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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 049 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 15 décembre 2010

[Enregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Il s'agit de la 49e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous sommes le mercredi 15 décembre 2010.
    Je veux rappeler à tous que la séance d'aujourd'hui est télédiffusée. Nous continuons notre étude du projet de loi C-17, Loi modifiant le Code criminel, investigation et engagement assorti de conditions.
    Nous sommes heureux d'accueillir le ministre de la Justice, l'honorable Rob Nicholson, qui comparaît devant nous aujourd'hui. Il est accompagné de deux fonctionnaires du ministère de la Justice: Donald Piragoff, sous-ministre adjoint principal au Secteur des politiques, et Douglas Breithaupt, directeur et avocat général à la Section de la politique en matière de droit pénal.
    Durant la deuxième heure, nous accueillerons d'autres représentants du ministère — Glenn Gilmour, avocat à la Section de la politique en matière de droit pénal. Certains d'entre eux comparaîtront au cours de la deuxième heure. Nous nous excusons auprès de notre ministre et des autres personnes. Comme vous le savez, des votes ont eu lieu à la Chambre un peu plus tôt.
    Nous avons hâte d'entendre votre point de vue, monsieur le ministre, et nous vous donnons la parole. Nous passerons ensuite à des séries de questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis ravi de comparaître devant le comité. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, je crois qu'il y a longtemps que je n'ai pas comparu devant votre comité.
    Bien entendu, je suis ici pour parler du projet de loi C-17, un projet de loi qui rétablira les dispositions sur l'investigation et l'engagement assorti de conditions du Code criminel. Comme vous le savez, ces dispositions ont fait partie du Code criminel à partir de la fin de l'année 2001 jusqu'à ce qu'elles cessent d'avoir effet le 1er mars 2007, conformément à une disposition de temporisation. Elles ont fait l'objet d'un examen important dans le cadre de l'examen obligatoire de la Loi antiterroriste ainsi que du projet de loi qui a précédé le projet de loi C-17 au cours de la législature précédente. Notre gouvernement est d'avis que le projet de loi répond aux questions soulevées durant ces examens et ces débats.
    Monsieur le président, permettez-moi de donner un aperçu de ce que propose le projet de loi C-17.
    Premièrement, la disposition sur l'investigation donnerait au juge, lorsqu'un agent de la paix lui en ferait la demande, le pouvoir d'obliger une personne qui a des renseignements sur une infraction de terrorisme passée ou éventuelle à comparaître devant lui pour répondre à des questions et lui remettre toute chose qu'elle a en sa possession ou à sa disposition. La personne comparaîtra en tant que témoin et non en tant qu'accusée.
    Deuxièmement, la disposition sur l'engagement assorti de conditions permettra à un agent de la paix — qui a des motifs raisonnables de croire qu'une activité terroriste sera entreprise et de soupçonner que l'imposition, à une personne, d'un engagement assorti de conditions est nécessaire pour éviter que l'activité terroriste ne soit entreprise — de s'adresser à un juge pour lui demander d'obliger cette personne à comparaître devant le juge, où l'on déterminera si des conditions raisonnables devraient être imposées à la personne afin d'empêcher que l'activité terroriste soit entreprise.
    Troisièmement, en plus de l'exigence de produire un rapport annuel, le projet de loi C-17 exige que ces deux outils fassent l'objet d'un examen parlementaire obligatoire. Au cours du débat de deuxième lecture, on a proposé qu'un examen des deux Chambres serait adéquat. Je tiens à souligner que le projet de loi prévoit que l'examen puisse être entrepris par un comité établi par l'une des deux Chambres ou par les deux. Au bout du compte, c'est le Parlement qui prendra la décision.
    Monsieur le président, je crois qu'il est important de présenter certaines garanties essentielles qui ont été ajoutées aux dispositions originales sur l'investigation.
    Premièrement, le projet de loi prévoit que dans tous les cas, un juge devra être convaincu qu'une investigation est justifiée, en se fondant sur le fait que des efforts raisonnables ont déjà été déployés pour obtenir les renseignements. Auparavant, cette disposition ne s'appliquait qu'aux infractions appréhendées et non à celles déjà commises.
    Deuxièmement, les dispositions originales de 2001 exigeaient que des autorités provinciales et fédérales, y compris le procureur général du Canada, produisent des rapports annuels sur le recours aux dispositions sur l'investigation et l'engagement assorti de conditions. Toutefois, le Comité sénatorial spécial chargé de réviser la Loi antiterroriste a recommandé que le procureur général du Canada énonce clairement dans le rapport annuel si les dispositions demeurent nécessaires. Le présent projet de loi met en oeuvre cette recommandation, tout en exigeant que le ministre de la Sécurité publique exprime un énoncé similaire dans son rapport annuel.
    Troisièmement, en 2006, le Sous-comité sur la revue de la Loi antiterroriste de la Chambre des communes a exprimé des préoccupations sur la question de savoir si une personne mise sous garde pour une investigation aurait droit d'être mise en liberté en vertu des moyens énoncés dans le Code criminel. En réponse à ces préoccupations, le projet de loi C-17 propose, grâce à l'application de l'article 707 du Code criminel, de plafonner la période au cours de laquelle une personne arrêtée peut être mise sous garde pour une investigation.
    Monsieur le président, je crois qu'il est important de dire que le projet de loi C-17 permettra toujours la tenue d'une investigation liée à un acte terroriste passé. Le gouvernement est d'avis que les infractions passées en soi méritent une enquête. Il ne fait aucun doute qu'elle peut fournir des renseignements cruciaux sur la planification d'autres actes terroristes.
(1550)
    Je vais maintenant parler de certaines des dispositions clés qui ont été ajoutées aux dispositions originales sur l'engagement assorti de conditions.
    Premièrement, au cours de l'examen que le comité sénatorial a fait de l'ancien projet de loi S-3, le gouvernement a accepté la recommandation du sénateur Baker d'aligner l'engagement assorti de conditions sur la décision de la Cour suprême dans l'affaire R. c. Hall, dans laquelle un passage de l'un des motifs de détention dans les dispositions sur les cautions du Code criminel a été jugé inconstitutionnel. Nous étions d'accord à ce moment-là, et nous le sommes toujours. Le projet de loi C-17 prévoit ce changement par souci de cohérence avec la décision rendue dans l'affaire Hall.
    Bien entendu, je dois parler des quelques questions qui ont été soulevées au cours des débats précédents. Certains ont fait valoir que les dispositions ne sont pas nécessaires, car on y a rarement eu recours. Toutefois, dire qu'on a rarement recours à des dispositions et dire que les situations qui exigeraient son recours ne surviendront jamais, ce sont deux choses différentes. Les outils prévus dans le projet de loi C-17 sont modestes et limités si on les compare aux mesures antiterroristes qui existent dans d'autres démocraties importantes.
    Monsieur le président, concernant l'investigation, certains ont dit qu'elle élimine le droit de garder le silence, mais comme vous le savez, les dispositions originales incluent la protection contre les éléments de preuve ayant un effet auto-incriminant en couvrant l'immunité contre l'utilisation de la preuve ou de la preuve dérivée. Vous serez contents d'apprendre que le projet de loi prévoit ces solides protections.
    Il est important de dire qu'en 2004, dans une décision majoritaire, dans le cadre d'une contestation constitutionnelle contre le projet de recours à une investigation qui est survenue durant l'affaire Air India, la Cour suprême a mis l'accent sur la solide protection contre les éléments de preuve ayant un effet auto-incriminant que la loi fournissait aux gens, et qui en fait allait au-delà des exigences et de la jurisprudence pour protéger les gens contre l'auto-incrimination.
    Monsieur le président, la dernière question, c'est de savoir si le Code criminel contient déjà des dispositions qui pourraient être utilisées pour des infractions relatives au terrorisme comme les articles 495 et 810.01. Le paragraphe 495(1) permet à un agent de la paix d'arrêter une personne, sans mandat, s'il existe des motifs raisonnables de croire qu'elle est sur le point de commettre un acte criminel. Cependant, un agent de la paix peut, au moment de l'arrestation possible, ne pas atteindre ce seuil. Étant donné la gravité du tort que pourrait causer une activité terroriste, il est nécessaire de pouvoir agir rapidement pour contrer la menace.
    Dans mon exposé d'aujourd'hui, j'ai tenté de présenter quelques garanties et améliorations concernant l'investigation et l'engagement assorti de conditions, tout en traitant de quelques questions qui ont été soulevées.
    À mon avis, la mesure législative proposée est équilibrée, juste et nécessaire.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le ministre, merci beaucoup de votre déclaration préliminaire.
    Nous passons maintenant à la première série de questions. Je vais tenter de faire respecter le temps alloué, car le ministre a un autre rendez-vous à 16 h 30.
    Monsieur Holland.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je vous remercie de comparaître devant le comité aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, je suis préoccupé entre autres par la question de la surveillance. Si nous devions adopter les dispositions, nous le ferions sans que le gouvernement n'ait donné suite à une série de recommandations qu'avaient faites le juge O'Connor il y a longtemps, qui ont été bien entendues renforcées par le juge Iacobucci, et ensuite réitérées dans le rapport Brown sur le scandale des pensions à la GRC, répétées par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, et répétées par Paul Kennedy, lorsqu’il était commissaire aux plaintes du public contre la GRC.
    Monsieur le ministre, où en sommes-nous à cet égard? On nous a dit que la raison pour laquelle le gouvernement n’a pas donné suite à ces recommandations sur la surveillance… Comme vous devez le savoir, dans beaucoup de ministères, y compris Emploi et Immigration Canada, il n'y a pas de surveillance. On nous a dit que vous ne donniez pas suite aux recommandations en raison du rapport du juge Major. Le rapport du juge Major a été publié il y a plus de six mois, et le gouvernement ne donne toujours pas suite aux recommandations, dont un grand nombre ont été faites il y a cinq ans.
    Pouvez-vous tout d’abord nous dire où nous en sommes en ce qui a trait aux dispositions sur la surveillance?
    Eh bien, encore une fois, en réponse à l’enquête sur Air India, le gouvernement s’est engagé à favoriser la mise en place d'un mécanisme d’examen interagences dans le cadre de son plan d’action. En ce qui concerne toutes les recommandations, je peux dire que le gouvernement va de l’avant. Comme vous l’avez dit, nous avons déjà donné suite à certaines d’entre elles. En ce qui a trait aux mégaprocès, le projet de loi dont est saisi le Parlement répond aux enjeux qui n’étaient pas couverts à ce moment-là.
    Le gouvernement va de l’avant. Le projet de loi que vous avez devant vous est très précis pour ce qui est des dispositions qui ont cessé d’être en vigueur en 2007. Nous avons fait valoir, comme d’autres l’ont fait, que ces dispositions sont nécessaires. Nous vous demandons de les approuver.
(1555)
    Mais, si vous me le permettez, monsieur le ministre, pour être très précis, dans ses recommandations, le juge O’Connor a souligné le besoin de surveillance dans tous les secteurs qui sont liés à la sécurité et aux renseignements. Par exemple, il n’y a pas de surveillance du tout en ce qui a trait à l’immigration ou à l’Agence des services frontaliers du Canada. Pour vous donner un autre exemple, à la GRC, la surveillance est extrêmement limitée. Le bureau du Commissaire aux plaintes du public n’est pas capable d’entreprendre des enquêtes de façon proactive; son bureau n’est pas en mesure d’obliger une personne à témoigner.
    Depuis cinq ans, les commissions d’enquête font valoir que c’est absolument crucial à mesure que nous allons de l’avant sur les questions de sécurité et de renseignement; mais, rien à cet égard n'est inclus dans le soi-disant plan d’action auquel vous faites référence, malgré le fait qu’à la suite de chacune de ces enquêtes, le gouvernement a dit qu’il agirait en ce qui a trait aux dispositions sur la surveillance.
    Monsieur le président, le ministre ne pourrait-il pas convenir avec moi, par votre entremise, qu’il est très difficile d’appuyer de telles mesures si elles n’incluent pas une surveillance rigoureuse?
    Eh bien, encore une fois, monsieur Holland, selon le plan d’action, le gouvernement « permettra l'examen des activités de sécurité nationale auxquelles participent plusieurs ministères et organismes et créera un mécanisme interne pour assurer la responsabilisation et le respect des lois et politiques régissant l'échange d'information sur la sécurité nationale ».
    Le projet de loi que vous avez devant vous est très précis. Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, et je suis sûr que vous l'avez constaté en examinant le projet de loi, et comme vous le diront d'autres personnes qui comparaîtront devant vous, il y a des garanties tout au long du processus, et des garanties pour le recours aux deux dispositions, y compris le consentement du procureur général et la surveillance judiciaire. Les articles sont très précis pour ce qui est d'empêcher les activités terroristes de se produire et d'enquêter sur ces activités, et ils sont autonomes et ils devraient l'être. C'était le cas de 2001 à 2007, et ils devraient être adoptés de nouveau.
    Ce que je veux dire, c'est que depuis cinq ans, on nous fait des déclarations vagues et ambitieuses, on nous dit que vous allez faire quelque chose au sujet de la surveillance, mais rien n'a été fait.
    Permettez-moi d'utiliser un exemple très précis. L'enquête du juge Iacobucci sur M. El Maati, M. Almalki et M. Nureddin, qui, en raison de l'échec des services de sécurité et de renseignement, ont affronté des épreuves horribles à l'étranger, où ils ont été détenus et torturés... Le gouvernement leur doit encore des excuses et il n'a pas encore agi selon les conclusions du juge Iacobucci. Nous savons qu'à ce jour, ces messieurs ne peuvent toujours pas prendre l'avion ou se déplacer librement dans bien des cas, parce que le gouvernement refuse de donner suite aux recommandations.
    Monsieur le ministre, si depuis des années, le gouvernement ne donne pas suite aux recommandations ou aux abus commis dans ces affaires, comment pouvons-nous aller de l'avant avec ces mesures, surtout lorsqu'on nous fait seulement de vagues promesses qu'un jour, quelque part, et à un moment donné, nous obtiendrons la surveillance que l'on demande depuis plus de cinq ans?
    Monsieur Holland, encore une fois, je vous ai dit que des garanties sont prévues dans le projet de loi en ce qui concerne son utilisation, mais je vous ai également dit que le procureur général et le ministre de la Sécurité publique présenteront leurs observations et un examen sur le recours à ces dispositions. Ainsi, cette surveillance fera partie de la compétence du Parlement pour ce qui est de décider si ces dispositions sont toujours nécessaires. Donc, il y aura cela.
    Comme je l'ai dit, nous sommes allés plus loin que ce qui était prévu au départ. À l'origine, le procureur général du Canada devait présenter tous les ans un examen sur les dispositions et la nécessité d'y avoir recours; nous sommes allés au-delà de cela. Le ministre de la Sécurité publique le fera. Donc, pour ce qui est de votre question sur la surveillance ou l'analyse, on analysera et on surveillera considérablement ces deux dispositions qui, en toute honnêteté, vont nettement plus loin que bien d'autres dispositions.
    Encore une fois, je crois que c'est très adéquat en bout de ligne, après qu'elles seront mises en place, leur examen... Mais au début, lorsque les organismes d'application de la loi auront besoin de ces outils pour lutter contre le terrorisme au Canada, vous trouverez, comme vous l'avez sûrement découvert, toute une gamme de garanties qui protégeront les gens concernés.
(1600)
    Il vous reste 30 secondes.
    Monsieur le ministre, voici ce qui me pose problème: chaque fois qu'on élargit des pouvoirs extraordinaires, on doit mettre des mécanismes de contrôle en place. Il doit y avoir une surveillance adéquate...
    C'est ce que je dis.
    ... et, monsieur le ministre, avec tout le respect que je vous dois, pendant cinq ans, malgré différentes commissions d'enquête et malgré les recommandations du comité et d'autres parties, rien n'a été entrepris, point à la ligne. Après cinq ans, des déclarations vagues et ambitieuses selon lesquelles nous obtiendrons un jour ce que nous demandons ne suffisent pas.
    On nous a dit que vous attendiez le rapport du juge Major. Où se fait exactement la surveillance pour l'immigration, l'Agence des services frontaliers du Canada et les 10 autres organismes qui n'ont pas de surveillance liée au renseignement de sécurité?
    Le président: Merci, monsieur Holland.
    M. Mark Holland: Et qu'en est-il des excuses que vous devriez présenter à M. El Maati, à M. Almalki et à M. Nureddin?
    Merci beaucoup, monsieur Holland.
    Monsieur le ministre, vous devrez répondre à la question à un autre moment au cours d'une autre série de questions.
    Nous passons maintenant à M. Gaudet ou à Mme Mourani.

