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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 007 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er avril 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Il s'agit de la septième réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous poursuivons notre étude du système correctionnel fédéral, notamment en ce qui touche la santé mentale et la toxicomanie.
    Nous aimerions souhaiter la bienvenue à nos témoins pour les 45 premières minutes de notre réunion. Mme Oades est sous-commissaire pour les femmes. Mme Jackson est directrice générale des services cliniques. Mme Thompson est directrice régionale des services de santé de la région des Prairies. Bienvenue, mesdames.
    Comptez-vous faire une déclaration préliminaire?
    Allez-y. Merci.
    Merci.
    Bonjour à vous, monsieur le président et membres du comité. Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour discuter des questions qui touchent les délinquantes sous responsabilité fédérale.
    Dans ce bref discours d'ouverture, je ne tiens pas à répéter les propos de l'ancienne sous-commissaire pour les femmes qui a comparu devant votre comité en novembre. J'aimerais plutôt faire le point sur les progrès des cinq derniers mois dans le dossier des délinquantes.
    Dans un premier temps, je sais que les membres du comité ont eu l'occasion de visiter certains de nos établissements à la fin de l'an dernier, dont le Pavillon de ressourcement Okimaw Ohci pour femmes autochtones et le Centre psychiatrique régional de Saskatoon, qui est doté de l’unité Churchill, unité spécialisée pour traiter les délinquantes ayant besoin de soins intensifs en santé mentale. Vous avez été témoins, lors de ces visites, de deux approches très différentes que nous employons pour gérer une population de délinquantes dont le profil est complexe et diversifié. Si les membres du comité ont l'intention de visiter l'un de nos cinq établissements régionaux pour femmes pour élargir vos connaissances sur la façon dont nous prenons en charge la majorité des délinquantes, je me ferai certainement un plaisir d’organiser la visite.
    Les questions de santé mentale nous posent toujours d'importantes difficultés; malgré cela, nous nous efforçons d'être à l'affût de nouvelles stratégies pouvant convenir à tous — aux délinquantes, au personnel du SCC et au grand public. Nous collaborons à cette fin avec la Direction de la recherche, qui est en train de dresser un profil national des besoins des délinquantes en santé mentale. Ce profil nous aidera à mieux cibler nos interventions, à conseiller plus efficacement les délinquantes et à leur offrir des programmes adaptés à leurs besoins et à ceux de la collectivité.
    Nous sommes également en train de revoir la façon dont nous gérons les délinquantes qui présentent un risque élevé pour les autres détenues et pour le personnel du SCC. Nous suivons en ce moment ce que l'on appelle le protocole de gestion, lequel a fait l'objet de critiques de la part de l'enquêteur correctionnel et de l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, notamment. Le SCC admet que l'approche en question n'est pas idéale, et c'est la raison pour laquelle nous sommes en train de réviser notre stratégie, dans le but de délaisser le protocole de gestion. Nous avons d'ailleurs participé au cours des derniers mois à des consultations nationales, de concert avec des intervenants de l'extérieur et des experts. J'attends très prochainement un rapport sur leurs conclusions, qui nous aidera à élaborer une autre approche plus exhaustive qui concorde davantage avec un plan correctionnel intégré.
    Dans le cadre du programme de transformation du SCC, nous en sommes aux dernières étapes de la mise en oeuvre de la stratégie communautaire pour les délinquantes. Celle-ci permettra de mieux soutenir les femmes libérées sous condition et de multiplier les possibilités à leur endroit. Comme plus de la moitié des délinquantes sous responsabilité fédérale vivent dans la collectivité, la stratégie aura des répercussions sur la plupart des délinquantes à notre charge. Je suis particulièrement fière de ce nouveau modèle qui améliorera le continuum des soins, encadrera mieux les délinquantes lors de leur transition dans la collectivité et améliorera les résultats en matière de sécurité publique pour l'ensemble des Canadiens.
    Je continue de collaborer étroitement avec mes collègues des services de santé, avec le Bureau de l'enquêteur correctionnel et avec d'autres partenaires pour veiller à ce que nous échangions de l'information et des pratiques exemplaires sur la façon de gérer efficacement nos cas plus complexes. À ce sujet, j'organise régulièrement des téléconférences et des réunions en personne avec les directeurs et directrices d'établissement pour femmes et d’autres responsables, au besoin.
    Je terminerai en vous disant que je suis ravie d'avoir à relever tous les défis de mon nouveau poste et que j'ai très hâte de me mêler aux autres membres de l'équipe: ils font un travail remarquable en s'efforçant quotidiennement d'améliorer la vie des délinquantes et en veillant à ce qu'elles réintègrent la société à titre de citoyennes respectueuses des lois.
    Je vous remercie.
(1535)
    Mme Thompson et moi-même avons le plaisir d'être ici aujourd'hui pour vous entretenir des questions touchant le programme de traitement de substitution aux opiacés offert aux délinquants du Service correctionnel du Canada (SCC). Le commissaire, M. Don Head, et la commissaire adjointe des services de santé, Mme Leslie MacLean, se sont présentés devant vous en juin 2009 et vous ont donné de l'information sur les initiatives et les stratégies que le SCC met de l'avant en santé mentale. Aujourd'hui, je vais vous informer sur le programme de traitement de substitution aux opiacés que le SCC a mis en place.
    L'usage de drogues injectables, et surtout l'échange de matériel d'injection, comporte un risque important de transmission des maladies infectieuses, comme le VIH et l'hépatite C. La toxicomanie est aussi un facteur qui contribue à la perpétration de nombreux crimes. Le fait d'offrir un programme de traitement de substitution aux opiacés aux délinquants sous responsabilité fédérale permet de réduire la demande de drogue et d'améliorer du coup la capacité de notre organisation à contribuer à la sécurité publique.
    Une étude a démontré qu'une participation active à un programme de traitement de substitution aux opiacés était associée à des résultats positifs de la mise en liberté. Johnson et al. (2001) ont découvert que les délinquants qui avaient participé à un programme de traitement d'entretien à la méthadone pendant leur incarcération étaient 28 p. 100 moins susceptibles d'être réincarcérés après leur libération que ceux qui n'avaient pas été traités.
    Je vais vous parler de la création du programme, qui était au départ appelé Programme national de traitement d'entretien à la méthadone. Il a été mis en oeuvre en deux phases. La première, introduite en 1997, s'adressait aux délinquants qui avaient une dépendance aux opiacés et qui suivaient un traitement d'entretien à la méthadone dans la collectivité. Ils pouvaient dès lors continuer leur traitement pendant leur incarcération. La deuxième phase, annoncée en mai 2002, a accru la capacité de SCC de permettre aux délinquants qui réclamaient de la méthadone d'amorcer un traitement en établissement, si un médecin le jugeait approprié.
    En décembre 2008, le programme de traitement d'entretien à la méthadone a été renommé Programme national de traitement de substitution aux opiacés en raison de l'ajout d'un autre médicament de substitution appelé Suboxone.
    Un traitement de substitution aux opiacés, lorsqu'il est accompagné d'un programme d'apprentissage cognitif, d'un suivi intensif et de soutien, est très efficace pour aider ceux qui ont une dépendance aux opiacés. Les médicaments employés peuvent les aider à se libérer du cycle perpétuel de sevrage et de consommation. En stabilisant leur état, le traitement de substitution permet aux délinquants de se concentrer sur leurs travaux scolaires, de participer aux programmes, de travailler et, du coup, d'accroître leur capacité à participer activement à leur plan correctionnel.
    Avant d'amorcer un traitement, le délinquant fait l'objet d'une évaluation détaillée de son état de santé physique et mentale pour déterminer s'il satisfait aux critères, l'un d'eux étant d'avoir obtenu un diagnostic de dépendance aux opiacés d'un médecin. À l'instar des pratiques qui ont cours dans la collectivité, le processus d'évaluation comprend une lecture des règles du programme, qui sont énoncées dans une entente de traitement que doivent signer le délinquant et les fournisseurs de soins, entente dans laquelle chaque partie atteste de ses engagements, notamment d'assurer un suivi continu.
    En 2009-2010, le programme de traitement de substitution aux opiacés du SCC a coûté plus de 12 millions de dollars. En janvier 2010, 701 délinquants, dont 55 femmes, y participaient dans l'ensemble du pays. Cela équivaut à plus de 1 000 délinquants chaque année si l'on tient compte du roulement de la population. Le programme est géré suivant l'approche d'une équipe multidisciplinaire composée de spécialistes de la gestion de cas, des programmes et des services de santé, conformément aux lignes directrices nationales.
    En 2009, des 512 délinquants admis au programme de traitement de substitution aux opiacés du SCC offert dans la collectivité, la majorité provenait d'établissements correctionnels provinciaux. La plupart de ces derniers assurent le traitement des délinquants qui prennent déjà de la méthadone dans la collectivité. Les délinquants qui prennent déjà de la méthadone poursuivent leur traitement lorsqu'ils sont admis dans un établissement fédéral, le temps d'être évalués pour vérifier qu'ils satisfont aux critères du programme.
    Par mesure de sécurité, les délinquants demeurent sous observation pendant 20 minutes après avoir pris leur dose de méthadone. On s'assure ainsi qu'ils ont absorbé tout le médicament et on réduit les risques qu'ils ne le dissimulent pour l'utiliser à d'autres fins. C'est un membre du personnel infirmier qui remet le médicament au délinquant et l'observe pendant qu'il l'avale.
    Tous les délinquants qui se font traiter doivent participer aux programmes courants de traitement de la toxicomanie. Ceux-ci sont adaptés aux toxicomanes qui ont une dépendance aux opiacés et sont donnés par des agents de programmes correctionnels formés. Les délinquants doivent aussi rencontrer régulièrement leur équipe d'intervention qui fait le suivi de leur progression.
    Le programme de traitement de substitution aux opiacés fait régulièrement l'objet de révisions de la part des médecins et des établissements, le but étant de repérer de manière précoce tout sujet de préoccupation, d'adapter les séances de formation destinées au personnel et de modifier les politiques définissant les procédures.
    Une préparation rigoureuse est effectuée pour chaque délinquant appelé à poursuivre son traitement de substitution aux opiacés dans la collectivité une fois qu'il est libéré, pour s'assurer d'une transition en douceur et de soins continus. Le processus débute dès qu'il amorce le programme. On vérifie et on confirme six mois avant sa libération qu'un fournisseur est disponible pour lui dans la collectivité.
    Je vous remercie.
(1540)
    Madame Thompson, la parole est à vous.
    D'accord.
    Nous allons donc donner la parole à l'opposition officielle pour une série de questions et de commentaires de sept minutes.
    Monsieur Holland, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, en fait, si vous me le permettez, avant de poser mes questions, j'aimerais commencer avec un rappel au Règlement.
    Je crois qu'il importe que les membres du comité ne s'entendent pas toujours pour déterminer qui a la meilleure politique, mais je crois que le fait d'attribuer une intention à un autre membre est très problématique. À titre de membres du comité, Mme Glover et moi-même avons tous les deux participé à un forum, et il a été déclaré que la raison pour laquelle les libéraux défendent les politiques qu'ils défendent est qu'ils sont en conflit d'intérêts. On a dit que nous appuyons les criminels, car ils votent pour le Parti libéral.
    Cela a été dit. Le compte rendu en fait foi.
    Permettez-moi de dire une chose, madame Glover: vous êtes une bonne personne. Je ne remets pas en question vos intentions. Je ne suis pas d'accord avec les politiques que vous défendez peut-être, mais je ne remets jamais en question vos intentions. L'idée que je me soucie moins, en quelque sorte, du bien-être de mes enfants ou de ma famille que vous vous souciez de celui des vôtres nuit grandement à ce processus.
    Je demanderais seulement à Mme Glover de rectifier le compte rendu à ce sujet. C'était un commentaire fâcheux, et je lui demanderais de se rétracter. Les mots exacts étaient que les libéraux avaient un intérêt direct, car les prisonniers votent pour eux. Voilà ce que vous avez dit.
    Je crois simplement que c'est le type de discussion qui attribue des intentions à d'autres membres et j'estime que c'est très décevant. Je vous demanderais, madame Glover, de vous rétracter.
    Je ne suis pas certain que ce soit un rappel au Règlement, monsieur Holland. Je ne vois pas comment cela puisse l'être.
    Allez-y et posez votre question.
    Pour moi, ce l'était.
    Allez-y et posez votre question.
    Merci aux témoins de comparaître devant le comité aujourd'hui. J'apprécie énormément que vous ayez pris le temps de le faire.
    L'une des choses qui me préoccupent, évidemment, est que plus de 80 p. 100 de nos détenus sont confrontés à des problèmes de toxicomanie. Alors ils viennent souvent dans nos installations à cause de ces problèmes. Le principal moyen que le gouvernement au pouvoir a trouvé pour composer avec la toxicomanie a été de tenter d'interdire l'accès aux drogues. On a dépensé énormément d'argent pour ce faire. Maintenant, nous savons qu'en 2005, les tests d'urine faits au hasard ont révélé que la consommation de drogue dans les prisons se situait à 12 p. 100 et qu'en 2008, la dernière année pour laquelle nous avons des données, elle s'élevait à 13,2 p. 100.
    Vous savez combien d'argent a été investi dans ces mesures restrictives, et vu que la consommation de drogue dans les prisons a, en fait, augmenté pendant cette période, dans quelle mesure, selon vous, ces dépenses sont-elles efficaces?
    Je crois que nous pouvons dire que nous avons des preuves qui montrent que les programmes de prévention de la toxicomanie auxquels les contrevenants participent donnent généralement des résultats positifs. Les contrevenants sont plus en mesure d'y participer et ils obtiennent de meilleurs résultats après...
    Désolé de vous interrompre, mais je crois que vous n'avez pas bien compris la question.
    Je suis très favorable aux programmes de traitement des détenus. Je parle du financement. Je me demande si vous savez combien d'argent a été investi pour empêcher l'entrée de drogues dans le système. On a dépensé des sommes astronomiques pour bloquer l'accès des drogues au système, et pourtant, au même moment, les taux de consommation ont augmenté au cours des dernières années. Alors je vous demande ce que vous pensez de l'efficacité de ces dépenses.
    Je n’ai pas les données relatives aux dépenses, mais nous pouvons vous les faire parvenir. Au cours des dernières années, on a déployé des efforts considérables pour lutter contre le trafic des drogues, grâce à de nouveaux procédés, dont les chiens détecteurs de drogues. Nous pouvons donc vous fournir ces chiffres. Nous pouvons probablement vous fournir des mises à jour… Êtes-vous en train de sous-entendre que les rapports d’analyse d'urine indiquent qu’un grand nombre de délinquants continuent de consommer de la drogue?
(1545)
    Tout à fait.
    J’ignore si c’est encore le cas, mais nous allons vérifier et vous transmettre ces renseignements.
    Je vous remercie. Je sais que les témoins vont en discuter plus tard, mais il y a un autre sujet qui me préoccupe grandement. Il s’agit de la prévalence du VIH-sida, de l'hépatite C et des maladies infectieuses en général dans le système carcéral. À titre d'exemple, nous savons que quelque 30 p. 100 des détenus ont l'hépatite C et que le taux d’infection au VIH est 10 fois plus élevé en prison que dans la population moyenne.
    On oublie souvent que 91 p. 100 des détenus seront un jour relâchés dans la société, ce qui pose non seulement une menace pour la santé dans les prisons, mais aussi une menace grave pour la santé publique en dehors des prisons. Donc, étant donné que des témoins vont venir plus tard dans la journée nous dire que le taux des maladies infectieuses augmente au lieu de diminuer, que faites-vous précisément pour arrêter la propagation des maladies infectieuses dans les prisons?
    Il y a un certain nombre d'initiatives de promotion de la santé dans les prisons qui aident à réduire la propagation de l'infection. Nous offrons aux détenus une éducation sanitaire. L'un des objectifs du programme de traitement à la méthadone consiste à aider à réduire la propagation de l'infection et la demande quant à la consommation de drogues injectables. Nous fournissons également des dispositifs de prévention tels que des préservatifs, des digues dentaires et des vaccins, ce qui aide également à réduire le taux d'infection.
    Selon vous, ces programmes ont-ils assez de ressources? En outre, comment évaluez-vous l'efficacité de ces programmes, en particulier compte tenu du fait que le taux de maladies infectieuses dans nos prisons continue de grimper et se situe à un niveau incroyablement élevé par rapport au reste de la population?
    Effectivement. Ce n'est pas seulement la propagation à l'intérieur de la prison, mais aussi les comportements des gens qui sont admis dans la prison. De manière générale, les comportements à risque de la population carcérale sont beaucoup plus importants que les comportements à risque de la population en général avant l'admission dans les prisons. Nous continuons de surveiller l'efficacité des différents programmes offerts dans les prisons pour voir quels sont les résultats et pour les améliorer en fonction des résultats ainsi que de leur efficacité en dehors du milieu carcéral.
    Madame Oades, en ce qui concerne la santé mentale en particulier, nous savons que les détenues sont plus susceptibles que d'autres d’avoir des problèmes de santé mentale. Les policiers nous disent, entre autres, qu'ils n'ont pas d'installations pour les personnes atteintes de maladie mentale. Ainsi, ces personnes finissent par être entassées dans les prisons qui deviennent de ce fait des établissements psychiatriques ne recevant pas suffisamment de ressources. Actuellement, plus de 20 p. 100 des femmes ont des problèmes de santé mentale graves, et l'on dit même que le pourcentage serait encore plus élevé en raison de l'absence d’un diagnostic approprié. Compte tenu de ces statistiques, pouvez-vous évaluer l'efficacité des efforts jusqu’à maintenant pour trouver d'autres moyens d’aider les femmes souffrant d’une maladie mentale à ne pas aboutir en prison? Selon vous, que faut-il faire pour réduire ces chiffres dangereux?
    Je crois qu’actuellement, jusqu'à 24 p. 100 des femmes incarcérées dans les prisons fédérales ont un trouble de santé mentale grave. Nous ne parlons pas simplement de troubles de personnalité antisociale, mais bien de troubles graves.
    C'est une grande source de préoccupation qui demeure un énorme défi. Si je me souviens bien, quand le commissaire Head est venu témoigner il n'y a pas longtemps… C’est une question d’équilibre: jusqu’à quel point voulons-nous être, de fait, un établissement de santé mentale, mais nous devons aussi faire quelque chose pour ces délinquantes, qui ont manifestement besoin d’aide. Il faut trouver cet équilibre.
    Pour ce qui est du volet communautaire, si nous ne voulons pas qu’elles se retrouvent en prison, il faut que ce soit une initiative à laquelle participeraient tous les paliers de gouvernement et probablement le secteur privé, un secteur bénévole.
    Il n'y a pas de solution simple à cette crise naissante.
(1550)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Desnoyers, du Bloc québécois.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Ma première question est semblable à celle de mon collègue. C'est un sujet sur lequel je me questionne énormément.
     Comment fait-on pour empêcher l'entrée de drogues en prison? Il me semble que la prison est un endroit tellement sécurisé. Comment réussit-on à y faire entrer de la drogue? J'avoue ne pas connaître les procédés employés à ces fins. Je ne sais pas si vous les connaissez. Quoi qu'il en soit, je trouve ça inquiétant. Si on bloquait ce processus dès le départ, on réglerait une grande partie des problèmes.
    Oui.
    Comme mon collègue, j'aimerais que vous nous fassiez part d'analyses et de chiffres précis. Je voudrais savoir ce qui est fait et combien d'argent est dépensé pour contrôler cette situation. En fin de compte, on investit des millions de dollars, mais si on en consacrait une partie à cela, on n'aurait peut-être pas besoin d'investir autant d'argent ailleurs.

