FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la condition féminine
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 30 avril 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour. Je vous souhaite la bienvenue à la 139e séance du Comité permanent de la condition féminine. La séance d'aujourd'hui est publique. Nous poursuivons notre étude sur les défis auxquels les femmes aînées font face, en portant une attention particulière aux facteurs qui contribuent à la pauvreté et à la vulnérabilité de ces femmes.
Je suis ravie de souhaiter la bienvenue à M. Michael Udy, président, et Mme Vanessa Herrick, directrice générale, d'Aînés Action Québec, de même qu'à Mme Lia Tsotsos, directrice du Centre for Elder Research au Sheridan College, qui témoigne par vidéoconférence depuis Oakville, en Ontario.
Je vais d'abord céder la parole à Lia. Vous disposez de sept minutes pour faire votre déclaration liminaire.
Bonjour, madame la présidente, et bonjour aux membres du Comité. Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de venir vous parler de ce sujet important. Je m'excuse de ne pas pouvoir être avec vous en personne.
Je m'appelle Lia Tsotsos, et je suis la directrice du Centre for Elder Research qui se trouve au Sheridan College à Oakville en Ontario. Nous sommes un institut de recherche appliquée présent sur le campus depuis plus de 15 ans. Notre mandat consiste à mener des recherches dans le but d'améliorer la vie des aînés et de leurs familles. Nous avons commencé à nous pencher sur la révolution démographique en cours il y a quelques années, et nous sommes heureux de constater qu'on accorde plus d'intérêt, plus de soutien et plus de financement à l'étude des défis et des possibilités que présente une population vieillissante.
Dans nos recherches, nous avons toujours opté pour une approche inclusive. Notre directrice fondatrice, Mme Pat Spadafora, a été la première à utiliser l'expression « recherches mutuellement avantageuses », c'est-à-dire que ceux qui participent aux recherches sont plus que des sujets, car ils ont souvent la possibilité d'être des participants actifs ou même des cochercheurs dans ces recherches en contribuant à en établir les orientations et les conclusions. À titre d'exemple, nous avons étudié pendant de nombreuses années des programmes de tutorat que l'on offrait aux aînés — le travail était réalisé en grande partie avec l'appui du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, ou CRSNG. Les aînés qui y ont participé ont été, bien sûr, les sujets de l'étude, mais ils ont également reçu de la formation en informatique gratuite et ont contribué à l'élaboration de matériel de formation normalisé. Il s'agit d'une approche de réciprocité, basée sur le « avec nous et non pour nous », que nous continuons d'utiliser dans la mesure du possible, y compris lorsque nous examinons les défis auxquels doivent faire face les femmes aînées.
Dans ce contexte, nous recommandons donc, par exemple, de déployer des efforts pour que des femmes aînées considérées à risque de pauvreté ou de vulnérabilité participent aux recherches, afin de comprendre les facteurs sous-jacents qui les ont menées dans cette situation. Plutôt que de se concentrer uniquement sur la situation actuelle, il faut aussi examiner les conditions historiques et systémiques qui en sont la cause, afin de pouvoir mettre en place des solutions durables. Chez les femmes en particulier, les facteurs qui les ont menées dans une situation de pauvreté et de vulnérabilité sont parfois présents tout au long de leur vie et ne sont pas liés uniquement au vieillissement.
Les recherches que nous avons menées dans le cadre des programmes de tutorat pour apprivoiser la technologie nous ont permis de constater notamment que certaines cohortes de femmes aînées n'avaient jamais géré les finances familiales et avaient souvent très peu de connaissances technologiques. Devenues veuves, elles se sont retrouvées soudainement avec cette responsabilité et il leur a fallu apprendre. Le problème a été aggravé en outre du fait que certains services gouvernementaux ne sont accessibles principalement qu'en ligne. Dans ce cas, les conditions de dépendance historiques de ces femmes, combinées à un nouveau mode de prestation des services gouvernementaux, ont fait croître les risques de vulnérabilité, une situation pouvant encore être exacerbée par le fait que diverses tâches non rémunérées — les soins aux enfants ou à des parents âgés, par exemple — échoient la plupart du temps aux femmes, en réduisant d'autant leurs chances de participer au marché du travail et en accroissant la vulnérabilité financière qui a marqué leur vie.
Dans le cadre de nos travaux sur les facteurs de risque liés à l'isolement social et à la solitude chez les immigrants âgés, que nous avons réalisés avec l'appui du Conseil de recherches en sciences humaines, ou CRSH, nous avons vu des exemples du même genre. Certaines femmes immigrantes âgées arrivent au pays dans le but de s'occuper de leurs petits-enfants en bas âge. Elles restent donc la plupart du temps à la maison, peuvent ne pas apprendre à conduire un véhicule et peuvent habiter en banlieue où le transport municipal est limité. Si ces femmes ont en outre une connaissance limitée de l'anglais et qu'elles n'ont pas une source de revenus autonome, après que leurs petits-enfants ont grandi, elles se retrouvent parfois désœuvrées, sans réseau social et sans ressources pour remédier à la situation. Ces facteurs viennent encore une fois accroître les risques de pauvreté, d'isolement et de vulnérabilité.
Cela étant dit, nous vous recommanderions par ailleurs d'éviter de stéréotyper les femmes d'un certain âge ou dans une certaine situation, ou de faire des généralisations. Dans les débats sur le sujet, il arrive parfois qu'on présume d'office que les femmes sont plus à risque de vulnérabilité, ou le sont de manière plus inhérente, que les hommes. Cela représente alors une forme d'âgisme sexospécifique. Selon des travaux réalisés précédemment par le Centre, l'âgisme est une forme d'« isme » plus toléré que le racisme et le sexisme.
Les Instituts de recherche en santé du Canada, où IRSC, se sont dotés d'un plan d'action pour intégrer l'analyse comparative entre les sexes dans les recherches. Nous appuyons, bien sûr, cette approche pour mettre en place un cadre sur la diversité dans le milieu de la recherche. Ce type d'analyse peut nous renseigner sur la façon dont des déterminants comme l'ethnicité, la santé, le statut socioéconomique et l'âge interagissent avec le sexe ou le genre pour accroître les risques de pauvreté et de vulnérabilité. En finançant des recherches qui tiennent compte expressément de la diversité de la population, nous pourrons tous travailler avec des ensembles de données plus fiables et de meilleure qualité.
De façon plus générale, il est très important également de mettre en place des ensembles de données ouverts pour l'ensemble de la population.
Dans le cadre de l'Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement, on fait un travail extraordinaire en suivant 50 000 personnes sur une période de 20 ans. Un processus est même en place pour permettre aux chercheurs comme ceux du centre d'avoir accès aux données. C'est une initiative encourageante qui favorise la poursuite des recherches et la création d'équipes interdisciplinaires qui peuvent étudier les voies complexes du vieillissement et leur diversité au pays.
Avant de terminer, permettez-moi de vous rappeler quelques grandes recommandations tirées des travaux dans le domaine. Premièrement, bon nombre de facteurs qui contribuent à la pauvreté et à la vulnérabilité des femmes aînées sont déjà présents à un stade précoce dans leur vie, ce qui veut dire qu'une approche globale s'impose donc.
Deuxièmement, malgré les preuves en ce sens, il ne faut pas présumer d'office de la situation des femmes aînées, au risque que cela mène à des comportements ou des idées âgistes.
Enfin, les recherches qui tiennent pleinement compte du genre ou du sexe dans la collecte et l'analyse des données peuvent nous aider à mieux comprendre comment ces facteurs interagissent avec d'autres pour façonner les expériences de tous les autres adultes au pays.
J'aimerais aussi vous faire part d'une expérience personnelle. Ma grand-mère a immigré au Canada en 1950. Elle a joué un rôle actif au sein de sa communauté culturelle et parlait bien anglais, mais elle n'a jamais travaillé à l'extérieur de la maison et n'a jamais appris à conduire. Lorsqu'elle est devenue veuve soudainement à 74 ans, elle s'est retrouvée dans une situation qui la dépassait complètement. Si notre famille n'avait pas été proche, tant géographiquement qu'affectivement, cette expérience aurait très bien pu l'anéantir, en l'isolant sur les plans physique, émotif et technologique et en la rendant vulnérable.
Je travaille dans le domaine du vieillissement et je connais l'ampleur des défis que nous devons relever, mais les expériences personnelles comme celle dont je viens de vous parler nous rappellent l'importance de ces questions et d'y répondre de manière adéquate.
Je remercie le Comité encore une fois de me permettre de participer à l'exercice, et j'ai hâte de prendre connaissance des recommandations qui découleront de vos consultations.
Merci.
Merci beaucoup, et je vous remercie de votre invitation.
Aînés Action Québec est un organisme qui défend les droits des aînés anglophones au Québec. Le nombre de locuteurs anglophones au Québec dépasse un peu le million, ce qui représente environ 13 % de la population du Québec. De ce nombre, un peu moins de 160 000 sont âgés de 65 ans et les anglophones de 65 ans et plus sont donc assez nombreux. Si on abaisse l'âge à 55 ans, ils sont environ 260 000, ce qui veut dire qu'environ 25 % de la population anglophone au Québec est âgée de 55 ans et plus. Parmi les 160 000 anglophones âgés de 65 ans et plus, 52 % sont des femmes et 48 % sont des hommes, ce qui rend compte en partie du fait que les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes.
L'information que je vais vous transmettre provient d'une initiative menée par Aînés Action Québec de 2016 à 2018, et financée par Emploi et Développement social Canada, qui visait à joindre les aînés anglophones socialement isolés au Québec. Un chercheur nous a aidés à examiner une partie des données, ce qui nous a permis d'isoler certains renseignements qui, selon nous, contribuent à mettre en lumière la situation des femmes aînées anglophones.
Nous avons donc appris que sur les 160 000 aînés de 65 ans et plus, environ 30 % vivent seuls. Nous cherchions des indicateurs d'isolement social, et le fait de vivre seul en est un, mais ce n'est pas le seul. Fait intéressant au sujet des quelque 46 000 aînés vivant seuls, 37 % sont des femmes et 20 % sont des hommes, ce qui veut donc dire que plus de femmes que d'hommes vivent seules chez les aînés anglophones. Je ne saurais vous dire quelle en est la raison exactement, mais comme je l'ai mentionné, le fait de vivre seul est un indicateur potentiel d'isolement social. Chez les aînés, plus de femmes que d'hommes vivent donc seules.
Deuxièmement, nous avons été vraiment étonnés de constater le nombre d'aînés anglophones qui vivent avec 20 000 $ ou moins par année, et encore plus de voir qu'il y avait presque deux fois plus de femmes que d'hommes dans cette situation. Cela s'explique sans doute notamment par le fait qu'elles étaient absentes du marché du travail et avaient moins accès à un régime de pension. C'est une constatation qui nous a quelque peu surpris.
