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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 25 octobre 2001

• 0905

[Traduction]

Le président( M. Clifford Lincoln (Lac-St-Louis, Lib)): Je déclare ouverte la séance du Comité permanent du patrimoine canadien,

[Français]

qui se réunit aujourd'hui pour continuer l'étude du projet de loi C-10.

[Traduction]

Madame Allen, avant de vous donner la parole, il y a une ou deux petites questions internes à régler.

Tout d'abord, monsieur Mills.

M. Dennis Mills (Toronto—Danforth, Lib): Monsieur le président, alors que vous étiez absent mardi dernier, nous avons reçu des observations, non pas au cours de la séance mais par la suite, de plusieurs députés qui étaient préoccupés par les coupures à MCTV. Il s'agit d'une division de CTV. Ils nous ont demandé de présenter une lettre. Elle n'est pas traduite, de sorte que nous ne pourrons pas la déposer aujourd'hui, mais essentiellement, ils demandent que des mesures soient prises immédiatement afin de déterminer si le nouveau format de CTV Inc., Northern Ontario Services, s'éloigne des modalités spécifiques de sa licence de télédiffusion ou de l'esprit de ces modalités, ou des observations qui avaient été présentées au CRTC pour appuyer les demandes de renouvellement de licence. Nos collègues sont très inquiets à ce sujet et demandent que notre comité, le Comité permanent du patrimoine canadien, fasse enquête sur la question dans les meilleurs délais. Je voudrais donc porter cette lettre à votre attention.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Mills.

Ce que je propose, c'est que la lettre soit déposée aussitôt qu'elle aura été traduite, et que nous nous penchions sur la question dès que nous aurons terminé notre examen du projet de loi C-10, sans doute la semaine prochaine.

Une autre question a été portée à l'attention de notre comité par plusieurs députés concernant le Fonds pour la câblodistribution. Plusieurs agences de radiodiffusion nous ont écrit. Nous pourrons alors également aborder cette question.

Troisièmement, je voulais aviser les membres du comité que notre demande de déplacement dans le cadre de l'étude sur la radiodiffusion a été refusée et que l'Alliance canadienne y a opposé son véto. C'est un peu ironique, monsieur Burton, car vous vouliez que le comité se rende en Colombie-Britannique. C'est la deuxième fois que vos représentants opposent leur veto à nos demandes de déplacement. Je proposerais donc aux membres du comité que mardi, au début de la séance, nous recevions une autre résolution que nous pourrions présenter à nouveau à la Chambre des communes.

L'attaché de recherche vient tout juste de me dire qu'on est en train de préparer un nouveau calendrier de déplacement pour tenter de voir... Apparemment, l'une des raisons pour lesquelles on s'est opposé à ce voyage, c'est que nous ne faisions pas suffisamment de villes, de sorte que nous aurons une résolution, dès que possible, à présenter à nouveau à la Chambre. Naturellement, si ne voyageons pas, alors aussi bien laisser tomber cette étude, car si nous ne pouvons visiter les principales infrastructures à Toronto, Montréal ou Vancouver ou visiter les sites partout au pays, il nous sera presque impossible de faire une telle étude.

M. Dennis Mills: Je pense que M. Burton voudrait sans doute dire quelque chose à ce sujet, car je n'arrive pas à croire qu'il était au courant de ce qui s'est passé.

M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Je ne savais pas que c'était le cas, mais je pense que cela explique un peu mon sentiment de frustration, monsieur le président, du fait que le comité ne puisse aller entendre les préoccupations de mes commettants et de la Colombie-Britannique. Je n'aime pas beaucoup le dire, mais j'espère que ce n'est pas une question de représailles. Je ne crois pas que ce soit le cas. Je pense qu'il y avait d'autres problèmes. Je pense que vous comprenez peut-être alors un peu mieux également mon sentiment de frustration.

M. Dennis Mills: Monsieur le président, je dois dire quelque chose à ce sujet.

Le président: N'en faisons pas un débat, d'accord?

M. Dennis Mills: Non, je ne veux pas en faire tout un débat, mais je pense qu'il est très important de préciser aux fins du compte rendu que mardi dernier, nous avons entendu près de 13 témoignages différents de la circonscription de M. Burton relativement au projet de loi à l'étude. La séance a été très productive. Je peux vous dire honnêtement, monsieur le président, que tous les 13 témoins ont dit la même chose. Nous aurions pu tout aussi facilement en entendre deux.

Le président: Merci.

Sans plus tarder, nous allons commencer l'examen du projet de loi C-10.

• 0910

Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui un témoin du village de Port Clements en Colombie-Britannique, Mme Joan Ann Allen, mairesse.

Madame Allan, vous avez la parole.

Mme Joan Ann Allen (mairesse de Port Clements, Colombie-Britannique): Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.

Je vous remercie de me donner l'occasion de vous présenter le point de vue d'une région rurale côtière concernant le projet de loi C-10. Je parle ici au nom des gens de Port Clements et au nom des organismes qui régissent les collectivités des Îles de la Reine-Charlotte Haida Gwaii et du district régional de Reine-Charlotte Skeena en Colombie-Britannique. Je suis ici pour exprimer leur forte opposition à l'adoption du projet de loi C-10 dans sa forme actuelle.

Le district régional de Reine-Charlotte Skeena s'étend sur près de 20 000 kilomètres carrés sur la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique. Ce district compte 25 000 habitants dont les deux tiers habitent la ville de Prince Rupert. La région est économiquement tributaire de l'industrie d'extraction des ressources, principalement de l'exploitation forestière et de la pêche.

J'ai par ailleurs assisté à une conférence de l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique qui réunissait près de 1 000 délégués représentant 185 municipalités et districts régionaux. Ils ont été unanimes à dire que le gouvernement de la Colombie-Britannique devait présenter ses observations au sujet du projet de loi.

J'ai le privilège d'avoir été élue mairesse de Port Clements, l'une des quatre municipalités qui se trouvent dans le district régional de Reine-Charlotte Skeena. Port Clements est l'une des plus petites collectivités constituées en Colombie-Britannique, avec moins de 600 résidents, soit environ 10 p. 100 de la population totale des Îles Charlotte Haida Gwaii. Cette municipalité se trouve à plus de 110 kilomètres au large de la côte nord de la Colombie-Britannique et à 750 kilomètres au nord de Vancouver par avion. Elle est au bord du passage Masset, un bras de l'océan Pacifique qui s'étend jusqu'à l'île Graham, l'une des deux plus grandes îles de la Reine-Charlotte Haida Gwaii.

Environ un tiers des 6 000 habitants de l'île sont Haïdas. Ils ont une culture riche et prospère. Comme bon nombre d'autres résidents de l'île, les Haïdas pratiquent la pêche et la chasse de subsistance. Le projet de loi C-10 ne respecte pas leurs droits d'accès ancestraux.

Comme bon nombre de résidents de petites villes rurales au Canada, nous avons beaucoup de mal à garder notre communauté économiquement viable. Notre éloignement des grands centres, combiné à une population de base peu élevée, fait en sorte que le coût de la vie est élevé chez nous. Nous avons tenté de cesser de dépendre de l'industrie d'extraction des ressources primaires, mais ce sont pourtant ces industries et les emplois bien rémunérés qu'elles offrent qui font en sorte qu'il est possible pour les familles d'y vivre.

Nous sommes intimement liés à tous les autres résidents de l'île dans cette lutte, car notre collectivité n'est pas assez grande pour offrir les commodités et les services essentiels et il faut donc compter sur les collectivités avoisinantes. Ces services sont notamment les écoles secondaires, les hôpitaux, les services bancaires, les magasins de vêtements et les centres récréatifs.

Au cours des deux dernières décennies, la viabilité économique des Îles Charlotte Haida Gwaii a été durement touchée. La station des Forces canadiennes Masset a été rationalisée, et cette collectivité a donc perdu 600 hommes, femmes et enfants. Un moratoire sur la prospection pétrolière et gazière offshore a été imposé.

L'industrie de la pêche a été durement frappée par l'épuisement des stocks de poisson. La pêche commerciale de l'abalone a cessé il y a 10 ans et selon les dernières données, ces stocks ne sont pas rétablis.

Le projet de la mine Cinola a dû être abandonné étant devenu non rentable en raison de la chute des prix de l'or. Le compte de reboisement de Moresby-Sud, un fonds de 23 millions de dollars pour la création de la réserve de parc national Gwaii Haanas à l'île Moresby-Sud, est en suspens depuis les 12 derniers mois.

Notre industrie la plus importante et la plus productive, l'exploitation forestière, a été le plus durement touchée. De vastes territoires de forêts productives ont été retirés des zones de récolte du bois afin de créer des parcs, des réserves écologiques, des espaces naturels et des aires de loisir.

Le règlement en matière de récolte du bois a été récrit et est extrêmement compliqué de sorte que son application prolonge la planification de plusieurs années. Les pénuries et les réductions de personnel au ministère des Forêts rendent impossible l'examen et l'approbation opportune des plans.

• 0915

Enfin, et ce qui est le plus critique, le tarif qui a été récemment imposé par les États-Unis sur le bois d'oeuvre risque d'éliminer 12 000 emplois sur la côte Nord et de déstabiliser totalement nos économies locales, régionales et provinciales.

Les résidents de Port Clements peuvent répondre personnellement de l'impact dévastateur d'une taxe sur notre industrie de l'exploitation forestière. Les principaux employeurs locaux, notamment Weyerhaeuser et Husby Forest Products, ont fermé indéfiniment leurs portes en juin 2001, mettant ainsi 200 personnes au chômage. Bon nombre d'entre elles vivent à Port Clements et sont le seul gagne-pain de leurs familles.

Nous prévoyons qu'il y aura d'autres pertes d'emplois dans des commerces locaux, dans des restaurants et d'autres entreprises de service au cours des prochains mois, à mesure que l'économie de notre île fléchira sous un tel fardeau. C'est l'effet cumulatif de ces événements qui fait en sorte que nous avons de sérieuses préoccupations relativement au projet de loi C-10 et à l'impact qu'il aura sur l'économie des Îles de la Reine-Charlotte Haida Gwaii et de la côte Nord.

Permettez-moi de vous parler de nos principales préoccupations concernant l'impact économique que pourrait avoir le projet de loi C-10.

On sait que les réserves pétrolières et gazières offshore sur le détroit d'Hécate sont considérables. Selon une étude menée par la Commission géologique du Canada en 1998, il y aurait 9,8 milliards de barils de pétrole et 25 billions de pieds cubes de gaz. Il est essentiel d'explorer ce potentiel pour la survie économique de toute la côte nord de la Colombie-Britannique, notamment des Îles de la Reine Charlotte Haida Gwaii, car cela renforcerait une économie provinciale à la baisse.

La pêche au crabe et la transformation du poisson demeurent d'importants employeurs dans l'économie de notre île. Après des années d'efforts, deux usines de transformation de poisson et fruits de mer, propriété des résidents locaux qui les exploitent, ont ouvert leurs portes. Elles sont en train d'élargir la gamme de produits de poisson et fruits de mer qu'elles offrent en développant les marchés européens et asiatiques de poisson et fruits de mer qui ne sont pas habituellement consommés localement. La pêche et la chasse sportives sont en train de se développer et ces industries potentiellement lucratives attirent des sportifs européens ainsi que canadiens et américains. Les motels, restaurants, guides et fournisseurs locaux en profiteront tous.

La perspective de limiter davantage les zones de pêche et de restreindre davantage les pêches en créant des réserves écologiques tuera dans l'oeuf ces industries secondaires avant qu'elles ne soient tout à fait établies.

Enfin, je suis tout à fait troublée par le fait que l'on propose ce projet de loi sans avoir consulté les résidents des collectivités côtières. Je comprends qu'au départ, le Comité permanent du patrimoine canadien chargé d'examiner ce document critique n'avait pas prévu entendre des témoins de la Colombie-Britannique. Nous devons donc encore une fois réagir à une mesure législative qui a été créée, examinée et qui pourrait être approuvée par des gens qui ne vivent pas là-bas et qui n'auront jamais à en subir les conséquences humaines directes.

La réserve du parc Gwaii Haanas se trouvera à Haida Gwaii, dans les Îles de la Reine-Charlotte et on nous a assurés que de nouvelles perspectives d'emploi dans le tourisme écologique remplaceraient les emplois qui ont été perdus dans le secteur forestier. Il s'agit là d'un parc sauvage. Ce ne sera jamais la Mecque du tourisme puisque son accès est contrôlé et limité afin de protéger l'environnement naturel. Les résidents de l'île eux-mêmes ont à tout jamais perdu le libre accès à cette région et à toutes ses ressources.

L'accès au compte de reboisement de Moresby-Sud, fonds qui avait été mis de côté afin de réduire l'impact économique de la réserve aux fins de création d'un parc, a été fermé l'an dernier, et le sort de ce fonds est entre les mains des gouvernements provincial et fédéral.

Les opinions et préoccupations de ceux dont les moyens de subsistance sont peut-être changés ou éliminés par ces décisions ne devraient pas être prises en compte après coup. Toutes les collectivités touchées doivent avoir le droit d'être consultées, de participer dès le début à la rédaction du projet de loi.

Nous ne sommes pas rassurés par le droit de veto provincial que l'on propose pour les aires marines nationales de conservation. Cela signifie que nous devons constamment faire une surveillance et du lobbying pour protéger notre accès aux ressources, ce qui représente beaucoup de temps et d'argent pour les collectivités Haïdas et non Haïdas des Îles de la Reine-Charlotte Haida Gwaii.

En conclusion, je voudrais souligner qu'on ne peut démontrer aucun besoin pour ce projet de loi à ce moment-ci. Les statuts et règlements fédéraux et provinciaux actuels, dont 23 existent en double, devraient être adéquats pour faire face à toute menace possible à l'environnement.

• 0920

Ce projet de loi ne précise pas quelles aires seront protégées, ne précise pas les critères utilisés pour exclure les aires du développement et ne précise pas non plus comment le public participera à la prise de décisions. Il est clair que les décisions seront prises par des fonctionnaires dont la philosophie personnelle risque d'être tout à fait en conflit avec la volonté démocratique de l'électorat.

Si la volonté politique est d'aller de l'avant avec ce projet de loi, alors il faudrait tout au moins y inclure des critères et des lignes directrices qui soient clairs et exécutoires, afin d'instruire et d'informer ceux qui doivent appliquer la loi. Par ailleurs, il faudrait accorder suffisamment de pouvoir aux collectivités locales qui sont touchées, afin qu'elles puissent contrôler les décisions relatives au développement dans leur région.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame Allen.

Monsieur Burton.

M. Andy Burton: Merci, madame Allen. Je sais que votre voyage a été long et fatigant, et je vous remercie d'être venue nous rencontrer pour nous faire part de vos observations.

À titre d'éclaircissement pour qu'il n'y ait pas de malentendu, permettez-moi de préciser que Haida Gwaii c'est le nom autochtone des Îles de la Reine-Charlotte. Il ne faut pas confondre avec Gwaii Haanas, qui est le parc proposé de l'île Moresby-Sud, dans la partie sud des îles Charlotte, n'est-ce pas, madame Allen?

En ce qui concerne le parc national de l'île Moresby-Sud, quelle a été la participation de la population locale lors de la création de ce parc par Parcs Canada?

Mme Joan Ann Allen: Ils ont été consultés pendant des années et des années.

M. Andy Burton: Mais les a-t-on écoutés? À votre avis, cela a-t-il été un bon processus?

Mme Joan Ann Allen: Oui, je le pense.

M. Andy Burton: Bien. C'est agréable de vous l'entendre dire. Ce que vous aimeriez, donc, c'est qu'on suive un processus semblable pour toute autre aire marine de conservation qui est proposée, n'est-ce pas?

Mme Joan Ann Allen: Exactement.

M. Andy Burton: Merci.

Manifestement, nous sommes tous d'accord pour protéger l'environnement. Nous sommes tous des écologistes, sinon nous ne vivrions pas dans les régions où nous vivons. Nous aimons la beauté de la région, la capacité de chasser, de pêcher et de profiter de tout cela. Cependant, les préoccupations économiques sont également très importantes, non seulement dans les îles de la Reine-Charlotte mais aussi sur la côte Nord. Pouvez-vous nous en parler davantage?

Il y a ce qu'on appelle les collectivités viables, et lorsqu'on tombe sous un certain seuil, comme vous l'avez mentionné, vos hôpitaux, vos écoles et vos services vitaux sont menacés. Je ne suis pas certain que le besoin d'élargir notre capacité d'utiliser les ressources que nous avons, plutôt que de réduire ces capacités en raison de la viabilité de ces collectivités qui décroît, est bien compris. Pouvez-vous nous en parler davantage, en tant que mairesse d'une petite collectivité?

Mme Joan Ann Allen: Nous n'avons pas de chômage sur l'île. Lorsqu'on perd son emploi, on doit partir. Nous avons des maisons vacantes partout sur l'île. À mesure que la population diminue, les Haïdas, qui vivent là-bas depuis des générations et veulent y rester, vont se retrouver sans aucun service.

À l'heure actuelle, un service de traversier nous relie au continent, c'est-à-dire à Prince Rupert, qui se trouve à 90 milles de chez nous; il est offert trois fois par semaine, pourvu qu'il n'y ait pas de tempête. Nous avons un service d'Air Canada qui nous relie à l'île Moresby-Sud tous les jours. Mais ces services sont de moins en moins certains car il y a de moins en moins de gens qui les utilisent.

Lorsque la Défense nationale s'est retirée de Masset, cela nous a porté un coup dur. Je pense qu'ils sont passés de 385 employés à 25. C'était une base navale d'alerte lointaine. La base militaire offrait les seules installations qui existent à Masset à l'heure actuelle—un centre de loisirs, une piste de curling, la plus petite piscine au monde et des salles de musculation et autres.

Masset a essayé de garder ces installations ouvertes. On leur a donné des fonds pour le faire, mais plus la population diminue, moins les chances de survie sont bonnes.

La pêche est toujours bonne là-bas, et le ministère des Pêches et des Océans fait relativement un bon travail pour la contrôler.

Je pense que si nous nous opposons au projet de loi, c'est parce qu'il ajoute un autre palier au niveau de la bureaucratie qui ne connaît pas les conditions comme Pêches et Océans les connaît. Je ne crois pas que Parcs Canada devrait prendre le contrôle de la pêche, mais je fais peut-être erreur.

• 0925

À l'heure actuelle, autour des îles, nous avons deux zones où les prises de morues sont interdites. Sur la côte Ouest, on propose une aire de protection marine pour le mont sous-marin Bowie. C'est un volcan sous-marin, qui arrive jusqu'à 75 pieds de la surface de l'eau. C'est quelque chose de merveilleux que les biologistes peuvent étudier, mais on met tout de même les pêcheurs au chômage. Je ne sais pas pourquoi ils ne peuvent coexister. Il devrait être possible de faire la recherche scientifique en même temps.

Quant au parc marin de Gwaii Haanas, il compte une grande île, l'île Graham, qui est encore viable. L'autre île qui est presque reliée à la première, est celle de Moresby. La moitié de cette île est disparue. C'est maintenant un parc auquel les habitants de la localité n'ont pas accès. Il faut suivre un cours d'un jour ou deux avant de pouvoir y aller.

Il y aura un parc marin...

Le président: Pouvons-nous passer à la question suivante? Sinon, nous manquerons de temps.

Monsieur Burton, vous avez une dernière question à poser, je crois.

M. Andy Burton: Au sujet de l'apport de la population locale dans le renforcement de la capacité... Comme vous l'avez dit, si on a la volonté politique d'aller de l'avant avec ce projet de loi, il sera adopté et mis en vigueur, mais nous aimerions voir des changements. Pourrions-nous améliorer le libellé concernant la contribution de la population locale? Je suis certain que vous aimeriez qu'on vous garantisse que, lorsqu'on propose ou qu'on établit des aires marines de conservation, on consultera la population locale auparavant et on lui permettra d'avoir voix au chapitre. Qu'en pensez-vous?

Mme Joan Ann Allen: Je sais que l'établissement de l'aire marine sur la rive nord du lac Supérieur a nécessité 10 ans de consultations par l'entremise d'un comité consultatif composé d'habitants de l'endroit, mais que l'aire marine n'existe pas encore. C'est là le genre de chose qu'il nous faut, un comité communautaire local, un comité consultatif constitué de tous les intervenants afin que nous ayons voix au chapitre.

M. Andy Burton: Merci.

[Français]

Le président: Monsieur Plamondon, est-ce que vous avez des questions?

M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Non.

[Traduction]

Le président: Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci d'être venue, madame Allen.

Le président vous a interrompue au moment même où vous alliez nous dire quelque chose d'intéressant sur le parc marin Gwaii Haanas. Vous alliez nous dire quelque chose sur ce parc. Pourriez-vous nous parler un peu du parc marin dans votre région?

Mme Joan Ann Allen: Lorsque le parc Gwaii Haanas a été établi, le plan officiel prévoyait la création d'une aire marine de conservation tout autour du parc. Pour autant que je sache, ça n'a pas encore été fait, mais c'est prévu. Cela englobera la moitié des îles de la Reine-Charlotte.

Mme Sarmite Bulte: Avez-vous participé aux consultations qui ont été menées sur ce parc marin?

Mme Joan Ann Allen: Non, elles se sont tenues il y a déjà quelques années.

Mme Sarmite Bulte: Les consultations ont déjà été faites?

Mme Joan Ann Allen: Oui.

Mme Sarmite Bulte: Je ne comprends pas. On a créé ce parc en partie pour y établir une aire marine de conservation, n'est-ce pas?

Mme Joan Ann Allen: Non. Il s'agit des îles qui entourent l'île Moresby. J'ai des cartes qui vous montrent l'île Graham, et, au sud, l'île Moresby. Toute la pointe méridionale sera transformée en parc. Mais on veut aussi établir un parc marin tout autour de l'île.

Mme Sarmite Bulte: À votre connaissance, a-t-on mené des consultations semblables sur le parc marin ces dernières années?

Mme Joan Ann Allen: Non, pas pour autant que je sache.

Mme Sarmite Bulte: Vous avez dit que, à votre avis, le ministère des Pêches et des Océans s'acquitte assez bien de sa tâche de contrôler la pêche. Vous avez aussi demandé pourquoi y mêler Parcs Canada. J'ignore si vous le savez—votre préoccupation me semble légitime—mais la loi prévoit que, en ce qui concerne tout genre de pêche ou d'aquaculture, le ministre du Patrimoine canadien doit consulter le ministre des Pêches et des Océans au sujet de toute réglementation qu'il voudrait imposer. Cela apaise-t-il vos inquiétudes?

• 0930

Mme Joan Ann Allen: Non, pas vraiment, parce que nous sommes si loin. Il est déjà assez difficile pour le gouvernement de la Colombie-Britannique d'assurer le respect de toutes ces lois, mais j'imagine que ce serait possible.

Mme Sarmite Bulte: Je vous pose la question, parce qu'on est assez positif au sujet du MPO. Je voulais simplement vous rassurer en vous faisant remarquer qu'une entente sera exigée pour tout ce qui concerne la pêche.

Mme Joan Ann Allen: Nous nous plaignons tous. Les pêcheurs se sont plaints amèrement du MPO, mais, maintenant, au moment crucial, ils nuancent leurs propos et affirment que le ministère ne s'en tire pas si mal.

Des voix: Oh, oh!

Mme Joan Ann Allen: C'est qu'ils craignent que quelqu'un d'autre prenne le contrôle...

M. Andy Burton: Le MPO, c'est mieux que Parcs Canada.

Mme Joan Ann Allen: C'est exact.

Mme Sarmite Bulte: Je vois. Vous avez soulevé un point semblable relativement au paragraphe 16(2) prévoyant que tout règlement doit être pris par le ministre en consultation avec le ministre des Pêches et des Océans. Il en va de même pour le plan de gestion qu'on envisage; le ministre des Pêches et des Océans doit aussi donner son accord.

Mme Joan Ann Allen: Il y a quelques années, les Haïdas avaient une énorme flotte de pêche. Depuis, ils ont vendu leurs permis. Le taux d'emploi à Skidegate, au sud de l'île, était de 75 p. 100; il compte maintenant un taux de chômage de 75 p. 100.

Ils commencent à s'intéresser à l'affrétage de bateaux, notamment pour la pêche, dans les îles. C'est un secteur viable, en pleine croissance, surtout auprès des Européens. Il y a deux ou trois très bonnes rivières où le saumon vient frayer. C'est là le genre de pêche qu'aiment bien les Européens, et ce secteur connaît une croissance importante. Nous tentons de remplacer l'exploitation forestière qui, nous le savons, touche à sa fin.

Le président: Vous avez le temps de poser une dernière question.

Mme Sarmite Bulte: Vous vous êtes dit préoccupée, à l'instar de bien d'autres témoins que nous avons entendus avant vous, par la nécessité que la province soit consultée. Je tiens à vous assurer que c'est crucial. Si nous amendions ce projet de loi pour l'améliorer, quelles recommandations nous feriez-vous pour que nous puissions vous garantir que rien ne sera fait sans la contribution des localités côtières et le consentement de la province?

Mme Joan Ann Allen: Pouvez-vous garantir qu'on consultera le gouvernement de la Colombie-Britannique avant d'agir? C'est essentiel. Le mode de vie y est si différent.

Mme Sarmite Bulte: C'est là notre intention, et je sais que cela préoccupe bien des gens. Je tente de trouver une façon de vous rassurer non seulement personnellement, mais en le prévoyant dans la loi.

Mme Joan Ann Allen: Aussi loin que je me rappelle, la Colombie-Britannique a été une province riche qui versait de l'argent à l'est du pays sous forme de paiements de transfert. Récemment, nous avons commencé à perdre du terrain. Nous avons souffert; la Colombie-Britannique a été très touchée par les ralentissements dans les secteurs des mines, de l'exploitation forestière et maintenant de la pêche, et cela ne semble pas vouloir cesser. Nous voulons avoir la chance de nous rétablir.

Mme Sarmite Bulte: Je vous remercie beaucoup, madame Allen, d'être venue nous parler.

Le président: Monsieur McNally, avez-vous une question?

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, PC/RD): À la fin de votre exposé, vous avez fait allusion à des lignes directrices exécutoires. Pourriez-vous nous expliquer davantage ce que c'est? Vous l'avez déjà bien expliqué.

Mme Joan Ann Allen: Le journal local a publié juste avant mon départ un court article disant que la GRC et Parcs Canada ne s'entendaient pas sur la question de savoir qui gérerait le parc Gwaii Haanas, qui allait veiller au respect du règlement. Parcs Canada refuse de le faire parce que ses agents veulent des armes à feu. Par conséquent, à l'heure actuelle, c'est la GRC qui assure l'application de la loi dans ce parc—où il est extrêmement difficile de se rendre—alors que déjà, la GRC manque de ressources sur notre île.

• 0935

Le règlement du code des pratiques forestières... C'est de cela que nous parlons—d'un manuel semblable qui est ensuite modifié à répétition. Je n'ai pas d'objection à ce que les groupes environnementalistes soient consultés, mais c'est devenu ridicule. Mon fils est ingénieur. Chaque semaine, lui et ses collègues devaient refaire leurs plans par suite de changements apportés à la loi pour satisfaire les groupes environnementalistes. Nous ne voulons pas que cela se reproduise.

M. Grant McNally: Vous craignez donc que cette situation se reproduise si la loi ou le règlement n'est pas plus précis?

Mme Joan Ann Allen: C'est exact. Et il faut que ce soit simple.

M. Grant McNally: Car cela aura une incidence sur l'économie, comme vous l'avez souligné plus tôt.

Mme Joan Ann Allen: En effet.

M. Grant McNally: Merci.

Le président: Monsieur Cuzner, vous avez la parole.

M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape-Breton, Lib.): Madame Allen, vous avez fait allusion à un fonds de 20 millions de dollars qui a été établi au moment où l'on a décidé de créer le parc Haida Gwaii; vous avez dit qu'on avait eu du mal à accéder à ce fonds. Je sais qu'on essaie souvent de dorer la pilule qui serait autrement un peu difficile à avaler. Est-ce que des initiatives ont été menées à bien grâce à ce fonds? Et qu'est-ce qui fait qu'il est si difficile d'y avoir accès?

Mme Joan Ann Allen: Personne ne semble savoir où il est. Notre député provincial, Bill Belsey, s'occupe du dossier. Pendant quelques années, l'argent provenant de ce fonds a servi à diverses initiatives, mais surtout pour des études qui, pour les habitants des îles, sont sans valeur. Il semble que l'argent ait été versé au gouvernement de la Colombie-Britannique, et nous tentons d'y avoir accès. Nous espérions, avec cet argent, accorder des subventions pour la création d'entreprises, mais nous n'avons pas encore réussi à retrouver le fonds. À l'origine, il avait été créé pour financer les entreprises qui remplaceraient l'exploitation forestière sur l'île Moresby. Dans les années 1800 et au début des années 1900, l'île Moresby était très prospère; on y trouvait des mines de charbon, des fonderies de fer et des conserveries. Maintenant, c'est un parc et toute la partie sud est inaccessible.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

M. Andy Burton: Oui, monsieur le président, j'aimerais poser encore deux ou trois courtes questions.

En ce qui concerne ce fonds, vous parlez du gouvernement précédent de la Colombie-Britannique, le gouvernement néo-démocrate qui a depuis été remplacé.

Mme Joan Ann Allen: C'est exact.

M. Andy Burton: J'espère que ce problème se réglera. Et Mme Allen a fait mention du député Bill Belsey qui est bien député provincial et non pas fédéral.

Quand le parc Moresby-Sud ou Gwaii Haanas a été créé—il y a déjà quelques années de cela—Parcs Canada avait laissé entendre que les emplois que créerait le parc remplaceraient tous ceux qui avaient été perdus dans le secteur de l'exploitation forestière. Que s'est-il passé? Vos attentes ont-elles été comblées? Sinon, comment expliquez-vous cela?

Mme Joan Ann Allen: Non, nos attentes n'ont pas été comblées alors et ne le sont toujours pas aujourd'hui. Le tourisme devait remplacer l'exploitation forestière, mais tel n'a pas été le cas. Ce n'est pas possible. Le tourisme est trop strictement contrôlé par un groupe se trouvant sur l'autre île, sur l'île de la Reine-Charlotte. Je sais que des yachts sont venus de Vancouver. Ces touristes ont été si déçus et contrariés qu'ils ont promis de ne jamais revenir. Ils ont été mal accueillis et, en plus, ils ont dû suivre un cours sur le respect de l'environnement. Ça ne marche tout simplement pas.

M. Rodger Cuzner: Monsieur le président, voici où je veux en venir: sauf tout le respect que je vous dois—j'ai vécu toute ma vie dans le nord de la Colombie-Britannique, où l'économie est aussi axée sur les ressources—vous ne pouvez remplacer des emplois bien rémunérés de l'industrie primaire, que ce soit dans le secteur de la pêche, des forêts, des mines ou du gaz et du pétrole, par des emplois dans le domaine du tourisme. Le tourisme est une industrie secondaire. Bien sûr, nous sommes tous d'accord pour dire que le tourisme est merveilleux, mais il ne peut assurer la viabilité de localités dans des régions isolées. C'est impossible. Il faut trouver une façon d'exploiter les ressources de façon écologique pour créer les emplois qui maintiendront la viabilité de ces collectivités.

• 0940

J'ai l'impression que vous êtes d'accord avec moi là-dessus, madame Allen.

Mme Joan Ann Allen: Absolument. Les abatteurs touchent 400 $ par jour; ils ne feront jamais autant d'argent dans le secteur du tourisme. C'est un emploi très dangereux et ils méritent leur salaire, mais vous ne pouvez vous attendre à ce qu'ils acceptent un salaire de 7 $ l'heure. C'est impossible.

Le président: Madame Allen, pourrais-je avant de vous poser une question faire une observation?

M. Burton a parlé des consultations exhaustives qui avaient été menées sur le parc Moresby-Sud. Vous avez aussi mentionné le lac Supérieur où un conseil consultatif existe et où il y a eu beaucoup de consultations. Bien sûr, la différence, c'est qu'aucune aire marine de conservation n'est prévue dans votre région ou ailleurs en Colombie-Britannique. Il n'y en a pas. Pour le lac Supérieur, on compte en créer une et c'est pour cela qu'on a mis sur pied le conseil consultatif.

J'ignore si vous avez le projet de loi sous les yeux.

Mme Joan Ann Allen: Oui, je l'ai.

Le président: Je vous renvoie au paragraphe 10(1):

    Le ministre favorise la consultation des ministres et organismes fédéraux et provinciaux concernés et des communautés côtières, des organisations autochtones [...] ainsi que des autres personnes ou organismes qu'il estime indiqués en ce qui touche l'élaboration de la politique relative aux aires marines de conservation, la constitution ou la modification de celles-ci [...]

Je reconnais que le libellé n'est pas très rigoureux, car on se contente de dire que le ministre «favorise la consultation». Si l'on disait plutôt que le ministre «consulte»—ce qui serait préférable, à mon avis—cela vous satisferait-il, puisque le ministre serait tenu de mener des consultations? Si l'on créait demain dans votre région ou ailleurs en Colombie-Britannique une aire marine de conservation, on procéderait comme on l'a fait pour Moresby-Sud ou le lac Supérieur. On ne pourrait procéder autrement. Seriez-vous rassurée si cette disposition exigeait du ministre qu'il mène des consultations et non pas qu'il favorise seulement la consultation?

Mme Joan Ann Allen: Oui. Ce serait acceptable de dire plutôt que le ministre «consulte». Je suis parfois déroutée, car on veut établir 29 parcs marins à l'échelle du pays.

Le président: Non, madame Allen...

Mme Joan Ann Allen: Je sais que c'est un projet de loi.

Le président: Ce n'est qu'une loi habilitante. Cette mesure législative ne crée aucun parc.

Mme Joan Ann Allen: Je comprends.

Le président: Elle confère au gouvernement le pouvoir d'envisager la possibilité de créer des aires marines de conservation. Si les intéressés ne sont pas d'accord, le parc ne peut être créé.

C'est ce qui s'est passé à Terre-Neuve. Il y a deux ou trois ans, le projet de loi C-48 prévoyait l'établissement d'une aire de conservation marine dans l'est de cette province. Le secteur de l'aquaculture s'y est vigoureusement opposé, ainsi que plusieurs autres groupes communautaires. Le parc n'a pas été créé puisqu'il n'y avait pas consensus. On ne peut forcer les gens à accepter ce genre de chose. C'est ce qui s'est passé dans ce cas. On a abandonné le projet.

Y a-t-il d'autres questions avant que je remercie Mme Allen? Monsieur Burton.

M. Andy Burton: Monsieur le président, c'est une préoccupation très légitime. Il faut qu'on nous garantisse que ces consultations auront lieu—le ministre doit être tenu de mener des consultations, garantir que les populations locales auront voix au chapitre et qu'on ne comptera pas simplement sur un comité ad hoc provenant de Dieu sait où.

Je répète aussi que, ce qui nous inquiète relativement à l'article 13, c'est le remplacement des emplois. Il faut pouvoir exploiter les ressources qui sont là. Il y a peut-être du pétrole ou du gaz. C'est là notre réserve au sujet de l'article 13. Nous ne devrions pas nous limiter ainsi.

• 0945

Il faudra aussi préciser les compétences fédérales et provinciales, comme je l'ai indiqué mardi. Il faut qu'on comprenne bien que la province devra être consultée s'il s'agit d'une compétence provinciale. Je ne suis pas encore certain s'il s'agit ici d'une compétence fédérale—il semble que la côte septentrionale relève en bonne partie du fédéral. Il faudra aussi préciser cela avant de mettre la touche finale au projet de loi.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Madame Allen, nous vous sommes très reconnaissants d'avoir fait tout ce chemin. Vous nous avez aidés. Vous nous avez dit sans ambages quels sont les problèmes dans votre région. Nous sommes très sensibles à ce que vous avez dit. Je vous remercie beaucoup d'être venue d'aussi loin.

Nous avons maintenant deux choix. Les fonctionnaires du ministère sont censés témoigner et à 11 heures nous avons une vidéoconférence avec des témoins de Vancouver en Colombie-Britannique. Nous pouvons faire une pause jusqu'à 11 heures ou entendre les fonctionnaires puis faire une pause avant la vidéoconférence.

Nous allons entendre les fonctionnaires.

Voulez-vous prendre place, madame Katz, s'il vous plaît?

Permettez-moi de vous présenter les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada. Mme Susan Katz, directrice, Législation et politiques; M. Nik Lopoukhine, directeur général, Direction des parcs nationaux; M. Kevin McNamee, directeur, Établissement de parcs—je crois que M. Latourelle n'est pas ici, madame Katz; enfin, Mme Daphne Porter, conseillère juridique de l'Agence.

Qui veut commencer?

M. Nick Lopoukhine (directeur général, Direction des parcs nationaux, Agence Parcs Canada): Je vais céder la place à Mme Katz, qui fera l'exposé.

Le président: Très bien, merci.

Mme Susan Katz (directrice, Législation et politiques, Agence Parcs Canada): Merci.

Nous avons déposé des exemplaires supplémentaires aujourd'hui de l'exposé de notre directeur général, M. Tom Lee, lorsqu'il a comparu devant le comité permanent en mai. Je compte donner une vue d'ensemble du projet de loi et évoquer certains des sujets de préoccupation exprimés au comité.

Tout d'abord, j'aimerais dire quelques mots au sujet de Parcs Canada et de son mandat. Parcs Canada crée et gère une famille d'aires patrimoniales protégées qui inclut les parcs nationaux, les lieux historiques nationaux, les canaux historiques, les rivières du patrimoine ainsi que les aires marines nationales de conservation.

Notre mandat consiste à protéger et à mettre en valeur des exemples représentatifs du patrimoine naturel et culturel du Canada ainsi qu'à favoriser dans la population la connaissance, l'appréciation et la jouissance de ces sites spéciaux. Toutes ces aires protégées contribuent à la mission du ministère du Patrimoine canadien puisqu'elles procurent un sentiment de fierté.

• 0950

L'ajout des aires marines nationales de conservation (AMNC) à cette famille d'aires patrimoniales comble une lacune car les océans du Canada et les Grands Lacs jouent un rôle important au plan de l'économie, de la culture et de l'identité du pays.

Le programme des AMNC de Parcs Canada vise à protéger et à conserver un exemple représentatif des 29 régions marines du pays dans les océans Atlantique, Pacifique et Arctique, ainsi que dans les Grands Lacs.

J'aimerais apporter une précision. Dans le document que nous vous avons remis, vous trouverez une carte qui décrit chacune des régions marines, qui comprennent le littoral et les Grands Lacs. Notre mission est de créer des aires marines nationales de conservation représentatives de chacune de ces régions.

Pour chacune d'entre elles, nous cherchons un site qui représente bien les caractéristiques locales. Nous cherchons normalement un territoire qui représente entre 3 et 5 p. 100 de la superficie totale de la région. Les limites que vous voyez sur la carte désignent les régions et non les AMNC.

Vous verrez en médaillon certaines des régions sur lesquelles nous travaillons actuellement et pour lesquelles il existe des accords fédéraux-provinciaux. Ces secteurs représentent entre 3 et 5 p. 100 de l'ensemble de la région. Je voulais le préciser parce que je sais que certains s'inquiètent de l'étendue de l'aire par rapport à l'ensemble de la région.

Les AMNC ne sont pas simplement des «parcs nationaux dans l'eau». La priorité dans la gestion des parcs nationaux est l'intégrité écologique, c'est-à-dire la conservation des lieux dans un état pratiquement inaltéré par l'activité humaine. Quant aux AMNC, ce sont des endroits à usages multiples où peuvent se pratiquer des activités comme la chasse, la pêche et l'aquaculture qui, d'ailleurs, se poursuivront.

La Loi sur les parcs nationaux du Canada n'est pas l'instrument juridique qui convient au programme des AMNC; elle est trop restrictive et mal adaptée aux complexités de l'environnement maritime. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a déposé le projet de loi C-10.

Le but est d'utiliser ces espaces de façon à satisfaire aux besoins des humains sans compromettre la santé de leurs écosystèmes. Idéalement, ces espaces serviront de modèles d'utilisation écologiquement durable.

Il faut aussi prendre des mesures globales de protection. Bien que Parcs Canada puisse jouer un rôle de coordination importante, elle ne peut à elle seule gérer ces aires. Il faut respecter la compétence des autres ministères pour gérer des activités comme la pêche et la navigation commerciale.

Je précise à ce propos que la gestion des pêches dans les AMNC continuera de relever du ministre des Pêches. Il est prévu dans le projet de loi que si le ministre du Patrimoine souhaite proposer un règlement applicable à la pêche dans une AMNC, celui-ci devra obtenir le consentement du ministre des Pêches. La gestion des pêches dans ces aires relève donc toujours du ministre des Pêches.

Les AMNC ne connaîtront pas le succès sans la collaboration et l'appui de la population locale. Les résidents et les groupes d'usagers touchés doivent participer à leur planification et à leur gestion. Si la population locale n'appuie pas une AMNC, Parcs Canada regardera ailleurs.

Il y a un exemple qui a été signalé au comité lorsqu'il a tenu des audiences sur le projet de loi en 1999. Parcs Canada avait lancé une étude de faisabilité dans la région de la baie de Bonavista à Terre-Neuve. Au fur et à mesure que l'étude progressait, il est apparu que l'idée ne jouissait pas de l'appui de l'ensemble de la population, si bien que l'on a mis un terme à l'étude de faisabilité.

Voici les principaux éléments de la loi proposée: elle définit la manière dont les AMNC sont créées, le mode de gestion, les interdictions applicables, le pouvoir de réglementation et l'application des lois.

• 0955

En ce qui concerne l'établissement des aires marines, je rappelle tout d'abord que le projet de loi est une loi cadre; il s'agit d'une loi habilitante. Elle crée le moyen de créer et de gérer les AMNC, mais n'en crée aucune. Les annexes du projet de loi sont vides. Plusieurs personnes l'ont signalé. Pourquoi? Parce que le gouvernement n'a encore aucune proposition d'AMNC à déposer au Parlement.

La loi définit la marche à suivre pour créer des AMNC. Autrement dit, pour les assujettir à cette loi, il faut un décret du conseil que le ministre dépose au Parlement et renvoie aux comités permanents appropriés de la Chambre et du Sénat qui examine la proposition.

Beaucoup de travail doit être fait auprès des populations locales avant de pouvoir présenter une proposition au Parlement. De nombreux travaux scientifiques également ainsi que des consultations nombreuses avec des comités consultatifs locaux. Il faut également préparer un plan directeur provisoire.

Une proposition au Parlement doit comporter un rapport sur les consultations ainsi qu'un plan de gestion provisoire.

Certains ont dit craindre que ces aires soient créées très rapidement, sans l'appui de la population locale, sur ordre du Cabinet. En réalité, lorsque le ministre présente une proposition au Parlement, il doit présenter un rapport sur les consultations ainsi qu'un plan de gestion provisoire élaboré en consultation avec les populations locales.

Il y a deux façons de créer une AMNC. Une AMNC peut être créée comme AMNC pleine et entière. Si toutefois des populations autochtones revendiquent une partie du territoire visé et si le gouvernement accepte de négocier cette revendication, l'aire est créée et gérée sous forme de réserve en attendant le règlement de la revendication.

Le projet de loi interdit notamment l'extraction de ressources non renouvelables et l'immersion en mer. L'immersion serait interdite dans les limites de l'AMNC sauf en situation d'urgence où la vie humaine est menacée.

L'article 16 énonce certains pouvoirs de prendre des règlements. Ces pouvoirs viennent combler les lacunes d'autres lois. Comme je l'ai dit, le ministre des Pêches et celui des Transports disposent déjà de certains pouvoirs. Ces dispositions de la Loi sur les pêches et de la Loi sur la marine marchande n'ont jamais eu pour but de répondre aux besoins particuliers des AMNC, comme la protection des ressources culturelles, la sécurité des visiteurs, l'établissement de zones de gestion et le contrôle des activités dans ces zones.

