:
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Monsieur le président, mesdames et messieurs, et honorables membres du Comité permanent des langues officielles, je vous remercie d'étudier le certificat de nomination en vue de la prolongation de mon mandat en tant que commissaire aux langues officielles.
Les six dernières années ont été marquées d'événements importants, parmi lesquels figurent les rencontres régulières avec les membres du comité. J'espère que j'aurai le privilège de poursuivre cette relation avec vous pour encore trois années.
[Français]
Je tiens à souligner le dévouement et le professionnalisme de la direction et des employés du commissariat tout au long des dernières années. Vous avez d'ailleurs appris à connaître certains membres de mon comité exécutif qui m'accompagnent habituellement dans le cadre de nos rendez-vous.
[Traduction]
Mais aujourd'hui, il n'y a que vous et moi — tout comme à notre première rencontre en 2006, qui avait pour objet de prendre en considération ma candidature en tant que commissaire. Certains d'entre vous se souviendront que j'avais alors répété la question posée par la Commission Laurendeau-Dunton il y a 50 ans cette année.
[Français]
Les Canadiens anglais et les Canadiens français peuvent-ils vivre ensemble et le souhaitent-ils? Si la réponse à cette question demeure positive, il est essentiel de mettre en oeuvre une politique sur les langues officielles axée sur les résultats. C'est ce que je vous ai dit il y a six ans et je le crois toujours.
[Traduction]
Le gouvernement doit continuer à faire des choix et à poser des gestes qui auront comme résultats de permettre aux citoyens d'obtenir des services bilingues; de permettre aux fonctionnaires de travailler dans la langue de leur choix; de permettre aux communautés de langue officielle de contribuer pleinement à la société canadienne; et de permettre aux gens de toutes les régions d'apprendre les deux langues officielles du Canada.
[Français]
On me juge également par les résultats que j'obtiens en tant qu'administrateur général. Les citoyens qui déposent des plaintes s'attendent à une résolution efficace dans des délais raisonnables. Nos interventions auprès des institutions fédérales doivent être judicieuses et amener des changements durables.
[Traduction]
Nos partenaires au sein des communautés de langue officielle et des groupes de promotion du bilinguisme comptent sur notre appui. Nos campagnes de promotion doivent toucher leur public. De plus, l'organisation doit être bien gérée, dans le respect de ceux qui y travaillent et des citoyens qui la financent.
[Français]
Le commissariat continuera de se moderniser. Nous poursuivons la mise en oeuvre de nouveaux systèmes de gestion de l'information grâce auxquels les citoyens peuvent maintenant porter plainte en ligne. Nous sommes désormais présents dans les médias sociaux comme Facebook et Twitter.
[Traduction]
Nous disposons maintenant d'un processus de plaintes facilité par lequel transitent plus de 60 p. 100 des plaintes. De plus, nous serons bientôt sous le même toit qu'Élections Canada, le Commissariat à la protection de la vie privée et le Commissariat à l'information. Cette proximité entre certains agents du Parlement renforcera notre indépendance et nous permettra de partager ultérieurement certains services.
[Français]
Ces changements administratifs permettront au commissariat de relever les défis qui l'attendent avec plus d'efficacité. Je pense non seulement au programme qui, je l'espère, succédera à la Feuille de route pour la dualité linguistique, mais également aux nombreux anniversaires et événements importants à venir au cours desquels la dualité linguistique canadienne jouera un rôle de premier plan.
[Traduction]
Mon personnel a travaillé de près avec les organisateurs des Jeux du Canada de 2013 à Sherbrooke et collabore déjà avec ceux des Jeux panaméricains de 2015 à Toronto, pour faire en sorte que nous mettions en oeuvre les leçons apprises à l'occasion des Jeux olympiques de 2010 à Vancouver.
[Français]
Les célébrations qui entourent le 150e anniversaire de la Confédération en 2017 incluront l'inauguration du nouveau Musée canadien de l'histoire et seront précédées de nombreux événements commémoratifs, notamment ceux liés aux deux guerres mondiales, ainsi qu'au 200e anniversaire de la naissance de John A. Macdonald. Ces anniversaires constituent la toile de fond d'une conversation nationale sur notre histoire commune et sur nos valeurs.