[Français]

    Madame Mourani, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Bonjour, monsieur le ministre. Je vous écoutais, un peu plus tôt, et vous avez parlé d'une gamme de garanties qui permettraient d'avoir un certain contrôle. Il faudrait une certaine révision de ces dispositions. Quand vous parlez d'une gamme de garanties, de quoi parlez-vous exactement?

[Traduction]

    Concernant les investigations, seul un juge ou un juge d'une cour supérieure peuvent entendre la demande d'un agent de la paix. Il s'agit d'une des garanties. De plus, il faut obtenir le consentement préalable du procureur général du Canada, ou encore du procureur général ou du solliciteur général de la province. Il devra exister des motifs raisonnables de croire qu'une infraction de terrorisme a été commise ou sera commise, et le juge devra être convaincu que des efforts raisonnables ont été déployés pour obtenir par d'autres moyens les renseignements sur des infractions de terrorisme passées ou éventuelles.
    Je pourrais vous donner d'autres exemples. Le témoin aura le droit de retenir les services d'un avocat et de lui donner des instructions à toute étape des procédures. Je crois que c'est d'une très grande portée et que c'est impressionnant. Encore une fois, je ne veux pas utiliser tout votre temps, mais mes observations concernant le consentement des procureurs généraux provinciaux et fédéral au sujet de l'engagement assorti de conditions demeurent, donc...

[Français]

    Monsieur le ministre, je comprends tout cela, j'ai lu le projet de loi. Toutefois, un peu plus tôt, vous parliez du ministre de la Sécurité publique, qui va exercer un contrôle et va permettre une certaine surveillance. J'essaie de comprendre.

[Traduction]

    Oui. Je suis ravi d'en parler, mais j'ai dit que les procureurs généraux fédéral et provinciaux devront faire rapport tous les ans sur tout recours à ces pouvoirs. Le ministre de la Sécurité publique et le ministre responsable des services policiers de chaque province doivent faire rapport tous les ans sur l'arrêt de personnes sans mandat. En vous parlant du fait qu'on obtiendra ces rapports et ces examens des ministres de la Sécurité publique ou des solliciteurs généraux, dans les provinces où on y a eu recours, et des ministres fédéraux, je réponds à votre question sur la surveillance et l'imputabilité.

[Français]

    Lorsque vous parlez de surveillance et d'imputabilité, cela me fait penser un peu au Sommet du G20, alors qu'il y a eu des pouvoirs spéciaux. Il semblerait qu'il n'y ait même pas eu de tels pouvoirs, mais on a fait croire aux gens que des pouvoirs spéciaux avaient été donnés à la police. Il y a eu des allégations de violations de droits de la personne, qui se sont avérées véridiques. On a reçu, justement, le ministre de la Sécurité publique, qui a dit qu'il n'était responsable de rien et qu'il n'était pratiquement au courant de rien.
     D'un autre côté, vous nous demandez de vous donner plus de pouvoirs, de donner plus de pouvoirs à la police, aux forces de l'ordre, de ne pas nous en faire puisque le ministre de la Sécurité publique sera un peu le garant de la surveillance de tout cela. Comment voulez-vous qu'on puisse croire à cela puisque, récemment, on a eu un bel exemple avec le Sommet du G20, et le ministre s'en est carrément lavé les mains?

[Traduction]

    Sauf votre respect, je ne suis pas d'accord avec vos commentaires visant mon collègue, le ministre de la Sécurité publique. Si vous parliez des lois provinciales ou du service de police provincial, je crois que le gouvernement ontarien étudie actuellement la question.
(1605)

[Français]

    Non, je parle de la GRC.

[Traduction]

    Toutefois, cela étant dit...

[Français]

    Non, je parle de la GRC, monsieur le ministre.

[Traduction]

    Désolé? Vous m'avez posé des questions.
    Laissez-le compléter sa réponse.

[Français]

     Je vous parle de la GRC, qui était en charge du Groupe intégré de la sécurité du G20.

[Traduction]

    Oui. En ce qui concerne les dispositions de ce projet de loi, comme vous pouvez le constater, les tribunaux participent et assurent une surveillance dès le tout début, et ce, non seulement sur les aspects judiciaires, ce qui, selon moi, devrait vous permettre d'avoir une grande confiance dans le processus. De plus, il faut obtenir le consentement du procureur général. Il faut avoir cela en plus. Les dispositions feront aussi l'objet d'un processus d'examen.
    J'essaye de vous faire comprendre que cela ne dépend pas uniquement des corps policiers comme la GRC ou les services de police provinciaux et municipaux. Ces décisions ne sont pas prises à ce niveau. Les tribunaux exercent une surveillance à ce moment précis, et le consentement du procureur général doit être obtenu. Je...

[Français]

    Très bien.

[Traduction]

    ... vous fait remarquer que si les politiciens, le monde judiciaire et les services de police...

[Français]

    Monsieur le ministre, j'aimerais vous interrompre.

[Traduction]

    ... participent tous, vous serez d'accord avec moi pour dire...

[Français]

    Pouvez-vous mettre votre oreillette, s'il vous plaît?

[Traduction]

    ... que cela crée le climat d'imputabilité et de surveillance que vous recherchez.

[Français]

    Une chose m'intrigue beaucoup dans ce processus judiciaire. Il s'agit de l'information qui sera présentée au juge, notamment, pour décider si une personne doit être détenue à titre préventif. On ne portera pas d'accusation. S'il y a accusation, il y a procès, il y condamnation et il y a incarcération. On parle de détention préventive.
    Sachant que le SCRS utilise de l'information obtenue sous la torture et que ce genre d'information est inefficace et mensongère — nous l'avons vu dans le cas d'Omar Khadr qui accusait Maher Arar puisqu'il a été lui-même torturé —, comment pouvons-nous faire confiance à un système, monsieur le ministre, basé sur la torture et où l'information est obtenue sous la torture dans des pays étrangers? Maintenant, on sait que l'information provenant des États-Unis et de Guantanamo a été obtenue sous la torture, sans compter l'Irak et la prison d'Abou Ghraib.

[Traduction]

    Merci, madame Mourani.
    Allez-y, monsieur le ministre.
    D'après le projet de loi, nous supposons que la personne sera relâchée. C'est ce que nous présumons. Ces dispositions sont testées dans le système judiciaire canadien, dans lequel nous avons tous confiance, j'en suis assez certain, et nous disposons de surveillance et de garanties. Monsieur le président, dans le cadre de votre étude, vous examinerez toutes les garanties dont j'ai commencé à dresser la liste pour Mme Mourani, et je suis certain que tout fonctionnera bien.
    L'enjeu est assez élevé. Soyons réalistes: nous parlons ici d'activités terroristes. Nous savons que le Canada est la cible de ce genre d'activités, comme le sont d'autres pays, et nous devons avoir des dispositions. Nous devons répondre à ce besoin.
    En ce qui concerne la question de trouver le juste équilibre, je crois que nous y sommes arrivés dans le projet de loi. Ces mesures ont fait partie de la loi au cours des sept premières années de la décennie...

[Français]

    Êtes-vous au courant...

[Traduction]

    Madame Mourani, votre temps est écoulé.

[Français]

    Pardon?

[Traduction]