[Traduction]

    Brièvement, j’aimerais dire que j’ai déjà travaillé pour une ONG oeuvrant dans le secteur correctionnel et j'ai beaucoup collaboré avec des administrations du monde entier. Jusqu’à maintenant, nous n'avons trouvé aucune prison dans le monde qui a réussi à éviter que de la drogue entre dans les prisons, malgré les meilleurs efforts de tout un chacun. Nous continuons d'avoir des chiens détecteurs de drogue. Nous avons apporté des améliorations à nos entrées principales relativement au matériel, aux évaluations des menaces et des risques actuelles et aux détecteurs ioniques.
    À moins de fermer une prison et d’y interdire en tout temps l’accès à tous les visiteurs, bénévoles ou qui que ce soit, je crois que ce sera impossible, malgré nos meilleurs efforts. Les gens usent de beaucoup de créativité pour faire entrer de la drogue en prison. C’est parfois lancé par-dessus la clôture. C'est difficile, mais nous faisons de notre mieux.

[Français]

    Avez-vous des statistiques permettant de déterminer si on réussit à réduire l'entrée de drogues?

[Traduction]

    J’ai vu quelques statistiques récemment, si je me souviens bien. Je vais me renseigner et vous revenir là-dessus. Un rapport quotidien est produit relativement à la contrebande saisie ou trouvée à la suite de fouilles dans les cellules. Elle peut avoir été amenée par quelqu’un, jetée par-dessus la clôture, etc. Comme je reçois des rapports depuis un certain temps, je constate une augmentation du nombre des saisies.

[Français]

    D'après ce que vous savez, avec l'introduction du traitement à la méthadone, a-t-on réussi à réduire les maladies infectieuses à l'intérieur des centres correctionnels?

[Traduction]

    D’après les recherches effectuées dans divers pays, les personnes traitées à la méthadone sont moins susceptibles de… La raison pour laquelle on administre le traitement à la méthadone, c’est pour réduire leur dépendance aux drogues, ce qui entraîne des comportements à risque liés aux maladies infectieuses. C’est donc ce que nous croyons.

[Français]

    Est-il difficile d'arrêter de prendre de la méthadone, une fois qu'on a commencé à suivre ce programme?

[Traduction]

    De manière générale, la méthadone est prescrite pour les personnes dont le diagnostic est la dépendance aux opiacés. Il ne s’agit pas de simples abus d'opiacés, mais d’une dépendance. C’est un traitement à long terme. En général, ce n'est pas un traitement que l’on suit et que l’on arrête facilement. La méthadone substitue l’opiacé. Or, elle n’a pas l’effet euphorisant d’un opiacé. Elle arrête l’état de manque ainsi que le sevrage. Ce traitement permet à une personne de se stabiliser pour qu'elle brise le cycle du besoin maladif et du sevrage d’une drogue.
    Cependant, parfois, les gens arrêtent le programme volontairement ou involontairement. Dans ces cas-là, en étroite collaboration avec les médecins, il faut diminuer la consommation de la drogue extrêmement lentement pour réduire les symptômes du sevrage, mais les gens continuent de le ressentir.
(1555)

[Français]

    Vous avez dit que c'était un traitement à long terme. Combien de temps dure-t-il?

[Traduction]

    Certaines personnes le suivent pendant 10, 15 ou 20 ans et même toute leur vie.
    Des années.
    C'est exact.

[Français]

    Dans le dernier rapport de l'enquêteur correctionnel, le traitement à la méthadone était l'une des principales sources de plaintes de la part des détenus. Pourquoi se plaignent-ils de ce traitement?

[Traduction]

    Je suis désolée, mais les plaintes dont il est question ne me sont pas familières. Il faudrait que j’en sache plus sur ces plaintes particulières.
    De manière générale, les plaintes des délinquants sont liées au temps d'attente. Parfois, ils peuvent être mécontents s’ils ne sont pas admis au programme, entre autres. Je ne connais pas les détails, et il m’est donc difficile de commenter.

[Français]

    Est-ce que les problèmes observés chez les hommes sont les mêmes chez les femmes, qu'il s'agisse de l'entrée de drogues dans les prisons ou du recours à divers traitements reliés à la consommation de drogues? Qu'en est-il des statistiques à ce sujet?

[Traduction]

    Pour vous donner une idée du nombre de femmes traitées à la méthadone, je vous dirais qu’en moyenne, 700 délinquants suivent ce traitement. En janvier, je crois qu’il y en avait 719, dont 55 femmes.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Pour ce qui est du pourcentage, il faudrait que je le calcule.

