FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent de la condition féminine
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 mai 2007
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Je rappellerai à l’intention de nos témoins que nous avons une motion pendante de la dernière réunion, et j’aimerais qu’on l’examine. Nous tenterons d’aller le plus rapidement possible, pour ensuite passer aux affaires courantes.
Madame Minna, voudriez-vous lire votre motion?
Merci.
Merci, madame la présidente. La motion se lit comme suit:
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, que le Comité permanent de la condition féminine recommande au gouvernement de présenter immédiatement un projet de loi proactif sur l’équité salariale, comme le recommandait le Groupe de travail fédéral sur l’équité salariale en 2004 et que la présidente rapporte sans tarder à la Chambre l’adoption de la présente motion.
J’aimerais connaître l’orientation du comité à ce propos. Avant d’accorder la parole à quiconque ici présent, je veux que le comité se prononce.
Nous avons des témoins. Pouvons-nous limiter ce débat à dix minutes? Peut-on obtenir consensus sur cette durée?
Des voix: D'accord.
La présidente: Bien. Donc, nous nous limiterons à dix minutes. Peu importe qui sera en train de parler, je vais y mettre un terme au bout de dix minutes.
Madame Smith.
Madame la présidente, j’aimerais me prononcer sur cette motion, car nous avons le sentiment que l’équité salariale est extrêmement importante.
Nous avons étudié la façon dont le gouvernement précédent a géré ce dossier. Il y a eu un groupe de travail, et une lettre de l’honorable Irwin Cotler et de l’honorable Joe Fontana Going à l’intention de Mme Neville, qui faisait partie du comité à l’époque. On lisait dans cette lettre que le rapport ne fournissait pas les détails adéquats pour la mise en œuvre de l’équité salariale dans un grand nombre de lieux de travail sous réglementation fédérale. On y ajoutait que, compte tenu des complexités liées à l’application d’une loi proactive sur l’équité salariale, le gouvernement (Parti libéral à ce moment) ne pouvait présenter une loi fédérale avant le 31 octobre 2005 sans avoir poursuivi les études et les consultations.
Nous étions d’accord avec cet état de choses.
En outre, Irwin Cotler, alors ministre, s’est exprimé en ces termes le 21 novembre 2005:
Je veux souligner le fait que cette loi proactive sur l’équité salariale, envers laquelle nous nous sommes engagés, doit être mûrement rédigée pour éviter les types d’écueils auxquels nous avons continué de nous heurter sous le régime actuel. Ce ne sera pas une tâche facile, compte tenu de la nécessité de déterminer les méthodes, les voies et les moyens requis pour mettre en œuvre l’équité salariale dans un milieu de travail. [Traduction].
On ne peut rédiger cette loi en une journée. [Traduction].
Comme je l’ai dit l’autre jour, notre ministre, notre gouvernement ressent vivement à quel point l’équité salariale est un enjeu énorme, important. Notre gouvernement a examiné la loi et souhaité prendre des mesures immédiates parce que nous avions convenu que cet exercice pourrait s’étirer sur une très longue période. Donc, le nouveau gouvernement du Canada reconnaît que l’équité salariale s’inscrit dans les droits de la personne. La Loi canadienne sur les droits de la personne contient depuis 1977 des dispositions sur l’équité salariale. Encore une fois, comme je le disais l’autre jour, l’Ordonnance sur la parité salariale a été adoptée par le gouvernement conservateur en 1986, et notre gouvernement appuie fermement l’équité salariale.
Ce qui s’est produit, pour l’essentiel, est que le plan de mise en œuvre a été appliqué au moyen de la loi existante. C’est pourquoi nous, de ce côté de la Chambre, ne pouvons appuyer la motion, car nous souhaitons que les choses se déroulent rapidement, sans obstacles.
Merci, madame la présidente.
J’appuie la motion de Mme Minna parce que j’estime très important de revoir le travail réalisé par le groupe de travail sur l’équité salariale. Les membres du comité qui ont lu ce rapport noteront qu’on y définit l’équité salariale étape par étape. Tout est très clair et très précis. Et le plan qu’ils proposent est tout à fait réalisable.
Le comité a entendu une succession de témoins s’exprimer sur l’état de pauvreté dans lequel vivent des femmes. Celles-ci occupent un emploi dont le salaire est inférieur aux normes. La semaine dernière, nous avons reçu un rapport du Centre canadien de politiques alternatives qui, encore une fois, indique que les femmes et les familles souffrent du fait que nous n’avons pas pris les mesures pour que leur revenu augmente au rythme de l’inflation. Le fait est que le fossé entre la capacité et l’incapacité de payer ne cesse de s’élargir.
Cette situation nécessite des mesures proactives en matière d’équité salariale. Ce pays dispose d’un système de plaintes qui est litigieux et exige de la part de ceux qui n’ont pas l’avantage de compter sur un syndicat de tout faire par eux-mêmes, pour ainsi dire. Dans un récent rapport, les syndicats de ce pays disaient, de but en blanc, que le gouvernement actuel ne propose absolument rien de nouveau au chapitre de l’équité salariale, que toutes les choses dont il parle ont déjà été tentées sans résultat positif.
Il nous faut simplement aller de l’avant, nous ne pouvons continuer à pédaler de reculons. Le temps est venu d’appliquer une équité salariale proactive, et ce gouvernement doit y donner suite. Nous attendons depuis de trop nombreuses années.
Merci, madame la présidente.
Je sais que Mme Smith a lu de longs extraits d’une lettre de M. Cotler, ancien ministre de la Justice, et de M. Fontana, ancien ministre du Travail et du Logement. Toutefois, une autre partie de cette lettre est également très révélatrice. La voici:
Par conséquent, le gouvernement est à élaborer des propositions étoffées de réforme législative, et il travaillera étroitement avec des intervenants dans le cadre de ce processus. Le ministre de la Justice de même que le ministre du Travail et du Logement désigneront un facilitateur impartial pour diriger les discussions avec d’importants représentants des intervenants. Ces représentants discuteront des propositions du gouvernement ayant trait aux quatre questions susmentionnées et examineront des solutions de rechange qui respectent les principes fondamentaux en matière d’équité salariale. À partir de ces conclusions, le gouvernement examinera un éventail de méthodes et de processus axés sur la mise en œuvre des réformes d’équité salariale, et il s’activera à présenter un projet de loi d’ici la fin de 2006 ou au début de 2007. [Traduction].
On présume que le ministère a reçu certaines instructions. Nous nous étions engagés à ce qu’une loi favorisant la réforme proactive de l’équité salariale soit déposée devant le Parlement soit vers la fin de 2006, soit au début de 2007. Nous voilà en 2007 et vous n’avez rien fait. Le gouvernement actuel répond ne pas souhaiter aller dans cette direction. En d’autres mots, quelle que soit la bonne volonté manifestée ou peu importe le nombre de personnes de plus qu’on affecte à l’application de la loi, ça ne fonctionne pas sous le régime actuel. La Loi est en place depuis 35 ans, et des situations litigieuses perdurent depuis 25 ans. Ça ne fonctionnera pas.
La conclusion de la lettre est la suivante:
Le gouvernement s’engage à mettre en place une réforme d’équité salariale qui sera efficiente et efficace. [Traduction].
Cet engagement est écrit noir sur blanc, et il est exprimé par les deux anciens ministres. L’ancien premier ministre s’était publiquement prononcé sur la question vers la fin de 2005, en indiquant clairement qu’il entendait présenter une loi proactive sur l’équité salariale. Compte tenu du fait qu’il y a réellement deux orientations divergentes sur la question, je voudrais dire, madame la présidente, que nous ne saurons modifier l’équité salariale pour les femmes de ce pays à moins d’enclencher un processus législatif proactif.
Merci, madame la présidente.
Sauf le respect que je vous dois, la motion fait état de la nécessité de produire rapidement cette loi en matière d’équité salariale, comme l’indiquent les mots « sans délai », « présenter immédiatement ». Comme l’a indiqué de façon très claire le ministre de l’époque, M. Cotler, dans une lettre conjointe, compte tenu des complexités de la situation... et je devrais mentionner que cela se retrouve dans le quatrième rapport présenté au Comité permanent de la condition féminine et daté du 5 octobre:
Le gouvernement ne peut, à ce moment-ci, présenter une loi fédérale avant le 31 octobre 2005 sans avoir poursuivi les études et les consultations. [Traduction].
Il y a aveu ici que, afin de… Je serais le premier à laisser entendre que toutes les lois gouvernementales doivent faire l’objet d’un examen de temps en temps. Il faut les mettre à jour. Parfois, on découvre des choses qui posent problème et il faut les revoir. Pour tout dire, nous disposons d’une loi en matière d’équité salariale. Le ministre s’est clairement engagé à enclencher des mesures proactives pour s’assurer que la loi dont nous disposons est bien mise en œuvre et que les milieux de travail l’appliquent. Il a joint le geste à la parole en lançant une centaine d’inspecteurs ou plus sur la route partout au pays pour s’assurer que la loi existante faisait l’objet d’une mise en œuvre adéquate.
Nous pouvons débattre la question jusqu’à ce que les poules aient des dents, mais tout compte fait, la demande du membre, à savoir une loi proactive plutôt immédiate en matière d’équité salariale, fait fi des recommandations mêmes du gouvernement précédent sur la question.
Oui, madame la présidente. J’apprécie que M. Stanton rappelle qu’ils disaient en 2005 n’être pas prêts, mais mon propos est très clair. Les deux ministères ont également affirmé qu’ils seraient prêts vers la fin de 2006 et en 2007, après consultation auprès des intervenants, qui allaient aider le gouvernement à rédiger la loi.
Ils ont perdu leurs élections, et le gouvernement actuel n’allait évidemment pas dans cette direction, de sorte que nous avons gaspillé un an et demi. Il est vrai que nos objectifs sont différents. Quant à l’observation selon laquelle nous disposons déjà d’une loi en matière d’équité salariale, c’est vrai, mais comme l’ont indiqué bien des gens, elle est fondée sur les plaintes, elle n’est pas efficace ni proactive.
L’ancien gouvernement s’est montré clair en disant que nous aurions proposé une nouvelle loi proactive avant la fin de 2006 ou au début de 2007. Le travail préliminaire n’a pas été fait au cours de la dernière année et demie en raison des différentes positions sur la question, et il est évident que la situation ne changera pas. Ce que je tente de faire ici, c’est de rectifier une situation et de nous remettre en position de travailler à nouveau sur une loi en matière d’équité salariale.
Le temps prévu pour cette question est presque écoulé. Nous avons présenté quelques rapports et reçu des réponses de différents ministres. Nous avons essayé d’amener ces ministres à se présenter devant nous.
Je ne tiens pas à suggérer quoi que ce soit, mais je pose la question: la présence de ces ministres ici serait-elle utile? Nous souhaitons tous agir de manière à ce que l’équité salariale se concrétise.
D’accord, mettons la motion en délibération.
Je ne peux mettre la motion aux voix, mais quiconque le souhaite peut le faire.
Allez-y, madame Minna. Vous pouvez procéder à la mise aux voix.
J’aime votre suggestion. Je crois que tous ceux qui sont réunis autour de cette table tiennent absolument à ce que l’équité salariale devienne une réalité. Pour l’amour du ciel, beaucoup d’entre nous avons nous-mêmes vécu des iniquités. La seule différence est que, de notre côté de la Chambre, nous demandons à ce que l’adoption de la loi ne prenne pas trois années. La loi est là. Le ministre tente de provoquer les choses, car il n’y avait même pas de plan de mise en œuvre au préalable.
Quant à l’argument selon lequel nous allions procéder rapidement à la veille de la dissolution du gouvernement dans la foulée des élections, je dirai en tout respect qu’il a eu 13 années pour le faire. Tous autour de cette table sont d’avis que l’équité salariale devrait être mise en place. Donc, avant d’aller de l’avant avec cette motion, je proposerais d’inviter les ministres à venir s’adresser à nous sur la question expresse de l’équité salariale plutôt que de tout laisser en suspens.
Bien. Je réponds à la volonté du comité, et si le comité veut procéder à la mise aux voix, c’est sa prérogative et non la mienne. J’aimerais que la question…
M. Bruce Stanton: J’ai une objection, madame la présidente.
La présidente: Oui, monsieur Stanton. Nos dix minutes sont écoulées. J’avais décidé d’accorder dix minutes, et je n’aurais même pas dû vous accorder une option, mais je tente seulement de voir si je peux équilibrer les choses.
Corrigez-moi si la procédure est incorrecte, mais j’aimerais proposer d’aller de l’avant avec d’autres affaires et laisser celle-ci pendante…
Désolée, en tout respect, la réunion est encore en cours, et nous la poursuivrons dans son état actuel avec ce résultat.
Sur le plan procédural, je crois que vous êtes hors limites. Vous avez tous convenu d’une période de dix minutes. La discussion est maintenant terminée. Nous passons à autre chose. Dans quelle direction le comité souhaite-t-il aller?
[Français]
Madame la présidente, je voudrais simplement faire un commentaire.
Pour ma part, peu importe qu'on fasse référence à l'ancien gouvernement ou qu'on s'adresse au gouvernement actuel. La semaine dernière, tous les partis ont été approchés par des groupes de femmes, lesquels nous ont rappelé que ce rapport a été déposé en 2004.
Je crois que cette loi devrait être efficace assez rapidement, si je me fie à celle qu'on a déjà au Québec et qui fonctionne très bien. Et le Québec est toujours à l'intérieur du Canada.
Merci, madame.
[Traduction]
Le temps de discussion est terminé, madame.
Un vote par appel nominal… Est-ce ce que vous demandez, madame inna?
Qui a demandé un vote par appel nominal? Personne. D’accord, c’est bien.
