Le registre des armes d'épaule n'a pas prouvé son effet dissuasif sur les crimes violents.
Il a aussi déclaré que ce n'est pas un outil d'enquête utile, et c'est là une remarque très, très importante, qui prête à controverse. En dernière analyse, je pense que le comité, s'il en a le temps, devrait se pencher sur cette question des agents de police à qui l'on a cloué le bec, à qui l'on a interdit de parler.
Je sais que cette question précise a été posée au chef Blair. Il a nié sans équivoque que lui-même ou quiconque relevant de son commandement ait imposé le silence à des policiers ou les ait muselés au sujet de leur opinion sur le projet de loi C-391.
Je crois le chef sur parole, mais nous avons entendu, pas nécessairement de Toronto... Je crois le chef sur parole mais nous avons entendu des gens de tous les coins du pays, des agents de police, qui ne nous autorisent d'ailleurs pas à les nommer, ce qui n'est pas étonnant, monsieur le président, mais qui voudraient s'exprimer en faveur du projet de loi C-391. Ils ne croient pas que le registre des armes d'épaule est un outil efficace d'exécution des lois.
Ni le chef Blair, ni Charles Momy de l'Association canadienne des policiers, ne s'expriment efficacement ou exactement en leur nom, mais ils ne disent rien parce qu'ils ont peur de ne pas obtenir de promotion ou de devoir passer le reste de leurs jours à infliger des amendes à des petits vieux pris avec de faux tickets d'autobus. Je sais que ce n'est pas ce que recherchent les agents de police: infliger des contraventions de stationnement pendant 20 ans.
Nous avons donc entendu cela, et je pense que le fait que ces agents aient été muselés est important. C'est selon Jack Tinsley. Il nous a parlé de la Nouvelle-Zélande, pays que je n'ai jamais visité mais où je devrais aller, parce que la Nouvelle-Zélande a aboli son registre au bout de sept ans. En Australie, le programme a été un échec. La criminalité violente a en fait augmenté en Australie durant l'existence du registre des armes d'épaule.
Le jour où nous avons accueilli M. Tinsley, le 6 mai 2010, nous avons également entendu Dave Shipman, également de la police de Winnipeg, qui a 25 années d'expérience, dont 19 dans l'unité des homicides et des vols. Il a été très franc dans son témoignage. Il a été très humble.
Il nous a dit, monsieur le président, que son expérience lui a appris que les homicides domestiques sont commis par des propriétaires légaux d'armes d'épaule légales là où il n'y avait pas eu auparavant de troubles domestiques et que — ceci est important — le registre des armes d'épaule n'y change rien.
Il a fait partie de l'unité des homicides et des vols. Il a reconnu que, de temps à autre, et peut-être plus souvent que de temps à autre, des armes d'épaule sont utilisées dans des bagarres domestiques, mais que, dans la prépondérance des cas, il n'y avait pas d'antécédents et que le registre des armes d'épaule n'y aurait rien changé. Le registre des armes d'épaule est inutile pour empêcher ou même résoudre ce genre de crimes.
M. Shipman nous a dit que les criminels n'enregistrent pas leurs armes. La plupart des armes qu'ils utilisent sont des armes volées ou introduites au Canada en contrebande, et le registre des armes d'épaule n'en empêche pas la possession illégale.
Dans le Nord canadien, il n'est pas conçu pour empêcher la possession illégale d'armes à feu. Même si le registre des armes d'épaule avait l'efficacité maximum envisagée lors de sa conception, ce ne serait toujours qu'un registre des personnes possédant légalement des armes à feu. Il ne saurait aider les organismes policiers à dépister la possession illégale d'armes à feu. Il n'a même pas été conçu pour ça.
M. Shipman a confirmé ce que les députés de ce côté-ci de la table ont toujours soupçonné: le registre des armes d'épaule sert à dénombrer les armes à feu. Bon nombre d'armes à feu possédées légalement sont en dehors du registre. J'en ai parlé il y a quelques minutes. Les amnisties vont coûter des millions et des millions de dollars pour faire en sorte que 50 p. 100 des armes à feu qui sont actuellement domiciliées au Canada soient enregistrées si le gouvernement décide que ce registre des armes d'épaule a de la valeur. Évidemment, en ce qui concerne les armes d'épaule, je ne le crois pas.
