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Bienvenue à la 109
e séance du Comité permanent de la condition féminine. Nous poursuivons notre étude sur les obstacles auxquels se heurtent les femmes en politique.
Avant de commencer, je tiens à vous informer que notre rapport sur la sécurité économique des femmes a été déposé à la Chambre par notre présidente, Mme Vecchio, qui ne peut être ici cet après-midi.
J’ai le plaisir d’accueillir, du Groupe Femmes, Politique et Démocratie, Thérèse Mailloux, présidente du conseil d’administration, et Esther Lapointe; et, à titre personnel, l’honorable Joanne Bernard et l’honorable Deborah Grey.
Je vous souhaite à toutes la bienvenue.
Je vous cède maintenant la parole, madame Mailloux, pour votre déclaration préliminaire de sept minutes.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Le Groupe femmes, politique et démocratie remercie le Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes de son invitation.
La sous-représentation des femmes dans les lieux d'influence et de pouvoir est un enjeu qui se situe au coeur même de la mission du Groupe. En plus de réaliser son mandat d'éducation et de formation, le Groupe travaille activement depuis quelques années à promouvoir la parité auprès des partis politiques et des élus du Québec. À trois reprises en avril — le mois où les femmes ont obtenu le droit de vote au Québec —, il a organisé des événements à l'Assemblée nationale en lançant d'abord le mouvement En marche pour la parité, en 2016, en formant une coalition de Partenaires pour la parité, en 2017, en rencontrant chacun des chefs de parti dans le contexte de la prochaine élection et en leur remettant officiellement, en 2018, un projet de loi pour la parité.
En marche pour la parité regroupe aujourd'hui 20 organisations Partenaires pour la parité, ce qui représente près de 500 organismes et 1,3 million de personnes, engagées à appuyer toute avancée en faveur de l'atteinte de la parité et qui réclament une loi garantissant la parité entre les femmes et les hommes au sein des instances décisionnelles publiques.
Ces actions ont porté des fruits. En effet, en avril 2017, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité une motion affirmant ce qui suit:
QU’elle s’engage à ce que la parité dans tous les secteurs de la société soit désormais l’objectif à atteindre;
Les chefs des partis politiques se sont aussi engagés, pour la prochaine élection du 1er octobre 2018, à présenter des candidates de façon à atteindre la zone de parité de 40/60 ou de s'en approcher le plus possible. Autour de ces événements s'est exprimée plusieurs fois au Québec une opinion publique souvent favorable à une parité de candidatures. Par exemple, à la mi-avril, 69 % des répondants à un sondage Léger-Le Devoir disaient penser que les partis politiques devraient compter autant de femmes que d'hommes parmi leurs candidats.
Des facteurs systémiques et structurels freinent l'accès des femmes à la vie politique par des barrières invisibles. Parmi les obstacles qui pèsent lourd — le plus lourd dirions-nous —, il y a le recrutement et la sélection par les partis politiques. Le monde de la politique est occupé depuis toujours par des hommes qui ont tendance à se reproduire, recrutant les candidats dans leurs réseaux, utilisant des méthodes qui ne sont pas adaptées à une clientèle féminine et opérant avec des partis pris et des préjugés. Pour inclure les femmes en toute parité, il faut casser le moule et leur faire de la place dans une arène hautement convoitée par les hommes. La responsabilité de ce changement ne peut pas reposer uniquement sur les femmes ou sur une progression soit-disant naturelle.
Nous croyons donc que les partis politiques devraient avoir à assumer une obligation de résultat. Ils devraient être tenus, en vertu de la loi, de présenter une liste constituée à parts égales de femmes et d'hommes. Ainsi, une fois que le filtre de l'étape du scrutin aurait agi, la députation élue se situerait dans une zone paritaire se situant entre 40 et 60 % ou, idéalement, entre 45 et 55 % des deux sexes. Afin d'appliquer ce changement et d'adopter des listes de candidatures paritaires, les partis politiques pourraient bénéficier pendant un certain temps de ressources financières additionnelles pour mettre en application des gestes concrets bien en amont des périodes électorales.
Notre mode de scrutin uninominal à un tour n'est pas un obstacle à la parité. De nombreux experts rappellent d'ailleurs que notre mode de scrutin permet d'utiliser plusieurs stratégies — ce qui a été fait, de façon efficace — pour favoriser l'émergence de candidatures féminines.
Tout comme au sein de la députation qui exerce le pouvoir législatif, il est très important que les femmes puissent être paritaires au gouvernement, à savoir le pouvoir exécutif, compte tenu des orientations majeures qui s'y prennent, notamment dans le choix, la présentation et l'application des lois, des politiques et des programmes.
Si, au Québec, dans d'autres provinces et à la Chambre des communes, il y a ou il y a eu des Cabinets paritaires, il reste que cela repose sur une décision individuelle et révocable en tout temps. Par conséquent, nous recommandons aussi d'établir dès maintenant dans une loi le principe de la parité au Conseil des ministres.
L'augmentation substantielle et rapide de la présence des femmes dans les Parlements est, à notre avis, le moteur le plus puissant qui permettra d'y instaurer une véritable égalité entre les hommes et les femmes. Elle seule est susceptible d'entraîner d'autres changements nécessaires, par exemple une culture respectueuse, une réduction du harcèlement et des confrontations guerrières, ainsi qu'une éventuelle transformation de règles comme la discipline absolue des partis. Ce sont les quelques députées en place, assistées d'alliés masculins, qui sont à l'origine de quelques améliorations à l'horaire et au calendrier des travaux parlementaires.
Quand elles y seront à parité, elles verront aussi à mettre en place ou à parfaire des politiques et des mesures créant un contexte favorable à leur présence, en particulier pour faciliter la conciliation de leur travail avec leur famille.
En conclusion, l'expérience mondiale nous démontre qu'il y a des solutions durables à la sous-représentation des femmes en politique. Elles passent par des mesures contraignantes, qu'on les nomme quotas ou lois sur la parité. Or ce sont les partis politiques qui possèdent les clés de cette transformation, car ce sont eux qui sélectionnent et recrutent les candidates, mais aussi ceux qui forment les gouvernements et qui adoptent les lois.
La réussite passe donc par leur engagement, et celui-ci n'arrive pas, la plupart du temps, sans l'impulsion et les pressions du public et du mouvement des femmes. Voilà le défi collectif, croyons-nous, de toutes et de tous, femmes et hommes de tous les milieux et de toutes les composantes du tissu social: inscrire la parité comme condition essentielle de l'exercice démocratique du pouvoir et de la gouvernance.
Je vous remercie.
Nous serons heureuses de répondre à vos questions.
Je n’ai rien écrit, parce que je vais simplement vous décrire ce que je vis depuis trois ans et demi.
Je suis entrée en politique à la veille de mon 50e anniversaire. Je voulais me porter candidate depuis l’âge de huit ans. À l’âge de huit ans, j’ai écrit au ministre de l’époque, Pierre Elliot Trudeau, pour déplorer la chasse au phoque. Environ trois semaines plus tard, j’ai reçu une réponse, et dans ma tête d'enfant de huit ans, j'étais sûre qu'il l'avait rédigée lui-même, mais nous savons tous qu’elle venait d’un employé. À ce moment-là toutefois, j’ai décidé qu’un jour, d’une façon ou d’une autre, j’allais faire de la politique. Je ne savais pas dans quel ordre d'administration publique. Je savais que ce serait à un niveau plus élevé que celui de représentante des élèves que j’avais atteint à l’âge de 15 ans.
J’ai grandi et je suis devenue mère célibataire pendant neuf ans, élevant mon fils grâce au soutien du revenu pendant mes études universitaires, d’abord à l’Université Mount Saint Vincent, puis pendant mes études de maîtrise à l’Université Acadia. Ces deux diplômes étaient en sciences politiques parce que je caressais encore ce rêve.
Je suis ensuite allée travailler pour la communauté des femmes et j’ai eu une belle carrière en aidant les femmes qui quittaient la violence familiale, en aidant les jeunes enfants qui étaient témoins de violence à la maison, et j'ai acquis une réputation à l'échelle nationale grâce à la Fondation Donner pour mon travail dans le secteur sans but lucratif.
À 49 ans, je me suis présentée en politique. Je ne connaissais personne dans l’association de circonscription. On ne m’avait pas approchée. J’avais été en quelque sorte approuvée par quelques collègues du Parti libéral de la Nouvelle-Écosse qui étaient des élues à l’époque, deux des élues de ce parti. J’ai été encadrée. Je me suis fait un devoir d’aller parler à Mary Clancy, à Diana Whalen et à Kelly Regan, afin de connaître leurs expériences. C’est l'expérience de Mary qui m'a inspiré la plus grande crainte. Que l'on soit d’accord ou non avec ses opinions, c’était la première indication de ce à quoi je pourrais me heurter comme femme en politique.
J’ai remporté l’investiture le 2 février 2012 et j’ai mené une campagne en septembre 2013. Le premier indice de ce que pourrait être ma vie si je gagnais m'est apparu pendant la campagne, parce que j’avais fait beaucoup de travail avant et je l’avais précisé dans ma biographie, à l'instar de chacune d’entre nous ici présentes. J’ai ajouté une phrase qui a attiré l’attention de quelqu’un de ma circonscription: « mariée à Annette, mère d’un fils adulte Taylor et de cinq chats adoptés ». Ce ne sont pas les chats et ce n’est pas Taylor qui ont été à l'origine du courrier haineux reçu à mon bureau de candidate en 2013, mais c’est plutôt le fait que j’étais mariée à Annette.
J’ai reçu une lettre magnifiquement écrite de ce que je croyais être la main d'une femme, mais je n’en suis pas certaine, dans laquelle on me disait très clairement: « Vous aviez mon vote jusqu’à ce que je lise cette phrase. » À partir de ce courrier haineux, une expérience que je n’avais jamais vraiment vécue auparavant, même si j'étais assurément consciente de l'existence de l’homophobie, j’ai écrit un gazouillis positif ce soir-là pour en parler. Huffington Post l’a repris, et j’ai pu transformer une expérience très négative en un message très positif.
La veille du 8 octobre 2013, j'étais une bonne chef de file de ma collectivité, et le 8 octobre 2013, j'étais soudainement devenue une voleuse, quelqu’un qui était là pour faire avancer ses propres intérêts, et non ceux de ses concitoyens. Du jour au lendemain, tout a changé. Je n’étais pas la seule à en faire l’expérience, mais j’ai ensuite été nommée à un portefeuille très instable, celui des Services communautaires. N’importe quel ministre des Services communautaires, où que ce soit au Canada vous dira que c’est un portefeuille très instable, parce que vous traitez de très proche avec des gens qui traversent la pire épreuve de leur vie. Comme j’avais moi-même profité des services du ministère que je dirigeais à l’époque, les attentes étaient très élevées envers moi.
Le sexisme, la misogynie et l’homophobie qui se sont manifestés au cours des mois qui ont suivi mon arrivée au pouvoir m’ont énormément affectée. Ma partenaire et mon fils en ont souffert énormément. Mon fils avait 23 ans à l’époque. Après avoir lu un premier gazouillis négatif à mon sujet, il s’est retiré des médias sociaux, puis il est resté à l’écart et il demeure à l’écart parce que la situation perdure encore aujourd’hui. Il m'arrive encore de temps en temps d'être victime d'un troll, mais assurément pas autant qu'avant.
Au cours des trois ou quatre dernières années, j’ai beaucoup parlé de mon expérience de l’homophobie, et j’ai adopté une position très publique à ce sujet en juillet 2015. J’ai révélé publiquement, aux bulletins télévisés de 18 heures, de ce que je vivais à titre de ministre. Je ne peux qu’imaginer ce qui se passe dans nos rues et dans nos régions rurales de la Nouvelle-Écosse, si je me fie à ce que j'ai subi moi-même. Je recevais des appels hebdomadaires à mon bureau de circonscription, à mon bureau de caucus et à mon bureau ministériel. La misogynie et les mots qui m’ont été adressés...
Ensuite, on commence à voir la haine à laquelle s'exposent Rachel Notley, Kathleen Wynne, Cathy Bennett, Rochelle Squires en Saskatchewan. Nous avons toutes commencé à parler entre nous et à dire que nous devions raconter ce que nous vivions, et c'est ce que nous avons fait.
La cyberintimidation et la violence verbale envers les femmes dans les médias sociaux sont bien documentées d’un bout à l’autre du pays. En ma qualité de ministre, j’étais devenue réticente à encourager les jeunes femmes à se porter candidates. Heureusement, j’ai rapidement surmonté cette réticence et j'ai simplement décidé de ne jamais fermer les yeux sur cette situation. N'acceptez jamais que quelqu'un vous conseille de vous forger une carapace, parce que c’est ainsi que l'on ferme depuis trop longtemps les yeux sur la violence faite aux femmes. À partir du moment où ces attaques ne vous touchent d’aucune façon, c’est le temps d'abandonner la politique. C’est aussi simple que cela.
Comme je n’ai pas été réélue en mai 2017, je suis désormais libre de toute affiliation politique et partisane. Je viens parler de mon expérience et, d’une certaine façon, j’espère que cela aidera la prochaine génération de femmes en politique.
Je suis heureuse d’être de retour sur la Colline. C’est assez drôle d’être assise de ce côté-ci de la table. Plutôt que d’interroger, je suis l'interrogée. Je tiens à vous féliciter toutes pour votre élection. C’est une occasion incroyable que peu de gens ont l’occasion de vivre, c’est certain.
J’ai été élevée à Vancouver par une mère célibataire dans les années 1960. Comme mon père était alcoolique, je comprends cette situation et toute la douleur qui en découle. Je suis heureuse d’avoir eu avec ma mère un modèle à suivre. C’est si remarquable.
Quant aux obstacles pour les femmes en politique, c’est intéressant. Je ne vois probablement pas les choses de la même façon que beaucoup d’entre vous. Je vais évidemment parler de mon expérience personnelle.
J’ai pris l’avion pour venir ici avec une femme qui est comptable agréée. Elle était accompagnée par son garçon de huit ans et, comme elle l’a dit elle-même, elle venait l’« abandonner » chez sa mère, parce qu’elle avait deux semaines de travail. Elle doit souvent se déplacer dans sa profession de comptable.
Je dirais que c’est un obstacle pour les femmes, mais pas nécessairement en politique. Comme vous le savez, on rencontre toujours des professionnelles dans les avions. Il est difficile pour elles de s’occuper de leurs proches et de s’assurer qu’on s’occupe bien d’eux.
J’ai été la première députée élue du Parti réformiste le 13 mars 1989. À ce titre, j'ai inscrit mon nom dans l’histoire du pays. J’ai été la première femme chef de l’opposition officielle au Canada en 2000 et j'ai donc encore fait partie de l’histoire du pays. J'ai assurément été surprise, et ma mère aussi a été stupéfaite.
Des obstacles? Il y en a eu. Mais comme quelqu’un me le faisait remarquer l’autre jour dans l’avion: « Je suppose que vous les avez surmontés, Deb, d’une façon ou d’une autre. », et c'est vrai. C’est ce que je savais faire. J’ai été députée pendant près de 15 ans et demi. Après quatre mandats, je suis partie le 28 juin 2004 avant de perdre le feu sacré. Je ne voulais pas être rejetée par les électeurs. C’était la meilleure façon pour moi de quitter la politique.
Je suis maintenant partie depuis presque aussi longtemps que j'ai été en politique. Je tiens à vous assurer qu’il y a une vie après la politique, et c’est bien. Il m'arrive encore de prononcer des allocutions ici et là, mais je suis heureuse d’être semi-retraitée et de vivre sur l’île de Vancouver. Je fais encore de la moto, pour ceux que cela intéresse. Je vais célébrer mon 25e anniversaire de mariage en août.
J’aimerais vous parler de moi comme femme aujourd’hui — de ce qui me définit ou non — et de la façon dont je perçois les obstacles.
Pour ce qui me définit, je suis compétente. Il se trouve que je suis une femme, mais j’ai deux diplômes universitaires. J’ai enseigné pendant une décennie. J’ai servi ici pendant une décennie et demie. J’ai jonglé avec des enfants en famille d’accueil, le mariage, les beaux-enfants et une carrière à l'extérieur. Comme vous le savez, je venais de l’autre bout du pays.
J’ai eu affaire à des gens qui s’opposaient à moi à chaque occasion — Joanne, je sais que ce n’est pas drôle —, mais à titre de femme compétente, j’ai appris à jongler, comme beaucoup d’entre vous. Je ne stresse pas, j'agis. C’est aussi simple que cela.
Deuxièmement, je suis compétitive. Si je joue au Scrabble ou au crible avec vous, je tiens à gagner.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Deborah Grey: Oui. J’adore gagner.
J'accepte aussi la défaite de temps à autre, et cela m'a probablement assez bien servi en politique fédérale. Si vous êtes compétitive, vous arrivez à gérer ces problèmes de mise en candidature et d’élection. On reproche souvent aux femmes d’être compétitives ou de s'affirmer. Ces gens-là, nous savons de quoi il s'agit, mais je n'en parlerai pas maintenant.
J'ai pour principe de ne pas m'énerver, parce que si vous vous offusquez et que vous passez votre vie ainsi offusquée, vous n'accomplirez jamais grand-chose. Nellie McClung, l'une des Célèbres cinq, a dit: « il ne faut jamais battre en retraite, ne jamais s'expliquer, ne jamais s'excuser, mais agir en faisant fi de la critique ».
Troisièmement, je suis engagée. Je me suis engagée à servir, à encourager et à encadrer, un don que nous avons, nous les femmes. Oui, je crois que les hommes et les femmes ont des dons et des forces différents. Vous ne pouvez pas battre en retraite au premier signe de danger ou de défaite, parce que vous savez trop bien ce que l'on dira de vous. Mon travail, comme femme, consiste à voir à ce que tout se passe bien, à aider un électeur, à préserver mon mariage et à gâter mes petits-enfants.
Pour ce qui ne me définit pas, je ne suis pas une victime simplement parce que je suis une femme. Je peux me tenir debout, sur mes deux pieds. Je peux mener mes propres combats et mes propres campagnes. Pourvu que les règles du jeu soient les mêmes pour tous, je peux me mesurer à n’importe qui. Ne me prenez pas en pitié, car dans un tel cas, je vais moi-même vous prendre en pitié de le faire. Les femmes n’ont pas besoin de pitié.
Deuxièmement, je ne suis ni un pourcentage ni un chiffre. Oui, je suis une femme. Oui, nous représentons 50 % de la population, mais je ne veux pas être assujettie à un système de quota et que quelqu’un puisse dire: « Deb Grey a été élue parce qu’elle était une femme. »
Si quelqu’un me présentait à une autre personne et lui demandait de voter pour moi parce que je suis une femme, mon sang ne ferait qu'un tour. Ce n'est pas du tout comme cela que je vois les choses.
Laissez-moi vous parler d’un véritable obstacle pour les femmes — et pour certains hommes — en politique: se faire dire par un homme, rien de moins, que je suis inapte à une charge publique parce que je crois à la liberté de religion, ou parce que je suis pro-vie. Vous savez quoi? Comme femme, je ne suis manifestement pas inapte à une charge publique. J’ai rempli quatre mandats.
Savez-vous qui devrait prendre cette décision et qui devrait décider si je suis apte ou non à occuper une charge publique? Ce sont les électeurs. Ils devraient décider si je suis assez bonne pour occuper une charge publique et — vous savez quoi — je suppose que je l’étais.
Merci.
Des députés: Bravo!
Le Groupe femmes, politique et démocratie travaille depuis 20 ans maintenant à toutes sortes d'autres solutions. Nous faisons de la formation, de l'éducation à la citoyenneté et de la sensibilisation de façon générale. Nous faisons cela depuis 20 ans, mais les chiffres n'ont pas changé.
Au Québec, le nombre de députées stagne depuis 15 ans. Ce nombre a monté à 32 %, mais il est redescendu à 27 %. Actuellement, il est de à 29,6 %, donc sous la barre des 30 %. C'est comme si la barrière des 30 % n'arrivait pas à être franchie, malgré les efforts de notre groupe et d'autres acteurs au Québec.
Depuis plusieurs années, le gouvernement investit dans toutes sortes de programmes. Par exemple, nous avons des tables régionales dans chacune des régions, qui travaillent beaucoup à la hausse de la représentation des femmes dans les élections municipales. Des subventions sont aussi accordées à des regroupements de municipalités, afin de favoriser l'élection d'un plus grand nombre de femmes dans toutes les élections municipales.
Ce n'est pas seulement nous qui le disons, c'est documenté dans la littérature, il faut quelque chose d'un peu plus contraignant et qui ait plus de mordant, que ce soit au moyen de quotas, de lois sur la parité ou d'incitatifs financiers. Je sais que ce n'est pas le cas dans tout le Canada, mais au Québec, 75 % du financement des partis politiques provient de l'État. C'est l'argent des contribuables qui finance directement les partis politiques. On peut alors se demander s'il ne devrait pas y avoir, en contrepartie, une obligation de justice ou d'équité de représentation.
Pour résumer, nous croyons qu'il y a un ensemble de solutions mais que le vrai moteur consiste à exercer une pression sur les partis politiques. Au Québec, nous nous préparons à l'élection générale, qui aura lieu au début d'octobre prochain. Notre groupe a fait beaucoup d'efforts pour faire prendre conscience aux divers partis politiques que la parité est essentielle. Il faut dire que, au Québec, la discussion sur la parité est très vive ces temps-ci. Il y a eu des élections municipales. Une femme a été élue comme mairesse de Montréal et plusieurs autres ont été élues mairesses de grandes Villes. Il y a des conseils municipaux paritaires dans de très grandes Villes comme Québec et Montréal.
Tout ce contexte a été très favorable pour exercer une pression sur les partis politiques. Selon les dernières statistiques, il y a 48 % de candidatures féminines. Il n'y a pas de loi, mais il y a eu une pression énorme sur les partis politiques. Dorénavant, ces partis se disent que, s'ils n'ont pas suffisamment de femmes dans leur équipe, ils ratent quelque chose.
Ce que nous voulons illustrer ici, c'est la façon dont une pression exercée sur les partis politiques peut faire bouger les choses.
Merci beaucoup.
[Traduction]
Madame Bernard et madame Grey, tout d’abord, c’était vraiment inspirant de vous entendre parler, très motivant. En ma qualité de jeune femme, la plus jeune de mon parti, je suis confrontée à bon nombre des obstacles dont vous avez parlé, et j’essaie d’adopter la même mentalité que vous, même si ce n'est pas toujours facile.
Je sais que chacune d’entre vous a fait de la politique. Plus récemment dans votre cas, mais vous avez fait de la politique active il y a quelque temps, alors les choses ont changé, je suppose, dans la société depuis.
Trouvez-vous que les femmes étaient aussi engagées que les hommes sur le terrain ou à la base, ou croyez-vous plutôt que les hommes étaient vraiment surreprésentés parmi les bénévoles, dans l’organisation des campagnes et dans la vie politique?
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Merci beaucoup à chacune d’entre vous d’être ici aujourd'hui.
Deb, je vais commencer par vous. Vous avez remporté votre première élection partielle en 1989, puis, bien sûr, vous avez servi fidèlement jusqu’en 2004. C’est toute une carrière. Ensuite, bien sûr, comme vous l’avez mentionné, vous avez inscrit votre nom dans les livres d'histoire. Vous avez notamment été la première femme chef de l’opposition officielle. Je tiens à vous en féliciter et à vous remercier d’avoir ainsi tracé la voie à celles d’entre nous qui ont pu suivre vos traces.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de quotas. Parmi les échanges que j’ai pu avoir avec des femmes, elles m’ont notamment dit que lorsqu’elles arrivent autour de la table, pour choisir cet exemple, les hommes ne se demandent pas comment elles sont arrivées là. Ils savent qu'elles sont là parce qu'elles le méritent. Cependant, les femmes autour de la table se demandent si elles sont là en raison d'un quota de femmes à respecter ou si elles y sont en fonction du mérite. Le quota engendre en fait l’insécurité chez les femmes réunies autour de la table.