Enfin, vous connaissez sans doute l'indicateur du SFR, ou seuil de faible revenu, un indicateur de « situation difficile » — c'est l'expression qu'on utilise dans la documentation — et de revenu annuel encore beaucoup plus limité. Dix-huit pour cent des femmes de 65 ans et plus vivent sous le seuil de faible revenu. De façon générale, les femmes âgées anglophones sont beaucoup moins à l'aise financièrement que leurs homologues masculins.
Sur la dernière diapositive, on trouve les indicateurs d'isolement social que nous avons principalement utilisés. On reprend l'information que j'ai présentée, mais sans tenir compte du sexe. Quand ces indicateurs sont combinés à des problèmes de santé, à un problème de mobilité, à une faible participation à la vie sociale et communautaire et à l'absence, ou presque, de filet de sécurité sociale, ce sont des éléments qui contribuent assurément à l'isolement social. Les femmes sont plus susceptibles de voir leur isolement amplifié par un de ces éléments.
Je vais maintenant demander à la directrice générale d'Aînés Action Québec, Mme Vanessa Herrick, de vous fournir d'autres renseignements sur les aînés anglophones au Québec.
Merci beaucoup de m'accueillir aujourd'hui.
Je vais étoffer un peu certaines données et vous parlez des défis particuliers auxquels doivent faire face les femmes aînées anglophones au Québec. Ces défis sont uniques. Je ne veux pas dire qu'on ne les trouve qu'au Québec, mais on parle ici d'une minorité linguistique dans une province qui a ses particularités, si bien que les circonstances sont un peu uniques.
Je vais vous parler de quelques-uns des défis auxquels doivent faire face ces femmes. L'isolement est une menace qui plane sur tous les aînés au Canada; toutefois, les femmes anglophones au Québec se trouvent dans une situation particulière, car beaucoup d'entre elles n'ont pas profité de la formation en français offerte dans le cadre de la loi 101. De plus, celles qui n'étaient pas sur le marché du travail n'ont pas eu l'occasion d'apprendre le français avec leurs pairs. Ainsi, les niveaux de bilinguisme chez les femmes aînées sont extrêmement faibles. Chez les 55 à 64 ans, il est de 60 %, tandis que chez les 75 ans et plus, il est de 36,2 %.
La barrière de la langue est bel et bien un élément qui les isole. Il leur est impossible de communiquer avec les autres communautés que la leur. Le Québec est un territoire très vaste, et les communautés anglophones ne sont pas toutes à Montréal. Dans ce cas, elles sont petites, mais elles existent et comptent aussi des aînés.
Si une femme se trouve dans une région où les services ne sont pas offerts en anglais, la barrière de la langue diminue ses chances d'avoir accès à des soins de santé et des services sociaux. Je n'ai pas le temps de vous parler en détail des modalités des services offerts en anglais au Québec, mais tout est très réglementé. Si vous ne vous trouvez pas dans une région où ils sont offerts en anglais, ils ne sont pas offerts en anglais, que vous parliez français ou non.
Un autre problème important auquel se heurtent les femmes au Québec est celui de l'exode des jeunes, car beaucoup de jeunes quittent le Québec en quête de débouchés professionnels. Lia vous a parlé un peu de l'importance qu'a eue la famille lorsque sa grand-mère s'est sentie isolée. Au Québec, bon nombre de femmes aînées ne peuvent pas compter sur un tel soutien.
Comme je sais qu'il ne nous reste plus beaucoup de temps, je vais vous raconter une petite histoire qui s'est produite au travail, dans la deuxième semaine, si je me souviens bien, après mon entrée en poste. J'ai reçu un appel d'une femme qui se trouvait à Montréal pour voir sa mère. Sa mère était à l'hôpital. Elle avait plus de 75 ans. La femme en question vivait en Colombie-Britannique avec sa famille depuis quelques années. Sa mère était hospitalisée en raison d'une pneumonie. Pendant le trajet en avion, la femme s'est demandé pourquoi, étant donné que les CLSC offrent des services de soins de santé à domicile, sa mère avait dû être hospitalisée pour une pneumonie, une maladie qui peut être traitée très facilement?
Après quelques discussions, elle s'est rendu compte que sa mère parlait, en fait, un peu français. Toutefois, elle était gênée d'admettre qu'elle ne se sentait pas à l'aise de parler de ses problèmes de santé en français avec la personne qui lui fournissait des soins. Elle s'est retrouvée dans une situation très grave pour cette raison. La femme a téléphoné au CLSC pour demander qu'on trouve une personne parlant anglais pour fournir des soins à sa mère après sa sortie de l'hôpital. On lui a répondu que c'était impossible, que le CLSC n'était pas tenu de trouver quelqu'un de bilingue pour lui fournir des soins à domicile, ce qui était faux.
Elle était au Québec depuis plus longtemps qu'elle le devait. Son employeur insistait pour qu'elle revienne au travail. Les membres de sa famille étaient mécontents. Elle ne savait pas vers qui se tourner. Elle avait appelé l'ombudsman, alors elle nous a appelés pour connaître ses options. Nous avons pu l'aider. Cette femme était dans une situation très difficile, tout comme sa mère. Si sa mère avait quitté l'hôpital sans qu'on lui fournisse des soins appropriés, elle courait de très grands risques. La dame était très âgée et avait une santé très fragile.
Ce ne sont là que quelques exemples des problèmes particuliers auxquels doivent faire face les femmes aînées qui font partie d'une minorité linguistique et d'autres minorités.
Je tiens à remercier le Comité de m'avoir donné l'occasion de lui faire part de ces renseignements.
Excellent.
Aujourd'hui, nous allons commencer par des questions de sept minutes. Je vais céder la parole à madame Sonia Sidhu.
Vous avez sept minutes.
Merci, madame la présidente. Merci à tous d'être avec nous.
Nos aînés méritent une meilleure vie. Nous le savons tous.
Ma question s'adresse à la représentante du Sheridan College. Le campus Davis se trouve dans ma circonscription. Merci d'être avec nous. Merci d'avoir mené cette étude.
Vous avez parlé d'isolement social. Même si nous avons un programme Nouveaux horizons pour les aînés, les femmes immigrantes se heurtent à la barrière de la langue, aux différences culturelles et à leur statut d'immigrante. Que pouvons-nous faire pour les aider à améliorer leur sort?
C'est une excellente question. Il y a ce type de diversité dans la région où se trouve votre circonscription.
Un élément qui est clairement ressorti de notre étude, c'est le besoin d'offrir une formation sur la sensibilisation aux réalités culturelles à bon nombre d'employés qui fournissent des services aux aînés, entre autres. Une certaine sensibilité aux réalités culturelles est nécessaire pour reconnaître diverses situations — même comme celle que Mme Herrick a citée comme exemple —, où les gens peuvent avoir plus ou moins de difficulté à surmonter les obstacles linguistiques. Il faut également fournir beaucoup de ces services dans d'autres langues ou dans un plus grand nombre de formats accessibles.
Cela est ressorti à maintes reprises dans notre étude. L'une de nos plus grandes difficultés a été d'essayer de recueillir des données auprès de personnes qui soit n'étaient pas à l'aise en anglais, soit n'étaient pas à l'aise d'un point de vue culturel à parler de la solitude ou de l'isolement. Dans une des langues, je pense que c'est le mandarin, il n'y a pas de traduction directe pour le mot « esseulé ». On a dû y faire référence de manière détournée, mais il n'a pas été possible d'utiliser un mot ou une expression comme tels. Les membres de notre équipe, qui ne parlent pas la langue, ne pouvaient donc pas discuter de ce concept avec ces personnes. C'était même un obstacle linguistique pour nos interprètes et traducteurs. D'un point de vue conceptuel, ce n'est tout simplement pas un sujet qu'abordent normalement ces personnes.
Certaines des recommandations clés portent sur la façon dont on peut établir la présence de ces obstacles et celle dont on peut y remédier à l'aide de diverses solutions. Cela peut comprendre la traduction de documents, différentes formes d'accessibilité, le recours à un interprète, ce genre de choses.
Vous avez parlé d'accessibilité. La majorité des services de santé sont de compétence provinciale, tandis que le transport relève d'une autre instance. De quelle façon le gouvernement fédéral peut-il contribuer à la prestation de ces services de sorte que les aînés se sentent mieux?
Encore là, c'est une très bonne question. L'une des choses à faire, c'est de veiller à ce que tout le monde soit présent aux discussions. Souvent, les discussions deviennent très isolées et cloisonnées au fil du processus décisionnel.
Les discussions sur le transport n'incluent pas les décideurs provinciaux, ni même fédéraux. Dans des cas comme celui-là, mais aussi d'autres où tous les ordres de gouvernement participent à la prestation ou au financement des services à ces résidants, si tout le monde participe aux discussions, ce qui n'est pas toujours le cas, on obtient une plus grande variété de points de vue, mais aussi des renseignements probants sur les points de service et la façon pour le système de transport d'assurer l'accès à ces endroits.
Dans beaucoup de groupes d'intervention municipaux et régionaux et de comités, nous tentons d'inclure les bons représentants, ceux qui peuvent insuffler le changement dans leur processus décisionnel ou au sein de leur gouvernement.
Non. Je crois que c'est une très bonne suggestion. Ce que vous proposez représente un énorme défi. Beaucoup d'ordres de gouvernement font face aux mêmes problématiques. L'absence de certains services adaptés n'est pas due à un manque de volonté, mais bien aux complications administratives associées à l'établissement d'une vision commune afin de servir efficacement la collectivité sans que ce soit coûteux pour les ordres de gouvernement.
C'est complexe. Mme Tsotsos a raison. La meilleure façon d'y parvenir est de veiller à ce que tous les acteurs soient réunis, et de permettre à tous les segments de la collectivité de se faire entendre sur ce qui fonctionne pour eux, car chaque collectivité est unique.
Je ne figure pas sur la liste des personnes qui doivent poser des questions, mais j'ai vu que vous étiez ici et je suis une anglophone du Québec. J'interagis beaucoup avec la communauté anglophone de ma circonscription, et à Montréal en général. Je maintiens des rapports étroits avec le Quebec Community Groups Network. Je suis également membre du comité sur les langues officielles.
Dans le contexte de Condition féminine Canada, que devrait faire ce ministère, selon vous, pour aider les aînées anglophones qui vivent au Québec à obtenir des services? Évidemment, quand on dit que la volonté est là, ce n'est pas toujours le cas chez toutes les parties concernées ou à tous les ordres de gouvernement. En ce qui nous concerne, que pouvons-nous faire pour faciliter l'accès aux services pour ces femmes?
Ce n'est pas une question facile.
D'abord, je suis heureux de vous rencontrer. Nos bureaux étaient dans votre circonscription à une certaine époque, sur le boulevard Décarie.
