LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des langues officielles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 11 juin 2013
[Enregistrement électronique]
[Français]
Bienvenue à la 84e séance du Comité permanent des langues officielles, en ce mardi 11 juin 2013. Conformément à l'article 108 du Règlement, nous étudions les programmes d'immersion dans la seconde langue officielle au Canada.
[Traduction]
Avant d'entendre notre témoin cet après-midi, je veux régler le deuxième point à l'ordre du jour, soit l'adoption d'un budget du comité.
Monsieur Dion.
[Français]
Monsieur le président, j'ai ici la motion que vous m'avez demandé de présenter. Elle se lit comme suit:
Qu'un budget proposé de 20 900 $, pour l'étude sur les programmes d'immersion dans la seconde langue officielle au Canada, soit adopté.
[Traduction]
Une motion a été déposée pour adopter le budget lié à cette étude, au montant de 20 900 $, qui servira à payer les dépenses de déplacement des témoins, les dépenses rattachées aux vidéoconférences et toutes autres dépenses liées à l'étude en question.
Des commentaires sur ce budget? Comme il n'y en a pas, je vais mettre la motion aux voix.
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Merci beaucoup.
Nous recevons le professeur Genesee, de l'Université McGill. Il s'adressera à nous par vidéoconférence de McGill, à Montréal.
Avant de lui céder la parole pour sa déclaration liminaire, je veux signaler aux membres du comité qu'il y aura un vote à la Chambre à 16 h 25. La sonnerie d'appel se fera entendre vers 16 heures.
Nous entendrons donc la déclaration liminaire du professeur Genesee. Les membres du comité pourront ensuite poser deux questions, puis nous irons à la Chambre pour le vote.
Mes excuses, monsieur Genesee. Ce sont les dernières semaines de la session parlementaire du printemps, et il y a plusieurs votes non annoncés. Nous l'avons appris il y a quelques minutes. Nous allons à tout le moins pouvoir entendre votre témoignage, votre déclaration liminaire. Nous allons permettre à deux membres du comité de poser des questions avant d'ajourner la séance.
Monsieur Genesee, vous avez la parole.
Bon après-midi. Merci beaucoup de m'avoir invité et de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
Je crois que je dispose de 10 minutes pour mon introduction, n'est-ce pas?
Je tâcherai d'être bref.
D'abord, comme bon nombre d'entre vous le savent, les programmes d'immersion au Canada, notamment les programmes d'immersion française, se sont avérés être une innovation particulièrement efficace du système d'éducation canadien. Depuis leur introduction, au milieu des années 1960, ils sont devenus une composante standard des programmes d'enseignement.
L'efficacité de ces programmes peut être mesurée de diverses façons, mais comme le démontrent les recherches, c'est au niveau de la réussite des étudiants que leurs résultats sont les plus probants. Nous savons aujourd'hui, après de nombreuses années de recherche, que les étudiants des programmes d'immersion atteignent des niveaux de compétence fonctionnelle avancés en langue seconde. Parallèlement, ils atteignent un niveau de compétence approprié dans leur langue maternelle, l'anglais, et des résultats satisfaisants dans les autres matières, comme les mathématiques et les sciences.
Cette expérience ne nuit aucunement à leur cheminement scolaire, tout en leur permettant d'atteindre des niveaux de compétence élevés dans une langue seconde.
L'efficacité de ces programmes est aussi mise en évidence par leur attrait et leur popularité auprès du grand public, mais surtout des parents. Dans la plupart des collectivités que je connais, ces programmes sont très courus et très en demande. En fait, la demande est probablement plus grande que l'offre.
Finalement, je dirais que ces programmes ont permis de répondre à certains besoins nationaux en ce qui a trait à la promotion des deux langues officielles du Canada.