Vous demandez la mise aux voix.
Monsieur Van Kesteren, on vous demande si vous votez pour ou contre la motion.
M. Van Kesteren se demandait si nous pouvions ou non limiter à dix minutes une discussion de ce genre. Est-ce légal de procéder ainsi?
Nous avons procédé à la mise aux voix. Le comité était d’accord. Il est trop tard pour revenir en arrière. Donc, nous allons de l’avant.
(Motion adoptée [Voir les Procès-verbaux])
La motion est adoptée, et nous allons maintenant entendre nos témoins sur la sécurité économique des femmes. Nous avons avec nous Diane Martz, qui comparaît à titre personnel. Nous avons également Colleen Purdon, représentante de Rural Women Take Action on Poverty Committee, et Ellen Gabriel, présidente de l’Association des femmes autochtones du Québec.
Bienvenue à vous toutes. Vous disposez chacune de dix minutes de présentation, à la suite de quoi les membres du comité poseront des questions. Ensuite, vous aurez une minute pour récapituler.
L’horloge va sonner le départ. Prêtez attention, car le temps est limité.
Madame Martz, pouvez-vous commencer? Merci.
J’aimerais vous remercier de l’invitation à prendre la parole aujourd’hui au sujet des femmes vivant en milieu rural et de la sécurité économique. Je remplis actuellement les fonctions de directrice de recherche du Centre d'excellence pour la santé des femmes — région des Prairies. Auparavant, j’étais directrice du Centre for Rural Studies and Enrichment, associé à l’université de la Saskatchewan.
Bien que de nombreux aspects de l’insécurité économique en milieu rural puissent être similaires à ceux du milieu urbain, plusieurs facteurs les différencient. Il s’agit de choses telles que l’invisibilité culturelle et spatiale — c’est-à-dire que la pauvreté dans les secteurs ruraux n’est pas concentrée et pas nécessairement admise — l’isolement, la structure économique et la restructuration, les attitudes et la culture en milieu rural, et l’élimination des services de santé et des services sociaux dans les secteurs ruraux.
Le problème grandissant de la sécurité économique dans le Canada rural a été évoqué dans un rapport de l’Association canadienne des banques alimentaires paru en 2003, qui soulignait l’ironie de la situation, à savoir qu’une quantité croissante de gens vivant dans les régions canadiennes productrices d’aliments, et même les producteurs d’aliments, devaient recourir aux banques alimentaires.
J’appuie mes remarques sur les thèmes récurrents de plusieurs études auxquelles j’ai pris part et qui portaient sur la garde des enfants en milieu rural, la violence conjugale dans les régions rurales, le travail des agricultrices dans les familles agricoles, la nouvelle économie rurale, le rôle du secteur public dans les sections rurales de la Saskatchewan, et le travail des femmes dans les secteurs de transformation agricole et forestière. Je me pencherai sur quatre domaines, à savoir la possibilité pour les femmes de travailler dans les secteurs ruraux, le revenu, les soins familiaux et l’agriculture.
L’emploi pour les femmes dans le Canada rural est une nécessité pour la subsistance de la famille, les soins aux enfants et, dans bien des cas, comme supplément au revenu agricole. Les femmes capables de gagner un salaire substantiel se donnent à elles-mêmes ainsi qu’à leur famille l’option de vivre dans des collectivités rurales, d’y trouver la sécurité et de connaître une bonne qualité de vie.
Les possibilités d’emploi pour les femmes en milieu rural sont limitées, particulièrement les emplois qui procurent un salaire convenable. Ces femmes ont le sentiment d’avoir peu d’options. La plupart des emplois qui leur sont offerts se trouvent dans le secteur des services. Il s’agit d’emplois traditionnellement occupés par des femmes, comme ceux de serveuse, gardienne d’enfants, aide-enseignante, secrétaire et employée de bureau. Les emplois traditionnels des femmes qui offrent un meilleur salaire, à savoir ceux d’enseignante, d’infirmière et de fonctionnaire, ne se trouvent plus dans les secteurs ruraux puisque les écoles et les hôpitaux ferment leurs portes et que les bureaux gouvernementaux sont déplacés dans les secteurs urbains.
Les idées traditionnelles relatives aux emplois qui conviennent aux femmes persistent dans certains secteurs ruraux. Malgré une lente progression des mentalités, la ségrégation professionnelle demeure une réalité si l’on en juge par la surreprésentation des femmes dans le secteurs des services et les emplois de bureau, où la rémunération est faible.
Sur le plan du revenu, les salaires moyens dans les secteurs ruraux et les petites villes du Canada sont depuis des décennies inférieurs aux salaires moyens dans les secteurs urbains, et la proportion des gens dans une pauvreté persistante tend à être plus élevée dans les secteurs ruraux et les petites villes du Canada. De tous les groupes examinés, ce sont les femmes vivant en milieu rural qui ont les salaires moyens les plus bas, et des proportions supérieures de femmes ayant un faible revenu demeurent dans cette situation longtemps. En fait, la chose est souvent liée à un faible salaire, de sorte qu’on trouve un nombre incroyable de petits salariés dans le Canada rural, où, même lorsqu’un ou deux membres du foyer travaillent, les chances de toucher un faible revenu sont plus grandes que dans les milieux urbains.
Les femmes nous ont dit que les emplois qui leur sont offerts sont peu rémunérés et à temps partiel. Les emplois au salaire minimum ne procurent pas un revenu permettant aux femmes de survivre et de répondre aux besoins quotidiens, de sorte qu’elles doivent compter sur quelqu’un d’autre pour les aider à payer les factures. Cet état de choses a des répercussions sur la sécurité économique et globale des femmes, étant donné que le manque de ressources financières limite les options des femmes qui vivent des relations de violence, et les femmes célibataires ne peuvent subvenir aux besoins d’une famille.
Les femmes qui ont de jeunes enfants se rendent compte que le revenu provenant d’un emploi au salaire minimum sera entièrement consacré aux frais de garderie, de sorte que l’effort n’en vaut pas la peine. Par conséquent, les femmes peuvent repousser leur retour au travail parce qu’elles ne peuvent assumer les frais de garderie lorsqu’elles gagnent le salaire minimum. Ces années au cours desquelles elles ne travaillent pas ont des répercussions économiques sur le plan de la perte de salaires, de la perte de possibilités d’avancement et de la perte de cotisations à un régime de pension, ce qui entrave la sécurité économique plus tard dans la vie.
Depuis des décennies, les femmes vivant en milieu rural répètent aux chercheurs et aux représentants du gouvernement que des services de garde souples et de qualité représentent un besoin crucial en milieu rural. Il est indispensable d’établir des stratégies pour répondre aux besoins du Canada rural relatifs à la garde d’enfants. De telles stratégies doivent expressément cibler les secteurs ruraux pour que les programmes et l’argent parviennent effectivement à cette clientèle, et non pas aux secteurs urbains. La garde des enfants est un volet crucial du développement économique pour les générations actuelles et futures, et c’est une nécessité pour les femmes qui veulent accroître leur éducation ou toucher un salaire.
Dans l’une des régions rurales les plus dynamiques sur le plan économique en Saskatchewan, on recense une seule garderie agréée et un seul centre de jour agréé, qui offrait des places à moins d’un enfant sur 50 âgés entre 0 et 12 ans. Donc, il y a un besoin crucial d’options en matière de garde d’enfants dans cette région rurale.
Actuellement, les parents répondent à leurs besoins de garde par de multiples moyens. Ils se tournent vers leur famille, leurs amis, les frères et sœurs aînés; ils travaillent en tandem, de sorte qu’un parent est toujours au foyer lorsque l’autre travaille.
Les parents veulent des garderies agréées. Ils y trouvent l’assurance de la sécurité et de la qualité, en plus des possibilités de subvention, ce qui est crucial dans les secteurs faiblement salariés, comme la chose se produit dans un si grand nombre de nos secteurs ruraux.
L’innovation entourant la garde des enfants. On trouve un nombre incroyable de familles qui composent avec le travail par quart, des familles agricoles et ainsi de suite, qui ont besoin de services de garde atypiques. Le manque d’accès à des services de développement et de garde de qualité pour la petite enfance engendre plusieurs autres répercussions sur les femmes et les familles. Il atténue la disponibilité des gens au marché du travail, exacerbant ainsi des pénuries de main-d’œuvre bien reconnues en milieu régional et rural. Des femmes tournent le dos aux études et au cheminement de carrière en raison de leurs besoins en services de garde, et d’autres doivent se rendre dans de multiples collectivités chaque jour pour laisser leurs enfants à un endroit et aller travailler dans un autre.
L’offre de services de garde est un enjeu important pour les parents. Certains feront valoir qu’un emploi au salaire minimum ne permet pas de payer les frais de garderie. Le financement des services de garde au moyen de petites subventions et de bons n’engendrera pas des options de services de garde agréés dans le Canada rural, de sorte qu’il faut financer en priorité les programmes étant donné le besoin désespéré en nouvelles installations agréées qui offrent un service de qualité.
Les soins aux aînés sont un autre volet de la garde familiale dans lequel les femmes rurales s’engagent de plus en plus. Dans le contexte d’une population vieillissante et de l’exode des membres de la famille, les femmes rurales qui restent derrière sont de plus en plus appelées à prendre soin des aînés. Selon notre étude sur le travail des familles agricoles durant la période de 1982 à 2002, 43 p. 100 des agricultrices s’occupent des aînés ou de membres de la famille ou d’amis souffrant d’une maladie chronique. En 1982, leur proportion était inférieure à 10 p. 100. Comme d’autres l’ont constaté, cet état de choses a des répercussions sur la sécurité économique des femmes, qui peuvent se voir forcées de réduire leurs heures de travail. Une telle situation influe sur leurs choix d’emploi, leur mobilité professionnelle et leur santé. Ces modifications ont eu pour résultat un virage dans les soins de santé, depuis le système de l’État vers les foyers, et ils sont le plus souvent assumés par les femmes.
Bien que bon nombre de gens continuent à diminuer l’importance de l’agriculture dans le Canada rural, celle-ci reste un secteur important. L’exploitation familiale demeure la forme dominante de production agricole au pays, et 98 p. 100 des fermes canadiennes sont encore de ce type. Sur un grand nombre de ces fermes, on retrouve des gens qui travaillent à temps plein et à temps partiel en agriculture, et une grande quantité de ces gens ne sont jamais recensés dans les statistiques officielles. Néanmoins, la ferme familiale subit actuellement des changements en profondeur. Les exploitations agricoles prennent de l’expansion et leur nombre diminue. La proportion de Canadiens qui travaillent dans l’agriculture a diminué. Les membres des familles agricoles travaillent de plus en plus hors de la ferme, les relations de travail se modifient et les transferts à la génération suivante sont remis en question. Une telle transformation structurelle de l’agriculture signifie qu’au Canada, la plupart des familles agricoles qui restent sont des unités marginales incapables d’employer à temps plein et de soutenir la famille.
Les familles agricoles qui choisissent de poursuivre l’exploitation de la ferme réagissent de diverses manières. Toutefois, bien que cette adaptation permette à la famille agricole de poursuivre ses activités, ce n’est pas sans entraîner un coût important pour la famille, la ferme et la collectivité.
L’agriculture est davantage qu’un secteur économique. Les fermes et les familles agricoles contribuent économiquement et socialement à bon nombre de collectivités rurales locales et sont responsables du contrôle de l’utilisation des terres sur de vastes territoires. La famille agricole est un élément important du paysage rural et une composante cruciale de la survie d’un nombre élevé de petites villes dans le Canada rural. Ces changements dans l’agriculture ont eu d’importantes répercussions économiques et sociales sur les familles agricoles qui vont bien au-delà du secteur agricole.
Statistiques Canada rapportait en 2001 que seulement 17,7 p. 100 du revenu net moyen des familles agricoles provenait de la ferme. Même les plus imposantes entreprises du genre, qui présentaient des recettes nettes de plus de 250 000 $, ne tiraient que 39,5 p. 100 de leur revenu net de l’exploitation agricole.
Les femmes jouent un rôle important dans la sécurité économique de la famille agricole, tout comme la viabilité de la femme a une incidence sur la sécurité économique des femmes. Que le rôle des femmes en agriculture ne soit pas encore reconnu en dit long sur la persistance de l’opinion prédominante selon laquelle le travail agricole serait l’affaire des hommes.
Entre 1982 et 2002, les agricultrices ont élargi leurs rôles dans bien des domaines en s’acquittant de tâches traditionnellement assumées par des hommes. Elles répondaient ainsi aux possibilités croissantes offertes par le changement social et à la pression accrue exercée sur la ferme familiale, qui découlait des changements économiques et politiques. Mais même si la palette de leurs activités s’élargit, elles continuent quand même à assumer la plus grande partie du travail domestique. Pour répondre à la fois aux possibilités et aux pressions, les agricultrices travaillent de plus en plus à l’extérieur de la ferme.
Les pressions économiques exercées sur le monde agricole et les possibilités offertes par le secteur du pétrole et du gaz ont par ailleurs créé une situation intéressante dans les prairies, alors que les hommes quittent les fermes après la récolte pour travailler dans les champs de pétrole, et reviennent au printemps avant l’ensemencement. Ils laissent ainsi les femmes, les enfants et les aînés s’occuper de la gestion des activités courantes de la ferme en leur absence. Et l’agriculture est une activité qui dure toute l’année, elle ne s’arrête pas après la récolte.
Enfin, les femmes sont intimement liées aux aspects économiques de l’agriculture; 81 p. 100 d’entre elles s’occupent de la tenue des livres. Elles travaillent de plus en plus sur la ferme, remplaçant la main-d’œuvre salariée, et hors de la ferme, rapportant de l’argent pour soutenir la famille, et parfois l’exploitation agricole
Vous aurez l’occasion de vous exprimer durant la période de questions et réponses.