Les pouvoirs de prendre des règlements énoncés dans le projet de loi viennent donc compléter les pouvoirs semblables que l'on trouve dans d'autres lois. Toute disposition réglementaire qui touche aux compétences du ministre des Pêches ou de celui des Transports doit faire l'objet d'une recommandation conjointe du ministre du Patrimoine canadien et de l'autre ministre concerné.

Enfin, en ce qui concerne l'application de la loi, les mesures que l'on trouve dans le projet de loi sont semblables à celles d'autres lois relatives à l'environnement, comme la Loi sur les océans et la Loi sur les espèces sauvages du Canada.

Ce projet de loi a un long historique, qui remonte aux premiers jours de la politique des aires marines, en 1986. Celle-ci a été révisée en 1994, encore une fois à la suite de nombreuses consultations. En 1996, le premier ministre a annoncé l'intention du gouvernement de présenter une nouvelle loi pour administrer et gérer un réseau d'aires marines de conservation. Des consultations sur ce texte ont été entreprises en 1997 et, en 1998, le projet de loi C-48 a été déposé.

• 1000

Un certain nombre d'amendements ont été apportés au projet de loi C-48 en 1999 pour tenir compte des préoccupations exprimées par les témoins. Le texte que vous avez sous les yeux reprend tous les amendements apportés par le comité permanent en 1999. J'aimerais énumérer brièvement les principaux amendements apportés par le comité à l'époque.

Tout d'abord, une clause excluant les dérogations a été ajoutée à la loi. Plusieurs intervenants avaient recommandé d'inclure une clause excluant les dérogations dans le projet de loi. Plusieurs d'entre eux avaient recommandé que soient protégés de cette manière les droits des Autochtones—ancestraux ou issus de traités. Ces droits constitutionnels existent indépendamment de toute loi du Parlement, qu'elle comporte ou non une clause excluant les dérogations. Toutefois, le gouvernement en a ajouté une pour plus de certitude et pour rassurer les populations autochtones.

L'accord des provinces. Certains ont dit craindre, aussi bien à la Chambre des communes que devant le comité permanent, que le projet de loi empiète sur les compétences des provinces. Tel n'est pas le cas. De fait, si la province est propriétaire du fond marin là où Parcs Canada envisage d'établir une AMNC, une entente doit être conclue pour transférer les droits de propriété au gouvernement fédéral, sans quoi l'AMNC ne pourra voir le jour. Pour plus de certitude, cette exigence figure dorénavant dans le projet de loi.

L'obligation d'avoir un plan directeur provisoire. Certains ont dit devant le comité permanent—et je crois que la même inquiétude a été exprimée cette semaine—qu'on ne peut pas s'attendre à ce que les populations locales se prononcent pour ou contre une AMNC sans avoir une idée de la façon dont elle allait être gérée et que le délai de cinq ans pour préparer un plan directeur provisoire est trop long. Pour cette raison, le plan directeur provisoire doit dorénavant être déposé en même temps que la proposition au Parlement. Si l'étude de faisabilité est concluante, il faudra donc ensuite préparer un plan directeur provisoire. Les populations locales seront invitées à se prononcer pour ou contre le principe de la création de l'aire en sachant comment elle sera gérée.

Enfin, en 1999, le projet de loi a été amendé pour établir un zonage des AMNC. À ce moment-là, le comité permanent avait entendu l'expression de deux grandes préoccupations. On se demandait si effectivement les aires marines de conservation seraient oui ou non des zones à usages multiples. On se demandait si on permettrait qu'on s'adonne à la pêche ou à l'aquaculture dans ces zones. Par ailleurs, d'autres s'inquiétaient de savoir si la protection des aires serait suffisante, par exemple, pour préserver les frayères de grande importante, les sites culturels, ou les lieux de mise bas des baleines.

Le projet de loi C-10 dit clairement que dans les aires marines de conservation, on doit prévoir au moins deux types de zones: des zones à usages multiples et des zones auxquelles on accordera une protection spéciale.

Le projet de loi suscite encore certaines interrogations auxquelles je vais tenter de répondre. On se demande en effet si la norme de gestion doit être l'intégrité écologique, comme dans les parcs nationaux. La gestion de l'intégrité écologique est une approche qui vise à maintenir les écosystèmes dans un état pratiquement inaltéré par l'usage humain. L'intégrité écologique est la priorité absolue de la gestion des parcs nationaux. Comme je le disais tout à l'heure, les aires marines de conservation ne sont pas des «parcs dans l'eau». Elles sont conçues pour être des modèles d'utilisation écologiquement durable et il convient donc que le projet de loi précise que l'intégrité écologique est la priorité des priorités en matière de gestion.

• 1005

On s'est aussi demandé si les mesures prises ne faisaient pas inutilement double emploi avec d'autres programmes fédéraux. Le programme des aires marines de conservation fait en fait partie d'un vaste engagement visant à établir un réseau complet d'aires protégées dans les océans du Canada. Il n'y a donc pas de double emploi dans ces programmes fédéraux. Le ministère des Pêches et des Océans établit des zones de protection marines surtout dans le but de protéger et de conserver certaines ressources et certains habitats spécifiques ou menacés. Environnement Canada établit des réserves nationales de faune et des réserves marines de faune dont le but premier est de protéger des habitats essentiels aux oiseaux marins. Ce sont là des désignations à but unique. Le programme de Parcs Canada vise un éventail plus large. Il s'agit d'un programme de conservation du patrimoine qui convient de façon idéale au mandat du portefeuille du Patrimoine canadien et de Parcs Canada en particulier.

De plus, le gouvernement fédéral a institué un comité directeur interministériel sur les aires marines protégées qui assure la coordination des efforts entre les ministères. Nous participons étroitement à l'établissement des aires, et l'on peut dire que nous visons le même objectif car nous nous prêtons mutuellement appui et main-forte.

On a également demandé si le projet de loi empiétait sur les compétences provinciales. Comme je l'ai dit, la loi constitue un énoncé très clair qui exige une entente conclue avec toute province qui possède des fonds marins avant qu'une AMNC puisse être établie. De plus, le gouvernement fédéral n'a pas l'intention d'agir unilatéralement pour désigner une aire marine nationale de conservation lorsque la compétence relativement au fond marin est contestée. Idéalement, un litige à ce sujet devrait être résolu avant la constitution d'une aire marine nationale de conservation.

Autre question: y a-t-il des exigences précises quant à la consultation des populations locales. On s'est inquiété du fait que le conseil des ministres pouvait désigner ces aires sans que les communautés côtières aient leur mot à dire. La consultation publique est obligatoire en vertu des dispositions de la loi. En outre, la nature de ces consultations est dictée par les politiques de Parcs Canada. À cet égard, on n'a qu'à se reporter à l'étude de faisabilité du lac Supérieur. Cela s'est révélé un processus très rigoureux qui a duré quelques années. Un comité consultatif local a été formé et il représente les intérêts des localités riveraines de la rive nord du lac Supérieur. Ce processus, très rigoureux et très approfondi, a permis de conclure qu'on appuyait la désignation d'une aire marine de conservation sur la rive nord du lac Supérieur et qu'on souhaitait vivement passer à l'étape suivante.

Une fois qu'une aire est établie, la consultation et les discussions avec les populations locales ne s'arrêtent pas. Le projet de loi prévoit la constitution de comités consultatifs sur l'aire dont la tâche ne consistera pas tout simplement à planifier l'établissement de l'aire, mais également à prêter assistance et conseil au ministre pour ce qui est de la gestion, sur une base permanente.

Je vais m'en tenir à cela et n'ajouter que quelques remarques en conclusion. Le Canada est très fier de son patrimoine marin et le projet de loi C-10 est une loi-cadre nécessaire pour permettre l'établissement, la gestion et la protection des AMNC et pour protéger notre patrimoine marin en même temps.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, madame Katz.

Y a-t-il de vos collègues qui voudraient faire des remarques ou devrions-nous passer tout de suite aux questions?

M. Nik Lopoukhine: Passons tout de suite aux questions.

Le président: D'accord.

M. Andy Burton: Merci beaucoup.

Votre exposé était fort intéressant, mais je pense quand même qu'il y a des ambiguïtés... Cette loi crée des chevauchements de bureaucratie et de compétence. Pourquoi la Loi sur les océans et la Loi sur les pêches ou d'autres lois qui déjà contiennent bon nombre des mêmes principes... Par exemple, quelle différence y a-t-il entre les zones de protection marines, dont il est question dans la Loi sur les océans, et les aires marines de conservation, qui relèveront de Patrimoine Canada? Il me semble que cela fait beaucoup de double emploi. Pouvez-vous nous en dire davantage?

• 1010

Mme Susan Katz: Les zones de protection marines, prévues dans les dispositions de la Loi sur les océans, sont des désignations à but unique. Elles sont protégées en raison d'un enjeu ou d'un problème particulier. En l'absence de ce problème ou de cet enjeu, la désignation est retirée.

Les aires marines nationales de conservation visent un objectif plus vaste. On veut y protéger la représentation d'une région marine avec toutes ses caractéristiques. Ces aires seront désignées à perpétuité, comme exemples du patrimoine marin du Canada, afin de protéger et de conserver ce patrimoine de façon permanente. Ces aires permettent aux Canadiens de se renseigner sur leur patrimoine et de tirer profit de la fréquentation de ces zones.

M. Andy Burton: Merci.

Sous la rubrique Interdictions, l'article 13 interdit toute prospection ou extraction d'un minerai quelconque. Étant donné la technologie dont nous disposons aujourd'hui, l'extraction du pétrole et du gaz ne pourrait-elle pas se faire d'une manière qui n'endommage pas l'environnement? Est-ce qu'on ne s'y adonne pas ainsi ailleurs dans le monde? Je pense que oui.

Mme Susan Katz: On continue de s'inquiéter à l'idée de permettre la prospection pétrolière et gazière dans les aires marines de conservation car cela pourrait exposer à des risques les caractéristiques de l'aire et les ressources qui s'y trouvent. L'interdiction d'exploiter le pétrole et le gaz est une norme internationale qu'il faut respecter quand on désigne des aires marines protégées. C'est une norme à laquelle le Canada adhère.

Cela découle également des consultations intensives qui ont précédé l'élaboration de notre politique marine. Nos consultations ont révélé que même si l'on souhaitait maintenir une exploitation durable des ressources marines dans les aires marines de conservation, on n'était pas prêt à accepter la mise en valeur des ressources non renouvelables qui comporte des risques et qui devrait donc être interdite dans les aires marines nationales de conservation. Ainsi, la politique retenue interdit la mise en valeur des ressources non renouvelables dans les aires. Les dispositions de la loi tiennent compte de cette politique.

M. Andy Burton: Mardi, nous avons entendu quelque chose d'intéressant. Un de nos témoins, un pêcheur commercial ayant bien des années d'expérience, nous a dit que dans une zone où l'on creusait des puits, les pêcheurs attachaient une extrémité de leur seine à l'une des piles de la plate-forme de forage.

Voici où je veux en venir. Je pense que ce projet de loi est trop restrictif. Nous comprenons tous qu'il est nécessaire de préserver l'environnement et personne ne conteste cela, mais je pense que le projet de loi va trop loin. Ce projet de loi serait beaucoup plus acceptable si on réduisait le nombre des interdictions. Sur la côte Nord, l'interdiction d'exploiter le gaz et le pétrole inquiète vivement.

Mme Susan Katz: Permettez-moi d'ajouter quelque chose là-dessus.

Quand Parcs Canada établit des aires marines de conservation, l'une des considérations scientifiques les plus importantes dont on tient compte au préalable est l'évaluation des ressources minérales et énergétiques. Le même processus s'applique lorsque l'on désigne des parcs nationaux et il s'appliquera pour l'établissement des aires marines de conservation.

Quand nous envisageons divers sites dans une région donnée pour déterminer quel site représente le plus fidèlement la région, une des études les plus importantes, dans tous les cas, est l'étude concernant d'éventuels gisements de pétrole et de gaz. Nous utilisons cette information pour établir les limites des aires marines de conservation proposées, afin de garantir qu'il n'y ait pas de conflits entre les objectifs que nous poursuivons et les débouchés économiques dont pourraient bénéficier les localités côtières par la mise en valeur du pétrole et du gaz.

• 1015

Nous faisons cela soigneusement pour qu'il n'y ait pas de conflits. Nous faisons la même chose dans le cas du territoire domanial. Les gouvernements provinciaux ont eux aussi des processus visant à accomplir la même chose.

M. Andy Burton: Je comprends. C'est rassurant. Je souhaiterais que cela soit explicite dans le projet de loi, pour que ce soit bien clair et que tout le monde sache à quoi s'en tenir.

Je voudrais vous poser une autre question dans la même veine. Si une aire était créée et que pour une raison quelconque, le potentiel pétrolier et gazier n'était pas jugé assez considérable mais n'en existait pas moins, y aurait-il un empêchement à avoir recours au forage dévié? Je suis sûr que vous savez ce qu'est le forage dévié, la sondeuse pouvant être éloignée de 10 kilomètres de la zone de forage. Le projet de loi n'est pas clair, car on dit tout simplement «interdiction d'extraction de pétrole et de gaz».

Est-ce qu'il y aurait un empêchement à ce genre de situation—extraire du fond marin grâce à une méthode déviée? La sondeuse elle-même serait située à l'extérieur de l'aire marine de conservation mais le forage se ferait en déviation sous le lit marin.

Mme Susan Katz: D'après votre exemple, les ressources seraient extraites de l'aire marine de conservation, d'un territoire domanial protégé en vertu des dispositions de la loi, n'est-ce pas?

M. Andy Burton: C'est cela. Vous me dites donc que non.

Mme Susan Katz: C'est cela, parce que l'extraction se ferait sur le territoire d'une aire marine nationale de conservation.

M. Andy Burton: Cela ne fait qu'ajouter à mes inquiétudes concernant l'article 13. Je pense qu'il faut bien approfondir cela car il s'agirait d'extraire une ressource qui se trouve enfouie 20 000 ou 30 000 pieds sous le fond marin. Je ne vois vraiment pas où il y aurait une difficulté, en toute franchise.

Vous avez dit, madame Katz, qu'actuellement il n'y avait aucune aire marine de conservation envisagée pour l'instant. Pourtant, Gwaii Haanas et une région du lac Supérieur dans les Grands Lacs font l'objet d'études. Le détroit de Georgia sud est également encerclé sur la carte. Cela ne veut-il pas dire qu'on envisage de les désigner?

Mme Susan Katz: Oui. Je n'ai peut-être pas été assez claire. Nous n'avons pas encore de propositions, prêtes à être présentées au Parlement. Prenez par exemple le cas de la rive nord du lac Supérieur. Nous avons les conclusions de l'étude de faisabilité et les recommandations du comité consultatif. Toutefois, il n'y a pas encore d'entente fédérale-provinciale conclue, pour le transfert de l'administration et de la maîtrise des terres provinciales.

Nous n'avons pas encore non plus de plan provisoire de gestion. Il est vrai que la proposition concernant cette aire a franchi certaines étapes importantes, mais nous n'avons pas encore tout terminé pour sa constitution, si bien que la proposition n'est pas prête à être déposée au Parlement.

Il en va de même pour le détroit de Georgia sud. L'étude de faisabilité n'a pas encore été entreprise officiellement.

À Gwaii Haanas, nous avons défini les limites proposées. Il existe une entente fédérale-provinciale d'intention, mais le plan de gestion des pêches n'est pas encore prêt pour cette aire marine de conservation proposée à Gwaii Haanas.

Là non plus, la proposition n'est pas prête à être présentée au Parlement. Le travail se poursuit, mais il y a encore plusieurs étapes à franchir avant que la ministre puisse déposer quoi que ce soit à la Chambre.

M. Andy Burton: Dans le cas de Gwaii Haanas, par exemple, jusqu'où les consultations publiques ont-elles été poussées, à ce jour?

Mme Susan Katz: Il y a eu des consultations il y a quelques années concernant l'établissement de la réserve à Gwaii Haanas. Mais un élément important préalable est le plan de gestion des pêches. Les consultations à ce sujet n'ont pas encore été entreprises.

M. Andy Burton: D'accord, de sorte qu'il y aura d'autres consultations, n'est-ce pas? C'est bien.

Mme Susan Katz: Oui, il y en aura.

• 1020

M. Andy Burton: Vous avez dit qu'essentiellement, de 3 à 5 p. 100 d'une région donnée pourrait faire l'objet d'une désignation AMC. Est-ce qu'on devrait préciser cela dans le projet de loi pour que personne ne change d'avis plus tard? Par exemple, en Colombie-Britannique, on prévoyait que 12 p. 100 du territoire serait réservé pour constituer des parcs, etc.—à l'échelle de la province—et on a eu tendance à s'emballer. Ne devrait-on pas prévoir une limite dans le projet de loi?

Mme Susan Katz: La taille des aires va varier d'une région à l'autre. Je ne pense pas que nous ayons envisagé de préciser un pourcentage quelconque. Il faudrait peut-être conserver une certaine souplesse, pour s'adapter aux diverses régions.

M. Andy Burton: Vous avez dit de 3 à 5 p. 100. Je voudrais savoir si ces 3 à 5 p. 100 sont calculés sur le total des 29 aires marines, de sorte qu'on pourrait avoir une vaste aire marine dans une région alors que dans l'autre, l'aire serait minuscule. Voyez-vous où je veux en venir?

Mme Susan Katz: On détermine cela au cas par cas, et j'ai cité ce chiffre approximativement pour expliquer que nous ne cherchons pas à représenter toute une région marine, mais tout simplement un échantillon. Le pourcentage pourrait varier d'une région à l'autre.

M. Andy Burton: De sorte que vos pourcentages de 3 à 5 p. 100 sont inexacts?

Mme Susan Katz: C'est une approximation.

M. Andy Burton: D'accord. Merci.

Le président: Monsieur Burton, pourriez-vous laisser la chance aux autres?

[Français]

Monsieur Plamondon.

M. Louis Plamondon: Merci, monsieur le président.

Ma question portera surtout sur l'aspect juridique. Peut-être qu'elle sera plus pour Mme Porter que pour Mme Katz.

C'est clair que le paragraphe 5(2) de votre projet de loi dit que les terres où il y aura des zones seront la propriété du fédéral. Or, le paragraphe 92(5) de la Constitution canadienne de 1887 dit clairement que: «L'administration et la vente des terres publiques appartenant à la province, et des bois et forêts qui s'y trouvent» sont de juridiction exclusive des provinces. En partant, votre projet de loi est anticonstitutionnel parce que vous demandez quelque chose qui est contraire au paragraphe 92(5) de la Constitution.

De plus, le gouvernement du Québec a déjà voté une loi sur ses terres, et cela fait l'unanimité de tous les partis au Québec. Il s'agit d'une loi qui interdit à la province de céder des terres au gouvernement fédéral. Cette loi du Québec ne permet de faire une entente avec le fédéral que dans la partie qui est de juridiction fédérale. Elle ne permet pas une entente dans la partie qui est de juridiction provinciale, par exemple sur la partie touchant les espèces en voie de disparition sur le territoire.

Donc, cela suppose que si on voulait créer un parc au Québec, avec cette nouvelle loi, il serait impossible d'avoir une entente fédérale-provinciale puisque la loi québécoise interdit de faire une telle entente et que vous demanderiez quelque chose au gouvernement du Québec—cela pourrait être la même chose pour une autre province—qui est anticonstitutionnel, puisque l'article 92 dit clairement que ces terres sont de juridiction exclusive des provinces. Je ne comprends donc pas que vous arriviez avec un projet de loi qui contient un tel article.

[Traduction]

Mme Daphne Porter (conseillère juridique, Agence Parcs Canada): Tout d'abord, l'entente à laquelle vous vous référez, celle du Saguenay et Saint-Laurent, portait nettement sur un fond marin où la province de Québec a compétence. Dans ce cas-là, selon l'entente, on a prévu des mesures législatives parallèles. C'est là la teneur de l'entente conclue avec la province.

• 1025

Pouvez-vous me dire ce que l'article 95 de la Loi constitutionnelle que vous citez dit exactement? C'est au paragraphe 91(1A) de la Loi constitutionnelle que l'on trouve le fondement de la compétence fédérale sur le territoire domanial. Je ne suis pas sûre de bien comprendre dans quel contexte vous utilisez l'article 95. Je ne l'ai pas sous les yeux.

[Français]

M. Louis Plamondon: À l'article 92(5), on reconnaît que la gestion et la vente des terres du domaine public sont de juridiction exclusive des provinces. C'est dit clairement dans cet article-là. Est-ce que c'est en contradiction avec l'article 91? Ça, je ne le sais pas. J'avoue ne pas avoir en main l'article 91.

Oublions momentanément cela. Vous avez parlé de l'entente du Parc marin du Saguenay—Saint-Laurent. Dans ce cas, le fédéral a reconnu qu'il devait y avoir une loi spéciale parce qu'il y avait une contradiction en ce qui avait trait aux juridictions provinciales et fédérale et parce que la province, selon la Loi constitutionnelle, possédait vraiment le fond marin. Donc, une loi spéciale a été adoptée par le Parlement fédéral pour faire cette entente-là. Je vous ferai remarquer qu'en même temps, le plan qui, je pense, s'appelait Plan d'action Saint-Laurent - phase III, a été signé par l'ensemble des ministères fédéraux touchés et par l'ensemble des ministères provinciaux touchés.

Donc, je ne sais pas si c'est aussi délicat pour les autres provinces, mais pour nous du Québec, la voie à suivre, c'est la voie qu'on a suivie pour le parc marin. C'est-à-dire que le projet de loi C-10—et cela nous oblige à voter contre son adoption—vient en contradiction avec ce qu'il y a déjà eu comme entente, par exemple pour le parc marin.

Ce que nous voulons, c'est que, s'il y a un autre parc, on suive le même pattern qu'on a suivi pour le Parc marin du Saguenay—Saint-Laurent, parce que ce serait dangereux de donner nos terres au fédéral puisque après arriveraient des normes nationales qui seraient souvent...

On sait ce qu'il en est des normes nationales. Le Québec n'a pas voulu signer l'Entente sur l'union sociale, par exemple, à cause des normes nationales en matière de santé, de services sociaux, etc., et tous les partis politiques ne voulaient pas le signer. Ils sont en désaccord sur cette entente.