M. Shipman nous a dit que la plupart des agents de police n'utilisent pas le registre. De fait, ils ne savent même pas comment s'en servir. C'est là une information tout à fait remarquable et convaincante, monsieur le président. Nous savons, d'après ce que nous ont dit Charles Momy et l'Association canadienne des policiers, le chef Blair, chef de l'Association canadienne des chefs de police, et Marty Cheliak, le surintendant du registre, que les services de police sillonnent en ce moment même tout le pays... Je sais qu'ils sont allés à Saskatoon, à Winnipeg, à Esteban et ailleurs. Ils sont allés partout. De fait, nous avons un exemplaire des diapositives qu'ils utilisent pour apprendre aux policiers de première ligne comment utiliser un...
Je regrette, je vais devoir vous interrompre. Comme c'est l'habitude au sein de ce comité, nous suspendons la séance quand la cloche commence à sonner. C'est seulement une suspension de séance.
Membres du comité, je suspends la séance et nous la reprendrons une dizaine de minutes après la tenue du vote, une fois que nous aurons le quorum. C'est seulement une suspension de séance.
Nous allons reprendre nos travaux après la tenue du vote en Chambre.
On m'a dit que quelqu'un souhaite faire un rappel au règlement.
Allez y, Maria, pour votre rappel au règlement.
[Français]
[Traduction]
[Français]
Madame Mourani, il n'a pas terminé, mais le président vous accorde la parole pour invoquer le Règlement.
[Traduction]
Non, il n'a pas terminé. Formulez donc votre rappel au règlement, expliquez-le, et je rendrai ensuite la parole à M. Rathgeber.
[Français]
Je voulais soulever deux ou trois points relativement à la motion. Je ne sais pas si c'est vraiment un rappel au règlement.
Monsieur le président, ce n'est pas un rappel au Règlement. Je ne me sens pas à l'aise d'appeler cela un rappel au Règlement. Je préfère que M. Rathgeber termine son intervention. Par la suite, j'aurai trois minutes pour exposer mon point de vue.
Je m'excuse si j'ai mal prononcé votre nom, monsieur.
[Traduction]
Ai-je la parole?
Monsieur le président, membres du comité, je résume en disant que je crois que cette motion proposée par le député d'Ajax--Pickering ne reflète pas correctement les témoignages que nous avons recueillis, loin de là.
Je pense que la prépondérance des témoignages... J'ai certainement discuté d'une bonne partie des témoignages avec Mme Hoeppner et Mme Glover, entre autres, et nous avons la ferme conviction que les agents de police et les experts qui ont été convoqués, pas nécessairement ceux qui représentaient leurs organisations mais les agents de première ligne, ont témoigné que le registre des armes d'épaule ne contribue en rien à la sécurité publique et ne fait certainement rien pour promouvoir la sécurité des agents de police canadiens.
Sur ce, monsieur le président, j'invite tous les membres du comité à voter contre la motion de M. Holland et je cède la parole à Mme Mourani.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Depuis le début de ce débat sur cette motion, je n'ai pas pris la parole. Avant de terminer, je tenais à dire au moins pourquoi on appuiera cette motion. Il faut au moins la justifier.
Dès le début du projet de loi C-391, on a toujours été très clairs. On est contre ce projet de loi. À notre avis, c'est un mauvais projet de loi qui risque d'avoir un impact négatif important sur la sécurité publique du Québec et du Canada et on estime que ce projet de loi ne pouvait pas être amendé.
Il n'est pas amendable et plusieurs personnes sont venues nous dire cela, que ce soit Mme Cukier ou d'autres intervenants qui représentent des groupes de victimes.
De plus, nous n'avions et nous n'aurons aucun amendement à ce projet de loi. D'ailleurs, je dirais que le débat a été expurgé. Quant à moi, on en a tellement parlé que les dés sont jetés et la motion de M. Holland vient concrétiser le fait que le débat est terminé et que nous ne devrions plus continuer l'étude ce projet de loi.
Nous allons appuyer cette motion. Je trouve bien dommage que dans toutes les séances, malheureusement, on n'ait pas vraiment écouté la voix du Québec. Le ministre de la Sécurité publique du Québec est venu et ne semble pas être écouté. Le Québec n'est pas vraiment écouté dans ce dossier.
Par ailleurs, j'ai trouvé regrettable, dans tout le débat qu'on a pu avoir, de constater cette tendance à vouloir discréditer certains chefs de police. Personnellement, j'ai trouvé ça dommage. Notamment, on semblait dire que M. Blair avait intimidé des policiers qui ne seraient pas en faveur du registre.
À mon avis, comme on dit en bon français, les carottes sont cuites et nous devrions commencer à procéder à un vote et arrêter de faire de l'obstruction systématique.
Voilà, nous voterons en faveur de la motion. Je vous remercie.
[Traduction]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication