Madame la présidente et mesdames et messieurs,
[Français]
mes commentaires seront en anglais.
[Traduction]
Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole sur le sujet important de l'emploi des femmes au sein des Forces armées canadiennes. À titre d'information, mon expérience relativement aux changements touchant l'emploi des femmes aux FAC a commencé en 1978. Depuis, j'effectue des recherches, je contribue à l'élaboration de politiques, je surveille l'évolution de la situation et je donne des enseignements sur le genre dans l'armée au Collège des Forces armées canadiennes.
À mon avis, l'étude actuelle est guidée par les objectifs de la Commission royale d'enquête originale pour assurer la pleine participation des femmes dans tous les aspects de la société canadienne. Dans ce cas-ci, c'est pour établir les conditions qui permettent aux femmes d'apporter une contribution optimale à la défense et la sécurité des Canadiens.
Je vais d'abord annoncer les changements apportés au fil du temps aux FAC afin de situer le contexte actuel. Devant les six recommandations destinées aux FAC dans le rapport de la Commission royale d'enquête de 1970, les années 1970 et 1980 ont été une période de refus et de résistance par de nombreux militaires, mais pas tous. Un certain nombre d'hommes ne pouvaient pas imaginer que des femmes puissent être en mesure de s'acquitter de rôles opérationnels de base. Le discours généralisé accentuait les différences entre les sexes. Tous les hommes pouvaient sauter d'un seul bond par-dessus un grand immeuble; aucune femme ne pouvait grimper en haut d'un escalier.
Bien que cet avis ne soit plus très répandu, l'accent mis sur la suprématie masculine continue de subsister dans certaines parties des FAC. Au cours des années 1990 et au début des années 2000, on a assisté à un changement vers la tolérance réticente et l'acceptation éventuelle, mais les femmes étaient constamment mises à procès. On pouvait fermer les yeux sur le mauvais rendement d'un homme ou l'excuser, tandis que celui d'une femme pouvait mener à un congédiement. Nous savions qu'elle ne pouvait pas être à la hauteur.
Dans la foulée des opérations intensives menées en Afghanistan, dans la Corne de l'Afrique et ailleurs, l'évolution depuis 2005 a été considérée par de nombreuses personnes comme l'acceptation complète. Les femmes sont allées là-bas, ont fait le travail et ont gagné le t-shirt et les médailles. Toutefois, ce fait s'est accompagné d'un nouveau discours qui remplaçait la construction des différences entre les sexes par la croyance selon laquelle les FAC ne sont pas sexistes. Une phrase courante qu'on entend est: « je ne vois pas de sexe, je n'entends pas d'accents, je ne vois pas de couleur. Je ne vois que des soldats, et les règles du jeu sont égales pour tous. » Les FAC ne sont pas non sexistes, et les règles du jeu ne sont pas égales.
Les femmes ont démontré très adroitement qu'elles peuvent assumer des rôles militaires de manières qui les amènent à gagner le respect de leurs supérieurs, pairs et subalternes masculins, mais la plupart le font en adoptant des comportements fortement masculins et, pour certaines, des conceptions du monde, des attitudes et des valeurs masculines. Ce n'est pas surprenant, puisque l'armée participe à des processus très intentionnels pour convertir les civils en soldats, marins, aviateurs, chefs et commandants. La difficulté, c'est que ce qui est produit est fortement masculinisé. Les FAC commencent tout juste à se demander à quel coût.
De quelles façons interdit-on aux femmes, aux hommes et à d'autres d'apporter une contribution optimale lorsqu'on les amène à penser et à agir d'une façon particulière?
Je vais maintenant présenter deux premiers commentaires concernant l'opération Honour et le harcèlement des femmes. D'abord, je ne peux pas voir d'autres organisations au Canada ou d'armée à l'échelle internationale qui en fait davantage que les FAC. Le problème, c'est que cela n'est toujours pas suffisant. Ensuite, c'est compliqué. Un certain nombre de raisons expliquent pourquoi les femmes, certains hommes, les personnes LGB et les personnes non binaires sont victimes de comportements non désirés et non professionnels. Les efforts dont vous ont fait part les chefs des FAC sont toutes des mesures nécessaires, mais les FAC doivent encore vraiment s'attaquer à deux facteurs principaux.
Premièrement, l'armée est une profession où l'on porte beaucoup de jugements. Les personnes se jugent constamment l'une l'autre et pour de bonnes raisons. Elles veulent savoir que ceux qui les entourent les protégeront en cas de coup dur, mais cela devient problématique quand on invente des excuses pour des hommes se mettent dans le pétrin, mais, comme vous l'avez entendu, on ne le fait pas pour les femmes ou d'autres personnes non conformes.
Deuxièmement, dans le cadre de ce processus où l'on juge constamment les autres, l'armée a créé de très claires hiérarchies sociales qui indiquent qui est le plus important et qui l'est le moins. Les FAC ne sont pas les seuls dans ce cas. Le choix des places dans les salles des comités répond au même objectif. Le principal problème, c'est que cet ordre social est établi et surveillé par l'utilisation du pouvoir social. Les recherches ont clairement démontré que de nombreux cas de harcèlement, mais pas tous, sont une question de pouvoir. Le fait d'étiqueter des gestes comme une inconduite sexuelle est trompeur.
Si je vous frappe avec une pelle, vous n'appelleriez pas ça du jardinage.
La difficulté pour les militaires des FAC consiste à trouver le juste équilibre où tout le monde garde confiance dans la capacité de ses pairs — tout le monde doit se montrer à la hauteur — et où ceux à qui l'on donne du pouvoir — certains ont tout de même besoin de pouvoir — savent comment l'utiliser de façon appropriée, tout en éliminant le risque que des évaluations qui portent des jugements et un pouvoir construit soient utilisés pour marginaliser les femmes ou d'autres personnes qui ne cadrent pas avec la norme hypermasculine.
Un certain nombre de chercheurs ont donné à penser que la solution consiste à modifier cette norme et à permettre d'autres moyens d'être considéré comme un militaire efficace. Cela supposerait notamment de faire passer l'accent actuel mis sur la conformité normative à l'exercice d'un leadership inclusif.