Alors là, la même chose se reproduirait. On amènerait, pour ces zones, des normes nationales qui pourraient ne pas convenir aux intérêts supérieurs du Québec. Dans ce sens-là, nous préférons la voie de la négociation, comme nous l'avons fait pour le parc marin.

Maintenant, ma question est un peu politique. Je m'en excuse puisque vous êtes fonctionnaires. Je voulais quand même vous sensibiliser à cette vision que nous avons et qui, je pense, se défend très bien.

Le président: Est-ce que je pourrais demander une clarification qui répondra aux préoccupations de notre collègue? L'alinéa 5(2)b), si je le comprends bien, dit que lorsqu'une province a la gestion et la maîtrise de tout ou d'une partie de ces terres, il faut que le gouvernement de cette province ait consenti à leur utilisation à titre d'aire marine. Si la province ne consent pas, ça meurt en place, rien ne se passe.

M. Louis Plamondon: Oui, monsieur le président. S'il n'y a pas entente, le projet meurt. Sauf que le projet peut être désiré par une province sans qu'elle ne concède les terres. Par exemple, le Québec, dans le cas du projet du Saguenay, n'a pas concédé les terres. Il y a eu entente fédérale-provinciale et le Québec est demeuré propriétaire de la terre. Alors, il pourrait arriver qu'un magnifique parc puisse être créé au Québec, mais comme la loi québécoise interdit de donner la terre, il n'y aurait pas de parc parce que la loi C-10 existe. C'est le danger. Je ne sais pas comment on peut faire une exception. Je n'ai pas de proposition concrète à faire, mais je voulais sensibiliser le comité à cela, de même que les hauts fonctionnaires qui ont l'amabilité de nous visiter aujourd'hui.

Le président: Madame Katz, c'est un point bien important. Si, par exemple dans le cas de l'alinéa 5(2)b), une province, le Québec, ne voulait pas céder ses terres et qu'il n'y ait donc pas d'aire marine, est-ce que le gouvernement fédéral aurait toujours le loisir de faire une loi spéciale par le biais d'une entente avec une province telle que celle conclue, par exemple, pour le Parc marin du Saguenay—Saint-Laurent? Est-ce que quelque chose empêche cela là-dedans?

• 1030

Mme Susan Katz: Non, il n'y a rien qui empêche ça. Le projet de loi C-10 prévoit, pour les aires marines de conservation, un modèle qui est basé sur une propriété fédérale des terrains. Donc, c'est le modèle qu'on examine aujourd'hui. Mais il n'y a rien dans le projet de loi qui empêche un autre modèle.

M. Louis Plamondon: Dans ce cas-là, je souhaiterais qu'on l'inscrive dans le projet de loi C-10, qu'on précise qu'il pourrait y avoir des ententes, afin que la loi ne soit pas restrictive. Cette loi C-10 deviendrait «la» loi. Mais si dans cette loi il y avait quelque chose qui dise que, cependant, dans le respect des juridictions, il pourrait aussi y avoir des ententes particulières comme il y en a déjà eu précédemment, ça pourrait rassurer. Vous comprenez? Par ailleurs, adopter la loi telle quelle pourrait faire qu'un ministre interprète cela de façon très restrictive et ne veuille pas faire d'entente.

Le président: Très bien.

[Traduction]

Monsieur McNally, voulez-vous poser des questions?

M. Grant McNally: Si, monsieur le président.

Merci de votre exposé.

À propos de l'entente sur le lac Supérieur dont vous avez parlé, il s'agirait manifestement d'une entente qui relève de l'alinéa 5(2)b)—celui qui traite des compétences partagées, et qui prévoit des consultations.

Vous-même et le président avez fait allusion au projet de loi C-48, sur la partie est de Terre-Neuve, pour laquelle les consultations n'ont pas abouti. Est-ce que ce cas pourrait être visé par l'alinéa 5(2)b)—compétence partagée—ou s'agissait-il d'un territoire domaniale.

Mme Susan Katz: Songez-vous ici aux eaux au large de Bonavista?

M. Grant McNally: Oui.

Mme Susan Katz: Honnêtement, je ne sais pas. Il faudrait que je me renseigne. L'étude n'est pas allée assez loin. Il est clair que les riverains n'appuyaient pas le projet, si bien que nous avons annulé l'étude et nous sommes passés à autre chose.

M. Grant McNally: D'accord. Nous avons constaté, nous les membres du comité, que la pomme de discorde venait du fait qu'on s'interrogeait sur la compétence.

Vous avez dit que le gouvernement n'agirait pas unilatéralement sur les terres de compétence fédérale ou qui feraient l'objet d'un litige avec une province. Vous avez dit dans votre exposé qu'on déterminerait à l'avance quel gouvernement a la compétence avant de constituer une AMC?

Mme Susan Katz: C'est cela.

M. Grant McNally: Très bien. Quel article du projet de loi garantit cela? Nous ne serons plus là dans 10, 20 ou 30 ans. Même si l'intention de la ministre et du gouvernement est manifestement de procéder à des consultations, en l'absence d'une protection législative, quelle garantie avons-nous pour l'avenir qu'on n'établira pas unilatéralement une AMNC en territoire domanial, ce qui pourrait avoir une incidence directe sur les économies locales et l'activité économique dans la région?

Je ne trouve pas de garantie ici même si je sais que le gouvernement et la ministre sont animés des meilleures intentions. À l'avenir, en l'absence d'une garantie dans les dispositions de la loi, le gouvernement pourrait agir unilatéralement. N'est-ce pas?

Mme Susan Katz: Il y a des dispositions précises outre l'alinéa 5(2)b) qui traite des cas où la province exerce la maîtrise administrative des terres qu'elle cède au gouvernement fédéral. En outre...

M. Grant McNally: Mais les terres qui font l'objet d'un litige, celles qui... Je suis entièrement d'accord avec vous là-dessus. Ce qui n'est pas clair, ce sont les terres qui actuellement sont de compétence fédérale ou qui font l'objet d'un litige. Voilà celles auxquelles je songe.

Mme Susan Katz: La loi ne prévoit rien de précis là-dessus, vous avez raison.

M. Grant McNally: On doit donc s'en inquiéter car il n'y a rien de précisé dans la loi. Même si le gouvernement a de bonnes intentions, puisque cela ne figure pas dans la loi, rien ne nous garantit que, lorsque nous serons tous partis, un gouvernement ne décidera pas de constituer une AMNC unilatéralement, sans consultation—car l'article 10 ne traite que des terres qui sont visées à l'alinéa 5(1)a), n'est-ce pas?

• 1035

Mme Susan Katz: Non.

M. Grant McNally: Excusez-moi, je voulais dire l'alinéa 5(2)b), et non pas 5(2)a).

Mme Susan Katz: Plusieurs dispositions du projet de loi contiennent l'obligation de procéder à des consultations. Cette obligation n'est pas propre aux terres dont les provinces ont la gestion et la maîtrise. C'est une obligation générale de consulter avec toute province...

M. Grant McNally: Peu importe qui a la compétence?

Mme Susan Katz: ...peu importe qui détient le titre sur les terres, que ce soit des terres domaniales ou faisant l'objet d'un litige. L'obligation de consulter les gouvernements provinciaux est prévue, peu importe le gouvernement qui détient le titre sur le fond marin.

M. Grant McNally: Ce que vous venez d'affirmer est sujet à interprétation, étant donné les dispositions du projet de loi, n'est-ce pas? Est-ce que les choses sont nettes? On ne trouve nulle part une disposition portant que si les terres sont de compétence fédérale, celles qui sont visées à l'alinéa 5(1)a), l'article 10 s'applique en tout état de cause. S'il y avait des précisions à cet égard dans le projet de loi, je pense que certaines des inquiétudes de M. Burton seraient apaisées, et les miennes jusqu'à un certain point, et celles d'autres membres du comité également.

Mme Daphne Porter: Je pense que le paragraphe 10(1) est très clair quant à l'obligation de procéder à des consultations quand on envisage de constituer ou de modifier des aires marines de conservation. Rien dans cet article ne précise «seulement dans le cas où la province a la gestion des terres visées à l'alinéa 5(2)b)». C'est nettement une exigence préalable à l'établissement d'une aire marine de conservation. Je pense que les dispositions du projet de loi sont très claires là-dessus.

M. Grant McNally: D'accord. Permettez-moi de ne pas être tout à fait d'accord là-dessus, car je suppose que vous avez participé à la rédaction du projet de loi, que vous l'avez rédigé dans cette intention, et que c'est donc ce regard-là que vous jetez sur le projet de loi.

Je le répète, quand nous ne serons plus de ce monde, pourra-t-on compter sur un texte clair qui précise l'intention de la loi, son interprétation et son exécution à l'avenir? Je ne trouve rien qui garantisse cela même si je comprends ce que vous dites.

Le président: Permettez-moi d'intervenir. Je pense que le libellé actuel n'offre aucune garantie car l'article dit «le ministre favorise la consultation». Ainsi, il n'y aura pas de consultation si le ministre ne la favorise pas.

Je pense que si on précisait «le ministre consulte», il n'y aurait aucune ambiguïté et le ministre serait forcé de consulter les ministres fédéraux et provinciaux, les organismes et les localités riveraines concernées. Le ministre ne pourrait absolument pas se soustraire à cela. Cela pourrait peut-être être éclairci.

Je pense que je suis d'accord avec M. McNally, que le libellé actuel permet une échappatoire. Il y a peut-être lieu d'apporter une précision.

Mme Susan Katz: Nous allons certainement nous pencher là-dessus.

M. Grant McNally: Abstraction faite de toute appartenance politique—et c'est ce que l'on devrait faire ici—on doit réfléchir à une telle conséquence non prévue, que nous risquons de créer, à moins de répondre à ces questions sur cet enjeu important. D'après ce que nous avons entendu—et je ne suis au comité que depuis tout récemment—c'était là la pomme de discorde.

Si l'on répond à ces préoccupations et que le projet de loi comporte une disposition prévoyant que le territoire domanial ou les terres faisant l'objet d'un litige sont visés ici—autrement dit que le processus de consultation sera garanti—je pense que cela va faire taire toute opposition car le processus sera prévu pour garantir, comme vous l'avez dit, monsieur le président, que la consultation aura lieu. Si les riverains n'étaient pas d'accord, ils pourraient compter sur la garantie d'être consultés, ce qui apaiserait toute inquiétude quant au processus.

Dites-moi, peut-on faire cela?

Le président: Nous avons signalé à Mme Katz et aux fonctionnaires du ministère que c'est un aspect qui devrait être examiné davantage, pour exclure toute ambiguïté quant au processus de consultation—pour le rendre obligatoire.

Madame Bulte, voulez-vous poser des questions?

• 1040

M. Sarmite Bulte: Non, ça va. Merci.

Le président: Monsieur Cuzner.

M. Rodger Cuzner: Je reprends dans la même veine que la première question de Andy—faire la différence entre une zone de protection marine et une aire marine de conservation—pouvez-vous me donner un exemple? Ainsi, si des stocks de saumon étaient menacés dans une zone particulière ou si une frayère donnée devait être protégée, le ministère des Pêches et des Océans désignerait cette région zone de protection marine, par exemple. Une fois que les stocks seraient hors de danger, la zone ne serait plus protégée. À cet égard, il y a une différence par rapport aux AMNC car une telle aire est cette partie du fond marin qui sera tout à fait hors d'atteinte, qui ne pourra pas être modifiée une fois qu'elle sera constituée. Pouvez-vous encore une fois nous expliquer la différence entre une zone de protection marine et une aire marine de conservation.

Mme Susan Katz: Dans le cas des zones marines protégées par le ministère des Pêches, cela est fait en raison d'un enjeu ou d'un problème particulier. On peut vouloir protéger une zone de pêche donnée afin de ne pas en épuiser les stocks, ou une frayère, pour permettre aux stocks de se reconstituer. On peut aussi vouloir protéger une zone particulièrement productive. La désignation pourrait être de courte durée ou encore durer plus longtemps, mais il est clair qu'il s'agit de protéger une caractéristique particulière ou de prendre une mesure particulière de gestion des pêches.

En général, cela porte sur des zones assez restreintes. C'est un peu comme notre programme marin, un programme relativement nouveau—mais dans ce cas-là les zones sont non seulement petites mais elles sont désignées à une fin particulière. Notre principal objectif est de conserver une région marine représentative, de trouver une aire dans une région marine plus vaste qui offre une bonne représentation de l'histoire marine, de l'écologie, des caractéristiques biophysiques, des ressources culturelles et du lien avec l'histoire du Canada. L'horizon de nos objectifs est donc plus vaste et nous abordons la chose dans le but précis de trouver une représentation de la région.

Dans l'exemple des parcs nationaux, nous essayons de trouver une représentation d'une région terrestre. Dans le cas des aires marines, nous voulons représenter une région marine afin de garantir que ces aires sont protégées à tout jamais, que les Canadiens auront la possibilité de s'y instruire, de les visiter, et d'en profiter. Le mandat est donc plus vaste. Mais nous pouvons travailler ensemble. À l'intérieur d'une aire marine de conservation, nous serons appelés à travailler avec le ministère des Pêches et des Océans pour protéger une frayère, par exemple. Nous pouvons donc nous aider mutuellement à atteindre nos objectifs, mais nous pouvons aussi faire en sorte que chaque programme est complémentaire. Nous travaillons en collaboration, étant guidés de façon générale par les dispositions de la Loi sur les océans.

Le président: Monsieur Cuzner.

M. Rodger Cuzner: Ça va.

Mme Sarmite Bulte: Monsieur le président, si je pouvais simplement enchaîner sur la question que M. Cuzner vient de poser...

Serait-il possible, ou est-il concevable, qu'une fois qu'on a désigné une AMC, on est une ZPM dans une AMC?

Une voix: ATQP.

Mme Sarmite Bulte: Non, mais s'il y avait une seule zone susceptible de poser problème, qu'il s'agisse d'une frayère une fois que l'aire marine de conservation a été désignée et s'il y avait une zone unique qui pose des problèmes, pourrait-elle être désignée pour cette période ou pour une période limitée? Pourrait- il y avoir une ZPM, c'est-à-dire une zone de protection marine, dans une aire marine de conservation?

Mme Susan Katz: Oui, nous avons un comité directeur interministériel qui permet de continuer à assurer la collaboration de nos programmes. Lorsque nous concevons une aire marine de conservation, nous travaillons évidemment très étroitement avec le ministère des Pêches pour établir les délimitations de l'aire. Si nous examinons une aire en particulier en raison de ses qualités représentatives vraiment exceptionnelles, il est alors possible que le ministère des Pêches et des Océans ait envisagé une aire semblable parce qu'il veut protéger un lieu de ponte. Donc, l'aire marine de conservation pourrait en fait servir les objectifs des deux programmes.

• 1045

Mme Sarmite Bulte: Je vous remercie.

Le président: Nous avons peut-être le temps de poser une autre question.

Monsieur Burton, avez-vous d'autres questions à poser? Juste une autre. Il est maintenant 11 h 45. Nous allons devoir nous interrompre à 11 h 50 pour préparer la vidéoconférence. Donc cinq minutes, si vous pouvez partager ce temps avec M. McNally.

M. Andy Burton: Oui, je le ferai avec plaisir, monsieur le président. Je vous remercie.

Nous arrivons au noeud du problème, et c'est assurément la question de compétence et qui a compétence sur quelle région. Je pense que ce qu'a dit M. McNally... Je conviens tout à fait que s'il y a des conflits de compétence, il nous faut un article dans ce projet de loi qui énonce clairement que cela ne peut se faire avant que l'on règle ces difficultés.

À votre avis, madame Katz, croyez-vous que nous devrions faire quelque chose en ce sens afin d'énoncer clairement qu'en cas de conflit de compétence, on ne donnera pas suite à la question jusqu'à ce que le conflit soit réglé ou que l'on trouve un moyen quelconque de le régler?

J'aimerais également souligner que je suis tout à fait d'accord avec mon collègue, M. Plamondon, et les préoccupations qu'il a exprimées. Je tenais à le préciser, mais ma question s'adresse à Mme Katz.

Mme Susan Katz: Notre rôle ici est bien entendu de présenter au gouvernement les diverses préoccupations exprimées. De toute évidence, il ne m'appartient pas de prendre un engagement quant aux amendements que le gouvernement peut ou ne peut pas déposer.

M. Andy Burton: Mais vous allez transmettre cette préoccupation néanmoins? J'aimerais être rassuré à cet égard.

Mme Susan Katz: Oui, bien sûr, nous allons transmettre votre préoccupation à la ministre.

M. Andy Burton: Je vous remercie.

Le président: Monsieur McNally.

M. Grant McNally: On pourrait peut-être le faire à l'aide de l'article 10 du projet de loi. Ce commentaire s'adresse plutôt au comité qu'aux représentants du ministère, bien que les représentants doivent transmettre ce commentaire au gouvernement—peut-être inclure dans toutes les dispositions un libellé comme suit «l'article 10 s'applique aux terres énoncées au paragraphe 5(1) et à l'alinéa 5(2)a)». Je crois que cela permettrait de donner suite aux préoccupations exprimées.

Le président: Je vous remercie.

Si vous avez pris en note toutes ces préoccupations, madame Katz, c'est vraiment ce que nous vous demandons. Je tiens à remercier tous les témoins d'avoir comparu devant nous et d'avoir été très directs.

Nous allons suspendre la séance pour préparer la vidéoconférence. La séance reprendra à 11 heures avec nos témoins de Vancouver.

• 1048




• 1111

Le président: La séance est ouverte.

Nous avons le plaisir d'accueillir de Vancouver en Colombie-Britannique Mme Anne Murray, directrice exécutive de la Federation of B.C. Naturalists. Vous pourriez peut-être vous présenter, madame Murray.

De la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique, nous accueillons M. Andrew Winn-Williams, qui est directeur des politiques et des communications, et de la B.C. Seafood Alliance, nous accueillons Mme Michelle James qui en est la présidente; de Island Trust, nous accueillons M. Gordon McIntosh, directeur exécutif, et de Bluewater Adventures Ltd, M. Randy Burke.

Vous avez la parole. Je ne sais pas si vous allez commencer dans l'ordre dans lequel je vous ai présenté, c'est à vous d'en décider. Je vous laisse la parole. Je vous demanderais d'être suffisamment brefs pour nous laisser du temps pour les questions par la suite. Comme vous le savez, nous avons jusqu'à 13 heures. Je vous laisse donc la parole.

Mme Anne Murray (directrice exécutive, Federation of British Columbia Naturalists): Je tiens à remercier le comité de cette occasion de prendre la parole devant lui au nom des naturalistes de la Colombie-Britannique.

Notre fédération a été fondée en 1969 et compte une cinquantaine de membres ainsi que des clubs affiliés qui comptent environ 5 300 membres. Notre devise est d'apprendre à connaître la nature et à la préserver pour mieux l'apprécier. Nous nous intéressons depuis longtemps à la conservation des aires marines. Depuis 1988, nous avons adopté 19 résolutions à nos assemblées générales annuelles sur ce sujet, y compris des résolutions pour restreindre la circulation de pétroliers, pour réglementer l'aménagement de marinas et pour appuyer la Loi sur les océans.

J'ai joint au document que je vous ai remis un résumé de ces résolutions. Vingt de nos clubs membres sont situés dans des collectivités côtières, et un grand nombre d'entre elles ont des groupes d'écologie marine. Ils appuient la recherche sur les écosystèmes marins ou font eux-mêmes ce genre de recherche. Parmi ces activités, citons l'enquête sur les oiseaux aquatiques côtiers de la Colombie-Britannique, le projet de cartographie du bassin de Géorgie et le programme d'arbres de nidification du pygargue à tête blanche sur la côte est de l'île de Vancouver.

• 1115

Nous donnons également des visites d'information des écosystèmes marins et côtiers et travaillons comme bénévoles dans les parcs et les aires protégées. Nos membres participent à des excursions en nature à toutes sortes de destinations marines, y compris les îles Gulf, Bamfield, Haida Gwaii, la passe Masset et ainsi de suite.

La Fédération est aussi le principal partenaire provincial de Wild Bird Trust pour le programme de protection des aires importantes de nidification, mis sur pied par BirdLife International il y a quelques années pour établir, protéger et surveiller un réseau d'habitats essentiels pour la conservation de populations d'oiseaux et de la biodiversité partout dans le monde. Il existe 84 aires importantes de nidification qui ont été désignées en Colombie-Britannique, dont 70 présentent une composante marine. J'attire votre attention sur les cartes jointes au document, les tableaux 1, 2 et 3. Cela vous donne une idée du nombre de sites regroupés dans les écosystèmes marins.

Le président: Madame Murray, si vous me permettez de vous interrompre, je tiens à mentionner que selon nos règles, tout document que nous recevons doit être traduit dans les deux langues officielles avant d'être distribué; c'est pourquoi nous n'avons pas pu distribuer votre documentation aujourd'hui. Elle sera traduite par la Chambre des communes et envoyée à tous les membres du comité le plus tôt possible. Entre-temps, faites comme si nous n'avions pas la documentation car nous ne l'avons pas. D'accord?

Mme Anne Murray: D'accord.

J'ai joint des cartes au document, et lorsque vous le recevrez, vous verrez où se trouvent certains de ces sites. On indique clairement qu'il existe de très nombreux sites marins d'une très grande importance pour les oiseaux, surtout parce qu'on y trouve des aires de nidification de nombreux oiseaux.

Samedi, nous avons reconnu la désignation de l'estuaire du fleuve Fraser comme aire importante de nidification. Il répond aux critères du nombre et de la diversité d'oiseaux globalement importants, étant donné qu'il compte le nombre le plus élevé d'espèces d'oiseaux de tout le Canada. Il s'agit simplement d'un autre exemple de l'importance de la Colombie-Britannique au chapitre de la biodiversité.

