Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la 81e séance du Comité permanent des langues officielles, en ce mardi 21 mai 2013. Conformément à l'article 108 du Règlement, nous étudions aujourd'hui les programmes d'immersion dans la seconde langue officielle au Canada.
Nous recevons cet après-midi Mme Sims, de l'Université de Saint-Boniface,
[Traduction]
ainsi que M. Young et M. Sokalski de la Winnipeg School Division.
Je vous souhaite la bienvenue à vous trois.
Je crois que chacun fera une déclaration, que vous condenserez dans une période de 20 minutes pour parler de vos organisations respectives. Sans plus tarder, je vous laisse la parole pour les 20 prochaines minutes.
Monsieur le président, honorables membres du Comité permanent des langues officielles, je vous remercie.
Nous, qui sommes trois éducateurs manitobains, comparaissons avec grand plaisir devant ce comité aujourd'hui pour vous faire part de nos expériences, de nos pratiques exemplaires et de nos recommandations au gouvernement fédéral concernant l'enseignement du français dans un milieu majoritairement anglophone.
Je m'appelle Raymond Sokalski et je suis enseignant de sciences humaines dans le cadre du programme d'immersion française, au niveau secondaire, depuis 23 ans. J'ai enseigné pendant la majeure partie de cette période à l'École secondaire Kelvin, à Winnipeg, près du centre-ville.
Je suis fier d'être accompagné de deux distingués collègues, soit Chris Young, qui est enseignant d'histoire au baccalauréat international, à l'école Kelvin, et Laura Sims, qui est professeur à la Faculté de l'éducation de l'Université de Saint-Boniface. Nous nous connaissons tous depuis longtemps, en tant qu'éducateurs, et nous sommes tous également d'anciens élèves du programme d'immersion.
Nous commencerons par des témoignages qui soulignent comment les programmes d'immersion que nous avons suivis en tant que jeunes ont influencé l'ensemble de nos vies. Nous nous sentons obligés de vous prévenir que si les descriptions de nos cheminements particuliers vous semblent un peu détaillées, c'est parce que nous voulons faire valoir que les programmes auxquels nous avons participé dans le cadre de l'immersion et les organismes communautaires au sein desquels nous nous sommes intégrés bénéficiaient de l'appui du gouvernement fédéral depuis des années et devraient continuer à recevoir ce soutien.
Quant à mon expérience personnelle, je suis pour ma part issu d'une famille d'immigrants. Mes parents, des travailleurs manuels, m'ont inscrit au premier programme d'immersion court établit au Manitoba en 1975. Mes camarades de classe venaient de milieux variés: familles monoparentales, classe ouvrière, familles aisées, etc. Les six années de ce programme et les expériences d'enrichissement qui faisaient partie de mes cours ont marqué le reste de ma vie. Nos manuels d'histoire canadienne venaient du Québec; ils étaient publiés par le gouvernement du Parti québécois, qui était nouveau à l'époque. Nous avons pu bénéficier de conférences au Collège universitaire de Saint-Boniface, de concours de « Génies en herbe », de concours d'art oratoire, de voyages d'échange et d'invités spéciaux, tous subventionnés par le gouvernement fédéral.
Au cours de ma première année d'université, j'ai été page ici, à la Chambre des communes. C'était en 1981, soit l'année où la Loi constitutionnelle a été adoptée. Trois ans plus tard, j'ai fait partie d'un groupe de bénévoles au Sri Lanka dans le cadre du programme Jeunesse Canada Monde. Grâce à ces deux programmes, je me suis lié amitié avec plusieurs jeunes francophones. Tous mes emplois à court terme, que ce soit au sein du comité de la Fête du Canada, au Manitoba, à Service Canada ou en Asie, avec l'Alliance Française, étaient attribuables aux compétences linguistiques que j'avais acquises au cours du programme d'immersion. Ces expériences m'ont amené à compléter mon baccalauréat en éducation à l'Université de Saint-Boniface. J'étais l'un des anglophones, de moins en moins rares, qui fréquentaient le campus francophone.
À ce jour, j'ai eu le privilège d'enseigner à quelque 7 000 élèves. Mon épouse et moi avons deux enfants. Or, depuis leur naissance, il y a 14 ans, je leur parle en français 80 % du temps. C'est leur langue paternelle. Notre famille est alors devenue membre de cette espèce récente que sont les familles anglophones bilingues qui habitent dans l'Ouest canadien.
Tout cela a débuté avec mes études en immersion, ce programme qui avait commencé dans quatre écoles manitobaines il y a 40 ans et qui inclut maintenant des milliers d'élèves à l'échelle de la province. Ils changent la démographie du pays et notre vision de celui-ci.
Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de me permettre de vous adresser la parole aujourd'hui.
Le bilinguisme et les emplois fédéraux ont transformé ma vie. À l'âge de six ans, j'étais inscrit en immersion longue. En 10e année, j'ai entrepris le programme de baccalauréat international qui, malheureusement, n'était offert qu'en anglais. Après mon cours secondaire, j'ai eu peu d'occasions de parler le français et j'ai senti que je perdais doucement ma capacité à parler cette langue.
Par la suite, un coup de téléphone a tout changé. J'ai été embauché pour travailler dans le lieu historique national de Lower Fort Garry. C'est là où j'ai retrouvé mon amour pour le français et ma confiance à le parler.
Pendant ces trois ans, j'ai parlé à des centaines de francophones, dont beaucoup provenaient de différents coins de la Terre. Ces conversations m'ont rendu non seulement plus ouvert d'esprit, mais ont aussi suscité en moi le goût de voyager partout au Canada et dans le monde. Après l'obtention de mon premier diplôme universitaire et désireux de vivre une expérience française, je me suis déplacé à Paris, en France, et ailleurs en Europe. Avec les habitants de ces pays, j'ai souvent joué le rôle d'ambassadeur informel quand je discutais en français à propos du Canada et de son histoire complexe.
Comme étudiant, j'ai eu aussi le grand honneur de vivre avec 10 autres Canadiens et de travailler au monument commémoratif du Canada, à Vimy. Grâce à divers échanges culturels, j'ai pu mieux apprécier diverses perspectives régionales de notre pays. À Vimy, peut-être parce que j'ai vécu avec deux Québécois — soit un anglophone et un francophone —, j'ai développé une fascination pour le Québec et son histoire. Plus tard, toujours mû par cette passion, j'ai déménagé à Montréal pour compléter ma maîtrise. Ma thèse traitait d'une émeute contre la conscription qui a eu lieu à Québec pendant la Première Guerre mondiale. Étant le premier anglophone de l'Ouest canadien à écrire sur le sujet, je suis fier d'avoir offert une perspective unique à l'historiographie.
Toutes ces occasions, qui ont transformé le jeune homme que j'étais, m'ont permis de me développer comme étudiant, comme Canadien et comme citoyen du monde.
Bonjour. C'est un honneur d'être parmi vous. Je m'appelle Laura Sims. Pour moi, l'éducation est source d'espoir.
Vous allez peut-être penser que je suis obsédée, mais permettez-moi de m'expliquer. Il est utile de se rappeler l'importance considérable de notre rôle d'éducateurs et de représentants élus dans une société pluraliste. Au cours des prochaines minutes, je vous invite à réfléchir à la question suivante: Au Canada, quelle est l'utilité de former des citoyens bilingues?
N'hésitez pas à jeter vos idées sur le papier. Je vous donne environ 30 secondes. Au Canada, quelle est l'utilité de former des citoyens bilingues? Il vous reste encore 10 secondes.
Merci beaucoup. Nous pourrons, espérons-le, aborder cette question plus en détail.
Dans cet esprit, je lirai ma déclaration dans les deux langues. J'estime que le bilinguisme est une forme de respect manifesté envers les deux communautés linguistiques.
[Français]
Avant de me présenter devant vous aujourd'hui, je me suis posé la question suivante: comment l'immersion a-t-elle changé ma vie?
Honnêtement, je peux dire que le fait d'avoir appris le français et d'avoir eu accès à toutes sortes d'activités d'immersion authentiques m'a offert la possibilité d'une vie beaucoup plus riche en expériences, en aventures, en amitiés et en possibilités éducatives et professionnelles que si je ne l'avais pas appris. Je considère l'immersion comme l'ensemble des expériences éducatives formelles et informelles offertes ici au Canada et ailleurs.
Comme Raymond, j'ai amorcé un programme d'immersion à l'âge de 12 ans. Ensuite, j'ai pu découvrir la culture québécoise et acadienne par l'entremise du Programme de bourses d'été de langues. Cela m'a permis de mieux reconnaître notre diversité culturelle et les enjeux auxquels font face ces communautés. L'apprentissage du français langue seconde m'a ouvert les yeux sur la valeur et l'utilité d'apprendre d'autres langues et m'a donné les bases linguistiques pour les apprendre plus facilement. Par conséquent, j'ai pu apprendre l'espagnol.
En parlant couramment trois langues, j'ai pu voyager avec facilité autour du monde — en Afrique, en Europe, en Asie, au Canada et en Amérique latine — et tisser des amitiés partout où je suis allée. J'ai pu étudier en Amérique latine et y faire mes recherches de maîtrise et de doctorat en espagnol. Cette habileté m'a aussi permis de m'épanouir sur le plan professionnel, car j'ai été enseignante pendant dix ans pour le programme d'immersion française à Winnipeg et pour le programme d'immersion anglaise en République dominicaine. Ensuite, j'ai pu gérer un projet mis en avant par l'Agence canadienne de développement international en Amérique centrale et au Canada.
Dans mon travail actuel à l'Université de Saint-Boniface, je suis absolument ravie de pouvoir enseigner en français et faire mes recherches dans les trois langues. En travaillant à l'Université de Saint-Boniface, la seule université francophone de l'Ouest canadien, cela m'a permis d'une manière directe et authentique de mieux comprendre ma communauté, surtout les contributions de la communauté franco-manitobaine.
Je vais maintenant parler de nos pratiques exemplaires.