Comme je l'ai dit au début, l'une des raisons d'être d'Aînés Action Québec est de défendre les droits et intérêts des aînés anglophones. Cela se traduit par l'établissement de ce qui distingue les aînés anglophones des aînés de la majorité francophone au Québec. Car il y a des différences. Certaines sont liées à la langue, mais pas toutes.
Du côté des facteurs démographiques, les aînés anglophones comptent habituellement moins d'aidants naturels à proximité que leurs pairs francophones. On a littéralement quantifié cette différence. Je ne peux pas vous expliquer comment elle est calculée, mais je connais les chiffres. Pour chaque aîné francophone, il y a à peu près trois virgules quelque chose aidants naturels dans leur milieu, comparativement à deux virgule quelque chose pour les aînés anglophones. C'est simplement un exemple pour illustrer une différence qui n'est pas liée à la langue.
Enfin, au bout du compte, elle l'est peut-être, car les gens partent dans une certaine mesure en raison de la langue, bien qu'ils déménagent aussi pour d'autres raisons.
Pour revenir à votre question, l'une des choses que nous avons constatées, c'est que nous devons sensibiliser le gouvernement provincial à ce qui distingue les aînés anglophones. Oui, il peut y avoir un manque de volonté, mais je crois qu'il faut aller au-delà de cela. C'est aussi une question d'information et de compréhension des différences au sein de la population.
La façon d'aborder cet enjeu, comme l'a dit Mme Tsotsos, c'est d'être présent aux discussions. C'est pourquoi cela fait maintenant partie de notre mode de fonctionnement: entrer directement en contact avec les ministères pertinents au Québec, comme celui des Transports ou du Revenu, avec des ministères qui ne sont pas réputés auprès de la population anglophone pour interagir beaucoup avec elle. Cela dit, si nous voulons que le gouvernement comprenne ce qui distingue les aînés anglophones, nous devons trouver des façons de le lui dire.
Bon, je ne...
En fait, si cela ne vous dérange pas, nous débordons d'une minute environ. Peut-être pouvons-nous conclure cette question.
Madame Harder, vous avez la parole pendant sept minutes.
J'allais simplement dire que des transferts de fonds ciblés par le gouvernement fédéral au gouvernement provincial, à des fins précises — je ne suis pas un spécialiste dans le domaine —, seraient une façon pour le gouvernement fédéral de démontrer son souci pour les aînées anglophones, et une assurance pour le gouvernement provincial qu'il y a une source de financement qui lui permet de tenir compte de ces différences.
Madame Tsotsos, pendant votre exposé, vous avez parlé d'une approche « avec nous » plutôt qu'une approche « pour nous » et du fait que votre organisation a opté pour une approche « avec nous ». Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails sur ce que vous voulez dire par là et pourquoi c'est important pour les aînés d'aujourd'hui?
Volontiers. Nous la décrivons souvent comme une étude aux avantages réciproques, où les deux parties tirent profit de leur participation aux travaux de recherche.
Souvent, et surtout dans le contexte de travaux en collaboration avec des aînés, il y a le risque d'une approche âgiste, c'est-à-dire d'un ton ou d'une approche qui peut être perçu comme très condescendant. On peut parfois le constater dans le secteur de la santé, où l'on entend: « Ce n'est pas grave, ma chère » ou « Prenez vos pilules, ma belle ». C'est ce type de langage et de ton.
Ce que l'on souhaite, c'est éviter d'aborder ces questions comme si ces aînés n'étaient pas des participants pleinement actifs et engagés face au défi qui se pose ou encore dans leurs propres solutions.
Quand on parle d'une approche « avec nous et non pour nous », ce ne sont pas les chercheurs qui disent: « Voici de quelle façon nous allons vous aider, mesdames et messieurs les aînés. Ne vous en faites pas, nous allons bien nous occuper de vous. » Cela se passe beaucoup plus dans l'interaction, car ce sont les personnes les plus à même de comprendre leur situation et les difficultés qu'elles éprouvent. Si les aînés peuvent participer à la création de leurs propres solutions ou stratégies, elles seront probablement plus durables et beaucoup plus efficaces, voire mieux adaptées.
Comme on l'a dit dans l'exemple des aînées anglophones du Québec, ces solutions et stratégies pourraient être beaucoup plus pertinentes si nous échangions directement avec elles afin de comprendre ce qu'elles vivent, ce qui nous permettrait d'allouer plus efficacement les bons types de ressources aux bons services.
L'idée de les inclure dans la solution, peut-être pourriez-vous la préciser un peu plus? Comment pouvez-vous vous assurer que l'autonomie ou les choix individuels sont respectés?
Par exemple, beaucoup de femmes âgées ont fait le choix de rester à la maison à temps partiel ou à temps plein pour s'investir dans l'éducation de leurs enfants. Ainsi, bien sûr, l'une des choses que vous soulevez, c'est l'insécurité économique qui peut en découler quand elles arrivent à l'âge de la retraite. Néanmoins, c'était un choix personnel. C'était l'exercice de leur autonomie. C'est une décision qu'elles ont prise, probablement en partenariat avec quelqu'un d'autre. De quelle façon respectez-vous cela et veillez-vous à ce que des dispositions soient prises pour celles qui ont fait ce choix sans pour autant le déprécier?
C'est un argument fantastique et qui est souvent soulevé, surtout quand il est question d'isolement et de solitude.
Certaines personnes peuvent choisir de vivre seules, et c'est ce qu'elles préfèrent, alors nous ne pouvons pas faire l'erreur de voir leur situation comme un cas de solitude ou d'isolement involontaire. Vous avez tout à fait raison, et préserver leur autonomie est très important. Pour ce faire, il faut entre autres éviter... C'est ce que j'appelle l'âgisme genré. Il s'agit de prévenir une approche âgiste en général et ne pas présumer que, parce que vous êtes une femme qui est restée à la maison, vous avez donc besoin du service X. Il s'agit de s'assurer que le service X est disponible et accessible pour les personnes qui souhaitent s'en prévaloir, sans faire de présomptions ni appliquer une approche générique ou une politique globale.
Il s'agit de veiller à ce qu'elles aient le droit et le privilège de choisir de quelle façon elles aimeraient vieillir, selon leur volonté. Vous avez tout à fait raison.
Cela dit, on pourrait en revanche poser la question suivante: quel est le rôle de la famille? Nous pouvons parler du rôle du gouvernement, et c'est une discussion importante, surtout au sein d'un comité comme celui-ci, mais il y a aussi un rôle sociétal que doivent assumer les membres de la famille, sans compter que la collectivité a aussi son rôle à jouer.
Je me demande si vous pouvez développer vos observations et nous donner des détails sur l'étude que vous avez menée. Quel est le rôle de la famille? Comment se déroule un échange avec les membres de notre société qui ont 65 ans et plus et qui, disons, sont à la retraite? De quelle façon une famille devrait-elle échanger avec ces personnes? Quel est leur rôle?
Il me faudrait probablement plus de sept minutes pour répondre à cela. Je peux tout à fait comprendre qu'on ait à m'interrompre.
Dans nos travaux avec les immigrants âgés qui sont à risque de solitude et d'isolement, la grande majorité d'entre eux vivaient avec leur famille, ce qui peut comprendre les petits-enfants et les enfants adultes. Je crois qu'un autre aspect de l'accessibilité de l'information consiste à tenir compte du rôle des enfants adultes, des enfants et des petits-enfants adultes dans le cadre d'une approche familiale globale.
Je sais, par exemple, en m'inspirant de ma propre expérience, que lorsque les gens pensent aux aides familiaux de personnes atteintes de démence, ils pensent aux enfants de cette personne et pas nécessairement à ses petits-enfants. Et pourtant, j'ai constaté, dans mon cas, que je participais souvent tout autant que ma mère aux soins de son père.
Il s'agit d'admettre que le soutien familial signifie beaucoup de choses pour beaucoup de monde et, une fois de plus, d'éviter de présumer qu'un rôle ou qu'une personne en particulier au sein d'une unité familiale est celui avec lequel nous devons interagir. Nous n'allons pas cibler seulement les femmes adultes, même si ce sont les enfants qui fournissent habituellement le plus de soins. Il s'agit d'admettre l'éventail de façons dont les gens peuvent offrir du soutien, par l'intermédiaire de la technologie, des finances ou de la rétention d'autres services.
Si je prends des dispositions pour l'entretien de la pelouse, j'offre une certaine forme de soutien à un adulte âgé dans ma vie. J'essaie de trouver toutes les voies qui s'offrent à nous et de quelle façon nous pouvons rendre tout plus accessible à un plus grand nombre de gens. Comme vous le dites, il n'y a pas que les programmes gouvernementaux. Il s'agit simplement de prendre conscience que n'importe qui peut retenir les services d'un tondeur de pelouses pour un aîné dans sa vie. Il n'est pas nécessaire d'avoir une procuration ou d'être la personne désignée responsable de ses finances.
Je ne sais pas si cela répond à votre question en une minute et demie.
C'est parfait. Merci beaucoup.
J'accorde maintenant la parole à Irene Mathyssen pendant sept minutes.
Madame Mathyssen, c'est à vous.
Merci, madame la présidente.
Merci à vous tous d'être ici. Merci pour vos activités de défense des droits et intérêts. Ce que vous faites est très important.
J'aimerais que les trois témoins répondent à ces questions pour voir si nous pouvons noter quelques points au compte rendu sur lesquels le Comité pourra travailler.
Avant tout, la question des femmes en tant qu'aides familiaux, et qui n'occupent peut-être pas un emploi rémunéré à temps plein, est quelque chose qui me préoccupe beaucoup. Dans les faits, le travail des femmes est très souvent sous-payé. Il n'est pas valorisé comme il se devrait. Ainsi, compte tenu de l'iniquité salariale et du manque de considération accordé aux aides familiaux, les femmes âgées font souvent face à la pauvreté et aux contraintes financières.
Nous avons une disposition d'exclusion applicable à l'assurance-emploi et à l'aide familiale. Est-ce qu'une disposition d'exclusion au Régime de pensions du Canada serait une façon de remédier au problème du travail sous-estimé et non rémunéré?
En termes simples, le temps qu'une femme consacre au travail très important à la maison ou à la prestation de soins n'est pas rémunéré. En conséquence, elle ne cotise pas autant au Régime de pensions du Canada que quelqu'un qui a un travail rémunéré et qui accumule les prestations de retraite. Avons-nous besoin d'une disposition d'exclusion pour que le temps consacré à fournir des soins et à élever une famille soit valorisé et pris en compte par le Régime de pensions du Canada?
Il y a aussi la hausse du Supplément de revenu garanti. Il n'est pas suffisant pour la femme qui a prodigué des soins. Il ne lui permet pas de subsister.
Sur ces deux points, avez-vous quelque chose à dire?
