INDU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 22 octobre 2018
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bienvenue au Comité de l’industrie, qui poursuit son examen quinquennal, prévu par la loi, du droit d’auteur.
Nous accueillons aujourd’hui, de l’Institut national canadien pour les aveugles, M. Simpson, responsable des affaires publiques, et M. Greco, gestionnaire national de la défense des intérêts.
Nous accueillons également, du Conseil des Canadiens avec déficiences, John Rae, président du Comité de la politique sociale. Bienvenue.
De Toronto, où se tiennent de grandes élections aujourd’hui, nous accueillons Paul Novotny, compositeur à l’image, de la Guilde des compositeurs canadiens de musique à l’image, et Ari Posner, compositeur à l’écran.
Nous allons commencer par l’Institut national canadien pour les aveugles. Vous avez environ sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je m’appelle Thomas Simpson. Je suis le responsable des affaires publiques de l’INCA. Je suis accompagné aujourd’hui par mon collègue Lui Greco, directeur national de la défense des intérêts.
Nous nous sommes assurés d’avoir un mémoire en braille qui devrait être envoyé à chacun des membres du Comité. Certains d’entre vous se demandent sûrement pourquoi des organisations qui s'occupent de déficiences comparaissent pour parler de la Loi sur le droit d’auteur du Canada. J’espère que les prochaines minutes de notre exposé vous aideront à mieux comprendre comment il est possible de modifier la Loi sur le droit d’auteur du Canada pour éliminer les obstacles auxquels se heurtent les personnes ayant une déficience de lecture des imprimés.
Pour commencer, je vous propose un aperçu de l’INCA. L’INCA a vu le jour en 1918 pour aider les anciens combattants aveugles qui revenaient de la Première Guerre mondiale et les personnes blessées par l’explosion de Halifax. L’INCA offre des services de réadaptation après la perte de la vue ainsi que des services de soutien affectif et sociaux aux Canadiens aveugles ou atteints de cécité partielle. Il propose des programmes novateurs et des activités de sensibilisation efficaces qui permettent à ceux qui sont touchés par la cécité de réaliser leurs rêves et d’éliminer les obstacles à leur participation à la vie de la société.
Ce qui se passe en ce moment vous fera comprendre ce que c'est, avoir une déficience de lecture des imprimés et avoir du mal à obtenir des documents sur support de substitution, car il est très peu probable que vous puissiez lire le braille, tout comme les personnes aveugles ou malvoyantes sont incapables de lire les imprimés.
Malheureusement, il n’est pas possible d’acheter en librairie un livre sous une forme autre que l'imprimé.
Les Canadiens qui ont une déficience de lecture des imprimés, y compris la perte de la vue, doivent compter sur des documents en médias substituts. Cela comprend le braille, qui est exactement ce que vous avez sous les yeux. L'imprimé-braille dit bien ce dont il s'agit: de l'imprimé et du braille. Les parents d’enfants aveugles ou les enfants aveugles de parents voyants s'en servent pour pouvoir lire ensemble. Nous allons vous faire écouter un exemple pour vous montrer ce qu'est un discours numérisé accessible.
[Présentation audio]
Comme vous pouvez le constater, ce n’est pas exactement la voix la plus agréable, mais c’est ce sur quoi beaucoup d’entre nous doivent se rabattre parce qu'il n'y a pas autre chose.
Nous estimons que, au Canada, environ trois millions de personnes ont une incapacité quelconque qui les empêche de lire l'imprimé. Les documents accessibles sont rares. Nous comparaissons pour essayer d’apporter des changements à cet égard.
À l’échelle mondiale, les estimations du nombre de personnes qui ont une incapacité quelconque concordent avec les estimations globales de la perte de la vue.
Comme je viens de vous l’expliquer, le pourcentage de documents disponibles sur support de substitution se situe entre 5 et 7 % — nous ne sommes pas vraiment certains. Qu’est-ce que cela signifie, au fond?
Il y a quelques années, j’ai décidé de suivre un cours en gestion de projet. Je me suis inscrit au programme d’éducation permanente de l’université, et j’ai assez bien réussi, puisque j’ai eu un B+. J’ai payé mes droits au Project Management Institute, j’ai étudié, et quand est venu le moment de passer l’examen, je n’ai pas pu obtenir une forme accessible d’examen. J’ai écrit à l’auteur, qui m'a dit qu'il ne voulait rien savoir. J’ai écrit au Project Management Institute, dont le message a été le même. En fin de compte, on m’a refusé la possibilité d’obtenir un titre professionnel qui aurait favorisé ma carrière.
Selon l’Association of Canadian Publishers, plus de 10 000 livres paraissent au Canada chaque année, mais, aux termes des exigences actuelles du Canada en matière de droit d’auteur, les éditeurs ne sont pas tenus par la loi ou la réglementation de rendre ces livres accessibles. Même si Patrimoine canadien propose des programmes incitatifs, les éditeurs canadiens ne sont pas obligés de produire des oeuvres accessibles, même s’ils reçoivent des fonds publics.
L’INCA croit que tous les livres devraient être accessibles. Qu'il s'agisse de s’assurer que les applications qui facilitent l’accessibilité peuvent être utilisées simultanément avec les livres électroniques ou que les Canadiens ayant une perte de vision peuvent acheter des exemplaires en braille ou en version électronique en magasin, tous les livres publiés au Canada doivent être accessibles.
Nous recommandons que les éditeurs soient tenus par la loi de rendre leurs livres accessibles. Pour ce faire, nous recommandons l'ajout d’un paragraphe à l’article 3 de la Loi sur le droit d’auteur, le paragraphe 3(2), qui se lirait ainsi: « Aux fins de la présente loi, le droit d’auteur ne peut être accordé à une oeuvre littéraire à moins que la production de cette oeuvre ne soit faite sur un support de substitution pour les personnes qui ont une déficience de lecture des imprimés. » Vous pouvez suivre dans votre exemplaire en braille, si vous voulez des détails.
Nous croyons que cette modification sensée de la Loi sur le droit d’auteur ferait en sorte que, au Canada, tous les livres soient accessibles dès le départ. Étant donné l’abondance des moyens de produire des livres accessibles, comment se fait-il que l'accès aux livres constitue toujours un problème?
Pour une multitude de raisons, l’accès à la littérature est important pour les personnes handicapées. Il permet la pleine participation au tissu économique et culturel de la société. L’impossibilité d’accéder au contenu publié complique la réussite scolaire et professionnelle, comme je l’ai montré tout à l'heure.
Les générations futures devront livrer concurrence dans un monde au rythme plus rapide; par conséquent, à mesure que l'ère de l'information resserrera son emprise, il sera de plus en plus nécessaire, pour affronter la concurrence, d’avoir des livres accessibles dès leur publication.
Je vous remercie de m'avoir donné l’occasion de m’adresser à vous. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Nous allons passer au Conseil des Canadiens avec déficiences.
Monsieur Rae, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, comme on vient de le dire, je m’appelle John Rae. Je suis membre du conseil national du CCD et président de son comité de politique sociale.
Je comparais pour vous parler de la double question de l’accessibilité et de la convivialité. Je vous assure que ces deux concepts sont liés, mais non synonymes.
Pendant le temps qui m’est alloué, j’espère aborder cinq points.
Le premier porte sur l’accessibilité. Comme les intervenants précédents l’ont dit, beaucoup d'ouvrages publiés aujourd’hui ne sont pas accessibles pour des gens comme moi ou comme eux. Il faut que cela change. Même lorsque je reçois des rapports du gouvernement du Canada qui me sont envoyés par voie électronique, je me demande si, lorsque j’ouvrirai la pièce jointe, mon lecteur d’écran ne dira pas que le document est vide. Cela m'empoisonne la vie. Je me fais dire que j’ai reçu un document PDF qui n’est pas lisible par mon lecteur d’écran. Oui, cela arrive encore en 2018. Il faut que cela cesse.
J’ai travaillé avec vos éditeurs plus tôt cette année. J’espère que ce problème est réglé, mais je suis sceptique. Il y a bien sûr une façon simple de régler le problème, et c’est de cesser de publier des documents uniquement en format PDF. Après tout, c’est le format qui présente le plus de problèmes. Ou, si vous continuez d’insister pour l’utiliser, publiez simultanément une version en texte ou en HTML. Ils ont de meilleures chances d’être accessibles.
La loi devrait lier le Parlement en ce qui concerne la publication de documents. Tous vos documents doivent être publiés dans un format accessible.
Deuxième point: la convivialité. Je suis sûr que vous avez tous entendu certains de vos électeurs dire qu’il semble souvent que les documents gouvernementaux sont rédigés pour les avocats et seulement pour eux. J’ai constaté que certains d’entre vous sont avocats, et ce n'est pas mal. Je me suis engagé dans cette voie, mais je m'en suis détourné. Je suis un intervenant. Comme d’autres Canadiens ordinaires, j’ai aussi besoin d’avoir accès aux documents que vous publiez.
Il faudrait rédiger les rapports dans une langue plus simple et plus compréhensible, et peut-être même faire des textes plus courts. Cela aiderait aussi. Comme vous le savez, lorsqu’un nouveau document est publié, les médias s’intéressent aux réactions le jour de sa publication et peut-être aussi le lendemain. Avec beaucoup de chance et si le sujet prête à controverse, il peut être encore d'actualité deux jours plus tard. Des gens comme nous doivent pouvoir participer à ces échanges comme tous les autres Canadiens. C’est là l'enjeu de la convivialité. Les documents doivent être produits dans une langue simple.
Troisième point, le braille. Pour les aveugles, le braille est ce qui permet de lire. C’est essentiel. Aussi étrange que cela puisse paraître, en 2018, bien qu’il soit plus facile que jamais dans l’histoire de l’humanité de publier des documents en braille, il semble qu’on en produit de moins en moins. Nous pouvons discuter des raisons qui expliquent ce fait, mais nous verrons cela une autre fois.
Il faut promouvoir davantage le braille. Par le passé, le Conseil des Canadiens avec déficiences a recommandé que le gouvernement fédéral établisse un programme national de soutiens aux personnes handicapées. L’une de ces mesures pourrait consister à offrir l'afficheur braille dynamique aux personnes aveugles qui en ont besoin et qui le veulent, afin de faciliter l’accès au braille et d’encourager de plus en plus de gens à l'utiliser, parce que c’est vraiment grâce au braille que nous arrivons à lire.
Lorsque la Loi canadienne sur l’accessibilité a été présentée, j'en ai immédiatement demandé le texte en braille, parce que, comme vous le savez, chaque virgule, chaque point-virgule a son importance. J’ai dit que j’en aurais peut-être besoin lorsque j’irais aux réunions pour en parler. Eh bien, j’ai dû justifier ma demande. Il ne suffisait pas que je veuille cette version. Il a fallu que j'explique aussi pourquoi j’en avais besoin. Je suis heureux de l’avoir reçue, et elle m’a été utile.