De plus, les hommes peuvent en profiter pour s’en prendre aux femmes ou remettre en question leurs compétences ou les raisons pour lesquelles elles sont à la table. Ils peuvent dire à leurs collègues féminines: « Vous êtes ici parce que vous êtes une femme. Quelles sont vos compétences, au juste? »
Il y a ce genre de commentaires et de ressentiment, si l'on peut dire. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi, selon vous, les quotas défavorisent les femmes?
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On m'a toujours demandé: « Comment est-ce d'être une députée? » Je dirais: « Je ne le sais pas vraiment, parce que je n'ai jamais été autre chose. » C'est tout ce que j'ai.
J'ai des mentors. Agnes Macphail, dont le buste a été installé près de l'antichambre pendant que j'étais ici, était une femme extraordinaire. C'était il y a très longtemps, en 1922, je crois. Un député lui a dit: « Agnes, avez-vous déjà été prise pour un homme? » et elle a répondu: « Non, et vous? » Pour moi, avec cette réponse, c'est une femme extraordinaire qui a l'assurance de pouvoir désamorcer des situations potentiellement horribles avec humour.
Au cours de ma carrière, j'ai eu la chance de pouvoir le faire lorsqu'on m'attaquait. Quelqu'un dans la rue à Radway, en Alberta, m'a dit: « Vous semblez intelligente, mais deux choses jouent contre vous. Vous êtes une enseignante et une femme. » Le seul regret que j'ai eu pendant toute ma carrière politique, c'est de ne pas avoir pris son nom et son adresse, parce que je voulais l'appeler, mais je ne savais pas qui il était.
Donc, soyez compétentes et confiantes. Faites-le tout simplement.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Tout d'abord, je tiens à m'excuser auprès de tout le monde de mon retard. J'écoutais le discours de Thomas Mulcair, qui nous quitte aujourd'hui. Comme il a été un grand leader et, entre autres, mon chef pendant plusieurs années, je tenais à lui dire au revoir en personne.
Me voilà donc parmi vous. J'ai manqué toutes vos présentations, mais j'essaie de rattraper ce que j'ai raté grâce aux questions de mes collègues.
J'aimerais pouvoir dire que le traitement des femmes et des hommes en politique est juste et équitable et qu'il n'y a pas grand-chose à faire pour les aider, mais force est de constater qu'il y a seulement 27 % de femmes à la Chambre des communes, en 2018, et à peine plus de 30 % dans le milieu politique municipal. Vous avez donné quelques chiffres quant au niveau provincial. En réalité, les femmes ne proposent pas nécessairement leur candidature d'elles-mêmes. On a aussi démontré que les publicités ne montrent pas suffisamment de modèles féminins de manière positive.
Madame Mailloux, j'aimerais savoir ce que vous pensez des modèles féminins. Y en a-t-il suffisamment?
Selon ce que j'ai pu entendre, vous avez parlé de mentorat. En 2017, au niveau municipal, il y a eu plusieurs groupes de formation pour les femmes, afin e les inciter à se présenter en politique.
Trouvez-vous que ce type d'outil devrait être davantage organisé et fourni aux femmes? Personnellement, ce n'est pas moi qui ai décidé de me présenter en politique. J'ai fini par le faire, mais c'est une amie qui m'a convaincue. Finalement, je me suis dit « pourquoi pas? ». Je suis persuadée qu'il y en a plusieurs autres dans la même situation. Finalement, c'est une expérience extraordinairement stimulante. Toutefois, si personne ne m'avait poussée à présenter ma candidature, je n'aurais jamais pensé à le faire moi-même.
Vous avez parlé des quotas. Les gens autour de la table ne sont pas tous d'accord là-dessus, et c'est bien. Au Rwanda, par exemple, 60 % des gens qui ont présenté leur candidature étaient des femmes. Cependant, on pense que les quotas qui ont été imposés dans plusieurs pays ont eu un impact important.
Pouvez-vous nous donner votre opinion à ce sujet?
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Je vais commencer par répondre à votre dernière question.
Les données recueillies un peu partout dans le monde démontrent clairement que là où il y a des quotas... En fait, ce ne sont pas tous les pays qui réussissent, parce que les quotas s'inscrivent toujours dans un contexte particulier, dans un pays ayant des traditions et une histoire particulières. Cela peut donc être très variable.
En général, les pays qui occupent les 20 ou 30 premiers rangs sur la liste de l'Union interparlementaire sont des pays qui ont des quotas inscrits dans la loi ou constitutionnels, ou des quotas que s'imposent les partis. Par exemple, pour les pays nordiques comme l'Islande, la Finlande, la Suède et la Norvège, ce sont les partis politiques eux-mêmes qui se sont imposés ces quotas. Il y a, derrière tout cela, une histoire que nous n'avons pas, mais cela fait un siècle que ces pays travaillent à l'égalité. Alors, même s'ils n'ont pas de quotas inscrits dans la loi, c'est presque aussi fort.
Encore une fois, je pense sincèrement que ce sont les partis politiques qui ont la clé du changement et que ce sont eux qui doivent avoir cette responsabilité. On impute trop souvent aux femmes la responsabilité de se présenter en politique, mais elles ont contre elles des millénaires d'obstacles systémiques qui font que ce n'est pas très facile pour elles de se présenter, pour tout un tas de raisons que tout le monde ici connaît et que je ne répéterai pas.
Il faut que les partis cassent le moule, un peu comme je l'ai dit dans ma présentation. Ils doivent procéder autrement. Il ne s'agit pas seulement d'attendre, comme ils le font, parce que, pendant qu'ils essaient de convaincre une femme, il y a 10 hommes qui se présentent au tourniquet pour être élus. Souvent, les femmes vont prendre un peu plus de temps à être convaincues. Elles vont aussi avoir besoin de planifier beaucoup plus longtemps à l'avance leur entrée en politique. Bref, il faut des méthodes modernes et différentes et il faut exploiter des réseaux différents. On sait très bien que les hommes et les femmes ne sont pas nécessairement dans les mêmes milieux. Les femmes n'ont pas nécessairement acquis des responsabilités de gestion dans les mêmes bassins que ceux des hommes. Il faut donc que les partis fournissent cet effort. Cela répond à la première question que vous m'avez posée.
En ce qui a trait au mentorat, j'aimerais bien que Mme Lapointe puisse en parler, parce qu'elle a fait beaucoup de mentorat auprès d'aspirantes politiciennes.
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Merci, madame Mailloux.
J'aimerais rappeler à l'auditoire que le Canada est au 60e rang des pays du monde pour ce qui est de la place des femmes en politique. Jusqu'à récemment, la France était tout près, soit entre le 50e et le 60e rang. Grâce à la loi sur la parité que la France a adoptée récemment, ce pays figure maintenant dans les 15 premiers à ce chapitre. Effectivement, cela a un effet et les études le démontrent. Mme Mailloux a parlé de l'étude de Manon Tremblay, une politologue de l'Université d'Ottawa, qui est réputée partout dans le monde pour les études qu'elle a faites sur le sujet. Toutes les études démontrent que la sélection et le recrutement par les partis politiques sont la clé de la parité.
On parle de mentorat, de formation, de soutien et d'accompagnement divers des femmes. Comme Mme Mailloux vous l'a dit tout à l'heure, cela fait 20 ans que notre groupe fait cela. Nous avons commencé par le palier municipal pour une raison bien simple: les élections étaient à date fixe. Maintenant, les élections sont à date fixe à tous les paliers de gouvernement. C'est une très bonne nouvelle pour la démocratie, mais aussi pour les femmes, parce que ces dernières ont besoin de plus de temps pour se préparer.
Par notre socialisation, nous avons été habituées à agir plutôt dans la sphère privée que dans la sphère publique, contrairement aux garçons, et ce, dès notre enfance. Cela a une incidence sur la façon dont nous réagissons par la suite.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vais partager mon temps de parole avec M. Fisher. Je vous serais donc très reconnaissant de répondre brièvement pour ne pas épuiser son temps de parole.
Tout d'abord, j'aimerais vraiment savoir comment nous pouvons mieux recruter ces femmes compétentes, capables — et elles sont nombreuses partout au Canada. J'ai vraiment apprécié le commentaire de ma collègue du NPD pour ce qui est de les inciter à se présenter en politique.
Lors d'une séance précédente, un groupe de témoins a dit qu'il est plus naturel pour les hommes de tout simplement supposer qu'ils sont destinés à la politique et au leadership, alors qu'il faut probablement inciter les femmes à franchir ce pas, même si elles sont tout aussi qualifiées pour le faire.
Madame Grey, vous avez donné des conseils à l'intention des femmes qui sont compétentes, capables.
J'aimerais savoir, madame Bernard et madame Grey, si vous avez des idées sur ce que nous pourrions recommander au gouvernement pour aider un plus grand nombre de ces femmes qui sont compétentes et qualifiées à se manifester.
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Je suis d'accord avec elle.
Je suis convaincue que vous et moi avons fait un certain nombre d'écoles de campagne, c'est donc une bonne chose. Je sais que le Manning Centre à Calgary en organise une pour les conservateurs, avec un petit c — mais c'est aussi non partisan que possible lorsque quelqu'un se présente pour un parti —, afin de pouvoir donner simplement les compétences de base en matière de campagne, en matière de réseautage. C'est très bien.
Hier soir, en prenant un café, j'ai entendu parler d'une femme qui se présentait pour les libéraux à Toronto. Elle s'est fait malmener, parce que les libéraux voulaient le siège pour quelqu'un d'autre — un ami — qui était plus spécial. Devinez quoi — il a gagné. Cela m'a beaucoup attristée.
Sans partisanerie, quand une femme présente sa candidature et donne l'impression qu'elle va bien faire, qu'un homme ou une femme dise: « Non, vous ne pouvez pas faire cela. Pourquoi avez-vous fait cela? Nous aurions plus de chances » ou « Ce ne sera pas bon, parce que vous serez là, mais je veux mon candidat vedette qui se trouve à être un homme »... C'est honteux.
Formez-les. Encouragez-les. Encadrez-les.
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Merci, madame la présidente. Merci beaucoup, Sean.
Madame la ministre, ou Joanne — excusez-moi, les vieilles habitudes ont la vie dure —, je veux vous remercier de votre travail en politique, mais aussi de votre travail avant la politique, dans le secteur sans but lucratif, et depuis avec le Timbre de Pâques. J'ai déjà constaté les changements que vous avez apportés au Timbre de Pâques. Ils sont incroyablement positifs.
L'hon. Joanne Bernard: Merci.
M. Darren Fisher: Vous avez parlé d'une lettre que vous aviez reçue pendant une campagne électorale. Je sais que vous avez peut-être fait référence à d'autres formes de haine et d'homophobie dont vous avez été victime lorsque vous étiez ministre et une toute nouvelle députée provinciale, les deux en même temps. J'aimerais savoir quelle a été l'incidence pour vous. Est-ce que cela a renforcé votre détermination? Est-ce que cela vous a abattue immédiatement au point de vous dire que vous ne pouviez pas faire cela, puis que cela a renforcé votre détermination?
Madame Grey a dit de ne pas s'en faire. Lorsque vous êtes une nouvelle ministre, une nouvelle députée provinciale et une nouvelle politicienne, est-ce que cela renforce votre détermination? Est-ce que cela vous a abattue? Pouvez-vous décrire le processus? Ensuite, parce que je vais probablement manquer de temps et que je sais que vous êtes en communication avec de nombreuses femmes en politique en ce moment, dans divers groupes, avez-vous des exemples où ce genre de haine pourrait pousser des gens à quitter la politique?
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Oui. Pour ce qui est de l'homophobie, cela a été très difficile pour ma famille. Quelqu'un m'a déjà demandé: « Pourquoi n'y a-t-il pas plus de femmes ou d'hommes gais qui se présentent en politique? » En plus de tout ce à quoi nous pouvons faire face en raison de notre sexe ou d'autre chose, ce n'est qu'une cible supplémentaire. Cette période a été très difficile.
L'autre problème, c'est le sexisme, le fait de dire: « Elle a pris du poids, elle ne va pas de toute évidence à une banque alimentaire » ou « C'est une retardée mentale », sans oublier les menaces de mort. Tout cela s'accumule.
Avant d'entrer en politique, personne ne savait que je souffrais d'un trouble de l'alimentation depuis 20 ans. Je ne voulais pas en parler comme politicienne, parce que, pour moi, c'était un signe de faiblesse et je ne voulais pas que l'on me considère comme faible. Nous avons parlé à des députées provinciales néo-démocrates qui ont été agressées sexuellement pendant leur enfance ou qui ont été victimes d'actes de violence quand elles étaient adultes. Ensuite, elles se font menacer en ligne de se faire enlever et de se faire violer. Ces choses déclenchent les expériences que ces femmes ont dans leur vie et nous l'avons vu en Nouvelle-Écosse. Nous avons été témoins de cyberintimidation. Nous savons tous ce qui s'est passé dans le cas de Rehtaeh Parsons.
C'est plus insidieux. Cela semble viser les femmes qui détiennent un apparent pouvoir. Qu'il s'agisse de votre orientation sexuelle, de la couleur de votre peau, de votre poids, de vos vêtements, de votre apparence, de votre façon de parler, c'est plus personnel avec les femmes, beaucoup plus personnel avec les femmes, mais cela ne fait pas de nous des victimes.
Riposter, chaque fois que je recevais un de ces stupides trolls sur Twitter, dont 99 % venaient d'hommes, j'en faisais une capture d'écran que je gazouillais en espérant que la mère, la femme, la sœur, la fille de cet homme le reconnaîtraient. Il y a toutes sortes de façons pour nous de composer avec les situations, mais cela m'a toujours dérangée et je ne voulais pas me faire une carapace.
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Oui, cette journée a été difficile. Je parlais de favoritisme. Je pensais que quelqu'un dépensait trop d'argent, alors j'ai parlé de favoritisme. Le pauvre Doug, qui était assis dans le coin gauche avec moi lorsque j'ai été élue pour la première fois, a dit tout haut dans le micro: « Celle qui parle fait elle-même plus qu'une tranche de bacon. »
Cela fait mal. Cela fait terriblement mal, mais j'ai pensé que cela en disait plus sur lui que sur moi. C'était malheureux pour lui. C'était triste et difficile pour moi, mais vous passez au travers, n'est-ce pas?
J'aurais pu dire: « Oh, c'est terrible », et j'aurais pu courir aux médias et dire que je suis offensée ou que je suis ceci ou cela. Quel gaspillage de salive cela aurait été! Pourquoi ne pas tout simplement continuer. Dire ces choses au sujet de mes boucles d'oreilles, de mon poids ou de ce que je porte aujourd'hui... Vous avez de la chance, les gars. Vous n'avez qu'à changer de cravate, vous êtes vraiment chanceux.
On nous critique pour cela, mais si je dois être une victime, tout va me déranger. Je me dis plutôt: « Non, je ne veux pas faire cela. Je veux être choyée. Je veux en profiter tous les jours et je veux faire de mon mieux. » À cause de cela, je me suis promis, ainsi qu'à tous les électeurs de ma circonscription et du pays, que je l'emporterais, quoi qu'il arrive.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie tous les témoins de leurs présentations. Cela nous aide beaucoup à mener notre étude.
[Traduction]
J’aimerais revenir un peu sur l’étude. Nous traitons des obstacles auxquels se heurtent les femmes en politique. Nous parlons de problèmes de recrutement. La question des femmes en politique transcende tous les partis politiques. Certains commentaires portent sur un parti en particulier, aucun parti ou un député. J’aimerais avoir des précisions, parce que nous croyons vraiment que nous ne parlons pas nécessairement du mérite, du mérite des femmes en politique. Les députées qui siègent à la Chambre sont formidables. Les ministres sont très compétentes, mais elles ne représentent encore que 26 % ou 27 % des membres du Cabinet depuis les quelques élections partielles. Nous sommes encore au 60e rang dans le monde.
Je ne comprends pas la question du mérite. Les députées sont très qualifiées, celles d'hier et celles d'aujourd'hui. Je veux revenir à l’étude elle-même.