À mon avis, poser la question, c'est y répondre.
Je constate que le pourcentage de femmes âgées anglophones qui vivent avec 20 000 $ par année ou moins est considérable. Je pense que la disposition dont vous parlez aurait aidé certaines d'entre elles.
Je pense qu'il est assez facile de conclure que, oui, des mesures comme celles-là seraient utiles.
Merci beaucoup.
Nous avons parlé du fait que les femmes âgées n'ont pas accès à bien des programmes. Une des choses qui me dérangeaient — j'étais porte-parole des aînés et des anciens combattants — était que le gouvernement ait de plus en plus recours à la technologie. Il affiche les choses en ligne et répond aux personnes qui ont besoin d'aide d'aller les consulter. Pour une personne qui n'est pas compétente en informatique, ce n'est pas utile.
Nous avons tous ces numéros sans frais, et si vous passez 45 minutes à écouter l'enregistrement, la ligne finit par être coupée, si bien que vous devez recommencer à zéro. Je pense que ce manque de contact humain pose problème. Le gouvernement fédéral a-t-il un rôle à jouer pour redonner leur humanité aux programmes, aux choses dont les gens ont besoin, pour qu'ils puissent y accéder comme par le passé?
Je dirais qu'il y a un besoin réel à cet égard, non seulement d'offrir un contact humain, mais aussi de tenir compte du fait que, en plus de ne pas être compétents en informatique, les gens peuvent ne pas être dotés de ces technologies, comme Internet, ou ne pas avoir la capacité de se rendre à un endroit où Internet est offert, comme une bibliothèque, par exemple.
Je pense que le retrait de certains de ces services de soutien en personne cause vraiment du tort à un groupe beaucoup plus vaste qu'on pourrait le croire au départ. On se dit simplement « oh, vous ne savez pas comment utiliser un ordinateur ». Les aînés n'ont peut-être pas accès à ce type de technologie, ils n'y ont peut-être jamais eu accès et ils pourraient ne plus pouvoir continuer à l'utiliser au fur et à mesure qu'ils vieillissent et qu'ils se retrouvent avec des problèmes sensoriels et des problèmes de mobilité, par exemple.
Peut-être qu'ils sont en mesure d'aller à la bibliothèque en ce moment, mais dans deux ans, ils pourraient se fracturer la hanche et ne plus pouvoir le faire. Je dirais que, oui, il faut pouvoir offrir le strict minimum de services en personne ou pouvoir parler à une personne et pas uniquement en ligne, car, ce faisant, on pourrait vraiment influer sur une plus grande population que l'on pense, selon moi.
Je pense qu'il faut une certaine créativité. J'ai récemment assisté à une conférence où j'ai entendu un exposé vraiment intéressant de la part de représentants d'un CLSC local au Québec à qui cela posait problème. Comment faire pour rejoindre ces communautés? Comment faire pour entrer en contact avec les personnes qui ne sont pas en ligne ou qui n'ont pas les moyens d'avoir Internet?
Ils ont eu comme idée — ce qui, pour moi, était vraiment brillant — d'envoyer des messages par l'intermédiaire des responsables de la Popote roulante, des petites notes sur lesquelles ils demandaient: « Aimeriez-vous que nous vous appelions pour vous parler de ces services? »
De cette façon, ce ne sont pas les aînés qui doivent les appeler. Ce n'est pas difficile pour eux de trouver ces gens et ces renseignements. Nombre d'entre eux bénéficient déjà de la Popote roulante. Il s'agit de gens qu'ils connaissent et avec lesquels ils se sentent à l'aise. Tout ce qu'ils ont à faire, c'est cocher une case, remettre la note à la personne qui leur apporte leur repas pour qu'elle la transmette au CLSC qui fera un suivi et dira: « D'accord, vous avez signalé que ces divers services vous intéressaient; que pouvons-nous faire pour vous? »
Leur approche a été vraiment fructueuse. Il suffit d'un peu de créativité et de ne pas toujours se contenter de faire les choses de la même façon.
Dans quelle mesure cette approche est-elle répandue? Vous en avez parlé au Québec, mais est-ce que quelqu'un sait si on procède ainsi dans les autres provinces et territoires?
Je n'ai pas entendu dire qu'on procédait ainsi ailleurs, mais je ne sais pas. Je ne peux pas l'affirmer avec certitude.
D'accord. Merci.
Je pense que tout le monde a mentionné le rôle des professionnels de la santé. Une chose qui me préoccupe vivement est la pénurie de gérontologues. Les besoins d'un aîné changent avec l'âge, et les traitements médicaux qui fonctionnaient il y a cinq ans pourraient ne plus répondre à ses besoins actuels.
Je pense à ma propre mère. Son médecin généraliste ne semblait pas comprendre ce qui lui arrivait et, en fait, il ne l'écoutait même pas. Quand une personne qui se préoccupait vraiment d'elle...
... a fini par la voir, ma mère était en situation de détresse. Estimez-vous que les professionnels de la santé aient besoin d'être mieux formés, ou le cas de ma mère était isolé?
Je pense que cela fait partie de la réponse, c'est clair. L'autre réponse est que nous nous efforçons davantage de soutenir et de sensibiliser nos aînés aux questions à poser et à la façon de s'assurer qu'ils consultent les professionnels adéquats pour répondre à leurs besoins. C'est une réponse très courte et simplifiée, mais je pense que cela marche dans les deux cas.
J'allais dire que je suis souvent d'accord pour dire qu'il existe un problème réel, mais que je pense aussi que les gens éprouvent parfois des difficultés. Ils sont intimidés au cabinet du médecin. Il est clair que les aînés anglophones ne savent pas comment exprimer leurs besoins, alors en tant que défenseurs de cette communauté, nous devons prendre des mesures supplémentaires pour accroître leur autonomie en leur disant comment poser des questions et en nous assurant qu'ils voient les personnes qui leur conviennent.
Merci d'avoir pris le temps de venir témoigner devant le Comité. Merci pour le travail que vous faites pour la cause des aînés.
Je dois dire, monsieur Udy, que j'ai été particulièrement frappée par une des statistiques que vous avez mentionnées, à savoir que plus de deux fois plus de femmes que d'hommes vivent avec moins de 20 000 $ par année.
Je me demande si, dans le cadre de votre travail, vous avez tous eu l'occasion de discuter avec des aînées afin de comprendre dans quelle mesure elles connaissent les programmes gouvernementaux à leur disposition, tous paliers de gouvernement confondus. Pensez-vous que les gens sont suffisamment au courant de l'aide gouvernementale offerte?
Non, je ne le crois pas. Et c'est plus compliqué au Québec parce qu'il faut fonctionner en deux langues. Votre question est intéressante. En ce moment, nous travaillons à la préparation d'un colloque d'une journée sur ce sujet particulier. Récemment, nous avons entendu un bref exposé sur les programmes — les programmes de revenu et les options de déduction offerts aux aînés et aux aidants naturels —, et j'ai compris que c'est beaucoup plus compliqué que je ne le pensais. Les gens ont vraiment besoin qu'on les accompagne pas-à-pas, dans une certaine mesure, juste pour comprendre ce qui est disponible et comment y accéder. Il est absolument nécessaire de sensibiliser à la fois les fournisseurs de ces programmes et les membres de la collectivité qui veulent prêter main-forte aux aînés. C'est assez difficile de fournir de l'aide si vous ne la comprenez pas vous-même. C'est définitivement un besoin.
Je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter, mais j'allais simplement vous demander si, dans votre colloque d'une journée ou dans d'autres programmes où vous essayez de sensibiliser les personnes âgées à l'aide gouvernementale, il y a des comptables ou d'autres professionnels des finances pour vous épauler dans ce travail, dans cet accompagnement serré dont vous venez de parler.
Brièvement, disons que des experts seront effectivement présents pour fournir cette aide lors de la préparation du colloque, mais je pense que vous parlez de ce qui se passera après. C'est plus difficile à organiser. Les organismes communautaires du Québec jouent un rôle assez important dans la communauté anglophone, mais ils doivent avoir accès à ce genre savoir-faire.
Je pense que la navigation dans le système est vraiment une question importante qui revient très souvent. Les gens connaissent peut-être une petite partie de ces rouages, mais les systèmes qui relient tous les différents services et tous les différents types d'aide qu'une personne pourrait envisager restent difficiles à comprendre. Avec tous ces différents fournisseurs, l'assignation et l'intégration des services appropriés peut-être problématique. L'accompagnement pas-à-pas des aînés — les aider à mieux comprendre à quoi ressemble le système dans son ensemble, quelles en sont les différentes parties et ce à quoi ils peuvent avoir accès — n'est pas chose facile.
Nous l'avons constaté lors d'événements communautaires auxquels nous avons participé ou que nous avons parfois organisés. Il y a beaucoup d'échanges informels à ce sujet. Par exemple, comment vous êtes-vous débrouillé avec le processus de demande de soins à domicile? Qu'est-ce qui a fait que les gens ont enfin compris que vous aviez besoin d'aide et qu'il ne fallait pas tout simplement vous reléguer à une liste d'attente d'un an? Je suis tout à fait d'accord avec tout ce que Michael a dit.
Je constate qu'entre 2005 et 2015, le nombre de femmes âgées dans la population active a doublé. J'aimerais savoir si vous avez remarqué l'émergence durant cette période d'une nouvelle autonomie financière chez ces personnes et, le cas échéant, quelles répercussions cela avait eues sur leur vie.
Nous sommes au courant des écarts salariaux qui touchent particulièrement les femmes âgées. C'est un vrai problème, mais au moins dans ma collectivité, ce type d'autonomisation économique semble également avoir un effet très positif sur le bien-être social de ces femmes. Elles ont vraiment l'impression de contribuer de nouveau à la société, et cela leur donne aussi un réseau. Que pouvez-vous nous dire au sujet des femmes âgées sur le marché du travail?
Je pense que tout ce que vous dites est absolument vrai. Je pense que, dans bien des cas, c'est vraiment valorisant pour les femmes. Cela les aide à se sentir plus engagées dans la société. Cela les aide à rencontrer d'autres personnes, et à se faire de nouveaux amis et de nouvelles relations. Comme on l'a mentionné tout à l'heure, cela aide aussi à faire circuler l'information de manière informelle. Elles ont l'occasion de parler à des gens qui peuvent les aider à naviguer dans leur vie, peu importe ce à quoi elles sont confrontées.
Je pense toutefois que ce phénomène est en partie attribuable aux besoins de ces femmes. En effet, 50 % d'entre elles vivent avec moins de 20 000 $ par année et elles n'ont tout simplement pas le choix de travailler. Donc, même si je pense que, d'une part, cela peut être très stimulant et très positif, je pense que nous devons aussi être conscients que le fait que le nombre de femmes plus âgées dans la population active ait doublé est peut-être un signal d'alarme, et que nous devrions nous assurer qu'elles ont assez d'argent pour vivre. Travaillent-elles parce qu'elles le veulent ou parce qu'elles y sont absolument obligées? Leur santé risque-t-elle d'en pâtir? De toute évidence, cela soulève d'autres questions.