Madame Purdon, vous avez 10 minutes.
Merci de me donner l’occasion de m’exprimer devant le comité permanent au nom de Rural Women Take Action on Poverty Committee.
Nous sommes un groupe de femmes des villes de Grey, Bruce, Huron et Perth dans le sud-ouest de l’Ontario, qui se sont réunies en 2001 en raison de nos préoccupations communes face aux répercussions de plus en plus grandes de la pauvreté sur les femmes rurales et leurs familles.
De 2001 à aujourd’hui, nous avons mobilisé des femmes vivant en milieu rural et des fournisseurs de services communautaires dans un projet de recherche à grande échelle favorisant l’action participative et portant expressément sur l’expérience des femmes et la pauvreté dans les collectivités rurales. L’objectif était d’élaborer des stratégies pour s’attaquer à la pauvreté rurale.
Nous avons amorcé les choses en 2001-2002 avec une série d’ateliers communautaires réunissant des femmes vivant une situation de pauvreté. Nous les avons interrogées sur l’incidence de la pauvreté, les raisons pour lesquelles les femmes en milieu rural sont pauvres, les choses qui les aident et celles qu’il faut changer. Les conclusions et constatations figurent dans le rapport intitulé Rural Women Speak About the Face of Poverty.
En 2004 et 2005, nous avons organisé une série d’atelier avec des femmes pour faire le suivi des principales recommandations issues de la recherche initiale: la nécessité de disposer d’une source d’information détaillée sur la pauvreté, la défense des intérêts, le soutien et l’autonomie pour les femmes qui sont pauvres et les agences communautaires qui s’occupent de ces femmes.
Des femmes qui définissent la pauvreté à partir de leurs propres expériences ont créé un guide intitulé How We Count. Selon elles, lorsque tu es pauvre, tu ne calcules pas. Le livre a été réalisé en 2005.
Le 6 juin, nous lancerons la troisième phase de notre travail en réunissant des femmes pour examiner les attitudes communautaires négatives envers les femmes vivant en milieu rural qui sont pauvres. Nous rassemblerons 80 femmes de partout au pays ainsi que des gens qui défendent leurs intérêts pour examiner les stratégies permettant de modifier les attitudes communautaires. Nous entendons produire des bulletins communautaires sur la pauvreté des femmes, réaliser un projet artistique pour célébrer la valeur et les contributions des femmes et élaborer une trousse pour aider les femmes à promouvoir le changement dans leurs propres collectivités.
Notre travail est financé par des subventions de Condition féminine Canada. Nous devons beaucoup au personnel du bureau régional de la Situation de la femme, à London, pour le soutien continu qui nous a été offert. Il est regrettable que ni nous, ni nos collectivités ne puissions plus compter sur l’expertise du bureau et du personnel.
J’aimerais maintenant faire un survol rapide des principaux enjeux mis en lumière par la recherche et le travail menés auprès des femmes vivant en milieu rural.
Premièrement, il y a les préoccupations clés touchant les femmes de notre étude. La première est que les femmes en milieu rural disaient s’être retrouvées dans un état de pauvreté alors que sont survenues des choses sur lesquelles elles avaient peu de prise: une maladie soudaine, un accident, une infirmité, un conjoint violent, la perte d’un emploi ou la perte d’emploi du conjoint, le décès du conjoint, une séparation, un incendie ou un accident.
Deuxièmement, les femmes en milieu rural sont pauvres parce qu’il n’y a pas d’emploi, ou pas de possibilités pour elles d’utiliser les bonnes compétences qu’elles possèdent. La plupart des femmes avec lesquelles nous avons travaillé possédaient d’excellentes compétences et étaient scolarisées, sauf qu’elles ne pouvaient pas trouver d’emploi. Les emplois payants sont réservés aux hommes dans les collectivités rurales, et les femmes n’ont d’autre choix que d’occuper les emplois peu rémunérés, ce qui fait qu’elles se retrouvent dans la pauvreté.
Troisièmement, l’aide sociale, les pensions gouvernementales et les emplois au salaire minimum ne couvrent pas les besoins fondamentaux en alimentation, hébergement, chauffage, transport et soins de santé dans les collectivités rurales. Les femmes et les enfants peuvent se retrouver dans le dénuement ou dépendants de la famille ou de soutiens charitables pour couvrir leurs besoins de base.
Quatrièmement, les femmes vivant en milieu rural ne peuvent accéder aux services, aux soutiens ou à l’emploi. Il n’existe pas de transport public, ou les femmes n’ont pas d’auto, ou leur véhicule n’est pas sécuritaire, ou elles n’ont pas d’argent pour l’essence, l’assurance ou les réparations.
Cinquièmement, les secteurs ruraux sont mal desservis et les services sont fragmentés. Les femmes indiquaient avoir de la difficulté à accéder à des services d’emploi, de santé et d’éducation, soit qu’ils ne sont pas accessibles, soit que les femmes n’ont pas l’information nécessaire pour accéder aux services. Elles n’ont pas de téléphone ou d’ordinateur ou l’Internet pour accéder aux services parce qu’elles ne peuvent se les offrir.
Sixièmement, les femmes vivant en milieu rural et leurs enfants sont géographiquement et socialement isolés. Cette situation est propice à engendrer la dépression et l’insécurité, particulièrement dans le cas des femmes battues.
Septièmement, les femmes vivant en milieu rural et leurs enfants font l’objet d’une discrimination ouverte dans leurs collectivités. Elles sont souvent humiliées publiquement par les fournisseurs de services. Leur vie privée souffre en raison de leur pauvreté.
Huitièmement, il est très difficile d’accéder à une formation et à des études dans les collectivités rurales. Les femmes ont déclaré ne pas pouvoir accéder aux études postsecondaires parce qu’elles ne sont pas offertes dans la collectivité ou parce qu’elles ne peuvent se les payer.
Neuf, les femmes ont dit que, lorsqu’elles sont pauvres, il leur est très difficile de sortir de la pauvreté et de rester dans leur collectivité.
Dix, les femmes consacrent beaucoup de temps et d’effort pour essayer de survivre à la réaction complexe et non coordonnée des collectivités et des organismes à la pauvreté. Aucun organisme ne s’occupe de la pauvreté ou n’aide les femmes à explorer les services offerts. Il se peut même que les fournisseurs ne soient pas au courant des autres services d’aide communautaire ou qu’ils décident de ne répondre qu’à leur partie du problème de la pauvreté.
Onze, il y a une pénurie de bons services de garde accessibles et abordables dans les collectivités rurales.
Douze, l’inégalité des femmes en milieu rural et leur dépendance à l’égard des hommes aggravent leur pauvreté. Les femmes dépendent financièrement des hommes et sont condamnées à la pauvreté lorsque leur mariage se termine. Les femmes sont habituellement les personnes qui prennent soin de leurs enfants, et les hommes qui ne paient pas leur pension alimentaire condamnent les femmes et les enfants à la pauvreté. Les femmes de notre étude ont dit que les hommes leur laissaient les enfants, les dettes et la pauvreté, et qu’ils les maltraitaient et les obligeaient à quitter leur maison, leur emploi et leur sécurité économique pour être en sécurité.
Treize, les femmes vivant en milieu rural sont bien plus susceptibles de rester à la maison avec leurs enfants et, de par leurs fortes valeurs traditionnelles, elle sont en faveur de l’idée de rester à la maison, mais celles qui font ce choix n’obtiennent par la suite rien en échange, que ce soit sous forme d’argent ou d’aide.
Quatorze, les femmes vivant dans une exploitation agricole en milieu rural sont pauvres parce que la ferme absorbe tout l’argent. Même lorsque deux membres de la famille travaillent, les femmes disent être pauvres parce que la ferme accapare tout. Les agriculteurs possèdent beaucoup d’actif mais peu d’argent et n’ont souvent pas accès à de l’aide parce qu’ils ont de l’actif.
Quinze, les politiques et programmes gouvernementaux sont le reflet du fait que — et je cite — « les hommes sont le sexe au pouvoir ». Le financement des services de garde, du logement, de l’aide sociale pour les femmes et des incapacités n’est pas suffisant et enferme les femmes dans la pauvreté.
Seize, il existe un parti pris favorable aux milieux urbains dans la politique gouvernementale et une hypothèse voulant qu’il y ait une infrastructure, alors qu’il n’y en a pas dans une collectivité rurale. Nous sommes mal desservis et notre infrastructure, tant sociale que physique, fait défaut.
Dix-sept, il existe de très nombreux mythes au sujet de la vie en milieu rural — par exemple, il coûte moins cher d’y vivre, on peut cultiver ses propres aliments et il y a beaucoup de logements — tous ces mythes ne sont pas vrais.
Dix-huit, puisque les administrations fédérale, provinciales et municipales ne font pas d’analyse selon le sexe ou le lieu, les besoins et la réalité des femmes vivant dans des collectivités rurales ne sont pas pris en compte dans les décisions gouvernementales à tous les paliers, et de nombreux programmes gouvernementaux ne profitent tout simplement pas aux femmes.
Dix-neuf, les femmes et les enfants doivent souvent quitter leur collectivité rurale pour occuper un emploi, suivre une formation ou profiter de certaines possibilités, et la seule manière qu’elles ont de sortir de la pauvreté consiste à quitter leur collectivité. Donc, nous exportons des femmes et des enfants de leur collectivité rurale.
Voici les principales recommandations qu’on m’a demandé de présenter.
Premièrement, les femmes vivant en milieu rural ont besoin de soutien et de programmes économiques qui les aident à titre de parents et qui reconnaissent la légitimité et l’importance du rôle parental. Les femmes ne devraient pas éprouver de difficultés économiques parce qu’elles sont les principaux gardiens des enfants dans les collectivités rurales.
Deuxièmement, les femmes vivant en milieu rural et ayant des enfants et les femmes handicapées et âgées ont besoin d’un revenu garanti qui couvre leurs besoins essentiels et qui supplée au manque d’infrastructure et de services dans les collectivités rurales.
Troisièmement, tous les paliers de gouvernement doivent utiliser une analyse selon le sexe et l’emplacement géographique ou le lieu pour élaborer leurs politiques et services, et nous croyons que le gouvernement fédéral a un rôle de premier plan à jouer à cet égard.
Quatrièmement, il faut prendre une mesure concrète pour améliorer la sécurité économique des femmes dans les collectivités rurales dès maintenant pour éviter qu’elles ne dépendent des hommes et des salariés de sexe masculin. En voici des exemples: L’équité salariale, un salaire suffisant, des programmes qui appuient l’équilibre entre le travail et la famille, le soutien des femmes entrepreneures, des programmes de formation qui tirent parti des compétences des femmes au lieu de les obliger à se recycler, une aide économique pour les femmes victimes de mauvais traitements lorsqu’elles quittent leur agresseur et un meilleur accès aux études et à la formation.
Cinquièmement, nous demandons aux gouvernements de ne pas utiliser une méthode de financement et de services basée sur la population mais d’examiner effectivement les coûts réels de la prestation de niveaux égaux de services aux collectivités rurales.
Sixièmement, les collectivités rurales ont besoin d’une méthode de financement horizontale et marquée par la collaboration entre les bailleurs de fonds fédéraux, provinciaux, municipaux et communautaires afin d’éliminer le financement artificiel, le cloisonnement et les obstacles liés aux programmes, et de prévenir et d’éviter réellement le gaspillage des fonds publics qui est très répandu actuellement.
Septièmement, les femmes vivant en milieu rural ont besoin de plus d’investissements dans l’enseignement à distance et d’autres formes d’éducation, de même que des investissements dans Internet à large bande.
Huitièmement, les femmes vivant en milieu rural ont besoin de la planification et de l’élaboration de politiques à long terme, par tous les paliers de gouvernement, pour appuyer des collectivités rurales qui sont des endroits où il est agréable de vivre et de travailler pour les femmes et leur famille et pour réagir immédiatement à l’exode rural.
Neuvièmement, nous avons besoin de politiques, de programmes et de fonds pour régler les problèmes de transport et d’accès des femmes pauvres et des personnes pauvres vivant dans des collectivités rurales, de même que d’un programme de services de garde qui crée de nouvelles places en garderie et qui offre des services de garde abordables, accessibles, de qualité et convenant aux femmes.
Enfin, nous avons besoin d’un programme national ou de quelque chose du genre pour réagir au stigmate et à la discrimination à l’endroit des femmes pauvres dans leur collectivité et pour inciter les entreprises et les collectivités à prendre leurs responsabilités en vue de réduire la pauvreté.
Merci.
Je vais vous parler un peu de l’association que je représente. C’est un organisme sans but lucratif dont les origines remontent au mouvement des femmes autochtones en 1974 et c’est le seul organisme qui travaille aujourd’hui au nom des femmes autochtones du Québec. Notre mission consiste à appuyer et encourager les initiatives locales qui cherchent à améliorer les conditions de vie des femmes autochtones et des membres de leurs familles.
La situation socioéconomique des Autochtones, tout spécialement des femmes autochtones, est l’une des conséquences de la colonisation. Avant l’arrivée des Européens, les nations autochtones étaient autonomes, comme en témoignent nos coutumes, nos langues, nos systèmes juridiques et gouvernementaux et nos cultures. Après le contact avec les Européens et la colonisation qui s’en est suivie, les systèmes traditionnels de la société autochtone ont été mis en péril. Des mesures législatives, tout particulièrement la Loi sur les Indiens, et d’autres lois et politiques gouvernementales ont été imposées aux peuples autochtones et ont mené à la perte de leur autonomie.
L’importance des femmes autochtones dans notre société actuelle a diminué au point où, comme Amnistie Internationale l’a mentionné, nous sommes devenues une marchandise dans la société en général. Les femmes autochtones étaient des décideuses, nous étions égales aux hommes dans nos sociétés et maintenant, nous sommes obligées de suivre un système qui préconise le leadership par les hommes et non par les femmes. Il n’y a pas d’équité entre les sexes dans les genres de négociations sur l’autonomie qui sont en cours. Le rôle des femmes autochtones est extrêmement marginalisé, ce qui est ironique, étant donné que le féminisme s’est inspiré des femmes autochtones dans les Amériques.
J’aimerais mentionner deux citations que voici:
C’est en s’en prenant au pouvoir des femmes autochtones qu’on a réussi à supprimer la liberté d’action de nos peuples, dans un processus déshumanisant qui est l’un des plus cruels au monde
Cette citation est d’Armstrong, en 1996.
Quand les femmes ont été privées de leur rôle et de leurs responsabilités traditionnels, des nations autochtones entières se sont affaiblies en raison de la suppression de leurs structures et de leurs systèmes traditionnels
Cette citation est tirée de Fiske et al, 2001.
Je peux vous lire des statistiques que vous avez déjà en main. Je n’en lirai que quelques-unes pour faire valoir l’argument que j’essaie d’avancer et toute la gravité de la sécurité économique des femmes autochtones.
Aujourd’hui, nous affichons la croissance démographique la plus importante. Une grande partie de notre population a moins de 35 ans et, dans certaines collectivités, 61 p. 100 de la population a moins de 25 ans.
Au Québec, les femmes autochtones représentent 8 p. 100 de la population féminine globale et la majorité des femmes autochtones, soit 72 p. 100, vivent hors réserve, tandis que 28 p. 100 vivent dans des réserves.
Rodolpho Stavenhagen, rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones, a écrit sur cette situation dans le rapport qu’il a soumis lors de sa visite au Canada. On peut y lire:
Les indicateurs économiques, sociaux et humains de bien-être, de qualité de vie et de développement sont constamment moins élevés chez les peuples autochtones que pour le reste de la population canadienne. La pauvreté, la mortalité infantile, le chômage, la morbidité, le suicide, la détention criminelle, les enfants prestataires du bien-être social, les femmes victimes d’abus, la prostitution juvénile sont tous des facteurs plus présents chez les peuples autochtones que dans tout autre secteur de la société canadienne, tandis que la réussite académique, les normes de santé, les conditions de logement, le revenu familial, l’accès au développement économique et aux services sociaux y sont généralement moins élevés.
L’espérance de vie des Autochtones est moins élevée, selon la Commission royale. Nous éprouvons plus de problèmes de santé, et les problèmes sociaux allant de la violence à l’alcoolisme sont plus répandus dans les collectivités autochtones. Les systèmes d’approvisionnement en eau, les réseaux d’eaux usées dans les collectivités autochtones sont plus souvent de moins bonne qualité. Et une plus petite partie des Autochtones ont un emploi.
Les Autochtones veulent que le gouvernement canadien sache et reconnaisse que tous ces problèmes sociaux sont principalement dus à la perte de leurs terres, de leurs ressources, de leurs systèmes juridiques, de leurs gouvernements, de leur économie et de leurs institutions sociales, ainsi qu’à la négation de leur identité, de leurs langues et de leurs cultures. Ce que les Autochtones recherchent avant tout, c’est d’être maîtres de leur vie et responsables de leur propre avenir. .
Dans le domaine de l’éducation, les statistiques nous montrent que quatre femmes autochtones sur dix n’ont pas terminé leurs études secondaires. En 2001, seulement 7 p. 100 des femmes autochtones avaient un grade universitaire, comparativement à 17 p. 100 des femmes non autochtones. Par contre, le pourcentage de femmes autochtones ayant un diplôme ou un certificat d’études collégiales est pratiquement identique à celui des femmes non autochtones.
Je ne suis pas une spécialiste des statistiques. Elles me donnent le vertige et je me demande parfois quelle est la vraie situation. Je sais néanmoins que la majorité des personnes qui font des études postsecondaires sont des femmes lorsqu’il s’agit d’Autochtones.
Dans les réserves, nous constatons que la majorité des employés dans les domaines de l’éducation et des services sociaux qui sont enseignants et secrétaires et, parfois gestionnaires de bande, si on les y autorise, sont des femmes mais celles-ci n’occupent pas la majorité des postes décisionnels dans nos collectivités.
Les femmes autochtones gagnent en moyenne 12 300 $ par année. Le revenu moyen des hommes autochtones est de 15 500 $. Le revenu moyen des femmes autochtones vivant dans des réserves est bien inférieur. Il est de moins de 11 000 $.
Les emplois des femmes autochtones sont mal rémunérés et ces dernières sont moins susceptibles d’être sur le marché du travail que les femmes non autochtones. En 2001, 47 p. 100 des femmes autochtones occupaient un emploi, comparativement à 56 p. 100 des femmes non autochtones. Malheureusement, il n’est facile pour personne de trouver un emploi mais cela est tout spécialement difficile pour les femmes autochtones, qui sont souvent victimes de discrimination et de racisme lorsqu’elles cherchent du travail. D’autres facteurs entrent évidemment en ligne de compte, comme le niveau d’instruction, l’expérience, les différences linguistiques et culturelles, l’âge et l’absence du travail en raison de la violence familiale. Dans certains cas, la violence familiale peut entraîner le licenciement.
Le taux de chômage des femmes vivant dans des réserves et en milieu rural se situe à 22 p. 100, comparativement à 14 p. 100 chez les femmes autochtones vivant en milieu urbain. L’un des principaux facteurs qui touchent les femmes autochtones est la violence. Selon des enquêtes, les femmes autochtones sont plus susceptibles que les femmes non autochtones d’être victimes de violence grave mettant leur vie en danger, comme être battues, étranglées, menacées avec une arme à feu ou un couteau, ou être victimes d’agression sexuelle. Par ailleurs, elles sont plus susceptibles d’être victimes de violence psychologique que leurs homologues non autochtones.
La violence s’accompagne de plusieurs impacts psychologiques tels que l’agitation et la frustration, et nous pouvons en nommer bien d’autres encore. Cependant, on manque de ressources pour ces victimes, qui sont souvent obligées de quitter leur collectivité pour aller dans un centre urbain, où elles sont victimes de racisme de la part du grand public. Les femmes autochtones qui sont victimes de violence sont également confrontées à l’isolement, de même qu’à des obstacles linguistiques, culturels et géographiques.
Les femmes autochtones vivant en milieu urbain sont aussi là parce qu’elles ne sont pas bienvenues dans leur collectivité, étant donné que le projet de loi C-31 n’a absolument rien fait pour régler le problème des femmes qui font l’objet de discrimination sexuelle en raison de la Loi sur les Indiens.
Tant que les Autochtones du Canada seront liés par la Loi sur les Indiens, et tant que le gouvernement fédéral aura le plein pouvoir d’adopter des lois sur les questions autochtones, nous ne pourrons pas parler d’une vraie participation active des Autochtones à la vie sociale, économique et politique de notre pays. Les femmes autochtones aimeraient prendre part à la mise en œuvre des programmes d’éducation et de formation, notamment les programmes scolaires qui sont adaptés à la culture autochtone. Elles aimeraient participer aux discussions menant à des solutions qui procureront aux Autochtones des compétences répondant aux besoins du marché du travail. Elles aimeraient participer à la formation d’institutions qui appuieront la création d’emplois et d’entreprises. Elles aimeraient faire reconnaître leur éducation pour pouvoir recevoir un revenu décent.
Je veux vous parler de mon expérience des femmes ayant un doctorat. Leurs homologues non autochtones leur ont dit qu’elles ne l’ont obtenu que parce qu’elles étaient autochtones, qu’elles ne l’ont pas gagné comme les autres l’ont fait. Les femmes ayant fait des études sont aussi victimes de racisme, même de la part de personnes dites instruites.
Nous aimerions recommander ce qui suit pour promouvoir le développement économique des peuples autochtones et améliorer leur niveau de vie.
Nous aimerions renforcer les discussions et les négociations menant à des ententes sur l’autonomie gouvernementale ou sur l’autodétermination qui permettront aux peuples autochtones de prendre en mains leur propre destinée, d’améliorer leurs conditions sociales et de participer à la vie sociale et économique de notre pays. Nous aimerions que les peuples autochtones fassent partie de toutes les discussions et de toutes les négociations pour garantir leur participation aux structures décisionnelles en fonction de l’égalité des sexes; pour conclure des ententes qui permettraient aux peuples autochtones d’être propriétaires et maîtres de leurs terres et de leurs ressources — actuellement, nous n’avons qu’un certificat de possession; pour élaborer et mettre en œuvre des programmes de formation scolaire et professionnelle; et pour instaurer des programmes de sensibilisation aux réalités culturelles à tous les niveaux afin de réagir aux stéréotypes et aux idées fausses au sujet des Autochtones
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant commencer la première ronde de questions.
Nous entendrons Mme Minna pendant sept minutes.
Merci, madame la présidente.
Je vous remercie tous. Cela a été une excellente présentation. En fait, c’était sensationnel. Nous avons entendu de nombreuses présentations fantastiques ici, au cours des dernières semaines.
Je dois vous dire que, lorsque nous nous sommes engagés dans ce processus, je m’occupais des questions féminines depuis bien des années et j’avais une bonne idée de ce que nous trouverions. Et je crois que ma...pas ma déception mais mon trouble vient du fait que, non seulement nous avons trouvé bien plus de choses que je pensais que nous trouverions, mais encore que bien moins de choses ont changé que je ne le pensais, tout spécialement dans certains domaines. Peut-être que la situation est davantage ancrée. Je suppose que je devrais savoir cela, en regardant notre Parlement, étant donné le nombre de femmes qui sont ici et ailleurs. Cela devrait nous en dire long.
Mmes Martz et Purdon ont parlé avec éloquence des problèmes des femmes vivant en milieu rural — l'isolement et les problèmes majeurs. Elles ont dit, entre autres choses, qu’un programme national de services de garde devrait être ciblé, conçu et localisé, évidemment, en fonction des besoins des femmes vivant en milieu rural, tout spécialement avec une perspective rurale et spatiale, ce qui est une évidence à mes yeux. Bien entendu, la prestation d’un programme national serait assurée au niveau provincial. Mais il devrait y avoir ce genre de consultation en raison des quarts de travail et de toutes les autres circonstances. Voilà une question de réglée.
Les autres sont — il y en a beaucoup — les transports et l’accès aux études pour que les femmes puissent se perfectionner et, par conséquent, obtenir un meilleur emploi, je l’espère, voire obtenir un emploi tout court, s’il y a de bons service de garde.
Il me semble donc, selon vos commentaires, que cela est, de toute évidence, fondamentalement important. Et c’est sans parler de la sécurité économique et du revenu garanti pour les femmes vivant dans une ferme et de la possibilité d’une pension quelconque, surtout pour les femmes qui continuent de travailler et qui travaillent à la ferme mais qui n’ont pas d’autres moyens de payer leur pension.
Ensuite, il y a, bien entendu, la question.... Lorsque je parle d’éducation, je veux aussi parler de l’accès à l’enseignement à distance. Il me semble donc que la question de l’accès à l’infrastructure sociale du gouvernement.... Et les bureaux des programmes régionaux des femmes ont été fermés, je crois. Je vous prierais de faire des commentaires sur l’impact que cela a eu sur la capacité des femmes vivant dans les comtés ruraux d’avoir accès à quelques maigres programmes.
Il me semble que, selon vos propos, l’infrastructure sociale du milieu rural au Canada — c'est-à-dire pouvoir avoir accès à des programmes sociaux ou à des bureaux du gouvernement pour accéder à des programmes — et l’éducation, les transports et les services de garde, bien qu’il ne s’agisse pas des seules mesures de soutien, sont probablement les mesures de soutien les plus fondamentales auxquelles nous pourrions songer à court terme, presque dans l’immédiat.
Ai-je tort à ce sujet? Je n’essaie pas de dire que les autres questions ne sont pas importantes. J’essaie simplement de remplir un panier qui, de l’avis de certains, nous aiderait à démarrer. Serait-ce un panier raisonnable?
Je pense que, ce qui manque à ce panier, c’est le fait que, si une femme s’enfonce dans la pauvreté, les prestations sociales ou les pensions d’invalidité ne suffisent pas à nourrir sa famille. C’est un genre de...
Elle doit y être, parce que c’est l’un des problèmes les plus importants des femmes. Si une femme reçoit des prestations d’aide sociale et qu’elle a des enfants, elle n’a pas les moyens de faire rouler une voiture. Vous ne pouvez pas mettre de l’essence dans votre voiture si vous recevez des prestations d’aide sociale, à moins d’obtenir de l’aide, à moins d’avoir un parent ou une personne qui vous aide pour des questions de ce genre.
Les femmes dont nous parlons arrivent à peine à payer des choses très essentielles, comme la nourriture et le logement, si elles obtiennent une forme d’aide ou qu’elles ont un emploi au salaire minimum. Une personne n’a pas les moyens de faire rouler une voiture si elle a un emploi au salaire minimum non plus. En fait, avec deux emplois au salaire minimum, elle a de la chance si elle peut faire rouler une voiture.
En milieu rural, où il faut avoir une voiture pour aller partout, les gens sont pris. Ils sont tout simplement pris. Dès qu’une personne est pauvre, comment peut-elle sortir de la pauvreté si elle n’a pas de voiture et pas de moyen de transport? Et que dire si elle n’a pas d’ordinateur et qu’elle ne peut pas payer l’accès Internet? Il se peut que sa petite ville ait l’accès Internet mais elle n’a pas les moyens de le payer parce qu’elle n’a pas assez d’argent.