    Votre temps est écoulé.
    Aviez-vous terminé votre réponse, monsieur le ministre?
    C'est correct. Je tiens à ce que tout le monde puisse s'exprimer.
    D'accord.
    Vous pouvez y aller, monsieur Davies, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être venu aujourd'hui.
    L'une des sections importantes de ce projet de loi concerne les témoignages obtenus sous la contrainte. J'aimerais vous lire le nouveau paragraphe 83.28(10) du projet de loi:
Nul n'est dispensé de répondre aux questions ou de reproduire une chose aux termes du paragraphe (8) pour la raison que la réponse ou la chose peut tendre à l'incriminer ou à l'exposer à quelque procédure ou pénalité, mais
    Ensuite, l'alinéa 83.28(10)b) se lit:
aucun élément de preuve découlant de la preuve obtenue de la personne ne peut être utilisé ou admise contre elle dans le cadre de poursuites criminelles autres que celles prévues aux articles 132 ou 136
    Je crois qu'il est ici question de faux témoignages.
    Lundi, nous avons entendu le témoignage du professeur Craig Forcese. Monsieur le ministre, voici ce qu'il nous a dit:
La Cour suprême en est toutefois arrivée à cette conclusion en imposant certaines conditions au recours aux enquêtes, la principale étant l’élargissement de l’immunité fondée sur l’usage connexe, garanti dans le projet de loi actuel par le paragraphe 83.28(10).
Cette disposition étend l’immunité aux poursuites pénales ultérieures, mais la Cour suprême a déclaré qu’elle devait aller plus loin. Les éléments de preuve obtenus ne devraient pouvoir être utilisés dans aucune autre instance, y compris les instances en extradition et en immigration. C’est une obligation constitutionnelle qui devrait figurer, pour cette raison, dans le projet de loi.
    Monsieur le ministre, vous avez mentionné la surveillance judiciaire. Vous en avez parlé à quelques reprises. Nous avons déjà assisté à un certain contrôle judiciaire lorsque la Cour suprême du Canada nous a dit que nous devions codifier cette situation pour éviter que les preuves dérivées soient utilisées dans les instances en immigration ou en extradition. Or, rien de cela ne se trouve dans le projet de loi.
    Monsieur le ministre, seriez-vous d'accord pour amender le projet de loi afin de respecter les directives émises par la Cour suprême du Canada?
(1610)
    Nous respectons toujours les directives de la Cour suprême du Canada, et bien entendu lorsque la Cour suprême du Canada s'est prononcée sur les articles, ces articles en vigueur deviennent loi dans notre système, comme vous le savez. Je suis très intéressé à toute recommandation et toute opinion que vous avez sur ce sujet en particulier.
    Je présume que vous êtes probablement d'accord avec cet amendement. Si je comprends bien ce que la Cour suprême a dit, il a été demandé que ce soit inscrit dans le projet de loi. Une cour de common law ne peut pas seulement se prononcer sur la question; il faut aussi que ce soit en fait inscrit dans le projet de loi. Si nous le faisions, seriez-vous d'accord?
    Je ne m'en souviens plus. Cela fait quelque temps que j'ai lu cela précisément... Je ne me rappelle pas que la Cour suprême ait dit que cela devait être inscrit dans le projet de loi. Je crois qu'elle s'est prononcée sur la question très clairement. Cela étant dit, j'ai hâte de voir les recommandations ou les suggestions que vous aurez à ce sujet.
    Merci, monsieur le ministre.
    Lundi, nous avons aussi recueilli le témoignage de Paul Copeland, un éminent spécialiste dans le domaine de la sécurité nationale. Il a occupé avec distinction le poste d'avocat spécial dans des causes de certificats de sécurité. Il a un important bagage professionnel, dont le comité a été mis au courant. Voici ce que M. Copeland avait à dire:
... dans tout ce que j'ai lu jusqu'à présent, je n'ai encore vu quelque explication que ce soit qui justifierait que le système judiciaire au Canada soit modifié de façon aussi draconienne.
    Monsieur le ministre, tout le monde s'accorde pour donner aux services de police les outils dont ils ont besoin pour protéger les Canadiens, mais notre problème jusqu'à présent en ce qui concerne le projet de loi est que nous n'avons pas trouvé de preuves concrètes que l'absence de ces pouvoirs extraordinaires entrave le travail des policiers allant même jusqu'à mettre la sécurité des Canadiens en jeu.
    Monsieur le ministre, avez-vous des exemples de dossiers précis et concrets dans lesquels les enquêtes policières ont été contrecarrées en raison de l'absence de ces pouvoirs?
    Vous poserez la question aux représentants de la GRC lorsqu'ils témoigneront, parce qu'ils sont mieux placés que moi pour y répondre. Toutefois, je crois qu'il est important que ces mesures se trouvent dans la loi, et vous pourrez questionner les représentants de la GRC ou les autres témoins qui viendront discuter du sujet devant le comité. De dire qu'il n'y a eu aucun changement ou que rien ne justifie... Nous savons que le monde actuel est différent d'il y a 10 ans et nous devons mettre à jour les mesures.
    Je ne comparais pas très souvent devant votre comité, mais souvent lorsque je comparais devant le comité de la justice, nous ne faisons que moderniser le Code criminel pour suivre le crime organisé et adapter le Code criminel et les lois canadiennes aux réalités du 21e siècle. La donne change très rapidement dans ce domaine. Nous faisons tous face à une menace terroriste; nous devons disposer de mesures dans la loi pour que nos organismes d'application de la loi puissent enquêter sur cette menace.
    Comme vous pouvez le constater, ces dispositions sont de nature préventive, et nous souhaitons qu'elles préviennent les activités terroristes.
    Cependant, elles sont beaucoup plus que simplement de nature préventive. Le projet de loi ajoute un article qui concerne les arrestations à titre préventif qui dit que si l'agent de la paix soupçonne que la mise sous garde immédiate est nécessaire, il peut arrêter la personne sans mandat avant de déposer la dénonciation et avant que la personne ait eu l'occasion de comparaître. Donc, en vertu de cet article, les Canadiens pourraient faire l'objet d'arrestations à titre préventif, pourraient être arrêtés avant même le dépôt de toute preuve ou de toute autre information contre eux ou avant même d'avoir eu l'occasion de comparaître devant un juge, et ce, pendant une période pouvant aller jusqu'à 72 heures. Avant une telle mesure radicale...
    Je crois que c'est 24 heures, mais...
    Oui, c'est 24 heures, mais la période peut être prolongée.
    Avant que nous fassions preuve d'une ingérence grave dans les droits constitutionnels historiques des Canadiens, je crois que nous avons l'obligation de nous assurer que le Code criminel actuel ne convient pas à ces situations.
    Je vous pose de nouveau la question. Avez-vous des preuves qui démontrent que le Code criminel, dans son état actuel, est insuffisant pour s'occuper de cette question?
    Vous entendrez les représentants des organismes d'application de la loi, et je suis certain que des membres de la GRC témoigneront et qu'ils vous diront qu'ils aimeraient avoir le pouvoir de prévenir ou de contrecarrer les possibles actes terroristes au Canada. Dans nos échanges, ils me disent qu'ils doivent agir très rapidement lorsqu'ils découvrent des preuves ou lorsqu'un renseignement leur parvient.
    Encore une fois, je reviens à ce que je vous ai dit plus tôt. Les dispositions dans le Code criminel ne sont tout simplement pas suffisantes; nous devons aller de l'avant. Nous devons avoir des mesures inscrites dans les lois — comme c'était le cas pendant une bonne partie de la décennie à cet égard — pour que si et lorsque la GRC ou les autres organismes d'application de la loi rencontrent ce genre d'activités et veulent contrecarrer ou prévenir les actes terroristes ou obtenir des renseignements sur les possibles actes terroristes... Les mesures doivent être à leur disposition dans les lois.
    En même temps, je comprends ce que vous me dites par rapport aux garanties. En réponse à Mme Mourani, j'avais commencé à dresser la liste des différentes garanties se trouvant dans le projet de loi. Selon moi, c'est assez impressionnant. Dans le cadre de votre étude, je recommande toutes les mesures de protection comprises dans le projet de loi, parce qu'il est important d'avoir ces mesures. En même temps, nous devons nous assurer de protéger les droits des Canadiens qui pourraient être visés par ces mesures. Je suis certain que cet équilibre est atteint avec ce projet de loi.
    Merci de vos commentaires.
(1615)
    Veuillez résumer vos pensées très brièvement, monsieur Davies.
    Monsieur le ministre, mon point est le suivant: je crois qu'il y a un autre moyen de protéger les Canadiens tout en continuant de respecter leur droit constitutionnel de ne pas être arrêtés et détenus par les services de police avant même d'avoir eu l'occasion de comparaître.
    Selon moi, nous y arrivons dans ce projet de loi...
    Eh bien, le projet de loi accorde ce pouvoir aux policiers.
    ... mais si les policiers ont vent d'un acte terroriste et qu'ils croient que l'acte est sur le point d'être commis, nous voulons prendre des mesures à cet égard pour protéger les Canadiens.
    Ne croyez-vous pas que les policiers peuvent y arriver tout en respectant la Charte et la Constitution?
    Je crois que des garanties d'ordre constitutionnel sont incluses dans ce projet de loi et je vous demanderais d'examiner cela. Cependant, l'agent de la paix qui découvre un acte terroriste ou qui obtient des renseignements sur un acte terroriste qui serait sur le point d'être commis doit avoir accès à des mesures pour protéger les Canadiens. En même temps, cette personne doit faire l'objet de garanties, et je crois que nous sommes arrivés à trouver le juste équilibre dans ce projet de loi.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Passons rapidement à M. MacKenzie, puis ce sera le tour de M. Lobb.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Je partagerai mon temps avec M. Lobb.
    Monsieur le ministre, j'ai écouté l'attaque du Parti libéral au sujet de la surveillance. Selon mes souvenirs, tous les incidents pour lesquels les libéraux exigent des excuses ou de la surveillance se sont déroulés au cours du mandat du gouvernement précédent.
    Je sais. C'est vrai.
    Il me semble que les Canadiens devraient se demander pour quelle raison le parti qui était au pouvoir, s'il exige des excuses, ne s'excuse pas. À l'heure actuelle, il y a un empressement à corriger un problème qui est survenu alors que les libéraux étaient au pouvoir, et je me demande...
    Monsieur MacKenzie, vous soulevez un très bon point. C'est deux dispositions... J'aimerais prendre le crédit au nom du présent gouvernement pour le durcissement des mesures législatives en matière de criminalité — tout ce que nous avons fait pour protéger les victimes et les Canadiens respectueux des lois —, mais ces dispositions ont en fait été adoptées par le précédent gouvernement en 2001 en réponse à la crise mondiale suscitée par les attentats du 11 septembre 2001. Comme vous le savez, des dispositions de caducité ont été ajoutées dans la loi, mais cela a été accompli par le précédent gouvernement.
    Nous les avons modifiées; nous avons ajouté des garanties et de la surveillance. Je ne m'en excuserai pas. Toutefois, le gouvernement a décidé que ces dispositions — les engagements assortis de conditions et les audiences d'investigation — étaient nécessaires il y a environ 10 ans; le gouvernement a décidé que les policiers avaient besoin de ces dispositions.
    Je pense que j'essaye de convaincre les personnes qui ont promulgué ces dispositions. Nous allons de surprise en surprise dans ce dossier, mais c'est l'origine de ces dispositions. J'aimerais prendre le crédit pour tout ce qui est accompli et laisser le gouvernement prendre tout le crédit pour la modernisation de nos lois qui visent à aider les victimes, mais ces deux dispositions ont en fait été rédigées par le précédent gouvernement — bien que nous y ayons ajouté des garanties et que nous ayons mis en place une surveillance, et je répète que je ne présenterai pas d'excuses à cet égard.
    Merci, monsieur le ministre. Je cède la parole à M. Lobb.
    Monsieur Lobb, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Pour être honnête, la Chambre des communes — votre comité — a recommandé que nous le fassions. C'est un peu délicat de dire que votre comité a recommandé que nous les ajoutions. Ces mesures ont été rédigées par le gouvernement précédent en comité, qui les a jugées nécessaires pour combattre le terrorisme. Encore une fois, cela étant dit, cela ne me dérange pas de comparaître ici pour les défendre. Certains députés ont changé d'idées ou ont oublié l'origine de ces mesures.
    Cela ne me dérange pas de le faire, monsieur MacKenzie, mais ce sont les faits.
    Monsieur Lobb.
    L'objectif des audiences d'investigation est bien entendu de permettre la cueillette de renseignements au sujet d'une possible infraction terroriste. Nous avons entendu quelques députés de l'opposition parler aujourd'hui d'équilibre ou de possibles risques de violations des droits de la personne. Ce projet de loi dispose d'un certain nombre de garanties au sujet des droits de la personne, et il serait peut-être important de les rassurer et de rassurer les Canadiens en leur expliquant de quelle manière le projet de loi permettra de trouver l'équilibre entre une société sécuritaire et la protection des droits individuels.
    Monsieur Lobb, je vous en remercie beaucoup et je vous remercie de votre intérêt et de votre dévouement à protéger les Canadiens et à défendre les victimes au Canada. Je vous l'ai déjà dit auparavant. Disons-le carrément; je vous en suis très reconnaissant.
    Vous soulevez un très bon point, à savoir que des garanties sont intégrées tout au long du processus. J'ai mentionné à Mme Mourani et à d'autres que le consentement préalable du procureur général du Canada ou des provinces et le fait que les tribunaux exercent une surveillance sont très importants et font partie intégrante de ce que nous essayons d'accomplir. Comme je leur ai dit, les différents milieux coopèrent entre eux: les organismes d'application de la loi, les tribunaux et même le monde politique s'occupent de la surveillance. Je ne crois pas que nous pouvons demander mieux.
    Quand vous étudierez le projet de loi, je vous demanderais d'examiner ce que les autres — j'ai parlé des grandes démocraties... Je suis conscient que le Bloc a été assez critique des moyens pris par les Américains, mais vous pouvez regarder ailleurs qu'aux États-Unis. Penchez-vous sur ce que le Royaume-Uni a fait.
    Je crois que le Royaume-Uni a un régime beaucoup plus sévère en place. Encore une fois, lorsque nous examinons notre droit pénal, une grande partie est fondée sur le modèle britannique, mais si vous jetez un coup d'oeil sur la manière dont la Grande-Bretagne traite de la question, les Britanniques ont une bonne longueur d'avance sur nous, et je ne vous parle même pas de ce qui se déroule dans le vieux continent.
    En ce qui concerne la position du Canada, selon moi, vous verrez en comparant le Canada que... Même ceux qui n'aiment pas les États-Unis ou la manière dont ils agissent — je ne tiens pas à en parler... Je ne lancerai pas le débat; je vous dis seulement d'examiner les autres grandes démocraties dans le monde, et je crois que vous serez assez impressionnés. Vous direz que c'est vrai que le Canada adopte une approche très équilibrée et très raisonnable pour faire face à un problème qui nous concerne tous, et j'ai nommé le terrorisme.
    Les pays qui sont victimes d'actes terroristes, qui sont visés par les groupes terroristes... Je crois que vous devriez étudier ce que ces pays font, et je suis assez certain que tous les députés en viendront à la conclusion que, conformément à leur précédente recommandation d'aller de l'avant avec ces mesures, ces dispositions forment une approche raisonnable et équilibrée.
(1620)
    J'ai une autre petite question, si vous me le permettez.
    Lors de notre dernière réunion, nous avons entendu certains témoins qui étaient très inquiets ou qui réclamaient une modification qui vise uniquement les infractions imminentes liées au terrorisme. Selon moi, une telle demande manque de logique; je ne suis pas d'accord avec eux à ce sujet.
    Je me demandais si vous pourriez nous donner un peu plus de précisions sur la question.
    Ces questions ne devraient pas être examinées séparément. Ce n'est pas seulement l'activité terroriste imminente — cela en fait partie — qui peut être visée, mais une connaissance des activités terroristes antérieures peut s'avérer d'une grande aide pour prévenir et intercepter de nouvelles tentatives terroristes.
    C'est tout ce que nous disons. Nous préconisons une approche globale. Nous ne pouvons pas dire qu'il s'agit d'une activité terroriste qui s'est produite la veille et que nous ne pouvons pas nous en mêler. Non, nous reconnaissons que... J'ai mentionné le Royaume-Uni et ses activités. L'information recueillie au sujet d'un attentat à la bombe qui a eu lieu dans le métro la veille pourrait aider à prévoir ou à empêcher les prochaines activités terroristes. C'est la même chose pour nous, c'est-à-dire que les informations reliées aux activités terroristes qui se sont produites dans le passé peuvent nous être utiles.
    Je pense donc qu'on doit aborder le sujet dans sa globalité, et c'est ce que ce projet de loi fait, monsieur.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant redonner la parole à l'opposition.
    C'est au tour de M. Kania, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur le ministre.
    Si je peux me permettre de faire un retour sur ce que M. MacKenzie a mentionné, il semble que le juge O'Connor ait émis ses recommandations pendant que les conservateurs étaient au pouvoir. Est-ce exact?
    Oui.
    Le gouvernement conservateur a promis de mettre en œuvre toutes ces recommandations. Est-ce exact?
    Le gouvernement conservateur les a toutes étudiées, comme il le fait avec toutes ces recommandations. Encore une fois, dans l'exemple que j'ai donné...
    Je demande seulement si vous aviez fait cette promesse.
    Le comité a recommandé que nous produisions ces dispositions. C'est ce que nous faisons.
    Mais de là à dire que nous avons promis de mettre en oeuvre toutes les recommandations de quelque rapport que ce soit... Nous les étudions attentivement, nous donnons notre accord de principe, et nous agissons en conformité.
    Ma question est de savoir si les conservateurs ont promis de mettre en oeuvre toutes les recommandations du juge O'Connor, oui ou non.
    Nous avons laissé savoir que nous produirions un plan d'action qui aborderait toutes les questions soulevées, et c'est ce que nous avons fait.
    Et cela répond à la recommandation faite il y a environ cinq ans. Est-ce exact?
(1625)
    Le plan d'action concerne des recommandations faites dans plusieurs domaines, comme je l'ai dit plus tôt, je pense, lorsque j'ai répondu à M. Holland — j'ai cité des passages du plan d'action —, ce qui devrait vous rassurer dans une certaine mesure.
    À ce jour, les recommandations n'ont toujours pas été mises en oeuvre. Est-ce exact?
    Je suis ici pour témoigner au sujet des deux dispositions qui ont expiré et que nous voulons rétablir.
    Si vous voulez vous engager dans une longue discussion au sujet du maintien de l'ordre et de la sécurité publique et de toutes les différentes recommandations, je me référerai aux méga-procès, si vous voulez, et comment cette recommandation nous a été présentée de façon constante. Mais je vous demande de vous concentrer sur ces dispositions en particulier, qui ont reçu, je le crois, un appui général, et qui ont été recommandées par votre comité et par un ancien gouvernement libéral. Je vous demande de les mettre en oeuvre et d'aller de l'avant.
    Merci, monsieur le ministre. Je vais orienter mes questions sur ce sujet lorsque vous nous aurez, s'il vous plaît, montré un peu de respect et répondu à une simple question que j'ai posée, ce qui devrait vous prendre environ cinq secondes. La question est de savoir si ces recommandations ont été mises en oeuvre.
    Et elles ne l'ont pas été. Ne pouvez-vous pas seulement reconnaître que les recommandations du juge O'Connor n'ont pas encore été mises en oeuvre? Est-ce si difficile?
    Encore une fois, rien n'est jamais achevé, si c'est ce que vous tentez d'insinuer. Mais je peux vous dire que nous avons mis les choses en marche et que nous allons continuer d'avancer dans tous les domaines. Un des sujets sur lesquels nous travaillons concerne la présente mesure législative, mais je ne peux pas dire que la question a été réglée, car vous devez d'abord l'adopter pour que nous puissions ensuite régler la question.
    J'aimerais parler de toutes ces recommandations comme si elles avaient déjà été adoptées, mais vous savez à quel point il est difficile d'amorcer un changement, quel qu'il soit. Mais je souhaite certainement que nous aurons plus de chance avec celui-là.
    Une fois de plus, est-ce que les recommandations du juge O'Connor ont été mises en oeuvre, oui ou non?
    Eh bien, comme je l'ai dit, nous travaillons à mettre en oeuvre les recommandations provenant de ce rapport et d'autres rapports, notamment celui du juge Major. Cela fait partie de notre plan d'action.
    Mais ce n'est pas terminé. Comme je le dis, c'est important... Je ne peux pas en parler au passé et dire que nous l'avons fait, que nous avons adopté ces dispositions antiterrorisme. Je dois toujours être prudent et dire que je les ai déposées au Parlement, et que nous les examinons. Lorsque ces dispositions recevront la sanction royale — bientôt, je l'espère —, je serai alors en mesure d'en parler au passé, et de dire que ces dispositions ont été adoptées.
    Je vais considérer cette réponse comme une façon très élaborée de dire que j'ai raison et qu'elles n'ont pas encore été mises en oeuvre.
    Je vais maintenant passer au projet de loi.
    À propos de la disposition de temporisation, cette mesure législative n'a pas été en vigueur depuis février 2007. Est-ce exact?
    C'est exact. On y a mis fin.
    D'accord.
    Je veux que tout soit bien clair. Je suis en faveur de tout ce qui est raisonnable pour protéger les Canadiens, alors je ne suis pas contre ce projet.
    C'est bien.
    Mais je veux qu'on me fournisse une analyse raisonnée et logique, et non des prises de position ou de la rhétorique.
    Je suppose que oui.
    Depuis février 2007, à quel point le fait de ne pas avoir adopté ces dispositions a-t-il causé des souffrances ou porté préjudice aux Canadiens ou au Canada? Il s'est écoulé plusieurs années, alors veuillez nous en parler.
    Il faudrait poser la question à la GRC et aux organismes d'application de la loi qui enquêtent à ce sujet. Ils me disent souvent que s'ils n'ont pas les outils nécessaires pour enquêter sur un certain type d'activité, ce sont les Canadiens qui en subissent les conséquences.
    Si vous me demandez si nous avons été exposés à des activités liées au terrorisme et que ces outils auraient pu... Je veux que nous ayons ces outils pour contrer les activités liées au terrorisme à venir, et je veux qu'ils soient disponibles. Si le Canada était victime d'une activité liée au terrorisme, il serait trop tard si nous entendions les organismes d'application de la loi se plaindre qu'ils voudraient bien avoir ces outils et qu'ils souhaiteraient être en mesure de mettre fin à l'activité en question. J'imagine que vous et vos collègues pourriez être parmi les premiers à nous critiquer et à nous demander pourquoi les conservateurs n'ont pas adopté ces dispositions.
    C'est donc ce que nous faisons aujourd'hui avec ces dispositions. Ces organismes sont les mieux placés pour répondre à la question. Mais d'après ce que j'entends de leur part et de la part de mes collègues lorsque nous en discutons, c'est qu'ils appuient fortement le projet.
    Je suis d'accord avec la recommandation de votre comité selon laquelle ces outils sont importants, et que nous devons les adopter. J'en suis conscient.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Il nous reste environ deux minutes, car le ministre doit nous quitter à 16 h 30.
    Monsieur MacKenzie.
    Merci encore, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je pense qu'on revient toujours à l'idée qu'une grande partie du sujet est lié aux attaques du 11 septembre, mais par ailleurs, la radicalisation et le terrorisme intérieur ont beaucoup changé depuis 2001.
    Cela ne fait aucun doute.
    En fait, la société de notre propre pays est différente. Ce sont les types d'outils qui sont élaborés... et je pense que vous avez parlé de l'avenir.
    Oui. Vous avez soulevé un point très pertinent.
    Il arrive très souvent, au cours de discussions, que les attaques du 11 septembre soient mentionnées. Mais vous avez bien raison, monsieur MacKenzie. Le récent rapport sur Air India a souligné que notre pays était visé par des activités liées au terrorisme, des activités d'envergure en fait, et ce, des années avant le 11 septembre 2001. Et je répète que pour y faire face, nous devons disposer d'outils comme ceux que vous avez devant vous.
    Comme je l'ai dit, ce n'est pas seulement le gouvernement ou moi-même ou le premier ministre qui le croyons. L'approbation de ces outils reçoit un appui généralisé. Le gouvernement précédent savait et comprenait que nous devions disposer de ces outils, c'est pourquoi il en a fait un projet de loi. Les organismes d'application de la loi leur donnent leur appui. Nous avons obtenu l'approbation judiciaire pour une partie des propositions que nous avons présentées.
    J'espère bien, et je ne suis pas le seul, que nous n'aurons pas à nous en servir. Malgré tout, nous vivons dans un monde menacé par les activités liées au terrorisme, car aucun pays n'en est à l'abri. Il faut donc se doter des lois appropriées.
    J'ai demandé aux gens qui se penchaient sur la question de vérifier ce que d'autres démocraties avaient mis en place, pour qu'ils puissent confirmer que l'approche canadienne est très raisonnable. Ces précautions sont très importantes et raisonnables, et c'est exactement le genre de mesure législative que nous devons adopter au Canada pour protéger les citoyens.
(1630)
    Merci beaucoup.
    Je veux remercier le ministre d'être venu aujourd'hui.
    Nous allons certainement de l'avant. Nous étudions un bon nombre de projets de loi. Nous espérons pouvoir faire notre rapport sur certains d'entre eux bientôt, après le congé des Fêtes.
    Nous vous remercions de votre présence et de votre témoignage et nous vous remercions aussi de permettre aux représentants de rester avec nous durant la prochaine heure. Nous avons hâte de les entendre, s'il y avait d'autres questions...
    Les représentants viennent juste de me remercier. C'est très bien, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous allons suspendre la réunion quelques instants pour permettre au ministre de partir et nous allons ensuite continuer.

    Le président: Nous reprenons nos travaux là où nous les avons laissés. Je pense que nous ne referons pas un premier, deuxième et troisième tours, mais que nous allons juste continuer, si vous êtes d'accord.
    M. MacKenzie venait de terminer, donc ce sera au tour de M. Rathgeber, et nous allons ensuite passer au second tour.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les représentants du ministère de la Justice d'être présents aujourd'hui et de votre avis d'experts sur le sujet, alors que nous tentons de trouver un équilibre entre les libertés civiles des Canadiens et notre intérêt sincère à protéger le pays contre le terrorisme.
    Lors de notre dernière réunion, nous avons parlé des dispositions actuelles du Code criminel. Je sais que mes collègues de l'autre côté de la table croient que les articles 810 et 495 du Code criminel protègent adéquatement les Canadiens contre les attaques terroristes, qu'elles viennent de l'intérieur ou de l'étranger. Je suis sceptique à ce sujet.
    Je me demandais si quelqu'un parmi vous pouvait nous aider à comprendre en quoi l'article 810 du Code criminel est inadéquat et pourquoi nous avons besoin des dispositions qui figurent dans le projet de loi C-17. Si vous ne le savez pas déjà, l'article 810 stipule que si une personne a des motifs raisonnables de craindre qu'une autre personne intimidera une personne associée au système judiciaire ou commettra une infraction d’organisation criminelle, elle peut demander à un juge d'obtenir un engagement.
(1635)
    Selon la loi en vigueur, l'article 495, qui autorise un agent de la paix à arrêter une personne qui est « sur le point de commettre » une infraction, stipule que l'agent en question doit avoir des motifs raisonnables de croire deux choses: premièrement, qu'une infraction sera commise, donc qu'une infraction est « sur le point » d'être commise; deuxièmement, que la personne qui sera arrêtée est bien la personne qui est sur le point de commettre l'infraction. C'est un critère élevé: il doit exister des motifs raisonnables de croire les deux critères ou faits, c'est-à-dire que l'infraction sera commise et que la personne arrêtée est potentiellement celle qui la commettra.
    Selon les dispositions concernant l'engagement de ne pas troubler l'ordre public, le critère, encore une fois, est la crainte raisonnable qu'une personne commettra un acte terroriste ou une autre infraction à l'article 810, c'est-à-dire une infraction d'ordre sexuel ou une infraction d’organisation criminelle. Encore une fois, il existe des motifs raisonnables de craindre ou de croire que la personne commettra l'acte en question.
    Selon le projet de loi...
    Juste pour clarifier les choses, l'article 810 concerne l'engagement de ne pas troubler l'ordre public, n'est-ce pas?
    Oui, l'article 810 concerne l'engagement de ne pas troubler l'ordre public. L'article 495 concerne la disposition en vigueur qui confère les pouvoirs relatifs aux arrestations sans mandat par un agent de la paix.
    Merci.
    Continuez, s'il vous plaît.
    Selon le projet de loi, le critère concernant l'arrestation préventive en vue de conduire la personne devant un juge est que l'agent de la paix doit avoir « des motifs raisonnables » de croire — encore une fois —, « qu'une activité terroriste sera entreprise ». La différence avec la loi actuellement en vigueur, c'est qu'il pourrait ne pas exister de motifs raisonnables de croire que la personne est bien celle qui va commettre l'infraction. C'est pourquoi cela comble un vide.
    En ce qui a trait à la deuxième étape, le projet de loi stipule que l'agent de la paix doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner que l'arrestation de la personne va « empêcher » la réalisation de l’activité. Cela ne veut pas dire que la personne qui est arrêtée est la personne qui commettra l'infraction, mais qu'elle peut faire partie des personnes en cause.
    Par exemple, on a déjà demandé dans quelles circonstances cette disposition s'appliquerait. On peut imaginer une situation où se tiendrait une manifestation au cours de laquelle la police a des motifs raisonnables de croire qu'une bombe explosera — pas par l'action des participants à la manifestation, mais par celle d'autres personnes — et que ces personnes ne sont pas connues. La police a été informée que cela arriverait, mais elle soupçonne aussi un certain nombre de personnes qui ont causé de l'agitation et qui ont fait des déclarations, et elle pourrait avoir des motifs raisonnables de croire que ces personnes sont en possession de renseignements et qu'elles ont aidé d'autres personnes. Les conduire devant un juge remplit deux fonctions: premièrement, les personnes sont maintenant sous l'autorité judiciaire du juge et deuxièmement, les autres sont averties que la police est au courant d'une conspiration ou d'un attentat probable. C'est une façon de démontrer publiquement que la police est au courant que quelque chose est sur le point de se produire.
     Merci, monsieur Rathgeber.
    M. Brent Rathgeber: Merci.
    Le président: Nous allons redonner la parole à Mme Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Piragoff, je voudrais continuer à parler de ce que vous disiez. On pourrait donc faire témoigner des gens devant un juge, mais ces gens seront-ils protégés? Supposons qu'il s'agisse de gens qui ne participent pas à un complot, mais qui peuvent être témoins de propos liés à un complot terroriste, par exemple. Y a-t-il des mesures qui protégeront ces gens s'ils parlent de ces fameux terroristes devant le juge?

[Traduction]

    Merci. La raison pour laquelle la personne est conduite devant le juge est pour permettre au juge de décider si elle devrait être libérée avec ou sans conditions. Contrairement à ce qui se passe dans certains pays, dans lesquels l'arrestation mène à la détention, le projet de loi est axé sur la libération de la personne. Comme le dit M. Forcese, on pêche pour remettre à l'eau. Le but visé est la libération assortie de conditions, et non la détention. On cherche vraiment à empêcher les activités préparatoires.
    Quant aux mesures de protection, une fois qu'une personne est détenue, toutes les protections établies par la charte ou par le Code criminel s'appliquent à cette personne, puisqu'elle est une personne détenue. Elle a donc le droit de faire appel à un avocat et de garder le silence. Toutes les protections établies par la charte s'appliquent, car elle est une personne détenue.
(1640)

[Français]

    Est-il accusé?
    Non, il n'est pas accusé.
    Je vous donne un exemple. Lors de notre tournée pour le Service correctionnel du Canada relativement à la santé mentale, nous sommes allés à la prison de Whitemoor en Angleterre. Il s'agissait d'une prison à sécurité maximale, très surveillée. Si je me souviens bien, 60 p. 100 à 70 p. 100 de la population carcérale était musulmane. Il s'agissait, supposément, de terroristes.
    Est-ce qu'on se dirige vers une augmentation de la population carcérale? Va-t-on créer des prisons par mesure de prévention, avec ce genre de projet de loi? J'étais tellement étonnée de voir cela en Angleterre. D'ailleurs, le ministre parlait, tout à l'heure, de mesures plus sévères en Angleterre.

[Traduction]

    Je pense que ce dont le ministre parlait par rapport au Royaume-Uni, c'est que là-bas, la loi permet d'arrêter une personne et de la retenir en détention provisoire pendant 28 jours sans que des accusations soient portées. De notre côté, en vertu de notre loi, une personne arrêtée peut être détenue pendant un maximum de 24 heures avant d'être conduite devant un juge, après quoi la police doit porter des accusations. Le présent projet de loi est fondé sur les mêmes types de mesures de protection employées pour les personnes accusées d'une infraction. Elles doivent donc être conduites devant un juge dans un délai de 24 heures. Lorsqu'il y a infraction, le juge doit décider si l'accusé devrait être mis en liberté ou libéré sous caution. Selon la disposition, le juge doit relâcher la personne; on présume donc qu'il y aura mise en liberté, à moins que la police et la Couronne convainquent le juge d'imposer des conditions. Ainsi, selon le projet de loi, il est impossible de détenir une personne, à moins qu'elle refuse de se soumettre aux conditions.

[Français]

    Une chose me préoccupe. Si ma mémoire est bonne, nous avons reçu des gens, lundi dernier, qui nous ont presque tous dit — sauf une personne, alors qu'il y avait des avocats — que cette loi n'avait pas servi. Pourtant, elle existait depuis ce qui s'est passé aux États-Unis en 2001. Le Code criminel est tout à fait adéquat pour faire tout ce que vous dites, que ce soit pour envoyer quelqu'un devant un juge, avoir un mandat ou faire témoigner quelqu'un. On peut le faire avec le Code criminel, actuellement, mais on ne peut pas le faire d'une manière préventive, parce qu'il faut pouvoir accuser les gens.
    Si la police a un bon service de renseignement, pourquoi ne pourrait-elle pas utiliser le Code criminel pour accuser les gens de complot? Pourquoi ne pas travailler avec le Code criminel? Cette loi n'a jamais été utilisée. La seule fois où elle a été utilisée pour une enquête, il semblerait que cela a plutôt été invalidé. Je ne comprends pas pourquoi on renouvellerait cette affaire.

[Traduction]

    En vertu de la loi actuelle, il est impossible d'obliger un témoin à fournir des preuves; de plus, les audiences d'investigation et les pouvoirs relatifs à l'arrestation à titre préventif sont séparés. En outre, selon la loi existante, les gens ne sont pas obligés de répondre aux questions posées par la police ou par tout représentant de l'autorité. Tout le monde a le droit de fermer la porte et de déclarer: « Je ne veux pas répondre aux questions. »
    D'autres pays ont un grand jury. Par exemple, aux États-Unis, on peut obliger les témoins — je ne parle pas des accusés, mais bien des témoins — à témoigner devant un juge et un grand jury avant que des accusations soient portées. Au Canada, on peut seulement obliger les témoins à comparaître devant le tribunal une fois que des accusations ont été portées contre quelqu'un. Un témoin peut seulement être obligé à se présenter lorsqu'il y a enquête préliminaire ou procès. La mesure permettrait au Canada de...
(1645)

[Français]

    Si c'est si important, pourquoi cela n'a-t-il jamais été utilisé?

[Traduction]

    Soyez très bref, s'il vous plaît.
    On pourrait s'en servir pour obtenir des renseignements de témoins possibles qui seraient peut-être réticents à les fournir volontairement à la police ou aux autorités ou qui auraient peut-être peur de les donner, mais qui seraient prêts à le faire s'ils y étaient obligés.

[Français]

    Je vous ai posé une question: pourquoi ne pas avoir utilisé ces pouvoirs, si c'est si important? Monsieur m'a expliqué à nouveau toute la procédure. Ma question est simple: pourquoi ne les a-t-on jamais utilisés, si c'est si important?

[Traduction]

    Merci, madame Mourani.

[Français]

    Puis-je obtenir une réponse?