Nous avons terminé une étude sur l'entrepreneuriat chez les aînés, et tous les facteurs que Vanessa vient d'évoquer ont également été mentionnés lors de cette étude. Les gens ont entrepris de démarrer une petite entreprise ou de se donner une sorte de revenu d'appoint parfois par nécessité ou tout simplement parce qu'ils avaient besoin de cet engagement supplémentaire pour quelque autre raison. Mais ensuite, ils ont constaté qu'il y avait un hiatus entre leur désir de devenir entrepreneur et les programmes offerts, lesquels s'adressent exclusivement aux jeunes de moins de 30 ans. Il y avait donc ce genre de déséquilibre entre leur désir de s'engager ou leur besoin de s'engager et le fait qu'il n'y avait pas d'aide pour leur groupe d'âge ou pour ce qu'ils voulaient accomplir. C'est quelque chose que nous avons vu dans le cadre d'un travail sur l'entrepreneuriat que nous avons également fait. Tous ces éléments ont aussi été évoqués à cette occasion.
... s'il y a des créneaux où le gouvernement fédéral pourrait jouer un plus grand rôle. Vous avez parlé de l'entrepreneuriat chez les aînés. Y a-t-il un ou deux autres points que vous aimeriez porter à l'attention du Comité?
Je pense simplement qu'il est très important de faire écho au fait que nous avons mis en place des programmes fantastiques pour aider les jeunes qui essaient de se développer et de faire des choses. Cependant, je constate un réel manque de soutien et de services pour les femmes âgées qui voudraient lancer leur propre entreprise ou qui ont des compétences particulières qu'elles pourraient exploiter. Cela pourrait leur permettre non seulement d'avoir plus de revenus, mais aussi de mieux s'engager dans la société selon leurs propres conditions, conditions avec lesquelles elles pourraient se sentir plus à l'aise.
D'accord. C'est excellent. Je vous remercie beaucoup.
Nous allons maintenant commencer notre série de questions de cinq minutes, et je vais céder la parole à Kellie Leitch.
Kellie, vous avez cinq minutes.
Je vous remercie beaucoup.
Merci à tous d'avoir pris le temps de venir témoigner.
Je suis médecin praticien, mais à l'autre bout du spectre. Mes patients sont des enfants, mais ils viennent souvent avec leurs grands-parents. J'ai donc l'occasion d'entendre parler de leurs problèmes à eux aussi.
Vous avez tous mentionné certaines préoccupations en matière de santé, en particulier vous, Vanessa. Vous avez raconté une histoire. Je vous dirais que j'ai aussi entendu parler d'histoires semblables. Je pense que beaucoup d'aînés sont vraiment à risque à cause de leur manque d'habileté à communiquer. En tant que médecins, nous avons tendance à parler dans une langue que les aînés ne parlent pas. Franchement, je ne pense pas que beaucoup de Canadiens la parlent.
Je crois qu'il devrait y avoir un certain degré de responsabilité en matière de soins de santé, que ce soit par l'entremise du gouvernement fédéral en vertu de la Loi canadienne sur la santé ou des gouvernements provinciaux qui, en raison de cette loi, ont assumé la responsabilité de fournir des soins de santé. Ils affirment qu'on ne devrait pas autoriser d'autres entités à faire cela, mais qu'en est-il des besoins des patients? C'est devenu très bureaucratique.
Pourriez-vous me dire comment vous croyez que la responsabilité envers les patients devrait se décliner pour les aînés? Quelle responsabilité le gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux devraient-ils avoir envers les aînés? Ils ont assumé la responsabilité des soins, alors comment pourrions-nous les tenir responsables de fournir de bons soins aux patients, de s'acquitter de cette responsabilité qu'ils ont choisi d'assumer?
Ce n'est pas la réponse principale à votre question, mais je me souviens d'un incident qui est arrivé à ma mère quand elle avait environ 78 ans. J'avais rencontré son médecin de famille et j'étais d'accord avec elle pour dire qu'il ne semblait pas s'intéresser à elle. Un jour qu'elle s'était aperçue qu'il ne l'écoutait pas, elle l'a subtilement rappelé à l'ordre. Elle a dit: « Je vois que ça ne vous intéresse pas tant que ça, alors je pense que je vais partir. » Cela a attiré son attention.
Donner aux gens les moyens de poser des questions et de savoir ce qu'ils veulent savoir et de recevoir le genre d'attention qu'ils veulent recevoir est un élément important de ce processus.
L'autre partie de ma réponse est liée au fait que tant de Canadiens, et tant de Québécois en particulier, n'ont pas accès à un médecin de famille, point final, peu importe leur âge. C'est un problème qui n'est pas limité aux aînés. En réglant ce problème, je crois que nous pourrions, entre autres choses, répondre à certains des besoins des aînés.
Je suis d'accord. Il y a plus de cinq millions de Canadiens qui n'ont pas accès à un médecin de famille. En plus des médecins de famille, quels sont, selon vous, les autres problèmes que nous devrions aborder en ce qui concerne les obligations redditionnelles à l'égard des patients? L'un d'eux est la question des médecins de famille. D'aucuns disent que les temps d'attente sont un autre problème, et je suis certaine que les aînés en souffrent. Certaines personnes âgées me posent des questions sur le remplacement de la hanche, une opération pour laquelle le temps d'attente est de 24 mois.
Qu'est-ce qui devrait faire partie de cette responsabilité à l'égard du patient? Avez-vous d'autres idées à ce sujet?
Je pense que les médecins au Canada font face à beaucoup de problèmes. Je pense que, de bien des façons, les gouvernements font ce qu'ils peuvent pour les appuyer. Je veux me faire l'écho de ce que Michael a dit tout à l'heure au sujet d'une partie du travail que nous faisons. Je pense qu'il est vraiment important que le gouvernement aide les défenseurs des droits des aînés à éduquer ces derniers pour s'assurer qu'ils... Souvent, lorsqu'ils traitent avec le système de santé, les aînés perdent du temps parce qu'ils ne savent pas quelles questions poser. Ils se retrouvent à l'urgence, alors que ce n'est pas vraiment là qu'ils devraient être. Je pense qu'il faut travailler davantage pour permettre aux aînés de participer activement à leurs propres soins de santé et pour les encourager à le faire. Cela n'arrive probablement pas aussi souvent que cela devrait arriver, du moins, selon moi.
Je pense qu'il faut accorder une attention particulière aux médicaments. Vieillir, c'est prendre plus de médicaments — pas pour tout le monde, mais en général, oui. Mes parents ont vécu cela. J'en ai fait l'expérience moi-même. Je prends des choses que je ne prenais pas quand j'avais 25 ans.
J'ai vu la pharmacie de mes deux parents se garnir de toutes sortes de produits au fil des ans. Personne n'aurait pu comprendre à quoi tout cela rimait, parce que les différents éléments avaient été prescrits par différents professionnels de la santé. Personne n'avait vraiment une vue d'ensemble de la chose. Je ne sais pas comment, en médecine, on peut arriver à s'y retrouver, mais j'estime qu'il est absolument nécessaire de le faire.
Je suis d'accord avec tout ce que Vanessa et Michael ont dit.
Pour ce qui est de la reddition de comptes, l'autre élément pourrait être de miser sur l'éducation de base de tous les fournisseurs de soins de santé. « C'est quelque chose qui arrive avec l'âge » n'est peut-être pas une réponse appropriée aux préoccupations d'un patient. Il y aurait lieu de prévoir davantage de formation en gériatrie pour tous les intervenants des soins de santé, qu'il s'agisse des physiothérapeutes, des travailleurs sociaux ou des médecins eux-mêmes. Ce n'est pas parce que la plupart des gens vont éventuellement se retrouver avec une certaine déficience auditive qu'il faut d'emblée blâmer cela sur le fait qu'ils vieillissent et qu'ils ne peuvent plus entendre aussi bien qu'avant.
L'intégration dès le début d'un enseignement et de pistes de compréhension quant à la façon de prévenir les maladies chroniques plus graves peut, à plus long terme, aider les intervenants de la santé à honorer leurs obligations redditionnelles. La réponse donnée d'office ne sera plus: « Eh bien, ce sont des choses qui arrivent » ou « vous vieillissez ». Grâce à l'autonomisation des patients, ces deux éléments réunis peuvent aider à prévenir beaucoup plus d'effets indésirables graves.
Voilà qui est excellent. Je vous remercie beaucoup.
Nous allons maintenant passer à Eva.
Eva, vous avez les cinq dernières minutes.
[Français]
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins de leur présentation.
Je suis la députée de la circonscription de Vimy, à Laval, où le quart de la population est des aînés. Dans une autre vie, j'ai été infirmière. Alors, je sais ce qui se passe chez nos aînés, spécialement dans une circonscription comme la mienne où il y a beaucoup de communautés culturelles. Je tiens à mentionner que la Ville de Laval offre gratuitement, depuis 2014, le service de transport en commun aux personnes âgées. Il existe aussi à Laval le nouveau Agape's English-speaking Seniors Wellness Center, qui a ouvert ses portes l'année dernière. J'ai eu le plaisir d'aller le visiter. Les intervenants font un travail incroyable au sein de la communauté anglophone, que ce soit sur les plans de la culture, des soins de santé, des conférences, entre autres. C'est un centre incroyable axé sur la communauté anglophone; il y a plein de communautés dans Vimy.
Je sais que les services de santé sont de compétence provinciale, mais j'aimerais savoir ce que notre gouvernement pourrait faire en plus du programme Nouveaux Horizons pour les aînés, qui a déjà été évoqué par plusieurs de mes collègues. En fait, il s'agit d'un programme incroyable qui offre beaucoup de subventions, surtout dans ma circonscription, qui est le centre-ville de Laval. Nous pouvons certainement améliorer notre intervention auprès des aînés, surtout les femmes.
Que pouvons-nous faire à l'échelon fédéral, même si c'est une question de compétence provinciale?
Je commence par vous, madame Tsotsos.
[Traduction]
Merci beaucoup.
C'est une excellente question, et vous avez tout à fait raison, le programme Nouveaux horizons est formidable. Quand il s'agit d'un travail financé comme celui-là, je pense que l'un des problèmes est la viabilité à long terme. Il faut apporter des ajustements à notre façon de financer les choses ou fournir un financement supplémentaire pour aider les gens à passer à la prochaine étape de leurs efforts de longue haleine. Dans notre collectivité, dans notre région, j'ai entendu parler de tant de merveilleux programmes Nouveaux Horizons qui ont malheureusement pris fin dès que le financement pour embaucher un coordonnateur de programme arrivait à terme ou était épuisé.