[Traduction]
Nous nous devons de souligner ces moments historiques, tout en reconnaissant qu'ils étaient à l'époque une source de débats amers et polarisants. Il serait contre-productif de chercher à camoufler les désaccords, car on en ressent des échos encore aujourd'hui.
[Français]
Depuis son élection, le gouvernement du Parti québécois s'inquiète des forces qui mettent en danger le statut du français. Ces dangers sont bien réels. Dans le milieu de la recherche, du commerce international et des grands divertissements, la domination de l'anglais réduit souvent l'espace d'expression dont disposent les francophones. Mais ces dangers ne viennent ni des communautés d'expression anglaise du Québec, ni des institutions fédérales. C'est un message que je vais continuer de véhiculer.
[Traduction]
Ce n'est qu'un aperçu du travail qui attend le commissariat et le gouvernement fédéral au cours des prochaines années. Également à l'ordre du jour, nous retrouvons la vitalité des communautés de langue officielle; les enjeux liés à l'immigration, qui est le passé, le présent et l'avenir de notre pays; l'accès à la justice dans les deux langues; et la nécessité absolue d'améliorer l'accès à l'apprentissage du français. Nous devons aussi garder à l'oeil les changements au sein de la fonction publique tant du point de vue des services que du point de vue de la langue de travail et de l'appui aux communautés de langue officielle.
[Français]
Le commissariat abordera ces questions en fonction de quatre grandes priorités: premièrement, assurer la promotion de la dualité linguistique dans la société canadienne, notamment en incitant le gouvernement à jouer un rôle plus visible et à améliorer l'accès à l'apprentissage de la langue seconde; deuxièmement, veiller à la protection des droits linguistiques, notamment en surveillant l'impact des compressions budgétaires et de l'application des données du Recensement de 2011 sur la désignation linguistique des bureaux fédéraux, tout en continuant de surveiller le rendement des institutions fédérales;
[Traduction]
troisièmement, favoriser la vitalité des communautés de langue officielle, plus particulièrement en ce qui a trait à l'immigration; enfin, quatrièmement, veiller à la saine gestion du commissariat dans une période de changements.
Pour atteindre ces objectifs, le commissariat continuera de recourir à tous les moyens d'intervention dont il dispose: le travail avec les parlementaires, les études, les vérifications, les enquêtes, les rencontres avec les dirigeants d'institutions, les initiatives de promotion et d'information, sans oublier les recours judiciaires.
[Français]
Nous continuerons également notre travail auprès des institutions fédérales, des minorités et des majorités, tout en offrant nos conseils dans les domaines de la santé et de l'éducation ainsi que dans le secteur privé et les médias, au besoin.
Avec votre permission, je continuerai donc à encourager et à déranger.
Je vous remercie de votre attention. J'aimerais profiter du temps qu'il me reste pour répondre à vos questions.
:
Sérieusement, je vais vous donner des exemples.
On a fait des plaintes concernant la bibliothèque du Collège militaire royal de Saint-Jean, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Or, le temps que vous enquêtiez sur cette plainte, la bibliothèque était déjà fermée.
Le centre de recrutement des Forces canadiennes de Bathurst est très important. Les gens de Madawaska viennent dans ce centre bilingue pour le recrutement. J'ai formulé une plainte le 12 avril 2012. On est le 19 mars 2013 et le commissariat n'a pas rendu de décision. Le danger avec ça, c'est qu'en raison du délai nécessaire pour qu'une plainte soit traitée, entretemps, le gouvernement a déjà fait fermer les bureaux. Et là on dit que le gouvernement aurait dû consulter.
Je me rappelle que lorsqu'on voulait fermer les bureaux de Bathurst pour les déménager à Miramichi, vous aviez dit que le gouvernement n'avait pas consulté et qu'il avait violé la loi. Vous faites encore la même chose cette fois-ci.