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. Norlock.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je commence toujours par expliquer aux gens à la maison ce que nous faisons et pourquoi. Puisque j'ai siégé au sous-comité de l'antiterrorisme après que la disposition de temporarisation soit entrée en vigueur et que notre gouvernement ait pris le pouvoir, je peux vous dire, pour ceux qui l'ignorent, que notre loi antiterroriste découle directement d'une résolution des Nations Unies. Je crois qu'il s'agissait de la résolution 1373, adoptée en 2001 en réaction à l'acte terroriste du 11 septembre, auquel le monde entier a réagi.
    La résolution exigeait que les pays membres prennent certaines mesures dans un délai de 90 jours dans le but de prévenir le financement du terrorisme, de protéger leurs citoyens, de sécuriser leurs frontières contre les terroristes, etc. C'est pour cette raison que le Parlement a adopté par la suite la Loi antiterroriste sous le gouvernement précédent.
    Ma question se rapporte à la réglementation concernée. Des dispositions de la Loi antiterroriste conféraient des pouvoirs auxquels on n'avait jamais eu recours auparavant ou même qu'on n'avait jamais envisagés, des pouvoirs qui, selon certains, contrevenaient à la Charte canadienne des droits et libertés. Par la suite, la Cour suprême a déclaré — je crois que c'était avant 2007 — que la partie en question devait être améliorée, et elle a imposé un délai au gouvernement.
    En raison de ce délai — corrigez-moi si j'ai tort, et certains détails devront peut-être être repris —, si vous êtes ici aujourd'hui, c'est parce que le gouvernement du Canada répond aux directives de la Cour suprême pour faire en sorte que la mesure législative dont nous traitons, la Loi antiterroriste, soit conforme à la Charte. Par ailleurs, la Cour suprême a mentionné — sentez-vous libre d'en dire plus à ce sujet — que bien que la mesure législative contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés, on la tolère jusqu'à un certain point en raison de l'histoire et de la nature du terrorisme.
    Elle contient des dispositions et des mesures de protection, et le ministre en a décrites quelques-unes. Ce que j'essaie de dire, c'est que les dispositions proposées ont été rédigées dans le respect de la Charte des droits et libertés.
    Pourriez-vous nous parler encore une fois des mécanismes qui ont été mis en place pour faire en sorte qu'une personne qui a été détenue ou qui pourrait être assujettie à un engagement assorti de conditions ou à des audiences d'investigation jouit de protections qui ont été intégrées à la loi pour donner suite à la déclaration de la Cour suprême?
    Merci.
    Permettez-moi de commencer par répondre à la dernière question, celle de Mme Mourani, parce qu'elle mène à la vôtre.
    Est-ce que les dispositions ont déjà été utilisées? Oui, l'une d'entre elles a servi, celle qui porte sur les audiences d'investigation. On y a eu recours dans le cadre du procès d'Air India; une audience d'investigation a été entreprise. Or, pendant l'audience, on a contesté la constitutionnalité de la disposition. La question s'est rendue jusqu'à la Cour suprême du Canada, qui a statué que les dispositions à cet effet étaient bien constitutionnelles.
    Je crois que l'affaire dont vous parliez portait sur les attestations de sécurité. C'est la Cour suprême qui a déclaré, à ce sujet, que la loi était inconstitutionnelle, mais elle a accordé du temps au Parlement.
    Par ailleurs, la Cour suprême a aussi décidé que la disposition du projet de loi relative aux audiences d'investigation est constitutionnelle. Elle a formulé des suggestions — comme M. Davies l'a souligné, je crois — au sujet de l'interprétation, et ces suggestions ont force de loi. Elles pourraient être codifiées, mais qu'elles le soient ou non, elles ont force de loi.
    En ce qui concerne les mesures de protection, le ministre en a nommé quelques-unes.
    Parmi celles qui précèdent le recours aux pouvoirs, mentionnons d'abord le contrôle politique: l'exigence relative au consentement du procureur général du Canada ou d'une province. Ces pouvoirs sont assujettis au contrôle judiciaire; ils nécessitent le consentement d'un juge, soit avant ou après qu'ils aient été exercés. En outre, ils sont tous visés par une disposition de temporarisation.
    De plus, ils devront faire l'objet d'un examen qui sera entrepris par un comité de la Chambre des communes ou du Sénat à n'importe quel moment pendant la période de cinq ans. Le ministre a aussi souligné qu'un rapport portant sur l'exercice de ces pouvoirs devait être remis au Parlement chaque année, et puisque le rapport est soumis au Parlement, n'importe quel comité parlementaire pourrait ensuite enquêter sur un ministre au sujet de l'utilisation de ces pouvoirs.
    Ce sont donc là les mesures de protection judiciaires et relatives à la reddition de comptes.
(1650)
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Norlock.
    Je vais modifier le programme un peu, parce que je pense que nous avons été injustes envers M. Davies et le NPD.
    Bien sûr, je serai toujours là pour protéger votre droit à une question, monsieur Davies; continuez.
    Merci, monsieur le président. Dans ce cas, nous sommes entre bonnes mains.
    Moi aussi, je veux expliquer un peu notre position à la population canadienne. Je pense qu'il est évident pour tout le monde qui examine le projet de loi qu'on y propose d'apporter deux modifications importantes au système judiciaire que les Canadiens connaissent aujourd'hui, à savoir, premièrement, le droit de ne pas être obligé à fournir de preuves, qui pourraient ensuite être utilisées contre la personne, et deuxièmement, le droit de ne pas être détenu par l'État pendant ce qui, dans ce cas-ci, comme je vais vous le montrer, pourrait être au moins quatre jours, puis d'être relâché sans qu'il y ait arrestation ou accusation.
    Je vais traiter de ce dernier point d'abord.
    Monsieur Piragoff, je crois que vous avez dit à plusieurs reprises qu'une personne devait être conduite devant un juge de la cour provinciale dans un délai de 24 heures, ce qui, à mon avis, est faux, monsieur. En fait, la mesure législative stipule qu'une personne doit être conduite devant un juge de la cour provinciale dans un délai de 24 heures ou le plus tôt possible après ce délai si un juge de la cour provinciale n'est pas disponible.
    Ma première question est donc la suivante: n'est-il pas possible, monsieur, qu'une personne soit conduite devant un juge de la cour provinciale après plus de 24 heures? C'est possible, n'est-ce pas?
    La disposition reflète la loi actuelle concernant l'arrestation.
    Je ne vous ai pas demandé si elle la reflétait. Je vous ai demandé de préciser. Je veux que ce soit clair. Vous avez dit 24 heures.
    Un instant. Oui, mais...
    Cela pourrait prendre plus de 24 heures, n'est-ce pas?
    Si vous ne trouvez pas de juge parce que vous êtes en Arctique, il y a une disposition à cet effet.
    Exact. Donc, vous pourriez être arrêté et détenu...
    Ce pourrait être pour 25 ou 30 heures, parce qu'il n'y a pas de juge...
    D'accord. Restons-en là. Vous pourriez être détenu.
    ... mais c'est dans la loi existante. Ce n'est pas nouveau. Ce n'est pas la nouvelle loi. Vous avez dit...
    Monsieur, je ne cherche pas à savoir si c'est nouveau; j'essaie de déterminer la période de temps.
    Vous avez dit dans les 24 heures. Ce pourrait être plus long, n'est-ce pas?
    En vertu de la loi actuelle.
    Très bien. Je vois où vous voulez en venir; trois fois plutôt qu'une.
    Deuxièmement, la disposition dit que le juge décide alors si la personne doit être mise en liberté ou si sa détention doit se prolonger, et que la comparution peut être ajournée pour 48 heures de plus. Est-ce exact?
    En vertu de la loi actuelle.
    D'accord. Donc, actuellement, une personne pourrait être arrêtée en vertu de cette loi et être détenue, jusqu'ici, pendant une période de plus de trois jours avant de comparaître devant un juge.
    En vertu de la loi actuelle applicable aux accusations criminelles, une personne doit comparaître devant un juge dans les 24 heures. Parfois, ce n'est pas possible, et la loi prévoit donc une certaine marge de manoeuvre. L'avocat de la Couronne a le droit...
(1655)
    Monsieur, nous pourrons aller plus loin si vous me permettez de vous interrompre.
    Je ne vous demande pas...
    Monsieur le président, puis-je répondre à la question, s'il vous plaît?
    Je vais vous donner plus de temps, monsieur Davies. Permettez-lui simplement de répondre à la question.
    D'accord.
    Merci, monsieur le président.
    En vertu de la loi actuelle, l'avocat de la Couronne peut faire valoir devant le juge que la Couronne a besoin de plus de temps pour le convaincre des raisons qui justifient la détention de la personne. Et le juge a le droit, en vertu de la loi actuelle, du Code criminel, d'ordonner la détention de la personne pour une période allant jusqu'à 72 heures.
    Puis-je alors vous demander, monsieur...
    Le projet de loi s'appuie sur le même genre de protections qui existent par rapport aux personnes qui sont accusées. Donc, les mêmes délais s'appliquent.
    Monsieur Piragoff, je vais vous interrompre parce que vous me faites perdre mon temps. J'ai sept minutes, monsieur.
    Je ne vous ai pas demandé en quoi consiste la loi actuelle. Nous parlons d'un article du projet de loi. Pour répondre à ma question, oui, une personne peut être détenue en vertu de cette mesure législative, le projet de loi C-17, pour plus de trois jours. Votre réponse, monsieur, c'est que nous pouvions le faire de toute façon. Ce n'est pas ce que je vous demande.
    C'est indiqué dans le projet de loi. Ma prochaine question est: si la loi actuelle le permet, en quoi cette disposition est-elle nécessaire, alors?
    La nature de la disposition est qu'en vertu de la loi actuelle, elle s'applique aux arrestations. Je crois avoir répondu plus tôt que dans le cas d'une arrestation, la police doit avoir des motifs raisonnables de croire qu'une infraction sera commise et qu'un individu précis est la personne qui commettra l'infraction.
    Bien qu'il exige que l'agent de police ait des motifs raisonnables de croire qu'une infraction sera commise, le projet de loi prévoit que l'agent de police peut ne pas savoir qui sont les auteurs présumés de l'infraction, mais savoir que certaines personnes sont vraisemblablement impliquées. Si cette personne est conduite devant un juge, cela permettra probablement d'empêcher un acte terroriste d'être commis parce que la personne et les autres personnes non identifiées qui pourraient être impliquées sauront que l'État est au courant de leurs activités.
    Eh bien, en fait, monsieur Piragoff, il existe une différence importante entre les deux... C'est pourquoi ce projet de loi existe. La loi actuelle ne permet pas aux agents de la paix d'arrêter une personne s'ils ne disposent pas de renseignements précis démontrant que cette personne pourrait être impliquée dans l'affaire.
    C'est la grande différence, n'est-ce pas?
    Selon le Code criminel, actuellement, l'agent de la paix doit avoir des motifs raisonnables de croire que la personne qu'il arrête est sur le point de commettre une infraction.
    C'est exact.
    Selon le projet de loi, l'agent de la paix peut arrêter la personne même s'il ne sait pas si elle est impliquée dans l'affaire ou non. Est-ce exact?
    C'est exact.
    En effet. Ce projet de loi permet donc d'arrêter une personne qui n'a rien à voir avec l'affaire.
    Je vous ferai remarquer, monsieur, que cela constitue une atteinte aux droits constitutionnels de la personne.
    Je vais aussi vous le demander.
    Puis-je répondre à la question?
    Je ne vous ai pas encore posé de question.
    Laissez-le finir, et ensuite je vous laisserai...
    Eh bien, je n'ai pas encore posé ma question, alors je veux la poser.
    Supposons qu'une personne soit arrêtée ou détenue pendant trois jours ou trois jours et demi. Si cette personne est remise en liberté — parce que si rien ne se passe en fin de compte, on devra la remettre en liberté — quel recours cette personne a-t-elle après avoir été arrêtée et détenue pendant trois jours et demi, et ensuite arrêtée sans réel motif? Dans une telle situation, quels recours sont à la disposition des Canadiens?
    Merci.
    Monsieur le président, en ce qui a trait à la première question, l'agent de la paix doit avoir des soupçons. Vous ne pouvez pas juste prendre n'importe qui... Le projet de loi spécifie clairement qu'il doit exister un motif raisonnable de soupçonner que l'arrestation de cette personne est nécessaire pour éviter qu'une activité terroriste ne soit entreprise.
    Dans ce cas, quelle est la différence avec la loi criminelle en vigueur, monsieur?
    La loi criminelle en vigueur précise que l'agent de la paix doit avoir des motifs raisonnables de croire que cette personne est bien la personne qui est sur le point de commettre un acte terroriste.
    D'après le projet de loi, qu'est-ce que l'agent de la paix prend en considération à propos de la personne qu'il s'apprête à arrêter?
    Cette disposition pourrait s'appliquer à d'autres qui ne manipulent pas la bombe, mais qui pourraient avoir participé au complot.
    Eh bien, il s'agit d'un complot, donc d'un acte criminel, monsieur. Le complot ne fait-il pas partie des infractions au Code criminel?
    S'il existait des preuves qu'un complot se...
    Monsieur, vous tournez autour du pot, car vous tentez, avec tout le respect que je vous dois, d'arranger la vérité.
    Le projet de loi est nécessaire, car la loi actuelle exige que l'agent de la paix soupçonne une personne d'être sur le point de commettre une infraction. Selon le projet de loi, l'agent de la paix n'a pas à prouver ou à avoir des motifs raisonnables de soupçonner que la personne qui est détenue va commettre une infraction. C'est là où réside la différence principale.
    C'est exact.
    On pourrait donc détenir une personne innocente pendant trois jours et demi sans aucune preuve que cette personne va commettre une infraction. C'est la principale différence dans ce projet de loi.
    Non. Vous avez dit que la personne est tout à fait innocente sans aucune preuve. Le projet de loi indique que l'agent de la paix doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner que l'arrestation de la personne est nécessaire. Il ne s'agit pas d'arrêter n'importe quel passant. Il doit exister des motifs raisonnables de soupçonner que l'arrestation de la personne est nécessaire. L'arrestation doit se fonder sur quelque chose de tangible.
(1700)
    Merci, monsieur Piragoff, et merci, monsieur Davies.
    Nous passons maintenant à Mme Mendes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Piragoff, j'aimerais commencer par faire un constat. Il y a un manque de supervision ou de suivi de près, si on veut, relativement à l'application de cette loi. J'aimerais vous poser une question un peu semblable à celle que vous a posée Mme Mourani tout à l'heure.
    Si ma mémoire est bonne, cette loi n'a été utilisée qu'une fois depuis 2001, avant qu'elle ne soit tombée en désuétude. C'était dans le cas d'Air India, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Exact.

[Français]

    Dans le cas des 18 accusés de Toronto, ça n'a servi absolument à rien. Pourtant, la loi était toujours en vigueur, elle n'était pas encore désuète. Pourquoi a-t-on besoin de ramener cette loi alors que les autorités ont été capables de déjouer un complot et d'éviter un malheur sans même utiliser ce qui était prévu par la loi? La loi existait, il n'y avait pas eu de prorogation. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi il faut la rétablir?

[Traduction]

     Pour ce qui est du cas de Toronto, je pense qu’il ne s’agissait pas seulement d’une situation où la police avait de motifs raisonnables de croire qu’un acte terroriste était planifié et commis, elle avait aussi des indices suffisants pour identifier les suspects. En l’occurrence, plutôt que d’empêcher les événements de se produire en agissant plus tôt et en ayant recours à des pouvoirs comme ceux-ci, les policiers ont choisi de mener une opération d’infiltration. Ils surveillaient des gens qui, selon toute probabilité, seraient les auteurs…
    Mais, convenez-vous, monsieur Piragoff…
    … jusqu’à ce qu’ils recueillent de plus en plus de preuves et qu’ils décident de procéder aux arrestations.
     Oui, mais convenez-vous qu’ils ont empêché l’événement de se produire? Ils l’ont empêché.
    Oui, ils l’ont empêché en procédant aux arrestations.
    Oui. Ils ont été en mesure d’agir avec fermeté et de manière à prévenir un acte terroriste horrible sans avoir recours à ces clauses.
    C’était parce que dans ce cas précis, ils avaient déjà les preuves.
    N’en serait-il pas toujours ainsi, qu’on ait besoin de preuves quelconques?
    Il faut toujours avoir des preuves. C’est une question de savoir si on a assez de preuves pour arrêter une personne et porter des accusations contre elle afin de l’empêcher de mettre son plan à exécution.
    D’accord; mais si vous n’avez pas les preuves, vous ne pourrez pas détenir la personne, peu importe le genre de loi que vous avez.
    C’est exact. C’est ce que j’ai répondu à M. Davies. Il doit y avoir une preuve quelconque. La question est de savoir de quel genre de preuve il s’agit. En vertu de la loi actuelle, vous devez avoir des motifs raisonnables de croire que la personne en question est l’auteur présumé de l’acte, alors que dans le projet de loi…
    Ou commettra probablement le crime, parce que dans le cas des 18 personnes de Toronto, elles n’avaient encore rien fait…
    J’ai parlé d’auteurs « potentiels », tandis qu’en vertu du projet de loi, vous devez avoir des preuves permettant au juge de croire les affirmations de l’agent de police selon lesquelles il existe des motifs de croire que l’arrestation de la personne était nécessaire.
    C’est là le danger que nous voyons dans le projet de loi. Actuellement, les autorités font déjà le travail; le danger, avec le projet de loi, c’est qu’il accorderait aux autorités des pouvoirs injustifiés leur permettant d’aller plus loin. L’ancien directeur du SCRS a déjà dit que ce n’était pas nécessaire. Les forces de l’ordre peuvent faire leur travail — empêcher ces actes de se produire — dans le cadre des lois existantes et des dispositions qui y sont déjà prévues.
    Depuis 2007, combien de fois le Canada a-t-il fait face à une menace? Nous ne le savons pas, ou du moins, le public n’en sait rien, Dieu merci, parce que nos lois permettent aux autorités de faire leur travail. Cela résume la situation. Ce qui nous préoccupe par rapport au projet de loi, c’est que nous n’avons pas vraiment besoin d’aller plus loin que ce que nous avons déjà.
    Me reste-t-il une minute?
    Combien de temps voulez-vous, madame Mendes?
    Une minute, ce serait parfait.
    Je vais vous accorder deux minutes.
    C’est fantastique. Merci beaucoup, monsieur le président. C’est l’esprit de Noël.
    Voulez-vous terminer vos questions?
    Certainement.
    J’ai posé cette question au ministre Nicholson et il n’y a pas répondu; je vais donc vous la poser. Ceci venait à échéance en février 2007; il en a convenu. Entretemps, nous avons eu un certain nombre d’années d’expérience. Ma question consistait à savoir dans quelle mesure le Canada ou les Canadiens ont été touchés par l’absence de telles dispositions. En fonction des scénarios réels sur le terrain, qu’aurions-nous dû avoir que nous n’avions pas?
(1705)
    Il serait préférable de poser cette question à la GRC ou au SCRS. Ils pourraient témoigner au sujet du projet de loi, par rapport aux limites que la loi actuelle leur aurait imposées ou non.
    Le ministre Nicholson a dit quelque chose de semblable. Il a dit qu’il ne pouvait pas poser la question à la GRC, mais c'est lui le ministre de la Justice qui propose de remettre ces dispositions en vigueur. Je penserais que la réponse raisonnable du ministre de la Justice qui veut faire adopter cette loi serait de nous donner des exemples où nous avons subi les conséquences liées au fait que nous n’avons pas ces dispositions, plutôt que de nous dire de poser la question à quelqu’un d’autre.
    Je répète ma question: entre 2007 et aujourd’hui, savez-vous si l’absence de ces dispositions a eu une incidence sur le Canada ou les Canadiens? Je ne veux pas savoir si quelqu’un d’autre aurait cette information; je veux savoir si vous avez quelque chose.
    Tous les renseignements que j’ai ont été fournis par la GRC et les forces de sécurité. Je pense que c’est à eux que la question devrait être posée.
    D’accord. Savez-vous si le Canada ou les Canadiens ont été touchés de quelque façon que ce soit? Je vais le faire en deux parties, si vous préférez. Si vous êtes au courant qu’il y a des besoins qui n’ont pas été satisfaits et que vous savez que nous en avons subi les conséquences, vous pouvez répondre par « oui » ou vous pouvez répondre par « non ». Vous n’avez pas à donner d’exemples.
    Il y a une autre option, qui consiste à dire qu’il préfère ne pas répondre à la question. Il y a trois options.
    Je ne pense pas qu’il soit nécessaire que vous m’interrompiez sur ce point. C’est ma question…
    Mon travail consiste à faire en sorte que lorsque nous avons le ministère ici... À la dernière réunion, j’ai cité le livre, et relativement à ce genre de questions sur la sécurité, les fonctionnaires du ministère n’ont pas à répondre.
    Poursuivez, monsieur Kania, je vais vous permettre de continuer.
    En fait, je veux régler ce problème, puisque vous l’avez soulevé la dernière fois. Je ne pense pas qu’il soit approprié que vous interrompiez les autres membres pendant qu’ils posent des questions. Nous pouvons avoir un rappel au Règlement sur cette question si vous le souhaitez, mais, en somme, vous avez rendu une décision avec laquelle nous ne sommes pas d’accord. Nous pensons qu’ils doivent répondre, alors je vous serais reconnaissant de ne pas m’interrompre pendant que je pose mes questions…
    Merci, monsieur Kania. Votre temps est écoulé.
    Nous redonnons maintenant la parole au gouvernement. Allez-y, monsieur Norlock, s’il vous plaît.
    Monsieur le président, je crois que c’était au tour de M. McColeman.
    Je suis désolé. Oui, c’est au tour de M. McColeman.
    J’invoque le Règlement.
    Allez-y, monsieur Kania, pour un rappel au Règlement.
    Mon temps n’était pas écoulé lorsque vous m’avez interrompu.
    En ce moment, votre temps est de 7 minutes, 40 secondes. Vous aviez jusqu’à sept minutes.
    Au moment où vous m’avez interrompu, mon temps n’était pas écoulé, n’est-ce pas? Autrement, au lieu de m’interrompre, vous auriez simplement dit: « le temps est écoulé ».
    Non.
    Allez-y, monsieur McColeman.
    Merci, monsieur le président.
    J’ai de nombreuses questions, mais j’aimerais d’abord préciser que mon domaine est la construction et non le droit.
     Nous avons vu, de l’autre côté, un avocat du travail agressif essayer de vous mettre dans l’embarras par rapport à certaines choses qui peuvent ou non être incluses dans la loi actuelle. J'adopte la démarche qui consiste à vous poser quelques questions qui ont été soulevées dans les témoignages du groupe de témoins précédent. Le professeur Forcese, de l’Université d’Ottawa, a écrit un article et réalisé une étude approfondie sur la question de savoir si le projet de loi tient compte ou non de quelques-uns des scénarios possibles par rapport à la menace du terrorisme. Il admet que le projet de loi permettrait de combler une lacune du cadre juridique actuel en matière de mesures d’application de la loi. Il dit qu’il s’agit d’une lacune, bien que petite, mais qu'elle existe. Puis, quand on a demandé aux autres membres du groupe d’experts si, selon leur analyse, il y avait une lacune, tous ont répondu qu'il n'y en avait pas.
    De plus, lorsqu’on leur a demandé s’ils pensaient que le terrorisme était une menace réelle au Canada, tous sauf un ont convenu que oui. Souvent, la menace que nous avons vue — par exemple, avec les 18 de Toronto — c’est que des gens ont déjà commis des actes. Les policiers étaient au courant de ces actes pour cette raison, mais si, dans une certaine mesure, les policiers en avaient eu connaissance au préalable et avaient pu vérifier les faits plus tôt, ils auraient pu les contrer.
    Cela dit, à titre de votre gouvernement et de votre ministère, nous avons évidemment examiné les lois des autres principaux pays du monde qui ont connu des attaques terroristes réelles, dont la Grande-Bretagne et les États-Unis. Comme vous le savez, le temps de détention en Grande-Bretagne est de 28 jours.
    Monsieur, j’aimerais avoir vos commentaires généraux au sujet de notre loi, en comparaison à celles des autres démocraties occidentales modernes, quant à savoir si elle donne aux policiers les outils dont ils ont besoin pour combler l’écart dont a parlé un de nos derniers témoins. Aussi, lorsque le ministère a déterminé le genre de dispositions qui seraient incluses, les a-t-il comparées aux autres pays et à leurs lois actuelles?
(1710)
    Comme vous l’avez indiqué, la loi du Royaume-Uni prévoit une détention préventive pouvant aller jusqu'à 28 jours. En Australie, le droit pénal relève des États et non du gouvernement fédéral. Cela varie d'un État à l'autre, mais dans de nombreux États d'Australie, la détention préventive peut aller jusqu’à 14 jours.
    Notre projet de loi n’est pas axé sur la détention. On a mis l’accent sur l’arrestation de la personne, la traduire devant les tribunaux, puis la libérer, avec ou sans condition. On ne présume pas qu’une personne sera détenue pendant une longue période de temps, c’est donc une différence importante.
    Pour ce qui est de l’audience d'investigation, les États-Unis ont un système de grand jury. Le Canada en avait un jusqu’au milieu des années 1960. Cela permet à une personne de comparaître devant un juge pour être interrogée sous serment afin de témoigner avant le dépôt d'une accusation. Cela n’est plus possible en droit canadien, même si ce l'était à l'époque où nous avions un tel système.
    En droit canadien, la seule exception est celle de la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle. Cette loi permet à un juge de citer une personne à comparaître afin qu'elle témoigne sous serment, aux fins de l’obtention de preuves qui seront envoyées à un pays étranger en vertu de leur demande judiciaire de recours à l’entraide judiciaire.
    Ce sont là les comparaisons avec d’autres lois, de même que quelques autres précédents que nous avons au Canada.
    Donc, en fonction de réponse à la question et des commentaires que nous avons entendus des autres témoins, qui ont dit que c'est un outil qui serait utile pour l’application de la loi et que nous serions peut-être en mesure d’empêcher quelque chose de se produire, car nous serions capables d’enquêter dans un cadre différent que la loi actuelle nous permet de faire, et en comparaison avec nos autres partenaires internationaux ou d’autres démocraties occidentales, qui, franchement, sont sous la menace du terrorisme...
    Nous le savons. Nous savons que nous avons besoin d’un mécanisme d'application de la loi qui possède tous les outils nécessaires pour mener cette guerre, et que la loi qui est proposée aujourd’hui a une incidence beaucoup moins grande sur le plan des droits individuels ou des droits de la personne. Elle est beaucoup plus équilibrée que les lois des autres démocraties occidentales, compte tenu des mesures contenues dans leur législation antiterroriste actuelle. Ai-je raison de dire cela?
    Le projet de loi contient plus de mesures de protection que beaucoup de lois de nos alliés.
    Donc, le gouvernement a tenu compte des valeurs des droits de l'homme et de la liberté de la personne dont jouissent les Canadiens et établi un équilibre entre ces facteurs et la nécessité de nous assurer que les organismes d’application de la loi ont en main d'efficaces outils pour lutter contre le terrorisme.
    Dans la préparation du projet de loi, comme je l’ai indiqué... et cela remonte à 2001. Nous avons examiné les lois d’autres pays. Nous nous sommes également penchés sur notre propre système juridique, la Charte canadienne des droits et libertés, la jurisprudence, ainsi que les dispositions actuelles du Code criminel sur le sort réservé aux accusés, soit les dispositions relatives aux peines d'emprisonnement et aux périodes de détention préventive.
    Nous avons essayé le plus possible d’harmoniser ces dispositions avec les pouvoirs existants et les mesures de protection qui s’appliquent aux accusés; en conséquence, comme le démontre le projet de loi, il y a beaucoup plus de mesures de protection concernant les personnes qui seraient visées par cette loi qu’il y en a pour les personnes qui sont accusées. Par exemple, pour les personnes qui sont accusées, il n'est pas nécessaire d'obtenir le consentement du procureur général avant leur arrestation. Dans leur cas, il n'y a pas de supervision, il n'y a pas de supervision parlementaire. Il n'y a pas, dans leur cas, de ministres qui sont tenus de présenter des rapports annuels.
    Donc, même s'il s'agit de nouveaux pouvoirs qui s'appliquent avant l'entrée en scène de la procédure judiciaire habituelle, nous avons essayé de mettre plus de mesures de protection pour tenir compte du fait que nous sommes dans une zone, une lacune, qui n’a pas encore fait l'objet d'une loi.
(1715)
    Merci, monsieur Piragoff.
    Nous retournons maintenant à l’opposition.
    Merci.
    Je vais reprendre où j’ai laissé. Je veux commencer par dire que je ne suis pas contre ces dispositions. Elles ont d'abord été introduites par un gouvernement libéral, après le 11 septembre, mais pendant un certain nombre d’années nous avons acquis l’expérience nécessaire pour déterminer ce qui est efficace et ce qui est vraiment nécessaire.
    J’essaie donc d’analyser ceci pour voir ce dont nous devons vraiment protéger les Canadiens... et c'est tout. Voilà pourquoi je vous pose ces questions. Ce ne sont pas des questions pièges. On essaie tout simplement de savoir ce dont nous avons vraiment besoin ici, au Canada.
    Je vais donc vous poser la question à nouveau. Avez-vous des informations qui nous permettent de croire que depuis février 2007 — parce que nous avons vécu sans ces lois depuis février 2007, parce que nous avons eu tout ce temps sans ces lois —, nous avons été lésés, nous avons souffert ou nous avons été à risque de quelque façon que ce soit et que ces lois auraient été utiles d'une façon ou d'une autre? Oui ou non.
    Manifestement, les procureurs de la Couronne dans l’affaire Air India étaient d’avis que les dispositions sur les audiences d'investigation ont été utiles pour un des témoins qu’ils ont rencontrés et qui ne fournissait aucun renseignement, et ils ont donc présenté une demande de recours à une audience d'investigation afin d'obtenir des preuves d’un témoin. De toute évidence, ce processus a été utilisé au moins une fois depuis 2001, et c'était en vertu de la disposition sur les audiences d'investigation en Colombie-Britannique.
    Quand cela s'est-il produit?
    En 2004.
    D'accord. Donc, ma question est la suivante: depuis que les dispositions ont expiré en février 2007, avez-vous des raisons de penser que le Canada ou les Canadiens ont souffert parce qu'elles n'étaient pas en vigueur?
    C'est une question hypothétique puisque les dispositions n'étaient pas en vigueur.
    Exactement. Quelqu'un a-t-il laissé entendre que, depuis février 2007, nous avions souffert d'une manière ou d'une autre de l'expiration de ces dispositions? Pouvez-vous penser à un exemple précis ayant eu lieu depuis février 2007 où il aurait été utile que nous les ayons?
    Je pense qu'il faudrait que vous demandiez aux autorités compétentes en matière d'enquête si, depuis 2004, elles auraient trouvé pratique de tenir une investigation. J'ignore les décisions que chacun des procureurs généraux provinciaux ou les membres de la GRC ont prises par rapport aux enquêtes. Vous devriez leur poser la question.
    C'est bien, mais je vous demande si vous êtes au courant d'une situation de ce genre, quelle qu'elle soit. Je sais qu'il y a beaucoup d'autres gens à qui nous pouvons poser ces questions. Mais, en ce qui vous concerne, connaissez-vous des cas où ces dispositions se seraient avérées utiles?
    Je le répète encore une fois. Vous devriez demander à d'autres personnes, qui prenaient part aux activités liées à ces affaires, si elles auraient pu user de ces pouvoirs s'ils avaient été en vigueur depuis 2004.
    Je ne comprends pas pourquoi vous avez du mal à répondre à cette question. Disposez-vous de renseignements en ce sens? Êtes-vous au courant de certains cas?
    Vous me demandez de faire une hypothèse...
    Non, ce n'est pas ce que je vous demande de faire. Je veux savoir si vous êtes au courant de cas particuliers.
    Je ne suis pas au courant des tactiques policières adoptées par la GRC ou le service de police de Toronto, ou des décisions que prennent les avocats de la Couronne de la Colombie-Britannique ou même le gouvernement du Canada. Le Service des poursuites pénales du Canada est un organisme indépendant. Ses membres ne me tiennent pas au courant des décisions qu’ils prennent ou qu’ils auraient prises. C’est pourquoi j’affirme que vous devez interroger ces gens — les parties poursuivantes, le Service des poursuites pénales du Canada, la GRC, le SCRS — pour savoir s’il y a des affaires qu’ils auraient gérées différemment si ces pouvoirs avaient été en vigueur.
(1720)
    Vous dialoguez avec ces divers organismes de temps en temps, n’est-ce pas?
     La réponse à cette question est manifestement « oui ».
    Si vous me demandez de vous révéler certains des renseignements qu’ils m’ont communiqués ou non, je n’ai pas le droit de vous dire ce que les agences de sécurité…
    Non. Je vous ai demandé si vous parliez de temps en temps à ces agences. Je ne pensais pas qu’il s’agissait d’une question à laquelle il était tellement difficile de répondre. Vous communiquez de temps en temps avec ces agences, n’est-ce pas?
    Oui, je communique avec elles, mais si vous demandez…
     C’est bien. Vous font-elles parfois des recommandations sur certaines questions…?
    Oui, elles m’en font.
     … à propos de ce qu’elles aimeraient voir changé dans la loi?
     Nous consultons les provinces et la GRC. Nous disposons d’un réseau de consultation au Canada qui nous permet de déterminer si des réformes sont nécessaires.
    Quelqu’un vous a-t-il indiqué verbalement ou par écrit qu’il était nécessaire de réintégrer ces dispositions dans la loi?
    Je pense que si vous posiez la question aux membres de la GRC, ils vous diraient que ces dispositions leur seraient utiles.
     Avez-vous — vous-même ou votre ministère — reçu des recommandations ou des demandes verbales ou écrites laissant entendre qu’elles sont nécessaires?
    Au cours de conversations? Je pense que mes fonctionnaires ont consulté la GRC et d’autres organismes. Personnellement, je ne l’ai pas fait, mais d’autres personnes s’en sont chargées.
    Merci.
    D’autres membres de son ministère l’ont fait.
     Madame Mourani.
    Ce n’est pas ce qu’il a dit. Il a indiqué que d’autres personnes l’avaient fait. Veuillez ne pas ajouter des éléments au témoignage.
    Madame Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poser une question très simple à M. Piragoff. J'aimerais savoir qui sont les groupes ou les personnes que vous avez consultés lors de la préparation de ce projet de loi, ou à qui vous avez demandé une opinion sur ce projet de loi.

[Traduction]

     La version originale du projet de loi a été examinée par un comité du Sénat et un comité de la Chambre des communes qui ont formulé des recommandations. Le comité de la Chambre des communes a recommandé que ces dispositions soient prolongées et qu’elles continuent d’être en vigueur. Les deux comités ont recommandé des modifications qui, selon eux, devraient être apportées pour améliorer ces dispositions et ont publié des rapports.
     Nous avons étudié ces rapports, et nous avons mené des consultations internes au sein du gouvernement fédéral afin de savoir ce que les fonctionnaires pensaient des recommandations formulées tant par le comité du Sénat que par le comité de la Chambre des communes. Nous avons également consulté les provinces, parce qu’elles ont un rôle à jouer dans les enquêtes et les poursuites. Voilà les gens que nous avons consultés

[Français]

    Vous disiez avoir consulté les gens de la GRC et du SCRS.

[Traduction]

     Ils ont participé aux discussions internes au sein du gouvernement.

[Français]

    Avez-vous consulté d'autres agences?

[Traduction]

    Je ne me souviens pas par cœur qu’elles étaient précisément ces autres agences mais, si vous le voulez, nous pouvons répondre…

[Français]

    J'aimerais que vous puissiez nous envoyer par écrit la liste des départements, des ministères et aussi des agences qui dépendent du ministère de la Sécurité publique du Canada.
    Merci.

[Traduction]

    Avez-vous terminé, madame Mourani?

[Français]

    C'est tout, monsieur le président.

[Traduction]

    Nous allons revenir aux députés ministériels mais, tout d’abord, j’aimerais poser une question.
     Pour ma gouverne — et il se peut que certaines des réponses soient de nature hypothétique, mais je tiens à revenir sur les raisons pour lesquelles on ferait appel à ce projet de loi.
     La question a été soulevée au sujet des 18 de Toronto. N’ai-je pas raison de supposer que les autorités ont été en mesure de réunir des preuves d’une manière ou d’une autre? Elles surveillaient, car elles savaient ce qui se passait. Dans une affaire comme celle des 18 de Toronto où ils avaient eu l’occasion de surveiller et de voir qu’il y avait des éléments de preuve, ne préféreraient-ils pas porter des accusations en vertu du Code criminel?
     Ce projet de loi ne serait-il pas pratique… si, tout d’un coup, on recevait un appel signalant une menace imminente et qu’on n’avait pas l’occasion d’amasser des preuves fort nécessaires avant de stopper une attaque terroriste? C’est ce que le projet de loi est censé accomplir, n’est-ce pas?
(1725)
    Le projet de loi a pour objet d’accorder à la police certains pouvoirs qui lui permettent de troubler le déroulement d’actes préparatoires avant qu’elle ait la possibilité de procéder à une arrestation
    Donc, si vous étiez un policier, ou même un agent du SCRS, ne préféreriez-vous pas porter des accusations contre quelqu’un en vertu du Code criminel? Si vous le faisiez, vous pourriez utiliser… L’ennui, c’est que, si nous rassemblons des preuves au cours de cette investigation, celles-ci ne peuvent être utilisées pour expulser quelqu’un ou pour intenter des poursuites criminelles plus tard, n’est-ce pas?
     Durant l’investigation, oui. Il est clair dans le projet de loi que…
    Par conséquent, ils ne pourront pas utiliser contre eux les éléments de preuve qu’ils ont réunis. Si j’étais un agent de la GRC, je dirais: « Écoutez, je préfère rassembler des preuves qui me permettront de porter des accusations contre ce type et de gagner cette cause. » Mais, ce projet de loi vise simplement à protéger le public contre une attaque terroriste. Même s’ils ne sont pas en mesure de porter des accusations, il se peut qu’ils sauvent des vies. Est-ce exact?
    C’est une décision que la police doit prendre. S’ils possèdent des preuves pour procéder à une arrestation, je pense, comme vous le dites, que c’est ce qu’ils feront. Mais s’ils n’ont pas encore recueilli suffisamment de preuves pour procéder à une arrestation, ce projet de loi leur donnera le pouvoir d’interrompre un comportement préparatoire et, comme vous le dites, de protéger le public.
     Je vais appeler le reste du temps la période ministérielle.
    Je vais demander à M. Davies s’il aimerait poser une brève question avant la fin de la séance.
    Merci, monsieur le président.
     De 2001 à 2007, ces dispositions figuraient dans la loi sous une forme très semblable à celle d’aujourd’hui. Puis, bien entendu, elles ont expiré, et nous n’avons pas été en mesure d’en bénéficier pendant les trois dernières années, c’est-à-dire de 2007 à 2010. J’ai deux questions rapides à vous poser. La première est la suivante: Combien de fois ces dispositions portant sur la arrestation préventive et l'internement administratif à vue ont-elles été utilisées de 2001 à 2007? Puis-je poser cette question en premier?
    On a eu recours à l’investigation une fois, je crois, en 2003, dans le cadre du procès Air India. À notre connaissance, les pouvoirs d’arrestation préventive n’ont jamais été utilisés pendant cette période.
    Nous savons, bien entendu, que, de 2007 à aujourd’hui, ces dispositions n’ont jamais été utilisées, car elles ne faisaient pas partie de la loi.
     N’est-il pas juste de dire qu’essentiellement, au cours des 10 dernières années — nous avons atteint la 10e année maintenant —, il n’y a eu aucun exemple d’activité terroriste que la police n’a pu enrayer à l’aide des pouvoirs dont elle dispose actuellement en vertu du Code criminel? C’est ce que les faits semblent indiquer.
     En fait, nous avons été chanceux de ne pas être victimes d’un incident terroriste.
     Si nous faisions abstraction de nos suppositions et de nos inquiétudes et que nous nous en tenions simplement aux faits, ne serait-il pas raisonnable de dire… compte tenu des faits, ne serait-il pas logique de conclure que les pouvoirs actuellement prévus par le Code criminel suffisent à contrer les activités terroristes éventuelles?
    Selon les événements qui se sont produits jusqu’à maintenant, oui, mais je ne peux prévoir ce qui pourrait se passer dans les années à venir.
    Bien sûr.
     Voilà la question. C’est la décision que le comité doit prendre.
     Nous pouvons signaler où sont les lacunes, et je vous ai indiqué où l’une d’elles se trouvait. Je pense que vous et moi sommes d’accord pour dire que la loi comporte une lacune. Quant à décider si, selon vous, elle doit être comblée, cela constitue une question politique à laquelle je ne peux répondre.
     Je peux seulement vous expliquer ce que le projet de loi accomplirait et vous indiquer les lacunes et les lignes de démarcation de la loi. Quant à décider si vous voulez étendre l’application de la loi, c’est une question politique et une décision que les parlementaires doivent prendre.
    En tant que membres du comité, nous cherchons à déterminer la politique qui convient. Je m’efforce de comprendre les faits qui se trouvent devant nous afin de découvrir si ces pouvoirs sont bel et bien requis.
     Manifestement, nous pourrions accorder aux policiers des pouvoirs extraordinaires. Nous pourrions leur permettre de détenir des suspects pendant une semaine. D’après votre témoignage, je crois comprendre que ces pouvoirs sont plutôt inoffensifs comparés à ceux accordés par les autres États, mais ce sont tout de même des pouvoirs supplémentaires qui permettent aux services de police de procéder à des arrestations préventives et de garder des gens en détention administrative — j’ai probablement inversé ces deux termes — et qui dépassent ceux dont ils disposent en vertu du Code criminel.
     Je tiens à vous remercier du témoignage que vous avez apporté devant le comité. Je suis certain qu’il nous sera très utile au cours de nos délibérations à venir.
(1730)
    Merci beaucoup, monsieur Davies, d’avoir terminé votre intervention de cette manière.
     Nous voulons vous féliciter d’être restés pendant la dernière heure et d’avoir contribué à nos discussions concernant cette très importante mesure législative.
     Je pense que tous les partis veulent trouver un équilibre et donner à nos autorités les ressources dont elles ont besoin pour prévenir des attaques terroristes, mais nous voulons également faire très attention de ne pas porter atteinte aux droits de la personne et à l’équilibre établi.
     Quoi qu’il en soit, merci beaucoup.
     Avant de lever la séance, je tiens à signaler qu'il s'agit de notre dernière réunion cette année. Je veux souhaiter à chacun d’entre vous un très joyeux Noël, une joyeuse Hannoucah et de merveilleuses fêtes, quelles qu’elles soient. Passez un joyeux Noël et, avec un peu de chance, nous nous reverrons ici en février, et pas avant.
     La séance est levée.
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