Un dernier indicateur du succès de ces programmes est qu'ils sont reconnus à l'échelle internationale. En général, on fait référence au « modèle canadien » d'enseignement bilingue. Bon nombre de collectivités d'un peu partout dans le monde ont pris exemple sur les programmes d'immersion canadiens pour répondre à leurs propres besoins, qu'il s'agisse d'appuyer le bilinguisme national, les politiques officielles de bilinguisme ou d'autres initiatives en ce sens.
La réussite des programmes d'immersion a été largement documentée. Le sommaire que je vous ai remis fait état des diverses manifestations de cette réussite, alors je n'aborderai pas la question en détail.
J'ai plutôt pensé vous faire part de ce qui devra, à mon avis, faire partie de la réflexion pour les années à venir, et des besoins en matière de leadership. Les commentaires et les suggestions que je m'apprête à faire s'appuient sur mon expérience en tant que chercheur qui a évalué bon nombre de ces programmes au Canada, mais aussi en tant que chercheur qui a travaillé ailleurs dans le monde, dont aux États-Unis, en Europe, en Asie, en Asie centrale et en Amérique du Sud. C'est le travail que j'ai fait un peu partout qui a motivé les commentaires qui suivent.
Ce sont là des suggestions qui pourraient contribuer à l'évolution des programmes et faire en sorte qu'ils demeurent une référence mondiale. Je crois que le temps est venu d'y réfléchir, car ils datent maintenant de plus d'une quarantaine d'années. En fait, selon moi, il aurait fallu entreprendre cette réflexion il y a longtemps.
Plusieurs domaines gagneraient à être pris en charge. Je vais vous parler de six d'entre eux rapidement.
Premièrement, il faudrait offrir plus de places dans les programmes d'immersion pour que les parents qui le veulent puissent y inscrire leurs enfants. Je me doute, même si je ne peux pas appuyer cette impression par des données empiriques, qu'il y a beaucoup plus de parents qui veulent inscrire leurs enfants en immersion qu'il n'y a de places disponibles. Souvent, quand je donne des conférences à l'étranger, je parle à des parents frustrés qui ne peuvent pas inscrire leurs enfants à des programmes d'immersion parce que le nombre de places offertes est limité.
Deuxièmement, je crois qu'il est particulièrement important de promouvoir le développement des méthodes pédagogiques qui sous-tendent ces programmes. Malgré le succès des programmes, qui a été bien documenté, les méthodes pédagogiques sur lesquelles ils s'appuient ne l'ont pas été.
En fait, d'après ce que j'ai vu ailleurs dans le monde, je crois que les méthodes pédagogiques employées dans les programmes d'immersion au Canada accusent un certain retard par rapport à celles mises de l'avant par les autres pays qui offrent aujourd'hui de tels programmes. À bien des endroits, on a mis en place des programmes professionnels systématiques et rigoureux qui visent à déterminer quelles sont les meilleures méthodes d'enseignement en langue seconde et les meilleures façons de former les enseignants dans ce contexte.
Ce genre d'activités fait cruellement défaut au Canada, et lorsqu'il y en a, c'est au niveau local, ou au mieux, au niveau provincial. De façon générale, il faudra s'intéresser davantage à la promotion de pratiques d'enseignement efficaces si l'on veut que les programmes d'immersion soient toujours d'avant-garde.
Un troisième domaine qui demande un certain leadership, et cela rejoint le point que je viens de soulever, c'est l'allocation de ressources aux collectivités, aux commissions scolaires et surtout aux enseignants qui prennent part à la mise en oeuvre de ces programmes. Pour des raisons constitutionnelles, les programmes d'immersion relèvent des ministères provinciaux de l'Éducation, alors ce sont les gouvernements provinciaux qui allouent actuellement les ressources.
D'après ce que je peux voir, il y a cependant un manque criant de collaboration entre les provinces pour ce qui est de la création et de l'allocation des ressources. Les enseignants et les commissions scolaires de chaque province doivent donc, en quelque sorte, réinventer la roue chaque fois, car les projets qu'ils entreprennent ont déjà été faits ailleurs, mais il n'existe aucun mécanisme pour coordonner tous ces efforts.
Bon nombre de pays où j'ai travaillé, et où on s'intéresse au bilinguisme et à l'enseignement bilingue, soutiennent des centres nationaux offrant des ressources pour les programmes bilingues et le bilinguisme. Le Canada a le statut unique d'être un pays officiellement bilingue, mais il n'a aucun centre national de ressources qui facilite la promotion du bilinguisme dans les écoles. J'estime que c'est un enjeu crucial, car le succès des programmes d'immersion et la compétences des élèves dépendent au bout du compte des ressources dont disposent les enseignants. Je pense qu'on pourrait offrir beaucoup plus de ressources qu'on le fait actuellement, et il serait possible de remédier à la situation d'une façon ou d'une autre, selon les contraintes de la Constitution.
Quatrièmement, je crois qu'il faut déployer de plus grands efforts pour faire en sorte que les programmes d'immersion soient plus inclusifs. Dans bien des collectivités — pas toutes, mais elles sont nombreuses —, les programmes d'immersion ont tendance à favoriser l'élite, si on veut, car les étudiants qui ont des difficultés d'apprentissage ou des troubles de l'apprentissage diagnostiqués ne sont pas admis ou sont exclus après leur admission. Aucun système scolaire n'a de politique officielle à cet effet, car cela serait inacceptable, mais de façon non officielle et informelle, c'est souvent ce qui se passe, même si de nombreuses années de recherche ont démontré que les enfants en difficulté d'apprentissage réussissent tout aussi bien dans les programmes d'immersion que dans les programmes monolingues, et peuvent en plus, dans le premier cas, apprendre une deuxième langue. Par égard pour la promotion du bilinguisme officiel, nous devrions encourager les programmes d'immersion à inclure davantage d'étudiants, et nous avons besoin du leadership voulu pour cela.
Cinquièmement, je pense que les efforts entourant les programmes d'immersion pourraient être soutenus au niveau national, par exemple en offrant des occasions d'apprentissage supplémentaires et innovatrices en dehors de l'école aux étudiants qui apprennent le français comme langue seconde. Autrement dit, on pourrait leur permettre de faire des échanges linguistiques et d'autres activités qui les aideraient à perfectionner leurs connaissances du français en dehors du contexte scolaire. Et cette possibilité ne devrait pas être offerte seulement aux jeunes du primaire et du secondaire, mais aussi aux étudiants universitaires. Je sais qu'on offre déjà quelques possibilités de ce genre, mais je crois qu'il est temps de redoubler d'effort pour en faire la promotion.
Finalement, de façon globale, je comprends que les programmes d'immersion ont été créés au milieu des années 1960 pour répondre à des besoins nationaux très pressants en fait d'unité, de bilinguisme officiel, etc. Bien que ces besoins soient toujours très importants, le monde a changé au cours des 50 dernières années. La mondialisation est une manifestation évidente de son évolution. J'estime que dans cette ère de mondialisation, les étudiants doivent avoir des compétences non seulement dans deux langues, mais également dans trois langues ou plus, en plus de nouvelles connaissances culturelles. Les programmes canadiens d'immersion furent un excellent point de départ pour répondre à ces besoins internationaux avant même qu'ils ne se manifestent, mais je crains que nous perdons rapidement du terrain par rapport au reste du monde, parce que nous n'avons pas renouvelé notre intérêt à l'égard de ces programmes.
J'aimerais conclure mon exposé sur une statistique très intéressante. On estime qu'il y a plus de gens dont l'anglais est la langue seconde qu'il y en a dont c'est la langue maternelle. C'est un facteur très important sur le plan des politiques et de l'enseignement. Cela indique que si l'anglais est bel et bien une langue internationale, une langue qui mérite d'être connue, elle ne suffit peut-être pas, car les unilingues anglophones vont devoir se mesurer à de nombreux candidats multilingues sur le marché mondial, qui connaissent l'anglais, mais aussi le Chinois, l'arabe, l'espagnol, etc.
Je crois que notre idée de l'immersion dans le contexte national est tout à fait valable et constitue un premier pas important, mais je crois que nous devons voir plus grand et tenir compte des réalités internationales.
Je vais m'arrêter là-dessus, car je crois que mon temps est écoulé.
Merci.
Merci, monsieur Genesee, pour votre exposé.
Nous allons donc entamer la séance de questions et de commentaires avec M. Dubé.
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Monsieur Genesee, merci d'être ici. C'est toujours un plaisir de rencontrer un autre « McGillois ».
Je me suis reconnu plusieurs fois dans votre exposé. J'ai moi-même suivi un programme d'immersion française; ma mère enseigne l'anglais langue seconde, et mon frère n'a pas pu être inscrit à un programme d'immersion, car il avait des difficultés ou un trouble d'apprentissage, peu importe le terme. Et c'est précisément de cela dont vous nous avez parlé.
Je trouve intéressant votre commentaire sur l'élitisme, car les programmes d'immersion sont toujours vus comme la « cerise sur le gâteau ». On se questionne beaucoup sur l'intégration de ces programmes dans les collectivités. Vous en avez parlé brièvement, et je me demandais si vous pouviez nous en dire un peu plus à ce sujet.
C'est un enjeu complexe. D'un côté, dans une société égalitaire comme la nôtre, je crois que les programmes scolaires devraient être accessibles à tous. À l'heure actuelle, les écoles offrant des programmes d'immersion ont du mal à travailler avec les étudiants ayant des difficultés d'apprentissage, qui finissent par être exclus pour cette raison — comme je le disais, habituellement de façon non officielle.
Une des mesures à prendre est de donner des ressources aux districts scolaires, aux commissions scolaires et aux enseignants pour les aider à travailler avec les étudiants ayant des difficultés d'apprentissage. De plus amples recherches sont aussi nécessaires pour certains aspects de ce secteur. Il faut également faire preuve de leadership en passant le message aux parents et aux éducateurs que les étudiants ayant des difficultés d'apprentissage peuvent très bien réussir dans des programmes d'immersion. Ils ne sont pas plus à risque dans un programme d'immersion que dans un programme unilingue. Les recherches sont très claires là-dessus.
Je crois que le message va se rendre à l'ensemble des collectivités s'il vient de l'échelon national. Je ne vois tout simplement pas comment cela pourrait être possible au niveau provincial ou communautaire.
Selon moi, comme nous sommes dans un pays officiellement bilingue, il faut que ce leadership vienne de l'échelon national pour que le message se rende et qu'on respecte le mandat national à cet égard.
[Français]
Vous parlez de succès dans les autres matières, par exemple les mathématiques. Qu'arrive-t-il si quelqu'un dont la langue maternelle est l'anglais a eu à traiter des sujets en français et d'autres en anglais? Cela représente-t-il des défis supplémentaires? Vous dites que des études prouvent que ce n'est pas le cas, mais cela dépend-il de l'âge auquel on commence? Faut-il commencer plus jeune pour que ce soit plus favorable et réussir à l'école dans une telle situation?
[Traduction]
Le sommaire que je vous ai envoyé aborde en partie la question. De nombreuses études ont été menées, principalement aux premiers niveaux des programmes d'immersion française, auprès d'enfants issus de milieux défavorisés et à risque de difficultés scolaires en raison de troubles cognitifs ayant entraîné des lacunes dans la maîtrise de leur langue maternelle. Tous ces facteurs sont généralement synonymes de piètres résultats scolaires par rapport aux enfants qui n'éprouvent pas ces difficultés. Mais selon les recherches effectuées auprès des apprenants à risque, les enfants présentant des lacunes dans leur langue maternelle, ou ceux ayant des habiletés intellectuelles sous la moyenne, réussissent tout aussi bien que des élèves dans la même situation inscrits à un programme régulier en anglais.
Si on prend un enfant ayant des difficultés d'apprentissage linguistique inscrit à un programme d'immersion française et qu'on compare ses résultats à un enfant ayant aussi des difficultés d'apprentissage linguistique mais inscrit à un programme en anglais seulement, l'élève en immersion réussit aussi bien que l'autre dans sa langue maternelle et en mathématiques et en sciences, en plus d'acquérir des compétences avancées en français.
Il n'y a pas autant d'études sur ces enfants que nous le souhaiterions, et c'est pourquoi je crois qu'il faut appuyer cette recherche. À date, toutes les études effectuées montrent que les enfants qui ont des difficultés scolaires ne sont pas plus à risque d'échouer dans un programme d'immersion que dans un programme unilingue anglophone.
[Français]
[Traduction]
[Français]
C'est parfait. Merci.
Vous avez parlé d'études et de vision nationale. Les programmes d'immersion connaissent-ils plus de succès dans certaines régions du pays que dans d'autres? Y a-t-il des lacunes qui pourraient être corrigées dans certains endroits?
[Traduction]
C'est une question intéressante. Il n'y a tout simplement pas d'études sur ces questions, en partie parce que les efforts de recherche, comme les projets pédagogiques, sont localisés. Pour avoir une comparaison nationale, il faudrait entreprendre une initiative pancanadienne, et cela n'a jamais été fait.
[Français]
Au fond, vous dites que le programme d'immersion souffre peut-être d'un manque de leadership qui nous empêche de bien voir la réalité pancanadienne à cet égard. Est-ce exact?
[Traduction]
Il existe une organisation appelée Canadian Parents for French, qui a été fondée, si je ne me trompe pas, par le premier commissaire aux langues officielles, Keith Spicer. Il a créé cette organisation.
Canadian Parents for French surveille la situation de l'immersion française à l'échelle du pays, mais vu la nature de l'organisation, il y a des limites à ce qu'elle peut faire. Les chercheurs des différentes provinces travaillant en collaboration pourraient probablement mieux répondre à certaines de vos questions. La recherche n'est pas la mission première de Canadian Parents for French. L'organisation s'en tient à ce qu'elle peut faire.
De façon générale, il n'y a pas beaucoup de soutien offert aux efforts de recherche à cet égard. Par exemple, j'ai soumis au Conseil de recherches en sciences humaines un projet de recherche sur les enfants ayant des difficultés de lecture en immersion française. La subvention a été refusée parce que... C'était dans le cadre d'une initiative du CRSH sur les langues officielles. Ma demande a été rejetée en partie parce qu'elle n'était pas pertinente selon le mandat de la subvention.
Il est très difficile au Canada de faire des recherches de nature appliquée, parce que nos organismes subventionnaires actuels soutiennent principalement la recherche axée sur les données théoriques.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Genesee, d'être ici aujourd'hui.
Certaines de vos recommandations rejoignent ce que d'autres témoins ont dit au comité pour ce qui est de l'allocation de ressources aux provinces, qui sont responsables des programmes d'immersion française, surtout pour les enfants d'âge scolaire. J'aimerais revenir sur ce que vous disiez à propos des étudiants postsecondaires, et sur les autres possibilités d'immersion que nous devrions envisager.
Une des questions clés entourant l'immersion française est de savoir quel est exactement le rôle du gouvernement fédéral dans tout cela. Le Canada est une fédération complexe, en quelque sorte; il n'y a même pas de ministère fédéral de l'Éducation. Vous avez parlé de promouvoir le développement des méthodes pédagogiques et de donner des ressources aux collectivités et aux commissions scolaires. Vous avez dit avoir étudié ce qui se fait ailleurs dans le monde, comme aux États-Unis et en Europe, où le gouvernement fédéral travaille en collaboration avec les autres ordres de gouvernement et fournit ces ressources sous forme de services partagés.
Y a-t-il des modèles dont nous pourrions nous inspirer pour trouver quelque chose qui semble bien fonctionner?
C'est une très bonne question. Je sais que c'est un dossier complexe au Canada, vu les différentes administrations.
Je connais quelques modèles, notamment celui des États-Unis. Il est intéressant de noter que les États-Unis comptent plusieurs centres nationaux axés sur l'apprentissage d'une langue seconde et de langues étrangères, bien plus que ce que nous avons au Canada, même s'il n'y a pas de langue officielle là-bas. Autre fait intéressant, selon les modèles américains, le financement provient soit d'un organisme fédéral — aux États-Unis, il y a le département de l'Éducation, ce que nous n'avons pas au Canada —, soit d'un organisme équivalent à Patrimoine canadien ou au Commissariat aux langues officielles. Ils ont les fonds nécessaires pour émettre des demandes de propositions afin que des centres de recherche ou des centres de services assurent des systèmes de recherche ou de soutien.
Les centres que j'ai vus dans d'autres pays sont généralement issus d'initiatives du gouvernement fédéral. Ils ne sont pas nécessairement établis en collaboration avec les provinces, mais au final, ils répondent aux besoins de la plupart des provinces.
Mais le gros problème est évidemment l'argent. Il faut avoir les ressources pour mettre en place des centres comme ceux-là. Il est très logique qu'ils soient établis dans des universités, car il existe des mécanismes grâce auxquels le gouvernement fédéral peut offrir des fonds supplémentaires aux universités à des fins de recherche ou de projets professionnels.
À mon avis, avec un peu de créativité, le gouvernement fédéral pourrait entreprendre des initiatives en ce sens, sans trop empiéter sur le terrain des provinces, en établissant ces centres dans des centres universitaires déjà en place ou en faisant appel à des associations nationales comme Canadian Parents for French, l'Association canadienne des professeurs d'immersion et l'Association canadienne des professeurs de langues secondes. Les recherches pourraient peut-être être assurées par des centres nationaux établis si le gouvernement fédéral leur versait un soutien financier.
Le dilemme... Cela dépasse peut-être mes compétences, mais je pense que si vous tentez de créer de tels centres en collaboration avec les provinces, il pourrait s'avérer extrêmement difficile d'obtenir un consensus, même si les éducateurs et les chercheurs pourraient vous dire ce qui doit être fait.
Oui, je comprends. Au Canada, la situation rappelle celle de Jefferson contre Hamilton quand il est question de déterminer le rôle des provinces par rapport à celui du gouvernement fédéral.
Je crois que nous devons conclure très bientôt, mais ai-je le temps de poser une autre question?
J'ai aimé votre commentaire à propos du fait qu'il y a plus de gens dont l'anglais est la langue seconde qu'il y en a dont c'est la langue maternelle, et que cela leur donne un avantage concurrentiel.
J'ai vu dans le document que vous nous avez fourni qu'on fait mention des liens importants entre la créativité et les compétences en langue seconde et les compétences multilingues. De toute évidence, cela procure des avantages dans le monde des affaires, en diplomatie et dans bien d'autres domaines.
Pourriez-vous nous en parler un peu plus? S'il faut faire valoir les retombées positives des investissements faits dans la promotion de l'apprentissage d'une langue seconde et de plusieurs autres, qu'est-ce que cela signifie pour la compétitivité du Canada?
Je crois que les Canadiens, les Canadiens unilingues surtout, et les entreprises canadiennes vont de plus en plus devoir se mesurer à des candidats et à des compagnies de partout dans le monde qui ont l'avantage d'être multilingues. Nous maîtrisons assez bien le français et l'anglais, mais nous avons négligé les autres langues.
Pour le bien de la population du Canada, mais aussi de l'économie canadienne, nous devrions tâcher d'être en meilleure position face à la concurrence, ce que nous permettrait probablement le fait d'avoir un effectif multilingue, car la mondialisation est de plus en plus omniprésente.
Merci.
Nous avons quelques questions de la part de M. Dion. Nous allons ensuite conclure la séance.
Monsieur Dion.
Monsieur Genesee, merci beaucoup de vous joindre à nous et merci pour les recherches que vous faites dans ce dossier.
Il ne nous reste que quelques minutes avant d'aller voter à la Chambre, alors au risque de vous faire répéter, je vous demanderais de mettre l'accent sur les changements qu'il faudrait nécessairement apporter aux politiques fédérales dans ce dossier, à votre avis. Si vous deviez les énumérer, quels seraient-ils?
Eh bien, c'est une question piège, car je ne connais pas très bien les rouages du gouvernement fédéral.
Je pense que le gouvernement fédéral devrait changer ses politiques ou appliquer les politiques actuelles avec une énergie nouvelle en vue d'appuyer le bilinguisme. Il y a plusieurs moyens que pourrait prendre le gouvernement fédéral, y compris le Commissariat aux langues officielles et Patrimoine canadien, pour y arriver.
Il pourrait simplement s'agir d'une campagne publicitaire qui souligne l'importance d'apprendre le français et d'autres langues dans un contexte canadien et international. Je crois que nous, les Canadiens anglais, sous-estimons l'importance de ces enjeux, car nous avons l'impression que tout le monde parle anglais et que nous n'avons pas à nous en faire. C'est une présomption qui me paraît très risquée.
Le gouvernement fédéral pourrait peut-être aussi élaborer ou adopter des politiques qui visent à allouer des ressources au niveau national pour aider les collectivités qui offrent des programmes d'immersion française à relever les défis auxquels elles sont confrontées.
Ce sont des enjeux importants et nos provinces fourmillent de gens compétents, mais il n'existe aucun mécanisme leur permettant de travailler ensemble pour soutenir les programmes d'immersion française, de même que les enseignants et les étudiants des programmes d'immersion française.
D'après moi, la solution serait d'établir un centre qui offrirait des ressources pour appuyer l'enseignement immersif, car c'est ce qui se fait ailleurs dans le monde.
Je ne suis pas certain de comprendre le mandat de ces centres nationaux. Pourriez-vous me l'expliquer?
Cela peut paraître banal pour vous et moi, mais ce sont des questions très importantes pour les écoles. Il y a d'abord la diffusion de l'information aux intervenants de la collectivité — les parents, les éducateurs et les spécialistes qui travaillent avec les enfants pour cerner l'état actuel de la recherche sur l'apprentissage d'une langue seconde et les programmes d'immersion.
Il leur faut aussi du matériel pédagogique pour enseigner aux étudiants dans une langue seconde.
Nous avons besoin d'instruments d'évaluation pour nous aider à reconnaître les étudiants qui ont des difficultés d'apprentissage et qui ont besoin d'aides supplémentaires.
Les spécialistes ont besoin de ressources pour outiller les enfants qui ont des besoins spéciaux en immersion. Cela pourrait se faire à l'échelon local ou provincial, mais je pense que nous devons mettre nos ressources en commun afin d'en avoir plus pour notre argent.
C'est ce genre de choses.
Monsieur Genesee, je vous remercie pour votre déclaration liminaire et pour le mémoire que vous nous avez soumis dans les deux langues officielles, de même que pour les références bibliographiques des documents de recherche sur lesquels vous vous êtes appuyé.
Merci aux membres du comité pour leurs questions et leurs commentaires.
Votre témoignage nous sera très utile. Notre analyste va l'examiner de plus près pour la rédaction de notre rapport préliminaire.
La sonnerie d'appel se fait entendre depuis 10 minutes, alors nous allons conclure là-dessus. Merci beaucoup.
La séance est levée.
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