Le quatrième point concerne les éditeurs. J'appuie le point de vue que M. Simpson a exprimé tout à l'heure. En effet, le CCD croit qu'il faut effectivement tenir compte de la problématique des déficiences, notamment dans le projet de loi C-81, mais on pourrait tout aussi bien en tenir compte dans la Loi sur le droit d’auteur. On pourrait priver de toute participation fédérale les programmes, politiques, contrats ou subventions qui contribueraient à perpétuer les obstacles ou à en créer de nouveaux. Cela comprend les subventions ou les contributions accordées aux éditeurs.
Le cinquième et dernier point concerne toute la participation du secteur de l’édition. Plus tôt cette année, le Bureau de la condition des personnes handicapées a réuni un large éventail de représentants: éditeurs, consommateurs et producteurs. Je crois que beaucoup des bons intervenants ont été invités à la table. L’objectif était de produire un plan quinquennal pour favoriser la production de documents sur support de substitution et leur plus grande disponibilité.
Nous nous sommes rencontrés la dernière fois en mai. Jusqu’à maintenant, aucune trace de plan. La première de ces cinq années passe à toute vitesse. Pourtant, aucun plan n’a été publié. Vous pourriez peut-être nous aider à l'obtenir. Ce serait utile. Les éditeurs doivent participer davantage. Si cela suppose une aide initiale de Patrimoine Canada pour les aider à démarrer ou à accélérer leur travail de production de documents accessibles, alors soit. Je suis d’accord. Les éditeurs doivent faire un meilleur travail, non seulement en produisant des documents, mais en les mettant à la disposition des bibliothèques publiques et en les proposant à la vente directe aux consommateurs.
Merci de m'avoir donné l’occasion de venir vous parler de ces deux questions que sont l’accessibilité et la convivialité. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à Toronto pour entendre les représentants de la Guilde des compositeurs canadiens de musique à l’image.
Monsieur Novotny, vous avez sept minutes.
Merci beaucoup. Nous sommes très heureux de comparaître.
Ari et moi représentons la Guilde des compositeurs canadiens de musique à l’image. Ces compositeurs créent de la musique originale pour le cinéma, la télévision, le documentaire et d’autres médias visuels, et elle est exportée dans le monde entier. Vous ne connaissez peut-être pas nos noms, mais il se peut très bien que vous connaissiez notre travail.
J’ai surtout travaillé pour la télévision. Je vais parler seulement de deux émissions qui ne sont pas sans intérêt dans la discussion. L’une était une émission dont j'ai composé la musique avec un de mes collègues ici, à Toronto, appelée Flashpoint, une dramatique en milieu policier qui a marqué le Canada parce qu’elle a ouvert la porte toute grande aux États-Unis à certains égards. Elle a été vendue à la CBS et diffusée là-bas avec beaucoup de succès. C’est un exemple d’une émission du XXe siècle diffusée par voie hertzienne. À l’heure actuelle, je travaille à une émission qui obéit à un modèle différent. Elle s'intitule Anne, et c'est une version moderne de l'oeuvre de Lucy Maud Montgomery, Anne... la maison aux pignons verts. Au Canada, Anne est une émission diffusée par la CBC, mais dans le reste du monde, soit dans 190 pays, elle est proposée par le géant de la diffusion en continu Netflix.
J’ai eu la chance de travailler avec George Stroumboulopoulos pour créer la musique de l’émission The Hour de la CBC. J’ai aussi composé la musique de CBC News Now, sur Newsworld. De plus, j’ai fait la musique de l’émission The National de la CBC
Si nous comparaissons aujourd’hui, c’est pour vous parler un peu plus du dilemme qui est le nôtre et de la situation précise qui est la nôtre dans notre écosystème créatif.
Les compositeurs à l’image sont les premiers propriétaires de leurs droits d’auteur. Comme les scénaristes, ces compositeurs sont reconnus comme des créateurs clés. Leurs droits d’auteur sur la musique sont de deux ordres: un droit d'exécution et un droit de reproduction. Ces droits sont assortis d’un ensemble distinct de droits d’auteur sur les films. Lorsque notre musique est associée à l’image, elle est distribuée pour diffusion aux niveaux national et international, ce qui donne une rémunération grâce au droit d’auteur. Elle est dérivée des ventes publicitaires du radiodiffuseur. Notre rémunération est régie par la politique sur le droit d’auteur et non par nous. La SOCAN perçoit nos droits en notre nom dans le monde entier.
L’argent des droits de représentation et de reproduction est calculé comme un pourcentage des ventes trimestrielles de publicité. La politique du droit d’auteur du XXe siècle pour les compositeurs à l’image est fondée sur les ventes de publicité à la diffusion. Je voudrais demander à Ari comment cela fonctionne pour lui au XXIe siècle.
Je comparais pour vous dire que cela ne fonctionne pas bien jusqu’à maintenant, et Anne en est un bon exemple. Il s’agit d’une émission dont Netflix a fait rapport aux producteurs de l’émission. J’ajouterais que Netflix ne communique pas beaucoup de données, mais l'entreprise a révélé aux producteurs que l’émission était au quatrième rang des séries les plus regardées en rafale sur le réseau en 2017.
C’est une statistique assez stupéfiante. Cela signifie que des millions et des millions de téléspectateurs regardent cette émission partout dans le monde. Ils la regardent rapidement. Anne est sur le point d'entamer sa troisième saison l’an prochain, et je peux vous dire que, si je fais une comparaison avec la rémunération que j’ai obtenue pour une émission comme Flashpoint, qui a été diffusée par voie hertzienne, il n’est pas exagéré de dire que j’ai constaté une baisse de 95 % des revenus.
J’ai composé récemment de la musique pour un film intitulé Mishka, réalisé par la cinéaste canadienne Cleo Tellier. Il y a eu 22,5 millions de visionnements sur YouTube depuis le 22 avril 2018. Le film rapporte environ 3 000 $ par mois en revenus publicitaires sur YouTube. Toutefois, au XXIe siècle, il n’y a aucun lien entre ces revenus publicitaires et les droits de représentation ou de reproduction.
À ce stade-ci, Ari et moi nous demandons tous les deux ce qu'il est advenu de nos redevances pour représentation publique et reproduction. La simple vérité, c’est qu'elles sont devenues insignifiantes, parce que l’argent est passé à l’abonnement. Il faut que la politique sur le droit d’auteur soit bonifiée de façon à rapporter assez d'argent, à partir des abonnements, pour faire vivre notre secteur au XXIe siècle.
Ce qui s’est produit, c’est qu’un écart de valeur est apparu. Nous voudrions que les membres du Comité et tous les Canadiens comprennent exactement ce qu'est cet écart de valeur. Je vais vous le dire tout de suite.
En 2018, Netflix a déclaré un bénéfice net de 290 millions de dollars pour le premier trimestre, soit plus de profits en trois mois que le géant de la diffusion en continu n'en a réalisé dans toute l’année 2016. Si l’entreprise atteint son objectif de profit de 358 millions de dollars pour le deuxième trimestre, elle gagnera plus au premier semestre de 2018 qu’au cours de toute l’année 2017, exercice pour lequel elle a déclaré un bénéfice annuel de 585,9 millions de dollars.
Au cours de la même période, Ari Posner a connu une baisse de 95 % de la rémunération provenant des droits sur l'exécution en public et sur la reproduction d'une série télé en libre-service et regardée en rafale qui est au quatrième rang des plus regardées sur Netflix dans 191 pays.
Ari, il semble que vous et votre famille subventionniez Netflix. Que se passe-t-il dans votre ménage?
Soyons clairs, il ne s’agit pas seulement de moi. Je suis un exemple de quelqu’un qui est en milieu de carrière. J’aurai 48 ans cette année et j’ai trois jeunes enfants. J’ai une hypothèque. J'ai un mode de vie plutôt de base pour la classe moyenne. J'ai pu me débrouiller grâce à mes droits de propriété intellectuelle sur des émissions auxquelles j’ai travaillé par le passé.
À ce stade-ci, je fais le même travail pour des émissions comme Anne, qui est plus populaire que tout ce à quoi j’ai travaillé par le passé, et pourtant la rémunération n’est pas au rendez-vous. Voilà l’écart de valeur dont je veux parler.
La seule organisation qui peut vraiment aider quelqu’un comme moi, mes collègues et mes pairs, c’est une société comme la SOCAN qui nous défend et qui essaie de récupérer les redevances pour l'exécution et la reproduction de nos oeuvres.
À l’heure actuelle, les géants de la diffusion en continu, les grandes entreprises de technologie comme Amazon, Hulus et Netflix, n’ont aucune transparence, et ils ne semblent pas en avoir besoin. J'ignore pourquoi.
Nous allons terminer très rapidement. Nous aimerions demander trois choses.
La Guilde veut participer davantage à l'élaboration d’une politique de droit d’auteur équitable et techno-morale pour le XXIe siècle afin de respecter chaque élément de la chaîne de valeur des médias sur écran, y compris le consommateur.
Nous voulons que le Canada adopte des principes conformes à ceux des autres pays et des unions économiques qui protègent le droit d’auteur des créateurs. On en trouve un exemple dans les articles 11 et 13 de l’Union européenne, qui reprennent des idées semblables à celles des recommandations de Music Canada et de la CMPC. Cela dit, nous voulons vous encourager à appuyer ces recommandations.
Ari va terminer en énumérant quelques principes qui, selon nous, sont essentiels à la politique techno-morale du droit d’auteur au XXIe siècle.
Je vais vous lire une citation par laquelle je voudrais terminer. J’ai également lu cela au Comité du patrimoine. J.F.K. a dit: « La vie des arts, loin d’être une interruption ou une distraction dans la vie d’une nation, est près du cœur de ce qui constitue une nation et un test de la qualité de sa civilisation. »
Je souhaite que tous ceux qui sont ici présents réfléchissent au fait que, si l'État ne peut pas intervenir pour renforcer les lois sur le droit d’auteur afin de protéger les droits des créateurs, nous aurons un pays beaucoup moins riche, parce que rien n'encouragera les carrières dans le domaine artistique.
Merci beaucoup de m’avoir écouté. Je suis désolé d’avoir pris un peu trop de temps. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup à tous de vos exposés.
Normalement, je présente les députés sans donner de précisions au moment où ils posent des questions, mais comme certains témoins ont une déficience visuelle, je vais aussi indiquer leur parti, pour que les témoins sachent à quoi s'en tenir lorsqu'ils entendent les questions.
Nous allons commencer par M. Jowhari, du Parti libéral.
Vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.
Je partagerai mon temps de parole avec le député Longfield.
Je vais m'adresser d'abord à la Guilde des compositeurs canadiens de musique à l’image. Monsieur Novotny ou monsieur Posner pourraient l’un ou l’autre répondre à cette question, qui nous ramène à votre témoignage du 25 septembre, au Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
Vous avez parlé de la SOCAN et dit qu'elle « n'a aucun moyen d'ouvrir les portes de Netflix », que l'entreprise « ne lui donne pas les données dont elle a besoin pour compiler le nombre de visionnements afin de créer un modèle de rémunération approprié ». Vous avez fait des réflexions semblables au sujet de YouTube. Vous avez parlé de Netflix et de YouTube dans votre témoignage.
Pouvez-vous nous dire au juste quel genre de données il faut recueillir auprès de ces deux entreprises pour être en mesure de verser une juste rémunération? Les chiffres que vous avez donnés sont astronomiques. Je veux parler des résultats qu’elles vont obtenir d'ici le milieu de l'exercice, comparés à ceux de l’an dernier. De quelles données avez-vous besoin pour vous assurer d’obtenir votre juste part?
Ari et moi sommes tous deux compositeurs. Un représentant de la SOCAN serait mieux placé pour vous répondre. Honnêtement, je ne le sais pas.
Vous parlez de choses très techniques. Ce n’est pas vraiment à nous de parler au nom de la SOCAN, qui est là pour nous défendre.
Dans votre secteur, qui négocie les licences et la rémunération avec des organisations comme Netflix et YouTube?
La SOCAN. Seules les organisations de défense des droits de représentation ou d'exécution, comme la SOCAN et les organisations semblables dans le monde, mènent ces négociations. Toutefois, il n'y a aucune transparence entre les territoires. Netflix n’a pas à révéler l’entente conclue avec tel pays par opposition à tel autre. La SOCAN nous dit qu’elle a besoin de plus de données sur le nombre réel de visionnements et de téléchargements pour pouvoir calculer la popularité des diverses émissions. C’est ce qu’on nous a expliqué.
C’est là le message de la SOCAN. Ce n’est pas aussi clair et simple que dans le modèle de diffusion par voie hertzienne: « Voici le montant de nos revenus publicitaires et voici le pourcentage que le gouvernement exige en fonction de sa grille. » Et voilà.
Il me reste une trentaine de secondes. Je reviens à vous. Selon vous, quelles données devrait-on recueillir pour vous assurer une rémunération correcte?
Comme Paul l’a dit, nous devrions consulter à ce sujet notre organisation qui s'occupe des droits d'exécution. Elle pourrait vous donner une idée exacte de la situation.
Je vais d'abord poser quelques questions à M. Greco, de l’INCA. J’ai fait du bénévolat pendant plusieurs années à l’INCA, à Winnipeg, dans les années 1970, je crains de le dire. La technologie était bien différente à l’époque. Nous travaillions avec des livres qui étaient enregistrés sur des cassettes ou sur des bandes de magnétophone.
Je me demande, à propos du projet de loi... Nous avons adhéré au Traité de Marrakech. Nous avons donné le feu vert pour que les documents soient disponibles sur des supports de substitution, mais on dirait que ce traité n'est pas respecté par ceux qui mettent ces supports à votre disposition.
Permettez-moi de recourir à une analogie pour répondre à cette question.
Marrakech a ouvert le robinet, mais l’eau ne coule pas.
De nos jours, il est incroyablement facile de produire du braille. La technologie est très différente des cassettes à quatre pistes. Je me souviens de ces bandes.
J’avais un manuel de calcul à l’université qui se composait de 36 cassettes à vitesse lente à quatre pistes. Aujourd’hui, tout cela est largement dépassé à cause des progrès de la technologie. Ce serait considéré comme digne de l'ère des dinosaures.
Soyons honnêtes, si le Traité de Marrakech est une réussite, il y aura plus de documents en médias substituts offerts aux Canadiens, puisque ce traité exige un partage international. Cela vaut non seulement pour les documents en anglais et en français. Comme nous sommes une société multiculturelle et que l’immigration fait évoluer rapidement notre paysage, nous pourrons obtenir des livres produits dans d’autres langues à l’étranger.
Je pense aussi à votre exemple de planification de carrière. En consultant votre site Web, j'ai vu que le projet Aspiro contient une ressource pour l’emploi qui a été élaborée en partenariat avec la World Blind Union et financée par la Fondation Trillium de l’Ontario. Les outils sont peut-être là pour développer les compétences ou les mettre en commun, mais il semble y avoir un blocage, même pour la mise à l'essai.
C’est un peu exaspérant. Nous travaillons à un projet de loi et nous pensons faire quelque chose de bon. On dirait qu'il faut donner plus de mordant à la loi pour ce qui est du financement.
Je pense, comme M. Simpson l’a dit à la fin de nos points de discussion, que si les éditeurs comptent sur la protection que leur accorde le droit d’auteur sous quelque forme que ce soit, alors on devrait s’attendre à ce qu’ils produisent leurs livres sur des supports de substitution dès le départ. Nous avons largement dépassé l’époque où il fallait que chaque livre accessible soit lu en studio par un être humain. Il existe un logiciel gratuit qui produira des livres de meilleure qualité que ce que vous avez entendu. La technique s’améliore, elle s’accélère et elle est gratuite. On ne peut pas faire meilleur marché.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d’avoir pris le temps de nous faire profiter de leurs compétences aujourd’hui.
Je commence par l’INCA. Il s'agit du braille.
Premièrement, est-ce que c’est en français? Est-ce en anglais?
Deuxièmement, combien de pages cela ferait-il...
[Français]
en français ou en anglais,
[Traduction]
... si le document était soumis? Je voudrais avoir une idée de ce que représente la note d’information que vous avez fournie aujourd’hui.
Merci. C’est une façon très efficace de communiquer votre message.
La Loi sur le droit d’auteur utilise l'expression « déficience perceptuelle ». L’INCA ou le Conseil des Canadiens avec déficiences croient-ils que la définition est suffisamment large pour englober tous ceux qui pourraient avoir besoin d'exceptions aux termes de la loi?
La Loi sur le droit d’auteur contient également une définition de « déficience de lecture des imprimés » qui est probablement aussi bonne ou meilleure que celle de « déficience perceptuelle ». C’est pourquoi nous avons recommandé de continuer à utiliser l’expression « déficience de lecture des imprimés ».
J’ai toujours pensé que l’expression « déficience perceptuelle » dans ce contexte est plutôt étrange. « Déficience de lecture des imprimés » me semble préférable. Pour revenir au Traité de Marrakech, cela pourrait faciliter le partage entre pays des documents produits, mais il reste que le problème, c'est d’amener les éditeurs à produire davantage de documents sur support de substitution. C’est là que la loi doit mieux encourager les éditeurs à produire des documents accessibles dès le départ.
Vous avez parlé de la Loi canadienne sur l’accessibilité qui a été déposée récemment. Selon vous, quelle expression devrait-on y employer? D’après ce que j’ai lu, on n'y parle pas de « déficience perceptuelle ».
C’est vrai. Je crois que non. Il y a une définition assez large de l’invalidité dans le projet de loi C-81. Beaucoup d’entre nous disent que le projet de loi pourrait être considérablement renforcé au moyen d’amendements et nous espérons que le Comité des ressources humaines jugera bon de le faire.
Monsieur Rae, en ce qui concerne ce texte législatif, il est utile pour tous, sans distinction aucune, qu'un libellé semblable soit utilisé dans les différentes lois. Seriez-vous d'accord pour qu'on utilise dans la Loi sur le droit d'auteur une définition semblable à celle qui se trouve dans la Loi sur l'accessibilité?
Je suis d’accord avec vous pour dire qu'il serait utile d'avoir une certaine cohérence dans les définitions.
L'expression « déficience perceptuelle » exclurait les personnes ayant une déficience physique qui les empêche de manipuler un livre, par exemple la SLA et d’autres maladies neurologiques qui constitueraient un obstacle. Je ne pense pas que nous ayons vraiment eu l’occasion de décider si « déficience perceptuelle » ou « déficience de lecture des imprimés » serait la formulation idéale, mais nous préconisons fortement, et mon collègue me corrigera si je me trompe, un libellé inclusif.
Le libellé ne doit exclure aucune personne handicapée qui, pour une raison ou une autre, à cause d’un handicap physique, perceptuel ou cognitif, ce qui est la même chose, ne peut aller en librairie acheter un livre.
Merci de votre réponse. Je vous sais gré de l'éclairage que vous nous apportez.
J’ai aussi entendu des défenseurs des personnes handicapées. Dans ma région, par exemple, à Kelowna, nous avons Michelle Hewitt, qui s'occupe des problèmes locaux d’accessibilité. Elle m’a dit qu’elle et bien des gens avec qui elle travaille ne sont souvent pas au courant des nombreuses exemptions prévues dans la Loi sur le droit d’auteur pour les personnes handicapées, qu’ils n'en soupçonnent même pas l'existence.
L’un ou l’autre des groupes a-t-il fait la même constatation de façon constante également, à savoir que, même s’il y a des exemptions prévues dans la Loi sur le droit d’auteur, on n'est pas nécessairement au courant?
Pour être honnête, je suppose que beaucoup de Canadiens ne connaissent probablement pas les subtilités de la Loi sur le droit d’auteur, alors les limites sont probablement un peu problématiques. Notre organisation ne s’est pas penchée sur ces exceptions. Comme nous l’avons dit, nous mettons principalement l’accent sur le partage. Si un producteur obtient un droit d’auteur, il doit s’assurer que l'oeuvre littéraire est proposée sur des supports de substitution.
Les établissements d'enseignement, les bibliothèques et les maisons de production comme celle qu’exploite l’INCA — et l’Université Simon Fraser a eu et a probablement toujours une installation de production —, tous ces intervenants savent fort bien... Nous sommes bien conscients des subtilités, de ce que nous sommes autorisés à faire ou non et de la démarcation qui existe entre les deux.
Quant aux consommateurs... Quand je rentre en fin de journée et que je veux avoir accès à des documents, tout ce que je veux savoir, c'est ce qui est disponible. Où puis-je l’obtenir et quels obstacles dois-je surmonter pour y avoir accès?
Je présume que les producteurs sont au courant. J’ai vu des éditeurs qui étaient au courant. Comme Lui vient de le dire, au bout du compte, notre communauté veut avoir accès à plus de documents à lire. C’est ce que nous recherchons. Par conséquent, notre travail au CCD a surtout consisté à amener les éditeurs à participer davantage à la production d'un plus grand nombre de documents accessibles.
Vous diriez donc qu’il y en a pas mal qui connaissent les exemptions, mais le grand public et ceux qui travaillent avec des handicaps ne sont pas aussi bien renseignés. Est-ce exact?