[Français]

    L'entrée de drogues dans ces centres correctionnels pour femmes est-elle aussi évidente que dans le cas des hommes?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    On peut donc dire que notre système est équitable: on laisse entrer autant de drogues pour les femmes que pour les hommes.
    Exactement.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Davies, vous avez sept minutes.
    Je vous remercie d’être des nôtres aujourd’hui.
    J'ai écrit rapidement, mais je crois avoir noté l’essentiel. L’un de vous a dit que l’échange de l’attirail était une source majeure de transmission des maladies. Je vais vous lire une brève citation d'un mémoire que nous avons reçu de l'analyste principale des politiques du Réseau juridique canadien VIH/sida:
    La toxicomanie est un facteur contribuant au comportement criminel de 70 p. 100 des délinquants admis dans des pénitenciers fédéraux. Étant donné la rareté des aiguilles et des seringues dans les prisons, les consommateurs de drogues injectables, y compris les toxicomanes, sont plus susceptibles de partager le matériel d'injection dans les prisons que dans la collectivité, augmentant de ce fait le risque de contracter le VIH et le VHC.
    Les programmes visant à assurer un accès à du matériel d'injection propre sont donc un élément important d'une approche exhaustive axée sur la réduction de la vulnérabilité des détenus au risque d'infection au VIH et au VHC.
    Les meilleures données existantes permettent fortement de supposer que les programmes d'échange de seringues en prison, réalisés dans certains pays, ont pour effet de réduire les comportements à risque et les maladies, ne causent pas une augmentation de la consommation de drogues, injectables ou non, ne mettent pas en danger la sécurité du personnel ou des détenus et ont d'autres incidences positives sur la santé des détenus, y compris une augmentation des inscriptions des consommateurs à des programmes de traitement de la toxicomanie.
    Je me demande si quelqu'un parmi vous aimerait faire des observations à ce sujet. Est-ce exact ou non?
    C'est une question différente de ce à quoi je m’attendais.
    Je crois qu'il y a eu des recherches pour montrer que la fourniture de matériel sécuritaire et stérile dans certains milieux réduit effectivement le taux d'infection. Toutefois, les stratégies de réduction des préjudices du SCC comprennent, comme je l'ai déjà mentionné, des volets tels que l'éducation et la formation. De plus, nous fournissons des digues dentaires et des préservatifs, et nous fournissons aussi de l'eau de Javel. Cependant, nous n'avons pas de programme d'échange de seringues actuellement.
    Voici la dernière phrase de la citation — et je suis désolé, je n'avais pas l'intention de l’omettre, mais je crois que c’est important.
Ces observations ont été confirmées dans le document intitulé Prison Needle Exchange: Review of the Evidence, une étude effectuée en 2006 par l’Agence de la santé publique du Canada à la demande de Service correctionnel du Canada.
    Ce rapport vous est-il familier? D’accord.
    La raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que nous nous opposons à la drogue en prison, mais nous avons un traitement à la méthadone, qui est un opiacé. Nous nous opposons aux rapports sexuels entre les détenus en prison, mais nous offrons des digues dentaires et des préservatifs. Nous nous opposons à avoir de l’attirail en prison, mais nous fournissons de l'eau de Javel. Notre comité a vu un attirail artisanal très choquant que les détenus s’échangeaient entre eux.
    Je me demande seulement si ce ne serait pas sensé de franchir cette dernière étape, c’est-à-dire d’éviter au moins de propager la maladie si l’on consomme de la drogue en prison. Comme l'a souligné mon collègue, cette maladie peut avoir des répercussions sur la population générale et devenir également un problème de santé publique. Cette conclusion n’est-elle pas logique?
(1600)
    À mon avis, à ce stade-ci, d’après les résultats, SCC a un certain nombre d'initiatives en place concernant la réduction des préjudices, dont j’ai parlé, mais nous ne prévoyons pas actuellement de programme d'échange de seringues ou d'autres accessoires.
    J’aimerais maintenant aborder la question de la santé mentale.
    M. Sapers a comparu devant notre comité en juin dernier et a dit ce qui suit:
Le Service correctionnel du Canada souffre surtout d'un problème de capacité qui l'empêche de traiter le nombre croissant de délinquants qui ont de graves problèmes de santé mentale. Et le problème est aggravé par le fait que le Service n'est pas en mesure de recruter et de garder des professionnels qualifiés formés en santé mentale et que le personnel chargé de la sécurité n'est pas bien équipé pour composer avec les comportements nuisibles qui découlent de problèmes de santé.

Par exemple, au Service correctionnel du Canada, le psychologue passe la majeure partie de sa journée à faire des évaluations de risque obligatoires afin de satisfaire aux exigences de sécurité ou de mise en liberté conditionnelle, plutôt qu'à traiter ou à rencontrer des délinquants qui ont besoin de ses services cliniques.

Les délinquants qui éprouvent des problèmes graves ou ont besoin d'une intervention spécialisée peuvent être renvoyés dans l'un des cinq centres régionaux de traitement, mais seulement s'ils satisfont aux critères d'admission, c'est-à-dire s'ils souffrent d'une maladie psychiatrique aiguë et grave. Le plus souvent, toutefois, le délinquant est mis en observation au centre régional pour être ensuite renvoyé en établissement après une période de stabilisation. En raison du nombre de cas, les centres régionaux sont devenus un lieu de passage où se succèdent les renvois, les admissions et les congés.

L'écrasante majorité des détenus atteints de maladie mentale ne satisfont généralement pas aux critères d'admission qui leur permettraient de bénéficier des services des centres régionaux de traitement. Ils restent donc dans les établissements ordinaires et leurs maladies sont souvent présentées comme des problèmes de comportement
    Ce ne sont pas des troubles mentaux à proprement parler.
    Cela semble coïncider avec ce que j'ai observé au cours des visites de prison auxquelles j'ai participé. Bon nombre de nos prisonniers sont atteints de maladies mentales. Nous ne réussissons pas très bien à prodiguer des soins de santé mentale intermédiaires, et nous ne permettons pas aux détenus de passer beaucoup de temps avec des conseillers et des thérapeutes. De l’endroit où vous vous tenez, constatez-vous la même chose?
    Je vais commencer, et je laisserai les experts terminer.
    Le dossier de la santé mentale est certainement un défi de taille. La plus grosse difficulté consiste à offrir des soins intermédiaires. Je pense que nous accomplissons des progrès sur ce plan. Au cours des dernières années, nous avons reçu des fonds pour nous inciter à nous améliorer à cet égard.
    Une partie du problème est imputable aux évaluations elles-mêmes. Notre système nous permet maintenant de les effectuer dès l'admission. Ainsi, nous savons aussitôt que possible si la personne souffre d'une maladie mentale. Nous pouvons commencer à la soigner immédiatement, au lieu d'attendre.
    Parlez-vous des femmes ou de la population carcérale en général?
    Des détenus en général.
    Pour ce qui est des femmes, vous avez visité l'un de nos établissements qui offrent des milieux de vie structurés. On les considère vraiment comme la Cadillac des établissements de soins intermédiaires. Ils sont reconnus à l'échelle internationale. Le rapport Glube a reconnu leur valeur, de même que l'inspecteur de Her Majesty's Prison.
    Sont-ils en Colombie-Britannique?
    Non, il y en a un dans tous les centres régionaux, sauf au Pavillon de ressourcement Okimaw Ohci. C'est une maison, dotée en personnel 24 heures par jour, 7 jours par semaine. L'établissement est organisé un peu différemment.
    Combien de détenus dans tout le Canada occupent ces établissements?
    Il y a une total de 40 lits à l'échelle du pays. Il y a cinq établissements, et chacun d'eux compte huit lits.
    Combien de femmes sont incarcérées au Canada?
    Il y en a 492 aujourd'hui.
    J'ai une dernière question. J'ai entendu dire que pratiquement chaque femme en prison avait souffert d'un traumatisme. C'est probablement une exagération, mais cela explique bien la situation. Nous pouvons certainement nous entendre pour dire que la grande majorité des femmes incarcérées ont subi un grave traumatisme d'un genre ou d'un autre. Avez-vous des programmes spéciaux pour ces femmes, ou pourriez-vous expliquer au comité comment nous pourrions mieux soigner les délinquantes qui ont souffert d'un grave traumatisme?
(1605)
    Vous exagérez peut-être en disant que toutes les délinquantes ont subi un traumatisme, mais un important pourcentage d'entre elles ont été victimes de violence physique, psychologique ou sexuelle à un moment ou à un autre avant leur incarcération. Ce pourcentage est encore plus élevé chez les délinquantes autochtones.
    Quel pourcentage utiliseriez-vous?
    Je ne suis pas certaine d'avoir ce renseignement avec moi, mais je dirais que c'est aux alentours de 70 p. 100. Je peux me renseigner pour vous, mais je n'ai pas ce chiffre avec moi.
    D'accord.
    Nous offrons un certain nombre de programmes dont elles peuvent se prévaloir. Le nouveau programme appelé « Esprit du guerrier », qui a été élaboré par les Native Counselling Services of Alberta, a effectivement un volet qui s'occupe de cet aspect, parce qu'il s'agit d'une approche beaucoup plus globale. Nous offrons également des services de counselling et de traitement du stress post-traumatique dans chacun de nos établissements. Elles peuvent participer à ces programmes si elles le souhaitent.
    Merci beaucoup. Nous avons dépassé le temps alloué.
    Monsieur McColeman.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui et d'avoir pris le temps de partager leurs connaissances avec nous.
    Un des exposés a fait allusion au médicament Suboxone. C'est la première fois que j'en entends parler. C'est peut-être également la première fois pour d'autres membres du comité. J'aimerais en savoir un peu plus sur ce médicament. Évidemment, nous connaissons tous la méthadone, mais s'agit-il d'un nouveau médicament? Est-il à la fine pointe de la pharmacologie? Que fait-il? Il a évidemment le même genre d'effets et donne le même genre de résultats, mais en quoi est-il différent de la méthadone?
    Sans rentrer dans de nombreux détails techniques, c'est un composé chimique légèrement différent de la méthadone, mais qui fonctionne sensiblement de la même manière. De plus, il est administré différemment.
    Nous l'avons adopté, parce que des programmes communautaires et d'autres programmes non liés au milieu correctionnel ont commencé à s'en servir. Des études ont démontré que c'était parfois une solution de rechange efficace pour les gens qui ne peuvent pas tolérer la méthadone ou pour qui elle ne fait pas effet, pour une raison quelconque.
    À l'heure actuelle, seulement un de nos patients prend de la Suboxone.
    Le médicament est-il administré oralement, comme la méthadone?
    Oui, mais on le place sous la langue au lieu de l'avaler.
    Vous avez fait allusion à ce qui, dans votre exposé, figure au paragraphe suivant, et vous avez dit: « lorsqu'il est accompagné d’un programme d'apprentissage cognitif... ». Pouvez-vous nous donner de plus amples renseignements sur la nature d'un programme d'apprentissage cognitif?
    Seulement à un niveau général...
    Avant de répondre, je tiens à préciser que nous ne sommes pas des expertes en la matière. L'apprentissage cognitif a recours au développement des compétences et la gestion du mode de vie pour régler certains problèmes qui peuvent avoir poussé les patients à consommer de la drogue.
    D'accord.
    Ma prochaine question concerne la dépendance à long terme. Comme vous l'avez dit, bon nombre de gens ne se libèrent jamais de leur dépendance à la méthadone ou à d'autres opiacés. J'imagine que ces médicaments coûtent assez cher. Après la mise en liberté des délinquants, les médicaments sont-ils couverts par les régimes d'assurance-maladie?
    Oui. De nombreux centres communautaires de traitement de maintien à la méthadone fonctionnent exactement comme notre programme. Pour élaborer celui-ci, nous nous sommes inspirés des modèles qui existaient déjà dans les collectivités. Il y a donc de nombreux programmes de traitement de maintien à la méthadone qui sont couverts par les régimes provinciaux d'assurance-maladie.
    D'accord.
    J'aimerais reprendre les commentaires de mon collègue à propos de ce que je vais appeler les programmes d'échange de seringues — j'oublie les termes exacts — offerts par certains établissements. Lorsque nous avons visité quelques-uns des pénitenciers fédéraux, l'un des directeurs de prison, je crois, a mentionné qu'offrir un tel programme exposerait les gens à de graves dangers à cause des problèmes de sécurité que l'on crée en fournissant des seringues aux détenus.
    Je me demande si vous avez des commentaires à propos de cette version des faits et de la manière dont elle est gérée, et si les gardes et les autres membres du personnel seraient inquiets si ces objets étaient à la disposition des détenus.
(1610)
    Je ne vais pas parler au nom de tous les employés, mais je suis certaine qu'un nombre non négligeable d'entre eux seraient préoccupés par la présence de seringues ou d'objets pointus, quels qu'ils soient, dans les prisons.
    À votre connaissance, les syndicats qui représentent ces travailleurs se sont-ils prononcés au sujet de ces programmes?
    Je n'en suis pas certaine.
    Vous n'en êtes pas certaine. Je vois. Vous n'êtes évidemment pas ici pour répondre à cette question.
    Au cours de l'exposé de la sous-commissaire, vous avez mentionné que vous gériez des cas plus complexes. Lorsque j'ai visité les établissements, j'ai constaté que certains de ces cas plus complexes exigeaient énormément de ressources et de temps de programmation et de gestion. Vous en avez parlé lorsque vous avez abordé la question des programmes de transition que vous mettiez en oeuvre. Dans vos remarques à ce sujet, vous parliez d'échanger des pratiques exemplaires. Pouvez-vous nous donner une idée de la façon dont nous pourrions mieux gérer ces cas plus complexes, ces problèmes de comportement chez les détenus qui sont si difficiles à résoudre?
    Je pense pouvoir le faire. Je vais essayer.
    Ces cas sont de vrais défis. Ils sont très peu nombreux; c'est pourquoi il est encore plus difficile de trouver des idées concrètes pour les résoudre.
    La structure actuelle est l'un des éléments qui nous posent un problème majeur. J'ajouterais à cela l'infrastructure, ainsi que le modèle. Je pense que nous devons envisager des solutions complètement différentes pour régler certains de ces cas problèmes.
    Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas particulièrement satisfaits du protocole de gestion en vigueur et de ses résultats. Nous allons le délaisser. L'isolement à long terme fait actuellement l'objet d'un examen externe. Nous utiliserons leurs conclusions pour nous tenir informés. Nous avons consulté l'Enquêteur correctionnel et d'autres intervenants pour découvrir les approches qui fonctionneraient le mieux dans ces cas très difficiles.
    Je m'en réjouis. J'apprécie également le fait que vous soyez en train de revoir ces modèles. Ainsi, les pratiques exemplaires mettront d'abord l'accent sur la sécurité de la personne et des gens qui l'entourent dans la plupart des cas, et ensuite sur le genre de thérapies dont elle a besoin.
    Oui, vous avez raison, mais nous devons également nous rappeler que tout service que nous leur offrons pendant leur période d'incarcération devra être appuyé après leur départ. Il ne sert à rien de prendre des mesures à l'intérieur du système carcéral, si nous ne sommes pas en mesure d'assurer leur suivi une fois les délinquants mis en liberté. Parce que la plupart d'entre eux seront mis en liberté tôt ou tard. Il va falloir que la collectivité appuie de tout coeur ces efforts en offrant à ces femmes des logements avec services d'aide à l'autonomie et des logements subventionnés, et en tentant de leur venir en aide après leur mise en liberté.
    Me reste-t-il encore du temps, monsieur le président?
    Pour être équitable, je devrais vous accorder une minute de plus, car tous les autres ont dépassé leur temps d'une minute.
    C'est très gentil de votre part. Merci beaucoup.
    Je vous entends clairement. Le continuum de soins doit être beaucoup plus étendu, en particulier dans le cas de personnes atteintes de graves maladies mentales, diagnostiquées très tôt ou dès leur admission dans l'établissement, et pour lesquelles des programmes ont été établis.
    S'agit-il habituellement de récidivistes? Ces personnes visitent-elles les établissements à répétition?
(1615)
    Non, ces femmes ne sont pas des récidivistes. En fait, la plupart des détenues purgent leur première peine dans un établissement fédéral; 53 p. 100 d'entre elles ont commis une infraction avec violence. Mais, en général, c'est la première fois qu'elles fréquentent le système fédéral.
    Est-ce que, dans la plupart des cas, elles ont déjà été incarcérées dans des établissements provinciaux?
    Quelques-unes d'entre elles l'ont été, mais c'est bien moins fréquent que dans le cas de la population carcérale masculine.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vous remercier tous d'avoir comparu devant le comité. La séance a été brève mais profitable. Vous nous avez communiqué de précieux renseignements, et je vous en suis très reconnaissant.
    Merci.
    J'invite notre prochain témoin, M. Penner, à venir prendre place. Nous allons entamer le prochain tour de questions.
    Nous souhaitons la bienvenue à M. Bruce Penner, directeur général des opérations canadiennes à Momentum Healthware.
    Chers collègues, nous avons essayé de faire traduire les documents ce matin, mais sans succès. La présentation PowerPoint n'a pas été traduite et n'est donc pas disponible dans les deux langues. Vous convient-il si nous procédions à la traduction simultanée des propos du témoin?

[Français]

    Ça me va.

[Traduction]

    D'accord, il n'y a pas d'objection.
    Allez-y, monsieur.

[Français]

    J'ai une objection.

[Traduction]

    Alors, devrions-nous suspendre la séance pour une demi-heure? Il n'y aura pas de présentation?

[Français]

    Monsieur le président, est-ce que vous m'entendez?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Vu que ce n'est pas dans les deux langues officielles, je propose que monsieur fasse sa présentation en regardant son ordinateur portatif et qu'on laisse tomber la projection, tout simplement. Nous allons être en mesure de comprendre ce qu'il va dire.

[Traduction]

    Comprenez-vous la demande?
    Oui, je la comprends, et j'étais prêt à procéder ainsi, si c'est ce que souhaite le comité.
    D'accord. Tout ce que vous direz sera traduit.
    Allez-y. Nous avons très peu de temps, alors vous pouvez commencer.
    D'accord.
    En ce qui a trait à l'ordre des interventions durant ce tour de questions, le premier intervenant sera M. Holland, puis les conservateurs et, enfin, le Bloc. Le NPD n'interviendra pas cette fois-ci.
    On vous écoute, monsieur Penner.
    Je vais essayer de m'en tenir à l'essentiel, mais je m'en voudrais si je ne commençais pas par remercier le comité de m'avoir invité à venir à Ottawa, du Manitoba, pour m'adresser au gouvernement. C'est un privilège pour moi.
    Vous venez tout juste de voir à l’écran, pour un bref moment, une photo de ma famille; la diapositive n’était pas traduite. Vous avez peut-être remarqué que quatre de nos enfants sont des Éthiopiens, des Canadiens de première génération, et ils sont très fiers de notre pays et du privilège que j'ai aujourd'hui de le servir, de façon aussi modeste soit-elle.
    La raison pour laquelle je suis ici — et cela m'amène à mon deuxième remerciement —, c'est que Shelly Glover était dans nos bureaux il y a quelques semaines pour remettre à Momentum Healthware un certificat de chef de file canadien de l’innovation. Ce certificat était aussi un signe de reconnaissance à l'égard des investissements que vous, notre gouvernement, avez effectués dans Momentum Healthware au cours des dernières années. Plus récemment, vous avez dépensé 111 000 $, par l'entremise du Conseil national de recherches, afin d'investir dans le développement d'un module de santé mentale dans le cadre de la solution de TI en matière de santé de Momentum Healthware. La nouvelle a d’ailleurs été annoncée dans une conférence de presse. Je tiens à vous remercier de cet investissement dans nos activités de recherche et de développement et je veux vous donner une certaine rétroaction sur son efficacité. Nous nous apprêtons déjà à passer à la phase pilote de notre module de santé mentale communautaire au Manitoba. Nous avons reçu des déclarations d'intérêt de plusieurs autres provinces, ainsi que de la Nouvelle-Zélande, en vue d’un déploiement possible de ce même module. Alors, je crois que les faits parlent d'eux-mêmes: l’investissement du Conseil national de recherches a bel et bien porté fruit.
    Le Canada est un pays qui compte plusieurs champs de compétence. À titre de directeur de TI en matière de santé, j’admets que mon travail est en fait très simple par rapport à votre rôle et à celui des témoins qui m’ont précédé, pour ce qui est d’élaborer des politiques et de respecter les valeurs des différents paliers de gouvernement, valeurs qui sont incroyablement complémentaires mais parfois conflictuelles. En tant que fournisseur de solutions technologiques en matière de santé, j'ai souvent observé, dans le cadre de mon travail dans divers secteurs de soins de santé — puisque les solutions de Momentum Healthware englobent les soins de longue durée, les soins à domicile, les soins communautaires, la santé mentale communautaire et les soins palliatifs —, que les fournisseurs de soins de santé dans chacun de ces secteurs et forums utilisent un langage différent pour décrire leurs activités. Ils utilisent différents processus pour fournir des services de santé à leurs clients. Grâce à nos solutions logicielles, nous sommes vraiment résolus à essayer d'éviter une telle disparité ou de nous en tenir aux éléments communs qui recoupent les différents secteurs de soins de santé afin de créer une solution très adaptable. On peut transposer nos solutions d’un secteur à l’autre et d’une langue à l’autre de façon à offrir un seul répertoire d'information sur la santé aux multiples fournisseurs de soins de santé.
    En tant que citoyen canadien, je suis très conscient de cette réalité. En même temps, je suis citoyen du Manitoba. J’ai passé mon enfance auprès de la première nation de God's River; c’est ce qui explique mon allégeance et mon intérêt envers les collectivités des premières nations du Canada. Pour chacune de ces collectivités, je suis considéré, en quelque sorte, comme un intervenant. Dans le cadre de votre travail au Service correctionnel du Canada, vous vous occupez, encore une fois, de ces mêmes citoyens. À leurs yeux, vous êtes, vous aussi, un important intervenant dans les soins de santé qui leur sont dispensés.
    Ce que nous essayons de faire avec nos solutions logicielles — et je vous dis cela vraiment à titre d'information générale —, c'est de souligner le fait que la technologie de l'information est un facteur déterminant pour les soins de santé. Vous avez l'occasion d'examiner une panoplie de déterminants en matière de soins de santé, mais je dirais que cette information en est peut-être l'un des plus importants.
(1620)
    Si vous aviez à demander l'avis des fournisseurs de soins de santé dans n'importe quel secteur de la santé sur la possibilité d'avoir accès à l'information d'autres fournisseurs dans le continuum des soins — qu'il s'agisse d'intervenants fédéraux ou provinciaux, ou qu'ils travaillent pour un centre de guérison autochtone, un établissement correctionnel ou un centre pour détenus en semi-liberté —, chaque fournisseur comprendrait que l'accès à l'information recueillie par d'autres fournisseurs qui s'occupent du même client permettrait d'offrir de meilleurs services, et ce, de façon plus éclairée et efficace.
    Cette situation me fait penser à une fable indienne — et ici, je fais référence à l'Inde. C'est l'histoire de six hommes aveugles qui découvrent un éléphant et cherchent à le définir. Un des hommes, touchant une jambe de l'éléphant, dit que celui-ci est comme un arbre. Un autre, qui touche le ventre, dit que c'est comme un mur. Un autre encore, qui touche une défense de l'éléphant, dit que c'est comme une lance. Un autre, touchant la queue, décrit l'éléphant comme une corde. Et voilà qu'ils se lancent dans des débats enflammés pour déterminer en quoi consiste au juste un éléphant. S'agit-il davantage d'une lance ou d'un arbre? Aucun d'eux n'est capable de voir l'éléphant dans son ensemble, et cela les empêche d'avoir une discussion efficace sur les éléphants.
    Je tiens à vous offrir mes services cet après-midi en vue de contribuer à votre discussion sur la façon dont la technologie de l'information en matière de santé pourrait servir à combler l'écart entre les établissements correctionnels fédéraux et la santé mentale communautaire.
    Nous avons mis au point une solution logicielle qui peut modeler le système de prestation de services dans n'importe quel milieu de la santé. J'avais pris la peine de préparer quelques diapositives pour vous démontrer la capacité de prodiguer des soins dans un établissement correctionnel. Il n'est pas nécessaire, pour les besoins de la discussion, de simplement comprendre que le même client peut être suivi dans différents milieux de santé et traité par différentes équipes de fournisseurs. On peut partager une information sélective sur le client, selon les conditions en matière de sécurité et de protection des renseignements personnels qu'on définit — ou qu'on négocie avec les autres intervenants de soins de santé — afin de prodiguer des soins plus efficaces et de mieux comprendre chaque cas de manière à se faire une meilleure idée de l'éléphant.
    Je vais m'arrêter là-dessus. Je suis disposé à répondre à toute question.
(1625)
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à des interventions de cinq minutes.
    Monsieur Kennedy.
    Monsieur Penner, bienvenue.
    Je suis né et j'ai grandi à The Pas, au Manitoba, alors c'est agréable de retrouver quelqu'un du Manitoba ici.
    Je sais que vous êtes un fournisseur de services d'information en matière de santé. Avez-vous une opinion sur la disponibilité de l'information, c'est-à-dire la mesure dans laquelle il y a une intégration au sein des services correctionnels fédéraux? Vous avez dit avoir préparé quelques diapositives, mais nous ne les avons pas vues.
    Certains des témoins précédents ont parlé de certains aspects du problème. Le sujet qui nous intéresse particulièrement, c'est la toxicomanie et la santé mentale, c'est-à-dire le degré de connaissance des problèmes, le degré d'intervention et, bien entendu, ce qui est efficace et ce qui ne l'est pas, particulièrement la méthadone et d'autres traitements pour toxicomanes. Ajoutons à la liste les préoccupations en matière de sécurité publique ainsi que les préoccupations sur le plan des individus. Il y a donc, me semble-t-il, certaines pièces manquantes.
    Avez-vous une idée de ce qui se passe dans les établissements correctionnels relativement à votre logiciel?
    Certainement.
    J'ai écouté très attentivement les témoins précédents et j'ai pris note de quelques statistiques, entre autres le fait que 24 p. 100 des femmes dans leur secteur de soins de santé particulier ont de graves problèmes de santé mentale. Je reconnais que ces personnes vont probablement ou définitivement être remises en liberté dans la collectivité ou dans des établissements de soins pour bénéficiaires internes au sein de la collectivité.
    Je n'ai pas évalué la qualité des systèmes d'information au sein du système correctionnel. Pour ma part, si je me fie encore une fois aux propos des témoins précédents, je sais que le système correctionnel a élaboré des évaluations normalisées, et on les trouve très efficaces auprès des femmes qui participent au processus. Évidemment, la technologie de l'information n'est qu'un outil, mais c'est un excellent outil pour effectuer des évaluations normalisées, recueillir des données de façon à les partager facilement au moment voulu et éclairer les décisions futures parce qu'on essaie de comprendre l'impact de l'évaluation, de la planification du rétablissement et des résultats.
    Quant à la question de savoir à quel point la technologie de l'information est utilisée dans le système correctionnel, je ne saurais trop vous le dire. À ma connaissance, cela semble limité, mais je ne me suis pas renseigné.
(1630)
    D'accord.
    Dans le budget de 2008, le gouvernement avait promis un investissement d'environ 500 millions de dollars pour développer Inforoute Santé, que vous connaissez bien, j'en suis sûr, et qui au moins oriente quelque peu vos travaux, que ce soit à l'échelle provinciale ou nationale. Ces fonds n'ont pas encore été versés, pour diverses raisons.
    Que pouvez-vous nous dire à propos du développement au Manitoba? Parce que les systèmes de santé provinciaux prennent souvent leurs décisions indépendamment du financement fédéral. Avez-vous une idée de ce qui est prévu? Avez-vous appris comment cette décision nationale s'inscrit dans le système du Manitoba? Encore une fois, je n'essaie pas de vous mettre sur la sellette du seul fait que vous venez du Manitoba, mais c'est peut-être un système de santé que vous connaissez mieux. Mais peu importe le ressort, à quoi servira cet argent fédéral? Dans quelle mesure cette approche peut-elle s'avérer efficace? Peut-elle nous aider à résoudre le problème que nous étudions aujourd'hui? Vous avez abordé cette question de façon générale.
    Dans le secteur privé, c'est-à-dire auprès des entreprises qui aident à élaborer ces diverses solutions potentielles, qu'envisage-t-on et que sait-on relativement à l'utilisation de ces 500 millions de dollars — c'est beaucoup d'argent — et quand ces fonds seront-ils débloqués?
    Il y a plusieurs réponses à la question. Tout d'abord, pour autant que je sache, en ce qui concerne la façon dont le Manitoba planifie utiliser ces fonds, je sais que l'accent est surtout placé sur les soins de santé primaires. J'ai réellement l'impression qu'on veut diviser le financement sous plusieurs volets importants, au lieu de l'éparpiller partout, afin de régler des questions cruciales.
    Le financement d'Inforoute Santé comporte deux composants qui revêtent peut-être un intérêt particulier pour le sujet à l'étude: l'innovation et l'interopérabilité. Ces deux composants pourraient être mis à profit pour améliorer l'innovation et parrainer ou financer l'interopérabilité des systèmes de soins de santé entre les différents types de soins. J'ignore dans quelle mesure le financement d'Inforoute Santé est applicable au Service correctionnel du Canada, mais c'est, il me semble, une question très utile à examiner afin de favoriser l'interopérabilité entre les systèmes.
    Il vous reste 10 secondes.
    Avez-vous bon espoir qu'on finira par unifier le système? Après tout, des observateurs externes travaillent depuis longtemps sur des systèmes d'information en matière de santé, et nous avons un grand retard pour ce qui est des 500 millions de dollars. Une intégration est-elle possible? Avez-vous bon espoir qu'on pourra avoir un système qui sera interopérable et qui améliorera vraiment le système actuel?
    Ai-je...
    De votre point de vue, en tant qu'intervenant.
    Mon point de vue, c'est qu'Inforoute Santé assure le financement des composantes principales des dépôts et des dossiers de santé électroniques, ce qui peut permettre de regrouper les dossiers de santé électroniques de la population à l'échelle nationale. Toutefois, un point sur lequel le programme ne s'est pas penché et sur lequel il ne semble pas se concentrer encore, ce sont les systèmes locaux qui permettront de consigner la prestation des soins à l'échelle des collectivités. Selon moi, en investissant dans les soins primaires, on a pris un premier pas dans cette direction.
    Madame Glover, s'il vous plaît.
    Je tiens à vous souhaiter la bienvenue, monsieur Penner. Merci beaucoup de participer à nos discussions. Votre déclaration m'a beaucoup impressionnée. En fait, j'ai pu voir votre présentation, et elle m'a fait penser au point qui revient sans cesse depuis le début de l'étude, soit au continuum de soins.
    J'ai trouvé appréciable le fait de voir des diapositives qui montrent non seulement qu'on peut enregistrer, conserver et recueillir des renseignements au sujet des traitements des maladies, des recommandations faites par différents représentants de la santé, ainsi que des méthodes qui ont fonctionné et de celles qui n'ont pas eu de succès, mais aussi qu'il est possible d'obtenir de l'information issue, par exemple, du service correctionnel, de la police ou d'autres organismes qui travaillent ensemble parce qu'ils souhaitent le bien des personnes atteintes d'une maladie mentale.
    Je suis d'avis qu'il importe de tenter de trouver des solutions pour résoudre les problèmes. De nombreux témoins qui ont comparu devant nous nous ont dit qu'ils utilisent encore des dossiers papier. Bien sûr, dans le domaine des services correctionnels, c'est très difficile de transférer un dossier papier d'un territoire à un autre ou de trouver quelqu'un avec rapidité et efficacité. C'est pour cette raison que je pense qu'on doit prendre les dossiers électroniques en considération afin d'obtenir les renseignements rapidement, ce qui pourrait permettre d'améliorer les services offerts à une personne atteinte d'une maladie mentale.
    Une sous-commissaire vient de nous dire qu'on doit procéder à une évaluation au sein du système carcéral, ce qui peut prendre beaucoup de temps. Je crois que votre programme permettra d'accélérer le processus, car on aura accès aux traitements antérieurs, aux méthodes qui ont fonctionné et à celles qui n'ont pas eu de succès, ainsi qu'au diagnostic, bien entendu, ce qui aidera évidemment à soigner la personne plus rapidement.
    Est-ce que j'évalue correctement votre programme?
(1635)
    Oui, absolument; bien sûr, vous avez l'avantage particulier d'avoir vu le programme à l'écran.
    Si cela peut être utile au comité — et je ne veux certainement pas m'imposer —, je serais tout à fait prêt à faire traduire le document et à revenir pour renseigner l'ensemble du comité avec plus d'efficacité. Je vais suivre vos conseils à cet égard.
    Permettez-moi d'intervenir un instant.
    En fait, nous pouvons le faire traduire et le distribuer aux membres du comité, puisque vous nous avez remis la version anglaise. Merci.
    L'autre point que j'ai trouvé très intéressant, c'est que vous êtes en mesure de recueillir les méthodes qu'on a essayées et les résultats de ces tentatives. Par exemple, lorsqu'il est question des personnes atteintes d'une maladie mentale et du service correctionnel, on parle souvent de l'isolement. Selon ce que nos témoins nous ont dit, il est très important de savoir comment ces personnes réagissent à l'isolement. Pour des raisons particulières, certaines demandent de leur plein gré d'être isolées. Encore une fois, dans le cas où ces personnes sont transférées d'une autorité à une autre, à mon sens, ces renseignements sont inestimables pour veiller à ce qu'elles reçoivent les soins qui les aideront à acquérir des compétences. Bien sûr, nous visons à ce qu'elles puissent se libérer du système de justice pénale et devenir des citoyens productifs.
    Je tenais à faire part de ces observations au comité, car j'ai pu voir les diapositives. Selon moi, nous avons peut-être là une réponse à la question du continuum de soins, qui revient sans cesse. Tous semblent reconnaître qu'il y a un manque de communication entre chacun des organismes qui travaillent avec la personne atteinte d'une maladie mentale.
    Dites-moi, est-ce que quelqu'un utilise actuellement un programme semblable à celui que vous avez créé?
    Oui. La solution de soins continus, un concept présent dans tous les aspects du continuum de soins, est utilisée à différents endroits depuis 15 ans. Plus précisément, le module récent axé sur les services communautaires en santé mentale entre actuellement en service à Winnipeg et, comme je l'ai déjà dit, nous avons reçu des déclarations d'intérêt de partout dans le monde relativement au programme.
    Le module axé sur les services communautaires en santé mentale est intéressant parce qu'il est possible de l'intégrer aux systèmes de soins à domicile et de soins de longue durée — quoiqu'il n'en soit pas vraiment de même en ce qui a trait aux soins palliatifs. Il est aussi possible de l'intégrer au service correctionnel, domaine dans lequel, je le répète, la santé mentale entre évidemment en ligne de compte.
    Essentiellement, on a déjà éprouvé un peu le programme, et maintenant, on ne fait qu'y ajouter pour inclure des domaines comme les services correctionnels et les maladies mentales.
    Je tiens simplement à noter, pour corriger les propos de M. Kennedy, que des fonds sont versés. Je sais qu'en réalité, les dossiers électroniques sont utilisés dans de nombreuses provinces; j'ignore pourquoi M. Kennedy croyait le contraire. Néanmoins, des fonds sont versés, et la situation du système de soins de santé s'en trouve améliorée à l'échelle du pays. Je crois que nous avons peut-être l'occasion, actuellement, d'appuyer les services correctionnels et d'autres intervenants qui travaillent avec des personnes souffrant d'une maladie mentale ou de toxicomanie, des intervenants comme les agents de police et de libération conditionnelle.
    J'ai une question technique. Ai-je encore quelques...
    Très brièvement.
    Dans ce cas, je ne la poserai pas, car il faudrait davantage de temps. Je sais qu'une diapositive a été présentée, mais je crois sincèrement que si vous aviez l'occasion de voir le programme, vous le considériez comme une réponse à de nombreuses questions que nous avons abordées ici relativement au continuum de soins.
(1640)
    Merci beaucoup.
    Madame Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur. Je vous remercie d'être venu nous parler de votre projet. Je vous avoue ne pas vraiment comprendre. Évidemment, c'est un peu plus difficile sans le transparent.
     Est-ce que votre logiciel permet de rassembler toutes les informations concernant une personne qui a des problèmes de santé mentale?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    C'est comme un dossier électronique. C'est exact?

[Traduction]

    C'est exact. Le logiciel crée un dossier électronique qui contient les renseignement normalement enregistrés dans un dossier papier. Dans certains cas, on implante le programme de façon à ce qu'il serve de complément aux dossiers papier. Autrement dit, on peut continuer à consigner certaines données sur papier, et on peut enregistrer celles conçues pour être partagées ou distribuées largement en format électronique. Dans d'autres cas, le logiciel est déployé dans un milieu tout à fait informatisé, où l'on n'utilise pas du tout de papier.

[Français]

    Si je comprends bien — vous me le direz si je me suis trompée —, votre système est actuellement utilisé à Winnipeg dans le milieu de la santé, dans des organismes communautaires.

[Traduction]

    C'est exact. On vient de commencer.

[Français]

    C'est un début.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Vous savez que le Service correctionnel a déjà un système informatisé qui s'appelle le « SGD », c'est-à-dire « Système de gestion des détenus ». Connaissez-vous ce système?

[Traduction]

    Non.

[Français]

    C'est un système où on retrouve déjà les dossiers assez complets des détenus.
    Généralement, dans le milieu de la santé, dans les hôpitaux — au Québec en tout cas, puisque je ne peux pas parler pour le Manitoba —, la plupart des dossiers sont informatisés, mais pas tous. Je pense qu'il y a encore du travail à faire à cet égard.
    J'essaie de comprendre un peu comment un système comme le vôtre pourrait être bénéfique au Service correctionnel. Je n'arrive pas à comprendre cela. J'essaie de le comprendre.

[Traduction]

    J'ai une question. Le système dont vous parlez et que Service correctionnel utilise est-il lié au système de soins de santé ou se limite-t-il aux services correctionnels...

[Français]

    C'est un système total de gestion des détenus. Tous les dossiers psychiatriques, psychologiques, les plans correctionnels, les notes des agents de gestion de cas, les notes des gardiens de prison s'y trouvent. Tout y est, et bien sûr, les dossiers papiers sont fondamentaux; ils s'y trouvent.
    Chaque unité de soins, par exemple, détient ce qu'on appelle un « cardex », où les dossiers sont maintenus à jour et suivis quotidiennement. Est-ce un peu ce que vous faites déjà?

[Traduction]

    Je comprends donc maintenant de quoi il s'agit. Selon moi, la difficulté que le système peut présenter — et, évidemment, vous êtes bien mieux renseignée que moi sur ce qui est en place — touche vraiment le lien entre les services correctionnels et la collectivité. Je ne suis pas du tout ici pour parler de l'efficacité du système dont les établissements correctionnels se servent. Je ne peux pas me prononcer là-dessus.
    Ce n'est pas seulement la relation entre les services correctionnels et la collectivité qui pose problème; il y a aussi le lien entre les hôpitaux psychiatriques et la collectivité. J'ai constaté moi-même ce fait. Encore une fois, la situation diffère d'une province à l'autre. Vous connaissez très bien le Québec. Je connais très bien le Manitoba. Toutefois, je sais que la communication des renseignements entre les hôpitaux psychiatriques et la collectivité pose de véritables défis. Je suis certain qu'il en est de même en ce qui concerne les services correctionnels.
(1645)

[Français]

    Vous soulevez un point intéressant. Selon ce que j'en comprends, votre système permet de faire le lien entre des groupes, des organismes, l'hôpital et d'autres hôpitaux — entre eux. Il y a donc une continuité de l'information, quel que soit l'organisme.
    Ce qui m'inquiète, c'est qu'actuellement, le système électronique du Service correctionnel est interne, c'est-à-dire que ce sont seulement toutes les instances du Service correctionnel qui ont accès à ce système. L'hôpital n'a donc pas accès au système de gestion des détenus.
    Ne croyez-vous pas qu'au contraire, à cause de la confidentialité des données, cela pourrait être un peu problématique d'échanger des informations?

[Traduction]

    Je suis désolé, mais nous n'aurons pas suffisamment de temps. Nous devons nous arrêter.
    Avez-vous une brève observation, monsieur?
    Mon observation est très simple. La réponse, c'est que vous avez tout à fait raison. Le défi ne se trouve pas du côté de la technologie. Les ordinateurs peuvent partager les informations que vous choisissez de partager, et ils peuvent le faire de façon sécuritaire. En réalité, le défi, c'est de s'entendre sur le partage.
    D'accord. Merci beaucoup.
    L'entretien a duré très peu de temps, mais nous vous sommes reconnaissants de votre présence et de votre participation.
    Nous allons suspendre la séance un instant pour changer de témoin.