Comment pouvez-vous dire que la situation s'améliore quand on voit cela? Ce n'est pas une grosse plainte. Il faut aller investiguer pour savoir si le bureau de Bathurst va vraiment fermer. On le sait, cela a été annoncé. Les francophones de Madawaska devront aller à Fredericton. Or on attend encore pour des réponses. Je ne connais pas toutes les plaintes qui sont acheminées à vos bureaux, mais je vous en cite une qui est facile à traiter et cela fait un an qu'elle a été déposée.
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Vous avez bien fait d'agir.
Monsieur Fraser, une des rares choses intéressantes qui arrive dans ce comité, c'est d'avoir des rencontres sporadiques avec vous et de débattre. J'ai beaucoup apprécié votre premier mandat. Mon parti et moi envisageons avec un grand intérêt la collaboration que nous aurons dans le cadre de votre second mandat.
Permettez-moi cependant de formuler une critique. Je trouve que vous avez très bien réussi à donner confiance aux gens face à beaucoup de négativisme. Toutefois, au prix d'une certaine lucidité, je trouve que vos rapports annuels sont trop roses bonbons. Il y a plusieurs éléments en jeu.
Je regardais votre liste des priorités et ce sont les bonnes. Sauf qu'il faut regarder les chiffres en face et c'est Statistique Canada qui nous les donne plus que vous. Vous allez me dire que cela fait partie de son travail, mais j'aimerais les voir dans vos rapports. Si vous voulez vraiment assurer la promotion de la dualité linguistique dans la société canadienne, il faut voir où elle en est, cette dualité linguistique.
Je vais vous donner des chiffres inquiétants. La dernière fois qu'on en a parlé, vous m'aviez dit qu'il fallait regarder les nombres et non les pourcentages. En fait, avec tous les gens qui viennent de partout à travers le monde, la proportion de francophones diminue en pourcentage. Parlons toutefois des nombres. Comment se fait-il que dans un pays éduqué comme le Canada, au cours des quatre dernières années, on soit passé de 2 561 000 personnes hors Québec en mesure de soutenir une conversation en français à 2 584 000, soit un gain d'environ 20 000 personnes en quatre ans. C'est un surplace extrêmement inquiétant.
Parlons des jeunes sur qui on espère beaucoup compter pour l'avenir. Je vais aborder la question des jeunes hors Québec parce qu'au Québec, évidemment, les anglophones sont très bilingues et les francophones apprennent l'anglais dans une proportion qui n'est pas encore assez élevée, mais qui est du moins grandissante. À l'extérieur du Québec, les inscriptions aux programmes d'immersion augmentent de 23 %, mais le nombre de jeunes inscrits dans un programme régulier de français a diminué de 23 %, selon Statistique Canada. Cela fait en sorte qu'au bout du compte, pour ce qui est des Canadiens qui apprennent le français comme langue seconde à l'extérieur du Québec, la proportion est passée de 53 % à 44 % en 20 ans. Il y a un immense problème et il faut que le commissaire mette le doigt sur ce problème.
Je m'arrête ici parce que je suis en train d'écouler le temps qui m'est alloué et que j'aimerais entendre votre réponse.
C'est bien de donner confiance aux gens, mais il faut les confronter aux défis auxquels on fait face. Il faut le faire sans fard et il faut le faire en toute lucidité.
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Je vous remercie beaucoup de vos commentaires.
Effectivement, c'est l'un des grands défis que je vois dans le continuum d'apprentissage de la langue seconde au Canada. Le programme d'immersion est largement reconnu comme un grand succès, mais le taux de décrochage est vraiment inquiétant. Il y a aussi des conseils scolaires qui continuent de limiter l'accès à l'immersion. En Colombie-Britannique, des gens continuent de passer la nuit dans des files d'attente pour pouvoir trouver une place pour leurs enfants. Comme façon d'accorder des places dans un système scolaire, je trouve cela aberrant.
J'ai même entendu des exemples de conseillers pédagogiques qui ont conseillé aux enfants de se retirer des programmes d'immersion parce qu'ils auraient de meilleures notes. Ils leur disent que les universités ne regardent que les notes. Un étudiant en immersion m'a raconté que son professeur lui a dit de ne pas rédiger l'examen pour le cours d'immersion, mais de le faire pour le français de base. Ainsi, il aurait de bien meilleures notes et que c'est tout ce qui intéressait les universités. D'après moi, c'est une incitation à la médiocrité.
C'est d'ailleurs pour cela que, à la suite d'une des études qu'on a faite, je continue de véhiculer l'idée que c'est la responsabilité des universités d'envoyer le message aux écoles secondaires afin qu'elles valorisent les étudiants qui ont choisi un programme plus exigeant, plus difficile. C'est extrêmement important que les universités envoient ce message. Il faut aussi qu'elles offrent des occasions d'apprentissage de la langue seconde au niveau universitaire, en partie parce que le gouvernement du Canada, qui est le plus grand employeur au Canada, a besoin d'employés bilingues.
Dans presque chaque province où je suis allé, j'ai visité des universités pour véhiculer ce message. Quand je m'adresse aux conseils fédéraux, je leur parle de l'importance du rôle qu'ils jouent comme recruteurs auprès des universités. J'ai également, bien sûr, des rencontres dans des écoles secondaires où je véhicule aussi ce message. C'est extrêmement important.
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Je pense qu'il y a maintenant une sorte de consensus au sein des communautés de langue officielle en situation minoritaire, à savoir que l'immigration est vraiment la clé de leur avenir. Dans les communautés, partout au pays, il y a une diversité impressionnante. Certains membres de la communauté viennent notamment du Maghreb, de l'Afrique ou de la France. Je pense qu'il est très important de disposer de programmes d'appui pour aider ces gens à s'intégrer dans la communauté. Ces services sont souvent disponibles pour les immigrants dont on facilite l'intégration à la majorité anglophone, mais il y en a moins pour des immigrants francophones. Toutefois, il y en a.
L'exemple de l'organisation Accueil francophone, à Winnipeg, m'a beaucoup impressionné. C'est une filiale de la Société franco-manitobaine. Ces gens accueillent des immigrants et des réfugiés à l'aéroport, les accompagnent à une habitation temporaire et les aident à inscrire leurs enfants dans des écoles françaises. Ces nouveaux arrivants sont accompagnés pendant une période de trois ans.
Certains organismes d'accueil ne sont pas sensibilisés à la réalité de la minorité et ont tendance à diriger tout naturellement les immigrants, surtout ceux dont la langue maternelle n'est ni l'anglais, ni le français, vers des organismes d'accueil anglophones. Or la deuxième langue de ces personnes est souvent le français. Par exemple, les Sénégalais, dont la langue maternelle est le wolof, parlent le français plutôt que l'anglais. Or si l'organisme d'accueil n'est pas sensibilisé à la réalité de la communauté minoritaire, il va diriger ces gens vers des institutions d'accueil anglophones.
Dans des cliniques et des institutions de la communauté, à Hamilton, des gens m'ont dit avoir croisé des immigrants qui avaient découvert l'existence de ces institutions de santé et d'éducation après un an ou un an et demi. Ils ont dit que s'ils avaient connu leur existence auparavant, ils auraient inscrit leur enfant à l'école française et dans une clinique francophone, mais qu'ils ne le feraient pas à l'heure actuelle étant donné qu'ils avaient maintenant un médecin et que leur enfant était déjà en deuxième année à l'école anglaise.
Il est donc très important que les organismes d'accueil soient sensibilisés à l'importance de diriger les immigrants francophones, qui ont le français comme première langue d'usage même si ce n'est pas leur langue maternelle, vers les institutions de la minorité.
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Disons qu'il y a deux éléments à considérer.
D'abord, j'ai rencontré des ministres et souvent des premiers ministres dans presque chaque province. J'ai également eu des rencontres avec des fonctionnaires responsables des affaires francophones. C'est un service qui existe dans presque toutes les provinces. C'était plutôt dans un contexte d'échange d'informations.
Par ailleurs, il y a une chose qui m'a impressionné. Même si la communauté est très petite, il y a quand même, de la part des gouvernements provinciaux, un impressionnant engagement à avoir un bureau responsable des relations avec la communauté minoritaire, comme à Terre-Neuve-et-Labrador ou encore à l'Île-du-Prince-Édouard. Dans cette province, c'est un sous-ministre adjoint se rapportant directement au premier ministre qui est responsable de son plan d'action et de la révision de sa Loi sur les services en français.
Ce sont donc des relations cordiales. Cependant, je n'ai évidemment pas de pouvoir d'enquête sur les activités de ces ministères.
Le gouvernement fédéral joue également un rôle dans les réseaux de santé financés par la Feuille de route. Dans ce contexte, j'entretiens des contacts plus directs avec les groupes et les organisations communautaires qui tirent leur financement des réseaux de santé. On peut penser notamment au Réseau communautaire de santé et de services sociaux pour les anglophones au Québec ou à d'autres réseaux qui reçoivent leur financement directement de la Feuille de route.
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Je vais y aller par ordre chronologique.
Peu de temps après mon entrée en fonction, il y a eu l'abolition du Programme de contestation judiciaire, et nous avons rédigé un rapport sur les 118 plaintes que nous avions reçues. Ce rapport a servi de base pour le procès, qui a débouché sur un règlement à l'amiable et la création du Programme d'appui aux droits linguistiques. Notre rapport était le seul document utilisé durant le procès ayant abouti au règlement à l'amiable, et j'en suis fier.
Je suis également fier du fait que nous étions en mesure de participer de façon constructive à la planification des Jeux olympiques. À bien des égards, les Jeux olympiques ont connu un immense succès sur le plan de la dualité linguistique, à l'exception d'un raté: les cérémonies d'ouverture. Nous avons produit un manuel qui est maintenant utilisé par les organisateurs des Jeux du Canada à Sherbrooke ainsi que par les organisateurs des Jeux panaméricains.
Par ailleurs, je suis fier du travail continu que nous effectuons au chapitre des enquêtes, des plaintes et des vérifications qui, selon moi, ont un impact plus important que ce qui est souvent publiquement reconnu ou admis, car cela aide les institutions à se rendre compte des problèmes qui existent et à apporter les corrections nécessaires.
Enfin, je suis fier du fait que nous avons pu utiliser notre étude sur les possibilités d'apprentissage postsecondaire comme un document en évolution constante. Je l'amène avec moi partout au pays et je l'utilise comme base pour les discussions avec les conseils fédéraux, les gouvernements provinciaux, les recteurs et les chefs de département au sujet de l'importance de favoriser les possibilités d'apprentissage linguistique.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Fraser, c'est toujours un plaisir de vous revoir.
J'aimerais revenir sur la question de l'immigration, de l'intégration et des langues officielles.
La semaine dernière, il y a eu le Congrès national de Metropolis, qui avait pour thème « Construire une société intégrée ». Il y a eu des discussions et des tables rondes sur la question de l'immigration, de l'intégration et ainsi de suite. Dans le cas de l'une des tables rondes, la question centrale était comment étudier la question de l'immigration en l'absence de données.
[Traduction]
Comment l'étudier? Comment s'y prendre? Est-il possible de réaliser une étude quand on n'a pas l'information nécessaire? C'est directement lié à l'abolition du formulaire détaillé de recensement, qui nous permettait de recueillir un tas de renseignements détaillés et qui aidait le gouvernement à cibler là où on avait besoin de soutien. Pour revenir à la discussion sur l'immigration, sans cette information, comment serez-vous en mesure de cibler là où on a vraiment besoin de soutien, là où il y a des lacunes sur le plan de l'intégration des immigrants dans notre société? Comment pourrez-vous continuer de surveiller comment les deux langues officielles s'en tirent dans les communautés linguistiques en situation minoritaire?
:
C'est une très bonne question. Quand le formulaire détaillé de recensement a été aboli, nous avons reçu des plaintes et nous avons mené une enquête. J'ai exprimé ma grande préoccupation concernant la perte d'information que cela représenterait.