En tant qu'enseignant, dans la salle de classe, je note que les meilleurs résultats sont atteints lorsqu'on offre aux élèves des expériences authentiques, soit dans la salle de classe, soit à l'extérieur de celle-ci. Dans mes cours, les élèves et moi décidons ensemble de la façon d'arriver à s'exprimer avec plus de confiance dans notre langue seconde. Au début, il faut travailler intensément avec les élèves pour qu'ils saisissent l'importance de s'exprimer en français entre eux. La confiance leur vient au fur et à mesure qu'ils sont exposés à des situations authentiques.
À l'École secondaire Kelvin, notre équipe d'immersion a lancé il y a deux ans une série d'évaluations orales pour tous les élèves, et ce, individuellement ainsi qu'en petits groupes. Cela se fait de façon interdisciplinaire.
Par exemple, une enseignante de sciences naturelles travaille de pair avec une enseignante de sciences humaines pour questionner, au cours d'une session de 20 minutes, un élève au sujet d'un article qu'il a choisi. De cette manière, nous essayons d'injecter un brin d'authenticité dans nos entretiens avec les élèves. Nous leur donnons l'occasion d'interagir intensément dans leur deuxième langue et de recevoir des mots d'encouragement ainsi que des suggestions pour améliorer leur expression orale.
Les jeux de rôle font aussi partie des activités authentiques. Par exemple, nous avons recréé les négociations ayant mené à la signature du Traité No 5 avec les Cris, à Norway House. Nous avons aussi tenu des débats parlementaires sur la réforme du Sénat. Je vous jure que j'ai écrit cela il y a quelques semaines. Par ailleurs, les élèves apprennent à mieux connaître des artistes francophones en créant leurs propres interprétations des questions sociales soulevées par les Cowboys fringants ou des rappeurs congolais, par exemple.
Ce que j'observe en préparant mes leçons, c'est la nécessité de creuser pour trouver des ressources pédagogiques authentiques et pancanadiennes pour les apprenants de langue seconde. C'est justement dans ce domaine que, selon moi, le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle. Je crois que nous avons besoin de plus de documentaires qui racontent l'histoire du Canada dans son entier, dans les deux langues.
Un exemple de cela est la série télévisée 8e feu, qui a été produite récemment par CBC/Radio-Canada. C'est une série extraordinaire. Dans bien des cas, c'est la première fois que mes élèves ont l'occasion d'écouter des Autochtones francophones discuter de problèmes actuels à la lumière de l'histoire canadienne. Qui plus est, la série offre une vision nationale, d'un océan à l'autre, à l'autre.
Cette série m'apparaît plutôt comme étant l'exception à la règle. Par exemple, si vous essayez de trouver une représentation du procès de Louis Riel dans les archives de Radio-Canada, vous chercherez en vain. C'est étonnant, compte tenu qu'il avait la vision d'une province valorisant les deux communautés linguistiques ainsi que celle des Autochtones, dans l'Ouest canadien. Pourtant, la popularité de la série Le Canada: Une histoire populaire a été remarquable. Les exemples de manque de ressources sont donc nombreux. Nous pourrions en discuter pendant la période de questions et de réponses qui va suivre.
Il en va de même pour les manuels scolaires, les jeux-questionnaires et d'autres ressources pédagogiques. Il faut fournir aux apprenants et aux éducateurs davantage de ces ressources qui sont le fruit d'une collaboration entre artistes et écrivains, entre réalisateurs et documentaristes ou entre historiens et politicologues issus des deux communautés linguistiques. Il s'agit de raconter davantage nos histoires et de leur donner une résonnance pancanadienne en langue française.
Comme c'est le cas pour tous les enseignants, les expériences de ma vie font partie de ce que j'apporte en classe. Les occasions dont j'ai pu profiter, que ce soit grâce au gouvernement fédéral — souvent dans un environnement bilingue — ou comme étudiant et comme enseignant, m'ont donné la possibilité de m'épanouir professionnellement.
Lors d'une conférence de l'Institut Historica-Dominion à Montréal, j'ai discuté du passé, du présent et du futur de notre pays avec d'autres enseignants qui provenaient de toutes les régions.
Lors de la Conférence des enseignants, j'ai appris beaucoup de choses à propos de notre système parlementaire. J'ai aussi pu apprécier l'esprit bilingue à Ottawa.
L'été prochain, je serai en France et je participerai à The Cleghorn War and Memory Study Tour. Avec 18 Canadiens, je vais acquérir de meilleures connaissances sur le rôle que nos soldats anglophones et francophones ont joué pendant les deux guerres mondiales.
Pour les éducateurs, ces expériences à l'extérieur de la classe sont riches et inestimables, mais les élèves sont les vrais gagnants. En classe, ils seront exposés à un plus large éventail de points de vue. Ils vont mieux comprendre leur pays et le monde entier. Ils seront de meilleurs citoyens.
Dans ma classe, à cause de ma propre expérience, j'ai toujours passé du temps à enseigner l'histoire du Canada français. J'essaie, autant que possible, de présenter à mes élèves des perspectives multiples lors de l'étude de sujets comme la crise d'Octobre, la conscription et les référendums au Québec, entre autres.
Par exemple, lors d'un séminaire la semaine dernière, mes élèves ont analysé divers articles sur la bataille des Plaines d'Abraham et la Conquête écrits par des anglophones et des francophones. Comme facilitateur, j'ai dirigé la discussion en incorporant des anecdotes personnelles tirées de mes études à Montréal et de mes visites aux Plaines d'Abraham. Je trouve que ces pratiques aident les anglophones de l'Ouest à mieux comprendre une histoire complexe et nouvelle et, en même temps, cela développe l'empathie pour les luttes des Canadiens français.
Souvent, nos élèves et les enseignants peuvent vivre l'histoire et le français à l'extérieur de la salle de classe. Pendant plusieurs années, Raymond et moi avons amené nos élèves faire une promenade historique de la ville. À Saint-Boniface, nos étudiants interprètent l'héritage du chef métis Louis Riel en allant voir sa statue controversée et son tombeau. Pour certains élèves, il s'agit de leur première rencontre de la communauté francophone et de leur première visite à l'Université de Saint-Boniface.
Récemment, j'ai organisé une sortie de classe un peu plus ambitieuse. J'ai dirigé un voyage d'étudiants en France et en Belgique afin de visiter les champs de batailles canadiens des guerres mondiales. Pour mes élèves, c'était une expérience authentique et profonde. Ils étaient exposés non seulement à une histoire poignante, mais ils étaient aussi immergés dans les cultures française et belge. On a visité plusieurs cimetières canadiens. Pour rendre hommage aux soldats morts de notre école, mes étudiants ont réalisé une vidéo souvenir partiellement bilingue. Lors du 100e anniversaire de l’École secondaire Kelvin, qui a eu lieu l'année dernière, la vidéo a été présentée à nos élèves et à la communauté.
J'enseigne à la Faculté de l'éducation d'une université francophone. Je pense qu'offrir des occasions intéressantes d'expérimenter la langue, de comprendre son importance et de se perfectionner constitue l'une des meilleures façons de former les futurs enseignants aux classes d'immersion et de perfectionner ceux qui y enseignent déjà. Il faudrait donc appuyer les organismes culturels dans les collectivités où nous vivons afin que tous les citoyens soient mis à contribution et puissent en tirer profit.
Pour inspirer les étudiants, les enseignants doivent être passionnés de ce qu'ils enseignent et posséder les connaissances nécessaires. Pour que les étudiants et les enseignants enrichissent notre littératie culturelle, ils doivent expérimenter la langue par l'intermédiaire de la littérature, du théâtre, des arts, du sport, des lieux historiques, des festivals et des musées.
Il faut donc avoir accès aux ressources qui reflètent vraiment notre identité collective; il faut vivre l'expérience des cultures francophones dans l'ensemble du pays et du monde par l'intermédiaire de programmes merveilleux comme Bourses d'été de langue, Jeunesse Canada Monde et Katimavik; il faut avoir la possibilité d'étudier et de travailler dans les deux langues partout au pays.
On peut améliorer notre savoir-faire culturel et notre intégration sociale à titre de Canadiens en appuyant des établissements d'enseignement comme l'Université de Saint-Boniface et des organismes culturels francophones en milieu minoritaire comme le Festival théâtre-jeunesse ou la Maison Gabrielle-Roy.
Nous pensons que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer sur le plan de la promotion du bilinguisme. À cet égard, nous avons deux recommandations à formuler.
Premièrement, le gouvernement devrait fournir davantage de fonds pour financer des ressources pédagogiques qui s'adressent aux élèves en immersion et des ressources qui appuient l'enseignement de toute l'histoire du Canada.
Deuxièmement, nous pensons que le gouvernement doit continuer à appuyer les expériences authentiques que peuvent vivre les étudiants et les enseignants à l'extérieur de la salle de classe. C'est grâce à ces programmes divers et à l'appui offert aux musées, aux échanges et aux groupes communautaires que nous sommes ici tous les trois, aujourd'hui, pour vous en parler.
Le bilinguisme officiel comporte une grande valeur qui nous inspire en tant qu'éducateurs. Il s'agit du don que constitue une vision élargie de notre pays et de notre monde. Je vous invite à examiner une photo que j'ai apportée. Pour ceux qui ne l'ont pas encore entre les mains, on y voit une plaque historique au lieu historique national du Canada de La Fourche, qui est censée expliquer la création du Manitoba. C'est l'un des points d'intérêts que nos élèves consultent quand ils font leur chasse à l'information dans le quartier historique et à Saint-Boniface pour étudier le fait français à Winnipeg.
Cette plaque est également accrochée sur un mur de l'Assemblée législative du Manitoba.
[Traduction]
Comme vous pouvez le constater, dans la version anglaise, Riel s'est emparé par la force du pouvoir détenu par le gouverneur Mactavish qui était malade.
[Français]
Cependant, dans la version française, on apprend que les habitants de la rivière Rouge ont constitué un gouvernement provisoire.
Un observateur unilingue ne remarquerait pas la différence très importante entre ces deux résumés historiques. Nos élèves en immersion, ayant profité de certaines ressources, ayant rencontré des gens et visité des lieux authentiques, s'en rendent compte immédiatement. Cet exemple illustre tout ce qu'offre ce programme d'enseignement et, en particulier, tout ce qu'offrent les programmes et les ressources fédérales dont ce programme dépend.
Il s'agit non seulement de l'accès à une langue qui n'était pas la leur au début, mais aussi de l'accès à des perspectives multiples sur le monde qui leur permet d'être d'avantage en mesure de trouver leur propre identité en connaissant les perspectives d'autrui. C'est ce qu'il faut promouvoir, protéger et améliorer.
En conclusion, je vous invite à sortir vraiment des sentiers battus face aux programmes d'immersion. Le bilinguisme revêt beaucoup plus qu'une simple valeur économique.
Apprendre d'autres langues favorise la cohésion sociale du pays en favorisant la communication, le savoir-faire culturel et l'acceptation interculturelle.
Cela fait de nous de meilleures personnes et contribue à notre essor économique, les Canadiens ayant ainsi la marge de manoeuvre nécessaire pour travailler partout au pays.
Cela nous permet également de forger notre identité collective en enrichissant notre identité culturelle individuelle comme francophone ou anglophone au Canada, de sorte que chaque communauté respecte et appuie l'autre communauté au sein d'une société canadienne pluraliste épanouie et enrichie.
Avant de donner la parole à M. Godin, je voudrais faire remarquer à mes collègues que la greffière vous a distribué des exemplaires de l'Entente Canada-Manitoba relative à l'enseignement dans la langue de la minorité et à l'enseignement de la seconde langue officielle 2009-2010 à 2012-2013. Vous avez reçu le tout par courriel. Je vous demanderais de vous reporter à ce document sur lequel mise le gouvernement fédéral pour financer l'enseignement dans la langue de la minorité et l'enseignement de la seconde langue officielle au Manitoba.
Notre analyste voudrait obtenir de vous des recommandations sur la façon d'améliorer cette entente qui a pris fin il y a environ un mois, soit le 30 avril, et qui doit être reconduite pour cinq ans.
Vous avez reçu ce matin par courriel ce volumineux document dans les deux langues officielles.
Veuillez vous y reporter pour que vos questions portent sur les améliorations de cette entente. Cela nous faciliterait considérablement la tâche lorsque nous rédigerons notre rapport.
Nous avons, je pense, quelques exemplaires supplémentaires que vous pourrez consulter pendant la séance.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Je pense que Mme Sims a côtoyé des gens de l'Acadie et est tombée en amour avec l'Acadie. Bienvenue.
J'ai écouté vos propos et cela me donne le goût de vous envoyer tous les trois rencontrer le premier ministre, à titre d'ambassadeurs, pour faire la promotion du bilinguisme et faire passer le message que les juges de la Cour suprême et les agents du Parlement devraient être bilingues. Cela enverrait un beau message à tous les Canadiens et les Canadiennes pour dire que le gouvernement respecte les deux langues officielles et que cela commence par le haut. Seriez-vous d'accord avec moi?
J'aimerais simplement préciser que nous parlons à titre personnel. Je ne parle pas au nom de l'Université de Saint-Boniface, où je travaille. Je travaille aussi à l'école secondaire Kelvin.
Je veux simplement vous dire que je ne représente personne d'autre que Laura Sims, tout comme mes collègues ne représentent qu'eux-mêmes. Selon moi, ce programme était excellent. Je n'y ai jamais participé, mais d'après ce que je comprends, il était excellent et j'aimerais qu'il continue. Je sais que le financement a été aboli, mais j'aimerais bien que cela continue parce que c'est un excellent programme .
J'allais simplement ajouter que tout le monde qui apprend une deuxième langue connaît ce moment de bouleversement. Si on avait commencé à apprendre une langue dans une salle de classe, ce qui ne peut être qu'un peu stérile comparativement au monde réel, on n'aurait probablement pas connu ce moment de bouleversement.
Je parle de ce que l'on vit lorsqu'on est vraiment immergé dans une société totalement nouvelle. C'est là que l'on se rend compte pourquoi on apprend cette langue. On comprend que c'est pour avoir de tels entretiens que l'on apprend cette langue. De tels moments arrivent justement quand on participe à des programmes comme Katimavik, à savoir lorsqu'on est dans un lieu complètement nouveau et entouré par des gens qui sont complètement différents de soi. Ce genre d'expérience est plutôt rare, mais il faut vraiment les susciter le plus possible. Katimavik est un exemple. Jeunesse Canada Monde en est un autre, tout comme le programme Rencontres du Canada et le Forum pour jeunes Canadiens. On a essayé de donner des petits exemples de ces programmes dans nos propos.
Je dirai rapidement que je n'ai pas participé à Katimavik, mais certains de mes étudiants l'ont fait et c'était, selon eux, une expérience absolument incroyable. Ils ont voyagé partout au Canada et ont rencontré différentes communautés. Ils ont dit que cela les avait transformés. Je crois, comme je l'ai dit lors de ma présentation, que ces programmes sont très, très importants pour notre pays, pour le bilinguisme et pour devenir plus ouverts.
Je voudrais aussi aborder la question de l'âge auquel on devrait commencer l'école d'immersion.
Quand il y a eu des changements à ce sujet, je ne vous le cacherai pas, les gens au Nouveau-Brunswick étaient déçus. C'était le cas même pour des anglophones. Je n'aurais jamais cru qu'il y aurait 350 anglophones pour manifester devant l'Assemblée législative à Fredericton et dire qu'ils voulaient apprendre le français. Quand le gouvernement provincial a indiqué que le programme commencerait à la 5e année, des parents ont manifesté leur opposition à cette mesure. Finalement, il a baissé cela à la 3e année. Toutefois, des experts nous disent que plus on commence jeune, le mieux c'est.
Vous êtes des experts. Vous ne voulez pas parler au nom de votre institution, mais j'aimerais entendre ce que vous pensez, en votre nom personnel. Vous êtes des enseignants. À quel âge et en quelle année pensez-vous que cela devrait commencer?
J'ai commencé en 7e année, tout comme Laura. Vous avez donc devant vous deux produits de l'immersion courte et un produit de l'immersion longue, soit Chris. Pour moi, la question essentielle est celle des appuis et des activités parascolaires qui seront offerts dans le cadre de tel ou tel programme d'immersion, qu'il s'agisse de l'immersion courte ou de l'immersion longue. Pour moi, c'est la question essentielle. Il s'agit de savoir quels appuis professionnels accompagnent ce programme ou l'autre programme.
En matière de soutien professionnel, des témoins précédents nous ont dit que des professeurs manquaient d'expérience ou n'avaient pas les compétences requises. Ils se sont précipités dans ce domaine sans vraiment avoir les compétences nécessaires. Selon vous, quel aide le gouvernement fédéral peut-il apporter pour transmettre ces compétences?
L'éducation étant assujettie à la législation provinciale, on patine donc sur de la glace mince. En vertu de sa responsabilité en la matière et en vertu l'article 43 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles portant sur la promotion des langues, quelles dépenses le gouvernement fédéral peut-il faire pour aider les provinces à mettre en avant ce type de programmes? Que lui recommanderiez-vous de faire?
Comme il dispose d'un plus grosse sacoche que les provinces, que pourrait faire le gouvernement fédéral pour aider les provinces en matière d'éducation?
Pour ma part, j'ai participé à un programme d'immersion jusqu'à la neuvième année. Par la suite, j'ai participé au programme de baccalauréat international, le BI, qui était une formation offerte en anglais. Je perdais donc mes connaissances du français.
Je ne suis pas allé au collège, mais plutôt à l'Université de Winnipeg où j'ai obtenu mon premier diplôme. J'aurais bien aimé poursuivre mes études en français, mais ce n'était pas possible parce que les cours n'étaient offerts qu'en anglais. Je suis allé à l'extérieur de la province pour faire des études en histoire.
En ce qui concerne les pouvoirs provinciaux et fédéraux, je recommanderais, si possible, de mettre sur pied plus de programmes d'immersion au niveau postsecondaire dans les universités où il y a cette possibilité. Je sais qu'on offre cette possibilité à l'Université d'Ottawa. Je crois aussi que les étudiants en droit de l'Université McGill ont aussi cette possibilité. C'est ce que j'aurais fait. Comme je l'ai dit dans mon discours, c'est grâce au programme national offert à Lower Fort Garry que je parle le français aujourd'hui.
Un anglophone de Winnipeg, qui ne connaît pas la communauté francophone et qui n'étudie qu'en anglais à l'Université de Winnipeg, n'aura pas la possibilité de parler le français. Il pourrait s'inscrire à des cours offerts par l'Alliance française ou à d'autres cours du genre, mais sa motivation doit vraiment être très intrinsèque.
Comme je l'ai dit, Lower Fort Garry a été ma porte d'entrée car j'ai pu, grâce à ce programme, parler à nouveau en français.
Je remercie nos témoins d'être ici parmi nous. Vous êtes des témoins extraordinaires et des enseignants dévoués. Vous faites une grande différence dans la vie de vos étudiants, ce qui constitue, à mon avis, un accomplissement extraordinaire.
Je dois clarifier certaines choses. Dans le cadre de la question que nous abordons aujourd'hui, on a mentionné qu'une grande partie du protocole d'entente entre le Canada et le Manitoba concerne la Division scolaire franco-manitobaine, la DSFM, soit une partie de notre système d'éducation.
Est-ce possible, monsieur le président, de ne pas utiliser le temps qui m'est alloué pour des questions, car je veux apporter une clarification?
À mon avis, c'est très important de bien comprendre que ce protocole d'entente comprend à la fois la DSFM et les programmes d'immersion dans les écoles. Nos témoins aujourd'hui viennent seulement des écoles d'immersion. C'est une distinction très importante à faire à l'occasion de nos délibérations. De plus...
C'est très important que tous les membres du comité comprennent bien que le protocole d'entente que vous avez suggéré afin d'encadrer les questions d'aujourd'hui, inclut des choses plus grandes que l'expérience de nos témoins extraordinaires, telles que la DSFM, par exemple.
C'est mentionné dans le document. C'est une bonne leçon.
[Traduction]
J'aurais dû lire le document, mais je ne l'ai reçu que ce midi. Il est très important de comprendre que nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les témoins abordent cette question aujourd'hui. Ils ont beaucoup d'expérience par rapport au programme d'immersion. Je tenais simplement à ce que cela soit bien compris, parce que je ne crois pas que ce soit exactement... À moins peut-être que d'autres témoins viennent nous en parler.