Le gouvernement devrait-il jouer un rôle à cet égard, à part mettre en place la Loi sur le droit d’auteur et ces exemptions?
Cela ne peut certainement pas nuire de faire mieux connaître aux Canadiens ce que dit la loi et ce qu’elle prévoit. Beaucoup de gens qui produisent ces documents, qu’il s’agisse de producteurs de médias substituts ou de représentants de collèges et d’universités, sont sans doute raisonnablement renseignés, mais faire mieux connaître la loi, cela ne peut pas nuire.
Je reviens au cas de M. Greco qui a été incapable de faire un examen. Le gouvernement a-t-il un rôle à jouer?
Bien sûr. Mais dans le contexte actuel, vous pouvez le crier sur les toits. Dans mon cas, avec le Project Management Institute, à qui j’ai payé des droits pour me présenter à un examen, on a choisi de ne pas se conformer sous le faux prétexte que ce serait trop onéreux et on a simplement fait fi de l'obligation morale de prendre des mesures d'adaptation pour moi. Je ne vois pas comment le gouvernement ou un établissement d'enseignement pourrait y faire quoi que ce soit.
J’avais besoin d’une contrainte, d’une sorte de mandat ou d’obligation pour pouvoir dire à ces gens-là: voici comment vous pouvez me fournir les ressources, en tant que membre en règle, sous une forme qui me permette de réussir. Vous en avez l'obligation, et voici la disposition législative qui le dit.
Honnêtement, dans un monde idéal, ce genre de discussion n'aurait pas lieu d'être. Je devrais pouvoir dire simplement que je suis aveugle et que j'ai besoin des documents sur support de substitution — texte en braille, texte électronique, DAISY, peu importe — et l’éditeur, ou dans mon cas, le PMI, en tant que producteur, devrait fournir le nécessaire. J’ai payé mes droits, j’ai respecté les exigences, j’ai franchi toutes les étapes nécessaires, puis je me suis heurté à un mur. Ce n’est pas juste. Ce n’est pas équitable.
Il serait utile d’accorder plus de ressources aux commissions des droits de la personne de partout au Canada afin qu’elles puissent mieux informer les Canadiens au sujet de l’obligation de prendre des mesures d’adaptation et des obligations juridiques qui, à mon avis, existent déjà dans les lois sur les droits de la personne.
C’est pourquoi nous sommes si nombreux à nous adresser à ces commissions et c'est pourquoi plus de 50 % des cas qui leur sont soumis chaque année relèvent des distinctions illicites fondées sur les déficiences. Si les décisions rendues étaient plus sévères et si on renseignait davantage le grand public, peut-être pourrions-nous faire diminuer le nombre de plaintes.
Merci, monsieur le président.
Lorsque je travaillais pour vrai, j’étais spécialiste de l’emploi pour les personnes handicapées au sein de l'organisme Community Living Mississauga et à l’Association for Persons with Physical Disabilities of Windsor and Essex County, et je siégeais au conseil d’administration de l’Institut national canadien pour les aveugles, l'INCA.
Il est frustrant de devoir continuer à prouver que l’argent des contribuables doit servir à des programmes fondamentaux auxquels ils ont droit. Je vous donnerai une carte plus tard, mais je vais vous donner un exemple des obstacles que nous créons. J’ai une carte en braille de la Chambre des communes que j’utilise, et j’ai le droit de l’avoir, mais les membres de mon personnel n'ont pas ce droit. Même si je pouvais faire imprimer cette carte professionnelle en braille, notre politique publique, que je n’ai jamais pu faire changer dans mes 16 ans passés ici, n'accorde pas le même droit aux membres de mon personnel, malgré la facilité avec laquelle cela pourrait être changé. C’est le genre de choses que nous continuons de voir.
J’aimerais parler un peu de votre amendement, le paragraphe 3(2), et de l’origine de votre raisonnement. Je pense que c’est important. Le gouvernement et les parrains investisseurs ont la lourde responsabilité d’être accessibles. Je peux vous dire encore une fois que le taux de chômage se chiffre à 50 % chez les personnes handicapées, ce qui est un problème chronique, un problème systémique dans notre société, et en plus, si nous n’avons pas ces documents, il y a non seulement l’exclusion sociale du milieu de travail, mais aussi l’exclusion socioculturelle.
Veuillez expliquer un peu plus en détail le paragraphe 3(2) et nous dire comment il rend le texte législatif plus proactif. Certains prétendent que des portes accessibles ou des toilettes accessibles coûtent trop cher, mais on peut s’en servir comme exemple pour dire que l’investissement fait en sorte que la société est ainsi mieux adaptée à tous.
L’INCA a récemment réalisé une étude, que nous avons également commandée à l’échelle internationale, pour comparer les niveaux d’emploi des personnes ayant une perte de vision. Nos conclusions, que nous espérons publier sous peu, indiquent qu’au Canada, les personnes aveugles ou ayant une déficience visuelle ont un taux d’emploi à temps plein de 28 %. La moitié de ces travailleurs gagnent moins de 20 000 $ par année. Il existe donc déjà le problème de l’éducation. Ensuite, il est également assez difficile d’essayer de faire des études postsecondaires, d’obtenir les livres et les documents dans un format accessible, et c'est un obstacle. Essayer d’être sur un pied d’égalité sur le plan culturel — vous savez comment; avoir le dernier livre de Harry Potter; celui de Stephen King; se comparer avec le reste de la société — c’est également difficile.
Il y a tellement d’obstacles à l’accès à un livre qu’on ne peut pas se comparer à ses pairs voyants et aux autres citoyens.
Lui, voulez-vous ajouter quelque chose?
Je dirais qu’il faut remplacer l'expression « se comparer » par « concurrencer ». Les étagères des librairies sont pleines de livres sur le leadership, sur la façon de gérer sa carrière, de progresser, de rédiger son curriculum vitae, de tirer parti du réseautage social pour acquérir des compétences en recherche d’emploi. Nous sommes tous entre deux emplois. L’époque où l'on passait toute sa carrière à occuper un seul emploi est révolue depuis longtemps. Je suis en fin de carrière. J'en ai plus de fait qu'il m'en reste à faire. En réalité, j’ai très peu d’années devant moi, probablement encore 10 ou 15 ans, mais au cours de ces 10 ou 15 années, que ce soit avec l’INCA ou avec quelqu’un d’autre, je dois être concurrentiel. J’ai besoin des compétences, des connaissances et des outils nécessaires pour être en mesure de concurrencer M. Simpson, M. Rae ou nos deux collègues de Toronto pour les occasions qui se présenteront. Je ne les ai pas à l'heure actuelle.
Notre paragraphe 3(2) fera en sorte que si un droit d’auteur est accordé pour une oeuvre littéraire, cette oeuvre doit être publiée dans un format accessible.
Bon nombre de personnes handicapées sont des contribuables, et ont donc à ce titre contribué au financement de certains programmes et services. Je ne peux pas vous dire à combien d’annonces j’ai assisté, au fil des ans, qui étaient faites dans un endroit inaccessible. L'on annonce un projet dont le financement public se chiffre en millions de dollars, et on le fait dans une salle où il n'y a même pas de portes accessibles ou d’autres aides de cette nature. Les choses changent, mais la réalité, c’est qu'il nous faut adopter une approche plus affirmative, plus directe.
Monsieur Rae, avez-vous quelque chose à ajouter?
Je suis d’accord avec tout ce que vous dites. Nous espérons que la Loi canadienne sur l’accessibilité aura un effet positif sur nos vies. Je pense qu’il faut la renforcer, mais nous sommes ravis que le gouvernement l’ait présentée. Je pense qu’il serait également utile que les commissions des droits de la personne soient plus sévères. À l’heure actuelle, comme toutes ces petites récompenses ne sont pas suffisantes pour dissuader les organisations de cesser de faire de la discrimination contre les personnes handicapées, ou d’autres groupes d’ailleurs, il faudrait peut-être changer cela également.
Ce serait certainement beaucoup plus avantageux, un peu comme dans l’exemple que j’ai donné des toilettes accessibles, des portes accessibles et les mécanismes qui les sous-tendent, parce qu’à l’heure actuelle, pour ce qui est des ouvrages littéraires et en braille et d’autres choses, nous en sommes encore au point où nous devons continuer de sensibiliser les gens et presque les supplier d’inclure ces aides, au lieu que cela fasse partie du processus. Si nous devions encore faire la tournée de nos édifices gouvernementaux et de différents endroits pour réclamer des toilettes accessibles et des portes accessibles, ce serait une grande perte d’énergie, beaucoup de temps perdu. Soit dit en passant, ces mesures améliorent le milieu de travail pour tous les autres, car elles réduisent le nombre d’accidents de travail et ainsi de suite.
Monsieur Greco, votre remarque pour ce qui est d'être concurrentiel est très judicieuse parce que ce n’est souvent même pas mentionné. Je dirais que les Brick Books pour les personnes ayant la vue faible, qui ont été offerts par de nombreuses bibliothèques à l'échelle du pays ont contribué à cette inclusion, mais il reste du travail à faire.
Je dirais à ce sujet, également, qu'à mesure que notre société vieillit et que les gens vivent plus longtemps, la plupart d’entre vous dans cette salle souffriront probablement d’une perte de la vue qui vous affectera dans une certaine mesure, de sorte qu’à un moment donné, vous pourriez aussi être confronté à un obstacle lorsque vous essaierez d’avoir accès à des oeuvres imprimées si rien n'est fait d'ici là.
Je vous dirais également que le faible taux d'emploi dont vous avez parlé a un effet négatif supplémentaire. Outre le dénuement économique, le fait que nous ne soyons pas représentés en nombre suffisant signifie que beaucoup d’organisations n’ont pas d’expertise interne en matière d’invalidité.
Si nous augmentions notre représentation dans les centres décisionnels qui ont une incidence sur la vie de tous les Canadiens, dans les conseils d’administration, au Parlement, dans les salles de nouvelles de notre pays, nous réduirions la mesure dans laquelle nos problèmes sont oubliés en raison de notre absence ou de notre inaction.
Nous voulons simplement être plus nombreux à participer à la vie de notre société.
Merci beaucoup.
Nous revenons maintenant au Parti libéral. Monsieur David Graham, vous avez sept minutes.
Voici un lecteur de livres Victor. On y fait jouer un livre DAISY, qui est un livre audio navigable.
Existe-t-il une technologie, peu importe son coût actuel, qui vous permet de pointer un bout de papier pour le faire lire?
Pour amener le texte à...
Une voix: La ROC, la reconnaissance optique de caractères.
M. David de Burgh Graham: La ROC, merci — au niveau suivant, cette technologie existe-t-elle ou est-elle en développement? En avons-nous entendu parler?