Ici, en Colombie-Britannique, nous avons une vaste aire d'influence marine. Nous avons 29 500 kilomètres de littoral, 450 000 kilomètres carrés d'eaux intérieures de la province et d'eaux du large, sans compter 6 500 îles côtières. Nous avons des espèces sauvages propres à l'écosystème marin, y compris 29 espèces de mammifères, 161 espèces d'oiseaux, 400 espèces de poissons, plus de 6 550 espèces d'invertébrés et au moins 800 espèces d'algues. C'est en Colombie-Britannique que l'on trouve 80 p. 100 de la population mondiale du starique de Cassin et 60 à 90 p. 100 du garrot d'Islande.

Nous avons des espèces marines en voie de disparition, entre autres la loutre de mer et la baleine noire. Nous avons des espèces menacées, comme le rorqual à bosse, l'orque, le guillemot marbré et l'ormeau nordique.

L'observation des baleines et celle des oiseaux pélagiques sont des activités d'écotourisme extrêmement importantes, et les eaux froides et claires de la Colombie-Britannique sont reconnues comme l'endroit idéal pour faire de la plongée autonome.

Voilà certaines des raisons pour lesquelles la Colombie-Britannique est une province très importante en ce qui concerne la faune, et pour lesquelles nous sommes favorables à une loi sur les aires marines de conservation qui appuie la protection de ces valeurs. Nous croyons en particulier qu'il est essentiel de conserver la diversité marine. Nous sommes conscients que les stocks de poissons diminuent. Un grand nombre de nos écosystèmes marins font l'objet d'énormes pressions et certains d'entre eux sont en train de s'appauvrir.

Le rôle des aires marines de conservation est de protéger toute la gamme des écosystèmes marins d'un océan à l'autre, et nous sommes fermement partisans d'une telle mesure. L'intendance des eaux de la Colombie-Britannique est une responsabilité importante tant à l'échelle nationale qu'internationale. Nous nous réjouissons de l'aide apportée par le Canada à cet égard et nous sommes heureux que cette responsabilité n'est pas simplement laissée à la province.

La fédération appuie le fait que le projet de loi C-10, tel qu'il est libellé, indique l'appui du Canada pour la création d'un système représentatif d'aires marines de conservation. Nous sommes heureux de constater que ce projet de loi engage le gouvernement à consulter un vaste éventail d'intervenants. Nous sommes heureux de constater qu'il met l'accent sur la planification de l'écosystème et sur le principe de la prudence, et qu'il reconnaisse l'importance de permettre aux communautés côtières l'utilisation durable des ressources marines.

On peut se demander pourquoi on a besoin d'aires marines de conservation lorsque la Loi sur les océans prévoit la création de zones de protection marines. Le fait de confier à une instance gouvernementale la responsabilité de la conservation des terres et des eaux dans une région présente de nombreux avantages.

J'aimerais prendre l'exemple de Gwaii Haanas. Ces terres font déjà partie d'une réserve de parc national. Si le projet de loi C-10 est adopté, il permettra la création d'une aire marine de conservation complémentaire dans la région déjà réservée à cette fin, à savoir 3 500 kilomètres carrés. Je soulignerais qu'il s'agit d'une très petite superficie comparativement aux 450 000 kilomètres carrés d'eaux intérieures et d'océans que j'ai mentionnés plus tôt.

• 1120

Cette double responsabilité permettrait de surveiller le lien entre les systèmes terrestre et marin dans un environnement contrôlé. Certains des liens ont déjà fait l'objet d'études ces dernières années. Par exemple, le hareng est mangé par le saumon et le saumon est mangé par les ours. Les ours ramènent les carcasses de saumon dans la forêt, et une fois dans la forêt, les restes du saumon pourrissent et nourrissent les arbres. Cette matière nutritive est tellement importante pour les arbres que si vous étudiez les cercles des arbres, vous constaterez quelle année a été bonne pour le saumon. Les scientifiques ont travaillé là-dessus tout récemment.

En raison de l'interdépendance des systèmes naturels, il devient logique de simplifier et d'harmoniser nos rôles sur le plan de l'administration. Nous estimons qu'il serait bon qu'ils relèvent d'une seule sphère de compétence dans certaines régions. Ce serait aussi efficace, par exemple, dans les îles Gulf du sud, où il y a pléthore de compétences.

Certaines communautés craignent que cette loi mette fin à l'activité économique dans le nord. Un grand nombre de nos clubs se trouvent dans le nord, donc par nos membres nous entendons parler de ces préoccupations et de la croissance économique souhaitée grâce à l'industrie pétrolière et gazière installée dans cette région. De toute évidence, cette loi ne mettra pas fin à l'activité économique. La superficie de l'aire marine de conservation proposée est très petite comparativement à l'ensemble de l'écosystème marin.

Le débat au sujet de la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières a beaucoup d'importance. Cela se fera, mais ce n'est pas à notre avis un débat qui doit se tenir dans le cadre de cette audience. Nous constatons que l'industrie pétrolière et gazière a publiquement appuyé, par exemple, la création de l'aire marine de conservation nationale Gwaii Haanas. Il n'est pas question de bail.

La Federation of B.C. Naturalists appuie aussi la notion de zonage pour les aires marines de conservation. Nous aimerions insister sur la nécessité de prévoir des zones d'interdiction de pêche dans ce système de zonage. L'expérience ailleurs dans le monde a établi que de telles zones créent des sanctuaires essentiels pour la reproduction et les alevins et permet le développement des poissons plus gros et plus vieux. Cela permet de reconstituer le milieu marin avec tous les avantages que cela représente pour les industries et les communautés de la pêche commerciale et récréative. Nous sommes heureux de constater que le projet de loi prévoit de vastes consultations dans le cadre de la préparation des cartes de zonage et des plans directeurs. Nous encourageons les naturalistes et les biologistes à participer au processus.

Lorsque vous recevrez le document que nous avons préparé, vous constaterez que nous avons formulé certaines recommandations précises pour la loi. Je n'ai qu'une minute donc je ne vais pas les aborder en détail mais en ce qui concerne particulièrement l'article 4 du projet de loi, qui énonce l'objectif de la loi, nous tenons à insister sur la conservation de la diversité marine. Nous aimerions aussi ajouter l'expression «zone d'interdiction de pêche» au paragraphe 4(4), car cela n'est pas précisé clairement en tant que tel. On exprime l'intention de protéger pleinement les caractères distinctifs et les écosystèmes fragiles mais nous aimerions que l'on inclue parmi les zones envisagées la zone d'interdiction de pêche.

Nous aimerions aussi que l'on interdise de façon explicite un plus grand nombre d'activités dans les aires marines de conservation, ce qui entraînerait certaines modifications aux articles 12 à 15. Je vous ai donné certains détails à ce sujet.

En conclusion, nous appuyons l'adoption du projet de loi C-10. Nous sommes particulièrement heureux de constater que vous appuyez la création d'un système d'aires marines de conservation dans le cadre de la préservation de la biodiversité mondiale.

Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie, madame Murray.

Je tiens à vous assurer que nous transmettrons les changements que vous recommandez aux personnes appropriées qui détermineront s'ils peuvent être apportés et libellerons le cas échéant des amendements en conséquence.

J'aimerais maintenant céder la parole à M. Andrew Winn-Williams de la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique. Monsieur Williams vous avez la parole.

M. Andrew Winn-Williams (directeur, Politiques et communications, Chambre de commerce de la Colombie-Britannique): Comme vous l'avez indiqué, je représente ici aujourd'hui la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique. Je prends la parole au nom de 120 chambres de commerces et plus de 27 000 entreprises d'un bout à l'autre de la province. Cela comprend un certain nombre de communautés côtières qui pourraient souffrir par suite de l'adoption de ce projet de loi.

Comme notre mandat est de défendre le bien-être économique de la population de la Colombie-Britannique, nous sommes préoccupés par ce projet de loi. Je tiens à remercier le comité d'avoir fait l'effort nécessaire pour nous permettre de comparaître de cette façon aujourd'hui et d'exprimer ces préoccupations.

• 1125

Un maire de Vancouver—je ne me rappelle pas son nom—dans les années 30 avait dit que le problème ce n'était pas que Vancouver se trouvait à 3 000 milles d'Ottawa mais qu'elle semblait être à 30 000 milles de là. Je suis heureux de constater que vous avez pris des mesures pour tâcher de donner suite à cette préoccupation.

Je commencerai par brièvement discuter des défis économiques auxquels fait face la Colombie-Britannique, surtout sur la Côte-Nord. On y trouve des collectivités dont la survie depuis des années dépend de l'industrie forestière, de la pêche et de l'extraction minière. Elles vivent une situation économique difficile, comme en fait l'ensemble de la Colombie-Britannique, à cause d'une industrie forestière affaiblie par les différends sur le bois d'oeuvre, des pêches limitées et un accès terrestre limité pour l'exploration minière. Par conséquent, l'un des facteurs clés de la survie économique de ces collectivités est l'accès continu aux ressources marines, y compris les navires de croisière, l'exploration pétrolière et gazière, et l'aquaculture. Ce projet de loi risque de nuire à ces initiatives et de causer encore plus de tort aux économies de nos collectivités côtières.

Notre premier sujet de préoccupation c'est le dédoublement inhérent à ce projet de loi. Nous comprenons qu'il est nécessaire de préserver notre environnement. Nous croyons toutefois que les lois fédérales, provinciales et municipales qui existent à l'heure actuelle permettent de répondre de façon adéquate à ce besoin, surtout lorsque les mesures qu'elles prévoient sont coordonnées par le biais de la Loi sur les océans. Parmi les lois qui protègent les océans, citons la Loi sur les espèces sauvages au Canada et la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. Environnement Canada établit des réserves marines d'espèces sauvages en vertu de ces lois et protège particulièrement l'environnement marin du Canada grâce à la Loi sur la protection des pêcheries côtières, la Loi sur la marine marchande du Canada et la Loi sur la protection des eaux navigables.

De plus, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale exige un examen exhaustif de toute l'activité humaine, pour protéger l'environnement. Lorsque ces lois sont conjuguées aux lois et aux processus en vigueur dans les provinces pour protéger l'environnement et l'utilisation des terres, il est clair que des lois et règlements supplémentaires sont inutiles et redondants. Cela dit, il est également clair que le présent gouvernement tient à prévoir des restrictions supplémentaires par la voie législative et est peu susceptible de retirer ce projet de loi.

C'est pourquoi j'aimerais discuter de certaines questions dont le gouvernement devrait tenir compte dans une version remaniée de ce projet de loi. Nous recommandons tout d'abord un changement précis au libellé. Le préambule du projet de loi se lit comme suit:

    Attendu que le gouvernement du Canada s'engage à respecter le principe de la prudence dans le cadre de la conservation et de la gestion du milieu marin, de sorte que l'absence de certitude scientifique absolue ne puisse être invoquée comme motif pour différer la prise de mesures de prévention lorsque l'environnement risque de subir des dommages;

Ce libellé n'est pas conforme à la définition utilisée dans un certain nombre d'autres lois canadiennes, en particulier la Loi canadienne sur la protection de l'environnement qui énonce:

    Attendu que le gouvernement du Canada s'engage à adopter le principe de la prudence, si bien qu'en cas de risques de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement [...]

Dans une lettre du 26 septembre de cette année, adressée au comité permanent, la Chambre de commerce du Canada émet un certain nombre de réserves à propos de ce nouveau libellé, qui vont nettement au-delà de la simple absence d'uniformité. Elle porte entre autres sur l'absence d'un seuil défini pour invoquer ce principe, le niveau de certitude scientifique, et la reconnaissance de la rentabilité en tant qu'important facteur.

La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique souscrit entièrement aux réserves émises et définies par la Chambre de commerce du Canada et recommande que le libellé utilisé par la LCPE pour définir le principe de la prudence soit repris aussi par la présente loi.

Notre deuxième réserve concerne la nature habilitante de ce projet de loi. Il confère au cabinet fédéral par l'entremise de décisions du gouverneur en conseil le pouvoir de créer des aires marines de conservation. Nous avons déjà signalé que la création d'une aire marine de conservation pourrait gravement nuire aux économies locales. Nous considérons qu'il ne convient pas que le cabinet prenne des décisions d'une telle portée sans les consultations que nécessiterait une loi du Parlement. Tel qu'il est libellé, le projet de loi pourrait priver les communautés locales et même les députés locaux de leur droit de contribuer au processus de création d'aires marines de conservation ou d'être consultés à cet égard. Il semble y avoir un déséquilibre à ce niveau lorsqu'on fait la comparaison avec le processus de diminution, de modification ou d'élimination d'une aire marine de conservation, ce qui nécessiterait une loi du Parlement. La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique recommande qu'une loi du Parlement soit nécessaire pour la création d'aires marines de conservation.

Nos préoccupations à propos de la consultation et de la création d'aires marines de conservation se trouvent exacerbées par l'existence apparente d'un chevauchement de compétences avec la loi proposée. En particulier, elle interdirait l'utilisation ou l'occupation de terres domaniales au sein d'une aire marine de conservation. Une forte proportion des terres en Colombie-Britannique sont des terres domaniales détenues par la Couronne fédérale ou la Couronne provinciale. Divers aspects de la loi permettent divers types d'utilisations et d'occupations des terres et des eaux le long du littoral de la Colombie-Britannique. Ce projet de loi pourrait, sans aucune consultation, éliminer toutes ces utilisations et occupations permises. Cela pourrait inclure les permis de pêche, les titres miniers et les tenures, l'aquaculture, et l'exploration pétrolière et gazière. De plus, aucune indemnisation n'est prévue pour ceux touchés par l'élimination de telles utilisations ou occupations.

• 1130

La ministre responsable, l'honorable Sheila Copps, a commenté ces questions de compétence et a exprimé le désir d'agir dans un esprit de coopération et de consultation. Cela est admirable mais pas particulièrement rassurant compte tenu que les gouvernements et les ministres peuvent changer et que la nature unilatérale du projet de loi tel qu'il existe habiliterait les gouvernements futurs à créer d'autres aires marines de conservation sans consultation et pourrait abolir les droits et responsabilités des provinces.

La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique recommande que le projet de loi C-10 soit amendé de façon à ce que la création d'une aire marine de conservation exige un processus officiel de consultation et une loi provinciale parallèle lorsque les responsabilités qui relèvent de sa compétence sont touchées. La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique recommande également que le projet de loi reconnaisse les intérêts des tiers et les indemnise lorsque leurs droits sont touchés.

La dernière question que je veux aborder aujourd'hui est celle des réserves pétrolières et gazières en mer. Cette ressource pourrait entraîner des retombées considérables pour la province de la Colombie-Britannique et particulièrement pour nos collectivités côtières appauvries. Le projet de loi comporte toutefois un certain nombre de mentions à cet égard de même qu'une disposition qui interdit expressément la prospection pétrolière. Il conférerait ainsi au gouvernement fédéral le pouvoir d'agir de façon unilatérale pour nous priver à tout jamais des possibilités qui s'offrent à nous dans ce domaine.

La ministre Copps a affirmé qu'il n'est pas envisagé de créer des AMC dans des secteurs où il y aurait de fortes chances de découvrir des gisements pétroliers et gaziers. C'est bien, mais pourquoi alors inclure une interdiction aussi explicite à l'égard de la prospection? S'il n'y a pas de réserves, il n'y a pas lieu de s'inquiéter et il n'est pas nécessaire non plus d'interdire expressément ou implicitement la prospection. La Chambre de commerce de la Colombie-Britannique recommande de modifier le libellé du projet de loi afin d'autoriser la prospection à condition qu'elle se fasse de façon écologique.

Merci encore de m'avoir donné l'occasion de témoigner. J'espère que vous tiendrez compte de ces préoccupations—et j'espère ne pas avoir l'air ridicule à l'écran. Merci.

Le président: Je laisserai à mes collègues le soin de se prononcer, mais il me semble que vous avez fait très bonne figure.

Quoi qu'il en soit, monsieur Winn-Williams, vous pouvez avoir l'assurance que tous les membres du comité ici présents auront pris bonne note de vos préoccupations et que nous allons les transmettre. Dès que votre mémoire aura été traduit, il sera envoyé à tous les membres du comité. Merci.

Nous allons maintenant entendre Mme Michelle James, présidente de la B.C. Seafood Alliance. Madame James.

Mme Michelle James (présidente, B.C. Seafood Alliance): Merci, monsieur le président.

La B.C. Seafood Alliance est une société sans but lucratif autofinancée qui représente l'industrie des produits de la mer en Colombie-Britannique. Nous comptons parmi nos membres les principales organisations oeuvrant dans l'industrie du poisson et des fruits de mer en Colombie-Britannique, notamment la B.C. Salmon Farmers Association, la Canadian Sablefish Association, la Deep Sea Trawlers Association, le Conseil canadien des pêches, la Pacific Halibut Management Association, la Pacific Prawn Fishermen's Association, la Pacific Salmon Harvesters Society, qui représente divers groupes du secteur de la pêche au saumon, la Pacific Sea Cucumber Harvesters Association, la Pacific Urchin Harvesters Association, la Spawn-On-Kelp Operators Association, la Underwater Harvesters Association, le B.C. Salmon Marketing Council, la Canadian Groundfish Research and Conservation Society et la Pacific Coast Fishermen's Mutual Marine Insurance. Si j'ai tenu à nommer tous ces groupes, c'est qu'ils représentent plus de 90 p. 100 de l'industrie du poisson et des fruits de mer en Colombie-Britannique et qu'ils ont décidé de former un front commun pour s'occuper de questions comme celle-ci.

Le projet de loi intéresse au plus haut point l'industrie des produits de la mer de la Colombie-Britannique à cause des répercussions qu'il pourrait avoir pour nous. Nos membres se retrouvent tout le long de la côte de la Colombie-Britannique. Au total, 15 000 personnes participent à l'industrie du poisson et des fruits de mer en Colombie-Britannique, dont 9 000 dans le secteur de la pêche en haute mer et 2 000 dans le secteur de l'aquaculture. L'industrie a un chiffre d'affaires globale d'environ 1 milliard de dollars par année.

L'Alliance appuie le principe de créer à la fois des aires marines nationales de conservation et des zones de protection marines, lesquelles peuvent contribuer à une stratégie globale visant la conservation des écosystèmes marins et la promotion d'une industrie durable de récolte et de culture des produits de la mer. L'Alliance est tout à fait disposée à travailler de concert avec le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces afin de réaliser les objectifs visés par le projet de loi C-10 tout en assurant la vitalité d'une industrie durable au plan environnemental. Vous ne trouverez aucune organisation dont les membres ont passé ensemble plus de temps sur les eaux et dans les eaux côtières de la Colombie-Britannique que la B.C. Seafood Alliance.

Mes observations sont groupées sous quatre grands thèmes. Premièrement, la B.C. Seafood Alliance estime que l'intendance et la gestion durable des milieux marins au Canada devraient être placées sous la responsabilité d'une seule agence.

• 1135

Il existe beaucoup de confusion entourant les différentes responsabilités des nombreuses agences qui s'intéressent au milieu marin et les programmes qu'elles mettent de l'avant. Il y a énormément de chevauchements et de dédoublements dans ce domaine, ce qui cause un gaspillage de l'argent des contribuables.

En vertu de la Loi sur les océans, le MPO a annoncé la création, à titre de projet pilote, d'un certain nombre de zones de protection marines ainsi que la tenue de consultations publiques sur chacune d'elles. Le MPO a aussi publié de l'information au sujet d'une gestion intégrée des zones côtières. En principe, la Loi sur les océans établit un cadre pour la gestion intégrée des océans et des ressources marines selon la méthode des écosystèmes. Le ministère des Pêches et des Océans a lancé un processus de consultations sur une stratégie intégrée sur les océans.

En prévision de l'adoption du projet de loi, Parcs Canada a annoncé des propositions et des plans relatifs à des aires marines de conservation. Quatre endroits ont été retenus pour la création éventuelle d'aires marines de conservation dans la région centrale du littoral, dans une vaste zone entourant l'île de Moresby-Sud, dans une autre au large du parc national Pacific Rim et dans une autre encore dans la partie sud des îles Gulf.

La loi proposée prévoit que soit créé, pour chaque aire marine de conservation, un comité consultatif de gestion chargé de conseiller le ministre sur l'établissement et la mise en oeuvre du plan directeur de l'aire marine en question, tout en confiant au MPO la gestion des pêches. Voilà qui entraînera inévitablement chevauchements, confusion et délais dans la gestion et la prise de décisions importantes sur des questions qui doivent souvent être réglées sans délai.

Environnement Canada projette également de proposer de nouveau sa Loi sur les espèces en péril qui pourrait prévoir la gestion et la conservation d'habitats pour les espèces menacées ou en danger de disparition. Cette loi, largement conçue pour les espèces terrestres, s'appliquerait aux espèces que l'on retrouve en milieu marin. Les plans de rétablissement pourraient très bien inclure des mesures de gestion et de zonage semblables pour les zones de protection marines et les aires marines de conservation. Ces travaux se poursuivent malgré le fait que le ministère des Pêches et des Océans ait la responsabilité et les compétences voulues pour gérer les espèces marines en péril. Par exemple, le MPO a mis en place en 1999 un système d'aires de protection de la scorpène, des refuges, afin de protéger les espèces côtières de ce poisson.

Le bureau de coordination de l'utilisation des terres de la province a un programme de gestion de l'utilisation des terres comportant un volet marin qui aura des répercussions pour la planification en matière de ressources marines. De plus, le gouvernement provincial gère un réseau de parcs marins, de sites du patrimoine marins et de réserves écologiques marines.

L'industrie et le public sont déconcertés et n'ont ni le temps ni les ressources pour participer à toutes les consultations entourant ces initiatives. Il faut que le gouvernement fédéral confie à une seule et même agence fédérale la responsabilité de veiller à l'intendance et à la gestion durable des milieux marins du Canada. Nous sommes d'avis que cette agence devrait être le ministère des Pêches et des Océans, comme il est prévu dans la Loi sur les océans. Il ne suffit pas de parler de coopération et de coordination, parce que l'expérience nous enseigne que chaque agence continue de définir ses propres programmes, ses propres priorités et ses propres activités.

Proposer que cette initiative soit confiée à Patrimoine Canada et administrée par les fonctionnaires de ce ministère vient saper le rôle directeur confié au ministre des Pêches et des Océans. S'il est justifié de créer une AMC dans une région en particulier, elle devrait être approuvée dans le cadre d'un plan de gestion intégrée des océans en vertu de la Loi sur les océans et être ensuite administrée par Parcs Canada dans le but d'établir des aires représentatives et d'offrir des centres d'interprétation éducatifs.