Enfin, je vais revenir aux commentaires du général Lawson, lorsque Mme Deschamps a surpris des officiers supérieurs avec ses conclusions. Il a affirmé que les FAC avaient pris des mesures et que la situation s'était améliorée depuis les articles parus dans Maclean's en 1994. Il avait raison, mais il est passé à côté d'un point essentiel. Les attentes des femmes quant à ce qui était acceptable et inacceptable avaient changé de manière radicale. Nous l'avons vu de façon plus généralisée avec le mouvement #MoiAussi. Les attentes sociales continueront d'évoluer et pourraient déboucher sur une autre rupture brutale, où les pratiques tolérées deviennent soudainement inacceptables.
Cela ne se limite pas juste aux femmes. Une autre expression courante parmi les jeunes Canadiens ces jours-ci, c'est « vérifie ton privilège ». Une vieille expression en vogue chez les officiers militaires, c'est « le grade s'accompagne de certains privilèges ». C'est un choc culturel.
Je conclurais que les FAC continueront de trouver des moyens de créer les caractéristiques individuelles et les caractéristiques de groupe nécessaires pour les opérations, tout en répondant à l'évolution continue quant à la façon dont les gens s'attendent à être traités et à pouvoir contribuer à la réussite de la mission.
J'ai une courte liste de recommandations que je déposerai à l'intention du Comité.
Merci.
:
Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs.
Merci, monsieur Okros.
Merci de m'avoir invitée dans le cadre de votre étude sur la situation des femmes au ministère de la Défense nationale.
Je suis ici au nom de mon organisation, mais aussi en tant que membre du comité directeur du Réseau Les femmes, la paix et la sécurité — Canada.
Il y a quelques semaines, j'ai regardé un documentaire sur la chaîne TVO qui a été diffusé pour la première fois en septembre 2018 et portait sur une partie peu connue de notre histoire canadienne, une campagne menée contre la communauté canadienne LGBTQ+ dans une tentative pour retirer d'une charge publique des membres de cette communauté. Des hommes et des femmes que l'on croyait être des homosexuels travaillant dans la fonction publique canadienne, y compris dans les Forces canadiennes et à la GRC, ont été mis sous surveillance et interrogés. On a envahi au plus haut point leur vie privée, leur carrière a été ruinée, et leur vie, détruite.
Outre l'injustice incroyable qui a été commise à l'endroit de Canadiens au Canada, il y avait une autre chose que j'ai trouvée très puissante dans ce documentaire. Toutes les personnes touchées racontaient la période qu'ils avaient passée au sein des Forces armées canadiennes ou de la GRC avec grande fierté, disant: « J'étais un excellent soldat » ou « j'étais un excellent agent de police ». Ils s'étaient tous engagés volontairement dans ce type de carrière, souhaitant changer les choses et servir leur pays. Ils étaient tous au courant des sacrifices que cela exigerait, et ils étaient prêts physiquement et mentalement. Ce à quoi ils n'étaient pas prêts et à quoi ils ne s'étaient pas engagés, c'était la culture omniprésente de discrimination et de harcèlement à laquelle il faisaient face, y compris l'intimidation et la violence, ce qui les a finalement obligés à s'en aller.
Même si les lois ont changé et que des progrès importants ont été réalisés depuis ce moment, comme M. Okros l'a dit, soyons très clairs: le but n'est pas encore atteint. Une grande partie de nos invités de la semaine dernière ont démontré cette réalité très clairement, y compris Sandra Perron, Laura Nash et Julie Lalonde. Nous obligeons les mêmes gens que nous disons vouloir attirer, du moins sur papier, à partir.
J'aimerais offrir aujourd'hui quelques mesures concrètes qui permettront de régler le problème, à mon avis.
D'abord, je crois que nous devons repenser le système d'éducation et de formation dans son ensemble. L'un des objectifs stratégiques des Forces armées canadiennes en matière de diversité consiste à « inculquer une culture de la diversité », ce qui exige de « développer une culture organisationnelle militaire plus inclusive et respectueuse démontrant ainsi à la société canadienne que les Forces armées canadiennes adhèrent aux valeurs de la diversité ». Le changement de culture ne va pas se produire avec une formation en ligne de une heure sur l'ACS+ ou une formation de une heure sur le harcèlement sexuel. Le changement de culture va se produire quand on s'assurera que les principes d'égalité, de diversité et les droits de la personne sont au centre même de l'éducation qu'un soldat reçoit. Cela doit être intégré dans tout ce qu'il fait et renforcé à chaque échelon, en plus d'être complété par des politiques strictes de tolérance zéro pour de tels comportements et un processus de plaintes qui font l'objet d'enquêtes appropriées.
Ensuite, je crois que nous devons tenir une conversation honnête sur le rôle de l'armée au 21e siècle, à commencer par les FAC. Comme on l'a mentionné, des progrès importants ont été réalisés au sein du MDN et des FAC au chapitre de la situation des femmes; toutefois, nous savons que les femmes et les hommes vivent leur carrière militaire de façon très différente, comme nous l'avons entendu au cours des dernières semaines. Partant, il existe un besoin très réel de tenir une conversation honnête et franche au sujet de ce à quoi ressemble la vie dans l'armée selon ces points de vue différents. Nous devons entendre ces voix, puis analyser les conclusions et être prêts à y répondre de manière utile. Il s'agit de s'engager à examiner les structures mêmes dans lesquelles nous plaçons les femmes et d'autres groupes diversifiés. Il s'agit de changer la façon dont on a toujours fait les choses.
Cette conversation exige un leadership efficace, ce qui est mon troisième point. Un leadership efficace est celui qui stimule le changement de l'intérieur tout en habilitant les autres à croire en ce changement.
À mon avis, c'est là où nous avons échoué. Le changement transformationnel vers l'égalité entre les sexes et l'inclusivité oblige tout le monde dans l'organisation à croire en ce changement, depuis les hauts responsables jusqu'aux cadets en passant par les étudiants du CMR. C'est loin d'être facile, mais dans les institutions hiérarchisées, des déclarations audacieuses suivies de mesures audacieuses devraient beaucoup contribuer à améliorer les choses. En outre, il ne peut y avoir une seule personne: plutôt, de nombreuses personnes dans l'ensemble de l'organisation doivent devenir des champions, se lever et remettre en question la façon habituelle de faire les choses et être habilitées à le faire.