L'enquête a clairement révélé que l'institution n'était pas en faute. Nos pouvoirs d'enquête ne vont pas plus loin que le Cabinet et, comme la démission de Munir Sheikh l'a montré, cette décision n'avait pas été prise par une institution fédérale, mais par le Cabinet fédéral.
J'aimerais dire un mot sur le Congrès national de Metropolis. J'ai assisté à deux de ces congrès et j'aurais sans doute assisté à celui-ci, mais malheureusement, je devais me trouver à l'extérieur du pays pour un congé qui avait déjà été planifié. J'espérais être de retour à temps. Il y avait d'ailleurs un événement le mercredi soir pour marquer le 50e anniversaire du lancement de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Selon la coutume du Congrès de Metropolis, on examine les enjeux linguistiques dans le cadre d'une réunion préalable au congrès. La langue a certes été un des thèmes récurrents de ces congrès, et je regrette de ne pas avoir pu être là cette fois-ci.
Malgré tout, je pense que nous continuerons d'être en mesure de surveiller les activités du ministère. Nous allons mener une vérification. Ce sera une des institutions que nous examinerons en détail dans les années à venir. Nous disposons d'une certaine capacité pour mener des études et des enquêtes, même s'il est évidemment regrettable de ne pas avoir les données que le formulaire détaillé de recensement nous aurait permis de recueillir.
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Ces temps-ci, je crois que la communauté anglophone du Québec est touchée de plusieurs façons. D'abord, il y a une incompréhension générale concernant la fragilité de cette communauté, surtout en ce qui concerne les communautés anglophones établies à l'extérieur de l'île de Montréal. La majorité francophone a tendance à considérer Montréal comme le seul centre de la communauté anglophone et à comparer les services offerts à Montréal à ceux offerts aux francophones de Sudbury ou de Saint-Boniface.
Si on établit une comparaison avec la situation des anglophones de Sherbrooke, de Québec ou de Gaspé, on voit que c'est beaucoup plus équilibré. Dans le cadre d'une étude qualitative de Statistique Canada, après les résultats de 2006, on a même découvert que même si, objectivement, les gens de la communauté anglophone du Québec disposaient d'institutions et de services importants, ils étaient plutôt pessimistes face à leur avenir. D'un autre côté, même s'ils disposaient de moins de services et d'institutions ou que ces dernières en étaient au début d'un cycle de croissance, les gens des communautés minoritaires à l'extérieur du Québec étaient plus optimistes.
Je pense que cela s'explique par le parcours de la communauté anglophone. Si on compare la population et la force de l'économie de la communauté anglophone d'aujourd'hui par rapport à celles d'il y a 50 ans, il est évident qu'il y a eu une transformation. Par contre, depuis 1982, la création d'écoles, de commissions scolaires et de services de santé francophones un peu partout au pays a donné aux gens des communautés francophones l'impression d'avoir progressé. Ils sont plus optimistes que les anglophones.
Ces deux groupes ont des défis en commun, notamment le vieillissement de la population. Il y a aussi l'exode des jeunes des communautés rurales vers les villes. Par contre, je peux témoigner que bien des gens reviennent vers leur village natal à la retraite. Il y a aussi des jeunes qui ont quitté la Gaspésie ou les Îles-de-la-Madeleine pour aller à l'université ou faire leur service militaire et qui, à l'âge de 30 ans, décident de revenir chez eux pour fonder une famille.
La communauté anglophone des Îles-de-la-Madeleine a un organisme, le Council for Anglophone Magdalen Islanders, dont deux membres de la direction sont de jeunes femmes qui sont revenues aux îles après avoir fait des études universitaires. Elles occupent maintenant des postes de conseillères financières pour des institutions financières. J'avoue que c'est un peu anecdotique, mais ce changement est visible au sein de ces communautés sur le plan du leadership.
:
Merci, monsieur le président.