Des travaux ont d'ores et déjà été entrepris en vue d'élaborer ces plans de gestion intégrée des océans en vertu de la Loi sur les océans, sous l'égide du ministère des Pêches et des Océans, afin qu'ils s'inscrivent dans le cadre d'une politique globale axée sur la préservation des écosystèmes. Même si le Canada a adopté au fil du temps une kyrielle de lois et de règlements régissant tous les aspects de la vie sur terre, ce n'est pas une raison pour répéter les mêmes erreurs dans les océans où nous avons la possibilité de faire les choses correctement et d'adopter une approche globale et systémique en vertu d'une seule et même loi, la Loi sur les océans.

Nous recommandons d'inscrire les éléments importants introduits par ce projet de loi dans le cadre de la Loi sur les océans et de confier à la ministre du Patrimoine canadien la tâche d'administrer et de gérer les AMC dans le cadre d'un plan de gestion intégrée des océans.

Deuxièmement, afin de bien planifier pour le futur et d'investir dans l'industrie des produits de la mer, tous ceux qui participent à cette industrie en Colombie-Britannique, les pêcheurs comme les éleveurs, les transformateurs comme les détaillants, doivent avoir l'assurance que, si des accès précieux à la ressource, concédés par licence ou par bail, sont expropriés, une juste compensation sera fournie.

Lorsque Parcs Canada crée un parc terrestre, il n'y a pas de doute que les propriétaires privés ou les détenteurs d'une concession de la Couronne seront indemnisés, soit par l'achat du titre de propriété sur les terres en question, soit par l'achat du titre des droits concédés, comme les droits de piégeage ou d'exploitation forestière. Même si les ressources marines sont considérées comme des biens communs—comme les arbres sur les terres de la Couronne—cela ne veut pas dire que ceux qui avaient des licences ou des baux leur permettant d'exploiter ou d'utiliser les aires marines visées ne subiront pas des pertes s'ils doivent y renoncer et qu'ils n'ont pas le droit d'être indemnisés pour ces pertes.

• 1140

Les membres de l'industrie des produits de la mer doivent être indemnisés de toute perte économique résultant de la création de zones à ne pas exploiter qui leur interdit l'accès à des zones de pêche ou de production qui leur avaient été concédées. Même si nous reconnaissons que la création de ces zones à ne pas exploiter ne créera pas nécessairement une perte économique, nous croyons qu'en incluant dans la loi l'obligation d'examiner la nécessité de prévoir une indemnisation aura au moins pour effet de rendre plus rigoureux le processus d'étude des compensations économiques si la création de vastes zones à ne pas exploiter est envisagée.

Prenons par exemple la pêche à l'oursin rouge. Le tiers du total autorisé des captures pour cette pêche est récolté dans le secteur de Moresby-Sud. Si ce secteur était fermé à ce type de pêche, qui est pratiquée de façon durable, il faut se demander ce qui arriverait à ces pêcheurs?

La pêche au panope du Pacifique, gros mollusque fouisseur, est un autre exemple. Dans les secteurs où l'on en trouve, le taux de récolte n'est que de 1 p. 100. Dans tout le secteur des îles de la Reine-Charlotte, la pêche se fait selon une rotation triennale. Autrement dit, on ne récolte cette espèce que tous les trois ans dans les alentours des îles de la Reine-Charlotte. Qu'arrivera-t-il si les zones en question sont désignées comme des zones à ne pas exploiter? Tous les trois ans, les pêcheurs ne rentreront pas chez eux, ne pêcheront pas? Qu'arrivera-t-il. Ce sont des questions comme celles-là que se posent les membres de l'industrie.

Nulle part dans la loi ou les politiques relatives aux ZPM ou aux AMC n'est-il fait mention de la nécessité d'offrir des compensations. La chose serait impensable dans un contexte terrestre. Pourquoi passe-t-on cette question sous silence dans le contexte marin où le droit de pêcher ou d'utiliser les ressources marines n'est pas différent du droit d'exploiter la forêt ou de piéger sur les terres de la Couronne?

Nous recommandons que la Loi sur les océans soit modifiée pour y inclure les éléments introduits par le projet de loi C-10 ou que le projet de loi C-10 soit lui-même modifié de manière à y inclure une garantie que, si des accès précieux à la ressource, concédés par licence ou par bail, sont expropriés ou diminués par la création d'AMC ou de ZPMP, une juste compensation soit offerte.

Troisièmement, les activités autorisées dans les AMC devraient inclure la pêche et l'élevage de ressources marines. Nous aimerions que les gouvernements fassent bien comprendre au public que les ZPM et les AMC ne seront pas nécessairement des zones où l'exploitation et la production seront complètement interdites. Il est en effet préférable de fixer différents objectifs, et donc différents types de zonage.

Si, afin de préserver l'environnement marin, on décide de définir des zones à ne pas exploiter, nous croyons que l'exploitation doit y être interdite pour tous. À l'heure actuelle, par exemple, l'archipel Broken Group dans le parc national Pacific Rim est fermé à toute la pêche commerciale, mais d'autres usagers, pêcheurs sportifs et Premières nations, y ont accès, de sorte qu'on ne peut pas vraiment parler de zone à ne pas exploiter à cet endroit.

Nous estimons que les AMC ne doivent pas servir d'instruments pour trancher les questions de répartition des ressources marines entre les différents usagers; il s'agit là d'une responsabilité incombant à Pêches et Océans Canada. Certains organismes ont recommandé que l'interdiction de pêcher dans les AMC soit étendue à l'aquaculture, la drague, le chalutage par le fond et la pêche au filet maillant. Nous sommes contre cette suggestion.

Il s'agit d'activités spécifiques qui doivent être examinées au cas par cas. Il est clair, par exemple, que les zones de la côte où l'on vient de découvrir des colonies d'éponges de mer ne sont d'aucun intérêt pour les chalutiers. Interdire ce type de pêche de manière globale revient à accuser indirectement tous ceux qui y participent d'être irrespectueux de l'environnement en toutes circonstances—ce qui est faux—et aura tout simplement pour effet de susciter l'hostilité des personnes et des entreprises qui exploitent les ressources marines de façon légitime et consciencieuse, dans le but de préserver l'environnement.

Quatrièmement, l'industrie des produits de la mer et le gouvernement provincial devraient travailler en plus étroite collaboration pour mettre en place et administrer les AMC et les ZPM. Le projet de loi prévoit que le ministre du Patrimoine canadien consultera les organismes gouvernementaux ainsi que les communautés côtières, les organisations autochtones et les autres personnes ou organismes qu'il estime indiqués en ce qui touche l'élaboration de la politique relative aux aires marines de conservation.

Nous disons que ceux qui gagnent leur vie à récolter et à cultiver les ressources marines méritent d'être explicitement reconnus dans la loi aux fins de consultation et de participation à des comités consultatifs de gestion, en raison tant de leur connaissance intime des milieux marins que de l'intérêt légitime qu'ils ont à préserver les ressources et la valeur économique qu'elles représentent.

De plus, le projet de loi comporte des éléments ayant d'importantes conséquences pour les activités de réglementation provinciale, comme les concessions en matière d'aquaculture, les licences pour le rejet de déchets, les permis pour la récolte de plantes marines et d'huîtres sauvages, mais rien dans la loi n'exige que le gouvernement provincial approuve l'interdiction de certaines activités comme l'aquaculture dans une AMC.

De nombreuses activités dans le milieu marin relèvent de la compétence provinciale, et la loi proposée ne doit pas être utilisée pour outrepasser cette compétence.

• 1145

Nous recommandons, en tant qu'organisations représentant les personnes qui gagnent leur vie à récolter et à cultiver les ressources marines, que ces ressources soient explicitement reconnues au paragraphe 9(1), et que la loi exige l'aval du gouvernement provincial pour interdire quelque activité que ce soit qui est visée par la réglementation provinciale.

La Colombie-Britannique a la chance de devenir un chef de file mondial à la fois dans la gestion durable de la ressource et dans la production de poissons et de fruits de mer. L'industrie des produits de la mer de la Colombie-Britannique a amélioré considérablement la pratique et la gestion de la pêche au cours des dix dernières années. Nous sommes toutefois préoccupés par le manque apparent d'équilibre entre les besoins de l'industrie des produits de la mer et les politiques, lois, programmes et processus entourant la multitude de mesures visant à planifier et à gérer le milieu marin.

Somme toute, notre industrie a besoin d'un accès stable aux ressources marines qui soit durable au plan environnemental, de l'assurance que, si des accès précieux à la ressource, concédés par licence ou par bail, sont expropriés, une juste compensation sera fournie, et d'une méthode simple et efficace pour avoir véritablement un mot à dire dans la gestion des ressources marines.

Nous prions instamment le Comité permanent du patrimoine canadien d'examiner la loi proposée et les politiques relatives à la conservation marine en situant les enjeux dans leur contexte global de gestion des ressources marines dans le cadre de la Loi sur les océans, des aires de protection marines et de la loi proposée relativement aux espèces en péril.

Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de témoigner devant vous sur cette question.

Le président: Merci, madame James.

Je devrais vous dire que nous avons reçu votre mémoire dans les deux langues. Les membres du comité ont déjà le texte en main.

Je cède maintenant la parole à Island Trust et à M. Gordon McIntosh, directeur exécutif.

[Français]

M. Gordon McIntosh (directeur exécutif, Island Trust): Bonjour, je m'appelle Gordon McIntosh.

[Traduction]

Je suis le premier dirigeant d'Island Trust. Je veux vous parler du projet de loi C-10.

Vous avez reçu le mémoire que mon bon ami le chef Vern Jacks vous a présenté mardi matin. Il vous a été soumis dans les deux langues, et j'espère que vous l'avez tous sous les yeux. Je n'ai pas l'intention de le lire.

Quand le chef Vern Jacks vous a parlé du fond du coeur de cette région bien spéciale de la côte appelée mer Salish, le bassin de Géorgie, il vous a expliqué l'importance de cette zone pour la communauté côtière salish.

Notre collègue Jack Fleming, qui est directeur des écoles de Saanich, ne vous présentera pas d'exposé, mais s'il avait à le faire il vous parlerait de l'importance de ce que nous devons laisser en héritage à nos jeunes. Dans ces écoles, on a mis sur pied un programme de production de CD, de guides visant à sensibiliser les jeunes à l'importance de l'intendance marine.

Vous avez à votre disposition des ressources incomparables pour vous aider à vous y retrouver dans le dédale des opinions sur le partage des compétences. Vous avez aussi accès à des ressources incomparables, sur le plan scientifique, qui concluent à l'importance de l'intendance marine.

Je sais que M. Lincoln et ses collègues viennent de tout le pays et je veux donc prendre un peu de temps pour vous parler du fond du coeur de cette région particulière de la côte Ouest. J'aimerais vous parler de quatre choses.

J'aimerais d'abord vous montrer où se situe Island Trust. J'aimerais ensuite vous expliquer pourquoi nous avons besoin d'un catalyseur ainsi que du projet de loi C-10. Je vous expliquerai ensuite pourquoi nous avons besoin de Parcs Canada et pourquoi un catalyseur doit faire réagir ces deux éléments. Quatrièmement, et c'est ce qui revêt le plus d'importance, j'aimerais vous dire pourquoi nous avons besoin de tout cela maintenant.

Permettez-moi de commencer.

Voici une petite carte de la région d'Island Trust. Island Trust est situé sur la côte Ouest et se compose de 470 îles, selon la hauteur de la marée, monsieur le président, et s'étend sur 5 000 kilomètres carrés. Le nombre d'îles est fonction de la hauteur de la marée. C'est presque une blague. Vous comprenez donc à quel point l'environnement marin revêt une importance pour nous puisqu'il nous entoure.

La région compte 35 000 résidents, mais 45 p. 100 d'entre eux n'habitent pas dans la région à temps plein. Nous constituons le terrain de jeu d'une population de plus de 3 millions de personnes sans compter les touristes qui viennent du monde entier.

• 1150

Le Island Trust est une administration locale. Nous élisons nos édiles. Comme bon nombre de vos collègues, ils travaillent sur le terrain.

Nous sommes régis par un mandat provincial spécial. En 1974, la Island Trust Act a été adoptée pour tenir compte de la vulnérabilité particulière de cet écosystème. La Island Trust Act habilite spécifiquement cet organisme à préserver et à protéger cet environnement unique ainsi que les infrastructures qui s'y trouvent.

Il nous faut une approche équilibrée en ce qui touche ces infrastructures. Cette approche est nécessaire pas seulement pour les citoyens de notre région, mais aussi pour tous les citoyens de la Colombie-Britannique ainsi que tous les citoyens du Canada.

Nos outils d'intervention sont limités parce que nous sommes réglementés par un office d'utilisation des terres. Notre compétence sur les eaux est évidemment très incertaine, mais nous disposons aussi d'outils limités pour ce qui est de la planification et de la gestion de l'utilisation des terres.

Divers paliers de gouvernement ont donc compétence sur ces 470 îles qui s'étendent sur 5 000 kilomètres carrés. De nombreux ministères fédéraux exercent des pouvoirs sur ces îles: le ministère des Pêches et des Océans, Parcs Canada, Environnement Canada et Industrie Canada.

J'aimerais insister sur le fait qu'Industrie Canada, par exemple, a reconnu le caractère spécial de cette région. Au moment de la conception et de la construction des tours de communication, on a pris en compte les caractères particuliers non seulement des espèces, mais de l'environnement et on s'est efforcés de ne pas enlaidir le paysage visuel qui est tellement important pour les gens qui se déplacent sur l'eau dans cette région.

De nombreux ministères provinciaux ainsi que 15 Premières nations exercent aussi des pouvoirs sur cette région. Vous avez entendu parler du chef Vern Jacks, mais de nombreuses autres Premières nations sont présentes dans la région.

Il y a ensuite l'administration locale. La région compte sept districts. De nombreuses municipalités sont situées sur notre territoire et qui vont de la ville de Vancouver à la petite collectivité de Bowen Island, qui fait partie de Trust Island et qui compte environ 4 000 habitants.

Voilà donc le contexte dans lequel se situent mes propos. Pourquoi avons-nous maintenant besoin d'un catalyseur et du projet de loi C-10?

Anne a été très éloquente et vous a expliqué pourquoi il fallait voir la terre, l'eau et l'air comme un tout. Le lien entre la terre et la mer revêt beaucoup d'importance. Nous faisons grand cas à l'heure actuelle de notre lien avec la terre, mais nous devons mettre davantage l'accent sur notre lien avec l'environnement marin. Anne et d'autres vous confirmeront qu'il s'agit d'une région unique qui compte le nombre le plus élevé d'espèces en péril au Canada.

Voilà donc pour ce qui est de cet environnement. Je partage les préoccupations qui ont été exprimées par Andrew ainsi que par Michelle. Island Trust a le mandat de préserver et de protéger l'environnement, mais nous oublions parfois la seconde partie de ce mandat qui est de protéger aussi les infrastructures. Comme il s'agit d'un mode de vie pour nous et que notre économie repose sur ces infrastructures, nous avons besoin d'aide pour les maintenir.

Il nous faut mettre sur pied un processus qui favorisera un dialogue entre les divers intervenants. Ainsi, le groupe de Michel et les industries comptent sur l'environnement marin pour survivre. Il est difficile pour une administration locale d'amener des groupes divers comme les groupes écologiques, les groupes économiques, les groupes commerciaux et les groupes représentant les pêcheurs sportifs à engager le dialogue.

Les possibilités de développement économique dans notre région existent. Nous devons aider nos collectivités à ne plus simplement compter pour leur subsistance sur les ressources traditionnelles. Voilà pourquoi le concept de l'écotourisme est intéressant, mais il exige des investissements en vue de mettre en valeur l'environnement marin.

Dans le bassin de Géorgie, la mer Salish est une région très spéciale. La table ronde nationale a travaillé sur cette région où l'on propose la création d'un parc national. Un collègue, l'ancien premier ministre Mike Harcourt, a fait ressortir le fait qu'il s'agit d'un bassin unique dans le monde. Il faut qu'un certain leadership s'exerce pour mettre en valeur ce bassin et en faire un bassin de calibre mondial.

• 1155

Ce projet de loi vise à faire en sorte que les gens mettent de côté les émotions et entament un dialogue ou qu'ils s'attaquent à la tâche qui consiste à trouver un juste équilibre entre les intérêts de chacun. Ce processus d'inclusion doit partir de la base.

À mon sens, avant que le Parlement ne s'engage à l'égard d'un projet quelconque, il doit avoir l'assentiment de la collectivité, de l'administration locale ainsi que du gouvernement provincial. C'est un défi de taille puisque certaines difficultés liées à la procédure se posent. Je comprends certaines des inquiétudes qui ont été exprimées à ce sujet. J'ai cependant des recommandations à formuler au comité quant à la façon dont le projet de loi C-10 pourrait être mis en oeuvre.

Il faut se doter d'un cadre global. Nous pensons que Parcs Canada est en mesure de jouer ce rôle. Parcs Canada a d'ailleurs fait ses preuves. Permettez-moi d'expliquer les raisons qui m'incitent à le croire.

Comme certains d'entre vous le savent peut-être, le prochain parc national sera créé dans les îles Gulf. Appelons-le pour l'instant le Parc national des îles Gulf.

Si nous croyons que Parcs Canada est l'organisme idéal pour mettre en oeuvre le projet de loi, c'est que jusqu'ici les efforts déployés ont été parcellaires. De nombreux ministères, organismes provinciaux et organismes locaux ont leur mot à dire. Il est nécessaire de créer un point focal. Pour nous, ce point focal devrait être Parcs Canada. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi.

Je pense d'abord que Parcs Canada a vraiment fait une étude de faisabilité comme il convenait de le faire. Nous avons donc confiance que le processus qui a été suivi pour la création du parc national sera le même qu'on suivra pour la création de l'aire maritime nationale de conservation. Au début du processus, nous avions de grandes réserves à l'égard de la mise sur pied de ce que nous considérerions comme un organisme paramilitaire composé de gardiens et de surintendants de parc qui imposerait toute une hiérarchie. La création d'une hiérarchie était notre plus grande crainte. Or, nous avons plutôt trouvé qu'il était très rafraîchissant de traiter avec cet organisme gouvernemental, et cela nous changeait de nos rapports avec d'autres paliers de gouvernement. Nous estimons que Parcs Canada a fait montre de respect pour les administrations locales en proposant que celles-ci et le gouvernement provincial soient représentés au sein du comité consultatif.

Nous pensons également que ce serait une erreur de créer un parc national qui ne comporterait pas une partie marine étant donné que la mer s'étend sur 5 000 kilomètres carrés dans cette région. Un catalyseur disposant des ressources et du mandat voulu doit rassembler tous les intervenants pour les amener à participer à un dialogue. Ce catalyseur doit également se montrer ouvert aux besoins des intervenants.

J'aimerais terminer en lançant un appel à l'action. Nous sommes prêts à aller de l'avant depuis un certain temps déjà. Nous avons en fait renoncer à attendre que les instances supérieures soient prêtes elles aussi à agir. Nous avons décidé de prendre les choses en main. Permettez-moi de vous raconter une petite histoire à cet égard.

On a établi il y a un certain temps une ligne de démarcation entre les quelque 270 îles de San Juan, et nos 470 îles. Quelqu'un a un jour établi cette ligne de démarcation. Nous avons cependant de nombreux points communs. Nous avons conclu un accord transfrontalier avec les îles de San Juan sur le partage des ressources et nous avons institué un dialogue sur ce que représente le fait de vivre dans une île et sur ce qui constitue le caractère particulier de cette région marine. C'était il y a environ trois ans.

Avec nos collègues du comté de San Juan, nous avons mis au point l'an dernier un projet d'intendance de l'environnement marin. Nous avons constitué un comité directeur composé de représentants des organismes non gouvernementaux situés de part et d'autre de la ligne de démarcation. Des représentants des Premières nations et des conseils tribaux de toutes les îles siègent à cet organisme. Mon ami le chef Vern Jacks en est membre.

Si nous sommes parvenus à nos fins, c'est parce que nous avons convaincu les bureaucrates que nous pouvions réussir. Cet organisme compte également des représentants des gouvernements provincial et fédéral ainsi que des administrations locales.

• 1200

Nous disposons donc d'une infrastructure qui prend la forme d'un comité directeur auquel sont représentés tous les paliers de gouvernement. Les gens nous disent qu'ils veulent faire leur part, mais qu'il n'existe pas de structure leur permettant de le faire. Les administrations locales se sont donc mobilisées et ont affecté des ressources à ce projet. Avec nos collègues des autres îles, nous avons préparé une brochure faisant connaître ce projet. Nous voulons mettre l'accent sur la collaboration et non pas sur la réglementation. La réglementation a peut-être sa place, et je conviens avec Michel que dès que nous voulons réglementer quoi que ce soit, beaucoup de gens s'énervent. Nous devons donc procéder avec prudence. Nous devons nous doter d'une trousse d'outils qui mettent l'accent sur les initiatives d'intendance volontaires. Nos gens sont prêts à agir.

Nous estimons que le projet de loi C-10 est susceptible de tenir compte des intérêts de tous les intervenants, de dissiper l'incertitude qui entoure le processus qui sera suivi et, ce qui revêt encore plus d'importance, de servir de catalyseur pour qu'il soit possible de canaliser les ressources vers l'atteinte des objectifs que nous poursuivons. À l'heure actuelle, il n'y a aucune concertation entre les différents organismes qui interviennent dans la région. Les organismes non gouvernementaux ont proposé l'initiative du détroit Orca, nos collègues américains ont proposé la création d'un sanctuaire marin et il y a le pipeline du détroit de Géorgie qui traverse toute cette région. Le moment pour un appel à l'action n'a jamais été plus opportun.