Oui, elle existe. Il y a des programmes gratuits, notamment Seeing AI, une application d’intelligence artificielle que Microsoft a créée. C’est une plateforme de développement de prototypes qu’ils utilisent pour peaufiner l’intelligence artificielle.
Il y a quelques années, la National Federation of the Blind, en partenariat avec Ray Kurzweil — je suis sûr que vous en avez tous entendu parler —, a mis à la disposition du public une application appelée KNFB Reader. La dernière fois que j’ai vérifié — et je vous prie de ne pas me citer —, c’était autour de 100 $. Il s’agissait d’un dispositif de reconnaissance optique de caractères très robuste avec lequel on pouvait littéralement pointer un bout de papier — un menu, un journal, peu importe — et qui permettait de numériser un document assez bien pour le rendre accessible.
J’ai l’application Seeing AI sur mon téléphone. C’est formidable. J’ai essayé de l’utiliser dans la chambre d’hôtel hier soir pour savoir s’il s’agissait de shampoing ou de lotion corporelle, pas exactement du matériel en format final, mais cela vous donne une idée de... J’espère ne pas avoir utilisé... quoi qu’il en soit, cela n’a pas d’importance.
Des voix: Ha, ha!
M. Lui Greco: Nous rions, mais ce sont des problèmes réels. Vous allez dans une chambre d’hôtel et il y a un déluge de dépliants sur votre lit. Vous montez dans un avion et on vous encourage à lire la fiche de sécurité. Vous allez à l’université et on vous demande de choisir vos cours à partir d’un calendrier, et ainsi de suite.
Personnellement, je n’ai pas utilisé le KNFB Reader. Je connais toutefois beaucoup de gens qui l’utilisent, et ils l’adorent. Cela leur a ouvert de grandes portes. Ces aides vont assurément dans la bonne direction.
Combien doit payer en frais supplémentaires quelqu’un qui a une déficience visuelle ou qui est carrément aveugle, tout au long de sa vie? Est-il possible de quantifier cela pour nous?
Pour un lecteur de livres parlants comme celui de Thomas, une entreprise appelée HumanWare, juste à l’extérieur de Montréal, vend ces appareils à l’échelle internationale pour 350 à 400 $ chacun.
Le KNFB Reader coûtait environ 100 $ la dernière fois que j’ai vérifié. Certaines des machines de lecture les plus avancées, plus près des lecteurs de télévision, dans lesquelles vous placez du matériel imprimé sous une caméra pour le faire agrandir, selon la vue de la personne, coûtent des milliers de dollars. Les appareils d’affichage en braille dont M. Rae a parlé, les afficheurs braille dynamiques, coûtent plus de 3 500 $.
Des prototypes arrivent sur le marché. L’INCA a participé à un projet appelé Orbit Reader. Il arrive tout juste sur le marché et se vend 500 $, mais c’est encore la première génération. Pensez aux micro-ondes; les premiers essais étaient maladroits, mais les fours fonctionnaient.
Les choses s’amélioreront. Au fur et à mesure que ces appareils seront mis au point, ils s’amélioreront, ils coûteront moins cher et en feront davantage.
Mais les coûts dont parlait M. Greco sont réels, et c’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons besoin d’un programme national pour financer l’équipement technique. Si, comme moi, vous vivez en Ontario, le PAAF couvre les trois quarts du coût d’un bon nombre d'appareils. Si je déménage soudainement à l’extérieur de l’Ontario, je n’y ai plus accès. Cela devrait être disponible partout au pays.
D’après ce que je comprends, vous avez le droit de contourner une mesure technique de protection en cas de déficience visuelle, alors vous pouvez l’utiliser. Si un appareil est protégé, vous pouvez légalement éliminer cette protection. Quelles sont les ressources nécessaires pour cela? Si vous avez un appareil qui comporte des verrous numériques, que faut-il faire pour contourner ce problème?
C’est impossible. C’est impossible, parce qu’à moins de vouloir inverser la conception d’un produit DRM, on court le risque de contrevenir non seulement à la loi, même si on a le droit de le faire à des fins d’accessibilité... Une fois que vous commencez à trafiquer des fichiers électroniques, vous courez le risque de compromettre le contenu, ce qui, bien honnêtement, me semble plus grave que le risque de vous mettre à dos ou de contrarier un éditeur parce que vous avez violé son droit d’auteur.
Bien sûr. Je vais m’adresser à MM. Novotny et Posner.
Votre argument repose essentiellement sur le fait que vous aviez un système. Il y avait un écosystème dans lequel votre contribution était évaluée au moyen de paiements recueillis par la SOCAN, mais selon un modèle qui ne représentait pas la réalité. Nous sommes passés de la publicité à l’abonnement comme source de revenus, mais le suivi de la publicité n’est pas très bon.
Hypothétiquement, pensez-vous avoir suffisamment de poids dans les négociations pour dire qu’il serait préférable pour vous d’exiger des frais fixes plus élevés au départ? Serait-ce une solution possible?
Je peux vous dire que ce ne serait pas le cas. D’après les budgets que nous voyons ici au Canada, ce ne serait sûrement pas le cas. Je ne suis même pas sûr que ce soit le cas pour les compositeurs américains. Je suppose que si j’étais un célibataire dans la vingtaine et si je vivais dans un appartement d’une chambre à coucher, ou quelque chose du genre, je pourrais peut-être gagner ma vie de cette façon. Mais ce ne serait certes pas un mode de vie raisonnable de la classe moyenne. Une grande partie de notre gagne-pain repose sur notre propriété intellectuelle. Nous faisons du travail à contrat. Lorsque vous êtes entre deux contrats et que vous ne voyez peut-être pas de nouvelles séries, de nouveaux films ou de nouvelles émissions avant quelques mois, ces revenus sont d’autant plus importants.
Que pouvons-nous corriger dans le modèle d’abonnement pour essayer de reproduire ou de créer une source de revenus? Est-ce le nombre de diffusions en continu? Y a-t-il quelque chose sur quoi nous pourrions fixer une forme de rémunération?
C’est un peu difficile pour nous deux de le dire parce que nous sommes des compositeurs. La SOCAN le saurait probablement. Mais je crois comprendre qu’il doit y avoir une sorte de tarif que ces services d’abonnement paient essentiellement aux organismes de droits d’exécution. Peut-être que le taux par mille devrait augmenter. Peut-être faut-il changer la façon dont les visionnements sont comptés. Il y a un tel décalage entre la façon actuelle et l'ancienne façon.
Je vais être honnête. J’enseigne au Humber College et aussi à l’Université York. Je suis très inquiet pour la prochaine génération de compositeurs et de musiciens. Beaucoup d’entre eux disent qu’ils veulent gagner leur vie de cette façon, mais avec les chiffres qu’Ari m’a rapportés, j'ai l'impression d'être hypocrite quand j'essaie de brosser un portrait optimiste de la situation à mes étudiants.
Merci, monsieur le président. Je vais poursuivre dans la même veine que le député Graham.
Nous avons beaucoup entendu parler des exemptions pour le secteur de l’éducation qui s’appliquent à l’utilisation équitable et de leurs répercussions sur le secteur de l’édition. Y a-t-il des aspects de ces exceptions qui touchent davantage les personnes handicapées et dont le Comité devrait être au courant?
Si j’ai bien compris, et peut-être que M. Rae pourrait nous éclairer, si je fréquente un établissement d’enseignement postsecondaire au Canada, j’achète le livre à la librairie. L’université peut alors le passer à la rupteuse, le numériser et me le remettre sous une autre forme sans encourir de pénalités ou de frais, ou risquer de contrevenir à ses obligations.
L'on pourrait peut-être mieux permettre à ces institutions et à d’autres dans le secteur de la production de devenir de meilleures ressources. C’est toujours une question de ressources. Il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton pour numériser un livre, car la technologie est souvent loin de faire du bon travail. Il y a toujours cet élément humain qui doit intervenir et corriger le texte, de sorte que s’il s’agit d’un graphique, il doit être décrit correctement. Ce serait la seule amélioration que je verrais.
Je pense que M. Greco a raison. Même quand on numérise un livre, il arrive que la numérisation ne soit pas parfaite. Si l’éditeur produisait une version accessible au départ, cela atténuerait le problème. Cela réduirait le besoin de consacrer du temps à la numérisation et produirait probablement une meilleure copie. Après tout, d’après ce que je comprends, la plupart des documents de nos jours commencent par une version électronique, alors je ne vois pas pourquoi une version accessible en format électronique ne pourrait pas être produite.
La loi précise que si une oeuvre est disponible dans le format approprié, sous une forme disponible sur le marché, elle doit être offerte à un prix raisonnable, moyennant un effort raisonnable d’acquisition. Cela ne relève pas des exceptions. Les tâches quotidiennes que nous pouvons tenir pour acquises peuvent être très difficiles pour les personnes handicapées. La loi devrait-elle préciser que ce qui constitue un effort raisonnable est différent pour les personnes handicapées?
À notre avis, monsieur, non. Nous ne faisons pas un effort raisonnable pour rendre les immeubles accessibles. Nous ne disons pas qu'il faut installer une rampe ou un ouvre-porte uniquement si cela ne crée pas de difficultés indues. Non, ce n’est pas ce que nous disons. Ce que nous disons, c'est que les bâtiments doivent être accessibles et utilisables par tous, un point, c'est tout.
Pourquoi offrons-nous ces possibilités de dérogation aux éditeurs?
Nous faisons la même chose avec le transport. L’Office des transports du Canada utilise des expressions analogues. Les sites Web doivent être accessibles, à condition qu’il n’y ait pas de contrainte excessive. Les terminaux doivent rendre leurs installations accessibles aux personnes handicapées, pourvu que cela ne crée pas d’obstacle indu.
Pour moi, c'est absurde. Je ne suis pas d’Ottawa; je viens de Calgary. M. Simpson et moi sommes venus à pied de l'hôtel où nous sommes descendus, à environ quatre pâtés de maisons. La plupart des intersections n’étaient pas dotées d’installations d’accessibilité appropriées. Les autres manquaient de cohérence. Les feux clignotants ou les signaux sonores pour les piétons n’ont pas fonctionné.
Pourquoi permettons-nous cela? Pourquoi est-ce acceptable? Et pour en revenir au débat, pourquoi trouvons-nous acceptable de produire des choses qui ne sont pas accessibles? Pourquoi est-il acceptable qu’un livre ou un objet d’art produit avec des fonds publics ne soit pas rendu accessible?
Côté art, nos collègues de Toronto... La vidéodescription ne coûte pas cher, mais son inclusion fait l'objet de véritables débats avec les radiodiffuseurs et les producteurs. Pourquoi est-il acceptable de ne pas s’attendre à ce que le contenu soit accessible à tous, peu importe la façon dont on consomme cette oeuvre d’art ou ces médias?