Pour conclure, je crois fermement qu'il existe une énorme occasion pour les Forces canadiennes de changer sa culture et d'être un lieu vraiment inclusif pour tous.
:
Je suis tout à fait d'accord avec vous, et oui, je dirais que des aspects de la culture devraient être changés.
Comme j'ai essayé de le mentionner dans mes commentaires, le problème, c'est que l'armée se donne vraiment beaucoup de mal à créer le soldat. Quiconque rejoint l'armée apprend trois éléments clés. Le premier, c'est la conformité normative; en cas de doute, faites ce que tout le monde fait. Le deuxième, c'est l'obéissance à l'autorité; faites ce que le patron vous dit de faire. Le troisième, c'est la loyauté envers le groupe — intégrez-vous aux groupes. Ces principes exercent des pressions énormes sur les gens pour qu'ils trouvent leur place et se conforment.
De nombreuses personnes — cela fait partie de mon travail auprès des groupes qui passent par le Collège des Forces canadiennes — qui s'intègrent dans... Lorsqu'elles se sont enrôlées, elles n'ont pas eu besoin de changer beaucoup qui elles étaient. Cela les représentait. Il y en a d'autres pour qui ce n'est pas le cas.
L'armée continue d'essayer de trouver des façons de les aider à être comme tout le monde, plutôt que de changer la culture et de dire: « Vous pouvez continuer d'être qui vous êtes. Vous pouvez être un militaire d'une façon différente que ce que nous faisons actuellement ».
C'est, pour moi, le problème central, et je ne crois pas que quiconque l'ait encore réglé.
:
Je vais commencer par quelques recommandations.
Un des aspects essentiels dans l'opération Honour est le devoir de signaler. Le hic avec ce devoir, c'est qu'il rend les incidents immédiatement très officiels. Certaines personnes ayant fait les frais d'un comportement stupide ne souhaitent pas qu'il soit signalé officiellement.
Ma recommandation, c'est qu'on remplace ce devoir par un « devoir de réagir ». Si on demandait ceci à une personne: « Vous étiez là, vous avez été témoin, vous avez vu quelque chose qui n'était pas professionnel. Comment avez-vous réagi? » Ce pourrait être simplement en apportant du soutien ou en parlant avec la personne. Ce serait une des solutions que je proposerais.
Je suggérerais aussi que l'armée examine très attentivement les événements sociaux qui mettent l'accent sur la consommation d'alcool. Nous savons que c'est une partie du problème et qu'elle y contribue.
Je dirais aussi qu'il serait avantageux de fournir aux victimes de l'incident, particulièrement les victimes de traumatismes militaires sexuels, du counseling professionnel.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Merci beaucoup d'être ici. Nous sommes vraiment reconnaissants des conseils et des points de vue que vous apportez.
Monsieur Okros, j'aimerais vous remercier tout particulièrement de votre observation concernant la hiérarchie au sein d'un comité et la façon dont le pouvoir est utilisé.
Je suis sûre que la plupart d'entre nous sont déjà allés dans un mess, et mon Dieu, vous devez connaître le protocole, sinon vous allez avoir des problèmes. Vous pourriez ne pas manger si vous ne comprenez pas la hiérarchie là-bas.
J'ai été très intéressée par le commentaire concernant l'éducation. Vous avez mentionné le CMR, et cela m'a rappelé une situation avec des cadets dans ma ville d'origine. Pour une raison ou pour une autre, pour une question d'amitié, parce qu'une personne avait accès à un véhicule, un prédateur d'enfants a été accepté comme instructeur. Le réserviste qui a tenté d'attirer l'attention sur ce fait s'est rendu jusqu'à la chaîne de commandement. Il a été renvoyé, et le prédateur est resté. Il me semble que cette éducation dont vous avez parlé doit effectivement commencer très tôt. Je me demande si vous pourriez vous prononcer sur ce sujet.
:
Je veux dire deux ou trois choses, dont une concerne particulièrement l'ordre de gouvernement. On dépend vraiment de l'image de l'armée et de la façon dont les Forces armées canadiennes sont censées contribuer à la défense et à la sécurité. À un certain moment, il était très clair que l'armée participait à des missions de combat majeures. À ce moment-là, on voyait des types d'annonces qui attiraient très clairement certains Canadiens qui souhaitaient s'enrôler, et en dissuadaient d'autres, particulièrement les femmes et des membres de plusieurs communautés minoritaires.
Comme Mme St-Pierre l'a dit, si les Forces armées canadiennes apportent des contributions positives au monde, en essayant de définir les conditions de la paix et de la sécurité, il est probable que beaucoup plus de femmes souhaiteront se joindre aux FAC. Voilà une chose, du point de vue gouvernemental.
Ensuite, toujours du point de vue du gouvernement, la Loi sur l'équité en matière d'emploi conseille et encourage l'utilisation de mesures spéciales, encore une fois, comme nous le savons, afin de tenir compte de la marginalisation historique des quatre groupes désignés. Tant les Forces armées canadiennes que la GRC ont été très réticentes à utiliser des mesures spéciales. Les deux organisations ont tendance à s'accrocher au principe du mérite, et à partir de cela, ma recommandation interne, c'est que l'armée continue de classer les gens selon un ordre donné. Si 1 000 personnes veulent se joindre au Collège militaire royal, on les classe en ordre de 1 à 1 000. En fait, ce n'est pas vrai; les mesures ne sont pas aussi précises. On ferait mieux de les classer selon des groupes de personnes remarquables, acceptables et faibles, et si vous faisiez de vastes regroupements de personnes aux compétences égales, le principe consisterait à sélectionner les premiers parmi ceux qui ont des compétences égales. Vous sélectionneriez donc des personnes en fonction de l'identité démographique.