Juste au cas où M. Galipeau serait inquiet, je veux lui faire savoir que nous appuyons la nomination de M. Fraser. Il reste que comme chien de garde des langues officielles, nous voulons un pitbull et non un chihuahua. Nous voulons qu'il frappe fort. C'est sa responsabilité, en tant que chien de garde des langues officielles, et c'est important. Selon moi, le bilan du gouvernement n'est pas si reluisant que cela.
Nous avons fait une étude sur l'immigration. Nous avons voulu la déposer à la Chambre des communes, mais nous n'avons jamais pu le faire. Nous n'avons pas pu la terminer. C'était de l'argent des contribuables que nous avons dépensé. Une belle étude a été faite et nous aurions pu faire un rapport. Nous avons fait une tournée dans le Grand Nord. Nous sommes allés à Yellowknife et à Whitehorse. Nous sommes allés rencontrer les communautés francophones. Nous avons fait une étude à ce sujet et nous aurions pu faire un rapport afin de le présenter à la Chambre des communes, mais le gouvernement conservateur a refusé.
Il y a eu aussi la nomination du vérificateur général, un anglophone unilingue, puis celle des juges de la Cour suprême. Deux fois de suite, un anglophone unilingue a été nommé.
Pour ce qui est du Programme de contestation judiciaire, une entente hors cours a été conclue. Comme vous le savez, monsieur Fraser, je n'étais pas des plus heureux face à cette situation. Je ne pense pas que ce programme soit le même qu'avant. C'est grâce à lui que des écoles ont été établies dans les régions et que des communautés avaient pu avoir les moyens nécessaires pour survivre. Nous savons ce qui s'est produit, et ce n'est pas un bon bilan.
Il y a eu aussi l'histoire du formulaire long du recensement de Statistique Canada. On pourrait en dire davantage là-dessus. Les conservateurs disent ne pas l'avoir aboli, mais on l'a par contre diminué. C'était des données importantes pour vous, monsieur Fraser, et nous les avons perdues.
Êtes-vous d'accord avec moi?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Fraser, je voudrais revenir sur la question des budgets. Mme Bateman était très optimiste et croyait que les communautés allaient passer au travers sans problème. Or, je ne partage pas cet optimisme. Je voudrais savoir si vous êtes équipé pour suivre la chose et souligner les problèmes que cela risque de poser.
Il y a bien des choses qui m'inquiètent. Premièrement, dans les quatre dernières années, le gouvernement n'a pas augmenté les budgets; il les a même diminués. Dans le cas de Patrimoine canadien, pour la vie communautaire, c'était 62 millions de dollars il y a quatre ans, alors que c'est maintenant 55 millions de dollars — et c'est en dollars courants, donc ce montant ne tient pas compte de l'inflation. Ensuite, un montant de 176 millions de dollars était consacré à l'éducation dans la langue de la minorité, alors que c'est maintenant 166 millions de dollars. Pour la dualité linguistique, c'était 4,4 millions de dollars, alors que c'est maintenant 4,3 millions de dollars. Pour l'apprentissage de la langue seconde, c'était 115 millions de dollars, et c'est tombé à 112 millions de dollars. Cela ne tient pas compte des compressions de 106 millions de dollars que Patrimoine canadien doit essuyer dans les trois prochaines années sur le plan budgétaire, ni des mauvaises nouvelles qu'on pourrait avoir dans le budget.
Ce que je vous dis, c'est qu'on a un immense défi. Quand j'ai soulevé cela auprès du ministre, il m'a dit que je ne tenais pas compte de l'argent de la Feuille de route. Donc, lui-même confirmait que la Feuille de route servait à renflouer les coffres après les compressions, alors que ce n'est pas censé être le cas. C'est censé ajouter des fonds. On ne sait pas quel montant le gouvernement mettra dans la Feuille de route. J'espère qu'il en mettra beaucoup.
Il y a un autre problème. Quand on parle au ministre de ce qui se passe dans les autres ministères, il nous dit d'aller parler aux gens concernés. Il est pourtant le ministre responsable des Langues officielles. Cependant, il n'est pas un interlocuteur générique comme il devrait l'être.