[Français]
Comme je l'ai dit, mes enfants ont bénéficié de vos compétences d'enseignant. J'ai vraiment beaucoup de chance.
Ma question est reliée à la vôtre, madame Sims.
[Traduction]
Pourquoi le bilinguisme est-il important pour chacun d'entre nous?
[Français]
Monsieur Young, vous avez parlé de votre expérience en matière d'histoire ainsi que des recherches menées par vos enseignants.
Monsieur Sokalski, vous intégrez toujours des aspects comme l'immigration dans vos cours de sciences humaines. Pourriez-vous parler à mes collègues ici présents de votre expérience, de la réalité que vous avez découverte et de l'enrichissement que représente le fait d'intégrer l'histoire de notre pays dans une autre langue?
J'enseigne à des élèves de 9e année au Manitoba. Ils ont 14 ans. D'ici trois ou quatre jours, ils vont tenir des débats parlementaires dans la salle de classe. Celle-ci est aménagée comme la Chambre des communes. Il y a le côté du gouvernement et celui de l'opposition. Ils traiteront de questions classiques, si on peut dire, mais aussi de questions d'actualité.
Cette année, nous allons débattre du rôle de la monarchie, étant donné qu'un jeune prince et un moins jeune prince vont peut-être prendre le pouvoir d'ici quelques années. Dans une perspective d'enrichissement, nous allons traiter de questions liées à l'immigration. Nous allons aborder, par exemple, le nombre de réfugiés qui devraient être admis respectivement dans la catégorie économique et dans la catégorie des familles.
Notre défi consiste à créer des occasions pour permettre aux élèves de s'exprimer avec confiance en se basant sur des recherches qu'ils ont effectuées en français. Cela demande toute la créativité possible. Parfois, il est un peu difficile de trouver du matériel approprié à leur niveau de langue.
J'essaie de recourir beaucoup à la créativité, de faire vivre l'histoire dans ma salle de classe, de faire valoir aux élèves que l'histoire est très dynamique et que les perspectives sont multiples. Comme je l'ai dit plus tôt, j'intègre beaucoup d'expériences personnelles dans mes cours.
En écoutant Chris, j'ai pensé au fait qu'il était de plus en plus possible pour les jeunes d'interviewer d'anciens élèves qui se sentent maintenant beaucoup plus à l'aise en français.
Par exemple, quand on étudie les questions touchant l'immigration, chaque élève doit chercher quelqu'un qui a une histoire d'immigration à son actif. J'ai souvent demandé à un ancien élève de s'exprimer en français lors d'une interview dans cette langue avec mes élèves de 14 ans. Ils racontaient à cette occasion des histoires passionnantes, par exemple sur la façon dont ils s'étaient enfuis de l'Afghanistan ou du Congo. Quand on parle du Congo, on parle de francophones, de personnes pour qui le français est la langue maternelle.
Ces expériences sont vraiment des bijoux pour les élèves, parce qu'elles sont authentiques. En outre, ce n'est pas l'enseignant qui parle devant la classe. Nous essayons en effet d'éviter cela le plus possible.
Encore une fois, j'espère que vous ne penserez pas que je suis obsédée par les détails.
J'enseigne dans une université francophone. Je suis anglophone de naissance, et je suis convaincue que nous pouvons tous apporter notre pierre à l'édifice.
J'enseigne à la Faculté de l'éducation de l'Université de Saint-Boniface. Je donne tous les cours portant sur la diversité, entre autres la diversité culturelle, et sur les perspectives autochtones. En me regardant, vous savez que je ne suis pas une Autochtone. La pâleur de mon teint saute aux yeux. Néanmoins, j'estime que, à titre d'anglophones, nous pouvons faire front commun pour favoriser le bilinguisme au Canada.
Comme Ray et Chris, j'aime beaucoup inviter certaines personnes dans mes cours, parce que nous devons... Par exemple, dans mon cours sur les perspectives autochtones, j'ai recours à des Autochtones pour la cérémonie de la suerie, notamment, car j'estime que... Je précise également que certains de mes étudiants sont originaires du Togo. Comme ils ne parlent pas anglais, vous devez songer à des moyens pour combler cette lacune. Tous les cours étant donnés en français, nous devons avoir recours à un interprète. Plutôt que de ne voir que le problème, nous cherchons des solutions pour répondre aux besoins des étudiants francophones.
Je voudrais ajouter — tout en espérant, encore une fois, que vous ne penserez pas que je suis obsédée — que, si les gens étaient d'une certaine couleur, par exemple orange, rouge ou beige, je me dirais alors: « Ah! Imaginez... » Ce qui nous distingue comme pays c'est que nous avons toute la gamme des couleurs sur le plan de la diversité. Ce qui me fait peur, c'est la monotonie de l'unilinguisme, la couleur beige.
Je remercie les trois témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Si vous l'avez consultée attentivement, j'aimerais savoir ce que vous pensez de l'Entente Canada-Manitoba et du Plan d'action pour les langues officielles au Manitoba.
C'est un peu un problème parce que c'est ce que nous devons aborder.
J'ai beaucoup d'admiration pour vos histoires de vie mais, comme législateur, je veux évaluer ce que je peux faire. Vous nous avez suggéré deux idées, mais je ne sais pas si elles sont déjà dans le plan du gouvernement manitobain. Si c'est le cas, il s'agirait d'un double emploi. Nous ne pouvons pas inclure des éléments dans notre rapport sans tous les vérifier.
Il est question d'un fonds pour les ressources pédagogiques. Est-ce qu'il y a quelque chose dans le plan à ce sujet? De plus, vous comprendrez qu'il est difficile pour le gouvernement fédéral de créer un fonds pour les ressources pédagogiques. C'est un peu loin de notre compétence. Je ne sais pas si un seul fonctionnaire fédéral connaît les ressources pédagogiques. Normalement, quand on connaît ce domaine, c'est qu'on travaille au niveau provincial et non au niveau fédéral.
C'était d'appuyer davantage les expériences authentiques destinées aux étudiants et aux enseignants à l'extérieur de la salle de classe. On parle ici notamment de programmes comme Youth Forum, Katimavik et Explore.
En ce qui concerne les ressources pédagogiques, nous nous demandons si le gouvernement fédéral pourrait avoir comme rôle de subventionner des auteurs pour qu'ils écrivent des manuels destinés à des étudiants en immersion, par exemple. Il y a quelques années, un étudiant de Raymond, un anglophone de Winnipeg, a écrit un manuel d'histoire en français. Bien sûr, la perspective est toujours un peu différente.
C'est un ancien élève qui a fait ses études de doctorat à l'Université Laval. Il s'agit de Matthew Rankin, un ancien élève de l'école secondaire Kelvin. Il a fait un doctorat en histoire à cette université. Il a produit un manuel qui est génial pour nous qui étudions l'histoire canadienne en français dans l'Ouest canadien. Il met l'accent non seulement sur les grandes questions anglophones et francophones centrées sur le Québec, mais il y a aussi un accent spécial sur la lutte pour le fait français dans l'Ouest canadien.
En termes de ressources pédagogiques, nous reconnaissons bien que c'est un domaine largement provincial. Toutefois, quand je visite le site Web de l'Institut Historica-Dominion et que je clique sur un jeu-questionnaire, on ne peut le consulter qu'en anglais. Je me dis que c'est dommage qu'il n'y ait pas eu un peu plus de fonds destinés à cet institut pour qu'il puisse développer un jeu-questionnaire en français.
Oui, il y a toute une gamme d'émissions à CBC/Radio-Canada. Certaines existent en anglais mais pas en français. Il y a eu des émissions comme Canada's Next Great Prime Minister. La Plus Grande Personnalité canadienne existe comme page Web, mais il n'y a aucun apport vidéo. Ce sont de petits extraits de 10 minutes.
Je crois que les écoles d'immersion vont bien. Les idées que vous nous soumettez vont peut-être permettre que ça aille mieux. Toutefois, je ne suis pas certain que l'apprentissage du français dans son ensemble aille bien. Voilà ce qui m'inquiète.
D'après les données que j'ai ici, il y a 181 000 élèves dans le système public manitobain. C'est à la hausse. Il y en a environ 5 000 dans la division francophone. C'est à la hausse. Il y a environ 21 000 élèves dans les écoles d'immersion. C'est à la hausse. C'est bon.
Cependant, voici où commencent les mauvaises nouvelles. L'apprentissage du français dans les écoles anglophones régulières — on parle je crois de 61 000 élèves — connaît une forte baisse. En 1990, il y en avait 90 000. C'est donc dire qu'on en a perdu le tiers. C'est un peu la même chose dans le secteur privé. Il reste donc 94 000 élèves anglophones qui n'ont à peu près pas l'occasion d'apprendre le français au Manitoba.
Avez-vous une explication à ce sujet? Les écoles d'immersion sont en quelque sorte la façade derrière laquelle on peut voir qu'il y a un recul. Or ce recul m'inquiète énormément.
Je ne prétends pas être experte dans ce domaine, mais à l'élémentaire, c'est maintenant la personne qui enseigne tous les cours qui enseigne le français, ce qu'on appelle le basic french. Imaginez des personnes qui ne sont pas à l'aise en français ou ne le parlent pas et qui doivent tout de même l'enseigner en 3e, 4e et 5e années. C'est difficile. Comme je l'ai mentionné, il faut que l'enseignant ou l'enseignante soit passionné par ce qu'il ou elle enseigne.
La politique a changé. Maintenant, il n'est plus nécessaire que le français soit enseigné par une personne qui parle très bien cette langue. Les élèves commencent peut-être à vivre des expériences négatives ou à développer une attitude qui ne valorise pas la langue.
C'est un autre problème. Les cours que les 61 000 élèves suivent en français dans ces écoles sont peut-être de moins bonne qualité qu'auparavant. Il reste que 94 000 élèves n'ont même pas de cours de français.
C'est ce que disent les statistiques que j'ai ici. En plus, c'est à la hausse.
Je ne sais pas si, à partir de vos postes dans des écoles d'immersion, vous observez ce recul dans les autres types d'écoles et si vous êtes en mesure d'expliquer ce phénomène.