Madame Grey, vous avez une vaste expérience. Je me souviens, quand j'étais étudiant au secondaire, de vous avoir observée très attentivement sur votre vélo, à l'époque où vous étiez la première membre du Parti réformiste.
Je veux me concentrer sur l'investiture. Êtes-vous en train de dire qu’il n’y a vraiment rien qu’un comité parlementaire puisse recommander au gouvernement pour apporter des changements à la loi, à la loi en vigueur pour les investitures à Élections Canada, ou que le parti ne devrait pas changer parce que les règles du jeu sont équitables? Est-ce qu'il y a des recommandations que vous avez voulu faire antérieurement, sans y arriver, et que nous devrions examiner maintenant?
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Merci beaucoup. Je vous remercie de me donner l’occasion d’être parmi vous aujourd’hui.
Quelques brèves notes biographiques. J’ai été élue pour la première fois au conseil scolaire de Canadian Rockies lors d’une élection partielle en 1996 et j’ai été réélue en 1998. En 2004, j’ai été élue conseillère municipale à Banff et réélue en 2007. En 2010, j’ai été élue — et c’est vraiment la voie à suivre — mairesse de Banff et réélue en 2013 et en 2017.
Je peux certainement affirmer qu'être la mairesse de Banff est un privilège et une occasion exceptionnelle dans notre pays puisque la municipalité de Banff se trouve dans le parc national Banff, le plus beau parc national du monde. C’est un endroit très particulier sur la planète et je peux dire que c'est ma demeure.
Je porte aussi les titres très influents d’épouse, de mère, de belle-mère, de fille, de soeur et de tante. Cela peut en soi démontrer une certaine différence entre les sexes, où, en tant que femme, je me sens obligée de vous parler de tout ce qui me constitue et de vous dire que lorsque je réfléchis à mes réalisations dans cette vie, la plus grande a certes été d’élever deux jeunes hommes remarquables qui respectent les femmes et qui trouvent très intéressantes celles qui sont motivées par des considérations politiques.
En ce qui concerne les obstacles auxquels se heurtent les femmes en politique, je reconnais qu’il y a clairement un problème d’équilibre entre les sexes en politique canadienne, aux niveaux fédéral, provincial et municipal. Nous avons bien sûr parlé de statistiques et celles-ci sont révélatrices. Une dernière statistique, les mairesses représentent 18 % des personnes qui occupent cette fonction au Canada.
Cela dit, personnellement, je n'ai pas eu à surmonter d'obstacles en tant que femme politique. Je n’ai pas fait l’expérience d’obstacles fondés sur mon sexe. Je vis aussi dans une collectivité où trois des sept conseillers sont des femmes, tout comme trois des cinq administrateurs; on y trouve aussi une directrice par intérim du parc national Banff, une directrice générale de Banff et de Lake Louise Tourism et une présidente du Banff Centre. Je vis dans une collectivité où les sexes sont équilibrés. Je suis rarement la seule femme à la table.
Je ne peux parler que de mon expérience personnelle et je dois m'en tenir à mes opinions personnelles. Aujourd’hui, j’ai mis l’accent sur trois obstacles: les médias, le fait d’être une mère et la confiance. Comme première observation, je dirais que les médias traitent encore les femmes en politique différemment par rapport aux hommes. Les médias sociaux, bien sûr, ont fait passer cette question à un tout autre niveau. Je crois que la violence fondée sur le sexe constitue un véritable obstacle pour certaines femmes qui veulent se présenter à une élection. Les hommes politiques font certainement l’objet de beaucoup de critiques également, et comme on vient de le dire, même en fonction de leur apparence, mais d’après mon expérience personnelle, ce n’est généralement pas lié au sexe pour ce qui est des mauvais traitements.
Toute femme qui a des aspirations politiques et qui passe 10 minutes sur Twitter à suivre ses femmes mentors peut tout simplement avoir peur de se présenter. Elle voit comment les femmes sont traitées et comprend le message. Elle se dit: « Merci, je vais m’abstenir. »
Voici des exemples de gazouillis provenant de l’Alberta lorsqu’une députée provinciale est passée du Parti conservateur au NPD: « Maintenant, vous avez deux blondes idiotes dans ce parti qui sont paumées. » « Sandra devrait rester dans la cuisine, c'est le lieu qui lui convient. » « Pauvre conne. Qu'elle reste avec les autres queers, c'est bon pour elle. »
Les médias traditionnels, je crois, sont également à blâmer. Ils aiment bien mettre l'accent sur la vie familiale d’une femme politique, traiter de son apparence, de sa voix ou de sa tenue. Les médias doivent vraiment se poser la question. S’ils parlaient d'un homme, diraient-ils la même chose ou poseraient-ils les mêmes questions? Ils doivent comme nous tous arrêter de demander si une femme peut être à la fois politicienne et mère, ce qui m'amène à mon prochain point.
Les femmes ont des bébés. Ce sont des mères. Les femmes sont maternelles et elles excellent dans ce domaine. Malheureusement, je crois qu’on continue de laisser entendre que celles qui poursuivent une carrière politique ne pensent pas à l'intérêt supérieur de leurs enfants, ou que d’avoir une mère qui fait de la politique est en quelque sorte plus néfaste que d’avoir un père dans le domaine. En politique et probablement dans n’importe quelle carrière à forte demande, les femmes qui se font un devoir de consacrer du temps à leurs enfants sont encore considérées comme un maillon faible vu qu'elles n'accordent pas la priorité au travail à accomplir, mais le même effort est applaudi chez les hommes qui sont qualifiés d'excellents pères qui passent du temps auprès de leurs enfants.
Enfin, je veux parler de la confiance. D’après les commentaires que j’ai reçus, les femmes qui envisagent de se présenter et décident de s'abstenir révèlent ainsi leur manque de confiance. Elles ne le définissent peut-être pas de cette manière. Voici ce que j’entends: « Je n’ai pas suffisamment de connaissances », « je ne suis pas assez coriace », « je ne serai pas élue parce que mon réseau n’est pas assez grand » ou « je ne peux pas recueillir l’argent dont j’aurai besoin pour faire campagne efficacement ».
Quelle que soit la raison, cela revient, de mon point de vue, à la confiance. Je ne manque pas de confiance. J'ai toujours été confiante. Cela m’amène à m'arrêter et à me demander pourquoi. Si la confiance est un obstacle, et je crois que c’est le cas, pourquoi certaines sont-elles plus confiantes que d’autres? Est-ce génétique? Est-ce lié à l’enfance? S’agit-il d’expériences de vie? Quoi qu’il en soit, je suis à peu près certaine que parler du manque de confiance n'y changera rien. Le mentorat visant à accroître le niveau de confiance peut donner des résultats.
Que faire? Pas question d'ignorer les injures dans les médias sociaux ni les reportages sexospécifiques dans les médias traditionnels. C'est inexcusable. Nous ne pouvons normaliser cela. Nous devons nous y opposer et les hommes doivent aussi être en première ligne. En ce qui concerne les mères en politique, il faut qu’il soit acceptable de prendre un congé de maternité au besoin, d’allaiter un bébé dans les deux Chambres, au caucus ou à la Chambre des communes. Ne vous en prenez pas à un politicien qui amène son enfant à une activité, le fait monter avec lui à bord d’un avion, ou au premier ministre et à son conjoint ou à sa conjointe qui ont besoin de services de garde supplémentaires en raison de leur horaire professionnel. Ça suffit. Les enfants devraient être la priorité de tous les parents.
Pour ce qui est de renforcer la confiance envers les futurs politiciens, je comprends bien sûr que les ateliers de formation sur les campagnes électorales deviennent assez courants et je pense que c’est excellent pour les hommes et les femmes. Si elles portent sur les femmes uniquement, on pourrait peut-être revenir sur certaines de ces conversations ou offrir du moins des séances d’éducation pratiques sur la façon de recueillir des fonds, de faire du porte-à-porte efficacement, d’élargir son réseau et de ne pas devenir trop insensible. Parfois, cela fait mal. Parfois, on n'arrive pas à oublier, mais ça va, car cela fait partie de l’expérience.