Merci beaucoup.
Revenons maintenant au Parti libéral, avec Mme Celina Caesar-Chavannes.
Vous avez cinq minutes.
Merci beaucoup à tous les témoins.
Je vais commencer rapidement par les compositeurs. J’ai une brève question au sujet de la vitesse à laquelle progresse l’ère numérique.
Il semble que nous soyons loin derrière. Vous nous donnez des chiffres de Netflix. Vous dites que cette entreprise gagne de plus en plus d’argent chaque année, sans que vous ne voyiez le moindre bénéfice dans vos poches ou dans vos coffres.
Pensez-vous qu’un examen quinquennal de la Loi sur le droit d’auteur est suffisant ou devrait-il être plus fréquent?
Je pense qu’il faut agir beaucoup plus rapidement. Les choses avancent à un rythme épique en ce qui concerne la technologie.
Oui, tout à fait. La dernière fois que la loi a été examinée, il a été décidé, si j’ai bien compris, qu’il faudrait attendre cinq ans avant de la réexaminer. Cela pouvait sembler approprié à l’époque, mais les temps ont changé, et ils évoluent plus rapidement que jamais.
Dans 100 ans, je vois d'ici les gens se demander comment on a bien pu tenir le coup avec tout ce qui se passe en ce début du XXIe siècle. La vitesse à laquelle les choses changent ne fait que s'accélérer. Et le droit d’auteur doit suivre le rythme, advienne que pourra.
Il doit être agnostique, technologiquement neutre. Le droit d’auteur doit se rapporter au premier titulaire et à l’oeuvre. Il faut permettre à la technologie d'avancer pour qu’elle puisse être rattachée à l'oeuvre, si la logique en dicte ainsi.
Merci beaucoup.
Je vais maintenant céder la parole à MM. Simpson, Greco et Rae.
Je dois dire que j’ai apprécié votre témoignage, monsieur Greco. Les histoires se gravent mieux dans la mémoire. J'ai trouvé frustrante celle que vous avez racontée au début sur le cours en gestion de projet que vous n'avez pu suivre jusqu'à la fin malgré le fait de l'avoir payé.
Monsieur Rae, vous avez parlé de renforcer les droits de la personne. Si nous enlevons le rideau de cet examen du droit d’auteur, je dirais qu’une grande partie de ce dont vous parlez, surtout en ce qui concerne le matériel financé par l’État, ne concerne pas seulement le droit d’auteur, mais aussi le droit d’accès. Si on s'attend à avoir accès à des documents de compétence fédérale dans les deux langues, ce qu'on veut, c'est avoir le choix entre le français ou l'anglais, point à la ligne. Est-ce une juste appréciation de ce que vous voudriez?
Cela va probablement un peu plus loin.
Il y a beaucoup de langues autochtones au Canada. Il y a de plus en plus de littérature et de spectacles artistiques dans ces diverses langues, et je pense que nous devons nous efforcer davantage de les promouvoir. Il faudrait aussi les adapter aux besoins des gens dans leur propre langue. Après tout, l’incidence de personnes handicapées dans les communautés autochtones est très élevée. Je pense qu’il faut tenir compte des besoins des peuples autochtones dans ce contexte.
Si vous avez trouvé frustrant d’écouter mon histoire; imaginez donc ce que c'est que de l'avoir vécu. Qu’il s’agisse d’une carrière professionnelle, de l’achat d’un livre sur le jardinage ou d’un passe-temps dont les gens veulent profiter pour améliorer leur qualité de vie, je ne vois pas de différence. C'était une question professionnelle dans mon cas. Mais heureusement, il n'y a pas que le travail qui compte dans la vie. Il s’agit de ne pas continuer à se heurter à ce genre d’obstacles qui empêchent les gens d’explorer, de s'épanouir et de contribuer à leur monde et à leur famille.
J’ai une histoire plus ou moins comparable.
Quand j’ai pris ma retraite, j’ai décidé de reprendre les études. J’ai présenté une demande à Ryerson, et j’ai été accepté. Certains cours sont impartis à distance, à l'aide d'un système appelé « Blackboard ».
Je ne saurais vous dire à 100 % si c’était carrément inaccessible ou si c’était tellement compliqué que je ne savais pas comment m'y retrouver, mais c’était un obstacle, alors j'ai renoncé. J’ai senti que je devais me retirer avant même de commencer, ce qui m’a beaucoup déçu. En fait, j’avais une bonne raison de vouloir retourner à l’école, et Blackboard était un obstacle pour moi à l'époque. Je pense que le système a été légèrement modifié depuis, mais je ne sais pas s’il est accessible ou non maintenant.
Pour suivre dans la même ligne et comprendre que nous sommes dans le contexte de l’examen de la Loi sur le droit d’auteur, en ce qui concerne la capacité de créer des espaces inclusifs, des milieux de travail inclusifs ou des endroits inclusifs dans les secteurs de compétence fédérale ou tout ce qui utilise des fonds publics, monsieur Greco, vous avez dit qu’aucun financement fédéral ne devrait être accordé à des programmes qui perpétuent les obstacles.
Nous utilisons ce que nous appelons l’analyse comparative entre les sexes plus. Je constate que nous mettons souvent l’accent sur l’analyse entre les sexes, et le facteur « plus » — soit l’intersectionnalité —, semble entrer en ligne de compte, mais pas avec autant de ferveur que l’analyse du point de vue du genre.
Vous n'avez peut-être pas des chiffres concrets, mais pouvez-vous nous parler du ralentissement économique causé par l’absence de documents accessibles dont on a besoin en temps opportun, comme vous l’avez dit, lorsque l'ouvrage ou le document voit le jour.
Je crois que la réponse est tout simplement non. Je ne pense pas que l'on ait vraiment étudié la question, mais je voudrais simplement signaler la situation concernant l’emploi des personnes handicapées. Peut-on faire le lien strictement entre cela et les obstacles entourant le droit d’auteur? Probablement pas, mais la capacité d’obtenir des documents accessibles est-elle une variable dans cette équation? Certainement, oui.
Embaucher des personnes handicapées sans emploi offre un potentiel économique qui se chiffre en millions. Pour y arriver, nous devons veiller à ce que les personnes incapables de lire les imprimés puissent se renseigner sur leur contenu.
Si vous prenez la statistique que M. Simpson vous a donnée tout à l’heure, à savoir que seulement 28 % des Canadiens aveugles ont actuellement un emploi, songez aux coûts que la société doit assumer en raison de l’ampleur de notre taux de chômage. Tous les aspects de la vie sont touchés. Si nous n’avons pas plus d’argent dans nos poches, il est assez difficile de participer à la vie communautaire. Il est plus difficile de nous nourrir comme il faut. Il est difficile de trouver un logement décent. Tous ces facteurs sont touchés par notre faible taux d’emploi. Si on a de la difficulté à obtenir la formation nécessaire pour acquérir les titres de compétence dont M. Greco a parlé plus tôt, il est manifeste qu'il s'agit d'un cercle vicieux. Nous sommes exclus de l’égalité d’accès à beaucoup d’aspects de la vie.
Merci, monsieur le président.
J’aimerais m'adresser aux compositeurs de musique à l'image. Merci d’être ici aujourd’hui.
En ce qui concerne votre plan d’imposition des utilisateurs d’Internet de plus de 15 gigaoctets, comment en êtes-vous arrivés à ce chiffre?
En gros, c’était une considération pour les Canadiens qui n’ont pas les moyens de verser une sorte de redevance. Si nous examinons l’étendue de l’utilisation par les gens qui vivent dans des régions éloignées où ils pourraient avoir un service par ligne commutée, nous avons estimé qu’ils ne feraient probablement pas de diffusion en continu, alors il s'agissait de prévoir une sorte d’allègement si un tel système était envisagé.
Un nouveau jeu très attendu intitulé Red Dead Redemption 2 sera lancé cette semaine. Il occupe plus de 100 gigaoctets. Dans ce que vous proposez ici, c’est-à-dire d’imposer une nouvelle taxe à partir de 15 gigaoctets, le jeu que quelqu’un va acheter et payer — et nous avons entendu de la bouche de ceux qui travaillent dans cette industrie que tout le monde est payé, y compris les gens qui font la musique pour cela, par leurs achats — en a six fois plus. En quoi est-ce équitable pour quelqu’un qui a acheté et payé pour, légalement, que le téléchargement d’un seul jeu atteigne ce seuil exorbitant?
C’est une très bonne question. Vous parlez à quelqu’un qui a travaillé à l’un des jeux vidéo de production canadienne les plus réussis au monde. En fin de compte, nos confrères, les compositeurs à l’image qui travaillent dans le domaine de la vidéo, ne reçoivent pas de redevances de performance publique ou de reproduction comme nous. L’idée serait de les inclure dans ce type de régime de rémunération au titre du droit d’auteur.
Nous recevons tous des honoraires dès le départ pour faire notre travail, mais souvent, nous devons en dépenser la majeure partie pour faire le travail pour nos clients. La rémunération des droits d’auteur découlant de l’exécution et de la reproduction publiques fait partie essentielle de notre gagne-pain.
Je comprends tout à fait ce que vous dites, monsieur, et le modèle d’affaires et la façon dont les gens se comportent ont changé. Cependant, pour être juste, il se peut qu’on n’ait pas accès à votre contenu. On cherche peut-être simplement à payer légalement. Nous ne parlons pas ici de pirates qui volent de la capacité, mais de gens qui achètent quelque chose avec leur argent et qui ne s’intéressent pas nécessairement à votre contenu. Pourquoi devraient-ils payer cette taxe sur 15 gigaoctets, simplement parce qu’ils utilisent un service pour lequel ils ont payé le fournisseur de services Internet, qu’ils ont acheté la console ou la télévision et qu’ils s'en servent pour se divertir?
Je réviserais la situation. Pourquoi quelqu’un qui n’a pas manifesté d’intérêt pour votre contenu devrait-il payer pour cette nouvelle taxe que vous proposez?
Oui, mais encore une fois, quand je parle aux jeunes de la génération Y, ils me disent: « J’ai acheté cette chanson sur iTunes » ou « J’ai payé pour diffuser ce service, et j’utilise ma propre télévision, ma propre console ou mon propre ordinateur, ou un routeur, mon propre fournisseur, mon propre forfait d'accès Internet », et ainsi de suite. Ils paient pour ces services, et s’ils veulent consommer votre contenu, ils vous paieront.
Encore une fois, c’est une question très précise. Pourquoi les gens qui paient pour ces choses, devraient-ils payer en plus cette taxe pour vos membres, sachant qu’il y a de vraies familles qui ont besoin de mettre du pain sur la table, tout comme vous?