Il existe de nombreux obstacles. Je crois que les femmes nous ont dit que la seule façon de sortir de la pauvreté consistait à sortir de leur collectivité.
Donc, la sécurité économique, qu’elle provienne de l’aide sociale ou d’une autre forme d’aide financière, disons, en plus de l’aide financière quelle qu’elle soit, lorsque nous examinons les options financières, nous devons ajouter l’élément rural, la condition et l’espace, comme vous l’indiquiez; c’est-à-dire qu’il faut ajouter au montant ou au revenu l’accès à l’enseignement à distance, Internet, et que sais-je encore, tout ce que nous considérons comme étant un plus et comme admis mais qui n’est pas nécessairement un plus ou admis. Ce sont des éléments essentiels à la survie. Autrement, on subsiste à peine.
Et nous parlons de femmes qui ont travaillé et qui ont fait partie de l’économie mais qui, pour diverses raisons, ont sombré dans la pauvreté. La plupart des femmes à qui nous avons parlé sont dans ce genre de situation. Ce ne sont pas des pauvres chroniques. Il existe aussi des femmes pauvres chroniques mais la plupart des personnes qui ont pris part à nos travaux jusqu’à maintenant ont été poussées dans la pauvreté par quelque chose qu’elles ne contrôlaient pas, et elles éprouvent maintenant d’énormes difficultés à s’en sortir.
Si je comprends bien, les femmes qui reçoivent une aide sous quelque forme que ce soit en milieu rural au Canada ont besoin d’une aide qui comprenne les transports — un ajout quelconque ayant trait au transport — et l’accès Internet, l’accès à un ordinateur pour pouvoir avoir accès à l’éducation et ainsi pouvoir effectivement....
Et puis, pour toutes les femmes, qu’elles reçoivent des prestations ou non, nous avons besoin de services de garde à l’échelle nationale, conçus en fonction de leurs besoins.
Je dirais que les services de garde semblent être reliés à la plupart des questions dont nous parlons.
Exactement. À plus grande échelle, nous avons des exemples canadiens de programmes de garderie qui offrent des services de garde à des taux abordables à une grande partie de la population. Et, lorsqu’on se tourne vers les régions rurales, il existe plusieurs modèles ruraux, au Manitoba et ailleurs, où on a fait des choses vraiment très...
[Français]
Merci, madame la présidente.
Bien qu'il fasse très chaud ici, on va essayer de garder la tête froide et de se concentrer sur ce que vous nous avez dit. Parfois, on a l'impression que la réalité des femmes en milieu rural et dans les collectivités relève pratiquement de la fiction. Si on se fie à ce qu'on entend aujourd'hui et à ce que d'autres qui sont passées avant vous ont dit, les femmes en milieu rural, les femmes autochtones et les femmes immigrantes — si on peut parler ainsi de minorités — sont grandement défavorisées.
Je représente une circonscription du Québec à l'intérieur de laquelle il y a un milieu rural. Je vois les problèmes auxquels sont confrontées les femmes parce qu'elles sont souvent le moteur, le pivot et le soutien d'une famille. Si toute cette structure est affaiblie économiquement, ce sont souvent elles qui en portent le fardeau. Madame Martz a dit que les femmes en milieu agricole sont de plus en plus confinées à des tâches multidisciplinaires, mais pour lesquelles elles ne touchent aucune redevance, aucun salaire. La tâche des femmes en milieu rural est assez lourde et effarante. Depuis quelques années, on constate l'exode d'une certaine pauvreté, qui quitte les centres urbains pour les milieux ruraux. On pense qu'en venant s'établir en milieu rural, on va échapper à cette pauvreté, mais on vit une désillusion parce que ce type de pauvreté est situé un peu plus loin, et les gouvernements y sont moins sensibles. De plus, les gens sont éloignés des services, ils ont moins d'accès à des services.
Dans un premier temps, j'aimerais vous entendre sur ce sujet, parce que vous savez que des mesures ont été mises en place. Vous parliez tout à l'heure d'accessibilité à des garderies. Croyez-vous que la mesure mise de l'avant par le gouvernement consistant à offrir à des familles qui ont des enfants de moins de six ans 100 $ par mois va pouvoir changer la situation dans laquelle se trouvent certaines familles? Le fait de mettre en place des garderies, pour l'avoir vécu, redonne une certaine autonomie aux femmes et leur offre aussi un certain choix. Sans qu'elles soient nécessairement sur le marché du travail, elles peuvent choisir en toute liberté d'envoyer leurs enfants à la garderie et faire autre chose qu'être la femme de la maison, et ainsi sortir de l'isolement qu'elles vivent. J'aimerais qu'on mette en perspective le fait que plus on est loin des centres urbains, plus on s'éloigne, moins on bénéficie de la reconnaissance des instances politiques. On tombe plus facilement dans l'oubli.
[Traduction]
Je peux parler un peu des femmes en milieu agricole et de la reconnaissance de leur rôle.
La création du cadre stratégique pour l’agriculture en est un très bon exemple. Même si les gouvernements ont maintenant pour mandat de tenir compte de l’équilibre entre les sexes lorsqu’ils tentent d’élaborer une politique agricole, ils ont éprouvé beaucoup de difficulté à obtenir la rétroaction des femmes. Bien que les femmes jouent un rôle capital dans les éléments économiques de l’agriculture aujourd’hui — faire le travail de bureau et tenir les livres — elles doivent s’occuper de toute la paperasserie supplémentaire qui entre dans la ferme.
Lorsque nous élaborons une politique, nous devons en faire beaucoup plus pour parler aux agricultrices. Elles ont un point de vue différent sur le rôle de l’agriculture. La vieille habitude de ne pas reconnaître les femmes pour leur rôle dure depuis des décennies. Je ne suis vraiment pas versée dans le débat sur les pensions mais je crois qu’il a été soulevé ici. Les agricultrices ont besoin qu’on reconnaisse leur rôle à long terme dans leur exploitation agricole, et une pension pourrait être une bonne façon d’y parvenir.
L’autre question dont j’ai déjà entendu un peu parler, c’est celle du programme de soutien du revenu qui a été instauré pour les exploitations agricoles familiales. L’an dernier, si une famille avait un revenu de 50 000 $, elle pouvait avoir droit à une forme d’aide au faible revenu. Cela a été bénéfique. J’ai entendu des comptes rendus positifs sur le programme, et les familles l’ont trouvé utile. Il s’agissait d’une sorte de revenu garanti. Cette année, le problème vient du fait qu’ils n’autorisent aucune nouvelle famille à en faire partie et que des personnes vont rater cette occasion.
L’agriculture est une entreprise très instable. Si nous voulons avoir des agriculteurs, il faut qu’il y ait de l’agriculture.
[Français]
À la suite de ce que vous nous avez dit, si le gouvernement apportait des correctifs et adoptait des mesures pour soutenir et peut-être valoriser le rôle de la femme dans le secteur agricole, cela pourrait-il aussi favoriser la relève agricole?
[Traduction]
Je ne sais pas. Je crois qu’en ce moment, un grand nombre de familles d’agriculteurs conseillent à leurs enfants de ne pas se lancer en agriculture. Elles ne pensent pas qu’il s’agit d’un mode de vie qu’elles infligeraient à leurs enfants. Mais beaucoup d’enfants veulent quand même le faire.
J’aimerais cependant nuancer mes propos. Je sais, en raison des travaux que j’ai faits pour obtenir mon doctorat, que des agricultrices assument des rôles différents. Certaines ont décidé qu’elles travailleraient à plein temps dans leur exploitation agricole et elles en sont les principaux décideurs. À mon avis, ces femmes se sentent bien à propos de leur rôle.
Nous allons partager le temps qui nous est alloué. Merci.
C’est la première fois que je viens ici et tout est nouveau pour moi. Lorsqu’on m’a demandé de venir, j’ai pensé: Mais qu’est-ce que je connais à ce sujet? Puis, j’ai pensé, surtout quand j’ai vu les témoins, que j’en connaissais un peu sur l’agriculture; ma circonscription est une communauté agricole.
Ma femme et moi avons élevé huit enfants à la campagne et, pendant les vingt premières années, nous étions pauvres. J’en connais donc un peu sur la pauvreté. Je ne prétends pas tout connaître sur ces questions mais je les comprends, et il est difficile de les saisir à moins d’en avoir fait l’expérience.
Je me pose des questions au sujet des engagements du gouvernement envers l’agriculture, et je pense, madame Martz, que vous avez fait des commentaires justes sur le programme agricole. Il a été mis sur la glace parce qu’il a créé tout un contrecoup. Les agriculteurs étaient tout simplement fâchés par le fait que nous suggérions que… Et je crois que le salaire minimum était de 25 000 $ et non 50 000 $, mais nous avons bien injecté 1,5 milliard de dollars en 2006 et 1 milliard de dollars en 2007. Vous avez mentionné les 550 $ pour les options familiales.
Rapidement, notre gouvernement s’en va-t-il dans la bonne direction dans le domaine de l’agriculture?
Avez-vous parlé à des femmes pour savoir ce qu’elles en pensaient? La plupart des gens qui m’ont fait des commentaires positifs étaient effectivement des femmes qui considéraient cela comme un avantage. Ce pourrait donc être une possibilité, un genre de consultation à une échelle un peu plus grande.
Si je pense que nous nous en allons dans la bonne direction dans le domaine de l’agriculture? Eh bien, je crois que notre pays a besoin d’une politique en milieu rural qui soit axée sur les régions rurales du Canada et qui ne les laisse pas à la merci des marchés pour décider ce qui s’y passe.
Je pense que nous devons comprendre que l’agriculture est une question sociale et économique, et que nous devons décider si nous voulons assurer la sécurité alimentaire dans notre pays au cours des cinquante prochaines années. Je crois donc qu’il faut poser des questions très sérieuses au sujet de l’agriculture et nous demander si nous en voulons ou non.
Je sais — parce que, comme je l’ai dit, je vis dans une communauté rurale, et qu’elle n’est pas la plus pauvre du sud-ouest de l’Ontario — il y a eu des batailles, surtout dans les domaines des céréales et des oléagineuses. Mais, à la grandeur du Canada — et j’admets que nous avons un grand pays — quel est le problème le plus important? Dans quelle partie du pays?
Je dirais dans les Prairies, mais j’ai un parti pris.
En tout cas, avec l’ESB — et nous réalisons une nouvelle étude pour connaître l’impact de l’ESB sur les familles d’agriculteurs aux prises avec le faible prix des produits — même si la situation s’est manifestement améliorée par rapport à l’an dernier, à savoir si cela continuera d’être un avantage étant donné les prix des intrants à la hausse qui vont dans le même.... Mais les Prairies ont incontestablement éprouvé de véritables problèmes et, si l’on examine les statistiques sur le faible revenu, on peut certainement le constater.
Je crois que je suis probablement d’accord.
Je n’essaie pas d’être cruel ou rien du genre, parce que nous voulons tous des solutions. Nous voulons tous aller dans la bonne direction. Voici une question précise: Quel gouvernement a dirigé le plus longtemps la Saskatchewan au cours des 25 dernières années?
Je pose cette question parce que je me demande si notre gouvernement s’en va dans la bonne direction. Qui a la majorité des sièges au palier fédéral, et quelle en est la raison, à votre avis?
Je crois que beaucoup de choses qui influent sur l’agriculture ne relèvent toutefois pas nécessairement de la politique provinciale. L’agriculture est un phénomène mondial et je pense que tous les paliers de gouvernement ont un rôle à jouer.
Mais vous devez convenir qu’ils se partagent les pouvoirs. Le fédéral a fait sa part et les provinces ont fait la leur.
Oui, je crois que les deux paliers de gouvernement n’ont pas beaucoup tenu compte du milieu rural et nous commençons à peine à reconnaître qu’il existe. Je crois que nous avons donc une occasion exceptionnelle de faire de bonnes choses.
Je ne sais pas si vous réalisez ceci, mais l’agriculture est la deuxième dépense en importance, après la défense. Elle en est rendue là. Nous reconnaissons qu’il existe de véritables problèmes en agriculture.
Je me pose des questions au sujet des 100 $ et je pense qu’on a abordé ce sujet. Pensez-vous qu’ils apportent une aide? Est-ce que les agricultrices apprécient les 100 $ qu’elles reçoivent chaque mois? Sommes-nous sur la bonne voie dans ce domaine?
Je ne pense pas. Je crois que vous n’allez pas obtenir.... Les habitants des régions rurales, si vous le leur demandez, aimeraient qu’il y ait des garderies agréées et les 100 $ n’aident pas vraiment à les obtenir en milieu rural. C’est en partie une question de qualité et de sécurité pour les familles, mais aussi une question de subvention. Si l’on n’a pas de garderies agréées, on ne peut pas avoir de subventions, et si l’on n’a pas de revenu élevé, il n’est tout simplement pas payant de travailler et d’envoyer ses enfants à la garderie.
Nous avons besoin d’une infrastructure en milieu rural au Canada et je ne crois pas que les 100 $ apportent une aide très importante en ce sens.
Je veux vraiment dire ceci. Dans notre communauté rurale, nous n’avons pas besoin...bien, les gens aimeraient avoir 100 $ dans leur poche mais, s’ils n’ont pas de place en garderie, s’ils n’ont pas d’installations, s’ils n’ont pas de place pour leurs enfants, alors, cela n’est d’aucune utilité.
Pour les femmes de notre étude, il n’y a pas de place pour les enfants, et la politique sur les services de garde du gouvernement conservateur n’aide pas à en créer. En fait, nous avions beaucoup de projets de places en garderie dans notre collectivité et ils ont tous été mis sur la glace en raison de la nouvelle orientation en matière de services de garde. Nous avions bon espoir qu’il y aurait une stratégie sur les services de garde dans notre collectivité, mais elle est maintenant sur la glace.