    Nous reprenons la séance.
    Je souhaite la bienvenue à notre dernier témoin de la journée. Nous accueillons Mme Sandra Ka Hon Chu, du Réseau juridique canadien VIH/sida. Merci beaucoup.
    Pouvez-nous nous expliquer brièvement votre poste?
    Certainement. J'ai aussi préparé une déclaration préliminaire.
    Merci beaucoup.
    Allez-y.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, chers membres du comité, de me donner l'occasion de vous faire part de certains des résultats de nos recherches sur le VIH-sida dans les prisons.
    Je suis analyste principale des politiques au Réseau juridique canadien VIH-sida, une organisation de défense des droits de la personne établie à Toronto. Nous sommes une organisation nationale qui fait la promotion des droits des personnes atteintes du VIH-sida, et ce, par l'entremise de recherches et d'éducation, d'analyses juridiques et politiques, de sensibilisation et de mobilisation des collectivités.
    Nous étudions le problème du VIH dans les prisons depuis bon nombre d'années. Plus récemment, nous nous sommes concentrés sur les programmes d'échange de seringues dans les prisons. En 2006, nous avons rendu public le rapport international le plus exhaustif à avoir été publié sur les données relatives aux programmes d'échange de seringues en prison offerts dans le monde entier.
    D'après les conclusions des recherches, et comme l'un des derniers témoins du SCC l'a souligné, il n'existe aucune prison dans le monde où il n'y a pas de drogues. Malgré les nombreux efforts déployés par les systèmes carcéraux pour prévenir l'entrée de drogues dans les prisons, des drogues sont introduites et sont utilisées par des détenus. Dans nos entretiens avec des anciens détenus, ils ont souvent mentionné la disponibilité des drogues et le fait que dans certaines prisons, il y a plus de drogues à l'intérieur qu'ils ont pu en voir dans la rue. La toxicomanie est endémique dans les prisons. Des détenus s'injectent des drogues et ils partagent des aiguilles en raison de la rareté du matériel d'injection stérile à l'intérieur des prisons.
    En 1995, le SCC a mené un sondage sur la consommation de drogues à l'intérieur des établissements fédéraux. Trente-huit pour cent des répondants ont signalé avoir utilisé de la drogue depuis leur incarcération, et 11 p. 100 d'entre eux affirment s'être injectés de la drogue. Il s'agit là d'une étude qui remonte à de nombreuses années, comme vous pouvez le constater. Elle a été réalisée en 1995. À partir de nos entretiens avec des détenus, nous croyons que les résultats indiqueraient probablement à l'heure actuelle un taux beaucoup plus élevé d'usage de drogues injectables et de partage de seringues. C'est malheureux. Une étude effectuée par le SCC en 2007 s'est penchée sur les comportements à risque et la prévalence du VIH et de l'hépatite C dans les prisons fédérales. Elle sera rendue publique dans une semaine à peu près. Si nous avions ces données sous les yeux, je suis persuadée que les taux d'hépatite C, de VIH et d'utilisation de drogues injectables seraient beaucoup plus élevés.
    Comme dans bien d'autres pays, le taux de VIH et d'hépatite C est largement supérieur dans les prisons canadiennes que dans la population en général. Je sais que d'autres témoins vous ont déjà dit que le taux de VIH dans le système carcéral fédéral est au moins dix fois plus élevé que dans le reste de la population. Dans le cas de l'hépatite C, c'est au bas mot 30 fois ou près de 40 fois plus. Le taux a augmenté considérablement au cours des dix dernières années. En 1999, le taux de cas connus d'hépatite C était de 20 p. 100, tandis qu'il s'élève maintenant à près de 30 p. 100.
    Nous avons étudié des programmes d'échange de seringues en prison dans le monde entier pour voir ce que les résultats révéleraient, comment ils fonctionnent et s'ils réduisent efficacement le partage des seringues et les maladies infectieuses.
    Ces programmes ont été institués pour la première fois en 1992 dans une prison en Suisse. Ils sont offerts dans plus de 60 prisons dans au moins 11 pays. Plus récemment, en janvier 2010, le Kirghizistan a annoncé le lancement d'un programme pilote.
    Ces prisons se trouvent en Europe de l'Ouest, en Asie et dans des systèmes bien dotés en ressources et moins bien dotés en ressources. Ce sont des prisons dans des systèmes carcéraux civils et militaires, dans des pénitenciers pour femmes et pour hommes, des prisons de tous les niveaux de sécurité et de toutes les tailles, ainsi que dans des établissements à l'aménagement nettement différent.
    Les établissements ont eu recours à diverses méthodes pour distribuer les seringues. Certains utilisent des machines de distribution automatisées, où l'échange se fait entre l'individu et la machine. D'autres font appel aux infirmeries pour distribuer les seringues et les aiguilles par l'entremise de l'infirmière ou du médecin de la prison. Dans certains cas, des travailleurs en santé auprès des pairs en font directement la distribution. Et dans d'autres cas, des ONG ou des intervenants externes — des professionnels de la santé — distribuent le matériel d'injection à l'intérieur de la prison.
    D'après les programmes qui existent dans le monde, un certain nombre d'évaluations systématiques ont été réalisées, notamment par l'Agence de la santé publique du Canada en 2006, comme l'a mentionné un député tout à l'heure. D'après les résultats de ces évaluations, ces programmes réduisent les comportements à risque et les maladies, ils n'augmentent pas la consommation ou l'injection de drogues, et ils ne mettent pas en péril la sécurité du personnel ou des prisonniers. En fait, on n'a signalé aucun incident où du matériel d'injection aurait été utilisé pour attaquer un membre du personnel — pas un seul cas depuis 1992, année où ces programmes ont été mis en oeuvre. Ils apportent d'autres résultats positifs pour les détenus, y compris des aiguillages vers des programmes de traitement de la toxicomanie.
    Ce qui est également intéressant, c'est qu'en dépit de la résistance manifestée par les agents de correction dans certains de ces pays — en Allemagne et en Suisse, plus précisément —, ils ont fini par comprendre que ces programmes assurent leur sécurité car il y a moins de risques qu'ils tombent sur une aiguille qui a été cachée dans la cellule d'un prisonnier et qu'ils se piquent accidentellement. Mais si un tel incident se produit, pour une raison ou pour une autre, il y a moins de risques que l'aiguille ait été partagée par de nombreuses personnes et qu'elle soit infectée par le VIH ou l'hépatite C.
(1650)
    Nous estimons qu'en refusant de mettre en oeuvre des programmes d'échange de seringues dans les prisons, le SCC place inutilement les grands toxicomanes à risque d'infection grave par le VIH et l'hépatite C. Les programmes d'échange de seringues sont offertes dans la communauté depuis bon nombre d'années. En 2001, on comptait 200 de ces programmes au Canada, grâce à l'appui de tous les ordres de gouvernement — les administrations municipales, les provinces, les territoires et le fédéral. Bon nombre des personnes qui sont incarcérées sont réalistes. Elles utilisent ces programmes dans la collectivité, et à leur arrivée en prison, on leur refuse soudainement l'accès au service.
    Le fait de refuser des programmes d'échange de seringues dans les prisons est discriminatoire à l'égard des détenus qui présentent un grand nombre des caractéristiques qui figurent sur la liste des motifs de distinction illicite. Je pense que des témoins ont déjà mentionné devant le comité permanent la représentation démesurée d'Autochtones dans les prisons. Ils sont surreprésentés dans les prisons fédérales, ainsi que dans la communauté parmi les utilisateurs de drogues injectables et les personnes atteintes du VIH.
    Ces problèmes touchent également les femmes de façon disproportionnée. J'imagine que le dernier témoin a signalé le fait que de nombreuses femmes qui entrent dans le système carcéral fédéral ont un passé d'utilisation de drogues injectables, et ce plus que les hommes qui sont incarcérés. Elles ont vécu des traumatismes. On enregistre invariablement un passé de consommation de drogues injectables plus fréquemment chez les femmes que chez les hommes dans les prisons canadiennes. La Commission canadienne des droits de la personne reconnaît ce fait et dit ceci:
Même si le partage de seringues usagées constitue un risque pour tout détenu, l’incidence sur les femmes est plus marquée en raison du taux plus élevé de toxicomanie et d’infection par le VIH au sein de cette population.
    Inversement, les programmes d'échange de seringues sont non seulement bénéfiques aux utilisateurs de drogues dans les prisons, mais aussi aux autres prisonniers, au personnel des établissements et à la population en général. Compte tenu de la hausse du VIH et de l'hépatite C, la société assume le coût des traitements pour les personnes qui en sont atteintes. Selon le SCC, il en coûte 22 000 $ pour traiter une personne en prison pour l'hépatite C et 29 000 $ pour traiter une personne atteinte du VIH par année. C'est donc un coût à vie. Il est bien plus efficace de fournir du matériel d'injection stérile que de traiter une personne pour une infection par le VIH et l'hépatite C.
    Je vais conclure avec une autre statistique du SCC. En 2006, plus de 2 000 personnes atteintes de l'hépatite C et plus de 200 autres atteintes du VIH ont été libérées dans la collectivité. La santé dans les prisons relève de la santé publique. Il n'y a aucune raison de traiter les prisonniers qui sont aux prises avec un problème de dépendance différemment des toxicomanes dans la collectivité qui ont accès aux programmes d'échange de seringues. En réduisant les risques d'infection par le VIH et l'hépatite C chez les utilisateurs de drogues dans les prisons, les risques que les Canadiens contractent ces maladies sont moindres.
    Voilà qui met fin à ma déclaration. Je peux maintenant répondre aux questions. Merci.
(1655)
    Merci beaucoup.
    Nous allons entendre M. Rathgeber pour commencer; vous avez cinq minutes.
    Merci de votre exposé et de votre présence ici cet après-midi, même si je m'inscris en faux contre une bonne partie, sinon la totalité, de ce que vous avez dit.
    Vous conviendrez certainement que consentir à la consommation de drogues par les prisonniers est...
    Pardonnez-moi, je ne veux pas vous interrompre, mais j'invoque le Règlement.
    M. Holland invoque le Règlement.
    Depuis toujours, lorsque nous passons à un autre témoin, nous suivons le même ordre d'interventions que pour le témoin précédent.
    Autrement dit, le gouvernement n'aurait jamais l'occasion de les questionner.
    Je ne dis pas qu'il n'aurait jamais la parole, mais simplement...
    Eh bien, les députés ministériels n'auraient pas la parole, car vous dites que nous devrions commencer du début. Je suis la liste des intervenants depuis le début de la séance.
    Monsieur le président, j'aimerais peut-être demander l'avis du greffier. Que je sache, nous n'avons jamais procédé ainsi dans le passé.
    Une voix: Non, nous n'avons jamais vu cela.
    M. Mark Holland: Je suis député depuis six ans, et je n'ai jamais vu cela, monsieur le président.
    Une voix: Lorsque l'on reçoit un témoin, on recommence avec l'opposition.
    Autrement dit, si on ne dispose que d'une demi-heure, le gouvernement n'aura jamais l'occasion de poser des questions. C'est ce que vous dites.
    Non, vous divisez le temps également.
    Je ne m'oppose aucunement à ce que le temps soit divisé également de sorte que nous puissions tous intervenir. Je peux réduire mon temps de parole ou peu importe.
    C'est ce que je fais depuis le début de la séance.
    Cinq minutes?
    Si le comité est d'accord, nous pouvons procéder ainsi.
    Oui, procédons ainsi. Je n'avais simplement jamais vu cela dans le passé.
    Je vais laisser M. Rathgeber poursuivre, puis nous reviendrons à vous.
    Monsieur le président, les néo-démocrates auront-ils cinq minutes? Que pensez-vous de donner cinq minutes à chaque parti?
    Là encore, c'est une question de protocole. Je n'ai jamais vu cela de ma vie.
    Eh bien, nous n'avons jamais procédé de la sorte auparavant.
    Eh bien, nous l'avons fait dans d'autres comités. Je suis juste embrouillé.