Avoir confiance c'est croire en soi. On ne peut pas faire semblant. En fait, accroître sa confiance commence bien avant qu'on se porte candidate à une élection. Ces leçons doivent être complètement intégrées dans le système d'éducation et dans la société. Les campagnes contre l’intimidation, la création de lieux où toutes les couleurs de peau, toutes les préférences sexuelles et tous les types de corps sont acceptés sont autant d'activités efficaces. Peut-être que la prochaine génération de femmes aura tout simplement davantage confiance en elle.
La légitimité de la démocratie canadienne dépend de l’intégration d’un plus grand nombre de femmes au processus politique. Les obstacles ne peuvent être supprimés que lorsque les attitudes sociales à l’égard du genre changent. Quelles que soient les recommandations qui découlent de cette étude, sachez qu'éliminer des obstacles ne serait-ce qu'à un seul niveau contribue grandement à apporter des changements ailleurs.
Je terminerai par un commentaire sur un débat qui semble s’infiltrer dans les partis et la politique, à savoir que des responsabilités et des ministères plus importants devraient être confiés à des femmes en fonction du mérite, et non pas seulement d’un quota. Je peux vous assurer qu'il n’est pas question de choisir l'un ou l'autre. Mais bien l'un et l'autre. Beaucoup de femmes ont assez de crédibilité pour remplir n’importe quel quota. Nous répondons présentes.
Merci.
Je m’appelle Jenelle Saskiw et je m’intéresse activement à la politique et à l’administration municipale depuis plus de 20 ans. J'ai toujours eu la politique dans le sang. J’ai un très bon souvenir de ce jour où, âgée de 16 ans, j’assistais au Forum des jeunes Albertains où je siégeais à l’assemblée législative et je me demandais si j’avais la capacité de me présenter aux élections et d’influer sur le changement.
Ce désir était toujours en moi. On m’a encouragée à me présenter aux élections municipales en 2004 et, à 29 ans, j’ai réussi à me présenter et j’ai été élue dans ma ville natale, Marwayne, en Alberta. J’ai occupé un poste pendant 14 ans, dont cinq comme conseillère et neuf comme mairesse. Je dois admettre que les obstacles politiques surgissaient de partout autour de moi, mais je ne les ai jamais laissés me définir. J’avais un engagement envers les électeurs, qui m’avaient fait confiance, et le désir de changer les choses dans ma collectivité. Il a fallu du temps, et au fil des ans, ma confiance s’est accrue, ma base de connaissances s’est élargie et j’ai relevé de nouveaux défis et créé de nouvelles possibilités.
J’ai poursuivi ma carrière politique et j’ai occupé des postes à l’Association des municipalités urbaines de l'Alberta pendant sept ans et à la Fédération canadienne des municipalités pendant quatre ans. J’ai présidé de nombreux comités aux niveaux local, provincial et national, y compris le Groupe de travail municipal sur la sécurité ferroviaire où j’ai pu travailler avec de nombreux députés pour élaborer et finalement adopter le projet de loi , Loi sur la sécurité et l’imputabilité en matière ferroviaire.
Je me suis engagée encore plus et j’ai participé à de nombreux événements, comme les ateliers de formation sur les campagnes électorales destinées aux femmes, aux activités d’À voix égales et d’aide aux femmes, aux minorités et aux jeunes de la région qui mènent des campagnes. J’aime beaucoup la politique municipale, mais je dois admettre que la vie a été difficile. Maintenir l’équilibre entre les engagements municipaux et ma vie familiale — j’ai quatre enfants — est devenu de plus en plus stressant. En août 2016, à la demande de ma famille, j’ai abandonné la politique pour rétablir l’équilibre dans ma vie familiale. Mes enfants grandissaient et je savais que je ne pourrais jamais retrouver ces précieuses années avec eux.
Je pense que les femmes doivent relever le défi de réussir au sein d’un parti politique dominé par des hommes. Nous devons tenir compte des répercussions que la politique aura sur nos familles, leur bien-être et nos carrières futures. Nous craignons l'excès de zèle des médias et nous avons tendance à manquer de confiance dans notre capacité de servir efficacement. Nous avons aussi l’impression que l’arène politique a un parti-pris contre nous. Je pense que les femmes ont besoin d'arguments plus convaincants que les hommes pour même envisager de se présenter à une élection, même lorsqu'il est clair que le siège peut être remporté. Il faut encore persuader les femmes qui sont, en fait, de solides candidates. Elles estiment devoir prouver que les compétences acquises sur le marché du travail, à la maison et dans la collectivité seront effectivement transférables dans la vie politique. Nous hésitons souvent à dire oui aux possibilités, pour une raison ou une autre, car nous avons l’impression de manquer d’expérience.
Je crois qu’il y a également des sujets de préoccupation à l'égard du processus électoral. Cela prend beaucoup de temps, c’est complexe, et il y a un manque d’information sur la façon de mener une campagne réussie, notamment sur ce que signifie exactement la mise en candidature. Des études ont démontré que les hommes recueillent beaucoup plus d’argent que les femmes en tant que candidats et donateurs, et qu'ils donnent plus d’argent aux candidats masculins. Cela nous incite également à hésiter à nous porter candidates, car nous nous demandons si nous pouvons nous permettre de mener une saine campagne politique.
Les titulaires, en particulier ceux qui occupent des postes de direction, ont tendance à être des hommes. Ils reçoivent la plupart des ressources financières, du soutien politique et de la visibilité pendant la campagne. Par exemple, au Canada, 84 % des titulaires étaient des maires. Par conséquent, la plupart des femmes, dont beaucoup font campagne pour la première fois, ne sont pas en mesure d’organiser des campagnes efficaces ou d’établir leur profil public pour obtenir la reconnaissance de leur nom par rapport au titulaire.
Les chefs de parti s’entendent également à l’unanimité pour dire que les partis ont de la difficulté à maintenir la participation des femmes entre les cycles électoraux. Le manque de formation et d’occasions d’exercer un leadership nous dissuade souvent de maintenir notre engagement politique. De plus, les partis n’ont pas de stratégie pour retenir les candidates qui ne remportent pas les mises en candidature ou les élections et ne les préparent pas pour le prochain cycle électoral.
Nous avons l’impression que l’ambition politique est une invitation à un examen politique de notre vie privée, ce qui pourrait avoir un effet indirect sur nos familles. Les attentes à l’égard de la maternité sont toujours des éléments dissuasifs importants pour les femmes qui veulent participer à la vie politique. Beaucoup d’entre nous le font, et nous devons choisir entre prendre soin de notre famille et de nos enfants et atteindre des objectifs politiques plus généraux.
Je sais d'expérience que c’est une situation très difficile. Le jour où j'ai quitté la politique, c’est celui où une partie de mon ardeur s'est éteinte. Je savais que je devais partir. Mes enfants avaient besoin de leur mère et travailler loin de la maison nuisait au bien-être de ma famille. Puis-je revenir à la politique? Je pourrais le faire, mais il me serait impossible de revenir voir mes enfants grandir.
Je suis curieuse de savoir combien d’hommes ont quitté la politique par souci pour le bien-être de leur famille.
Les médias sociaux sont aussi en train de devenir un obstacle plus important pour les femmes en politique et ils sont probablement l’un des facteurs de dissuasion les plus visibles aujourd’hui. Une enquête menée en 2016 auprès de femmes politiques de 39 pays a révélé que 44 % d’entre elles ont reçu des menaces de mort, de viol, de violence ou d’enlèvement, et que 85 % disent avoir souvent été la cible de propos sexistes humiliants de la part de collègues masculins. Je dois admettre que c’est là un des obstacles les plus préoccupants pour moi, en tant que femme politique. J’ai été victime de ce harcèlement. C’est rude, c’est concret, et c'est parfois terrifiant. Si épaisse soit la carapace qu'on pense avoir, cela fait quand même mal, et je ne veux pas que mes enfants aient à craindre pour mon bien-être à cause de ce qu'aura écrit, retranché derrière son clavier, une personne qui ne me connaît peut-être même pas.
Comment pouvons-nous améliorer la représentation des femmes en politique? Nous devons travailler ensemble pour établir de solides systèmes de soutien, y compris des modèles, des réseaux solides et des équipes robustes. La société doit encourager et promouvoir la participation féminine à la vie politique. Nous devons interagir avec les femmes politiques en poste et celles du passé, car nous sommes leurs modèles. Nous avons besoin de plus de formations sur la façon de mener une campagne, de conseils juridiques et de possibilités de réseautage. Nous devons lutter ensemble contre les aspects négatifs des médias sociaux et l’intimidation en ligne en créant un mécanisme de responsabilisation pour limiter les préjudices causés par les agresseurs en ligne. Il faut que les femmes sachent qu'elles ne sont pas seules dans ce combat.
Que vais-je faire? Mon objectif est d’être un mentor, de permettre à des femmes, à des amis et à mes filles de croire en elles-mêmes et de voir comment nous pouvons collectivement éliminer les obstacles et amener un plus grand nombre de femmes à devenir plus actives dans des rôles politiques et de chefs de file.
Il est facile de faire de la recherche et de présenter des exposés, mais notre génération doit redoubler d'efforts, offrir du soutien et inspirer du courage. Imaginez que nous consacrions tous, collectivement, notre énergie et nos efforts à changer l’avenir. J’espère que la prochaine génération comparaîtra à son tour, mais pour expliquer comment les obstacles pour les femmes ont été éliminés et réfléchir à la façon dont, ensemble, notre génération a influencé ce changement en politique.
J’ai appris à surmonter les obstacles, et mon but est de faire profiter les autres de mon expérience afin que, ensemble, nous puissions aider d'autres femmes à mieux exploiter leur potentiel en politique.
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Ce que l’éducation essaie de faire, et probablement parfois réussit à faire, c'est accomplir un bien meilleur travail, un excellent travail. En dehors du milieu scolaire, il existe aussi maintenant une foule d'organisations. Il ne s'agit plus de guides et de scouts. Il y a des groupes distincts qui se concentrent sur les jeunes filles et qui les font participer davantage à des activités sportives et autres qui sont différentes des activités traditionnelles.
En fait, le système d’éducation progresse et, socialement, nous pouvons tous faire notre part, maintenant. Si on m'invite à Banff pour des activités avec des jeunes filles, je ne rate pas l'occasion. On doit se présenter comme modèle. Je suis très optimiste. À la lumière de ce qu’a dit Jenelle, j’ai bon espoir que, dans une génération, nous parlerons au passé de certains problèmes de la condition féminine. J'encourage vraiment les femmes dans le système d’éducation, et les efforts doivent commencer avant que les jeunes n'aient 14 ou 15 ans. J’ai eu des filles de 14 et 15 ans chez moi, et je peux dire qu'il faut vraiment que les efforts commencent plus tôt.
Mes fils ont 26 et 23 ans, et cela me choque encore de voir des jeunes femmes chez moi qui s'intéressent à ce point à leur apparence et aux médias sociaux, de voir que c’est ce qui les rend populaires. Cet aspect me semble encore vraiment troublant. Je voudrais croire que, peut-être, nos enfants qui ont maintenant cinq, six et sept ans et les filles qui naissent aujourd'hui, échapperont à ce système.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie nos deux témoins. Ce sont deux femmes de tête et de coeur qui ont envie de faire en sorte que les femmes de partout au Canada et au monde s'impliquent davantage. Elles sont également des exemples extraordinaires pour la prochaine génération. De plus, cela fait du bien d'entendre qu'il y a encore de l'espoir. Toutefois, il y a encore beaucoup de place à l'amélioration.
Nous avons beaucoup parlé de la conciliation travail-famille. Certaines personnes disent parfois que les hommes aussi doivent concilier le travail et la famille. Depuis des décennies, les rôles sociaux font en sorte que les tâches liées à l'éducation incombent beaucoup plus aux femmes qu'aux hommes, malheureusement. Cela tend à changer, ce qui est bien.
Au cours des dernières années, plusieurs femmes qui travaillent au Parlement ont eu des enfants. En 2014-2015, plusieurs de mes collègues et moi-même avons eu la chance que nos conjoints acceptent de tenir le rôle de pères au foyer, ce qui nous a permis de continuer à être ici. Votre conjoint vous a aussi permis de continuer, pendant 14 ans, à être mairesse ou conseillère.
Pensez-vous que, en plus des médias, le gouvernement aussi a un rôle à jouer pour laisser plus de place à la conciliation travail-famille et pour appuyer des services, comme les services de garde, qui permettent aux femmes d'avoir la tête tranquille et de retourner dans leur milieu de travail? Croyez-vous que le gouvernement doit favoriser, dans les milieux de travail politiques, la mise sur pied de services de garde dont les horaires sont adaptés aux horaires de travail des politiciennes?
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Je peux répondre à cette question. Je viens d’un très petit village de 600 habitants en Alberta. Lorsque j’ai été élue pour la première fois... Mon dernier bébé est né un vendredi et il m'accompagnait à la réunion du conseil le lundi soir suivant. Je suis allée là-bas. J’ai fait mon travail. Mes enfants ont colorié sous les tables des salles de réunion. Ils ont vécu cette vie-là.
Il faut également assurer une rémunération adéquate. Lorsque j’ai été élue maire pour la première fois, je touchais une indemnité de 50 $ pour chaque réunion à laquelle j’assistais. Avec une gardienne pour quatre enfants, j'étais perdante. Pendant deux ans, jusqu’à ce que je convainque le conseil municipal de relever la rémunération à 100 $, j’ai perdu de l’argent à chaque réunion à laquelle j’ai assisté.
Je ne cherchais pas à faire de l'argent. Je n'attendais rien. Je croyais sincèrement en ce que je faisais, et j'aimais le faire. Il est vraiment important de veiller à ce que tout soit équilibré, de voir où nous pouvons offrir des services supplémentaires, surtout dans les collectivités rurales. Nous n’avons pas de garderie. Il faut compter sur une jeune fille du voisinage. On espère qu’elle sera libre pour venir garder les enfants dans la soirée, mais il était toujours possible qu'elle ait un examen le lendemain et doive rentrer chez elle à 21 heures.
Nous devons chercher les moyens de mettre en place toutes les ressources nécessaires pour absolument tout le monde, peu importe où nous sommes géographiquement et quel âge ont les enfants. Est-il possible de les amener au travail, où nous pouvons nous occuper d'eux au besoin?
Nous apportons de grandes améliorations. Les changements survenus entre 2004 et 2018 sont merveilleux. Il est phénoménal de voir des mères qui amènent leurs bébés au bureau. J’espère que l'évolution se poursuivra. Je le répète, il y a d’autres domaines auxquels nous pouvons nous intéresser, surtout dans les régions éloignées, où il y a toujours un vrai problème.
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Merci, madame la présidente.
Merci à vous deux. Vous êtes formidables. Je suis un jeune parent et je vais certainement utiliser le truc de la chaîne de papier. Ma fille a 2 ans. Parfois, quand je lui dis, le dimanche soir, que « papa va travailler cette semaine », elle pleure un peu, elle me donne un baiser et elle dit « papa revient vendredi? » Je réponds: « Oui, je reviendrai vendredi. »
Il y a une chose qui, à mon avis, pourrait beaucoup améliorer les choses. La prévisibilité de l’horaire est terrible, et c’est beaucoup plus difficile pour les femmes que pour les hommes, pour certaines raisons biologiques, par exemple quand vous allaitez un nouveau-né.
Ce soir est un bon exemple. Nous nous attendons à voter toute la nuit et peut-être jusqu’à demain soir. Je me demande si vous pensez qu’il y a des choses qui pourraient être faites du point de vue de la procédure, particulièrement dans les assemblées provinciales et au fédéral, quand on doit partir à l'autre bout du pays et qu'on ne peut pas rentrer chez soi rapidement.
Vous avez dit que c’est agréable de participer à la politique municipale parce qu'on est chez soi, mais ce n’est pas une option pour beaucoup de gens qui n'habitent pas Ottawa, par exemple. Pensez-vous qu’on pourrait faire quelque chose pour garantir une certitude, de sorte que vous ne mettiez pas quatre ou cinq maillons à la chaîne pour vous rendre compte que vous serez parti six ou sept jours? Pensez-vous qu’il serait utile de garantir une certaine certitude dans le calendrier des travaux des organes législatifs?