Cela n’a pas été utile.
Il ne me reste qu’une petite question. Pourquoi? La seule manière d’examiner la situation est de l’envisager comme un vote sur ce qu’est notre politique. Pourquoi des Canadiens vivant en milieu rural, partout au pays, ont-ils élu des gouvernements conservateurs avec de telles politiques? Comment pouvez-vous expliquer cela, si ce n’est...
Je peux vous l’expliquer. Je crois que notre milieu est un milieu très conservateur, où des hommes dirigent fondamentalement le gouvernement au palier municipal, au palier provincial. Il n’y a pas beaucoup de consultations avec les femmes dans notre milieu pour savoir ce qui est bon pour elles dans les collectivités. Les politiciens ne consultent pas les femmes. Il n’y a pas d’analyse comparative entre les sexes pour connaître l’impact de ces politiques.
Personne dans notre milieu n’a demandé comment la politique des conservateurs influerait sur les femmes vivant en milieu rural dans notre milieu. On ne l’a pas demandé. Je crois que cela est, plus que tout autre chose, le reflet de la nature conservatrice des collectivités.
Qu’en est-il du revenu fractionné? Est-ce que la partie fractionnée du revenu va vous aider? Est-ce que la politique sur le revenu fractionné va aider les Canadiens vivant en milieu rural?
Excusez-moi, je voulais parler de la pension fractionnée.
Elle aidera certaines personnes mais pas celles avec qui nous avons travaillé dans l’étude. Elles n’ont pas de revenu. Bon nombre d’entre elles n’ont pas de pension. Si une personne a un emploi au salaire minimum, elle n’a pas de pension ou d’actif qui lui sera d’une aide quelconque. Cela est bon pour les personnes qui se situent dans une certaine catégorie de salaire mais pas pour celles que nous avons consultées.
Merci, madame la présidente.
Je dois dire que nous avons la chance d’avoir votre expertise, et je suis très heureuse que vous soyez ici. Je comprends, madame Gabriel, qu’il s’agit de votre deuxième séance en comité aujourd’hui et votre capacité de rester concentrée est vraiment remarquable.
Ma première question a trait au logement. Il me semble qu’on l’a abordée mais elle est essentielle à la sécurité économique des femmes: Le manque de logement abordable, le manque de logement décent, que ce soit dans les réserves, hors réserve ou dans les régions rurales. Il existe un véritable problème qui touche les familles à faible revenu, tout particulièrement celles qui sont dirigées par une femme seule.
Avons-nous besoin d’une politique nationale en matière de logement? Avons-nous besoin d’une vue d’ensemble de la politique fédérale globale en matière de logement de manière à ne plus avoir le genre de pénurie du logement que nous constatons actuellement?
Dans les réserves et hors réserve, le problème vient du fait que les femmes n’ont tout simplement pas de choix, surtout en raison du régime matrimonial. Parce que la Loi sur les Indiens est en faveur des hommes, à la dissolution du mariage, c’est habituellement l’homme qui obtient la maison. Lorsque les femmes quittent leur collectivité pour aller vivre en milieu urbain en raison de la violence, elles doivent souvent vivre dans des secteurs très pauvres des villes, où elles sont victimes de racisme et de mauvais traitements de la part des propriétaires.
Je crois que cela serait utile. J’ai l’impression — c’est pour cette raison que la sensibilisation aux réalités culturelles est si importante — que le problème des femmes autochtones est très semblable à celui des femmes pauvres qui vivent dans une ferme. Tout spécialement dans ma culture, nous étions des agriculteurs et, en raison de la diminution du territoire, nous ne pouvons plus l’être et, en raison de la pollution, nous ne pouvons plus l’être.
Je crois donc que le logement est un élément très important, ou du moins une étape sur la bonne voie menant à la sécurité économique des femmes autochtones.
Je crois que le logement est une question vraiment importante, mais la fréquence de la scission entre les décideurs et les politiciens provinciaux et fédéraux est une chose qui m’inquiète. Les membres les plus défavorisés de nos collectivités sont pris au jeu. Ce sont presque des ballons de football politique.
Une stratégie nationale en matière de logement, appuyée à l’échelle provinciale, serait une chose merveilleuse pour les collectivités rurales, tout comme une politique sur le transport qui aiderait les personnes vivant dans des collectivités plus isolées à avoir accès à des services. Il pourrait y avoir des mesures qui coûtent moins cher dans les petites collectivités mais, si elles n’ont pas de véhicule, elles ne peuvent pas avoir accès aux services et aux emplois. Cela ne leur est pas utile.
Il serait bon d’avoir une vision plus nationale où les gens auraient droit à un logement décent. Il serait bon de remettre sur la table, aux paliers fédéral et provincial, l’idée selon laquelle les femmes et les enfants ne devraient pas vivre dans un logement insalubre et dangereux parce qu’ils ont été victimes de mauvais traitements. Ce ne devrait pas être le choix à faire — c’est-à-dire vivre avec le conjoint violent dans une belle maison ou quitter le conjoint violent et vivre dans un endroit horrible et dangereux qui ne va même pas les protéger contre leur conjoint violent lorsqu’il reviendra et enfoncera la porte. Voilà les possibilités qui sont offertes aux femmes dans notre collectivité actuellement. Il n’y a pas, dans les collectivités rurales, de logements décents qu’elles auraient les moyens de payer. Si une personne reçoit des prestations d’aide sociale ou une autre forme d’aide sociale, elle n’a pas les moyens de payer un logement décent. Elle ne le peut pas. Elle ne peut même pas nourrir ses enfants convenablement.
Voilà où nous en sommes. Les femmes dans notre collectivité nous disent pourquoi, lorsqu’elles sont malades ou qu’elles ont un conjoint violent ou qu’elles perdent leur emploi et qu’il n’y en a pas d’autres, sont-elles traitées comme si elles ne comptaient pas, comme si elles avaient commis une erreur et qu’elles ne valaient rien? Les femmes avec qui nous avons travaillé désirent ardemment ne pas être pauvres mais elles sont confrontées à un plus grand nombre d’obstacles en milieu rural. Elles restent pauvres plus longtemps, elles ont de la difficulté à sortir de la pauvreté et elles se sentent plus découragées. Au bout du compte, bon nombre d’entre elles partent parce qu’elles veulent avancer.
Dans les communautés rurales, c’est un gros problème. Pourquoi exportons-nous des femmes et des enfants hors de nos communautés rurales parce que nous n’avons pas de politiques et de mesures de soutien décents en milieu rural pour les femmes et les enfants? Cela n’a pas de sens à mes yeux — ni aux leurs. Elles ne veulent pas quitter leur collectivité. Elles aiment leur collectivité. Mais, en raison des politiques fédérales et provinciales actuelles, il leur est presque impossible de survivre, à moins d’avoir de la famille ou des amis. Beaucoup de femmes n’ont pas de soutien familial. Les femmes qui réussissent sont celles qui ont des amis et de la famille ainsi que des personnes qui les aident lorsqu’il leur arrive quelque chose.
Nous avons eu des ateliers où des femmes nous ont dit: « Jamais de ma vie je n’aurais pensé que j’assisterais à un atelier sur la pauvreté. Ce n’était pas dans mes projets. Je n’arrive pas à y croire. » Des enseignantes, des infirmières, des agricultrices, des femmes de toutes les professions — elles étaient là. Elles n’arrivent pas à sortir de la pauvreté.
Ma question est la suivante: Pourquoi cela se produit-il? Notre pays a beaucoup d’argent. Pourquoi cela arrive-t-il? Cela ne se passait pas il y a vingt ans. Cela ne se produisait probablement même pas il y a dix ans. Mais cela se produit maintenant.
Madame Gabriel, j’aimerais que vous me parliez brièvement des consultations actuelles qui traitent des droits relatifs aux biens matrimoniaux. Sont-elles satisfaisantes jusqu’à maintenant?
Non. Le délai était extrêmement court. Au moment où l’argent a été versé aux différentes organisations, il n’y avait plus suffisamment de temps.
De plus, il n’y a pas eu de véritables consultations, peut-être de trois semaines à un mois de ce qui a semblé être des consultations. À mon avis, le rapport de 500 pages de Wendy Grant-John ne répond probablement pas aux attentes du ministre responsable de ce portefeuille, mais nous aimerions régler cette question. Nous voudrions avoir des consultations appropriées.
Je ne peux vous donner dix secondes, parce que nous allons passer à une autre question.
Je passerai maintenant à la ronde de cinq minutes.
Madame Neville.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie chacune d’entre vous.
J’ai beaucoup de questions à soulever, parce que vous nous avez vraiment obligés à repenser les choses en tant que législateurs ou politiciens.
Madame Purdon, je pense à la question que vous posez maintenant sur la raison qui nous empêche de changer les choses. Les trois ordres de gouvernement (fédéral, provincial et municipal) ont lancé des initiatives qui sont parfois devenues des programmes continus. Il me semble que votre collectivité est mûre pour ce genre d’initiative.
J’ai un certain nombre de questions à poser. Vous avez mentionné que vous avez reçu une aide financière de Condition féminine Canada. J’aimerais savoir si cet argent a été alloué à un projet.
Madame Martz, vous faites partie du Prairie Centre of Excellence for Women’s Health. J’ai reçu certaines informations ces derniers jours sur des programmes qui ne reçoivent aucune contribution par l’intermédiaire de cet organisme. Votre financement est-il touché? Je vous demanderai de répondre dans une minute.
Madame Gabriel, nous nous sommes rencontrées en comité plus tôt aujourd’hui et, parmi les solutions que vous avez présentées, plusieurs étaient des solutions à grande échelle. Elles ne pourront pas se réaliser du jour au lendemain. Nous connaissons déjà les questions de l’autonomie gouvernementale, du financement, du logement, etc.
Vous avez aussi parlé de l’importance de la participation des femmes à un certain nombre de projets éducatifs et liés au marché du travail. Vous avez séparé ces questions. J’aimerais savoir pourquoi. Pensez-vous pouvoir trouver les moyens, en tant que femmes, de changer les choses? Comment pouvons-nous, en tant que gouvernement, répondre à vos attentes? Voilà ce que j’aimerais soulever pour le moment.
Je vous demanderais de commencer par répondre aux questions touchant le milieu rural et je reviendrai ensuite à Mme Gabriel.
Nous étions financés par Condition féminine Canada avant que cet organisme ne connaisse des changements. Nous n’avons pas senti les effets de ces changements parce que nous travaillons avec des fonds qui venaient d’avant les changements. Je ne suis pas certaine que Condition féminine Canada, comme il est maintenant structuré, accepterait un projet comme le nôtre.
Une chose est très claire: le bureau régional de London a travaillé très étroitement avec notre groupe populaire pour nous aider à élaborer le projet. Pendant la première étude, ce groupe nous a aidés à préparer la prochaine phase, qui était de prendre des mesures fondées sur les résultats et les idées de l’étude. Nous sommes actuellement dans la troisième phase du projet, où nous nous penchons sur les attitudes de la collectivité.
Je veux juste souligner quelque chose sur la façon dont le financement fonctionne. Un gouvernement a une idée de ce qu'il veut accomplir et crée une ouverture. Si nos besoins collectifs correspondent à ceux visés par le gouvernement en question, il est possible d'obtenir une aide financière. S'ils ne sont pas alignés sur les objectifs visés ce jour-là, ce mois-là ou cette année-là — quel que soit le sujet en vogue —, nous n'obtiendrons rien. Condition féminine Canada était le seul organisme par l'intermédiaire duquel il était possible d'obtenir un soutien financier pour accomplir ce que les collectivités voulaient.
Cela a très bien fonctionné pour nous. C’est pourquoi j’ai dit que je regrettais que cet organisme ne soit plus là, car il a été une vraie ressource. Pour des collectivités rurales qui n’ont pas de ressources ni d’infrastructure, ce genre de bureau dirigé par une personne qui connaît bien les besoins de la collectivité est très utile. Je ne sais pas comment ça se passe maintenant. Nous verrons bien. Nous avons beaucoup de travail à faire et cela ne se terminera pas avec l’achèvement de ce projet. Son aide a été très précieuse. Je tiens à le souligner et à présenter mes remerciements.
J’ai reçu plusieurs fois l’aide financière par l’intermédiaire de Condition féminine Canada, à la fois dans le cadre d’un financement régulier de la recherche stratégique et dans le cadre de projets communautaires. J’ai trouvé que c’était un excellent moyen. Cela nous a permis d’accomplir des choses qui n’avaient pas encore été faites pour les femmes des régions rurales du Canada. Tellement peu de choses ont été accomplies pour ces femmes jusqu’à maintenant. J’étais triste de voir cette aide prendre fin.
En termes de projets, nous en avons un en cours, semblable à celui de Colleen, qui fonctionne encore avec l’argent versé avant la restructuration. Je pense que certaines de mes activités n’auraient pas été financées dans le cadre du présent régime, parce que les groupes de pression ne semblent plus possibles. À mon avis, leur action est importante. En effet, comment peut-on prendre de meilleures décisions si on n’entend pas les critiques à l’égard de celles-ci?
Il est très difficile d’avoir une bonne gouvernance du jour au lendemain. Nous avons beaucoup progressé avec de nombreux groupes de femmes. Dans la région, il y a une bonne collaboration avec certains ministères provinciaux, et c’est plus facile de faire avancer les choses avec les personnes ouvertes à nos idées. Pour avoir une bonne gouvernance, il nous faut changer la mentalité de nos semblables qui ont été conditionnés à penser d’une certaine façon et résistent beaucoup à l’idée que des femmes autochtones peuvent devenir chefs ou participer au processus décisionnel. C’est pourquoi je pense qu’il est préférable de se tourner vers des solutions à grande échelle plutôt que de procéder par petites étapes pour lesquelles des portes sont déjà ouvertes.