Le projet de loi C-10 est tellement nécessaire que les 26 membres de notre conseil qui représentent cette région, en collaboration avec les différents organismes visés, sont prêts à participer à la mise en oeuvre d'un projet pilote. Vous devez compter sur la collaboration des intervenants. Ce qui convient aux uns ne conviendra pas nécessairement aux autres. La solution qui convient dans les îles Gulf ne conviendra pas nécessairement à Prince Rupert ou sur la côte Est. Compte tenu de l'incertitude que crée le projet de loi C-10, nous aimerions collaborer avec vous à mettre en oeuvre un projet pilote dans la région de la mer Salish. Nous n'attendons que votre accord pour aller de l'avant.

Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur McIntosh.

Monsieur Randy Burke de Bluewater Adventures Ltd. sera le dernier témoin à faire un exposé pendant cette partie de la séance. Monsieur Burke, vous avez la parole

M. Randy Burke (président, Bluewater Adventures Ltd.; président, Gwaii Haanas Tour Operators Association): J'aimerais d'abord remercier l'ensemble des membres du comité de me permettre de prendre la parole devant eux aujourd'hui.

Je m'appelle Randy Burke et j'aimerais apporter deux précisions d'entrée de jeu. Je suis président de Bluewater Adventures Ltd, l'une des premières entreprises d'écotourisme en Colombie-Britannique. La société a été créée il y a 27 ans, soit en 1974. Je suis également président de la Gwaii Haanas Tour Operators Association, ce que n'indique peut-être pas l'ordre du jour. J'aimerais donc préciser que je comparais également devant le comité à titre de président de cette association. Je vais d'ailleurs insister sur les îles Gwaii Haanas qui constituent une région susceptible de devenir une aire de conservation marine en vertu du projet de loi C-10.

La Gwaii Haanas Tour Operators Association représente 18 entreprises. L'association a été créée pour favoriser les activités et les communications entre les gestionnaires de ces entreprises et les autres intervenants dans les îles Gwaii Haanas ainsi que pour faire respecter certaines normes déontologiques. Il est intéressant de noter que 70 p. 100 des personnes qui visitent les îles Gwaii Haanas le font accompagnées d'un guide. Elles ne voyagent pas seules et elles s'adressent aux exploitants commerciaux pour visiter le site patrimonial Haida dans la réserve de parc national Gwaii Haanas Moresby-Sud. Les membres de notre association font visiter la région à 70 p. 100 des visiteurs.

Comme nous sommes de petits gens d'affaires, nous n'accueillons pas toujours d'un très bon oeil la réglementation gouvernementale. Ces entreprises sont cependant du domaine de l'écotourisme: des entreprises de kayak de mer, des entreprises qui font des voyages éducatifs en bateau et qui exploitent des voiliers. Nous nous occupons de petits groupes qui comptent de 10 à 15 personnes et nous leur faisons visiter la région de façon respectueuse pour l'environnement. J'insiste sur le fait que pour survivre l'écotourisme doit compter sur une zone marine et terrestre sauvage.

• 1205

Les zones protégées comme la réserve de parc national Gwaii Haanas Moresby-Sud intéressent les visiteurs et permettent aux exploitants d'entreprises d'écotourisme comme la mienne de survivre. La majorité de nos membres appuient la création d'aires marines de conservation ainsi que l'adoption du projet de loi C-10.

Les aspects du projet de loi qui favorisent les activités éducatives et la visite des régions sauvages sont bénéfiques à l'écotourisme. Les lois qui visent simplement à protéger les stocks de poissons ou les ressources naturelles sont louables, mais le projet de loi C-10 vise aussi à faire en sorte que les Canadiens connaissent davantage les merveilles de l'océan ainsi que la beauté des régions côtières.

En 1987, alors que la campagne nationale visant à sauver la réserve de parc national Gwaii Haanas Moresby-Sud était en cours, je pense qu'on a surtout mis l'accent sur l'aspect éducatif de cette initiative. Les Canadiens ont pu se rendre compte de la beauté de la région en la visitant avec des exploitants d'entreprises qui organisent des visites dans les régions sauvages, entreprises qui font maintenant partie de la Gwaii Haanas Tour Operators Association. Voir par soi-même une région a une valeur éducative bien supérieure à celle de lire simplement un article sur celle-ci. Les gens se préoccupent ensuite de ce qui arrive à cette région. L'accent doit certainement être mis sur l'éducation.

De façon générale, les Canadiens appuient le concept des aires marines de conservation, mais je pense qu'ils ne savent pas vraiment à quel point nos côtes sont spéciales. Loin des yeux, loin du coeur, dit-on. Il n'en demeure pas moins que le besoin de protéger ces régions est très réel.

Permettez-moi de vous parler de moi-même pendant un instant. J'ai fait de la voile pendant 14 ans sur les eaux des Gwaii Haanas. Pendant 14 étés, je me suis familiarisé avec les baleines, les oiseaux, les créatures qu'on retrouve entre les marées sur la grève ainsi qu'avec le poisson. Nos visites sont éducatives. Chaque visite est dirigée par un biologiste connu. C'est ce qui fait notre renom.

Je crois que la côte Pacifique est la côte la plus spéciale au monde, non seulement par la majestuosité de ses paysages, mais parce que cet océan fourmille de vie comme aucun autre dans le monde. L'été dernier, nous avons vu dans le cadre des excursions que nous avons organisées 75 rorquals à bosse, le plus grand nombre des rorquals que nous ayons jamais vus. Lors des excursions en août, nous avons vu des cachalots à grosse tête et nous avons vu à deux reprises des rorquals, le mammifère qui vient au deuxième rang pour ce qui est de sa taille parmi tous les mammifères au monde. Cette région est très spéciale.

Au cours de ces 14 années, j'ai aussi constaté des changements dans la région des Gwaii Haanas. Je ne pratique pas beaucoup la pêche. Je disais autrefois que nous pouvions attraper ce qu'il nous fallait pour le dîner en 15 minutes. Ce n'est plus le cas. Les bateaux commerciaux qui pêchent la scorpène ont tellement pris de poissons que je dois admettre que je n'essaie même plus de pêcher.

Je désire insister sur le fait que vous devez adopter ce projet de loi sans plus tarder. Je vous en implore.

En conclusion, l'un des points forts de ce projet de loi c'est qu'il met l'accent sur la consultation. Je souligne cependant que cette consultation doit comprendre l'industrie touristique. On a trop souvent jusqu'ici exclu l'industrie touristique des décisions portant sur l'utilisation des terres et des ressources océaniques. L'industrie touristique sera bientôt la principale industrie de la Colombie-Britannique. L'écotourisme est le secteur touristique qui croît le plus rapidement dans le monde. Une industrie de l'écotourisme sur une petite échelle qui soit viable peut favoriser la conservation des aires marines. Je suis sûr que vous en conviendrez.

Comme les pêches, l'écotourisme repose sur l'exploitation durable des ressources océaniques. Les aires marines de conservation seront bénéfiques pour l'écotourisme.

Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Burke.

J'aimerais vous remercier tous de nous avoir exprimé un vaste éventail de vues sur le sujet avec autant de conviction. Nous vous remercions de votre contribution.

Il nous reste 50 minutes. Passons maintenant aux questions. J'accorde d'abord la parole à M. Cummins.

• 1210

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir d'être ici.

Comme vous le savez, le comité des pêches voulait étudier le projet de loi qui comporte de nombreux aspects liés de très près à la gestion des ressources halieutiques. Nous n'avons malheureusement pas eu l'occasion de le faire. Je suis cependant ici aujourd'hui.

Dans une lettre qu'elle faisait parvenir au comité, Mme James a fait remarquer que le projet de loi exige la création de comités consultatifs de gestion dans chaque aire marine de conservation. Leur rôle sera de conseiller le ministre sur l'établissement, la révision et la mise en oeuvre d'un plan de gestion, ce qui soulève la question de savoir qui sera responsable de ce plan. En vertu de la Constitution, la gestion des ressources halieutiques relève du ministre des Pêches et des Océans. Il me semble que ce projet de loi porte atteinte à ses pouvoirs à cet égard. Je me demande si vous avez un avis sur cette question, madame James.

Mme Michelle James: Je vous remercie, monsieur Cummins. C'est effectivement le cas. Le projet de loi porte atteinte aux pouvoirs du ministre parce que des décisions doivent être prises quotidiennement alors que l'élaboration des plans de gestion des pêches prend beaucoup de temps. Lorsqu'il s'agit d'une aire marine de conservation, un autre comité est chargé d'examiner les plans de gestion des pêches et de les approuver et cette structure s'ajoute au système déjà en place et auquel participent les intervenants, les écologistes, les Premières nations et les pêcheurs commerciaux. Ensemble, ils proposent des plans de gestion intégrés des pêches. Cette structure s'ajoute à celle qui existe déjà.

Dans bien des cas, les décisions de gestion des pêches doivent être prises rapidement, en particulier pour ce qui est de la pêche aux oeufs de hareng et au saumon. Il faut parfois modifier à la dernière minute les plans en fonction des circonstances du moment. Le processus serait retardé si le projet de loi prévoyait l'intervention d'un autre comité. Le rôle que joueront ces comités dans la gestion quotidienne des pêches demeure incertain. On a certainement créé une autre structure qui ajoute à l'incertitude qui existe déjà dans ce domaine.

M. John Cummins: Le paragraphe 10(1) du projet de loi prévoit:

    Le ministre favorise la consultation des ministres et organismes fédéraux et provinciaux concernés et des communautés côtières, des organisations autochtones et des organismes constitués aux termes d'accords sur des revendications territoriales touchés, ainsi que des autres personnes ou organismes [...]

Le paragraphe ne mentionne pas l'industrie de la pêche. Les pêcheurs et les transformateurs ne sont pas mentionnés du tout dans le projet de loi. Cela préoccupe-t-il votre organisme, madame James?

Mme Michelle James: Cette omission nous préoccupe grandement. Il ne s'agit pas simplement des pêcheurs. Le projet de loi ne fait pas non plus mention des exploitants d'entreprises agricoles et des personnes qui tirent leur subsistance de l'océan. Le fait que le projet de loi ne mentionne pas ceux qui exploitent les ressources marines devrait vraiment les préoccuper.

M. John Cummins: Le projet de loi a donc quelque chose à voir avec la gestion des ressources halieutiques. Peut-être convient-il dans le cas des oursins de mer et de la panope du Pacifique dont la mobilité est limitée, mais il ne convient pas dans le cas du saumon et du flétan qui sont des espèces très mobiles. Madame James, cette partie du projet de loi vous inquiète peut-être comme moi. Comment ce projet de loi améliorera-t-il la gestion des ressources halieutiques prévues dans la Loi sur les pêches, ou l'améliorera-t-il selon vous?

Mme Michelle James: La gestion des pêches est un système très complexe selon le type d'espèces visées et selon les zones où la pêche est interdite. L'interdiction de la pêche dans certaines zones n'a aucune utilité dans le cas du saumon parce que les saumons sont comme des Ferraris; ils se déplacent très rapidement tout le long du Pacifique Nord. Ces genres de zones sont cependant utiles pour le scorpène. Voilà le genre de décisions qui sont prises dans le cadre de la gestion des pêches. De grandes aires sont maintenant des refuges pour le scorpène, ceux qui aident vraiment à gérer la pêche à ces espèces. Des systèmes ont donc été mis en place dans le cadre de la Loi sur les pêches et la Loi sur les océans afin d'assurer la viabilité des ressources halieutiques et des ressources marines en Colombie-Britannique. La loi couvre tous ces aspects de la question.

• 1215

La seule chose qui ne se trouve pas dans la Loi sur les océans et la Loi sur les pêches, ce sont les services d'interprétation, les visites publiques et ce genre de choses que fait Parcs Canada. Nous pensons toutefois qu'on peut en traiter bien autrement qu'en créant ce nouveau projet de loi.

M. John Cummins: Merci.

J'ai encore d'autres questions sur cette question de gestion mais nous pourrons y revenir. J'aimerais maintenant parler d'indemnisation. Plus tôt, le maire de Port Clements a dit que par suite de la création du parc national de Moresby-Sud, la région avait connu une baisse du nombre d'emplois, entre autres. Il est clair que ces collectivités n'ont pas été indemnisées.

Si j'ai bien compris, ce projet de loi ne prévoit aucune indemnisation pour les pêcheurs qui ont un manque à gagner. Le projet de loi semble oublier que la pêche n'est pas un privilège conféré au ministre, mais un droit qui remonte à la Grande Charte. Il n'y a pourtant aucune indemnisation pour les pêcheurs qui perdront ces revenus éventuels. Est-ce une préoccupation pour votre organisme?

Mme Michelle James: Absolument. Quand des gens craignent de perdre leur gagne-pain, sans indemnisation, ils deviennent très inquiets; vous n'aurez pas d'appui de citoyens pour ce genre de mesure. Beaucoup craignent qu'on y voit un outil pouvant servir à mettre fin à des activités commerciales dans des régions assez importantes.

Le projet de loi prévoit des activités dans ces secteurs, mais il prévoit une évolution graduelle. Rien n'est sûr. Les investisseurs dans ce secteur se demandent ce qui arrivera si le secteur Moresby-Sud n'est plus une zone de pêche commerciale. Pour la pêche au hareng en Colombie-Britannique, cette zone représente le cinquième des prises, à un taux de prélèvement de 20 p. 100. On fait une gestion prudente.

Là-bas, on craint des pertes d'emplois. Nous ne parlons pas d'un petit secteur. Le projet de loi offre suffisamment de souplesse pour nuire sérieusement aux collectivités côtières du point de vue économique. La possibilité de créer des aires marines de conservation sans examen parlementaire ni considération provinciale pour l'économie suscite de grandes craintes au sein de la population.

Le président: Monsieur McNally.

M. Grant McNally: Merci, monsieur le président.

J'ai une question pour M. Winn-Williams. Vous avez fait allusion à une chose dont nous avions parlé plus tôt.

Mme Michelle James: M. Winn-Williams a dû partir.

M. Grant McNally: Je pose ma question tout de même, à qui voudra bien y répondre. Peut-être que ce n'est plus pertinent maintenant.

Au sujet du processus de consultation prévu à l'article 10, des incertitudes ont été soulevées au comité, et par d'autres antérieurement, au sujet de la possibilité de créer une aire marine de conservation sans consultation, si ce secteur relève uniquement du gouvernement fédéral.

Nous songeons à présenter un amendement qui prévoirait la consultation aussi pour les secteurs auxquels s'applique l'article 5 de la loi, autrement dit, les terres qui sont la propriété du gouvernement fédéral ou qui en relèvent. Serait-ce une bonne chose? Peut-être que cela ne touche pas directement votre ami.

Le président: Quelqu'un de votre groupe veut-il répondre, madame James, ou quelqu'un d'autre?

M. McNally veut que le processus de consultation s'applique à toutes les terres qui relèvent du fédéral, qu'elles soient de propriété provinciale, qu'elles soient administrées par la province ou qu'elles fassent l'objet d'une contestation. La province devrait donc être consultée, quelles que soient les circonstances.

• 1220

M. Gordon McIntosh: Je peux vous présenter le point de vue d'une administration locale. Les administrations locales survivent selon leur capacité de consulter les personnes intéressées. Nous prenons donc très au sérieux la possibilité de tenir compte des divers intérêts en jeu.

Je suis en faveur de renforcer la certitude procédurale relative à la consultation, puisque les consultations commencent maintenant à avoir mauvaise réputation. Il faut un processus qui donne davantage de certitude à la participation, à la vérification ou aux critères de réussite, de manière que la consultation soit réelle pour les administrations locales, qui elles-mêmes relèvent du gouvernement provincial, puis aux yeux du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral. Le renforcement de la consultation contribuerait à faire savoir à tous les intéressés qu'ils seront entendus.

Mme Michelle James: Si je peux intervenir: nous croyons que le gouvernement provincial doit certainement avoir son mot à dire pour ce qui relève de sa compétence. Dans le domaine des océans, la compétence provinciale est assez large, par exemple pour les permis d'aquaculture et de phytogénétique. Toujours du point de vue de la compétence, les terres sous l'océan appartiennent au gouvernement provincial, entre deux bras de terre, par exemple.

Ces avancées de terre, en Colombie-Britannique, couvrent presque toute la zone côtière, à cause de la nature de nos côtes. Par conséquent, le projet de loi devrait prévoir l'approbation du gouvernement provincial pour la création des aires marines de conservation.

Le président: Monsieur Cuzner.

M. Rodger Cuzner: Je veux d'abord féliciter les témoins d'aujourd'hui. Les exposés étaient bien préparés et bien présentés.

Pour Mme James, je ne vois pas l'élément du projet de loi qui enlève la responsabilité de la gestion des pêches au ministre des Pêches et des Océans. Ça me semble inouï. Si c'est là, j'aimerais qu'on me dise où, s'il vous plaît.

Actuellement, si un secteur industriel vit une réduction de quotas ou une fermeture temporaire à cause de préoccupations liées à la conservation ou à l'état des stocks, y a-t-il des mécanismes d'indemnisation?

Je sais que sur la côte Est, il y a eu le programme LSPA, et une indemnisation a eu lieu avec le déclin de la pêche à la morue. Mais actuellement, y a-t-il des mécanismes d'indemnisation en cas de réduction de quotas?

Mme Michelle James: Non, il n'y en a pas. Il n'y a pas de mécanismes d'indemnisation pour des changements résultant de la gestion en fonction de la conservation. Il ne devrait pas y en avoir, ce n'est pas ce que nous disons. Ce n'est pas ce dont nous parlons.

Nous parlons de la possibilité de fermer des zones de la côte où il n'y a pas de conservation, pour en faire une zone représentative du Canada, à préserver pour l'avenir, peut-être comme parc marin, par exemple.

Ce n'est donc pas une question de conservation. Pour l'intérieur du pays, prenons plutôt l'exemple du piégeage des renards. S'il y avait des renards partout, il pourrait y avoir des réseaux de piégeage partout, et par mesure de conservation, on pourrait vous dire que vous êtes limités à un certain nombre de réseaux. Mais en créant un parc, vous dites qu'il ne peut plus y avoir de piégeage, et c'est d'ailleurs ce qui se produit dans les parcs. Dans ces cas-là, les propriétaires de concessions de piégeage sont indemnisés, puisqu'il ne s'agit pas d'une question de conservation; on dit simplement qu'on veut préserver cette aire pour les générations à venir, et que vous ne pouvez plus y mettre vos pièges.

• 1225

C'est la même chose pour Moresby-Sud, par exemple. S'il y avait des zones sans exploitation de mollusques pour lesquelles il n'y a pas de mesures de conservation... Par exemple, le taux de prélèvement est de 1 p. 100 pour la panope du Pacifique, mais si l'on crée une zone sans exploitation, vous ne pouvez plus y pêcher. Ces zones sont retirées de la biomasse totale pour le calcul des prises admissibles de 1 p. 100 et personne n'y aurait plus accès.

Ce n'est pas une question de conservation. Nous ne demandons pas d'indemnisation à cause des mesures de conservation, comme cela se produit couramment. Quand on a créé des zones de refuge pour la scorpène, les pêcheurs n'ont pas été indemnisés et n'auraient pas dû l'être non plus, puisqu'il s'agissait d'une mesure de conservation.

Nous parlons d'une situation bien différente, soit la création de zones pour... Et je ne dis pas nécessairement que toute exploitation sera interdite dans ces zones, puisque les aires marines de conservation ne sont pas nécessairement comme ça, mais pour les zones sans exploitation, créées non pour des fins de conservation mais pour les générations à venir, il doit y avoir une indemnisation.

Le président: Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte: Merci beaucoup, monsieur le président.

Comme M. Cuzner, je veux remercier tous les témoins de ce matin, notamment pour leurs mémoires, qui résultent d'une réflexion approfondie et qui ont été bien présentés. Merci beaucoup.

J'ai une question pour M. Burke et pour Mme James. Vous avez parlé de la nécessité de consulter. Vous avez dit précisément qu'il fallait consulter le secteur du tourisme. Dans votre mémoire, madame James, vous avez aussi parlé d'inclure les gens qui exploitent les ressources marines, qui en font leur gagne-pain, dans l'article 9—je sais que M. Cummins a parlé de l'article 10, alors qu'il voulait dire l'article 9.

L'article 9 porte sur les plans directeurs. L'article 10 porte sur les consultations auxquelles se référait M. McNally. L'article 11 porte sur les comités consultatifs. Dans les trois articles, le ministre est tenu de consulter les personnes ou organismes qu'il estime indiqués.

N'est-ce pas suffisant à vos yeux? Vous en êtes exclus, mais la possibilité existe. Actuellement, l'écotourisme est une partie intégrante de la vie des collectivités côtières du Nord. Si nous imposons des limites, ne craignez-vous pas qu'à un moment donné il faudra ajouter des gens? Pourquoi vous sentiriez-vous exclus? Vous faites certainement partie de ce qui ferait fonctionner ces aires marines de conservation.

M. Randy Burke: Merci beaucoup pour cette question. Je répondrai en premier, si vous le permettez.

L'écotourisme est un secteur relativement nouveau. Il n'a donc pas un rôle très ancien auprès du gouvernement. Par exemple, il y a en Colombie-Britannique un ministère des Forêts, mais pas de ministère du Tourisme. Il y a d'autres exemples de situations où, pour une raison quelconque, on n'a pas invité à la table le secteur du tourisme.

La situation évolue certainement mais je tiens simplement à dire que c'est un secteur important, qui doit être représenté. Il serait bien dommage que le ministre, par négligence ou pour toute autre raison, omette de consulter le secteur du tourisme.

Le président: Madame James, pouvez-vous répondre brièvement?

Mme Michelle James: Je peux répondre pour le secteur des produits de la mer.

C'est intéressant, qu'on ait commencé à dire qu'une liste partielle existait, plutôt qu'une liste complète. Ce serait presque préférable de dire simplement tous les intéressés, ou quelque chose du genre. Les gens commencent à s'inquiéter lorsqu'ils voient une liste partielle, et non une liste complète. Vous avez raison de dire que si nous voulons une liste complète, l'article du projet de loi sera assez long, parce qu'il y a beaucoup de gens à consulter. La reconnaissance devrait aussi se rapporter à la représentativité en fonction de l'importance, etc.