Cela s'applique non seulement au moment de l'enrôlement; mais aussi au moment des promotions. Cela s'applique à la nomination de gens à des postes de commandement. En ce moment, il y a une foule de domaines dans lesquels les femmes, en particulier, peuvent souvent se retrouver les prochaines sur la liste. Elles n'ont juste pas été assez concurrentielles pour figurer en haut de la liste, et je crois que le principe consistant à sélectionner les premiers parmi ceux qui ont des compétences égales aiderait à remettre en question cette hypothèse selon laquelle c'est non discriminatoire et que les règles du jeu sont égales. Des mesures peuvent être prises.
:
Comme vous l'avez entendu, le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle mise sur des employés chargés de fournir des services d'intervention initiale et de soutien aux personnes. D'après ce que je comprends, les travaux sont en cours pour passer de ce qui est, en fait, un service fondé sur un numéro 1-800, à une présence dans les grandes bases afin de pouvoir fournir un soutien en personne, ce que, j'en suis sûr, la plupart des gens reconnaîtraient comme étant important.
Par conséquent, je dirais que, actuellement, il y a un certain niveau de soutien. Je crois qu'on peut en faire plus, y compris en comprenant la situation dans laquelle les gens se retrouvent.
Encore une fois, nous savons de façon générale — particulièrement lorsque les femmes sont victimes d'agression sexuelle — que les victimes hésitent à en parler. Il y a, de façon générale, un certain nombre de raisons sociales qui expliquent ce fait. Nous savons qu'il y a des préoccupations liées à la façon dont les pairs, les membres de la famille et d'autres personnes réagiront. Par conséquent, je crois qu'il faut examiner le système de façon plus générale, et c'est la raison pour laquelle j'ai dit entre autres qu'il fallait fournir du counseling psychologique aux personnes lorsqu'elles se retrouvent pour la première fois dans une telle situation, pas au moment des enquêtes officielles et des audiences, mais au début, tout simplement pour les aider à composer avec tout cela. C'est un traumatisme, et je ne suis pas sûr que nous fournissons actuellement le bon soutien aux premières étapes de ce type de traumatisme.
:
Reprenons la 146
e réunion du Comité permanent de la condition féminine.
Durant la deuxième heure, je suis heureuse de souhaiter la bienvenue à la brigadière générale Virginia Tattersall, commandante adjointe, Génération du personnel militaire, à la brigadière générale Lise Bourgon, championne de la Défense, Femmes, paix et sécurité, à Lisa Vandehei, directrice pour l'égalité des sexes, diversité et inclusion, et à Sean Cantelon, chef de la direction, Service de bien-être et moral des Forces canadiennes.
Je vais maintenant céder la parole à la brigadière générale Virginia Tattersal.
Vous avez sept minutes pour présenter votre déclaration préliminaire.
:
Bonjour, madame la présidente et bonjour aux membres du Comité. Merci de m'avoir invitée à venir vous parler aujourd'hui du traitement des femmes au sein du ministère de la Défense nationale. C'est un sujet qui m'interpelle autant personnellement que professionnellement, puisque j'ai passé la plus grande partie de ma vie au sein des Forces armées canadiennes.
Je suis la brigadière générale Virginia Tattersall, et, jusqu'à la semaine dernière, j'étais commandante du Groupe de la Génération du personnel militaire. Ce groupe, que nous militaires appelons aussi GENPERSMIL, est notamment responsable du recrutement, de l'instruction et de l'entraînement des nouveaux membres des Forces armées canadiennes. Je possède donc une certaine expertise dans le domaine et je serai heureuse de répondre à vos questions précises sur le recrutement des femmes.
La diversité, et cela inclut la représentation des femmes, est d'une importance primordiale pour les Forces armées canadiennes. Grâce à la diversité, l'organisation veut non seulement être à l'image de la société, ce qui est important, bien sûr, mais elle veut également puiser dans tout le bassin de talents du Canada et dans la richesse de pensées, de capacités et de compétences qui en découle.
Les femmes servent dans les Forces armées canadiennes depuis plus d'un siècle. La tâche n'a pas toujours été facile, mais nous continuons de nous améliorer en tant qu'institution. Lorsque nous cernons des problèmes, nous tentons de nous y attaquer et de trouver des solutions, même si on ne le fait peut-être pas toujours aussi rapidement qu'on aimerait.
Aujourd'hui, les femmes et les hommes peuvent servir dans le groupe professionnel de leur choix, pour autant qu'ils remplissent les critères d'enrôlement. En outre, je suis fière de dire que nous avons été parmi les premières forces armées au monde à permettre aux femmes de servir dans tous les groupes professionnels.
Pourquoi est-ce que les femmes s'enrôlent dans les forces armées? Pour les mêmes raisons que les hommes. La chance de servir leur pays. La chance d'avoir une profession respectée, stimulante et enrichissante qui offre un bon salaire et des avantages sociaux. Et il y a aussi l'occasion de nouer des amitiés qui dureront vraiment toute une vie.
Comme vous le savez, un de nos objectifs institutionnels est que les femmes forment au moins 25 % des Forces armées canadiennes d'ici 2026. Il s'agit d'un objectif ambitieux, mais nous faisons des progrès. En date de janvier 2019, nous comptions 1 316 femmes de plus dans les Forces armées canadiennes qu'en 2015.
La stratégie de recrutement des FAC en ce qui concerne les femmes vise à favoriser la sensibilisation aux possibilités de carrière. Pour ce faire, les FAC ont recours à la mobilisation et à l'information, à la publicité, aux offres d'emploi, aux partenariats médiatiques, aux médias sociaux et aux efforts individuels des recruteurs. La Défense nationale a réalisé un certain nombre d'initiatives au cours des dernières années dans le but d'accroître la représentation des femmes au sein des forces armées, notamment grâce au programme Les femmes font la force, initiative permettant aux femmes de vivre l'expérience associée au fait de servir dans l'armée, et la campagne de réenrôlement des femmes libérées précédemment.
Nos collèges militaires jouent un rôle en matière de recrutement en accordant la priorité aux candidates qui répondent aux critères d'enrôlement. Ainsi, les femmes représentent 19,7 % de la population des élèves-officiers au cours de la dernière année scolaire. Surtout, grâce à l'opération Honour, nous continuons de renforcer le respect et l'inclusivité et de lutter contre la culture négative qui a assujetti des hommes et des femmes à des comportements sexuels dommageables et inappropriés.
À l'heure actuelle, les femmes sont bien représentées dans huit principaux groupes professionnels et nous persévérons pour accroître la représentation des femmes dans l'ensemble des Forces armées canadiennes.
Madame la présidente, mesdames et messieurs, les Forces armées canadiennes sont une organisation qui reconnaît l'excellence et accueille ceux et celles qui veulent atteindre l'excellence comme objectif personnel. En outre, nous continuons de recruter des femmes et de les encourager à s'enrôler. Je ne suis qu'un exemple de ce qu'une femme peut accomplir en s'enrôlant dans les Forces armées canadiennes. Je peux vous dire que ma carrière m'a offert de nombreuses possibilités et expériences. Si on me permettait de tout recommencer au début, je n'hésiterais pas une seconde.
Je vous remercie de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
:
Madame la présidente, mesdames et messieurs, merci de me donner aujourd'hui l'occasion de comparaître en compagnie de mes collègues. Je vous remercie aussi de l'intérêt que vous portez à ce thème important.
[Français]
Plus de 30 ans ont passé depuis que j'ai amorcé ma carrière en tant qu'élève-officier au Collège militaire royal de Saint-Jean. Depuis lors, à titre d'officier et de pilote d'hélicoptère dans l'Aviation royale canadienne, j'ai été témoin et j'ai fait l'expérience de bon nombre des difficultés particulières auxquelles les femmes doivent faire face dans les Forces armées canadiennes, dont cette étude se fait l'écho.
[Traduction]
Je crois néanmoins à l'importance des FAC et de leur mission ainsi qu'en leur capacité d'apprendre et de s'adapter en tant qu'institution. Ma carrière m'a procuré des possibilités et des expériences que je n'aurais pu trouver nulle part ailleurs, et j'adore encore me rendre au travail jour après jour. Je me suis enrôlée dans l'armée pour obtenir un diplôme, et j'avais ensuite l'intention de démissionner et de regagner le monde civil. J'ai eu tellement de plaisir que j'ai tout simplement oublié de démissionner, et je suis encore ici 32 ans plus tard.
Dans mon rôle actuel de championne du programme Femmes, paix et sécurité de la Défense, mon objectif primordial consiste à nous rendre plus fortes et plus efficaces dans le contexte des opérations militaires. Outre que ce sont des lieux de travail pour des milliers de Canadiennes et de Canadiens, le MDN et les FAC constituent des outils importants dont le Canada se sert pour apporter la sécurité, la stabilité et des secours humanitaires dans les régions fragiles et déchirées par la guerre partout dans le monde.
[Français]
Afin d'accomplir ce travail efficacement dans un contexte opérationnel moderne, les Forces armées canadiennes doivent pouvoir comprendre comment les conflits et d'autres crises touchent différemment les femmes, les hommes, les filles et les garçons, et aussi comment des défis liés au genre peuvent être aggravés par des problèmes liés à la sécurité et aux crises humanitaires, voire y contribuer.
Dans son plan d'action national de 2017 sur les femmes, la paix et la sécurité, le gouvernement reconnaît ce besoin et réclame une approche coordonnée de tous les secteurs de la société canadienne, tant militaires que civils, pour améliorer la sécurité, promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes, et édifier une paix durable.
[Traduction]
Au moment où nous apportons la dernière main au rapport d'étape pour l'exercice 2018-2019, je suis heureuse des efforts que nous avons déployés et du succès remporté à l'égard des quatre piliers suivants: gouvernance et responsabilisation, formation et instruction, recrutement et maintien en poste et intégration dans les opérations.
Puisque je suis sous-chef d'état-major — Opérations au Commandement des opérations interarmées du Canada et championne du programme Femmes, paix et sécurité, l'intégration dans les opérations est l'enjeu auquel je m'intéresse le plus.
Bien sûr, ce volet du programme Femmes, paix et sécurité qui met l'accent sur les opérations est inextricablement lié aux enjeux plus axés sur l'institution qui sont étudiés par le Comité, étant donné que, pour réussir dans nos opérations, nous devons être appuyés par une vigoureuse institution et par le bon groupe de personnes.
[Français]
Afin de progresser vers cet objectif, les Forces armées canadiennes doivent pouvoir dialoguer avec tous les segments d'une population donnée et les comprendre, y compris ceux qui risquent d'avoir du mal à traiter avec une force militaire principalement masculine.
[Traduction]
Voilà pourquoi il est si important d'attirer, d'entraîner et de maintenir en poste un nombre suffisant de femmes dans les FAC, dans des rôles clés et à tous les grades. Non seulement cet effort accroît l'égalité hommes-femmes au sein de nos propres effectifs, ce qui est un but valable et important en soi, mais en plus il contribue à faire des FAC une entité militaire mieux préparée, plus souple et plus efficace.
[Français]
J'ai bien hâte à la discussion de ce matin. C'est avec plaisir que je répondrai à toutes les questions concernant l'importance des questions de genre et des perspectives en ce domaine qui touchent les opérations des Forces armées canadiennes.
:
Merci, madame la présidente, et merci aux membres du Comité.
Les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes travaillent au nom du chef d'état-major de la Défense et sous l'autorité du ministère de la Défense nationale. Nous fournissons des programmes et des services axés sur le bien-être physique, mental et social et le bien-être financier des membres et des vétérans des Forces armées canadiennes et de leur famille.
[Français]
En tant que chef de la direction des Services de bien-être et moral des Forces armées canadiennes, mon travail consiste à faire en sorte que nos services et nos programmes favorisent la préparation et l'efficacité opérationnelles des FAC et contribuent à la résilience et à l'autonomie de ses membres et de leurs familles. Nous le faisons d'une manière qui associe des fonds publics et des fonds non publics, selon un modèle d'entreprise sociale.
Nos activités couvrent un large éventail de services, notamment des services de vente au détail, des services financiers et des services d'assurance, ainsi que des services d'entraînement physique et de sports, de loisirs et de soutien à la famille. Nous gérons également la cause caritative officielle des FAC. Appuyons nos troupes.
Les Services de bien-être et moral des FAC appuient de plusieurs façons la prévention et l'intervention quant à la violence basée sur le genre dans la communauté des FAC.