    Je jugeais simplement qu'il était plus juste de laisser tous les membres intervenir et de suivre la liste.
    D'accord, mais dans l'avenir, nous devons corriger cette façon de procéder. On doit commencer au début de la liste quand on passe à un nouveau groupe de témoins.
    Je peux essayer de donner cinq minutes à chaque parti, si c'est ce que vous souhaitez. Mais c'est ce que je fais depuis le début de la séance et personne ne s'y est opposé.
    Monsieur Rathgeber, je vais vous laisser recommencer, puis nous entendrons les libéraux.
    Merci, monsieur le président. Je suis désolé de devoir recommencer.
    Vous défendez essentiellement le devoir de satisfaire les besoins des toxicomanes au sein de notre population carcérale. Est-ce exact?
    Oui. Je leur offre essentiellement les mêmes outils que les gens dans la collectivité ont déjà.
    Ne conviendrez-vous pas cependant que le devoir de satisfaire les besoins est contraire aux objectifs établis de prévention et de traitement des dépendances?
    Je ne crois pas, et je pense que ce n'est pas reconnu dans la collectivité, quand des programmes d'échange de seringues sont à la disposition des toxicomanes.
    Je sais que ces programmes existent dans la collectivité, mais ce n'est pas ma question. Ce que je veux savoir, c'est si le devoir de satisfaire les besoins est contraire aux objectifs établis de traitement et de la prévention des dépendances.
    Je ne crois pas. Je pense qu'un grand nombre de personnes ne veulent pas être traitées ou des traitements ne sont peut-être pas disponibles pour elles. Dans ces cas-là, quand ils sont offerts, les programmes d'échange de seringues réduisent les risques de contracter l'hépatite C et le VIH.
    J'ai lu votre rapport dans lequel on indique que jamais une seringue ou une aiguille n'a été utilisé comme arme. Mais vous êtes consciente que vraiment très peu d'agressions dans les prisons sont signalées aux autorités carcérales.
    Ces données sont fondées sur les évaluations systématiques réalisées dans les prisons où ces programmes sont en place. Je présume donc que les responsables tiendraient compte du problème puisque les agents de correction ont signalé qu'il s'agissait d'une de leurs craintes.
    Exact. Donc, vous reconnaissez que les agents de correction ont fait savoir qu'ils s'opposaient à ce genre de programme en raison du fait qu'ils sont préoccupés par leur propre sécurité et par celle des autres détenus.
    C'était le cas en Allemagne et en Suisse. Dans ces deux cas, comme je l'ai dit au cours de ma déclaration préliminaire, ils ont parlé de cette crainte, et elle ne s'est pas confirmée. Avec le temps, ils ont fini par appuyer ces programmes.
    Avez-vous demandé à des responsables des prisons canadiennes ou à des dirigeants syndicaux s'ils avaient des préoccupations concernant l'implantation d'un programme d'échange de seringues dans les pénitenciers fédéraux?
    Pas personnellement. Mon collègue du réseau juridique — qui s'occupait des prisons avant moi — leur en a parlé et je crois que la sécurité institutionnelle est aussi leur principale préoccupation.
    Vous reconnaissez que c'est une préoccupation.
    Oui.
(1700)
    Qui paierait pour les seringues?
    Cela dépend. Les modèles varient d'un pays à l'autre. Dans les systèmes les moins bien financés, au Kirghizistan et en Moldavie, les coûts sont assumés par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et la malaria. En Espagne, le ministre de la Justice paie pour la distribution de seringues. Dans certains cas, les ONG qui offrent déjà des programmes d'échange de seringues dans la collectivité poursuivent cette pratique dans les prisons et reçoivent des fonds supplémentaires pour ce faire.
    Puisque vous préconisez l'implantation d'un programme d'échange de seringues dans les pénitenciers canadiens, qui en assumerait les coûts?
    Je crois que nous aurions besoin d'un projet pilote pour déterminer la méthode la plus efficace. Mais de nombreux prisonniers nous ont signalé l'importance de la confidentialité; il serait donc préférable que le service soit dispensé par une personne du service de santé ou des ONG plutôt que par des agents de correction ou du personnel non lié au service de santé.
    Selon le modèle que vous préconisez, aurait-on besoin d'autres membres du SCC comme une infirmière, ou fournirait-on simplement les seringues aux détenus qui feraient les injections à leur convenance?
    Encore une fois, tout dépend du modèle qui serait adopté dans les différents services correctionnels. Comme vous le savez, il n'y a jamais eu de projet pilote. Donc, je crois que nous devrions faire des essais pour savoir quel modèle convient le mieux pour notre système carcéral. Mais nous pouvons tirer des leçons des nombreux modèles existants, en fonction du nombre de prisons où de tels programmes existent maintenant depuis un certain nombre d'années.
    Qu'en est-il de la méthadone et de cet autre médicament appelé Suboxone? Ne sont-ils pas plus efficaces et ne sont-ils pas un meilleur moyen que la distribution de seringues pour traiter les détenus qui souffrent de toxicomanie?
    La méthadone est un traitement efficace pour les personnes qui ont une dépendance aux opiacés, mais je pense que d'autres témoins nous ont dit que le traitement à la méthadone n'est pas toujours offert et que ce n'est pas tout le monde qui veut utiliser cette méthode.
    Tous ne souffrent pas de dépendance aux opiacés. Certaines personnes peuvent faire usage d'autres drogues. L'usage de cocaïne par injection est répandu dans le système carcéral, y compris dans les pénitenciers fédéraux.
    Ce n'est donc pas une méthode efficace dans tous les cas. C'est une méthode très efficace, mais les programmes d'échange de seringues constituent un autre aspect d'un programme de réduction des dommages et de santé publique.
    Il faut deux substances pour favoriser la dépendance: la première est la drogue et l'autre, l'instrument. Vous êtes sûrement d'accord sur ce point.
    Je suis désolée, je ne considère pas la seringue comme une substance.
    La seringue n'a aucune valeur sans la drogue.
    Exact.
    L'obligation de prendre des mesures d'adaptation ne s'étend-elle donc pas aussi à la drogue?
    Dans tous les programmes d'échange de seringues, les drogues étaient illégales. Elles devraient donc le demeurer.
    Je comprends. Mais j'ai lu votre mémoire et vous avez parlé de l'article 15 de la Charte et du traitement qui doit être le même pour les prisonniers que pour la population en général. Donc, si nous avons l'obligation de prendre des mesures d'adaptation, la logique veut que l'État doive aussi fournir la drogue aux prisonniers.
    Ce n'est pas ce que nous préconisons à ce moment-ci, et ce n'est pas de cela que je parle.
    Merci.
    Bien. Monsieur Holland, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus témoigner aujourd'hui.
    Vous êtes peut-être au courant — le ministre a récemment annoncé une entente concernant l'explosion de la population carcérale — que le Canada va enfreindre un accord international dont il est le signataire, un accord de l'ONU, qui s'oppose à la double occupation des cellules.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez concernant les répercussions de la double occupation des cellules — dans le contexte de l'explosion de la population carcérale — sur les maladies infectieuses. Je pense qu'il est également important de regarder ce que cela signifie pour les collectivités, puisque 91 p. 100 des détenus retournent au sein de la société.
    J'ai lu la transcription de Craig Jones, qui est venu témoigner ici auparavant. Je suis totalement d'accord avec lui pour dire que la double occupation des cellules et l'explosion de la population carcérale ne vont qu'aggraver les conditions de vie dans le système carcéral.
    Nous avons parlé avec de nombreux prisonniers qui ne consommaient pas de drogues avant de se retrouver en prison, mais qui se sont mis à le faire une fois rendus en prison parce qu'ils doivent composer avec un environnement carcéral vraiment difficile. La double occupation des cellules ne va qu'accentuer le problème. Cela ne peut pas améliorer les choses. Cela ne va que faire grimper le taux de maladies infectieuses. C'est ce que nous pensons qui va se produire, et quand j'en ai discuté avec des groupes communautaires qui s'occupent des détenus, ils étaient du même avis.
    Je pense qu'il est important que vous ayez parlé des 91 p. 100, du nombre de détenus qui sont relâchés dans la société. En 2006, 2 000 personnes étaient atteintes de l'hépatite C et 200 personnes, du VIH. C'est inacceptable. 
    Ces chiffres étaient 2 000 détenus relâchés avec l'hépatite C et 2 000, avec le VIH?
    C'est 200.
    C'est donc 200 personnes dans la collectivité générale.
    En 2006.
    Je pense que c'est important. Nous avons parlé du risque associé au programme d'échange de seringues. Vous avez parlé de pays européens qui avaient les mêmes craintes, et que celles-ci ne s'étaient pas concrétisées.
    Vous pourriez évaluer, d'une part, le risque d'offrir un programme d'échange de seringues aux détenus et, d'autre part, le risque pour la sécurité et la santé du public de ne pas offrir des programmes qui freinent cette augmentation rapide des maladies infectieuses dans nos prisons.
(1705)
    C'est exactement ce que les analyses systémiques nous ont démontré. Les risques associés aux préoccupations sur ces programmes d'échange de seringues ne se sont tout simplement pas concrétisés. Il n'y a pas eu d'augmentation de la violence institutionnelle. Les seringues n'ont pas été utilisées contre le personnel ou les autres détenus.
    Si nous ne mettons pas cela en oeuvre, le nombre de personnes infectées par l'hépatite C et le VIH augmentera de jour en jour. Pendant la préparation du rapport que nous avons présenté plus tôt cette année, j'ai parlé à des gens qui étaient persuadés qu'ils avaient été infectés pendant leur incarcération.
    L'un des arguments est celui-ci: tout ce que nous avons à faire, c'est d'adopter une attitude répressive en matière de drogues; la solution, c'est de bloquer l'entrée de drogues. Pendant de nombreuses années, cette politique a été mise en application, et des dizaines de millions de dollars ont été dépensés. Les résultats des tests anti-drogue faits au hasard démontrent que la consommation de drogues a augmenté au cours de cette période.
    Que pensez-vous de l'argument voulant que la seule solution soit d'empêcher les drogues d'entrer dans nos prisons pour régler le problème?
    Je pense que c'est une partie de la solution; empêcher les drogues d'entrer, c'est une partie. Mais le dernier sous-commissaire du SCC a dit que cela n'empêche tout simplement pas les drogues d'entrer. Il n'y a aucune prison au monde où les drogues n'entrent pas.
    Étant donné les sommes importantes dépensées au cours des 10 dernières années et le fait que l'enquêteur correctionnel a constaté que l'usage de drogues n'a pas diminué, on ne peut se concentrer que sur l'interdiction de la drogue. Il doit y avoir une perspective globale.
    Concernant les coûts, pouvez-vous comparer le coût de certaines des mesures que vous proposez —les programmes d'échange de seringues — au coût du traitement médical d'une personne atteinte du VIH-sida ou de l'hépatite C? Si nous comparions le coût d'une méthode de prévention au coût d'une approche consistant à ne rien faire, quelle serait la différence de coût?
    Nous n'avons pas de données sur les coûts des différents programmes qui existent dans le monde.
    Les directeurs espagnols nous ont dit qu'il y a le coût des seringues elles-mêmes, et dans les nombreux cas où c'est le personnel qui s'occupe du programme, le temps qui y est consacré est minime. Il y a des discussions avec les détenus au sujet des renvois...
    Et quel est le coût amorti sur une base annuelle du traitement des cas d'hépatite C ou du VIH-sida dans les prisons?
    Pour un détenu, c'est 22 000 $ pour l'hépatite C, et 29 000 $ par année.
    Et pour le VIH-sida?
    C'est 29 000 $ par année.
    Merci, monsieur le président.
    C'est le coût à vie.
    Merci beaucoup.
    Madame Mourani, je vous prie.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame, de votre présence. J'aurais quelques petites questions. Vous avez dit que 30 p. 100 des détenus auraient aujourd'hui l'hépatite C. C'est bien ça?