Voici donc mes questions. Premièrement, êtes-vous en mesure de suivre ces compressions à la loupe, étant donné qu'on sait que le gouvernement cultive une opacité budgétaire? Deuxièmement, allez-vous montrer toute la sensibilité nécessaire pour aller au-delà des chiffres?
Je vais vous donner un exemple où j'ai trouvé que vous aviez un peu manqué le coche. Il s'agit de la question de la fermeture du centre de sauvetage de Québec. Votre rapport soulignait les déficiences du bilinguisme à Trenton et à Halifax. Il faut mentionner qu'on va couper le territoire du Québec en deux: on va en envoyer une partie à Trenton et une autre à Halifax pour superviser ce qui se passe dans le Saint-Laurent et dans le golfe. Cependant, je trouvais qu'on ne soulignait pas assez à quel point le niveau de bilinguisme devait être particulièrement exigeant. En effet, quand on a une clientèle en état de choc et dont la vie peut être en danger, elle a besoin de pouvoir parler sa langue avec son accent et d'avoir une réponse extrêmement rapide.
C'était un exemple pour vous signaler que, au-delà des chiffres, il faudra montrer beaucoup de sensibilité. Je reviens aussi sur la question de l'exactitude et de la rigueur. Cela nous permettra d'être mieux équipés, ce comité et les Canadiens en général, pour suivre les conséquences des compressions budgétaires qui s'en viennent, en plus de celles qui ont déjà eu lieu.
:
C'est une très bonne question.
En fait, notre directrice des finances sera présente lors du huis clos du budget afin de consulter les chiffres. J'ai confiance en nos analystes. Ils pourront déchiffrer et analyser ces données. On verra si cela sera suffisant.
Je suis préoccupé par les tendances que vous avez identifiées. Je peux vous dire aussi qu'on a entendu beaucoup d'inquiétudes relativement aux ententes fédérales-provinciales qui touchent des institutions des communautés minoritaires. On procède à une enquête sur le transfert des responsabilités liées à la formation de la main-d'oeuvre de Service Canada en Colombie-Britannique où certaines institutions de communautés ont été délaissées à la suite de ce transfert.
Certaines préoccupations ont été exprimées par des communautés anglophones au Québec, qui craignent que l'entente Québec-Canada ait des répercussions sur le réseau de santé, par exemple, ou les centres d'apprentissage communautaires qui jouent un rôle extrêmement important dans 14 communautés minoritaires éparpillées sur le territoire du Québec.
Si ces ententes font en sorte que cette responsabilité d'accorder de l'argent est transférée directement à la province, cela va accroître l'inquiétude des communautés.
:
Merci, monsieur le président.
Je vais résumer une situation, mais je ne vous demande pas de faire des commentaires parce que vous avez accepté de l'étudier. Je veux juste la présenter pour expliquer à quel point je suis inquiet relativement à un sujet qu'on a déjà abordé, vous et moi, monsieur Fraser.
Chez moi, quelqu'un avait un besoin urgent d'un médicament. Il a communiqué avec le ministère de la Santé, mais les gens à qui il s'est adressé n'ont jamais pu lui parler en français au cours des trois ou quatre semaines qu'a duré ce processus. On a justifié les longues journées d'attente d'une réponse à mes questions par le fait qu'il fallait traduire mes courriels. On parlait d'un médicament d'urgence à Santé Canada et j'ai assuré le suivi constant avec la ministre, mais quand je lui parlé de ces problèmes, elle m'a répondu ceci:
[Traduction]
« N'en faites pas tout un plat. »
[Français]
Quand on parle de décentralisation relativement à la surveillance des services en français des ministères et que vous me parlez d'une étude face à de tels cas troublants, pouvez-vous me dire en quoi cette étude va s'assurer de bien mesurer les conséquences de cette décentralisation? Que prévoyez-vous faire pour qu'on soit rassurés? Vous dites que ce n'est pas nécessairement mauvais. Je veux bien vous croire, mais pour l'instant, mon expérience sur le terrain en tant que député est assez troublante.