Je tiens à préciser que c’est une idée que nous explorons. Tout ce qui a stimulé cette idée, c’est que nous avons indiqué très clairement comment nous sommes compromis par le passage du modèle de publicité au modèle d’abonnement. Nous sommes à la recherche de mécanismes économiques qui fassent le lien entre le droit d'auteur du XXe et du XXIe siècles. La vérité, c’est qu’il y a déjà un régime en place en ce qui concerne la copie privée, qui « taxe », si vous voulez — et beaucoup de gens utilisent ce terme —, les zéros et les uns, qui ont été sur les médias numériques comme les CD, et toutes sortes de données.
Nous ne prétendons nullement que cela va régler le problème à 100 %, mais nous pensons que nous devrions essayer d’étendre au XXIe siècle un mécanisme économique qui était déjà en place au XXe.
J’ai rencontré aujourd’hui des représentants d'Unifor. De toute évidence, ils étaient ici sur la Colline pour parler de la nécessité d’appuyer le journalisme, et l’une de leurs suggestions était presque identique à ce que vous réclamez.
Si nous commençons à adopter des pratiques de maximisation des bénéfices pour les fournisseurs de services Internet, ils finiront tous par y souscrire, et les consommateurs paieront la note sans vraiment consommer. Pensez-vous que c’est juste? À qui pensez-vous que nous devrions nous limiter?
C’est votre proposition. Encore une fois, lorsque vous venez ici, j’aimerais savoir — et je pense que les gens à la maison l'aimeraient aussi —, pourquoi, contrairement à Unifor et à certains autres groupes qui ont autant de difficultés que vous avec les nouveaux modèles de Netflix, Google et Facebook, croyez-vous que nous, les parlementaires, devrions chercher à vous donner cette capacité et dire non à tous les autres?
Eh bien, permettez-moi d’être clair et de répéter ce que Paul vient de dire. Ce n’est qu’une des nombreuses idées que la Guilde des compositeurs de musique à l'image et les créateurs de notre milieu envisagent. Il faut dire que nous ne sommes pas des économistes. Les 15 gigaoctets, ce n’est ni le chiffre magique ni le chiffre idéal. Nous convenons évidemment avec vous qu’il ne faut pas que des gens qui n’utilisent pas le contenu paient une taxe, si vous voulez l’appeler ainsi. Nous sommes d’accord. Mais dans un monde idéal, ce qui serait formidable, c’est ce dont nous avons parlé tout à l’heure, c’est-à-dire la transparence et la possibilité d’avoir accès aux connaissances pour que nos organismes de défense des droits des artistes puissent intervenir et se mobiliser pour aider à rémunérer les artistes et les créateurs.
La redevance dont on a parlé n’est qu’une idée très simple, quelque chose qui existait dans le passé. Ce serait très simple...
Je dirais simplement que c’est très différent des cassettes vierges, où je fais un mélange pour quelqu’un et j’utilise le contenu de ma propre collection privée pour le donner à autrui. L'époque des CD vierges est révolue. Encore une fois, je ne trouve pas juste que l'on fasse payer davantage aux consommateurs — vous êtes consommateur, je le suis aussi. Or, comme parlementaires, ce qui est fondamental pour nous, c’est que le gouvernement ne peut pas imposer cette taxe sans le consentement de la population. Et c’est là que le Comité doit apporter ces changements.
Les propositions que l'on nous présentera désormais devraient recevoir de bonnes réponses, à condition que l'on ne se contente pas de dire qu'on « souffre », car tout le monde est confronté à cette nouvelle technologie. Si vous vous présentez devant un comité pour nous exhorter à demander aux Canadiens de payer davantage pour quelque chose qu’ils n’utilisent peut-être pas, nous devrions avoir de bonnes raisons pour expliquer pourquoi il s’agit d’un cas spécial.
Nous avons entendu dire au Comité que certains éditeurs ont beaucoup souffert. Cela pourrait compromettre l’écosystème de production de nouveaux ouvrages. Cela m’inquiète. Il faut étoffer les détails de ce genre de choses.
Je comprends que vous n’ayez pas toutes les réponses. En tout cas, moi je ne les ai pas. Mais lorsque vous comparaissez devant un comité et que vous nous demandez d’utiliser cet ancien pouvoir pour taxer la population, nous devons avoir de bonnes raisons de le faire.
Eh bien, je voulais simplement dire que nous respectons tout ce qui vient d’être dit. Nous voulons juste en discuter. Il existe en fait un précédent avec des dispositions qui sont toujours en vigueur dans la Loi sur le droit d’auteur. C’est ce que nous voulons: un débat sur la mise à jour de cette politique précise. C’est là que nous en sommes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J’aimerais remercier tous nos témoins de leurs témoignages.
Ma première question s’adresse aux témoins ici présents. Ma femme travaille pour une ophtalmologiste. Elle est technicienne médicale ophtalmique. Je comprends certainement beaucoup de ce que vous suggérez et de ce que vous dites, surtout que le segment de personnes ayant une déficience visuelle qui croît le plus rapidement est celui des personnes de 75 ans et plus, soit une tranche d'âge qui prend de plus en plus d'envergure de son côté aussi.
Monsieur Thomas Simpson, vous aviez un livre. Pouvez-vous le montrer, s’il vous plaît?
D’accord. Vous avez Harry Potter, par exemple.
Combien en coûterait-il à un éditeur de mettre un livre en braille? Je ne parle pas de la distribution ni du montant total.
C'est bien moins cher que par le passé. Je n’ai pas ce chiffre sous la main, mais il y a de nouvelles technologies qui permettraient de produire le braille plus rapidement, en grande quantité et à moindre coût.
Tout à fait. Il y a aussi le braille électronique. Avec un afficheur braille dynamique — c’est à peu près de cette grandeur —, on peut rafraîchir l'affichage pour éviter de gaspiller du papier. C’est aussi moins cher à produire.
Je vous pose la question en songeant aux suggestions que vous avez faites dans votre témoignage, Lui, John et Thomas, et aux propos d'autres témoins que le Comité a eu l'occasion d'entendre dans le cadre de cette étude, en voyageant d'un bout à l'autre du pays. Nous avons commencé à Halifax, puis nous sommes allés à Montréal, Toronto, Winnipeg et en Colombie-Britannique.
Nous avons entendu les créateurs. Je ne parle pas de gens susceptibles de lancer tout un Harry Potter, mais de nouveaux créateurs en devenir, des gens qui travaillent à temps partiel ou à l'occasion et qui soutiennent leur mode de vie de la classe moyenne en occupant un autre emploi. Quelles sont les chances pour que ces auteurs soient publiés en braille ou qu’il y ait un intérêt à publier leurs oeuvres?
Avez-vous des statistiques sur les petits créateurs canadiens moins connus qui ont l’occasion de publier et de distribuer leurs oeuvres en braille?
C’est une très bonne question. Je crois que la réponse toute simple est non. Personne ne suit la situation. Quand on lance un livre sur le marché, il s'agit de convaincre le plus de gens possible de l’acheter, y compris les personnes ayant une déficience de lecture des imprimés.
Dans ce contexte, il y a l'autoédition, qui est possible de nos jours grâce à Apple, Adobe et à une multitude d’autres plateformes, pourvu qu'elles soient accessibles et puissent produire des documents en médias substituts, soit le genre de support que le consommateur ou moi-même voudrons bien acheter... Soit je branche mon imprimante en braille à mon ordinateur et je l’imprime, soit je l’écoute sur mon lecteur Victor Reader ou autre dispositif analogue. Ensuite, j’assume le coût de rendre le contenu consommable dans un format de mon choix. L'essentiel, c'est de veiller à ce que le livre que je construis de la sorte soit utilisable et accessible.
Est-ce que cela coûte cher? Non. Il y a maintenant des logiciels gratuits. Vous pouvez aller sur Daisy.org et télécharger gratuitement un logiciel qui prendra un document Word ou un fichier texte ASCII, ou probablement un fichier XML ou HTML — XML est un protocole que les éditeurs connaissent bien — et il vous suffira littéralement de cliquer sur un bouton pour créer un livre accessible et bien structuré sans frais. Peu importe qu’un millier de personnes ou qu'une seule personne aveugle décident de consommer ce produit. Ce qui compte, c'est qu'il est disponible dans un format accessible.
Nous ne demandons pas combien de personnes vont regarder la télévision sous-titrée. Nous ne posons plus la question; nous nous limitons à rendre ce service disponible. Absolument toutes les chaînes de télévision canadiennes ont l'obligation d'offrir le sous-titrage codé.
Pourquoi poser la question que vous venez de poser, monsieur? C’est injuste et inutile. Tout le contenu devrait être accessible, un point c'est tout.
Je suis d’accord. Une chose qui m’a frappé, c’est le décalage entre ce qui se passe dans l’industrie de l’édition et l’accessibilité qui est nécessaire. J’ai été étonné de constater que les livres les plus connus sont trouvables en braille, sans que ce soit nécessairement le cas pour les oeuvres des nouveaux auteurs. Toutes les suggestions que nous pouvons faire — et vos témoignages nous aideront — nous permettront de nous assurer que tous les livres, quels que soient les intérêts de la personne, sont à sa disposition, qu’il s’agisse de qualité de vie, d’études ou d’affaires. Je pense que ce sont des questions importantes que nous devons poursuivre.
Et que dire de la situation inverse? Qu'en est-il des créateurs ayant une déficience visuelle? Quels sont les outils à la disposition de ceux qui veulent prendre une idée, la publier et la commercialiser? Avez-vous des suggestions ou des réponses à ce sujet?
Je suggère l’autoédition. Il y a un monsieur dans mon bureau à Calgary qui a perdu la vue parce qu’il avait de l’eau dans le cerveau. Je crois que c’est de l’hydrocéphalie. Il est passé d'une vision normale à devenir légalement aveugle du jour au lendemain. Il a publié lui-même un livre que vous pouvez acheter sur iTunes pour 10 $. Il a suivi les mêmes voies que vous lorsque vous décidez de publier vos mémoires.
Ces plateformes sont disponibles. Certaines sont meilleures que d’autres. C’est comme pour toute autre chose. Il y a de bonnes voitures et il y en a des mauvaises. Il y a de bonnes plateformes d’autoédition qui sont utilisables par quelqu’un qui compte sur des technologies fonctionnelles et il y en a d’autres qui ne le sont pas. Si le marché suit son cours, à force d'essais et d'erreurs, les personnes handicapées qui choisissent de publier finiront par trouver les outils et les systèmes qui leur conviennent le mieux. Elles y resteront fidèles et ces outils et systèmes dureront plus longtemps que d'autres, espérons-le.
Je vous remercie de ce témoignage vraiment important, que nous ne manquerons pas de consigner au compte rendu.
Merci, monsieur le président.