Non. Nous sommes venus parler d'immersion. Nous remarquons qu'il y a une hausse des inscriptions en immersion. Vous avez vous-même mentionné cette augmentation. Je suis heureux de voir qu'au Manitoba, contrairement à ce qui se passe dans d'autres provinces, il semble y avoir moins de stress associé à l'inscription. Les parents qui désirent inscrire leurs enfants dans un programme d'immersion peuvent en effet avoir accès à celui-ci.
Pour ma part, ma clientèle couvre pratiquement toute la ville de Winnipeg. Ces élèves viennent aussi bien de quartiers défavorisés que de quartiers très favorisés. Il y a un bon mélange et il semble que personne ne doive passer la nuit dans un stationnement afin d'être le premier dans la file pour inscrire son enfant. La demande et l'offre semblent passablement équilibrées, et nous nous en réjouissons.
C'était intéressant de vous entendre, particulièrement lors de votre présentation, quand vous avez parlé des occasions que vous avez eues, en tant qu'anglophones, d'apprendre le français. Vous m'arrêterez si vous trouvez que j'en rajoute trop, mais on aimerait que tous les Canadiens puissent profiter d'occasions de ce genre, à savoir que les anglophones puissent parler le français et que les francophones puissent parler l'anglais. Notre étude porte sur les écoles d'immersion. Comme on le sait, c'est une compétence surtout provinciale, mais le gouvernement fédéral peut fournir un apport.
Monsieur Sokalski, j'ai bien aimé ce que vous avez dit au sujet de la programmation possible du côté de CBC/Radio-Canada.
Est-ce qu'un effort supplémentaire pourrait être fait en vue de vous offrir plus de matériel en français, dans le cas des émissions anglophones, ou des émissions francophones pouvant être traduites en anglais, ou encore des émissions comportant les deux langues en même temps? On en a déjà parlé dans le cadre du comité.
S'agit-il d'un outil qui pourrait être avantageux pour vous, en ce sens qu'il aiderait vos étudiants à poursuivre leur travail?
Je suis toutefois partagé sur cette question, car il pourrait y avoir des problèmes. Je suis effectivement intéressé à avoir accès à des programmes destinés à des francophones au Québec. J'ai présentement accès à des émissions comme Pérusse Cité, où un ministre adjoint donne ses conseils à un ministre de l'Environnement fictif au Québec. J'ai donc déjà accès à ce genre de programmation.
La question n'est pas d'avoir accès à une traduction anglaise de ces programmes qui sont en français, puisque le français qu'on y diffuse est assez clair. Ce qui pose problème, c'est que ces émissions sont tellement centrées sur le Québec que leur utilité pour mes élèves au Manitoba peut être remise en question. En regardant ces émissions, ils peuvent comprendre un peu la réalité québécoise et écouter des tournures de phrases québécoises. Tout cela est très utile, mais j'aimerais que quelqu'un invente le même genre de programmation qui parlerait plutôt d'un ministre fédéral afin que mes élèves puissent mieux comprendre le système fédéral au Canada.
Je nommerai d'autres émissions pour ceux qui ne sont pas familiers avec l'émission Pérusse Cité. Certaines émissions se moquent des politiciens, telles que Et Dieu créa... Laflaque, ou son équivalent anglais, The Rick Mercer Report. N'est-ce pas? Ces émissions essaient d'éduquer les Canadiens en même temps qu'elles critiquent certains aspects du système gouvernemental. Il ne s'agit pas d'une leçon en tant que telle, mais c'est certainement une façon accrocheuse de présenter une leçon.
Rick Mercer parle de l'ensemble du Canada, mais peut-être pas assez du Canada français. C'est vrai. Ce que je recherche, c'est quelque chose en français qui parle de l'ensemble du Canada.
Vous comprendrez que les ressources financières en viennent tôt ou tard à être limitées.
Tout à l'heure, vous avez parlé du programme Katimavik, qui coûte pratiquement 30 000 $ par personne et auquel ne peuvent participer qu'environ 500 personnes par année. Est-il mieux de financer de tels programmes ou de plutôt donner la chance à 5 millions de jeunes Canadiens d'avoir accès à des outils pour leur permettre de faire leur cheminement personnel?
Nous devons faire un choix. Doit-on donner la chance à une multitude de Canadiens d'apprendre les deux langues ou à seulement 1 000 personnes par année? Il est important de faire ce choix.
Selon vous, que devons-nous faire? Devons-nous favoriser la masse ou l'élite?
C'est un choix sans doute difficile à faire. Quand vous le mettez dans ces termes, je ne vous envie pas. Cela doit être très difficile, surtout quand vous parlez de 30 000 $ par participant. C'est un chiffre inouï. C'est difficile de préserver l'aspect authentique, mais c'est tellement important de le faire. Toutefois, le fait que le programme Katimavik coûte 30 000 $ par participant doit remettre en question tout le programme.
Lors de ma participation au programme Jeunesse Canada Monde, j'ai habité dans des familles d'accueil. Songe-t-on à préserver ou à créer des programmes qui dépendent de la communauté elle-même en y injectant les fonds nécessaires pour y arriver? Je ne sais pas. Si je me souviens bien, les participants...
Revenons aux outils. En tant que professeur, y a-t-il d'autres outils qui pourraient vous apporter le soutien nécessaire?
Il faut une base, mais les élèves sont capables de faire un bout de chemin. Mes enfants ont appris l'anglais à l'école, mais c'est aujourd'hui la télévision et les outils informatiques et électroniques qui leur permettent de faire des échanges et d'aller plus loin.
Serait-il très utile pour vous que le gouvernement fédéral investisse dans d'autres programmes et outils qui serviraient à la masse?
On parlait de ces situations authentiques, de ces voyages d'échange, de ces visites aux musées et de ces visites sur des sites historiques où l'on est guidé par un francophone très à l'aise dans sa langue. À l'intérieur d'un fort ou devant une statue, ce dernier interagit avec un groupe de jeunes dont la langue première est le français et leur fait vivre une certaine situation. C'est ce qu'on recherche en tant qu'enseignants, une fois qu'on peut sortir de la salle de classe.
Les organismes culturels dépendent des bourses. Quand on revient à ce que le gouvernement fédéral peut faire, je pense à notre contexte. À Winnipeg, nous avons le théâtre du Cercle Molière, le musée de La Maison Gabrielle-Roy, le Lieu historique national du Canada de Lower Fort Garry et le Lieu historique national du Canada de La Fourche. Toutefois, il nous est difficile d'avoir accès aux visites en français, parce que seulement une ou deux personnes peuvent le faire. Ce serait très important que des gens puissent présenter, partager et faire vivre ces expériences dans les deux langues.
Même si les ressources pédagogiques en français sont meilleures pour les anglophones et même si, quand ils reçoivent leur diplôme du secondaire, leur niveau de français oral est plus élevé, s'ils n'ont pas l'occasion au niveau postsecondaire de visiter le pays et de connaître diverses perspectives, il va leur être très difficile de conserver leur français. On sait cela.
À partir du moment où ils fréquentent l'université, beaucoup de nos diplômés ne pratiquent plus le français qu'ils ont appris, ce qui fait que dans bien des cas, ils le perdent. Il est difficile d'être politicien. Je sais que vous avez à prendre des décisions et que l'argent n'est pas infini, mais je pense que ces programmes sont vraiment très importants.
Je suis très content que vous soyez ici aujourd'hui. Pour moi, le Manitoba est un peu comme un ancien pays. Mon père y a grandi; il a fréquenté l'école française à Saint-Norbert et a étudié au Collège universitaire de Saint-Boniface. Il m'a raconté des histoires au sujet de ses examens de philosophie et de grec quand c'était un collègue classique. Je comprends bien ce que représente comme défi le fait d'étudier en français dans un endroit comme le Manitoba, mais je crois que vous êtes en mesure de faire face à ce beau défi.
J'aimerais d'abord préciser un peu mes commentaires, étant donné qu'on ne discutera pas longuement de ce sujet. En ce qui concerne Katimavik, il s'agissait de 28 000 $ par année par participant et le taux de décrochage était de 30 %. Je partage vraiment votre point de vue sur l'importance des expériences authentiques. L'immersion est importante, mais il faut plus que cela. C'est aussi mon expérience. J'ai rencontré de jeunes étudiants qui avaient fait des années d'immersion, mais qui n'avaient pas acquis la confiance nécessaire pour mettre en pratique leurs compétences en français dans la communauté et dans le monde en général. En ce sens, les expériences authentiques ont de l'importance.
Vous avez aussi parlé d'histoire. Or, cela cause toujours un problème, surtout quand on parle de l'enseignement de l'histoire par le gouvernement fédéral. Les provinces sont parfois sensibles à ce sujet. J'aimerais que nous parlions d'expériences authentiques dans le contexte d'aujourd'hui. C'est selon moi un bon thème et nous pourrions l'aborder de façon plus large dans le cadre du comité.
Pourriez-vous nous donner des exemples d'expériences authentiques ou nous parler d'idées que vous avez, non pas dans un contexte historique, mais dans un cadre plus actuel? Je pense en effet que les jeunes sont plus intéressés par le présent que par le passé. L'histoire est importante, mais elle ne suscite pas toujours le même intérêt.
Pour ma part, je parle de l'actualité avec mes élèves presque chaque jour. Ce que j'enseigne ne porte pas seulement sur le présent. Je parle des événements qui font l'actualité, mais je les relie toujours à l'histoire pour qu'ils comprennent mieux et voient comment cela peut les affecter.
L'année dernière, j'ai organisé beaucoup d'activités pour le 100e anniversaire de notre école. Mes élèves m'ont aidé. C'est un bon exemple. Non seulement ont-ils beaucoup appris sur le passé de notre école que Marshall McLuhan, Neil Young et Fred Penner ont fréquentée, mais ils ont aussi rencontré des personnes. J'ai organisé une journée sur l'histoire de l'école à laquelle 52 présentateurs ont participé. Toutes ces personnes avaient obtenu leur diplôme à l'école Kelvin ou étaient d'anciens professeurs. Les étudiants qui ont présenté ces personnes et ont agi comme ambassadeurs auprès d'eux ont eu l'occasion de les rencontrer et de vraiment établir des liens entre le passé et le présent. Je pense que c'est vraiment extraordinaire.
Je crois qu'en tant qu'éducateur, vous êtes conscient du fait que les élèves apprennent davantage quand ils sont actifs que lorsque l'éducation se fait de façon passive.
Quel genre de programmes ou d'activités d'immersion permet une participation active des élèves, au-delà de l'école d'immersion? Vous me parliez de certaines expériences, par exemple des voyages en Europe. Comment peuvent-ils participer et véritablement s'impliquer grâce à cela?
Je ne l'ai pas vraiment mentionné dans ma présentation, mais il y a maintenant deux ans, j'ai dirigé un voyage avec mes élèves pour visiter les champs de bataille de la Première Guerre mondiale et de la Seconde Guerre mondiale.
Il ne s'agissait pas seulement d'aller à la crête de Vimy et d'apprendre l'histoire de ce site, même si cela aurait quand même été très bien. Or, plusieurs mois avant notre départ, j'ai commandé des affiches militaires des soldats ayant fréquenté l'école secondaire Kelvin. J'ai assigné à chacun de mes élèves un soldat qui était mort au cours de la Première Guerre mondiale ou de la Seconde Guerre mondiale. Ils ont fait de la recherche pendant quelques mois. Ils ont visité les maisons des soldats — si elles étaient toujours là — pour prendre des photos. Ils ont contacté leurs descendants, s'il y en avait. Puis, nous sommes allés au cimetière, au tombeau des soldats. Chaque élève a fait une présentation de la vie du soldat en question. Je crois que cela constitue vraiment une expérience authentique. Je le sais parce que les élèves étaient tellement touchés par cette expérience, au point où cela m'a surpris.
Comme je l'ai dit auparavant, nous avons fait une vidéo afin de partager cette expérience avec notre école et notre communauté. Nous avons même eu l'occasion de rencontrer des descendants qui sont venus visiter cette chambre du Souvenir que nous avons créée pour raconter cette histoire.
Je ne semblais peut-être pas écouter tout à l'heure, mais pendant que j'écoutais, je faisais des recherches. C'est l'aspect statistique évoqué par M. Dion qui me préoccupe principalement.
Nous sommes réunis en comité pour évaluer la situation de l'immersion et la qualité du travail dans les écoles d'immersion. Parallèlement, nous devons voir de quelle façon l'argent fédéral provenant de la Feuille de route est investi en soutien à l'enseignement de l'anglais langue seconde.
À cet égard, je regardais les données de Statistique Canada. Au Manitoba, en 2006, 75 545 enfants suivaient des cours de français langue seconde; en 2011, il y en avait 70 000, soit 5 000 de moins. Parallèlement, on note entre 2006 et 2011 une augmentation de 1 500 élèves en immersion. Dans les faits, 3 500 enfants de moins sont en contact avec le français. Par ailleurs, soit le bilinguisme chez les jeunes stagne au Canada, soit il recule carrément.
Comme législateurs, nous serons bientôt face à un dilemme. Est-ce que nous devons continuer à investir pour soutenir les programmes d'immersion? Sur le plan du bilinguisme, notre société gagne-t-elle à investir dans les programmes d'immersion, ou devrions-nous réorienter cet argent vers le soutien des programmes d'enseignement du français langue seconde de façon générale? Je suis persuadé que les élèves qui sortent des programmes d'immersion sont plus bilingues, individuellement, que la majorité de ceux qui suivent des cours de français langue seconde au primaire ou au secondaire.
Cela étant dit, au total, le bilinguisme recule chez les jeunes, et de moins en moins de jeunes sont en contact avec le français. Où devrions-nous placer nos billes? En fait, c'est la grande question que nous devons résoudre ici.
Si je suis expert dans un domaine, je ne le serai pas dans un autre. Je connais peu le domaine de l'immersion sur le plan national, mais sur le plan provincial, je m'y connais un peu. Si je comprends bien, les statistiques du Manitoba indiquent que les inscriptions en immersion augmentent chaque année. Par conséquent, le nombre total de diplômés en immersion augmente aussi. Cela veut dire, je l'espère, que vous verrez un changement, même s'il sera peut-être imperceptible au début.
On rencontre de plus en plus d'anglophones qui vivent en français chez eux. Mes enfants on maintenant 11 ans et 14 ans. Je connais le concours d'art oratoire depuis que j'y ai participé quand j'étais enfant. Je peux vous dire que de plus en plus de familles vivent un dilemme chaque année. Elles se demandent dans quelle catégorie inscrire leur enfant. Mes enfants, par exemple, m'ont suggéré de les inscrire dans la catégorie francophone parce que je leur parle en français. Je me pose moi-même la question.
Je sais qu'il y a un changement réel par rapport à là où j'étais dans les années 1970-1980, alors que j'étais inscrit au programme. Je ne voudrais pas voir l'immersion diminuer parce qu'il semble que lorsqu'on consulte tous les chiffres, il y a moins de personnes en contact avec le français. L'immersion semble bien fonctionner et je ne voudrais pas qu'elle paie un fort prix.
Je comprends le sens de votre réflexion, mais je voudrais revenir sur les propos de Mme Sims concernant l'enseignement de base qui est dispensé dans des écoles primaires et secondaires par des enseignants qui ne possèdent pas bien la langue qu'ils enseignent. Dans la région d'où je viens, les professeurs d'anglais — c'est la situation inverse — ne parlaient pas anglais. Je trouve que cet aspect est important. Le fédéral ne devrait-il pas aider les provinces à faire en sorte que la qualité des enseignants du français de base soit meilleure?
C'est un excellente commentaire. Il est important de répondre à ces questions.
Prenons l'exemple de l'Université de Saint-Boniface. J'y travaille, mais ce n'est pas comme si j'étais mariée avec l'institution. Je crois cependant que c'est un bon endroit et qu'il s'y passe beaucoup de choses authentiques. C'est la seule université francophone et on y offre le programme FIT, ce qui veut dire French Immersion for Teachers. Ce programme s'adresse aux gens qui enseignent le français de base. C'est pour appuyer leur développement professionnel. Cela leur donne aussi la possibilité de voir que la communauté francophone est vivante chez nous, ce qui est très important.
C'est bien là le fond de ma préoccupation. Je ne voudrais pas qu'on ait au Canada un système d'enseignement de la langue seconde à deux vitesses. Cela voudrait dire des écoles d'immersion où les professeurs sont d'une qualité incroyable — on s'en rend compte — et un système public où les professeurs ne sont pas à la hauteur des exigences normales relatives à l'enseignement de la langue seconde.
Je remercie également nos témoins de leurs déclarations.
Je comprends que vous avez appris une deuxième langue. Vous avez été exposé à cette deuxième langue. Vous avez également voyagé en Europe, n'est-ce pas?
Pouvez-vous me dire comment on enseigne les langues en Europe? La Suisse possède quatre langues officielles.
Vous avez fait allusion à Vimy. J'étais à Ypres, en Belgique, une ville qui ne fait pas partie de la Wallonie mais de la Flandre, où l'on parle le néerlandais.
Il me semble que l'apprentissage des langues s'y fait facilement, sans aucun problème. On aime parler plusieurs langues. J'estime que l'apprentissage d'une autre langue est un tremplin culturel.
D'après votre expérience européenne, comment pouvons-nous favoriser que nos deux merveilleuses langues, le français et l'anglais, soient florissantes dans notre magnifique pays. Nous avons insisté sur l'aspect pécuniaire notamment, mais notre objectif consiste à favoriser le bilinguisme.
Que recommanderiez-vous? L'enseignement notamment relève des provinces, et, entre autres, nous sommes limités dans une certaine mesure par la Constitution. Mais comment le gouvernement fédéral peut-il promouvoir le bilinguisme? Il n'est pas question de forcer quelqu'un à apprendre l'autre langue en lui disant qu'il n'obtiendra pas tel emploi. Nous devons plutôt tabler sur la souplesse et faire ressortir les avantages formidables de nos deux langues.
Quelles recommandations nous formuleriez-vous d'après votre expérience en Europe et vos compétences dans l'enseignement des deux langues?
En Europe, il suffit de se déplacer pendant une heure ou deux pour se plonger dans une culture et une société tout à fait différentes. C'est ce qui fait le charme et, mais c'est ce qui peut poser problème également. J'en retiens l'aspect charmant alors que, pour d'autres qui ont vécu la guerre, il y a une connotation pénible.
Si vous le souhaitez, vous pouvez organiser un voyage d'études qui vous mènera de la Flandre à l'Espagne en deux jours ou en une nuit, ce qui est tout de même à proximité. Au Canada, nous sommes restreints par notre géographie. Ce n'est pas une mince tâche que d'organiser un voyage d'études à mon école secondaire à destination d'un endroit où personne ne parle anglais.
Vous avez raison. J'ai également vécu en Europe et j'ai travaillé en Amérique latine. Je dois parfois expliquer à mes amis qui vivent là-bas que le Québec se trouve à 3 000 kilomètres de chez nous. Lorsqu'ils viennent à Montréal, ils me demandent d'aller prendre un café ensemble. Je leur réponds que c'est trop loin.
Des voix: Oh, oh!
Mme Laura Sims: Ce serait absolument...
On me demande souvent comment, dans certains pays européens — pas tous, cependant —, on peut apprendre d'autres langues sans problème.
Oui, mais il y a certains... Par exemple, mes amis français sont nuls en anglais; mes amis anglais sont nuls dans toute autre langue. Cependant, les Allemands parlent très bien anglais. En Suisse, on parle plusieurs langues.
Vous vous demandez pourquoi un certain contexte est si merveilleux? J'ignore quelle est la réponse, mais il y a...
Je voudrais souligner très rapidement que notre école secondaire n'organise plus de voyages d'études au Québec. Notre école intermédiaire le fait, cependant. Nos étudiants ont pu vivre une telle expérience, mais nous pourrions certes en faire davantage.
Ce qui nous inspire au bout du compte, c'est, je le répète, la possibilité de pouvoir vivre une expérience authentique à l'extérieur de l'école.
Lorsque j'ai obtenu cet emploi à Lower Fort Garry, c'était pour l'été. C'était magnifique. Cependant, j'ai eu rapidement l'occasion incroyable d'utiliser l'autre langue et de rencontrer des gens venant de partout dans le monde. Je débordais d'enthousiasme à l'idée de travailler dans ma deuxième langue.
C'est le genre d'occasion qu'il faut offrir. Il n'y avait aucune obligation. Le programme du gouvernement fédéral donnait l'occasion de parler dans la deuxième langue.
... que le gouvernement fédéral puisse, sans s'ingérer dans l'éducation, encourager et favoriser ce genre d'échanges, et j'ignore tout des aspects pécuniaires.
Je puise dans mon expérience dans l'armée canadienne pour vous dire qu'il était très agréable de connaître chaque province. Par exemple, je connais des militaires québécois qui ont été affectés à Chilliwack en Colombie-Britannique. Ils ont adoré l'endroit. Ils ont enrichi la culture et favorisé l'ouverture, entre autres.
Au pays, ce genre d'échanges est essentiel. Nous sommes un grand pays peu peuplé.
Je remercie nos témoins d'être ici parmi nous. J'avais plusieurs questions à vous poser, mais vous avez répondu à la plupart d'entre elles. Je ne vous les poserai donc pas à nouveau.
Vous savez qu'il y a quand même une grande diversité linguistique au Canada en raison des nouveaux arrivants. Lorsque ceux-ci arrivent au pays, l'un de leurs plus grands défis est de choisir entre le français et l'anglais. Qu'est-ce qui explique leur choix? Est-ce qu'on fait plus de promotion d'une langue ou de l'autre? Est-ce qu'on favorise un choix plutôt qu'un autre?
La réalité à Winnipeg, c'est que lorsqu'ils arrivent, la plupart s'attendent à être immergés dans une ville anglophone. Sans trop y penser, ils vont inscrire leurs enfants à l'école la plus proche de chez eux, qui, statistiquement parlant, sera probablement une école anglophone.
Par contre, je tiens à ajouter que dans les cours d'immersion que je donne, surtout au niveau secondaire où il y a eu un certain nombre de décrochages scolaires faute d'appui paraprofessionnel nécessaire, mes élèves forment un groupe très mixte comparativement à ce que j'observais au début de ma carrière. Je vois aujourd'hui plusieurs enfants qui proviennent de familles immigrantes, comme la mienne. Plusieurs élèves viennent de l'Asie, de l'Afrique ou de l'Amérique latine.
J'ai en tête l'image de ma salle de classe de neuvième année aujourd'hui, dont au moins le tiers est composée d'élèves venant d'ailleurs. Leur famille vient d'ailleurs. Ils ont donc opté pour l'immersion et ils sont parmi les plus persuadés que le système fonctionne. De plus, puisqu'ils parlent déjà deux langues chez eux, le fait d'en ajouter une troisième leur semble tout à fait logique.
J'ajouterais à cela que la communauté francophone de Winnipeg connaît actuellement une croissance à cause de ceux qu'on appelle les nouveaux arrivants. Ils viennent surtout de l'Afrique du Nord et de l'Afrique noire.
Aujourd'hui, 40 % des étudiants de l'Université de Saint-Boniface viennent d'ailleurs, ce qui est énorme. Leur présence, extrêmement riche et importante, redonne vie à cette communauté francophone. Ce sont soit des immigrants, soit des réfugiés. Parmi eux, il y a des gens qui ne parlent pas l'anglais. Ces derniers ne parlent donc uniquement que le français et peut-être leur langue d'origine. Leur présence à Winnipeg est absolument enrichissante.
Cela dépend d'où ils proviennent. S'ils viennent de pays francophones, ils s'inscriront à la Division scolaire franco-manitobaine ou dans les écoles d'immersion. Pour leur part, les immigrants parlant anglais s'inscriront où ils veulent.
Je me rappelle très bien que j'ai commencé à étudier l'anglais lorsque j'étais en cinquième année et que j'ai continué au secondaire. Naturellement, notre problème était un peu celui que vous décriviez tout à l'heure, soit que les professeurs d'anglais ne parlaient pas anglais. Cependant, je croyais que cette espèce d'approche avait changé au fil des années. J'avoue que je suis très déçue de savoir qu'il y a encore un problème à cet égard dans nos écoles. Je sais que cela relève du gouvernement provincial, mais il m'apparaît incroyable que ce problème existe encore en 2013.
Tout à l'heure, on a parlé de la promotion auprès des élèves. Est-ce qu'on fait aussi de la promotion auprès des parents de ces jeunes pour leur faire savoir que l'apprentissage d'une deuxième langue est important? Cela a des avantages sociaux et financiers. Est-ce qu'on rejoint les parents?
Lorsqu'on a des parents comme Mme Bateman, par exemple, qui semble voir d'instinct la valeur des deux langues, alors on prêche les convertis.
Lorsque j'écoute les directeurs de l'école secondaire Kelvin promouvoir nos trois programmes, c'est-à-dire le baccalauréat international, le programme d'immersion et le programme scolaire régulier, je n'entends pas de mots décourageants à l'endroit de l'un ou l'autre des programmes. Ce ne sont que des mots d'encouragement.
Cependant, je ne sais pas quel genre d'information reçoivent les parents qui songent à inscrire leurs jeunes enfants à ces programmes dès la prématernelle ou la maternelle. Je ne peux donc pas donner plus de détails au comité à ce sujet.
C'est difficile pour nous de vous donner plus de détails à ce sujet, puisque nous sommes des enseignants du secondaire. Nous ne connaissons pas vraiment la réalité des enseignants de maternelle et de première année, au moment où il est très important d'avoir cette discussion avec les parents.
Oui, en effet. Par contre, je parlais surtout du secondaire. C'est la question que je me posais.
Cela m'amène à penser à une autre chose. Avez-vous l'impression que les jeunes à qui vous enseignez comprennent bien la portée d'une langue seconde? Mme Bateman disait tout à l'heure que ses enfants en étaient conscients et le vivaient. Or, l'ensemble de vos élèves le comprennent-ils vraiment?
C'est une évolution. Je vais parler bien honnêtement. Bon nombre de mes élèves qui en sont à leur première année à l'école secondaire Kelvin étudient le français depuis déjà 10 ans. Beaucoup d'entre eux perçoivent encore le français comme une simple matière scolaire. Ils savent qu'il faut avoir de bonnes notes et remettre ses devoirs pour ne pas se faire chicaner à la maison. À 14 ans, ils ne le perçoivent pas encore comme quelque chose qui transformera leur vie et qui leur donnera toutes sortes de possibilités, car ils n'ont pas encore eu la chance d'ouvrir plusieurs de ces portes.
Au fur et à mesure des quatre années passées à l'école secondaire — dans la plupart des cas au Manitoba, il s'agit de quatre années —, ils interagissent avec des professionnels qui viennent parler pendant la journée des carrières, ils voient des diplômés, ils font davantage de voyages d'échange. En effet, ces voyages sont souvent effectués pendant les études secondaires. C'est à ce moment, en 12e année, que de 5 à 10 % de nos élèves sont vraiment enthousiasmés et passionnés pour la sauvegarde de cette langue, tandis que les 90 % autres ne le voient pas encore. Ils n'ont pas encore eu ce moment déclencheur, mais quelques-uns parmi eux finiront par l'avoir.
Je vous remercie infiniment de la passion que vous affichez tous aujourd'hui. Vous êtes l'exemple parfait du magnifique résultat des programmes d'immersion française.
Madame Sims, pour répondre à votre question du début, je parle d'occasions offertes, du leadership de collaboration de notre pays et de l'élargissement de nos horizons. Je n'ai pas oublié.
Loin de moi également l'idée que vous êtes obsédée. Vous êtes plutôt une passionnée, et j'en suis ravi.
Ces dernières semaines, des témoins nous ont parlé des quatre décennies de l'immersion française au Canada. Tant les étudiants que les enseignants qui ont participé à ces programmes d'immersion nous ont alors souligné les lacunes concernant l'usage de la deuxième langue après l'école secondaire. Il y a de moins en moins d'occasions de la pratiquer. Beaucoup d'étudiants désireux de perfectionner leur deuxième langue se trouvent pris au dépourvu.
Quelles mesures le gouvernement fédéral pourrait-il prendre pour améliorer la situation?
Monsieur Young, il semble que vous ayez aimé enseigner dans une langue comme dans l'autre.
Nous avons tous évoqué le problème des compétences provinciales en éducation. C'est toujours une question qui revient sur le tapis, ce qui m'amène à penser que le gouvernement fédéral pourrait envisager d'accorder des bourses ou favoriser la pratique de la langue seconde après l'école secondaire.
Je le répète, il faudrait peut-être favoriser davantage l'immersion à l'université. C'est possible, car certaines universités en ont fait la preuve. Ce serait offrir aux étudiants en immersion française un outil incroyable leur permettant de conserver leur français. La clé, c'est la confiance. En fait, ce n'est qu'une question de confiance. J'ai perdu cette confiance que j'avais auparavant, car je parle dorénavant moins en français qu'auparavant. J'enseigne maintenant au programme de baccalauréat international à l'école secondaire. Je n'enseigne donc plus en français. Je me retrouve devant vous aujourd'hui à parler dans ma deuxième langue, et ma confiance est fragile.
Merci. En ce qui me concerne, c'est la clé. Je le répète, nous devons maintenir et peut-être accroître les possibilités de pouvoir travailler dans un lieu historique national ou au sein de l'appareil fédéral, dans des fonctions qui permettent d'utiliser la deuxième langue.
J'ajouterais — et c'est ce que je voulais répondre à M. Gourde plus tôt — que, à tous les ans, notre école accueille un récent diplômé universitaire. Je crois que son salaire est payé par le gouvernement fédéral. Ce diplômé donne des conseils et favorise les échanges entre les étudiants et le monde du travail. C'est un poste au sein de l'administration fédérale. Cette personne travaille avec Reesa Averback — je vois que Mme Bateman...
Par Service Canada, effectivement. Nous pouvons compter sur des diplômés dynamiques et extraordinaires à qui nos étudiants peuvent s'identifier et qui peuvent les aider à rédiger leur curriculum vitæ, car il se tient annuellement une foire de l'emploi à notre école secondaire.
Ne serait-il pas fantastique si l'école à laquelle Kelvin s'est inscrit en immersion française pouvait toujours compter sur un jeune diplômé bilingue pouvant obtenir la participation de conférenciers bilingues susceptibles d'entretenir les étudiants de leur travail d'ingénieur, de dentiste et de disc-jockey? Par contre, je crains que quelqu'un d'unilingue pourrait ne pas penser ainsi. Il pourrait simplement dire: « Je connais un dentiste et je connais un cinéaste que nous pourrions inviter. » Ce n'est pas toujours possible d'obtenir un professionnel bilingue, mais le jeune diplômé bilingue peut être utile à ce chapitre.
Le gouvernement fédéral pourrait entre autres appuyer les établissements d'enseignement francophones qui offrent un programme d'immersion, notamment l'Université de Saint-Boniface. Je crois qu'il y a une constituante de l'université à Regina, comme c'est le cas en Alberta et en Colombie-Britannique. Il y a bien d'autres exemples, notamment la constituante à Pointe-de-l'Église en Nouvelle-Écosse. Il y a aussi celle de l'Université de Moncton.
Quant au leadership de collaboration et à la question initiale de l'opportunité d'avoir tous ces postes bilingues, je vous dirai que, pour avoir une société totalement inclusive à l'échelle du Canada, nous devons compter sur la formation et consacrer le temps nécessaire pour que nous puissions utiliser efficacement les deux langues. Si c'est là vraiment notre objectif, nous devons alors dire à quelqu'un des Territoires du Nord-Ouest qui est enthousiaste à l'idée d'apprendre l'autre langue: « Magnifique, nous allons vous venir en aide. Vous ne parlez pas les deux langues officielles. Nous allons vous offrir les moyens vous permettant de donner votre plein rendement dans l'appareil gouvernemental. » J'ai pris l'exemple d'un inuktitut qui peut également s'exprimer dans les deux langues officielles.
De plus, les étudiants au doctorat et à la maîtrise peuvent obtenir des bourses du CRSNG, du CRSH et du gouvernement fédéral. Cependant, ces bourses sont de plus en plus rares, ce qui est très malheureux. Cette année, on observe une diminution de 25 p. 100. La concurrence est donc de plus en plus féroce. Ce serait magnifique si l'on pouvait favoriser la poursuite des études de maîtrise et de doctorat dans ma deuxième langue. Les étudiants pourraient alors dire: « Je vais faire ma maîtrise ou mon doctorat dans tel domaine, et je le ferai dans ma deuxième langue. » Pourquoi cela ne serait-il pas possible?
Je vous remercie tous les trois de vos témoignages, mais surtout de votre passion. En effet, c'est ce qui m'a frappé dès le début.
Vous avez posé la question, à savoir si le bilinguisme était différent du respect de la langue. C'est la première phrase que j'ai remarquée lorsque j'écoutais votre témoignage.
Pour ma part, je vous réponds qu'au Canada, nous sommes obligés d'apprendre une autre langue, soit l'anglais ou le français, ne serait-ce que parce qu'il est parfois impossible d'obtenir des services dans notre propre langue. Le bilinguisme devient alors plus instrumental qu'autre chose, c'est-à-dire que c'est une façon d'obtenir des services qui devraient pourtant être fournis dans les deux langues officielles, partout au Canada. Je trouve cette situation un peu problématique. De mon côté, je me sens en immersion ici, présentement.
Je suis né au Québec et je suis fier de ma langue. Je suis un Québécois canadien francophone d'Amérique du Nord et j'en suis extrêmement fier. J'essaie d'en faire la promotion partout où je vais dans la Cité parlementaire. Il est parfois difficile d'obtenir des services dans notre langue. Dans le cadre d'autres comités auxquels j'ai participé, nous avons reçu plusieurs témoins — des sous-ministres et des hauts fonctionnaires — qui ne disaient pas un mot de français. Je trouve ça inacceptable. Comme je le disais, le Parlement fait présentement office d'un cours d'immersion pour moi. Je me croyais bilingue avant d'arriver ici, mais ce n'était pas tout à fait le cas.
Je vais aussi vous parler de l'expérience de ma fille, qui a maintenant 18 ans. En sixième année, alors qu'elle avait 12 ans, elle a participé à un programme d'immersion, soit une moitié de l'année en français et l'autre moitié en anglais. Aujourd'hui, elle n'a même pas d'accent et elle parle parfaitement les deux langues. Je n'ai donc aucun doute sur l'importance de l'immersion. C'est extrêmement important. Je parlais bien l'anglais auparavant. Je me débrouillais suffisamment pour entretenir une conversation, mais j'ai appris beaucoup de nouveaux termes anglais, surtout ici, au Parlement.
Pour ce qui est du bilinguisme au pays, les services devraient nous être offerts dans notre propre langue, partout au pays. En Estrie, il y a beaucoup d'anglophones et il est parfois impossible d'obtenir des services en français. J'aimerais entendre vos commentaires à ce propos.
Je vais vous faire part de deux observations en guise de réponse.
Dans le cadre du jeu de rôles où nous recréons la signature du Traité no 5, les élèves personnifient les Cris, les Métis et les négociateurs blancs. Quand vient le moment de signer le traité, deux copies sont distribuées: l'une des deux est écrite en français. En effet, le jeu de rôles se déroule en français. Les négociateurs blancs voient clairement quelles sont les clauses, les critères, etc., et signent le traité. Ensuite, un de mes élèves distribue une deuxième copie aux Cris. Tout est écrit en caractères wingdings, c'est-à-dire en symboles, et ils n'y comprennent rien.
Ils demandent alors ce que nous leur demandons de signer et nous leur répondons qu'ils n'ont simplement qu'à apposer un x en guise de signature, que tout cela traite de sujets dont on vient de parler, qu'ils n'ont pas à avoir peur. C'est à ce moment-là qu'a lieu le moment authentique. Ils disent: « Vous nous demandez de signer, mais nous n'avons aucune garantie que ce dont nous avons parlé pendant ces trois jours de négociations se trouve là-dedans. » Nous leur disons alors que c'est tout ou rien et qu'ils doivent signer, autrement, tout ce dont nous avons discuté risque de disparaître. Ce que vous avez dit m'a fait penser à cela.
Ma deuxième observation porte sur un fait qu'on apprend aussi dans le cours d'histoire du Canada. Au Manitoba, il y a deux langues officielles, mais ce n'est pas une province bilingue. Il y a une distinction terminologique assez intéressante sur le plan juridique. On offre des services en français là où le gouvernement a l'impression que c'est nécessaire. Ce n'est pas garanti. Pour la communauté francophone du Manitoba, cela a été à l'origine de bien des problèmes et de bien des disputes.
J'aimerais simplement ajouter quelque chose, et je vais parler seulement en mon nom.
Je pense souvent à ceci. J'aimerais tellement voir les gens de partout au Canada parler les deux langues officielles ainsi que d'autres langues. Je dis souvent à mes étudiants que nous vivons actuellement une transition historique et que ça prend beaucoup de temps pour apprendre une langue et vraiment faire cette transition. Je suis aussi impatiente.
[Traduction]
Il faut foncer!
[Français]
Cependant, je pense que c'est aussi important de valoriser les connaissances des gens, qu'ils soient unilingues ou bilingues. Cela veut dire qu'on doit parfois construire des ponts. Par exemple, je travaille avec des francophones qui ne parlent que le français. S'ils veulent obtenir des services dans leur langue, il faut au moins qu'une personne bilingue soit là pour les aider. Cela ne veut pas dire que tous ceux qui travaillent dans le bureau doivent parler français pour offrir le service, mais cet appui favorisera du moins la transition historique vers une société plus bilingue.
Il faut penser aux solutions. Si le but est d'offrir des services en français et en anglais, on doit se questionner sur ce qu'on doit faire pour y arriver. Est-ce que tout le monde doit parler français? Ce n'est peut-être pas réaliste, parce qu'on ne dispose pas des fonds nécessaires. Mais est-ce qu'on peut embaucher quelqu'un qui parle couramment les deux langues officielles?
[Traduction]
Bien sûr.
[Français]
Absolument, car cela facilitera cette transition. On verra alors que nous sommes une société bilingue et que nous faisons ce que nous pouvons selon le contexte et selon les ressources disponibles. Par la suite, les autres seront peut-être plus motivés à apprendre le français, ce qui valorisera les deux langues, selon le contexte.
Je mentionnerai très rapidement que ce n'était pas un problème quand je travaillais à Vimy. Les 10 étudiants qui travaillaient là-bas parlaient assez bien les deux langues.
Ce fut toutefois un grand défi quand j'ai travaillé à Lower Fort Garry, parce que des 50 étudiants qui y travaillaient pour l'été, seulement 15 pouvaient parler le français. Ainsi, chaque fois qu'on avait des visiteurs francophones, ces derniers réclamaient une personne bilingue et c'est cette personne qui leur faisait visiter les lieux. Quand j'ai commencé à travailler là-bas, je ne pensais pas du tout que j'étais bilingue, mais je suis devenu la personne chargée de ces visites, parce que j'avais pu parfaire mes connaissances du français durant l'année précédente et parce que j'étais à Paris l'année avant cela. Lors de ma dernière année, j'ai même offert une visite en français à notre ancien gouverneur général. Je n'aurais jamais imaginé cela quand j'ai commencé ce boulot.
Nous allons suspendre la séance quelques minutes pour que nos témoins quittent la salle, puis nous reprendrons nos travaux en séance publique et non pas à huis clos, afin d'examiner les deux motions dont nous avons reçu l'avis. La séance est suspendue pendant deux minutes.
Nous reprenons la 81e séance du Comité permanent des langues officielles. La séance se poursuit en public pour discuter des deux motions pour lesquelles Mme Michaud nous a donné un avis.
Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Est-ce qu'on peut ramener un peu d'ordre dans la salle? Il doit quand même y avoir un minimum de décorum.
Le comité est saisi d'une motion de M. Gourde, qui demande de poursuivre les travaux à huis clos. C'est une motion dilatoire qui ne peut faire l'objet d'un débat. Je mets donc la motion aux voix.
(La motion est adoptée.)
Le président: La motion est adoptée. Nous observerons une pause d'une minute afin que nos techniciens puissent faire les changements pour le huis clos.