[Traduction]

    Je pense que le chiffre que j'ai vu, c'est 27,6 p. 100. C'était les chiffres de 2006, et je crois que ces taux sont probablement plus élevés.

[Français]

    Vous ne parliez pas d'aujourd'hui, mais de 2006.
    Parmi les données que vous avez apportées, avez-vous la ventilation des détenus contaminés en prison par rapport à ceux qui étaient déjà contaminés?

[Traduction]

    Nous n'avons pas la ventilation. Je pense que dans certains cas, il est très difficile de dire quand et comment ils ont été infectés. Nous n'avons pas ces données. Le recensement de 2007...

[Français]

    Ça veut dire qu'on ne peut pas affirmer que ces gens ont été contaminés à l'intérieur de la prison. On peut seulement dire qu'ils sont contaminés.

[Traduction]

    Oui, mais il existe des données qui indiquent les taux de VIH et d'hépatite C à l'admission — quand les personnes sont soumises à un test de dépistage — et les problèmes dans le système carcéral. Ces données sont très différentes, et je peux vous les fournir.

[Français]

    C'est avant ou après quoi? Je ne comprends pas.

[Traduction]

    Quand les personnes sont soumises à un test de dépistage à l'admission — quand elles sont sur le point d'entrer en prison — les taux de VIH et d'hépatite C sont beaucoup plus bas que la prévalence dans l'ensemble du système carcéral fédéral. Nous pouvons en tirer des conclusions, même si nous ne pouvons pas dire quand ils ont été infectés.

[Français]

    Quelle conclusion peut-on tirer?

[Traduction]

    Des personnes sont infectées dans les pénitenciers.

[Français]

    Qu'ils auraient été infectés à l'intérieur du pénitencier?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Prenons la perspective du Service correctionnel du Canada. Le Service correctionnel a le mandat d'offrir des programmes pour lutter contre la toxicomanie, c'est à dire aider les gens à sortir d'une toxicomanie.
    Que pensez-vous de cette ambivalence entre le fait qu'à l'intérieur de la prison on donne les seringues et tout pour que les gens se droguent, et le fait qu'on interdit l'entrée de la drogue en prison et qu'on offre des programmes qui expliquent aux gens comment travailler sur eux-mêmes pour s'en sortir et ne plus consommer?
(1710)

[Traduction]

    Je ne pense pas qu'il s'agit d'ambivalence. Je pense qu'il s'agit de la reconnaissance du fait que les personnes font usage de drogues. Dans la société, nous interdisons les drogues, et nous fournissons des programmes d'échange de seringues fondés sur les faits en matière de santé publique et de coûts. Donc, je pense qu'il y a là une reconnaissance de la réalité, qui est que des gens souffrent de dépendance. Quelle qu'en soit la raison, ils n'ont pas nécessairement accès à des traitements, et nous voulons prévenir la transmission de maladies.

[Français]

    Comment voyez-vous la gestion de ce genre seringue? Faut-il la donner à un prisonnier dans une cellule et le laisser se débrouiller? Voyez-vous ça comme ça?

[Traduction]

    Cela dépend de la façon de gérer le programme. Il y a eu différents exemples. Il y a eu des distributeurs automatiques et des pairs qui travaillaient en santé. Dans la plupart des cas où ce programme a été mis en oeuvre, il y a toujours eu une augmentation du nombre de personnes adressées à des programmes de traitement de la toxicomanie. Donc, il faut toujours parler de l'usage de drogues et de ses dangers.

[Français]

    Il y a une chose que je ne comprends pas: quand vous parlez du programme, vous parlez de programme à l'extérieur de la prison et non à l'intérieur.

[Traduction]

    Non, des programmes d'échange de seringues dans les pénitenciers d'autres pays.

[Français]

    Ah, les programmes sont dans d'autres pays!

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Je n'avais pas vu au Service correctionnel du Canada des distributrices de seringues.
     Vous rendez-vous quand même compte que, tous les jours, les agents de correction ont à gérer la violence à l'intérieur des murs? Cette violence est générée par l'injection de drogues, mais aussi par la capacité et l'ingéniosité des détenus à pouvoir utiliser n'importe quel objet pour agresser des codétenus ou des gardiens.

[Traduction]

    Ceci est votre dernière question. Veuillez conclure.

[Français]

    Une seringue non contrôlée peut donc devenir très dangereuse, comme un simple crayon.

[Traduction]

    Nous avons présenté une demande d'accès à l'information au SCC il y a quelques années, et je pense qu'il y a eu plus de 100 cas accidentels de blessure par aiguille au cours de cette période de cinq ans, et pas un seul cas où une seringue a été utilisée comme arme.
    Je peux formuler une hypothèse qui en explique la raison. C'est parce qu'elles ont beaucoup de valeur. Elles sont si rares. Les gens ne veulent pas les utiliser en tant qu'armes parce qu'il faut les payer. Dans les autres pays où ces programmes d'échange de seringues sont en place, elles n'ont pas été utilisées en tant qu'armes.
    Merci.
    Monsieur Davies.
    Merci.
    Je tiens tout d'abord à vous remercier pour le document très bien documenté que vous nous avez remis. Je ne me souviens pas avoir vu autant de notes en bas de page dans un document auparavant.
    Mon collègue d'en face a demandé qui paiera pour les seringues si elles sont fournies. Qui paie le coût de traitement de 22 000 $ par année pour un détenu qui souffre d'hépatite C, ou de 29 000 $ par année pour celui qui est atteint du VIH?
    SCC.
    SCC assume les coûts. Savez-vous combien coûterait l'approvisionnement en seringues par année?
    Je ne sais pas exactement. Lorsque je parle aux responsables du programme de distribution pour la réduction des préjudices en Ontario, on me dit que le coût d'une seringue varie entre 5 et 10 cents.
    Entre 5 et 10 cents, très bien.
    C'est le cas dans leur réseau de distribution.
    D'accord.
    Ce n'est pas beaucoup.
    Je pense qu'il est facile de voir ce qui est le plus économique.
    En ce qui concerne les piqûres accidentelles, j'ai parlé à des gardiens de prison qui m'ont dit que les gardiens ont souvent peur de se piquer sur une seringue, qui peut être dissimulée à toutes sortes d'endroits, lors des fouilles dans les cellules.
    Les gardiens de prison vous ont-ils déjà fait part de ces craintes?
    Oui. Mon collègue précédent, qui leur a déjà parlé, en a entendu parler. Lorsque nous avons présenté la demande d'accès à l'information, nous avons constaté que cela s'était produit assez souvent sur une période de cinq ans, soit plus d'une centaine de fois.
    D'où je viens à Vancouver, en Colombie-Britannique, nous avons aujourd'hui — et c'est le cas depuis plusieurs années — un programme sûr d'échange de seringues dans la rue, de même qu'un site d'injection sûr. Mais en ce qui a trait au programme d'échange de seringues, qui permet aux toxicomanes d'obtenir une seringue neuve en échange d'une seringue usagée, les gouvernements qui se sont succédé, peu importe leur allégeance, ont tous continué de l'appuyer. Je constate que les toxicomanes dans la rue courent moins de risques que les détenus dans les prisons fédérales. Diriez-vous que c'est le cas?
    Il est tout à fait illogique, à mon avis, qu'on refuse à quelqu'un qui pourrait obtenir des seringues, profiter du programme, dans la rue d'y avoir accès en prison. En fait, nous avons parlé à de nombreux détenus qui nous ont dit avoir bénéficié des programmes d'échange de seringues dans la collectivité, mais ne pas y avoir eu accès en prison.
(1715)
    Ma dernière question concerne l'affirmation que vous faites à la page 25 de votre rapport voulant que les programmes d'échange de seringues dans les prisons « facilitent la mise en rapport des utilisateurs avec des programmes de désintoxication ». Vous avez fait valoir que cela n'accroît pas la consommation, mais peut parfois amener les intéressés à se faire traiter. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Bien sûr. Les évaluations qui ont été faites de ces programmes ont révélé que les conversations qu'ont eues les détenus avec le personnel des soins de santé et leurs collègues qui ont reçu une formation sur la réduction des préjudices et de la dépendance, et sur les traitements, ont facilité la mise en rapport des utilisateurs avec des programmes de désintoxication. C'est ce que les faits ont démontré. Les programmes ouvrent la porte à un dialogue avec le personnel des soins de santé, leurs collègues, ou des ONG externes.
    Tout le monde s'entend, à mon avis, pour dire que la consommation de la drogue en prison n'est pas souhaitable, qu'elle présente un danger, et qu'elle débouche sur un problème qu'il faut, de l'avis de tous, régler. Mais je pense que nous parlons ici de la réduction des préjudices.
    Ma dernière question porte sur le fait que les rapports sexuels entre détenus sont interdits, mais qu'on leur fournit des condoms et des digues. La drogue est interdite en prison, mais nous venons tout juste d'entendre qu'on distribue aux prisonniers du méthadone. Ne vous semble-t-il pas illogique de ne pas vouloir passer à l'étape finale et leur fournir l'attirail qui, nous sommes tous d'accord pour le dire, de même que les experts, y compris les Nations Unies, permettrait de réduire la propagation de maladies infectieuses transmises par le sang?
    Oui. Quand on sait que SCC fournit de l'eau de Javel, dans le but principalement de désinfecter les seringues pour réduire les risques de VIH, et que cela n'aide en rien à réduire les risques d'hépatite C, c'est, en effet, tout à fait illogique. On distribue l'eau de Javel avec les instructions sur la façon de nettoyer les seringues pour la consommation des drogues injectables.
    Donc, même si on n'aborde pas la question du point de vue des droits, du point de vue de la santé publique...
    Nous allons devoir clore la séance.
    ... ou de la prévention des maladies, cela semble justifié de ce point de vue?
    Absolument. Et du point de vue des coûts également.
    D'accord. Merci beaucoup. Nous vous remercions d'avoir bien voulu comparaître devant le comité.
    Merci.
    Nous allons suspendre la séance pendant une minute, puis passer à huis clos.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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