[Traduction]
Tout d'abord, à titre de partenaire financé dans le cadre de la stratégie fédérale visant à prévenir la violence sexiste, les Services aux familles des militaires sont en train de mettre sur pied, dans les bases et les escadres de tout le Canada, des équipes qui renseigneront et soutiendront les personnes touchées par la violence. Ces équipes se composent de spécialistes militaires et civils qui procurent toute une gamme de services de soutien et de programmes dans un contexte multidisciplinaire, holistique et axé sur la collaboration. Sont ainsi fournis des moyens de prévenir la violence, des outils d'éducation et de sensibilisation ainsi que des mesures de soutien aux victimes et aux agresseurs.
Ces équipes comprennent des membres du centre local de ressources pour les familles des militaires, comme les travailleurs sociaux, des agents de liaison avec les familles, du personnel des services de santé des FAC, comme des travailleurs sociaux, du personnel infirmier spécialiste de la santé mentale, des membres de la Police militaire, qui peuvent offrir des services aux victimes, des représentants de l'aumônerie et du Programme de soutien du personnel faisant la promotion de la santé. Les équipes travaillent en collaboration avec des professionnels de la santé et des travailleurs des services sociaux du milieu civil pour mettre en commun leur expertise et accroître la sensibilisation à l'égard des programmes et services communautaires.
L'importance de cette initiative est aussi reflétée dans l'initiative 22 de la Politique de défense du Canada, Protection, Sécurité, Engagement. Dans le cadre de cette initiative, les Services aux familles des militaires ont dispensé une formation sur un large éventail de sujets liés à la violence sexospécifique aux travailleurs sociaux qui travaillent directement avec les familles et les militaires. Durant l'exercice 2018-2019, les Services aux familles des militaires ont fourni 380 000 $ aux communautés des Forces armées canadiennes pour leur permettre de réaliser des activités, des ateliers et des cours de formation ciblant la violence sexospécifique. Les Services aux familles des militaires gèrent une ligne d'information téléphonique accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 qui donne accès à des conseillers bilingues pouvant aider et soutenir les militaires et leur famille qui ont aussi été touchés par la violence. Ce service offre l'option d'avoir des séances de counseling virtuelles à court terme.
Au sein de la Division du Programme de soutien au personnel des Services de bien-être et moral des Forces canadiennes, notre équipe responsable de promouvoir la santé offre le programme Respect dans les FAC. Ce programme est fourni directement aux militaires dans les bases et les escadres de tout le Canada. Le programme a pour but de favoriser le respect grâce à la prise de conscience et à la compréhension. Il vise à amener les membres des FAC à prendre position contre l'inconduite sexuelle et à les sensibiliser en ce qui concerne le soutien aux victimes. Ce programme est réalisé en partenariat avec l'équipe d'intervention stratégique des Forces armées canadiennes sur l'inconduite sexuelle.
L'autre option de soutien pour les militaires et leur famille est le Fonds Appuyons nos troupes, qui est offert grâce à nos fonds non publics. Cette initiative permet d'offrir une aide financière, sous la forme de subventions d'urgence. Les personnes qui ont été touchées par la violence peuvent avoir accès à un financement pour des choses comme un logement d'urgence, des moyens de transport et des produits de première nécessité, comme de la nourriture et de l'essence.
Les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes continueront de travailler avec tous les intervenants de la Défense et de la collectivité pour faire en sorte que les membres des FAC et leur famille qui sont touchés par la violence soient soutenus. Notre organisation continuera de mettre l'accent sur l'éducation et la prévention, tout en veillant à ce qu'une gamme de services d'intervention existe de manière à ce que les personnes touchées sachent de quelle façon et à quel endroit elles peuvent avoir accès à l'aide dont elles ont besoin.
Voilà qui termine ma déclaration.
Mesdames et messieurs, madame la présidente, merci beaucoup de m'accueillir ici aujourd'hui. Je suis heureuse de participer à la réunion ce matin.
Je m'appelle Lisa Vandehei. Mon rôle au sein de l'équipe de la Défense consiste à fournir une expertise pour aider à la mise en œuvre de l'analyse comparative entre les sexes plus, l'ACS+. Nous tous aujourd'hui travaillons en collaboration afin d'accroître la diversité et l'inclusivité au sein du milieu de la Défense.
La politique de défense du Canada contient l'engagement d'intégrer l'ACS+ dans toutes les activités liées à la défense dans l'ensemble des Forces armées canadiennes et au ministère de la Défense nationale. L'équipe de la Défense est déterminée à institutionnaliser l'utilisation de l'ACS+ afin que nous puissions prendre des décisions efficaces, équitables et fondées sur des données probantes. Nous nous efforçons d'élaborer des pratiques et des systèmes durables à l'appui de notre leadership afin que nous soyons tous responsables de réaliser des ACS+ et d'élaborer des politiques et des programmes étayés par les constatations de telles analyses.
Nous sommes chargés d'appliquer l'ACS+ à toutes nos activités, qu'il s'agisse de nos achats, des édifices que nous entretenons ou construisons, de la science ou de la technologie que nous utilisons ou encore de nos politiques, nos pratiques, nos programmes et nos projets. L'ACS+ est un processus analytique puissant permettant d'améliorer le fonctionnement pour chacun des membres de l'équipe de la Défense et l'impact qu'a l'équipe sur les autres aussi. Cela comprend l'acceptation des changements culturels et la création d'un milieu de travail accueillant et inclusif, conçu pour les employés que nous souhaitons attirer et maintenir en poste.
Nous avons déjà entendu dire que la politique PSE reconnaît que la diversité et l'inclusion sont des capacités indispensables qui donnent à l'équipe de la Défense la capacité nécessaire pour innover, travailler localement et à l'échelle internationale et, au bout du compte, s'acquitter avec succès de son mandat, mais de quelle façon exactement peut-on y arriver?
Nous savons que la diversité est une source d'innovation et de créativité grâce à une gamme élargie de modes de résolution de problèmes, de points de vue et d'idées. Le fait que les gens puissent faire part de leur expérience vécue lorsqu'on tente de régler des problèmes complexes est important. La diversité des points de vue éclairés permet d'explorer les objections comme les solutions de rechange de façon plus efficace, de trouver des solutions plus rapidement et d'adopter ces dernières avec une confiance accrue. Une équipe de la Défense qui reflète la population canadienne en ce qui concerne le genre, la race, l'ethnicité, l'orientation sexuelle et tous les autres aspects de notre vécu est mieux outillée pour comprendre ces besoins changeants en matière de sécurité et pour créer des solutions gagnantes.
Je souhaite aujourd'hui communiquer trois messages clés aux membres du Comité et à la présidente.
Nous avons réalisé des progrès, et l'ACS+ a des incidences positives. Jusqu'ici, nous avons effectué des ACS+ ou des sondages connexes relativement à des projets, des programmes et des politiques dont la valeur s'élève à environ 40 milliards de dollars, ce qui a mené à des changements concrets. En outre, d'autres changements suivront.
À titre d'exemple, l'ACS+ est un critère de financement évalué à 20 % du programme MINDS, qui offre des possibilités de collaboration entre l'équipe de la Défense, le milieu universitaire et le milieu des experts en défense et en sécurité. Pour ce qui est d'un autre exemple, les Forces armées canadiennes offrent une indemnité de 160 $ par année pour l'achat de soutiens-gorge, par souci de confort et de sécurité au travail. Cette indemnité double lors des déploiements à l'étranger. Pour la première fois, cette politique englobe les soutiens-gorge de maternité et d'allaitement et les bandes thoraciques.
Notre deuxième message, c'est que l'institutionnalisation de l'ACS+ est un processus complexe. Il ne s'agit pas uniquement de mieux sensibiliser les gens aux inégalités et aux questions de diversité et d'inclusion. Pour bâtir une capacité, il faut des moyens et une planification à long terme. Il faut des compétences, des connaissances et un leadership et il faut avoir accès à des recherches et à des données désagrégées. Nous connaissons un excellent départ. Nous disposons du soutien de la direction et avons reçu des ressources pour faire le travail.
Pour terminer, changer la culture d'une organisation est parmi les plus grands défis de la direction. La culture d'une organisation est constituée d'un ensemble entremêlé de buts, de rôles, de responsabilités, de valeurs, de pratiques en matière de communication, d'attitudes et d'hypothèses. L'ACS+ est un outil qui nous permet de relever le défi et de changer notre façon de travailler, et c'est ce que nous faisons actuellement.
Merci.
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Je vais peut-être commencer en expliquant deux choses dont je peux parler.
Du point de vue du recrutement, une partie du processus préalable à l'enrôlement inclut en fait la sensibilisation des gens au serment relatif à nos valeurs, et nous avons bien évidemment un certain nombre d'idées sur la façon dont nous pourrions insister sur la mesure dans laquelle ces valeurs sont importantes. Lorsque les gens arrivent à notre école de leadership et de recrutement, à Saint-Jean, ils consacrent 60 périodes — ou 40 heures sur un programme de 10 semaines — à des séances d'information, des exposés et des engagements liés au commandement sur tous les sujets associés à l'opération Honour, l'éthique et les valeurs des Forces armées canadiennes, ce qui est un investissement assez important.
En ce qui concerne la formation structurée, ça ne commence même pas à refléter l'engagement et le mentorat continu durant le temps que les recrues passent à l'école auprès du personnel qui, en prêchant par l'exemple, renforce la culture des Forces armées canadiennes; il faut reconnaître, cependant, que la période passée à l'école des recrues est une période d'assimilation au sein des Forces armées canadiennes. On fait passer les gens de civils à quasiment des membres formés des Forces armées canadiennes.
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Je répondrais en utilisant certains exemples concrets concernant notre école de recrutement.
L'un des obstacles que doivent franchir les recrues comprend essentiellement un ensemble d'échelles horizontales qu'ils doivent traverser en croisant les mains dans les airs. Nous avons constaté que la hauteur causait beaucoup de blessures, particulièrement chez les femmes, qui risquaient des blessures pelviennes si elles tombaient. Normalement, les femmes ont tendance à être plus petites. Lorsqu'elles tombent, elles tombent de plus haut et se blessent; c'est pourquoi nous avons changé la hauteur de ces barres.
De même, nous nous sommes penchés sur la formation que nous donnons en vue du stage final en leadership sur le terrain. Auparavant, les recrues marchaient 13 kilomètres avec un sac à dos. Nous avons maintenant changé cet exercice, car, encore une fois, nous avons constaté qu'il y avait beaucoup de blessures, particulièrement chez les femmes, ce qui, dans bien des cas, les forçait à prendre une pause pour guérir, avant de revenir à l'entraînement.
Nous avons changé cette partie de l'entraînement. Maintenant, les recrues marchent sept kilomètres et prennent part à une activité de tir. Ce changement peut sembler petit, mais c'est un exemple concret de la façon dont nous modifions notre façon de penser en regardant les aspects de notre formation et en tenant compte du fait que le contexte n'est plus le même qu'il y a 50 ans.
Au cours des dernières années, on a publié divers articles et présenté un sondage, qui a été réalisé par Statistique Canada, au sujet des agressions sexuelles dans les forces armées. Bien sûr, plus récemment, le rapport du vérificateur général au sujet de l'opération Honour a été publié. Avant cela, en 2016, le vérificateur général a présenté un autre rapport sur la participation des femmes dans les Forces armées canadiennes.
Madame Tattersal, durant votre déclaration liminaire, vous avez dit que les Forces armées canadiennes avaient pour objectif d'avoir un effectif composé à 25 % de femmes d'ici 2026, et vous avez dit qu'il s'agissait d'un objectif ambitieux.
Vous dites que nous réalisons des progrès. En 2019, il y avait 1 316 femmes de plus dans les Forces armées canadiennes qu'en 2015. Dans son rapport de 2016, le vérificateur général a dit que le recrutement des femmes avait été minime, que nous n'avions pas nécessairement les programmes ni l'engagement attendus pour recruter des femmes.
Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la situation?