Il faut trouver des façons de faire plus avec les ressources qu'on nous donne et il faut soutenir une vision à plus long terme de l'élaboration et de la mise en œuvre de ces choses. Cela fait peut-être partie des changements qu'il faudra apporter aux critères de financement et de subvention. Nous devrions peut-être mettre un peu plus l'accent sur l'intégration de tous ces nouveaux programmes et services que nous développons dans les infrastructures existantes ou appuyer la création de nouvelles infrastructures afin que lesdits programmes ne disparaissent pas dès qu'émerge une nouvelle priorité gouvernementale ou que ce fonds particulier se tarit.
[Français]
Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais c'est un programme qui est reconduit chaque année. Il ne s'agit pas d'un programme qui se termine au bout d'une année. Il est donc possible d'y avoir recours à nouveau.
J'ai une autre question. Les personnes âgées issues des communautés culturelles, âgées de 50 ou 60 ans et qui viennent souvent ici pour prendre soin de leurs petits-enfants, sont beaucoup plus vulnérables que les aînées canadiennes anglophones. Ce sont des gens qui ne connaissent ni le français ni l'anglais la plupart du temps. C'est évident que je ne suis pas ici pour dire qu'il faut trouver des programmes pour chaque communauté, c'est quasiment impossible. Par contre, qu'est-ce que nous pouvons faire de plus?
Je demanderais à Mme Herrick de répondre à cette question.
Que se passe-t-il au Québec? Je sais que, au Québec, il y a beaucoup plus de programmes comme La Popote roulante pour les gens seuls, qui existe aussi à Laval, tout comme le transport en commun dont j'ai parlé tout à l'heure, mais que pouvons-nous faire en plus?
[Traduction]
Je crois que c'est un point important et, d'après ce que nous observons à Laval et à Montréal, des efforts réels sont déployés pour venir en aide aux personnes qui ne parlent ni le français ni l'anglais parce qu'il existe une grande communauté, et ces gens ne vivent pas seulement à Montréal et à Laval.
Je vais revenir un peu sur ce que nous avons dit tout à l'heure. Bon nombre des organismes communautaires qui oeuvrent dans le domaine, qui embauchent les traducteurs nécessaires — il y a d'excellents exemples à Montréal — reçoivent un financement du gouvernement en fonction des projets. Autrement dit, il faut faire une demande pour obtenir une somme d'argent pendant une période déterminée.
Ces organismes passent beaucoup de temps à s'inquiéter au sujet du financement et à essayer d'assurer le maintien de leurs services, plutôt que de trouver de nouveaux moyens créatifs d'appuyer la communauté. Je le répète, je ne suis pas économiste. J'ignore quelle est la meilleure façon de s'y prendre, mais il y a peut-être lieu de cerner des figures de proue communautaires et de veiller à ce que leur financement soit stable afin qu'elles puissent collaborer avec de petits intervenants au sein des diverses communautés.
Au lieu de créer un nouvel organisme pour chaque population d'immigrants, il faudrait peut-être nommer une personne chargée de travailler au sein du groupe général qui représente, par exemple, la population chinoise ou libanaise — c'est-à-dire une personne qui peut travailler davantage sur le terrain. On pourrait ainsi tendre la main à un plus grand nombre de gens. Je peux parler uniquement pour le Québec, car c'est notre domaine d'expertise, mais il existe, partout dans la province, des groupes communautaires qui sont tricotés serrés grâce à différents organismes.
Il s'agit là d'un excellent réseau. Misons donc là-dessus et aidons ces organismes à élargir leur portée afin qu'ils puissent repérer les gens qui sont laissés pour compte.
Excellent. Merci beaucoup.
Je tiens à vous remercier tous sincèrement de vos témoignages. Michael Udy, Vanessa Herrick et Lia Tsotsos, merci beaucoup d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
Nous allons faire une pause de deux minutes et, au retour, nous entendrons notre deuxième groupe de témoins.
Nous reprenons la 139e séance du Comité permanent de la condition féminine.
Pour la deuxième heure, je suis ravie d'accueillir, à titre personnel, Juliette Noskey, qui témoignera par vidéoconférence depuis Calgary, en Alberta, et Colleen Young, qui est députée de l'Assemblée législative de la Saskatchewan pour le district de Lloydminster. Elle préside actuellement le comité permanent de l'économie, ainsi que le comité des politiques économiques du caucus.
Colleen, vous pouvez m'écrire plus tard pour me dire comment je me débrouille comme présidente — ce dont je vous saurais gré —, mais pour l'instant, je vais vous céder la parole.
Vous avez sept minutes pour commencer.
Je suis ici aujourd'hui pour dire au Comité qu'il faut absolument trouver un moyen de mettre en place des mesures assurant une sécurité financière aux mères au foyer.
Si une femme choisit de rester à la maison pour élever ses enfants, elle dépend le plus souvent entièrement de son conjoint sur le plan financier. Si le mariage est solide et que l'emploi de ce dernier est stable, le couple peut normalement s'arranger. Toutefois, si le mariage ou l'union de fait se termine, cette femme devra sans doute trouver un emploi pour prendre soin de ses enfants.
Nous savons tous qu'obtenir un divorce avec une pension alimentaire pour un enfant est un processus très stressant, coûteux et difficile, qui se solde parfois par un échec. Le conjoint peut tout simplement disparaître. Il arrive même qu'il revienne plus tard pour contester les droits de visite, ce qui augmente le stress et les frais judiciaires.
Une femme peut sombrer dans la pauvreté et en venir à être complètement dépendante des programmes d'aide. Toutefois, encore faut-il qu'elle y soit admissible. Il lui faudra sans doute occuper un ou plusieurs emplois pour répondre aux besoins de sa famille, et elle ratera, à mon avis, des occasions de s'impliquer dans l'éducation de ses enfants.
Il lui faudra peut-être même faire appel à des membres de la famille pour obtenir un soutien financier si ceux-ci en ont les moyens. Même ses enfants auront possiblement à trouver un emploi à temps partiel pour répondre aux besoins de la famille. Il se peut même qu'elle ait travaillé pour son mari et contribué à la réussite de l'entreprise de ce dernier, tout en s'occupant de leurs enfants et de leur maison. Pourtant, elle ne recevra rien à la fin.
Je suis convaincue que tout le monde dans cette salle a déjà entendu de nombreuses histoires semblables et connaît une jeune femme, une maman, qui s'est retrouvée dans cette situation.
De nos jours, une jeune femme devrait pouvoir envisager tranquillement d'élever sa famille en étant mère au foyer ou en travaillant à temps partiel ou à temps plein, si elle le souhaite, sachant qu'en vieillissant, elle recevra les mêmes déductions et prestations que son conjoint, voire une pension. Voilà la clé. À quoi a-t-elle droit si elle choisit d'être mère au foyer, sans emploi, mais jouant un rôle crucial dans l'épanouissement de sa famille? Jamais une valeur financière n'a été assignée à un emploi aussi primordial et déterminant dans ce monde.
J'ai 62 ans, et je suis mariée à mon mari, Kim, depuis 38 ans. J'ai mis au monde et élevé, avec mon mari, huit enfants en santé, qui réussissent bien. J'ai travaillé de 1974 à 1978, lorsque j'étais jeune célibataire, avant de décider d'aller à l'université. Je travaillais comme serveuse le soir et les fins de semaine pour payer mes études postsecondaires et pourvoir à ma subsistance. J'ai épousé Kim en 1981 et j'ai mis au monde notre fille en juin 1982. Pendant cette période, mon mari a été élu à l'Assemblée législative de la Saskatchewan. Je l'ai aidé à se faire élire; j'appuyais pleinement sa décision et son travail. J'étudiais aussi à l'université et j'élevais notre fille. Le premier de mes fils est né en août 1983, et j'ai fait une pause d'un an dans mes études, avant de reprendre celles-ci à l'automne 1984.
Avant son élection, mon mari avait été avocat pendant huit ans et il gagnait un salaire raisonnable. Il a cessé de pratiquer peu après son élection, et notre revenu annuel a diminué substantiellement, pour s'établir à seulement 32 000 $. Nous devions payer l'hypothèque, les dépenses d'automobile, les services publics, la nourriture, les vêtements et bien d'autres choses pour répondre aux besoins des enfants, dont un bébé. Nous avons géré notre argent avec soin, limitant nos dépenses, vivant dans une maison modeste, soucieux de garder nos dépenses inférieures à nos revenus. Je touchais alors une maigre allocation familiale de 55 $ par mois. Mon mari pouvait déduire l'allocation familiale et celle pour les enfants. Son père était décédé l'année de notre mariage, et nous avions repris la ferme pour ne pas payer de gains en capital à ce moment-là.
J'aidais mon mari sur la ferme. Il me versait un petit salaire et avait ainsi droit à une déduction. Cependant, devinez quoi, parce qu'il faisait cela, je devais payer en moyenne 10 000 $ par année en impôt. Voilà de l'argent que ni lui ni moi n'avions. Nous avons toutefois fait notre devoir et payé par versements. Je me souviens très bien avoir été exaspérée et fâchée à ce moment-là, convaincue que le gouvernement fédéral ne voulait ni des familles fortes au pays ni des femmes qui restent au foyer pour élever des enfants équilibrés, bien élevés et en bonne santé.
Qu'est-ce qui clochait alors, et qu'est-ce qui cloche encore aujourd'hui? Recevoir un crédit d'impôt de 500 $ pour enfants après coup ne suffit pas non plus. Même si l'on y est admissible, il faut d'abord trouver l'argent pour payer d'avance les dépenses des enfants.
Un article national paru en juin 2011, dans la revue sur les finances personnelles MoneySense, montre qu'il faut prévoir 17 236 $ par enfant par année. C'est donc dire qu'élever un enfant de la naissance jusqu'à ses 18 ans coûte environ 310 244 $. Ce montant remonte à huit ans. Je n'ose imaginer quels sont les chiffres aujourd'hui. Nous devons faire mieux.
Les jeunes femmes attendent aujourd'hui d'être dans la trentaine avant de fonder une famille. Elles attendent d'avoir une carrière et un emploi stable, idéalement avec un régime de pension. Il y en a un grand nombre parmi celles dont l'employeur n'offre ni avantages sociaux ni régimes de pension qui appréhendent de fonder une famille ou qui choisissent de n'avoir qu'un seul enfant. Les choses ne devraient pas se passer ainsi.