À l’intention de nos témoins de Toronto, je veux simplement m’assurer qu’il est clair qu’il ne s’agit que d’un examen quinquennal prévu par la loi des changements apportés au droit d’auteur, après quoi nous formulerons des recommandations à l'intention du ministre, qui disposera alors d’un délai pour nous répondre. Nous sommes par ailleurs limités par une étude semblable qui est en cours au comité du patrimoine. À partir de là, s’il doit y avoir des changements, il faudra déposer un projet de loi et probablement tenir plus d’audiences pour ensuite passer par la Chambre des communes et le Sénat. C’est tout un parcours pour en arriver là où nous en sommes.
Quels seraient selon vous les aspects à régler en priorité? Je sais que d’autres témoins ont accordé beaucoup d’attention à quelques points. Y a-t-il quelque chose qui pourrait être fait par voie de règlement ou à court terme — par exemple, l’application des dispositions actuelles? Si nous n’apportons pas de changements à court terme, nous entrerons peut-être en période électorale, et il faudra alors attendre plus longtemps avant que les réformes se matérialisent. Peut-être pourriez-vous nous éclairer quant à ce que l'on pourrait envisager à court terme ou moyennant la réglementation ou l’application des dispositions actuelles de la Loi sur le droit d’auteur ou de la Commission du droit d’auteur, par exemple. Ce serait utile.
Je suppose que je reviendrais à l’idée que nous sommes ici pour parler de l’écart de valeur. C’est une question primordiale, et je pense que l'essentiel serait que tout le monde autour de la table en parle. Je crois comprendre que certains géants de la technologie et des services de diffusion en continu n’ont pas l’intention de participer. Il n’est ni dans leur intérêt ni nécessaire qu’ils soient à la table. Je crois savoir que Spotify, par exemple, est une entreprise avec laquelle beaucoup d’artistes ont d’énormes problèmes à cause des taux de rémunération. Pourtant, Spotify est au moins venue à la table pour en parler. Des organisations comme la SOCAN et leurs organisations soeurs aux États-Unis, en Angleterre et en France, partout dans le monde, doivent toutes pouvoir s’asseoir à la table avec les entreprises de diffusion en continu — les Amazon, Hulu, Netflix, et compagnie —, pour voir comment les choses sont réparties dans cette nouvelle ère et comment nous pouvons nous assurer que les créateurs sont rémunérés équitablement.
Si vous êtes Drake, Weeknd ou Hans Zimmer, et que vous êtes au sommet de la chaîne, vous gagnez de l’argent grâce à ces services de diffusion en continu. Mais il n’y a plus de classe moyenne et il n’y a plus de jeu à long terme à cause de cela. Nous allons avoir une population de créateurs qui va disparaître assez rapidement.
Puis-je ajouter quelque chose? Plus précisément, nous appuyons ce que Music Canada propose dans son document intitulé « L'Écart de valeur », tout comme ce que la CMPC recommande dans son document « Sounding Like a Broken Record ». Il y a un certain nombre de mesures qui pourraient être prises assez rapidement. C’est là que nous entrons en scène, mais nous voulons surtout participer au dialogue et exposer nos idées.
Merci beaucoup.
Je vais m’adresser à MM. Greco et Rae.
Je tiens d’abord à dire que mon directeur de thèse doctorale était le grand professeur James Harris, de l’Université d’Oxford, qui était aveugle et qui était non seulement un homme merveilleux, mais aussi un brillant érudit. Il est un auteur prolifique de deux grands ouvrages aux éditions de la Oxford University Press, en plus de nombreux articles et autres publications qui vont avec une carrière universitaire aussi prestigieuse. Ce qui est vraiment tragique, la plus grande injustice de toutes, c’est que la technologie commençait tout juste à rendre sa vie beaucoup plus facile au début des années 2000. La dernière fois que je l’ai vu, c’était chez lui, au Royaume-Uni, et il venait de se procurer un nouveau logiciel qui lui lisait les textes. Je lui présentais mes textes en WordPerfect et il avait une machine qui les convertissait en braille.
J’invite MM. Rae et Greco à spéculer sur ce que M. Rae a dit plus tôt, c’est-à-dire, le pourquoi. Il me semble insensé que les gens ne produisent pas des documents dans des supports, des formats technologiques, qui peuvent ensuite être facilement convertibles et facilement accessibles. Si c’est HTML ou un autre format, pourquoi les gens insistent-ils pour utiliser des formats comme PDF qui sont bloqués?
Eh bien, on croit que c’est bloqué. Je soutiens que c’est tout simplement faux, et ce pour le motif suivant: je reçois un document en PDF, et si je peux le lire, s’il est accessible, et il y a de bonnes chances qu’il le soit, je peux prendre ce document, le transformer en Bloc-notes ou le placer dans le dossier des ébauches de mon programme de courrier électronique, et je peux dès lors faire tout ce que je veux avec ce document.
À mon avis, l’idée qu’un document PDF soit automatiquement protégé est complètement fausse.
Quant à savoir pourquoi la production est plutôt limitée, je suppose qu’il y en a qui estiment que le marché n’est pas suffisant. En ce qui concerne le braille, beaucoup de jeunes s'y connaissent déjà. Les enseignants itinérants connaissent-ils le braille? Croient-ils au braille? On part du principe que tout est maintenant lu électroniquement.
C’est une supposition malheureuse, une idée malheureuse, parce que, comme je l’ai dit plus tôt, notre chemin vers l’alphabétisation passe par le braille. J’ai beaucoup appris sur l’orthographe et la ponctuation en faisant passer mes doigts sur le braille. C’est quelque chose que l’on ne voit pas quand on écoute la lecture d'un document, qu’il s’agisse d’un livre, d’un rapport ou d’autre chose. Le braille est extrêmement important, mais on ne lui accorde pas la priorité qu’il mérite.
Si votre collègue au doctorat travaillait encore aujourd’hui, je vous garantis que son monde serait bien différent de ce qu’il était lorsque vous étiez à la faculté.
Quant à savoir pourquoi c’est encore si difficile, monsieur, si j’avais cette réponse, je ne serais pas là à vous parler aujourd’hui. Ce ne serait pas une conversation que nous aurions devant un comité parlementaire chargé de réviser la Loi sur le droit d’auteur. Tout ce que je peux vous dire avec certitude, c’est que lorsque je rentrerai chez moi demain, si je veux entrer dans la boutique de magazines à l’aéroport, tout ce que je peux acheter, c’est de la gomme et des bonbons. Je ne peux pas acheter une revue que je puisse lire, un journal que je puisse lire.
Les journaux sont accessibles dans une certaine mesure...
... mais pas dans ce magasin.
Si je pouvais avoir accès aux magazines disponibles dans la boutique ou la librairie au coin de la rue, je vous garantis que je dépenserais beaucoup plus d’argent comme consommateur des médias. Je ne dépense pas beaucoup d’argent, en fait je ne dépense pas d’argent pour les médias, parce que les choses que je veux vraiment lire ne sont tout simplement pas disponibles. Par conséquent, je consomme ce qui est disponible.
Serait-il suffisant, dans le cadre de l’élaboration d’un projet de loi, d’exiger un format accessible et de compter ensuite sur d’autres types d’incitatifs ou d’aide pour permettre aux personnes ayant des déficiences visuelles, des déficiences perceptuelles ou qui sont aveugles de convertir les documents eux-mêmes, ou devons-nous faire quelque chose de plus?
Je pense que si le livre était disponible à la source dans un format qui pourrait être facilement accessible... Le scénario idéal, le monde que nous envisageons, c’est que j’entre dans un Coles, je mets mes 20 $ sur le comptoir et je dis que je veux tel ou tel ouvrage sous forme de livre DAISY ou comme copie électronique en braille. C’est cela que nous devrions viser.
Les lecteurs Victor Reader sont rares, tout comme les imprimantes en braille, mais ils existent. Si j’avais le contenu dans un format accessible et utilisable, comme John l’a dit plus tôt — et c’est très important —, l’éditeur ou le créateur n’aurait pas à assumer de coûts supplémentaires. Il leur suffirait de régler quelques menus détails. Soyons honnêtes, ce n’est pas simple. Plus ils le feront, mieux ils s’y prendront et mieux ils s'y prendront, plus ils seront efficaces et le produit coûtera moins cher.
J’aimerais ajouter que je pense que c’est une question d’égalité. Les personnes voyantes peuvent obtenir un livre sans plus. Nous avons remis des exemplaires en braille à tous les députés. Je ne m’attends pas, comme le témoin que je suis, à ce que vous remettiez votre copie à vos collaborateurs en leur demandant de vous la redonner sous une forme imprimée conventionnelle. Cela ne se produira tout simplement pas.
Je ne pense pas qu’il s’agisse de doter les personnes incapables de lire les imprimés de quoi créer un format accessible pour elles-mêmes. Il faudrait simplement les rendre accessibles.
Il y a un autre aspect dont nous n’avons pas beaucoup parlé, je crois, et c’est celui des bibliothèques. Nous vous avons beaucoup parlé de notre désir de pouvoir acheter un livre, et c’est la réalité. Dans mon cas, je m’intéresse particulièrement à des domaines qui n'ont rien à voir avec la fiction, mais il est très difficile d’obtenir une version accessible de livres sur l’Égypte ancienne, ou sur d’autres pays que j’aimerais visiter, alors que c'est un peu plus facile quand il s'agit de fiction. Tout comme vous avez le choix d’aller à votre librairie locale et d’acheter un livre, ou d’aller à votre bibliothèque locale en espérant qu’il s'y trouve pour pouvoir l'emprunter, eh bien nous, nous voulons la même chose. Plus les éditeurs rendent cela possible en produisant leurs livres en médias substituts... Une partie du marché consiste en des ventes directes aux particuliers, mais aussi, bien sûr, à des réseaux de bibliothèques locales, et c’est également important. Nous voulons pouvoir utiliser davantage nos bibliothèques locales, et les choses vont dans le bon sens à cet égard.
Je pense qu’il pourrait être nécessaire de fournir un peu d’aide financière aux éditeurs pour leur donner un petit coup de pouce — pas indéfiniment —, juste de quoi les inspirer.
Merci beaucoup.
Cela nous amène à la fin de notre séance d’aujourd’hui. Je tiens à remercier tous nos témoins de Toronto et les gens qui sont venus nous rendre visite.
Je rappelle aux intéressés que le projet de loi sur l’accessibilité aura lieu dans cette même salle à 18 heures, et que vous pouvez vous joindre à moi. Je serai assis sur le côté, participant.
Tout cela est très utile pour cette partie, en plus de m'avoir ouvert les yeux. Je tiens à remercier tout le monde. Nous devons poser des questions difficiles pour essayer d’obtenir des données probantes à inclure dans notre étude.
La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication