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Bonjour, monsieur le président, distingués membres du comité. Je vous remercie de me permettre de m'adresser à vous aujourd'hui, en compagnie de Liette Dumas-Sluyter, commissaire adjointe intérimaire au Secteur des services corporatifs, de Pushkar Godbole, directeur général des Services techniques et des installations, et de John Sargent, président-directeur général de CORCAN.
Nous sommes heureux de pouvoir nous présenter devant vous cet après-midi pour répondre à vos questions concernant la fermeture des fermes de CORCAN et l'approvisionnement alimentaire. Comme vous le savez, le Service correctionnel du Canada procédera, d'ici le 31 mars 2011, à la fermeture de six exploitations agricoles fédérales de CORCAN, et ce, à la suite de l'examen stratégique mené par le gouvernement du Canada. D'après les exigences de cet examen, tous les programmes gouvernementaux existants doivent faire l'objet d'une évaluation tous les quatre ans, afin d'en vérifier l'efficacité et l'efficience.
En 2008, le Service correctionnel du Canada a examiné ses programmes et ses services pour s'assurer que les fonds sont concentrés dans les secteurs où ils sont le plus utiles et pour trouver des façons plus judicieuses de fournir ces programmes et services. Dans le cadre de ce processus, le Service correctionnel du Canada a eu l'occasion de restructurer son budget, ses programmes et ses priorités en fonction de la nouvelle vision du système correctionnel fédéral au Canada. Le SCC est résolu à offrir des programmes correctionnels aux délinquants ainsi qu'à les aider à acquérir des compétences favorisant l'employabilité qui les aideront à se trouver un emploi dans la collectivité et à garder ce travail.
Pour que nous réussissions à faire cela, les occasions que nous mettons à la disposition des délinquants en vue de l'acquisition de compétences améliorant l'employabilité doivent refléter les exigences du marché du travail d'aujourd'hui et de demain. Voilà une chose que le SCC ne prend pas à la légère. Aussi, avec l'appui d'entreprises locales et de ministères gouvernementaux, le SCC s'emploie à élaborer d'autres programmes de formation professionnelle qui aideront les délinquants à réintégrer avec succès la société.
L'expérience et les compétences acquises dans le cadre des tâches accomplies sur les fermes se sont révélées bien précieuses. Cependant, la décision de fermer les fermes restantes se fonde sur le fait que les gains des délinquants sur le plan des compétences favorisant l'employabilité n'étaient pas optimaux dans le domaine de l'agriculture. Cela est d'autant plus manifeste qu'au cours des cinq dernières années, moins de 1 p. 100 de tous les délinquants mis en liberté dans la collectivité se sont trouvé du travail dans le secteur agricole.
Alors, bien que les délinquants qui ont participé au programme agricole aient effectivement acquis des compétences favorisant l'employabilité, comme la responsabilité, le travail d'équipe, la ponctualité et des capacités propres au domaine agricole, un nombre relativement peu élevé de délinquants ont fini par travailler en agriculture une fois qu'ils étaient de retour dans la collectivité. Par conséquent, le SCC envisage d'élaborer d'autres programmes de formation correspondant aux exigences et aux réalités actuelles du marché du travail, pour bonifier les perspectives qui s'offrent aux détenus dans les six pénitenciers à sécurité minimale qui sont touchés à l'échelle du pays. Cela favorisera du même coup une intégration accrue des programmes correctionnels, des programmes d'éducation et des programmes de formation professionnelle.
Ces possibilités de formation seront intimement liées au Programme de transformation du SCC et favoriseront davantage l'acquisition de compétences associées à l'emploi et à l'employabilité. CORCAN poursuivra ses opérations dans ses autres secteurs d'activité, soit la fabrication, les services, la construction et les textiles. De plus, à l'heure actuelle, on s'emploie à élaborer des plans en vue de la création de nouvelles occasions de travail et de formation pour les délinquants, lesquelles comprendront les suivantes: offrir aux délinquants de la formation et des emplois axés sur les exigences du marché du travail; établir des programmes de formation professionnelle officiellement reconnus qui permettront aux délinquants d'acquérir des compétences en demande, tout en obtenant une certification par un tiers; offrir plusieurs autres possibilités auxquelles on s'affaire activement de concert avec des intervenants des secteurs public et privé.
Quant aux autres secteurs du SCC qui pourraient subir des effets à la suite de la fermeture des fermes, je peux vous assurer que l'organisation mettra à profit l'ensemble de ses outils et de ses processus en matière de gestion des ressources humaines, pour faire en sorte que tous les membres du personnel qui sont touchés se voient offrir des emplois convenables ailleurs.
Je peux aussi vous dire qu'aucune décision finale n'a encore été prise relativement à l'utilisation ultérieure des terres qui ont été exploitées, mais, pour le moment, le commissaire est ouvert à la possibilité de louer des portions de ces terres à des agriculteurs locaux, pourvu que cela ne compromette pas la sécurité des établissements.
Certes, ces fermes fournissent toute une gamme de produits aux établissements fédéraux, notamment de la viande, des oeufs et du lait. Après leur fermeture, le SCC se procurera ces denrées au moyen de l'exécution des pouvoirs de passation de marchés et dans le cadre de mécanismes tels que le système d'appels d'offres du gouvernement. Le SCC ne prévoit pas que la fermeture des fermes de CORCAN aura une incidence considérable sur les coûts annuels associés à l'approvisionnement alimentaire. De façon générale, nous avons constaté que le prix de certains produits de CORCAN, dont le boeuf, le porc et le poulet, était en moyenne plus élevé que celui des produits vendus par des fournisseurs canadiens locaux, alors que d'autres produits de CORCAN, comme les oeufs et le lait, étaient moins coûteux.
Selon nos dossiers financiers, au cours de l'exercice 2008-2009, le SCC a acheté, pour nourrir les détenus, des produits provenant des fermes de CORCAN d'une valeur approximative de 4 millions de dollars, sur un total de quelque 27 millions de dollars dépensés pour l'alimentation des détenus pendant toute l'année.
CORCAN exploitait auparavant des fermes dans trois des cinq régions. Dans les régions de l'Atlantique et de l'Ontario, les produits de viande, les produits laitiers et les oeufs sont achetés de CORCAN. Depuis avril 2009, la région des Prairies a cessé de s'approvisionner en produits de viande auprès de CORCAN, puisqu'on a mis fin aux activités de production de viande dans cette région. Dans la région du Québec, les oeufs et les produits laitiers sont achetés des opérations de CORCAN en Ontario. Dans la région du Pacifique, l'approvisionnement alimentaire se fait au moyen des processus d'achat du gouvernement.
Le SCC est également en train de se pencher sur l'utilisation de contrats nationaux et régionaux pour certaines denrées alimentaires, ce pour réaliser des économies d'échelle dans le cadre de l'approvisionnement alimentaire. Durant l'exercice 2010-2011, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada a l'intention d'introduire la nouvelle Stratégie nationale en matière d'achat d'aliments et de boissons, qui déterminera comment le gouvernement du Canada aura à s'approvisionner pendant une période de plusieurs années. L'objectif de cette nouvelle stratégie consiste à uniformiser le processus d'achat à l'échelle des ministères et des organismes gouvernementaux et à optimiser l'utilisation des deniers publics pour la population canadienne, puisqu'on sera à même d'obtenir les prix les plus avantageux. En effet, on demandera plus fréquemment à connaître les prix des fournisseurs afin de pouvoir profiter des fluctuations du marché pour ce qui est des coûts des biens.
En ce qui concerne l'équipement agricole et le bétail, le SCC est tenu de demander la juste valeur marchande pour tout bien aliéné. Tous les biens dont le SCC n'aura pas besoin seront donc offerts à d'autres ministères ou organismes gouvernementaux. Certaines pièces d'équipement agricole ont d'ailleurs déjà été vendues à Agriculture Canada et à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. L'élimination des biens restants se fera en conformité avec la politique du gouvernement.
Même si la fermeture des fermes amènera de nouveaux défis à relever, je suis persuadé que le SCC sera toujours en mesure de remplir son mandat et de produire des résultats positifs pour ce qui est de la sécurité publique des Canadiens et des Canadiennes.
Je vous remercie de votre attention. Nous nous ferons aujourd'hui un plaisir de répondre à vos questions.
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Je vais vous entretenir de certains des éléments de planification pour la région de l'Ontario, et M. Sargent pourrait peut-être traiter des autres que nous avons.
L'un des éléments que nous sommes en train d'envisager à l'heure actuelle à l'établissement de Frontenac est un programme de démolition CORCAN. Il s'agira d'un programme de certification par un tiers en métier de la construction. Cela inclura la charpenterie, le désamiantage, la formation de sécurité et la formation en matière de risques en milieu de travail. Ce que nous avons en tête c'est du travail de construction pour CORCAN. La chose existe déjà, mais nous sommes en train d'explorer des avenues qui permettraient aux détenus de niveau sécurité minimale d'obtenir une certification en construction et de soumettre des propositions de projets. Ainsi, les heures qu'ils accumuleraient pourraient compter aux fins d'apprentissage.
Une étude de marché a également fait ressortir qu'il y a une demande du côté de la construction de bureaux-caravanes. Cela fait appel à des compétences en menuiserie, en soudure, en électricité et en plomberie.
Les études de marché révèlent également une demande du côté du blanchissage commercial. Ici, il s'agirait d'acquérir des compétences en informatique, en gestion d'inventaire et en expédition et réception.
Encore une fois, nous maintiendrons nos autres emplois internes — ouvriers jardiniers à l'entretien des terrains, personnel d'entretien, nettoyeurs et personnel de cuisine.
Les programmes que j'ai mentionnés tout à l'heure et certains programmes éducatifs sont ce sur quoi nous nous penchons.
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Nous allons de toute manière examiner plus avant ces chiffres.
Ayant été solliciteur général et ayant visité les prisons agricoles, et en ayant fait le tour en février dernier, et ayant passé pas mal de temps à discuter avec des détenus, je pense personnellement — et je crois que c'est ce que pensent nombre d'entre nous qui avons visité les fermes — que cette décision est l'une des plus idiotes que le SCC pourrait jamais prendre.
Regardez les personnes au fond de la salle. Ce sont des membres des collectivités qui sont ici pour appuyer les prisons agricoles, pas juste pour la valeur que celles-ci représentent pour le milieu agricole, mais tout particulièrement pour la valeur qu'elles représentent en ce qui concerne la réadaptation des détenus.
Je ne sais pas combien de temps M. Sargent passe à discuter avec des gens qui travaillent dans ces exploitations laitières. Je ne sais pas combien de temps il y a passé. Mais avant qu'une décision de cette envergure ne soit prise, le comité et le ministre devraient passer du temps dans ces fermes à véritablement discuter avec les gens.
[Applaudissements]
L'hon. Wayne Easter: Les gens avec qui j'ai discuté dans ces fermes n'avaient pas de vie. On leur a donné une vie en leur offrant de travailler avec du bétail et des vaches laitières — les troupeaux laitiers à Kingston et à Westmorland. Voilà ce que c'est que la réadaptation.
Je suis producteur de lait, et il en a d'autres aussi autour de la table qui sont agriculteurs. Lorsque vous entrez dans l'étable, vous voyez un troupeau et vous voyez la fierté de ces détenus.
Je pense vraiment qu'il s'agit d'une mauvaise décision.
Quoi qu'il en soit, monsieur Toller, en réponse à une question de M. Davies, il y a quelques instants, vous avez mentionné que vous n'avez pas de programme qui soit important pour la santé mentale. Je vous soumets, monsieur, que vous avez tort. Vous en avez un, et c'est le système des prisons agricoles et le travail avec les animaux de ferme.
Avez-vous fait la moindre étude sur l'incidence, sur le plan réadaptation, du fait de travailler avec du bétail et sur ces fermes? Êtes-vous au courant du projet de jardinage à San Francisco?
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Merci, monsieur le président. Bienvenue aux témoins.
Permettez-moi, d'entrée de jeu, de tirer tout de suite quelque chose au clair. Notre voeu est clairement de faire tout ce que nous pouvons pour aider ces contrevenants à se trouver des emplois prudents, fonctionnels et à s'intégrer dans une société au sein de laquelle ils pourront bien réussir. Je sais que le Service correctionnel du Canada partage ce désir d'essayer de veiller à ce que nous offrions à ces contrevenants les meilleurs outils possibles pour veiller à ce que cela devienne réalité. Je sais que nombre de membres du comité, quel que soit leur parti, sont d'accord là-dessus.
J'aimerais concentrer mes questions sur certains des coûts, mais j'aimerais dire très clairement qu'il a été fait ici aujourd'hui certaines déclarations qui étaient non fondées. J'ai déjà visité une prison agricole. Je suis certaine, monsieur Easter, que c'est le cas de plusieurs des personnes qui sont ici, alors certaines de vos hypothèses ne reposent sur aucune recherche et ne présentent aucune validité.
Quoi qu'il en soit, je viens moi aussi d'une famille qui a travaillé dans l'agriculture. Ma mère a grandi sur une ferme. Ma mère est ensuite devenue gardienne de prison. Elle convient elle aussi qu'il nous faut fournir aux prisonniers et aux contrevenants les meilleurs outils possibles afin qu'ils puissent réussir.
Cela étant dit, j'aimerais traiter de certaines questions concernant, encore une fois, l'aspect financier. Vous avez déclaré tout à l'heure que pendant l'exercice financier 2008-2009, 14 contrevenants en tout se sont trouvé des placements dans le secteur agricole, n'est- ce pas?
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Je ne voudrais pas que vous parcouriez toute la liste, mais seulement parce qu'il ne me reste qu'une trentaine de secondes environ.
Mais il est clair que si l'on pense optimisation, pour que ces contrevenants réussissent à obtenir les outils requis pour trouver un emploi, nous avons 285 000 $ comparativement à... Et vous pourrez faire le calcul tout à l'heure, mais moi je l'ai fait. C'est environ 36 000 $, ce qui est considérable. Et, encore une fois, je tiens à leur donner les meilleures possibilités de réussite.
J'ai appris le français dans le cadre d'un programme de français. Je ne nierais jamais le fait que pendant que j'apprenais le français, j'ai également appris à bien étudier. J'ai appris plusieurs choses précieuses: j'ai appris à communiquer avec d'autres, j'ai appris à être ponctuelle, j'ai appris à être tolérante, à être patiente. J'ai appris cette ponctualité, j'ai appris cette patience, j'ai appris ces liens, mais je ne suivrais jamais un cours de chinois pour apprendre le français.
Je veux donner à ces contrevenants les meilleures possibilités qui soient, et je ne pense pas que nous le fassions avec les fermes.
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Merci, monsieur le président. S'il me reste du temps, je vais le partager avec ma collègue.
Mesdames et messieurs, bonjour. Je salue M. Sargent, qui est le président-directeur général de CORCAN. On compte des installations de cet organisme dans ma circonscription, à Laval, mais pas de fermes.
Selon nos informations, CORCAN n'exploite pas de fermes au Québec. Il y a sûrement une explication à tout cela, mais on se pose des questions, comme celle que ma collègue posait. En effet, on constate que CORCAN se procure les oeufs et les produits laitiers du Québec chez CORCAN en Ontario.
Si vous arrêtez d'exploiter des fermes, allez-vous prendre l'engagement de lancer des appels d'offre dans la région du Québec? En effet, le Québec a beaucoup d'oeufs et de produits laitiers. Je pense que c'est une question précise à laquelle vous pourriez peut-être répondre aujourd'hui.
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Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de leur participation.
Je suis moi aussi en visite au comité aujourd'hui, mais il y a un certain nombre de questions que j'aimerais poser.
Jusqu'en octobre 2008, j'ai dirigé une entreprise spécialisée dans la gestion des limitations fonctionnelles, et qui a travaillé avec certaines grosses sociétés au Canada, mettant en place pour elles des programmes de reprise du travail, l'accent étant mis sur la réadaptation des travailleurs blessés et leur retour au travail. Ainsi, bien qu'il ne s'agisse pas exactement de la même chose, du fait que nous traitions de personnes présentant des limitations fonctionnelles, il y a certains principes qui, je pense, s'appliquent en l'espèce.
Ce que nous avons constaté dans notre travail est que si une personne est affectée à un poste dans le cadre duquel elle gagnera moins que dans le cadre de son poste antérieur, l'incidence de blessures nouvelles est de beaucoup supérieure et il y a un bien plus grand risque que la personne se retrouve de nouveau dans une situation dans laquelle elle vit de prestations. C'est ainsi que nous nous efforçons, dans notre travail, qu'il s'agisse d'offrir une formation de recyclage, de la réorganisation ou du nouveau matériel ergonomique, d'aider la personne à retrouver un emploi lui procurant son plein revenu antérieur.
Conviendriez-vous que si une personne gagne un revenu adéquat cela diminue son risque de récidive?
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À l'heure actuelle, en Ontario — et c'est là que le gros de mon travail a été fait dans ce domaine —, dans les métiers de la construction, et je vais reprendre un petit peu ce que disait M. McColeman, nous avons une demande dans le marché, ce qui est l'une des raisons pour lesquelles il y a autant de gens qui émigrent vers le Canada. À l'heure actuelle, l'âge moyen des applicateurs de panneaux muraux secs en Ontario est de 57 ans et l'âge moyen des plombiers est de 53 ans, ce qui veut dire qu'il va y avoir une demande énorme.
Si je regarde simplement ici sur mon BlackBerry, sous techniciens de l'industrie et fabrication, je trouve: briqueteurs, tarif horaire moyen, 21,92 $; charpentiers, 17,93 $; électriciens, 18,66 $; manoeuvres, travailleurs de la construction et aides, 16,57 $; plâtriers ou installateurs de panneaux muraux secs, 21,58 $; et plombiers, 24,56 $. C'est là le salaire horaire auquel peuvent prétendre les personnes ayant acquis les compétences et établi la paperasse; elles peuvent sortir dans la rue et dire « Je suis qualifié. J'ai droit à 21,58 $ de l'heure ».
Diriez-vous que c'est là une attente raisonnable et que les personnes que vous avez formées dans le cadre des programmes de préparation à l'emploi que vous offrez devraient pouvoir compter se voir offrir un tel traitement horaire?
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Vous auriez fait du bon travail.
Si vous permettez, je vais faire une déclaration en quelque sorte. Soyons francs. J'ai eu l'occasion de visiter la quasi-totalité des établissements fédéraux du pays. J'ai eu l'occasion de voir à l'oeuvre presque tous les programmes offerts par le Service correctionnel. Le programme des prisons agricoles est, sans conteste, le meilleur que j'aie vu. Mais voici ce qui m'irrite. Il y a une norme différente qui est appliquée à ce programme et qui n'est appliquée à aucun autre. Lorsque je me présente et que je vois des détenus construire des cabanes à oiseaux, personne ne demande « Combien d'entre eux partent d'ici et se trouvent des emplois dans la construction de cabanes à oiseaux? » Lorsque je me présente et que je regarde des détenus balayer des planchers, personne ne demande « Combien d'entre eux se trouvent des emplois de balayeur? » Lorsque je me présente et que j'examine un programme d'alphabétisation, chose que, croyez-moi, j'appuie, et chose nécessaire, personne ne demande « Combien d'entre eux vont écrire des livres? » Il s'agit là pour moi d'une norme parfaitement ridicule, qui n'est appliquée à aucun autre programme du service correctionnel.
Ma question, donc — ce n'est pas même une question, mais je vais vous soumettre la chose sous forme de déclaration, après quoi je passerai à une question. Lorsque nous comparons des programmes, il nous faut faire des comparaisons de programme à programme, et d'emploi à emploi. Ce qu'on nous a dit aujourd'hui est qu'on ne dispose pas de ces statistiques. On ne peut pas dire que pour ceux qui suivent tel programme de formation professionnelle, il y a tel taux d'emploi; que pour ceux qui suivent le programme des prisons agricoles, il y a tel taux d'emploi. Dans le cas des détenus que j'ai vu coudre des poches — un travail louable pour les militaires, car ils cousent des poches sur des choses qui vont aller en Afghanistan —, quel est leur taux d'emploi au sortir de ce programme? Pourquoi cette norme pour ce programme? Cela ne tient pas debout.
Le deuxième point que j'aimerais souligner concerne le la récidive. Le principal mandat du Service correctionnel du Canada est de veiller à ce que, lorsque les gens sortent de prison, ils ne retombent pas dans le crime, mais plutôt s'améliorent. Ce que nous disent tous les travaux de recherche à la fine pointe menés dans le monde est qu'il n'y a rien de mieux; que le fait de travailler avec une autre vie — en soignant des animaux, en étant agriculteur — amène, cela est prouvé, l'empathie, et favorise le processus de réadaptation. Nous avons utilisé ce programme de prisons agricoles à la fin, juste avant que les détenus ne soient libérés.
À entendre les histoires... M. Easter raconte l'histoire de détenus qui avaient une vache souffrant de piétin, qui, en temps normal, aurait été abattue, mais les détenus ont refusé qu'on l'abatte à cause de l'attachement qu'ils avaient pour elle. À voir les yeux des hommes qui ont suivi ce programme et la façon dont ils disent que celui-ci a changé leurs vies et la différence que cela leur a apporté, monsieur... Il me faut vous dire que cela me brise le coeur de voir ce que l'on est en train de faire à ce programme. Cela me brise carrément le coeur.
[Applaudissements]
Le vice-président (M. Mark Hollande): En ce qui concerne le coût, on nous dit qu'il en coûte environ 4 millions de dollars pour maintenir le programme des prisons agricoles. Ce programme va être remplacé; nous ne savons pas exactement par quoi — quelque programme de formation professionnelle et d'autres choses. Ces choses vont manifestement être assorties de coûts.
Une déclaration erronée a été faite ici tout à l'heure au sujet de nos sources d'approvisionnement. Nous ne savons pas si elles se situeront au Canada. La chose est assujettie à l'ALENA, alors les produits pourraient venir du Mexique; ils pourraient venir des États-Unis. Nous ne savons pas du tout d'où vont venir ces produits.
Montrez-moi les coûts. Pourriez-vous me donner une ventilation de ce que les nouveaux programmes vont coûter et de ce que l'ancien programme coûte? Fournissez-moi ici une comparaison entre torchon et torchon.
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Ma question s'adresse à M. Toller. Si je comprends bien, vous n'avez pas d'analyse du taux de récidive. Vous n'avez pas de chiffres sur les cohortes. Vous n'avez pas de ventilation, c'est-à-dire combien de personnes sont passées dans les fermes et ont ensuite trouvé un emploi dans une ferme ou dans d'autres domaines.
Vous n'avez que des chiffres de 2008-2009 sur toutes les personnes qui ont eu recours à CORCAN, sur le nombre de personnes qui ont trouvé du travail dans le domaine de la construction ou dans des fermes. À titre de criminologue qui fait des analyses sur plusieurs sujets importants, je ne base jamais mon analyse sur des impressions, mais plutôt sur des faits, des chiffres, puis j'arrive à la conclusion qu'un programme est efficace ou ne l'est pas.
J'en conclus donc que ce n'est pas une décision basée sur des chiffres et des faits, ou sur le manque d'efficacité d'un programme, mais plutôt une décision qui vous est imposée. Je sais que la mission première du Service correctionnel du Canada — pour y avoir travaillé — est la réhabilitation des délinquants et des détenus, en fonction, bien sûr, de la gestion du risque de récidive et de la protection de la société, d'une certaine manière. Je sais que le Service correctionnel du Canada ne prendrait pas une décision sans avoir des chiffres et des faits. C'est ce qui me porte à croire que c'est une décision du gouvernement qui vous est imposée. Ai-je tort?
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Merci, monsieur le président.
Malheureusement, aujourd'hui est une de ces journées où certains de mes collègues ont voulu amuser la galerie, comme le font de temps à autre les artistes. Cependant, la vraie question ici est que nous sommes en train d'examiner ce qui est bon pour la sécurité publique et ce qui est bon pour les contrevenants lorsqu'ils vont en prison et lorsqu'ils en sortent.
Certains d'entre nous sommes originaires de communautés agricoles. Quelque 28 p. 100 du PIB dans ma circonscription est d'origine agricole, alors je comprend l'agriculture. Je ne prétendrai pas être fermier. D'autres me disent qu'ils ont déjà été sur des fermes, ce qui ne veut pas dire qu'ils sont fermiers. Mais ce que nous voyons ici, c'est toutes sortes de suggestions selon lesquelles seules les personnes qui sont passées par des prisons agricoles ont acquis certains jeux de compétences. Je sais, sur la base d'expériences passées, que les gens ont utilisé des exemples ridicules, et je ne dis pas que c'est le cas ici, mais ils ont utilisé des exemples ridicules pour dire qu'un certain pourcentage de personnes qui font ceci ou cela sont des mangeurs de pommes de terre en purée. Ceci ne s'inscrit pas dans le même contexte, mais mon souci est qu'il y a ici des gens qui tentent de jouer à un jeu voulant que la seule façon pour les détenus d'obtenir des compétences est de travailler dans une prison agricole.
Vous avez dit que 14 de ces personnes ont pu se trouver des emplois en milieu agricole, et je pense que ces 14 cas de figure sont formidables, et si ces personnes peuvent maintenir ces emplois, alors elles apprendront énormément dans la vie, mais le problème est que les compétences citées ici, que certaines de ces personnes prétendent avoir acquises, ne sont pas commercialisables. Lorsque je regarde la liste d'emplois que les gens ont obtenus, certaines des compétences requises ne sont tout simplement pas acquises du fait d'être un bon joueur d'équipe ou d'être ponctuel au travail ou autre chose. Ces compétences, les gens doivent les acquérir lorsqu'ils sortent de prison, afin que les employeurs soient prêts à les embaucher. Cette collection, il faut l'espérer, grossira avec l'argent en provenance de CORCAN.
Nous avons déjà entendu dire que, lorsque mon collègue d'en face était solliciteur général, ces fonds ont été réduits de moitié. S'il croyait vraiment dans ce programme, il aurait doublé ces fonds et multiplié les prisons agricoles. Or, il ne l'a pas fait. Et maintenant que l'on est en train de décider de fournir ces possibilités aux détenus, pour qu'ils sortent de prison avec des compétences...
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Très bien. Merci. Peut-être que je corrigerai alors simplement une déclaration.
On a laissé entendre qu'il s'agit d'une directive du gouvernement. Je siège au comité des comptes publics, comme c'est également le cas de notre président. Je siège d'autre part au comité des finances. Les principales fonctions sont d'assurer surveillance et reddition de comptes, et c'est ainsi que nous sommes chargés par la vérificatrice générale de faire des recommandations à ces comités quant à la façon dont le gouvernement doit s'acquitter du mieux possible de ses responsabilités. L'une des recommandations de la vérificatrice générale a été que les ministères subissent des examens stratégiques systématiques. Cela est en place. Le gouvernement a instauré cela, et ces ministères sont chargés d'effectuer des examens périodiques. Cela se fait dans le cours normal des activités, sur la base des recommandations de la vérificatrice générale. Ces recommandations ont été mises en oeuvre et nous faisons ce travail.
J'habite à proximité de prisons agricoles, Je comprends certainement les préoccupations locales et les coûts et avantages pour les collectivités locales, qui sont encore un autre facteur dont il nous faut définitivement tenir compte. Mais je pense qu'il intervient principalement deux préoccupations. La première est qu'il faut maintenir les détenus en lieu sûr. La deuxième, bien sûr, est la réadaptation — est-elle rentable, est-elle efficace et disposons-nous de la forme de placement qui réussit le mieux? Je pense que c'est là le noeud de l'argument ici, le noeud des renseignements qui ont été fournis, et, en bout de ligne, il devra s'agir d'une décision particulière avec tous les renseignements locaux et...
Encore un autre commentaire a été fait par l'ancien solliciteur général au sujet des dépenses. Je vais livrer les vraies statistiques. Sous son administration, celle du gouvernement libéral, lorsqu'il était ministre, le montant a été réduit, passant de 42 892 557 $ à 22 438 557 $. Voilà quelles ont été les réductions d'ensemble dans les programmes d'emploi et d'employabilité. Je tenais simplement à préciser cela aux fins du procès-verbal.
L'autre chose que je mentionnerai est qu'il me semble assez incroyable que les gens d'en face soulignent et louangent un programme californien, avec des statistiques montrant un programme qui fonctionne vraiment très bien, alors que tous les commentaires antérieurs des libéraux membres de ce comité n'ont servi qu'à démolir le système correctionnel américain. C'est une suite d'événements incroyable que celle que nous vivons au comité aujourd'hui, en apprenant qu'il y a aux États-Unis un programme...
Peut-être que vous aimeriez réagir à la dernière question que j'aimerais vous poser. En bout de ligne, une partie de l'examen de l'élaboration d'un plan stratégique a pour objet de veiller à ce que tout soit bien considéré, à ce que l'argent des contribuables soit optimisé et à ce que la sécurité de nos citoyens soit à l'avant-scène dans l'ensemble des programmes correctionnels. Pourriez-vous s'il vous plaît nous dire si cette analyse exhaustive a ou non été faite avant la prise de ces décisions visant à s'écarter de ce modèle?