Je me réjouis et rends grâce d'avoir la possibilité d'être mère au foyer et de faire tout mon possible pour élever huit bons enfants résilients, qui ont des valeurs morales bien ancrées, qui sont bien éduqués et qui réussissent bien dans la vie. J'ai fait beaucoup de bénévolat dans les écoles et dans la communauté, et j'étais toujours là pour mes enfants s'ils avaient besoin de moi. En 1995, j'ai décidé de me présenter aux élections du conseil des écoles publiques de notre région. J'ai été élue; j'étais alors mère d'une fille et de sept garçons. Tout l'argent que j'ai fait jusqu'à ce que je démissionne a servi à répondre aux besoins de mes enfants, entre autres, sous forme de montants mensuels pour ceux qui étaient à l'université.
J'ai été élue députée provinciale en novembre 2014. Aujourd'hui, même avec l'emploi que j'occupe, je peux vous dire que 95 % de mon revenu mensuel continue de servir à répondre aux besoins de mes enfants qui ne ménagent pas leurs efforts dans leurs études ou dans leurs carrières.
J'ai fait beaucoup de sacrifices au cours des 38 dernières années pour le bien-être de mes enfants, volontairement et avec joie. J'ai de la chance et je ressens de la gratitude d'avoir un emploi qui offre des avantages sociaux et un régime de pension. Je m'inquiète pour les jeunes femmes qui se demandent comment elles feront pour arriver à subsister en vieillissant et qui n'ont d'autres choix que de continuer à travailler à un âge avancé juste pour joindre les deux bouts. Mes petites-filles ne devraient pas appréhender d'être mères au foyer ou craindre de ne pas avoir d'enfants. Les jeunes femmes d'aujourd'hui et de demain doivent savoir qu'elles sont précieuses et que leur contribution à la société en restant à la maison et en élevant leurs enfants a une valeur financière bien établie. Elles méritent d'avoir des avantages ainsi qu'une pension.
En tant que femmes influentes, nous pouvons et devons faire mieux en mettant en place des politiques et des lois qui reconnaissent et montrent la valeur des jeunes mères d'aujourd'hui et de demain. Je vous remercie de votre invitation.
Je m'appelle Juliette Shirley Noskey, née Kapashesit, ce qui signifie « petite » en français. Je suis membre de la Première Nation de Loon River, une réserve située à quatre heures et demie au nord d'Edmonton, en Alberta.
Je suis née et j'ai grandi à Moose Factory, en Ontario, au large de la rivière Moose. Je suis la fille d'Oliver et de feu Alice Small. Tout au long de mon enfance, mes parents ont travaillé comme récolteurs à divers endroits dans le nord de l'Ontario. À un jeune âge, j'ai été placée dans un pensionnat — au Bishop Horden Hall — où j'ai vécu pendant neuf ans. Même si mes parents nous confiaient au pensionnat pendant l'année scolaire, leur dévouement envers notre famille ne s'est jamais tari. La famille était importante pour ma mère. Elle l'est encore aujourd'hui pour mon père et mes neuf frères et soeurs.
Ma mère, Alice, démontrait son dévouement envers la famille grâce à son amour, à son dur labeur et à sa persévérance. Tout comme ma mère, je savais que je voulais, moi aussi, avoir beaucoup d'enfants. Lorsque je suis devenue mère, j'ai décidé que je resterais à la maison — un privilège que ma mère n'avait pas eu — et que je me consacrerais entièrement à l'éducation de mes enfants.
Être mère au foyer est un privilège et un honneur. L'un des facteurs décisifs, c'était que je voulais contrôler et protéger l'environnement dans lequel mes enfants grandiraient. Je voulais leur offrir un environnement rempli d'amour afin qu'ils puissent devenir des individus responsables et des membres actifs de la communauté. Je voulais m'assurer d'enseigner à mes enfants à devenir des adultes responsables dans la société. Dans les moments difficiles, je me disais que mes enfants ne seraient petits que pour une infime partie de leur vie. J'ai concentré toute mon énergie sur mes responsabilités parentales pour préparer mes enfants à la vie adulte. Je me suis donc absentée du marché du travail pendant une période prolongée pour élever mes enfants. Il y a aussi un verset de la Bible que j'ai toujours gardé en tête. C'est tiré du Livre des proverbes, chapitre 22, verset 6: « Instruis l'enfant selon la voie qu'il doit suivre; Et quand il sera vieux, il ne s'en détournera pas. »
On dit que la famille est la pierre angulaire de notre société. J'en suis profondément convaincue. C'est pourquoi j'ai décidé de m'absenter longuement du marché du travail. J'ai toujours pensé que je retournerais au travail une fois que mes enfants seraient grands et qu'ils auraient terminé leurs études secondaires.
Hélas, je suis devenue mère monoparentale — contre mon gré — lorsque mon plus jeune n'avait que quatre ans. Deux ans plus tard, j'ai décidé que mes enfants — Joanne, Candace et Adam — avaient besoin d'une mère épanouie à tous points de vue. J'ai donc pris la décision de quitter notre communauté. Il me fallait trouver un environnement qui m'aiderait à régler les problèmes dans ma vie et à devenir une meilleure mère pour mes enfants. J'ai ensuite décidé de faire des études afin de pouvoir appuyer mes enfants financièrement. La décision de déraciner mes enfants de la seule communauté qu'ils avaient connue jusque-là a été extrêmement difficile.
Pendant près de 20 ans, je m'étais concentrée sur l'éducation de mes enfants et je m'étais efforcée de créer un environnement stable à la maison, sauf quand j'ai dû travailler parce que mon mari à l'époque était sans emploi. Dans la dernière partie de cette période de 20 ans, j'ai décidé de retourner sur les bancs d'école et, en fait, j'ai obtenu mon diplôme du Portage College en même temps que ma fille aînée.
Malheureusement, tout au long de la période où j'étais mère au foyer, je n'avais fait aucune cotisation à un régime de retraite. Je n'avais cotisé qu'au Régime de pensions du Canada avant d'avoir mes enfants et, de nouveau, lorsque je suis retournée sur le marché du travail après avoir terminé mes études en 2006. Il n'y a aucune prestation de retraite pour les femmes — et, de nos jours, certains hommes — qui décident de rester à la maison pour élever leurs enfants.
Maintenant que ma carrière professionnelle tire à sa fin et que je m'apprête à prendre ma retraite, je me rends compte que ma pension ne suffira pas à couvrir tous mes frais de subsistance. Le choix d'être mères au foyer semble nous avoir pénalisées, moi et d'autres femmes. Pourtant, nous avons fait la chose la plus importante dans une société: prendre soin de nos enfants et contribuer ainsi à la société.
Je crois qu'aujourd'hui, des milliers de mères, qui sont maintenant à la retraite, vivent dans la pauvreté en raison de leur décision de se consacrer à l'éducation de leurs enfants et de ne pas participer au marché du travail. Beaucoup d'entre elles n'ont pour seule pension que les maigres cotisations versées au Régime de pensions du Canada à leur retour sur le marché du travail, une fois que leurs enfants sont devenus indépendants ou membres de la population active. Je connais personnellement certaines de ces femmes.
L'une de mes amies me passe par la tête. Elle vit dans les Territoires-du-Nord-Ouest où le coût de la vie est élevé par rapport à d'autres régions du pays. Je suis certaine qu'il y a de nombreux récits d'anciennes mamans au foyer qui sont aujourd'hui à la retraite et qui vivent maintenant dans la pauvreté.
J'aimerais recommander fortement que le gouvernement envisage de financer adéquatement un régime de pensions pour les personnes comme moi qui choisissent de demeurer à la maison pendant de nombreuses années, afin d'élever des adultes responsables qui bénéficieront à la société dans laquelle nous vivons. Si les mamans au foyer pouvaient avoir accès à un régime de retraite auquel elles pourraient apporter une faible contribution, une contribution que le gouvernement doublerait, ce serait l'idéal.
En conclusion, je tiens à vous remercier. Je considère comme un honneur le fait d'avoir pu vous relater l'histoire de ma vie dans l'espoir que cela contribue d'une façon ou d'une autre à l'avancement de toutes les femmes de notre pays et à la reconnaissance de leur valeur.
Meegwetch. Merci. Hiy hiy.
Merci beaucoup, madame Noskey.
Nous allons maintenant amorcer notre série d'interventions de sept minutes. Notre première intervenante est Salma Zahid.
Madame Zahid, vous avez la parole.
Merci, madame la présidente.
Je remercie nos deux témoins de nous avoir raconté l'histoire de leur vie.
Lorsque j'ai commencé ma vie et que j'ai eu mon premier fils...
Je dois vous interrompre, car la sonnerie retentit maintenant.
Le comité doit prendre une décision. Nous avons deux personnes à interroger en ce moment. Aimeriez-vous siéger pendant encore 15 minutes?
Une voix: Oui.
La présidente: Cela nous donnerait 15 minutes de plus.
Pour pouvoir entendre tous les intervenants, j'aimerais réduire la durée de chaque intervention à cinq minutes. Ainsi, tout le monde aura le temps d'intervenir.
Je vous remercie d'avoir raconté au Comité l'histoire de vos vies, alors que nous, les membres du Comité, menons notre étude sur les défis auxquels les femmes aînées font face.
Lorsque mes enfants étaient jeunes, j'ai également décidé de rester à la maison pendant cinq années. J'ai intégré la population active du Canada lorsque mon fils aîné était âgé de cinq ans. J'ai donc traversé une période pendant laquelle nous étions forcés de dépendre d'un seul salaire. À cette époque, c'est-à-dire en 1999, nous étions de nouveaux arrivants au Canada. J'ai donc vécu ces difficultés.
J'adresse ma première question à Mme Young.
Quelles mesures recommandez-vous que les femmes, qui décident de rester à la maison pour élever leurs enfants, prennent pour assurer leur sécurité financière durant leur vieillesse? Avez-vous des recommandations particulières à nous faire, auxquelles nous devrions donner suite, selon vous?
D'abord et avant tout, il est crucial d'avoir des connaissances financières et de participer aux finances familiales. Je pense que bon nombre d'entre nous savent que, même à l'époque de nos parents, c'était le mari qui gérait toutes les factures et toutes les questions financières. Je crois que, de nos jours, un plus grand nombre de jeunes femmes agissent de façon intelligente à cet égard. En même temps, si elles ne travaillent pas et n'ont pas de salaire, elles dépendent des finances de quelqu'un d'autre.
Comme cela a été mentionné plus tôt et comme Mme Mathyssen l'a soulevé au cours d'une conversation antérieure — j'étais présente, et j'écoutais les délibérations —, il est vraiment impératif, à mon avis, qu'il existe un moyen pour les mamans au foyer de contribuer davantage à un régime de retraite, d'une façon ou d'une autre, ou à une prestation d'un genre ou d'un autre, de sorte que, si quelque chose se produit au cours de leur vie et qu'elles deviennent l'unique pourvoyeuse de leurs enfants et de leur famille, elles seront en mesure de cotiser à un régime de retraite qui assurera leur subsistance plus tard. Ainsi, 61 % des femmes, dans une seule province du Canada, ne vivraient pas en deçà de 20 % du seuil de pauvreté.