Merci beaucoup.
J’aimerais remercier toutes les participantes. Nous avons entendu d’excellents commentaires aujourd’hui. Je ne crois pas que ces commentaires soient nouveaux. C’est la même question qui revient sur le tapis.
Je suis particulièrement intéressée par l’aspect rural. J’ai beaucoup travaillé pour résoudre ces questions. Je viens d’une circonscription rurale et j’ai fait de la politique municipale pendant 26 ans. Il n’y a rien comme la politique municipale pour prendre le pouls d’une collectivité. Nous sommes chanceux parce qu’il y a toujours eu des femmes qui ont participé à la vie politique du comté de Lambton. C’est pourquoi la dynamique y est peut-être différente.
Nous avons eu un projet pilote pour le programme Meilleur départ de garde d’enfants dans le comté de Lambton — le projet pilote rural. J’étais présidente de conseil du comté lorsque le projet a été mis en œuvre. J’ai donc beaucoup participé au démarrage du programme et à sa mise en œuvre. Je l’ai surveillé de près. Même s’il était financé par une contribution fédérale, il a fait l’objet de négociations avec la province. Le programme a été mis sur pied par la province et le comté, et non par le gouvernement fédéral.
En vérifiant auprès de la directrice du programme la semaine dernière, j’ai su que d’autres places étaient créées et que cela allait continuer. Les responsables du programme ont adopté une approche très proactive et renégocié les modalités avec la province, parce que les dollars vont encore à la province. Le projet continue. Ce genre d’initiative est donc possible, mais il faut de la collaboration et de la coopération.
Je sais que l’isolement, le manque de services, de transports et de débouchés professionnels et les niveaux de prestations d’aide sociale sont des problèmes particuliers aux collectivités rurales. Ces collectivités sont aux prises avec des difficultés que d’autres collectivités n’ont pas. Je n’ai pas de solutions toutes faites pour résoudre ces problèmes. En ce moment, j’essaie de mettre sur pied un réseau de transport dans une collectivité rurale et c’est un énorme défi à relever. C’est pourquoi je vous félicite, Colleen, pour ce que vous êtes en train de faire. C’est une entreprise colossale. Nous avons obtenu un certain succès dans ma collectivité, mais il a fallu beaucoup de collaboration et de coopération de tous les groupes concernés. Comme je m’intéresse à ce genre de projet et que j’ai un peu d’expérience dans ce domaine, je sais que vous travaillez très fort.
Avez-vous des suggestions particulières à formuler sur la façon d’améliorer la situation des femmes qui vivent dans la pauvreté dans les régions rurales? Pouvons-nous instaurer des mesures de sécurité sociale pour les femmes qui n’auront pas de rente de retraite parce qu’elles n’ont pas de revenu? Comment pouvons-nous commencer à résoudre ce problème?
Je sais qu’il faut nous attaquer au problème lorsque les femmes sont plus jeunes de sorte qu’une fois devenues âgées, elles auront droit à une certaine sécurité. Alors, par quoi devons-nous commencer? Le financement devrait il suivre l’enfant « follow-the-child » si elles ont des enfants? Est-ce un paiement ou un remboursement pour celles qui vivent et travaillent dans la ferme familiale tout en s’occupant de leur famille?
Cela veut dire que, si vous restez chez vous avec vos enfants, vous recevrez de l’argent. Si cet argent arrive sous forme de paiement de sécurité ou d’aide sociale, vous recevrez suffisamment d’argent pour payer vos dépenses. Nous n’avons plus de normes nationales pour des choses comme l’aide sociale. Chaque province l’organise à sa façon. En Ontario, ils ont coupé les taux de prestations de 20 p. 100 et les gens ne peuvent plus nourrir leur famille. À mon avis, il faudrait qu’il y ait un consensus sur le fait que les enfants doivent être nourris convenablement dans notre pays, et les gouvernement fédéral et provinciaux devraient prendre les mesures nécessaires pour que cela se produise.
Les programmes de prestation d’invalidité, d’aide sociale et d’assurance-emploi ont grand besoin de réformes. Par exemple, pourquoi les travailleuses autonomes n’ont pas droit aux prestations de maternité?
Il y a aussi le problème des niveaux des rentes de retraite, des prestations d’invalidité et des rentes pour les femmes. Une femme comme ma mère qui est restée à la maison pour prendre soin de ses huit enfants et n’a pas travaillé à l’extérieur n’y a pas droit. Ma mère vit donc dans la pauvreté depuis que mon père est décédé.
Voilà les choses qu’il nous faut examiner.
[Français]
Merci beaucoup.
Je suis députée d'une circonscription rurale. Il y a un syndicat d'agricultrices qui lutte présentement pour la reconnaissance de leur rôle à titre de partenaire économique, de collègue de travail de leur mari et de leur travail à la ferme. Au fil des années, elles ont gagné des postes officiels dans les structures des différents syndicats agricoles au Québec.
Depuis quelques années, les agricultrices luttent pour avoir accès à des prestations de maternité. Au Québec, les congés parentaux se sont améliorés. On a récupéré certains transferts du fédéral, ce qui nous a permis de mettre en place un système de congés parentaux assez acceptable.
Le problème est que les agricultrices, en raison de leur statut de travailleuse autonome ou de conjointe, ne peuvent pas, quand elles ont un enfant, recevoir des prestations parentales. Souvent, cela appauvrit la famille parce que la femme doit, après la naissance de son enfant, engager du personnel pour compenser le travail qu'elle faisait à la ferme.
Je connais bien la situation des agricultrices du Québec qui luttent pour obtenir ce changement au Code du travail et être reconnues et bénéficier d'un congé parental, mais également pour ne pas être pénalisées financièrement quand elles ont des enfants.
Je ne sais pas si c'est la même situation dans les autres provinces, mais chose curieuse, le père, lui, est reconnu et a droit à cinq semaines de congé parental, alors que la mère n'a droit à aucun congé parental. C'est la femme qui accouche et c'est l'homme qui a le congé! C'est une lutte que mènent les femmes du Québec. Je crois qu'elles vont réussir, parce que ces femmes ont l'habitude de revendiquer.
D'après votre recherche, les femmes des autres provinces vivent-elles la même chose? Vous a-t-on fait remarquer qu'elles s'appauvrissaient quand elles donnaient naissance à un enfant?
[Traduction]
C’est certain. Cette situation est reliée à d’autres problèmes dont nous avons parlé: les femmes qui vivent sur des fermes et s’occupent de leurs enfants n’ont pas beaucoup d’options en termes de services de garderie et d’autres services qui leur permettraient soit de se libérer d’une tâche agricole soit de travailler à plein temps à la ferme à titre de partenaire égale.
Par conséquent, la cause que les femmes du Québec sont en train de défendre est très intéressante. À mon avis, c’est une bonne nouvelle pour les femmes du reste du Canada qui essaient aussi d’obtenir une forme de reconnaissance pour le travail qu’elles accomplissent dans les fermes.
Je pense que la situation est la même pour les travailleuses indépendantes. Bon nombre de femmes des collectivités rurales sont travailleuses indépendantes, parce qu’il n’y a pas d’emplois pour elles. Elles sont très innovatrices et créent leur propre emploi. Elles ne gagnent pas beaucoup, mais suffisamment pour s’en sortir et nourrir leur famille. Par contre, elles n’ont droit à aucune prestation de maternité, de retraite ou de maladie.
C’est pourquoi nous devons essayer d’améliorer le soutien dans les collectivités rurales. Il faut permettre aux femmes de travailler et de contribuer à la collectivité et à leur famille tout en bénéficiant d’un filet de sécurité pour les périodes où elles ne peuvent pas travailler ou veulent avoir des enfants.
[Français]
[Traduction]
Merci, madame la présidente.
Nous avons entendu parler du dépeuplement du Canada rural, dont nous a parlé un groupe de femmes venues de la Nouvelle-Écosse. Ces femmes ont proposé au gouvernement d’inverser sa méthode d’allocations en ajustant les services de santé, de garderie et autres aux besoins de la population au lieu de les calculer en fonction du nombre d’habitants.
Comment cela pourrait-il aider les femmes des régions rurales? Cela changerait-il quelque chose?
Cela ferait une énorme différence, car les collectivités rurales récupéreraient les services qu’elles ont perdus. En ce moment, les femmes se démènent beaucoup pour combler les besoins créés par la perte de services de soins de santé: elles conduisent leurs parents chez le médecin en ville et s’occupent de leurs besoins quotidiens. L’une des femmes qui travaillent avec moi va voir sa mère chaque jour à l’heure du midi. Cela réduit sa mobilité professionnelle et autre.
Cette perte de services est aussi cruciale sur le plan de l’emploi, parce que, dans les collectivités rurales, les bons emplois avec un salaire décent sont ceux des domaines de l’éducation et des soins infirmiers.
Il faut que nous recommencions à voir les collectivités rurales comme des milieux de vie. Nous devons admettre qu’elles nécessitent une approche différente de celle des collectivités urbaines, en termes de politiques et de financement, et qu’il n’existe pas de solution universelle pour toutes les collectivités. Je pense que nous en sommes tous conscients, mais nous n’avons pas encore modifié notre approche. Pour que les collectivités rurales soient durables et demeurent des endroits où il fait bon vivre et travailler, il nous faut modifier la méthode de financement, les programmes et les politiques.
Je vis dans une collectivité rurale et j’aimerais que mes enfants y vivent aussi, mais il est peu probable que cela se produise, parce qu’ils ne sont pas prêts à vivre avec presque aucun revenu. Encore une fois, le revenu est un des grands problèmes à résoudre. Nous ne pouvons pas tous vivre à Toronto. Alors, pourquoi certaines personnes ne peuvent-elles pas choisir de vivre à Grey ou à Bruce?
Madame Gabriel, l’une des recommandations dans votre présentation était:
D’offrir une formation visant à sensibiliser à la culture autochtone les gestionnaires de la fonction publique fédérale et des entreprises privées régies par la Loi sur l’équité en matière d’emploi, afin de démythifier les questions relatives à l’embauche d’employés autochtones…
Pourriez-vous élaborer et expliquer cette recommandation?
La commission d’enquête parlementaire a affirmé très clairement que les services doivent être adaptés aux réalités culturelles et aux valeurs des Autochtones. Il est prouvé que, autrement, ils ne combleront pas les besoins des femmes autochtones et de la population autochtone en général.
J’ai perdu le fil de ma pensée.
Vous nous avez déjà dit que la langue était essentielle aux premières nations. Malheureusement, il y a eu des coupures dans les programmes linguistiques.
Pouvez-vous expliquer pourquoi la langue est un aspect important de la collectivité et de la sécurité des femmes?
Bon nombre de femmes parlent une langue autochtone et, au Québec, cela a été problématique parce qu’il faut apprendre le français ou l’anglais. Parfois, les services ne sont pas offerts en anglais; parfois, les Autochtones n’y ont pas accès, en particulier dans les collectivités éloignées. Les services doivent vraiment répondre aux besoins des femmes autochtones et refléter leurs valeurs, car les Autochtones sont en train de perdre leur langue. Nous sommes toujours coincés dans de petites boîtes qui nous font perdre notre identité. Notre identité est constamment menacée.
Je suis désolée, je suis simplement fatiguée. J’avais quelque chose à vous dire et mon temps sera bientôt écoulé.
Il existe aussi des économies parallèles. Certains pensent que les Autochtones n’ont pas d’intérêts particuliers. Par exemple, à l’automne, les Cris prennent congé pour aller chasser. C’est pourquoi il y a des économies parallèles dont les gains servent à subventionner des activités artistiques et artisanales. Les employeurs ne réalisent pas que la chasse, la cueillette de plantes médicinales et les autres activités de ce genre font partie de nos intérêts et de notre culture.
Je comprends exactement ce que vous voulez dire. Il en était de même avec mes élèves à l’école, dont un grand nombre étaient des premières nations...
Merci.
Je souhaite remercier toutes les personnes qui sont venues faire des présentations ici aujourd’hui pour leurs commentaires très éclairés et leurs judicieux conseils. J’apprécie beaucoup tout votre travail.
J’ai grandi dans une région rurale du Manitoba. Nous étions très pauvres, et je comprends donc très bien ce dont vous nous parlez.
C’est là la raison pour laquelle nous invitons des personnes à participer à ces comités, pour trouver des solutions. Je crois que certains d’entre vous ont participé à la vie politique, car vous défendez vos idées avec beaucoup de conviction, et je vous en félicite, surtout les femmes, qui ont moins l’habitude de la faire.
Ellen, si vous me permettez de prendre quelques minutes, je suis très intéressée par un de vos commentaires. Mon fils est marié avec une femme de la tribu Ojibway, et nous sommes donc une famille multi-ethnique. Je suis très intéressée… vous avez dit une petite phrase, mais elle a eu tellement d’impact parce que c’est ce que j’entends sans cesse… lorsque vous avez parlé de culture et d’éducation. J’ai eu l’occasion, en tant qu’ancienne enseignante, de travailler dans des réserves.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur...? Nous avons parlé d’argent, nous avons parlé de programmes politiques et de bien d’autres choses. Mais les réelles racines du peuple autochtone, son cœur et son âme, c’est la culture. Pourriez-vous en dire plus sur la culture et son importance dans l’éducation des enfants et leur bien-être afin qu’ils comprennent d’où ils viennent?
Bien sûr. Nous parlons de la colonisation et de ses répercussions, et une des choses très importantes pour des groupes comme les femmes autochtones du Québec et d’autres, c’est le renforcement de l’identité, de la culture et de la langue, comme vous l’avez mentionné.