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Certainement. Nous sommes en 2019, et depuis que nous avons pris le commandement des opérations en 2017, nous avons consacré beaucoup d'efforts au recrutement de femmes. Comme je l'ai mentionné, nous avons mis à l'essai le programme Les femmes font la force, car nous savons que les femmes et la majorité des milléniaux — puisque nous recevons des commentaires comme: « Pourquoi le programme s'adresse-t-il juste aux femmes et pas aux hommes? » — veulent pouvoir vivre l'expérience des forces et avoir une idée de ce que c'est.
Nous avons établi une équipe spéciale qui, avec l'aide du carrefour du BCP, s'est penchée essentiellement sur toutes nos pratiques de recrutement afin d'examiner le langage que nous utilisions dans nos publicités. Étaient-elles trop destinées aux hommes? Pourrions-nous changer la formulation?
Nous avons fait beaucoup de travail dans la sphère des médias sociaux et au chapitre de nos publicités pour présenter la femme dans le contexte des Forces armées canadiennes, parfois à notre détriment, car l'une des choses que les femmes ne veulent pas, c'est être prises à part. En fait, cela se retourne contre nous lorsque, publicité après publicité, tout ce qu'elles voient c'est un groupe de femmes, car elles pensent qu'elles ne sont là que pour la forme et qu'elles ne font pas réellement partie des forces.
Il est certain que nous réalisons des progrès, mais nous sommes aux prises avec les mêmes problèmes que lorsque vient le temps de recruter des membres de n'importe quel groupe désigné au Canada ou même des citoyens canadiens en général. C'est attribuable au fait que la majorité des Canadiens, même s'ils savent que nous avons une armée, ne savent pas réellement ce que font les militaires. Ils croient que leurs activités sont essentiellement axées sur le maintien de la paix et l'aide humanitaire, et ils ne sont certainement pas au courant des possibilités offertes.
Si le grand public canadien n'est pas au courant, on peut certainement s'imaginer que les jeunes femmes ne sont elles non plus pas au courant des activités que nous menons. Nous sommes présents sur les médias sociaux et nous organisons des activités au cours desquelles une jeune femme militaire devient recrutrice d'un jour et répond aux questions. Nous présentons des vidéos qui montrent à quoi ressemble l'instruction pour les hommes et pour les femmes.
Nous progressons lentement, car nous devons lutter contre ce manque de sensibilisation générale. Nous réalisons des progrès; le nombre de femmes dans les forces continue d'augmenter. Il y a un certain nombre d'autres initiatives que je pourrais décrire. La liste est longue et continue de s'allonger. Nous faisons tranquillement des progrès, mais la plus grande difficulté consiste à sensibiliser les Canadiens au fait que les Forces armées canadiennes représentent plus que le soldat d'infanterie que vous voyez dans le film Il faut sauver le soldat Ryan. Cela va des aumôniers aux logisticiens en passant par les électriciens, les pilotes d'aéronef et les médecins.
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Il s'agissait d'une campagne épistolaire, où nous nous sommes adressés à des femmes qui avaient été libérées au cours des cinq années précédentes. Cette période avait pour but que nous n'ayons à répéter aucun volet de la formation fondamentale, dans le cas où elles auraient perdu leurs compétences.
Le taux de réponse a été très faible. Nous n'aurions pas dû être surpris, parce que les principales raisons pour lesquelles ces femmes sont libérées... Certes, il y en a qui le sont parce qu'elles ont vécu une terrible expérience, mais beaucoup de femmes sont libérées parce qu'elles subissent des pressions familiales et qu'elles prennent la décision personnelle de ne pas rester dans l'armée. Nous aurions été naïfs de nous attendre à ce qu'en cinq ans, certaines de ces situations familiales aient changé, surtout si c'était lié au fait d'élever des enfants.
Dans la même veine, beaucoup de femmes sont libérées à certains moments en raison de blessures. Encore là, si elles sont libérées pour une telle raison, il est fort probable qu'elles ne se soient pas rétablies ou qu'elles ne soient pas guéries de cette blessure particulière cinq ans plus tard.
Les raisons — et je viens tout juste de vous en donner trois — pour lesquelles elles sont sorties n'avaient pas changé; elles ne souhaitaient donc pas revenir dans les Forces armées canadiennes.
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Le centre est l'un des partenaires avec lequel nous travaillons au sein des services à la famille. Il importe de faire une distinction avec le mandat du centre à l'égard des employeurs, c'est-à-dire les membres des forces armées et la souplesse qu'apportent les services de moral, du fait qu'ils sont accessibles aux conjoints dans un autre contexte et un autre cadre, élément que j'ai abordé dans ma déclaration préliminaire. Certains de nos travailleurs sociaux virtuels sont disponibles afin de s'occuper de ces personnes dans le cadre d'une intervention en situation de crise, puis pour travailler avec les partenaires communautaires locaux.
Pour ce qui est du centre précisément, encore une fois, c'est en dehors de mon mandat, mais relativement au centre — et nous travaillons avec ses intervenants —, nous devons nous assurer d'englober la totalité de l'expérience, parce que, évidemment, si un militaire et un conjoint civil sont touchés, les compétences sont différentes, mais, en fin de compte, c'est la famille dans son ensemble qui a besoin d'être guérie et appuyée, ou soutenue au moment où elle en arrive au résultat inévitable dans le cas d'une séparation. Il faut toutefois gérer ces situations.
Il s'agit là d'un volet lié au centre responsable de l'officialisation sur lequel nous allons continuer de travailler pour nous assurer...
Je ne suis pas certaine de savoir à qui adresser cette question, alors je vous laisserai décider quelle personne est la mieux placée pour répondre.
Pouvez-vous formuler un commentaire non seulement sur la procédure, mais aussi sur les pratiques qui sont mises en place dans le but de mieux servir les femmes lorsqu'elles font face à une agression ou à une inconduite sexuelle?
La raison pour laquelle je pose cette question, c'est que nous avons entendu de nombreux témoins affirmer qu'il ne s'agit pas d'établir davantage de procédures, de formalités administratives ou de platitudes ou d'avoir de bonnes intentions; c'est simplement une question de pratique. Ils affirmaient qu'un grand nombre des procédures sont déjà en place et qu'un grand nombre des attentes ont déjà été énoncées.
Madame Tattersal, je crois que vous avez mentionné que 40 heures de cette semaine initiale...