Des données indiquent que le revenu médian des femmes âgées s'élevait à 21 900 $ en 2013, comparativement à 32 300 $ pour les hommes âgés de cette région. Il y a donc un énorme écart.
Il y a effectivement un énorme écart. Si nous trouvions un moyen d'améliorer la situation des jeunes femmes à compter d'aujourd'hui, il n'y aurait pas de populations vieillissantes vivant sous ces seuils de pauvreté.
Je conviens avec Mme Young qu'il faut faire quelque chose.
Je ne suis pas devenue une mère monoparentale par choix. Lorsque mon enfant était jeune, j'ai traversé une période difficile. En fait, la benjamine, Candace, soutient qu'il en coûte environ 100 000 $ par année pour élever un enfant. Elle dit à son frère et sa sœur: « Maman pourrait posséder 300 000 $ de plus si elle ne nous avait pas donné naissance, mais elle a consacré sa vie à nous élever ». Il devrait y avoir une forme de dédommagement pour ces femmes.
Oui, nous avons choisi d'être mères et de rester à la maison afin de fournir à notre société des adultes responsables.
Merci.
J'adresse ma prochaine question à Mme Young. Au cours de votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné que les coûts à assumer pour élever un enfant s'élèvent à environ 17 236 $. Que pensez-vous de l'Allocation canadienne pour enfants, et comment aide-t-elle les familles à assumer ce qu'il en coûte pour élever un enfant?
L'allocation aide; cela ne fait aucun doute. L'ajout d'un plus grand nombre de programmes ou d'aides financières de ce genre est une merveilleuse initiative, mais cela ne suffit pas. Nous parlons de femmes âgées en ce moment. Alors, je suppose que j'aurais dû amener ma mère de 95 ans qui a élevé 12 enfants et qui est restée à la maison pendant tout ce temps. Elle a travaillé à titre d'enseignante pendant les quatre premières années de sa vie d'adulte. Ensuite, elle a commencé à avoir des enfants et en a élevé 12. Elle est maintenant âgée de 95 ans, et elle se porte bien, mais tout ce sur quoi elle peut compter maintenant, mis à part sa famille qui lui apporte un grand soutien, ce sont les petites miettes qu'elle tire du RPC, ainsi que les prestations du plan des vétérans de mon père. C'est tout. Il est triste de dire que nous en sommes arrivés là.
Merci beaucoup.
Nous allons maintenant céder la parole à Kellie Leitch, qui dispose de cinq minutes.
Je vous remercie toutes les deux d'avoir pris le temps de nous faire un exposé. Nous vous en sommes grandement reconnaissants.
Je suis originaire de Fort McMurray. Par conséquent, je peux comprendre la situation des gens du Nord de l'Alberta, de Fort McKay, de Fort Chip et de toute cette région.
Madame Noskey, j'aimerais donner suite aux observations que vous avez formulées et peut-être obtenir celles de Mme Young à ce sujet. Je parle de votre idée d'établir un régime de retraite. Au cours d'une séance antérieure, une dame nous a présenté l'idée de créer un instrument semblable à un REEE. En ce moment, il est possible de contribuer à l'éducation de votre enfant et de retirer ces fonds au cours des années ultérieures. Toutefois, cette dame recommandait d'offrir un régime semblable au REEI, qui permettrait à la famille d'une maman au foyer et au gouvernement d'apporter chaque année une contribution au régime dont les fonds seraient épargnés et s'accumuleraient jusqu'à ce que la femme soit âgée de 65 ans. Elle serait alors en mesure d'y avoir accès bien longtemps après avoir élevé ses enfants, qu'elle ait intégré la population active ou non.
Je veux vous demander ce que vous pensez de cette idée. De plus, si vous avez toutes les deux des suggestions à faire à cet égard, j'aimerais vous demander de nous les présenter. Il est merveilleux d'avoir ces conversations mais, si vous avez des idées particulières à nous présenter, madame Noskey, il serait génial d'obtenir ces renseignements particuliers par écrit, afin qu'ils fassent partie intégrante de notre rapport. Je pense que cela nous serait très utile.
Je tiens simplement à vous demander de formuler des commentaires à propos de ce type particulier de régime de retraite ou, si vous avez d'autres idées, veuillez nous les communiquer.
Je pense que c'est une excellente idée. Vous avez répondu à votre propre question en ce sens qu'en ayant accès à un régime auquel elles peuvent contribuer au fil des ans et dont elles tireraient parti... La seule partie que je remets en question est l'âge auquel elles peuvent retirer des fonds, un âge qui est fixé à 65 ans. Oui, habituellement, nous attendons d'atteindre 65 ans, mais je connais des femmes, avec qui j'ai eu affaire dans le cadre de mon rôle actuel de députée provinciale, qui ont travaillé, qui ont élevé des enfants et qui sont maintenant âgées de 55 ou 57 ans, mais qui ont été forcées d'arrêter de travailler en raison de problèmes de santé. Maintenant, elles n'ont plus de revenus ni de conjoint, et elles doivent attendre d'avoir atteint 65 ans.
Elles n'ont plus rien. Elles sont forcées d'attendre, et il n'y a rien que je puisse faire ou que nous puissions faire pour faire avancer ce dossier. Il devrait être possible de prendre en considération ces genres de situations...
Oui, si nous sommes âgées de 55 ans, que nous ne pouvons pas travailler pour une raison quelconque, que nous n'avons aucun revenu et que nous attendons toutes d'avoir 65 ans, nous avons un problème.
J'aimerais voir un genre de financement de retraite pour les mères qui choisissent de rester à la maison. Je ne saurais trop insister sur l'importance d'élever nos enfants dans un environnement qui les aidera à devenir des adultes responsables.
Je ne sais pas à quoi ce régime de retraite ressemblerait. Je dois y réfléchir et obtenir les commentaires d'autres femmes. J'ai mentionné à mes amies que je témoignerais devant un comité, et je leur ai indiqué quel serait mon centre d'intérêt. J'aimerais donc leur parler de nouveau et déterminer la teneur de leurs réflexions. Je pense que plus il y aura de femmes que je parviens à convaincre de me dire ce qu'elles souhaitent voir... Je crois que nous pouvons faire avancer ce dossier.
Nous allons maintenant céder la parole à Mme Mathyssen.
Madame Mathyssen, vous disposez de cinq minutes.
Merci, madame la présidente. Je tiens également à remercier Mmes Young et Noskey.
Je pense que les questions que vous avez abordées sont très fréquemment négligées.
Madame Noskey, si vous pouviez en fait consulter vos pairs afin de réfléchir à la possibilité de prévoir une disposition d'exclusion au RPC ainsi qu'à la nécessité d'améliorer le Supplément de revenu garanti, je vous en serais vraiment reconnaissante. Il y a en effet beaucoup trop de personnes âgées qui vivent dans la pauvreté au Canada.
Madame Young, en ce qui concerne la question des femmes d'agriculteurs, selon mon expérience, ces femmes ont apporté une contribution pendant toute leur vie — elles ont développé l'exploitation agricole et ont rendu possible sa réussite — puis, lorsque vient le temps de séparer les biens, après la rupture d'un mariage, elles sont entièrement laissées pour compte. Il faut que les femmes soient traitées équitablement. Je pense que nous devons examiner le système judiciaire. Les tribunaux traitent-ils les femmes équitablement après la rupture d'un mariage?
En particulier en ce qui concerne la capacité des femmes à subvenir elles-mêmes à leurs propres besoins... Je suppose, madame Noskey, que cela vous concerne. Vous avez dit que vous aviez été forcée de quitter votre collectivité. Bien entendu, il y a le problème de l'isolement. Vous avez été obligée de vous débrouiller par vous-même. En ce qui concerne la capacité de subvenir à ses propres besoins, il y a la question du logement. Du point de vue de la disponibilité et du coût des logements — en ce moment, le coût des logements est incroyablement élevé, et leur disponibilité est faible —, je me demande s'il devrait y avoir une politique en matière de logement qui vise à garantir que cet enjeu ne rend pas les femmes encore plus vulnérables et ne contribue pas à leur pauvreté.
Qu'est-ce que vous aimeriez observer en ce qui concerne ce besoin fondamental?
Lorsque j'ai quitté ma collectivité, j'ai compté sur mes amis pour m'apporter un soutien. Ils m'ont trouvé un endroit où loger dans une région rurale. Plus loin, le long de l'autoroute, il y avait une église où des femmes — leurs maris étaient des agriculteurs — subvenaient à mes besoins essentiels.
Je vivais à Bonnyville, en Alberta. J'étais en mesure de présenter une demande d'habitation à loyer modéré, et j'ai passé de 2000 à... Depuis, je vis dans de grandes villes ou de petites villes. Les gens me demandent pourquoi je n'ai pas acheté une habitation. Je leur dis que c'est parce que mon argent est destiné à élever mes enfants.
Malheureusement, leur père a été incarcéré en 2002. Je n'ai donc pas pu me reposer sur qui que ce soit, sauf moi-même. Heureusement que j'avais une famille! Mon frère Raymond m'a fourni les fonds nécessaires lorsque mon fils souhaitait participer à des activités parascolaires, comme la gymnastique et le baseball. J'ai eu beaucoup de difficultés à élever mes enfants.
Je suis retournée à l'école; j'allais à l'école avec mes enfants. C'était une période très difficile, mais nous nous en sommes sortis. Ma fille aînée travaille pour notre nation à titre de conseillère en soins. Mon cadet et fils unique travaille au ministère des Finances. Il a étudié pendant trois ans à l'Université de la Colombie-Britannique. Ma benjamine, Candace, a fréquenté l'Université de Calgary et l'Université Mount Royal, qui se trouve aussi à Calgary.
Sans l'aide de ces personnes, je ne serais pas où j'en suis aujourd'hui en ce qui concerne mes enfants. Personnellement, j'examine mon avenir, et je me demande ce que je vais faire maintenant. Il y a environ un mois, j'ai été démise de mes fonctions et, à ce stade, où pourrais-je trouver du travail en tant que femme autochtone? Je ne peux pas retourner dans une petite collectivité au sein d'une réserve, car les perspectives d'emploi sont limitées dans ces endroits. Il n'y a pas beaucoup d'emplois, alors mon avenir est peu prometteur. Je suis certaine qu'il y a d'autres mamans au foyer qui ont traversé le même genre d'épreuves que moi. J'ai du mal à réfléchir à mon avenir et à un endroit où aller.
Je n'ai jamais acheté une maison, parce que je préférais que quelqu'un d'autre se préoccupe du système de chauffage, s'il tombait en panne, des réparations à effectuer ou de tous les problèmes de ce genre. Je voulais que l'argent que je gagnais profite à mes enfants.
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