Pour que nous soyons de nouveau un peuple fier, il importe que ces choses figurent au programme de nos écoles. Nous avons besoin que nos enfants en apprennent la valeur. Les enfants ont besoin d’apprendre leur rôle dans la société. C’est le rôle des femmes, c’est le rôle des hommes, et chacun mérite d’être respecté. Nous sommes tous dépendants les uns des autres.
Si nous examinons les problèmes que notre collectivité doit surmonter, ils viennent du fait que notre culture a été attaquée. Ses valeurs, qui sont à la base de notre organisation sociale, ont été attaquées.
Tant que tous n’auront pas vraiment compris à quel point il importe pour les Autochtones de préserver ces valeurs, nous ne réussirons pas. Nous serons toujours un problème, le problème des Autochtones dans la société canadienne.
Ce n’est pas ce que nous souhaitons. Nous voulons être des gens autonomes, des gens qui prennent en main leur destinée.
Tant que nous n’aurons pas adopté cette philosophie dans les écoles, tant que le public ne sera pas sensibilisé… Tous les efforts que nous avons faits n’ont guère eu d’effet sur l’attitude du public. Mais, tant que nous n’aurons pas renforcé nos valeurs, nous connaîtrons les mêmes difficultés et nous serons comme les roues d’une voiture qui patinent dans la boue.
Pourriez-vous aussi nous parler brièvement du rôle très important de la femme dans la société autochtone? Je crois que ce rôle a été un peu perdu, ce qui est dommage. Pourriez-vous nous offrir vos commentaires?
Le rôle de la femme est de transmettre la langue, la culture et les valeurs. Ma société est une société matrilinéaire, alors nous détenions les titres des terres et nous étions les protectrices de la terre, parce que nous sommes comme la Terre mère, des nourricières.
C’est le genre de choses que nous avons perdu avec la colonisation. Le rôle des femmes a toujours été l’égal de celui des hommes. Comme je l’ai dit, nous étions une source d’inspiration pour les féministes parce qu’elles voyaient à quel point les femmes jouaient un rôle égal à celui de l’homme dans le processus décisionnel et dans les efforts pour préserver la nation.
Je crois que les femmes autochtones et en fait, tous les Autochtones sont des gens très fiers.
Je crois réellement que ce gouvernement appuie vraiment ces valeurs, et j’ai hâte d’en savoir plus sur vous et votre action auprès des femmes autochtones.
Je vous remercie beaucoup.
Comme nous devons nous pencher sur certaines activités du comité, je ne peux permettre qu’une seule autre question, et je crois que vous allez toutes deux partager cette question, madame Minna.
Oui. Je prends le temps de M. Pearson, car il a dû partir.
C’est plus un commentaire que je veux faire, et peut-être une question à la fin. Je n’ai pu m’empêcher de remarquer l’ironie de ce qui se passe ici aujourd’hui, et peut-être que cela arrive pour une…
Madame Purdon, vous avez mentionné quelque chose plus tôt… vous avez parlé de l’occasion que vous avez eue, et vous avez parlé de la recherche que vous avez effectuée et du fait que le bureau local vous avait aidée pour les étapes suivantes. Cela vous a permis de vous rencontrer, de défendre les intérêts des femmes, de leur parler, de les informer et d’être ici aujourd’hui.
L’ironie de tout cela, c’est que, dans le système actuel, rien de tel — la recherche et la défense des intérêts — ne serait permis. Alors, d’ici un ou deux ans…
Oui. Je suis désolée, je...
Madame Smith, elle a la parole. Votre objection est fondée en ce qui a trait au fait que la défense des intérêts et l’égalité ont été retirées de la Condition féminine.
Madame Minna, poursuivez.
Je suis désolée, mais ce sont les règles. En fait, une organisation à qui je m’adressais la semaine dernière a vu son projet refusé parce que la recherche comportait un petit élément de défense des intérêts. Alors, je dis que notre travail pour aider les femmes dans les deux ou trois prochaines années souffrira, parce que vous ne serez pas là avec toute l’information que vous êtes à même de nous donner. J’ai pensé que je pouvais faire ce commentaire et que vous pourriez peut-être y ajouter quelque chose.
Je sais que ma collègue a une autre question. Peut-être peut-elle la poser maintenant et vous pourrez nous répondre à toutes les deux.
Ma question est d’une toute autre nature.
J’écoutais vos commentaires, madame Purdon, et vous savez peut-être qu’il y a deux ans, ce comité s’est penché sur toute la question des prestations de maternité pour les travailleuses autonomes. En réalité, ces prestations devraient également viser les femmes en région rurale, pas seulement les travailleuses autonomes. Alors, je me suis mise à penser.
Madame Gabriel, j’ai été frappée par un de vos commentaires, et j’aimerais avoir une réponse. Vous avez dit que même les femmes qui ont reçu une éducation supérieure doivent surmonter l’obstacle du racisme. Cela porte-t-il atteinte à leur bien-être économique? Il semble clair que cela touche leur bien-être personnel. Pourriez-vous nous en dire plus?
Il existe des cas de femmes qui ont des maîtrises et des doctorats et qui n’arrivent pas à trouver du travail. Elles doivent se contenter d’accepter du travail hors du domaine pour lequel elles ont étudié parce qu’elles sont victimes de racisme et de discrimination sexuelle. Elles ne peuvent pas trouver de travail dans leurs collectivités parce que les chefs se sentent menacés par leur éducation. Elles se tournent vers l’extérieur, vers les régions urbaines, et les gens croient qu’elles ne doivent leur éducation qu’au fait qu’elles sont Autochtones; elles ont obtenu leur diplôme non parce qu’elles l’ont mérité, mais parce qu’elles sont Autochtones. Ce sont là quelques-uns des problèmes que doivent surmonter les femmes diplômées.
Ce n’est pas tout et ce n’est pas… Je ne connais pas le pourcentage, mais le problème est réel.
Et il est réel, si je comprends bien, alors qu’il y a des possibilités d’emploi dans des organisations autochtones de la collectivité? Ou y en a-t-il? La situation s’applique-t-elle tant dans la collectivité autochtone que non autochtone?
Merci beaucoup. Je souhaite vous remercier tous d’être venus.
Vous nous avez fait d’excellentes présentations. Vous avez détruit le mythe de la femme en région rurale qui reste à la maison et choisit de s’occuper de ses enfants, ou les autres mythes qui nous hantaient, et vous nous avez donné l’image de femmes très fortes. Le rôle de la femme autochtone était anciennement représenté par celui de la Terre nourricière. Vous nous avez mis au défi. Vous nous avez mis au défi de nous demander pourquoi, avec toute la richesse de ce pays, il existe encore des personnes pauvres?
En nous penchant sur la situation économique des femmes, nous tiendrons compte des situations dont vous avez parlé. En tant que société, nous voulons tous travailler vers un but semblable. Quelles que soient les philosophies, personne n’aime la pauvreté. Je crois que personne ici ne souhaiterait faire de la pauvreté l’étendard du Canada.
Nous vous remercions donc. Je souhaite vous laisser chacune une minute pour conclure. Nous commencerons avec Mme Gabriel. Voudriez-vous commencer? Non? Vous êtes un peu fatiguée. Alors nous commencerons avec Mme Martz.
Je crois qu’il y a probablement deux choses sur lesquelles je voudrais vraiment vous encourager à vous pencher. En plus de l’ensemble de la discussion sur la sécurité économique, qui est, à mon avis, essentielle, je crois que le besoin d’une politique pratique sur la garde des enfants ressort aussi de toutes ces discussions. Si les femmes ne peuvent avoir accès à des services de garde à prix abordable, elles ne peuvent accéder au marché du travail et gagner un revenu décent pour elles-mêmes et pour leurs familles.
L’autre élément qui, à mon avis, est très important, c’est de prendre le temps de revenir au débat sur la politique rurale et de le relancer. Nous devons faire quelque chose pour les régions rurales du Canada, quelque chose qui ne soit pas uniquement fondé sur le point de vue économique. Nous devons décider ce que nous voulons faire du Canada rural, de manière très délibérée. Nous osons espérer que cette vision de l’avenir comprendra des familles agricoles, des collectivités rurales et toutes ces belles choses qui ont contribué à la culture rurale au fil des siècles.
J’aimerais souligner que la pauvreté est de plus en plus présente dans la vie des femmes des collectivités rurales, et bon nombre d’entre elles croient que la solution consiste à quitter leur collectivité rurale. Les grands trous dans notre filet de sécurité sociale, qui n’est plus vraiment un filet, créent des obstacles incroyables aux femmes pauvres, qu’elles le soient de manière chronique ou en raison de certaines circonstances. Il leur est très difficile de sortir de cette pauvreté et d’utiliser les aptitudes et les compétences qu’elles ont pour en faire profiter leurs familles et leurs collectivités. C’est une pure perte pour nos collectivités.
Je rappelle moi aussi le besoin d’une politique rurale et d’une analyse comparative entre les sexes et les lieux qui contribueraient à un processus décisionnel fédéral davantage soucieux de l’opinion des femmes et des habitants des régions rurales lors de l’élaboration de politiques, afin que ces dernières ne contribuent pas encore plus au dépeuplement de ces régions et ne soient pas un désavantage de plus pour les femmes et les collectivités rurales.
Dans la plupart des collectivités autochtones, le mouvement va vers l’édification de la nation. Cette édification ne peut se faire sans une bonne gouvernance. Et une bonne gouvernance ne peut exister tant que ne règne pas l’équité entre les sexes dans les processus décisionnels.
En raison des forts taux de violence dans nos collectivités, les personnes tendent moins à investir dans ces collectivités. Du coup, un grand nombre de personnes se tournent vers des activités jugées illégales. J’aimerais qu’on se penche sur ces questions.
Il faut les régler, parce que nous devons nous sortir de l’oppression qui est notre lot depuis des centaines d’années. Nous en avons assez. Nous voulons des réponses. Nous avons besoin d’une réelle volonté de tous pour nous aider à contribuer réellement, nous aussi, à la société, dans un pays fondé sur les ressources des territoires autochtones. Nous contribuons à la société canadienne et à sa prospérité, et nous voulons continuer de coexister pacifiquement avec les Canadiens.
Merci beaucoup.
J’aimerais suspendre la séance pour une minute. Nous avons certaines questions sur lesquelles je voudrais entendre les commentaires du comité.
Nous aurons donc une suspension d’une minute.
Membres du comité, je souhaite rappeler la réunion à l’ordre. J’ai quelques points à discuter avec vous.
Nous avions demandé à la ministre Oda de venir nous voir, mais elle participera au comité sur les voies et les moyens à la Chambre des communes mercredi prochain, pour une réunion du comité plénier. Sa participation portera sur les crédits 110 et 115. Condition féminine sera donc renvoyé à ce comité.
Les membres du comité souhaitent-ils tout de même demander à la ministre de venir à ce comité, parce que nous n’avons plus le mandat d’étudier le budget des dépenses?
Oui, madame Minna.
Premièrement, j’ai une question.
Avions-nous le mandat d’étudier le budget des dépenses? Nous l’avions? Et il a été renvoyé à la Chambre parce que…?
D’accord. Néanmoins, je me demande si la ministre ne pourrait pas venir au moins pour discuter de la partie du rapport sur les plans et les priorités, car cela porte plus sur les orientations futures du ministère et des programmes que sur le budget des dépenses actuel.
Très bien. Alors nous l’inviterons pour le 30 mai et nous l’informerons que le sujet sera les futurs plans et priorités, et que le budget des dépenses sera examiné par le comité plénier.
Cela vous convient-il?
Deuxième point: La semaine prochaine, des représentants de RHDS et du ministère des Finances seront avec nous. Je sais que vous êtes un peu préoccupés par l’envoi de questions écrites. Les représentants nous ont demandé de fournir des questions par écrit afin de pouvoir amener ou nous envoyer la bonne documentation.
Si vous pouviez nous donner un bref aperçu du genre de questions que vous souhaitez poser à ces représentants — et vous n’aurez pas à vous en tenir à ces questions — , ils pourraient amener la documentation pertinente.
Quelqu’un a-t-il déjà réfléchi aux sujets dont il souhaite discuter avec ces représentants? Quelqu’un?
Madame Minna.
En fait, j’aurais une question au préalable. Je suis désolée.
Je crois que la dernière fois que des représentants de RHDS et des Finances sont venus, nous avions fait quelques demandes.
Pour obtenir des renseignements du ministère des Finances sur l’analyse comparative entre les sexes?
J’ai demandé au greffier, et Michelle m’informe qu’ils ont dit qu’ils travaillaient encore à rassembler ces renseignements. Mais je veux leur demander quand ils auront terminé le travail, parce que nous leur avions demandé s’ils avaient effectué l’analyse comparative entre les sexes lors de l’élaboration de leur budget? Et, si c’était le cas, pouvaient-ils nous indiquer quels crédits d’impôt étaient fondés sur cette analyse? En outre, répondront-ils à la question sur le fait qu’un revenu de 22 000 $ est trop bas pour recevoir un crédit d’impôt pour emploi, mais trop élevé pour un crédit d’impôt pour enfants? Les représentants travaillent encore sur cette question, et nous devrions découvrir s’ils ont les réponses d’ici à la semaine prochaine.
Nous pouvons les leur poser. Ce sont donc les questions que nous leur poserons.
Quelqu’un a-t-il d’autres questions à leur poser?
Quelle est l’orientation générale des questions que vous souhaitez poser aux représentants de RHDS et du ministère des Finances?
Vous avez une copie de la lettre envoyée. Pour la prochaine réunion, essayons de décider si cela fera partie d’une étude plus vaste, de réfléchir au but, à savoir si c’est une mission d’information, etc. Alors, réfléchissez à ces questions, et nous en discuterons alors.
Merci beaucoup.
La séance est levée.