• 1230

Les préoccupations ont été suscitées par le fait que certains se trouvaient inscrits sur la liste, mais pas ceux dont c'est le gagne-pain qui est en jeu. Il est presque préférable de n'inscrire personne sur la liste que d'omettre quelques-uns, qui peuvent dire: «Que voulez-vous dire? Pourquoi eux et pas nous?»

Le président: Merci.

Pour être juste envers les autres participants, je les encourage à intervenir rapidement, s'ils veulent ajouter quelque chose.

Oui, madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte: Madame James, je crois qu'en réponse à la question de M. McNally, vous avez dit craindre que des aires marines de conservation soient créées sans surveillance du Parlement—si je me souviens bien de vos paroles.

Si vous voulez bien regarder le projet de loi, vous pourriez m'aider à comprendre comment nous pouvons renforcer le projet de loi, et dissiper cette crainte. En vertu de l'article 7 du projet de loi, avant qu'une aire marine de conservation soit créée ou proposée, le ministre doit présenter aux deux Chambres du Parlement un rapport contenant des renseignements sur les consultations effectuées ainsi qu'un plan directeur provisoire, et ensuite, la proposition est renvoyée au comité permanent qui l'examine.

Est-ce que cela répond à vos préoccupations?

Mme Michelle James: Ce qu'on a dit plus tôt, dans l'exposé, c'est qu'il faut une loi pour supprimer une aire de conservation; alors pourquoi ne pas exiger une loi pour en créer une? Nous voulons que le Parlement l'approuve, de même que le gouvernement provincial. Ces deux ajouts au projet de loi le rendraient bien plus acceptable.

Lorsque vous parlez de «surveillance», il est vrai qu'il y a les comités mais ceux-ci ne viennent même pas en Colombie-Britannique, parce que c'est trop coûteux. Un comité qui discute de la question ici à Ottawa dira oui, cette proposition de Parcs Canada nous semble assez bonne, on la renvoie aux autres comités. Et oui, l'aire de conservation sera approuvée, et créée par décret en conseil. Pour les gens de la Colombie-Britannique qui doivent vivre avec cette décision, qui sont directement touchés, ce n'est pas suffisant.

Nous voulons renforcer la procédure d'approbation, parce que le genre d'examen en comité dont vous parlez est malheureusement assez futile aux yeux des gens qui vivent à Tofino, Prince Rupert ou ailleurs. Ils aimeraient pouvoir s'adresser à leurs député fédéral ou à leur député provincial; ils voudraient avoir un mot à dire.

Le président: Monsieur McIntosh.

M. Gordon McIntosh: J'aimerais ajouter mon commentaire à celui de Michelle, puisque je crois comme elle que la procédure d'approbation...

En tant qu'administration locale, ce que nous avons appris en pratique, c'est que l'approbation n'est pas nécessairement à la fin de la procédure. Ce que nous voulons, pour renforcer ce projet de loi, c'est la possibilité d'approuver la procédure elle-même, et la création de la liste des intéressés et dès le départ, acquérir des certitudes quant à l'évolution de la procédure. Trop souvent, à la dernière minute, les principaux intéressés n'ont toujours pas été entendus et il n'y a pas eu de procédure équitable aux yeux de certains.

Pour abonder dans le sens de Michelle, je dis qu'un processus de faisabilité doit être pris en compte avant l'approbation.

Mme Sarmite Bulte: Encore une fois, M. McIntosh et Mme James, et pour conclure puisque d'autres ont sans doute des questions à poser, j'aimerais que vous examiniez à nouveau l'article 7, qui prévoit bien un débat parlementaire.

Madame James, vous avez parlé de la possibilité de s'adresser au député provincial ou fédéral; c'est justement ce qui est possible en vertu de cet article. Il n'y a pas que le comité qui discute de la proposition; on en débat au Parlement avant la création de l'aire marine de conservation.

• 1235

M. Gordon McIntosh: Oui, nous le savons bien, mais d'après notre expérience pratique, une gestion marine responsable nécessite plus que le gouvernement fédéral, plus qu'un débat fédéral. Il faut des consultations approfondies. Pour une réelle efficacité, il faut des gestionnaires bénévoles sur le terrain, sinon les aires de conservation deviennent trop coûteuses à gérer. Il faut consulter les principaux intéressés au plan de l'économie, et obtenir leur appui. Il faut beaucoup de ressources pour ce genre de processus.

Nous sommes au courant du processus d'approbation finale. Mais c'est plus tôt, en début, à la base, qu'il faut renforcer le processus.

Le président: Merci, monsieur McIntosh. Cette question a déjà été soulevée et nous y sommes extrêmement sensibilisés.

Madame Murray.

Mme Anne Murray: Puis-je intervenir?

Je suis d'accord avec Gordon, mais je crains qu'on s'enlise complètement dans un processus. Nous avons déjà attendu si longtemps pour ce projet de loi. Il a déjà porté d'autres noms ou titres et nous attendons depuis longtemps. Si on rend le processus encore plus complexe en ajoutant des annexes pour des sites précis, nous attendrons encore des années. Des occasions seront perdues et des écosystèmes se détérioreront. Et quand nous aurons enfin ce site spécial pour le Canada et les Canadiens, il ne sera peut-être pas aussi beau qu'il aurait été si l'on avait agi rapidement.

Quel que soit le processus proposé pour l'amendement, cela doit se faire rapidement, plutôt que de traîner encore pendant des années.

Le président: Mais peut-être que c'est nécessaire.

Ceux qui s'intéressent tant à cet aspect crucial du projet de loi s'intéresseront peut-être à ce qui est arrivé dans la partie nord du lac Supérieur, où une étude de faisabilité sur une aire marine de conservation est en cours depuis déjà deux ans. Des gens de la communauté étaient pour, d'autres ont exprimé des tas de préoccupations sur les divers aspects du projet. La question a été confiée à une sorte d'arbitre, qui a présenté un rapport. Le ministère s'est engagé à produire un plan directeur qui sera présenté à la communauté avant qu'on fasse quoi que ce soit d'autre.

Il a fallu deux ans, mais deux ans d'efforts utiles. Au bout du compte, s'il n'y a pas de consensus, rien ne se produira probablement. Mais s'il y a un consensus, comme on semble le croire, le projet ira de l'avant.

C'est une bonne chose de prendre du temps au départ, et de prendre une décision qui reçoit l'appui de toute la communauté. Autrement, ça ne marche pas.

Monsieur Cummins, avez-vous d'autres questions?

M. John Cummins: Merci, monsieur le président.

Madame James, d'après votre rapport au comité, je déduis que vous êtes aussi perplexe que moi quant à l'objectif réel du projet de loi. Si l'objectif est de protéger le poisson et son habitat, le ministre des Pêches a déjà les pouvoirs nécessaires pour le faire. En fait, le ministre a non seulement ce pouvoir, mais aussi l'obligation de gérer la ressource halieutique, de la protéger, ainsi que de protéger son habitat.

Il n'y a pas d'exigence semblable ou comparable pour la faune terrestre ou pour les terres; ça n'existe pas. La création de parcs nationaux terrestres semble donc utile. Mais pour les pêches et l'océan, je ne vois pas la même utilité.

Il semblerait même, comme je l'ai déjà dit, qu'en intervenant dans un domaine qui relève des obligations du ministre, l'exigence de consultation par le ministre du Patrimoine pourrait empêcher le ministres des Pêches de s'acquitter de cette obligation. Je ne sais pas si c'est à vous que je dois poser la question, mais j'aimerais certainement savoir ce que vous en pensez, madame James.

Mme Michelle James: La Loi sur les pêches et la Loi sur les océans prévoient tous les outils nécessaires pour la saine gestion et la gestion durable de nos ressources marines, en plus d'autres lois provinciales. Pour ce qui est d'assurer la pérennité de la ressource marine, cette loi est redondante, puisque tous les outils nécessaires existent déjà en vertu d'autres lois. Tout ce qu'ajoute ce projet de loi, c'est l'idée de préserver pour le public des zones particulières, vierges, pour qu'il puisse les voir. Cela relève du mandat de Parcs Canada.

• 1240

Le problème, c'est que la gestion des pêches et des ressources est une activité très complexe axée sur les espèces. Si l'objectif de ce projet de loi est la conservation, par exemple, tous les outils existent déjà dans la Loi sur les pêches et la Loi sur les océans. Ce sont des mesures législatives très fortes, en fait. Tout le monde dit que la Loi sur les pêches est l'outil législatif le plus fort, en matière environnementale, au Canada. Comme vous le dites, il n'y a rien de tel dans les autres domaines.

Il y a beaucoup de chevauchements et de risques de dédoublement, et rien ou presque dans la loi nous garantit qu'on l'évitera. En examinant le projet de loi, je ne vois rien qui donne à nos membres, qui sont nombreux et situés tout le long de nos côtes, des garanties qu'une meilleure gestion des pêches sera assurée grâce au projet de loi. Si les gens y voient un outil de conservation de la ressource, ils se trompent.

Si les gens y voient une façon de gérer l'interprétation comme on le fait dans les parcs, c'est bien, mais cela pourrait être approuvé en vertu de la Loi sur les océans, tout en étant géré par Parcs Canada, plutôt qu'en vertu d'un projet de loi administré par Parcs Canada. C'est notre position, puisque tous les outils de conservation et de saine gestion des ressources marines sont déjà à la disposition du gouvernement.

M. John Cummins: Voici une question pour conclure en quelque sorte, car je pense que mon temps et presque écoulé.

Vous parlez d'une gestion sage et vous avez mentionné tout à l'heure un taux de prises de 1 p. 100 pour la panope du Pacifique. Il y a probablement des gens autour de cette table qui ne connaissent pas la différence entre une panope du Pacifique et un canard colbert, mais c'est une tout autre histoire. Pourriez-vous expliquer cette notion d'un taux de prises de 1 p. 100 afin que les gens puissent comprendre de quoi vous parlez?

Mme Michelle James: En général, quand on gère des pêches, on détermine quelle est la quantité de biomasse présente. Dans le cas de la panope du Pacifique, par exemple, il y a ce qu'on appelle une biomasse qui peut être récoltée. On exclut par exemple les endroits trop profonds pour y plonger. Les secteurs mis de côté pour la recherche et la conservation n'en font pas partie. Ils ne sont pas inclus dans la biomasse.

Le secteur des îles Scott, par exemple, a été fermé à la pêche parce qu'il sera peut-être un jour désigné comme zone de protection marine, et des endroits comme les îles Broken sont évidemment fermés à la pêche. Dans les secteurs ouverts à la pêche, on détermine le nombre d'animaux disponibles, et chaque année, on peut en prendre 1 p. 100. C'est un chiffre très prudent. Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres.

Il y a 82 espèces de poissons et de fruits de mer qu'on peut prendre à des fins commerciales en Colombie-Britannique, et elles sont toutes gérées d'une façon très différente. Des espèces différentes peuvent tolérer des taux différents de prises. Ces espèces sont gérées de façon prudente par le ministère des Pêches et des Océans. Certaines de ces espèces passent d'un endroit à l'autre, alors que d'autres restent au même endroit. Les avantages de zones d'interdiction de prises peuvent différer selon l'espèce. Actuellement, il n'y a absolument aucun avantage à désigner des zones où les prises de panope du Pacifique sont interdites, sauf si l'on veut désigner des endroits où l'accès est simplement interdit à tous. En ce qui concerne la conservation de la ressource, c'est inutile, mais s'il s'agissait d'assurer la protection, il y aurait une utilité.

• 1245

Le président: Bien.

Avez-vous d'autres questions à poser, monsieur McNally?

M. Grant McNally: Non.

Le président: Monsieur Cuzner.

M. Rodger Cuzner: Je pensais en réalité que la panope du Pacifique n'était qu'une des conséquences de la catastrophe de l'Exxon Valdez. Je suppose que j'étais quelque peu mal informé.

Le président: Je me demandais également si nous étions tous tellement innocents ici que nous ne connaissions absolument rien des oiseaux aquatiques, mais nous en avons vu quelques-uns dans notre vie.

Une voix: A-t-il parlé d'oiseaux aquatiques?

M. Rodger Cuzner: Monsieur Burke, et madame Murray, je pense avoir détecté un sentiment d'urgence dans votre message et dans votre exposé. Pourriez-vous nous redire pourquoi il est tellement impérieux d'avoir cette mesure législative?

M. Anne Murray: Certainement, je serais heureuse de le répéter. J'espère avoir communiqué cette impression dans mon mémoire.

Nous examinons cette question depuis des années, comme je l'ai mentionné—l'idée de désigner des zones représentatives—et il est essentiel à mon avis que tout en reconnaissant la très grande importance des ressources halieutiques, nous sachions qu'elles ne constituent pas le seul élément de l'écosystème. Nous avons besoin de zones où l'on tient compte de l'écosystème dans son ensemble afin de le protéger, de sorte que nous ne pensions pas seulement aux poissons, mais aussi aux oiseaux, aux mammifères, aux crustacés et à d'autres espèces également, et que nous pensions aussi aux gens, aux possibilités qu'un parc leur donne d'apprendre à connaître l'océan, d'en profiter pour s'y détendre tout en s'instruisant—de profiter donc de cette expérience que décrivait Randy.

L'expérience pratique est absolument inestimable. On ne peut pas remplacer une expérience concrète par ce qu'on peut voir à la télévision. La seule façon d'apprendre vraiment est d'aller faire l'expérience des choses par soi-même.

L'écotourisme est en croissance très rapide. Je reviens d'un voyage en Australie, où il y a des aires marines de conservation, des parcs marins et d'autres choses de cette nature. Les possibilités pour l'écotourisme augmentent énormément. J'étais déjà allée en Australie il y a quinze ans et j'ai vraiment remarqué la différence, maintenant qu'un grand nombre des parcs marins sont établis, et j'ai pu constater quelle a été leur incidence sur les collectivités environnantes. Dans tous les hôtels et les bureaux d'information, on trouve des renseignements sur ces voyages. Certains sont bien gérés, tandis que d'autres le sont moins bien.

Je pense que Parcs Canada a une bonne réputation comme gestionnaire des parcs du Canada. La présence de parcs dans certains secteurs limités de notre côte donnerait vraiment une bonne base pour l'établissement d'entreprises d'écotourisme. Les gens viendront de toutes façons. J'aimerais que ces visites soient gérées d'une certaine façon, au lieu que les gens arrivent simplement en masse dans la région. Les perturbations causées ainsi par l'être humain peuvent être aussi dommageables que la surpêche ou l'installation d'une industrie qui ne convient pas du tout à la région.

Nous voulons une sorte de structure pour gérer ces visites. Cela nous préoccupe particulièrement dans le cas de secteurs importants pour les oiseaux, et il y en a dans toute la région côtière que j'ai décrite tout à l'heure.

Je peux donc voir beaucoup de raisons pour justifier l'adoption de ce projet de loi afin que Parcs Canada puisse établir deux, trois ou quatre sites—et c'est probablement tout ce qu'il faudra pendant un bon bout de temps—mais si nous pouvons obtenir ces sites, les provinces pourront ensuite créer des zones de protection marines et d'autres sites plus spécifiques qui présentent un intérêt pour la conservation.

Je pense vraiment que le temps est venu d'agir. Le reste du monde est en train de le faire. Pourquoi le Canada, doté d'une merveilleuse biodiversité—et c'est particulièrement le cas en Colombie-Britannique—pourquoi devrait-il traîner derrière le reste du monde? J'ai toujours pensé que nous devrions être un chef de file dans le monde à cet égard.

Merci.

M. Randy Burke: Si vous le permettez, j'ajouterai qu'en Colombie-Britannique, on voit que l'écotourisme à l'intérieur des terres, comme c'est le cas pour la foresterie, se limite maintenant à quelques vallées qui restent. Si nous avons besoin d'une base d'espaces naturels pour survivre, l'écotourisme est seulement vu comme un élément marginal, quand il s'agit de tenir compte de ses besoins lorsqu'on prend des décisions au sujet de l'utilisation des terres.

• 1250

En ce qui concerne l'océan, je pense que la situation est devenue urgente, car comme vous le savez fort bien, d'autres industries prennent de plus en plus de place ici le long de la côte. L'industrie de l'aquaculture prévoit étendre ses activités encore plus vers le nord le long de la côte. Il y a également des possibilités pour l'industrie pétrolière et gazière. Je pense que nous allons voir la côte de plus en plus découpée en diverses zones. Ce processus de découpage doit inclure des aires marines de conservation, et il faut agir assez rapidement, sinon les possibilités seront réduites.

Étant donné que tout prend toujours plus de temps que prévu—c'est une caractéristique de l'être humain—nous pouvons aussi convenir qu'en agissant plus rapidement nous réduirons jusqu'à un certain point le niveau de dégradation supplémentaire des ressources aquatiques qui a peut-être déjà commencé.

Merci.

M. Gordon McIntosh: Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose au commentaire de Randy et à celui d'Anne. Ils parlent d'un point de vue défensif—et je suis d'accord là-dessus—en disant qu'il y a un besoin, un besoin urgent. J'aimerais aborder la question d'un point de vue opportuniste.

Les gouvernements sont tous mobilisés, tant au palier local que provincial et fédéral. Le député de notre circonscription s'appelle Gary Lunn. Nous sommes tout près de la frontière et nous essayons de reproduire de notre côté un système d'intendance de zones marines qui existe déjà à moins de 15 kilomètres de chez nous. Il y a une simple ligne de démarcation entre nous. Je voudrais parler de la possibilité que les administrations locales, le gouvernement provincial et—peut-être—le gouvernement fédéral unissent leurs ressources pour exploiter cela. Nous avons là une occasion. Nous sommes prêts. Nous avons une capacité énorme d'agir, et donc en plus d'un besoin qui existe, il y a aussi une occasion qui se présente.

Le président: Avant de terminer, je veux demander à Mme James quelque chose au sujet de la question de la compétence du ministre des Pêches et des Océans et de celle de la ministre du Patrimoine canadien en vertu du paragraphe 9(4), qui se lit ainsi:

    Les dispositions du plan relatives à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation et sécurité maritimes sont assujetties à l'accord du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

Cela signifie-t-il que si le ministre des Pêches et des Océans n'est pas d'accord, ce qu'on veut faire ne se fera pas?

Mme Michelle James: Je pense que c'est une question de processus. Je ne sais vraiment pas ce que ce jargon de juriste signifie exactement, mais je pense que cela peut signifier que le ministre des Pêches et des Océans doit consulter la ministre du Patrimoine canadien, et à juste titre.

Il y a tout un processus à suivre, et les gens sont fort préoccupés, parce que ces aires marines de conservation pourront être des secteurs immenses. Je pense que nous avons parlé d'une zone d'environ 5 000 kilomètres carrés d'océans dans le secteur des îles Gulf. Je ne sais pas quelle sera la taille du parc, mais les cercles que j'ai vus semblent assez grands.

On ajoute donc un autre palier d'approbation, si je peux dire, et des discussions dans une situation qui est déjà très complexe. Je pense que les gens, et c'est certainement le cas de nos membres, se demandent ce que cela signifie. Nous ne sommes pas rassurés par le fait que les choses seront...

Personne ne s'attend à ce que tout soit comme avant, mais ils font leur travail de conservation, ils font de grands sacrifices pour faire en sorte que la gestion de ces pêches se fasse d'une façon prudente, et ils font bien d'autres choses. Ils ne comprennent tout simplement pas comment tout cela va fonctionner, étant donné les accords qui sont nécessaires entre des ministères.

C'est déjà une situation très complexe. On risque d'ajouter un autre niveau de complexité, bien qu'on n'ait pas vraiment bien expliqué—c'est du moins ce que je pense—aux intervenants de l'industrie ce que tout cela signifie. Il faut qu'il y ait des consultations, mais je ne sais pas qui prend la décision finale, si c'est le ministre des Pêches et des Océans ou la ministre du Patrimoine canadien. Je ne comprends pas.

• 1255

Le président: D'après cet article, le ministre des Pêches a un droit de veto. S'il n'accepte pas un plan, ce plan ne sera pas mis en oeuvre. Il a un droit de veto absolu sur tout ce qui concerne sa compétence. En d'autres mots, on dit bien clairement ici:

    9.(4) Les dispositions du plan relatives à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation et sécurité maritimes sont assujetties à l'accord du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

Si le ministre des Pêches et des Océans dit non aux instances présentées par votre groupe et d'autres, c'en est fait, le plan ne sera pas mis en oeuvre.

Mme Michelle James: En vertu du processus actuel de gestion des ressources halieutiques, les scientifiques déterminent le taux de prises qu'ils estiment acceptable. Il y a ensuite un processus d'examen, suivi de consultations avec tous les intervenants, les écologistes et bien d'autres groupes. Enfin, la question est soumise au ministre.

Le processus commence par des employés en Colombie- Britannique, et certains de ces plans de gestion des pêches sont approuvés par le ministre, tandis que d'autres sont approuvés au niveau local. C'est un processus qui prend généralement toute une année, à partir du moment où l'on recueille les données scientifiques jusqu'au plan directeur.

S'il y a un processus additionnel qui nécessite des consultations avec la ministre du Patrimoine canadien, nous disons simplement que cela commence à paraître vraiment complexe et très difficile. Il est déjà assez dure à l'heure actuelle d'obtenir l'approbation d'un plan de gestion des pêches par le ministre des Pêches et des Océans, et cela serait encore pire si l'on ajoute un autre processus. Nous craignons donc vraiment qu'on ajoute simplement un palier par-dessus l'autre.

En ce qui concerne la conservation, le ministre des Pêches et des Océans a déjà tous les outils nécessaires. Si, par exemple, Parcs Canada estimait que le ministre ne fait pas son travail à cet égard, je pourrais envisager un processus permettant une intervention. Il est cependant déjà assez difficile d'obtenir l'approbation d'un plan de gestion des pêches, et la situation sera encore pire si l'on ajoute un niveau d'intervention.

Vous avez parlé aussi d'aquaculture. Cette industrie est de compétence provinciale, et l'on ne prévoit pas d'approbation par la province.

Le président: Le temps que nous avions à notre disposition est écoulé.

Je remercie tous les intervenants d'être venus aujourd'hui. Je vous remercie beaucoup de votre participation, d'avoir exprimé vos préoccupations et vos opinions. Nous vous en sommes reconnaissants.

La séance est levée.

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