FEWO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la condition féminine
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 29 octobre 2018
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Bonjour. Tout d’abord, je tiens à présenter mes excuses à tous nos merveilleux témoins qui ont tenu bon. Je reconnais que nous avons une heure de retard, et je vous prie de nous excuser de vous avoir fait perdre un temps précieux, d'autant plus que nous reconnaissons, à la lumière de cette étude, l'importance du facteur temps dans le travail que vous faites. J’allais faire mes observations en français, mais je veux d’abord m’assurer que tout va bien.
Nous allons fusionner ces deux groupes de témoins. Chaque groupe ou chaque personne disposera de sept minutes pour faire son exposé, après quoi nous passerons aux questions.
Bienvenue à la 118e réunion sur la condition féminine.
[Français]
Le Comité reprend son étude sur le réseau de refuges et de maisons de transition qui desservent les femmes et leurs enfants affectés par la violence faite aux femmes et la violence par un partenaire intime.
[Traduction]
Tous nos groupes sont ici. Je suis heureuse d’accueillir Megan Walker, directrice générale du London Abused Women’s Centre. Jayce Beaudin-Carver, directrice générale, témoigne au nom de Windsor-Essex Transgender and Allied Support. Donna Mullen et Marilyn Ruttan comparaissent à titre personnel. C’est notre premier groupe.
Nous accueillons aussi aujourd'hui Grace Costa, directrice générale d’Eva’s Satellite, par vidéoconférence. Nous entendrons les représentantes de SAVIS of Halton, Alma Arguello, directrice générale, et Tara Setaram, conseillère en cas de crise pour la traite des personnes.
Nous allons commencer par Megan Walker, pour sept minutes. Megan, vous avez la parole.
Merci beaucoup.
Le London Abused Women’s Centre offre des services de représentation, de soutien et de counselling aux femmes et aux filles de plus de 12 ans qui sont victimes de violence de la part de leur partenaire intime dans la traite ou la prostitution à des fins sexuelles, de harcèlement au travail ou d'autres formes de harcèlement.
Nous sommes un service non résidentiel. Nous croyons fermement qu’il faut appuyer la prévention, ce qui est évidemment beaucoup plus facile à faire que de s’attaquer aux problèmes auxquels les femmes sont confrontées quotidiennement.
Nous ne sommes pas un organisme de Logement d’abord. Nous croyons que Logement d’abord est vraiment restrictif. Nous proposons plutôt « les femmes d’abord », et nous nous assurons d’être à l’écoute des besoins des femmes et de leur offrir les services appropriés.
C’est une période très difficile pour les femmes en ce moment. Entre janvier et août, 106 femmes ont été assassinées, presque exclusivement par des hommes. Sur les 106 femmes assassinées au Canada, 33 ont été tuées par leur partenaire masculin intime, et 70 % d’entre elles ont été tuées chez elles. Nous savons que l’endroit le plus dangereux pour les femmes n’est pas dans une ruelle, mais dans leur propre maison. Nous devons travailler pour changer cela.
Nous avons un problème majeur en ce qui concerne l’aiguillage des femmes qui ont besoin d’un refuge vers un refuge. Les abris débordent. Nous transportons maintenant des femmes et payons pour les loger dans des organismes partout au pays. Cela ne devrait pas être le cas.
Les femmes se rendent dans les refuges avec leurs enfants et leurs vêtements dans le coffre de la voiture, mais elles n’y ont pas accès. Cela crée une situation extrêmement dangereuse pour les femmes et les filles. Nous sommes très préoccupés par le manque de places dans les refuges.
Nous savons également, du point de vue de Logement d’abord, que dans la municipalité de London, la priorité donnée au logement signifie que chaque femme entre dans un logement et non dans un refuge. Nous assistons maintenant à la fin des lits de refuge pour hommes et femmes de l’Armée du Salut, parce qu’il faudra fermer ces lits au cours des trois à cinq prochaines années pour respecter les principes de Logement d’abord.
Il est très difficile pour les femmes et les filles d’avoir accès à un logement, même lorsqu’elles ont des suppléments de loyer. Grâce au fonds de soutien à la lutte contre la traite des personnes du gouvernement provincial, nous avons obtenu des suppléments de loyer pouvant atteindre 600 $ par mois pour les femmes qui ont été victimes de la traite des personnes. Si l’on tient compte de l'aide de la ville et de l’allocation d’Ontario au travail, les femmes obtiennent entre 1 100 $ et 1 200 $ par mois, mais cela pose des problèmes, parce qu’un logement d’une chambre à coucher à London coûte 847 $ par mois; un logement de deux chambres coûte 1 055 $ et un logement de trois chambres coûte 1 193 $. Comme vous pouvez l’imaginer, il reste très peu d’argent à consacrer à la nourriture, aux vêtements ou aux soins des enfants dans cette situation.
Nous constatons également une discrimination incroyable de la part des propriétaires contre les femmes victimes de mauvais traitements ou de traite. Beaucoup de femmes se heurtent au refus du propriétaire, même lorsqu’elles trouvent un logement abordable. C’est très difficile pour nous, parce que ces femmes se retrouvent littéralement sans abri. Elles n’ont ni lit ni logement dans un appartement.
Nous appuyons fondamentalement une recommandation qui va à la source du problème, à savoir que la violence masculine envers les femmes est une épidémie. Si nous parlions de violence sous n’importe quelle autre forme, sauf contre les femmes, le fait que 106 femmes ont été assassinées cette année, en grande partie par des hommes, et que 33 femmes ont été tuées par leur partenaire intime, déclencherait toute une levée de boucliers. S’il s’agissait d’une épidémie de grippe, de syndrome respiratoire aigu sévère, SRAS, ou de quoi que ce soit de ce genre, nous prendrions des mesures immédiates, mais, pour une raison ou une autre, nous continuons de minimiser les expériences vécues par les femmes et de faire comme si elles ne se produisaient pas.
Il est temps de cesser de faire l’autruche et de se rendre compte que nous avons tous un rôle à jouer, en particulier le gouvernement, pour empêcher que des femmes de partout au pays soient assassinées, surtout lorsqu’elles sont assassinées par un homme qui est censé les aimer, et dans leur maison, qui est pour la plupart d'entre nous l’endroit le plus sûr où nous puissions être.
C’est notre première recommandation: nous voulons que le gouvernement du Canada reconnaisse que c’est une épidémie.
De plus, nous voulons que le gouvernement réagisse à cette épidémie en prévoyant un financement de base complet pour tous les services qui aident les femmes à vivre à l’abri de la violence et des mauvais traitements.
Nous voulons qu’il y ait d’importants programmes de sensibilisation et d’éducation du public afin que les générations futures de filles et de garçons sachent que c’est inacceptable, que la valeur des femmes et des filles ne vient pas de l’attention que leur portent les garçons et les hommes, mais plutôt de ce qu’elles sont en tant que personnes.
Nous voulons que les hommes et les garçons sachent, en grandissant, que ce n’est plus du machisme dont nous parlons. En fait, ce dont nous parlons, c’est qu'un homme doit considérer les femmes comme des êtres humains qui méritent leur respect, leur amour et leur attention.
Nous voulons également que l’on investisse massivement dans la prévention. Comme je l’ai dit, si nous avons sauvé la vie d’une femme grâce à des mesures préventives, nous avons fait notre travail. Nous devons le faire beaucoup plus souvent et avec des investissements beaucoup plus importants.
Je dois également dire que nous offrons des services à de nombreuses femmes victimes de la traite des personnes. Dans l’ensemble, l’an dernier, nous avons fourni des services à 6 000 femmes et filles, dont 1 400 se prostituent et sont victimes de la traite. Nous n’avons aucune maison d’hébergement dans la région, et ces femmes ne veulent pas aller dans des refuges, qui s'apparentent à des asiles de nuit où elles ne font qu'entrer et sortir. Elles ne veulent pas non plus aller dans un refuge pour victimes de violence familiale, parce que leurs besoins sont très différents. Elles veulent leur propre espace, un endroit qu’elles peuvent appeler le leur, où elles sont à l’abri de leurs proxénètes.
Dans vos discussions sur les refuges, nous aimerions que vous incluiez également la sécurité des femmes et des filles victimes d’exploitation sexuelle et de trafic.
Je l’ai fait en une seconde.
Je tiens à remercier le Comité de m’avoir invitée à participer à cette importante conversation sur l’état des services de refuge pour les femmes et les enfants.
Votre invitation à prendre la parole devant vous aujourd’hui m'a laissée perplexe. Oui, je suis une femme qui a travaillé dans le secteur de l’itinérance chez les femmes, eh oui, je suis une femme qui a une expérience vécue. Cependant, le seul récit que je peux vous livrer aujourd’hui est celui de la communauté la plus mal desservie au Canada. Je suis la fondatrice et la directrice générale du seul centre de soutien pour les personnes transgenres et leurs familles, situé à Windsor-Essex.
Notre agence n’est financée par aucun ordre de gouvernement et fonctionne uniquement grâce à des dons et des contrats de services avec d’autres organisations. Je suis également une femme transgenre qui a vécu l’itinérance, et je connais de première main les obstacles auxquels se heurte ma communauté lorsqu’elle tente d’obtenir des services.
Cette année, pour la première fois, la collectivité de Windsor a ajouté l’identité de genre, les personnes transgenres étant l’une des options, à la liste des questions posées à l'occasion du dénombrement ponctuel. Même si notre collectivité a choisi de recueillir ce renseignement, aucun ordre de gouvernement ne demande cette information, en dehors du choix binaire du sexe masculin ou féminin pour quelque type de collecte de données que ce soit. Les administrateurs du dénombrement ont été surpris de voir que 3 % des membres de la communauté s’identifiaient comme personne transgenre.
Pour l’ensemble de la collectivité, le chiffre de 3 % peut ne pas sembler alarmant, mais nous savons que les personnes transgenres ont toujours peur de s’auto-identifier par crainte de ne pas pouvoir avoir accès aux services sexospécifiques et de ce qu’il pourrait leur arriver si elles avaient accès à ces services.
Je sais, pour avoir travaillé dans un refuge pour femmes, que ces refuges fonctionnent toujours à plein régime et, à Windsor, nous n’avons que 12 lits pour femmes célibataires. Cela a obligé les gestionnaires de refuges à faire preuve de créativité et à utiliser des tapis d'exercice pour accommoder d’autres femmes en plus du nombre pour lequel ils sont financés.
Les femmes trans qui s'adressent à un refuge d’urgence qui fonctionne déjà à pleine capacité, sont dans l'impossibilité de se sentir en sécurité et d’accéder à ce service vital. Notre collectivité est également l’une des seules dont je n'ai jamais entendu parler qui n’a pas de refuge pour les familles ou qui n’a pas recours aux motels comme la plupart des collectivités pour faire face aux débordements.
Nous savons qu’il n’existe actuellement aucune recherche qui puisse fournir des statistiques exactes sur l’itinérance et la violence familiale dans les communautés trans. Il y a de nombreuses raisons systémiques à cela. Même si les refuges posent des questions sur l’identité sexuelle de façon inclusive au niveau des services, nous savons que le gouvernement n’exige pas que les refuges tiennent des statistiques sur l’accès des personnes transgenres aux services.
Le portrait le plus précis des besoins se trouve dans le projet Trans Pulse réalisé dans le sud-ouest de l’Ontario. Même lorsque les études sont terminées, elles regroupent les trans avec les lesbiennes, les gais et les bisexuels, qui ne sont pas confrontés aux mêmes obstacles à l’accès que nous. Si nous continuons à faire des recherches et à ne conserver des statistiques que sur l’ensemble de la communauté LGBT, nous n’aurons jamais un portrait exact des obstacles auxquels se heurtent les plus marginalisés de notre communauté.
Les femmes transgenres se voient toujours refuser quotidiennement des services aux femmes, bien qu’il soit illégal de le faire. On nous dit encore que notre présence dans les services aux femmes angoisse les femmes cisgenres qui ont été violentées par des hommes. Les hommes transgenres qui ont été victimes de violence sont envoyés dans des refuges pour hommes sans-abri, et bon nombre d’entre eux signalent avoir été victimes de violence sexuelle pendant qu’ils étaient dans ces refuges. Ils le rapportent rarement aux autorités ou au personnel des refuges, parce qu'ils savent que c'est le seul lieu d'hébergement auquel ils ont accès.
Nous les entendons cependant. Nous les voyons venir dans notre centre, sans espoir et sans options. Ce ne sont pas seulement des histoires pour nous. Ce sont nos amis, des gens avec qui nous partageons une expérience commune, des gens qui comptent.
Les personnes qui ne sont pas binaires sont obligées de choisir entre le sexe masculin ou féminin lorsqu’elles accèdent à des services, car nos collectivités ne serviront que les personnes qui sont visées par le concept binaire. Non seulement cela ne rend pas service à notre collectivité, mais cela ne donne pas non plus un portrait exact des besoins des personnes marginalisées qui ont besoin de ces services. Comme notre gouvernement ne pose pas de questions sur l’identité de genre, nous ne comprendrons jamais vraiment les besoins de notre collectivité. Cela signifie que notre gouvernement continuera de financer les lits pour femmes et pour hommes, plutôt que des lits sûrs. Après l'affirmation de notre identité, nous sommes nombreux à perdre notre système de soutien, notre famille, notre emploi et notre maison. Le taux de suicide dans la communauté trans est de 43 %.
Dans un pays où les lois sont si progressistes en ce qui concerne le respect des droits des personnes transgenres, pourquoi nos systèmes sont-ils encore conçus pour servir uniquement les personnes cisgenres? Étant donné que nos systèmes ne tiennent pas compte des identités trans, 92 % des personnes trans ont trop peur d’avoir accès aux espaces publics.
À un moment ou à un autre de leur transition, 77 % des membres de notre communauté sont sans abri, mais ils demeurent dans des situations de vie dangereuses pendant de plus longues périodes afin d’éviter d’avoir accès aux services. De plus, 40 % des membres de notre communauté n’ont pas accès aux soins de santé d’urgence ou aux services de traitement des dépendances en établissement lorsqu’ils en ont besoin.
Notre organisation fonctionne depuis un an. Nous avons obtenu les clés de notre centre d’accueil le 1er mai 2018. Bien sûr, il n’y a pas de statistiques concrètes à l’appui de l’ouverture d’un centre spécifique pour les transgenres, ce qui veut dire aussi qu’on n’a pas pu obtenir de financement pour les opérations ou les services.
Ce que je crois, c’est que si vous construisez un centre, les gens viendront. Depuis notre ouverture, nous avons reçu 1 500 visiteurs qui sont venus pour diverses raisons, pour notre banque alimentaire, notre banque de vêtements ou nos services de counselling, mais surtout pour obtenir de l'aide en vue d’avoir accès à des services d'hébergement sécuritaires dans la grande collectivité.
Je suis déçue qu’en 2018, des clientes m’appellent encore pour me dire qu’elles ont été chassées des salles de bain des refuges, parce qu’elles avaient utilisé la mauvaise salle de bain, qu’elles ont été forcées de partager des locaux réservés au sexe indiqué sur leurs pièces d’identité ou qu’elles avaient craint pour leur sécurité dans le réseau de refuges. Elles préfèraient dormir dans l’entrée de mon centre jusqu’à l'ouverture des portes pour rattraper un peu de sommeil.
Je suis consternée par la nécessité d’appeler les refuges afin d'expliquer pourquoi notre cliente devrait avoir accès au refuge en question et quelle est leur obligation d’accommoder cette personne en vertu de la loi. Si vous deviez me demander de téléphoner pour vous donner accès à un refuge, en sachant que j’ai d’abord dû défendre votre droit d'y séjourner, vous sentiriez-vous à l'aise? Comment pourriez-vous faire confiance au personnel, à l’administration ou même à l’environnement, sachant que vous ne seriez même pas autorisée à être là à moins que quelqu’un ne défende votre cause?
Encore récemment, j’ai reçu la plainte de clientes qui ont perdu le logement que nous avions recommandé pour elles en vertu du code. Elles ont été réassignées à une place d'hébergement qui ne correspond pas au genre dans lequel elles vivent après avoir enfreint une règle mineure.
Les mesures d’adaptation ne sont pas des récompenses; elles sont exigées par notre loi pour un accès sécuritaire.
Certaines des choses dont je vous parle aujourd’hui font partie de ma propre histoire et de celle d'un grand nombre des personnes de mon entourage. De nombreuses autres populations marginalisées ont bénéficié de fonds et de ressources supplémentaires pour changer leurs résultats et réduire les statistiques consternantes; la communauté trans en a assez d’être laissée de côté pour la prestation des services.
Notre communauté est en train de mourir, et il est temps que cela cesse.
Merci beaucoup. C’était un excellent exposé.
Nous allons maintenant passer à Donna et Marilyn, pour sept minutes.
Nous tenons à remercier notre députée, l’honorable Dre Kellie Leitch, de nous avoir invités à comparaître aujourd’hui.
Je m’appelle Marilyn Ruttan. Je suis courtier immobilier et j’exploite le bureau RE/MAX à Wasaga Beach depuis 29 ans. Donna Mullen est courtier hypothécaire à Wasaga Beach...
Oui, je parle vite.
Donna Mullen est courtier hypothécaire à Wasaga Beach depuis 25 ans.
Au départ, on m’a demandé de venir discuter avec le Comité permanent de la condition féminine de l’accession à la propriété des femmes vivant seules et de l’accès des femmes à un logement.
J’ai répondu rapidement que les femmes célibataires ne venaient plus chez nous pour acheter une maison...
... surtout depuis janvier dernier, lorsque le nouveau test de tension hypothécaire a été mis en place. Il est déjà assez difficile pour une famille à deux revenus d’être admissible, et encore moins pour une femme seule ou une femme célibataire qui essaie de se remettre sur pied après avoir vécu dans un refuge de première ou de deuxième étape. Les femmes ne peuvent pas acheter une maison sans d’abord être admissibles à une hypothèque, et les grandes banques ne sont pas du tout accommodantes ou accueillantes.
J’ai demandé si Donna pouvait m’accompagner pour que nous vous brossions un tableau des défis auxquels les femmes sont confrontées. Donna et moi sommes toutes les deux actives dans nos carrières respectives, et nous traitons directement avec le consommateur final tous les jours.
Nous avons reçu un courriel de suivi du Comité dans lequel on demandait de faire un lien avec votre étude sur le réseau de refuges et de maisons de transition au service des femmes et des enfants victimes de violence faite aux femmes et aux partenaires intimes.
Donna et moi avons commencé un remue-méninges. Nous avons recueilli le plus de renseignements possible, puis nous avons interviewé plusieurs femmes. Nous avons rencontré une femme qui travaillait à My Friend’s House, notre refuge local à Collingwood, et qui est employée depuis 25 ans au bureau de Collingwood du programme d’aide Ontario au travail. De plus, nous avons interviewé des conseillers locaux pour discuter des nouveaux projets de construction de logements sociaux en cours dans le comté de Simcoe.
Donna et moi avons quelques recommandations dont la mise en oeuvre pourrait, selon nous, aider certaines femmes, ne serait-ce que 20 % d'entre elles, à sortir des refuges de la deuxième étape...
... faire de la place aux femmes qui sont dans les refuges de première étape.
Donna va recommander les changements qu'il faudrait apporter à certains programmes de la SCHL pour aider plus de femmes à acheter un logement.
Je m’appelle Donna Mullen et je suis une survivante de violence familiale, de troisième génération. J’ai aussi survécu à une affaire de droits de la personne, qui a commencé en 1992, parce que j’avais posé des questions. Cette affaire a été pire pour moi que toute forme de violence physique que j’avais eu à subir auparavant.
Je vais aller droit au but. Marilyn et moi sommes...
Nous avons sauté de nombreux passages.
Nous sommes conscientes qu’il y a beaucoup d’excellents programmes, du moins dans le comté de Simcoe, pour aider les femmes qui sont en transition et vivent dans des maisons d’hébergement de deuxième étape, mais il semble y avoir un décalage entre les femmes qui veulent acheter un logement — peut-être 20 ou 25 % —, assurer leur sécurité, se constituer un patrimoine pour assurer leur avenir, et trouver un courtier hypothécaire et un agent immobilier qui comprennent quelles sont leurs difficultés. Ce décalage s’applique aux deux côtés de l’équation.
En tant qu’agents immobiliers, nous pouvons poursuivre nos études grâce à divers cours de formation canadiens et américains en ligne pour obtenir des titres et des certificats. Il y en a de toutes sortes, comme ceux de spécialiste sénior de l'immobilier ou de représentant des acheteurs accrédité, par exemple. On peut obtenir un certificat de professionnel agréé de l’Internet, et il y a une toute nouvelle formation qui s’appelle « At home with diversity ». Il y en a beaucoup d'autres, mais il n’y a pas de titres ou d’accréditations pour la formation à la sensibilisation ou le mentorat nécessaire pour enseigner aux agents immobiliers et aux courtiers hypothécaires ce qu’ils doivent savoir pour aider les femmes à se sortir de situations difficiles.
Le cours devrait notamment enseigner aux agents immobiliers et aux courtiers hypothécaires comment mettre à profit les divers programmes actuellement offerts par la SCHL, les provinces et leur comté local...
Marilyn, j’aime votre énergie. Nous sommes tellement semblables.
Nous allons devoir aller un peu plus lentement.
D’accord.
Nous pensons pouvoir élaborer un programme utile. Donna a beaucoup de choses à dire au sujet des qualifications. Le cours pourrait être créé conjointement par les femmes qui conseillent actuellement les femmes dans les maisons d’hébergement de la phase 2, les courtiers hypothécaires et les agents immobiliers. Nous pourrions en parler partout au Canada et espérer que, dans chaque collectivité, quelqu’un puisse aider les femmes.
Je vais laisser la parole à Donna.
À l’heure actuelle, lorsqu’on demande un prêt hypothécaire pour acheter une maison, les règles n’ont jamais été aussi rigoureuses et différentes d’un prêteur à l’autre. J’ai commencé à travailler dans les banques en 1982, alors que les taux étaient de 20 %. J’ai donc vécu chaque crise.
Pour louer une maison bas de gamme de trois chambres à coucher, généralement sans sous-sol fini et sans éléments additionnels, dans le comté de Simcoe, le coût moyen est de 1 800 $ à 2 000 $ par mois. La situation est la même partout au pays, en fonction de la population. Une femme pourrait acheter une maison de trois chambres à coucher, pour un prix de 359 000 $ à 399 000 $, qui lui coûterait la même chose qu'un loyer. Cela répond aux « besoins » plutôt qu'aux « désirs ». Au Canada, on ne peut pas construire, sur un terrain viabilisé, une maison bas de gamme sans sous-sol fini et sans carreaux de céramique, de marbre ou de granit pour moins de 350 000 $.
Nous avons examiné la base d’emploi dans le comté de Simcoe et le salaire moyen des professionnels de la santé — IA, IPA, nouvellement diplômée, 90 % de femmes —, des préposés aux services de soutien à la personne et des emplois manufacturiers liés à l’industrie automobile.
L’IPA et l’IA commencent à 28 $ de l’heure. Il n’y a pas d’avantages sociaux, et leur emploi est occasionnel. N’oubliez pas que ce sont des emplois occasionnels. La moyenne de départ d’une PSSP est de 18 $ de l’heure. Il n’y a pas d’avantages sociaux, et c'est un emploi occasionnel.
L’usine de fabrication de voitures d’Alliston embauche régulièrement des travailleurs contractuels. Le salaire de départ moyen est de 18,92 $ l’heure, et nous venons de remettre 1,1 milliard de dollars de dette à Chrysler.
Les emplois dans le secteur de la fabrication de vitrage automobile commencent à 16 $ de l’heure. Le salaire de départ moyen pour travailler dans une municipalité ou un comté est de 18 $ à 20 $ de l’heure, et il n’est pas facile pour les femmes d’obtenir ces emplois.
L’industrie de l’hôtellerie et de la restauration est notre principal employeur dans notre comté, le comté de Simcoe. Comme elle recevait des pourboires, la serveuse ne les déclarait pas dans sa déclaration d'impôts. Ce genre d’emploi permettait aux femmes d'aller travailler à l'extérieur pendant que leur conjoint était à la maison. Elles n'avaient pas de frais de garderie à payer et généralement pas de stress causé par le conjoint pendant ce temps-là.
Cet argent permettait à la femme de payer l’essence pour son véhicule, l’épicerie et des choses supplémentaires pour ses enfants, et peut-être aussi d’économiser de l’argent pour pouvoir sortir d’une relation de violence. Cet argent ne pouvait pas être retracé par son conjoint. Les serveuses et les barmaids touchent un salaire inférieur au salaire minimum parce qu’elles reçoivent des pourboires.
Je crois que maintenant, l’ARC examine les registres pour voir combien une serveuse est payée par carte de débit ou Visa. Ce n’est pas une question qui devrait être prioritaire pour l’ARC. Dans notre pays, il y a beaucoup de poissons plus gros à attraper que les femmes qui travaillent dans cette industrie.
Lorsqu’une femme quitte son conjoint parce qu'il la maltraite, cela soulève la question des biens, tels que la maison. La femme a généralement droit à 50 % de cet avoir au moment de la séparation ou du divorce. Elle peut également avoir droit à une pension alimentaire pour elle et ses enfants. Lors d’une séparation ou d’un divorce, elle peut aussi faire recalculer sa prestation fiscale pour enfants.
Comme vous allez me couper la parole, je vais formuler quelques recommandations.
Comme nous voulons nous assurer que le Comité recevra nos recommandations, nous voudrions déposer un rapport.
Nous allons veiller à ce que tous ces renseignements soient distribués, mais nous devons passer à notre prochain groupe de témoins, si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Je suis désolée; le temps passe si vite.
Nous allons demander que ce soit traduit, si vous voulez déposer le reste de votre document. Nous pouvons demander qu’il soit traduit et nous pourrons alors le distribuer au Comité. Je vois qu’il compte environ 18 pages.
Grace Costa est directrice générale d’Eva’s Satellite, et elle témoigne par vidéoconférence.
Vous avez sept minutes, s’il vous plaît.
Eva’s Initiatives for Homeless Youth est un organisme torontois primé qui offre des refuges et des logements de transition aux jeunes de 16 à 24 ans qui sont sans abri. Nous espérons les aider à réaliser leur potentiel et à mener une vie productive.
Eva’s Place est un refuge d’urgence de 40 lits où est offert le programme de rétablissement des liens familiaux. Eva’s Satellite est un refuge d’urgence de 33 lits qui met l’accent sur la réduction des méfaits pour les jeunes toxicomanes qui ont des problèmes de santé mentale. Eva’s Phoenix est un logement supervisé de type maison en rangée pour 50 jeunes. Il offre également des programmes d’éducation et d’emploi.
Charity Intelligence a choisi Eva’s comme l’un des 10 organismes de bienfaisance ayant le plus d'impact au Canada. Eva’s dessert les jeunes sans-abri de tous les genres. Ils deviennent des sans-abri pour de nombreuses raisons. Cependant, il est clair que les jeunes font face à des difficultés systémiques lorsqu’ils sont touchés par la violence faite aux femmes et la violence entre partenaires intimes; ils demandent de l’aide aux refuges pour jeunes et aux fournisseurs de logements de transition qui sont mal équipés pour répondre à leurs besoins.
Il y a quelques constatations que je veux souligner et qui montrent l’intersectionnalité entre l’itinérance et la violence fondée sur le sexe.
La première, c’est que les données probantes montrent que la majorité des jeunes sans-abri viennent de foyers où il y a beaucoup de violence physique, sexuelle et émotionnelle; de violence interpersonnelle et d'agression; de négligence parentale; et d’exposition à la violence entre partenaires intimes. Le manque de sécurité dans les rues peut inciter les jeunes femmes à rester dans des situations où elles risquent également d’être victimes de violence fondée sur le sexe. Les jeunes hommes sont généralement plus nombreux que les femmes dans les refuges pour jeunes. C’est un ratio de deux pour un, plus ou moins.
Les données probantes appuient le point de vue selon lequel de nombreuses jeunes femmes restent dans des situations de violence parce que la rue leur semble beaucoup plus dangereuse. L’itinérance expose les jeunes à des risques extrêmement élevés de violence. Ils sont près de six fois plus susceptibles d’être victimes de crimes violents que la population en général, et ils sont la principale cible de toutes sortes de crimes violents, y compris les agressions sexuelles.
Les jeunes LGBTQ et bispirituels, les jeunes autochtones et les jeunes qui deviennent sans abri à un jeune âge sont les plus exposés à la violence. Les jeunes sans-abri risquent particulièrement d'être victimes de la traite des personnes.
Covenant House Youth, le Field Center for Children’s Policy, Practice and Research et le Modern Slavery Research Project, de 2017, de la Loyola University ont révélé que 68 % des jeunes qui avaient fait l'objet de la traite des personnes ou qui avaient eu des relations sexuelles de survie ou commerciales l’avaient fait pendant qu’ils étaient sans abri.
Ils ont également découvert qu’une femme cisgenre sur cinq s'était trouvée dans une situation de trafic sexuel. Les jeunes LGBTQ représentaient 36 % des victimes de la traite des personnes à des fins sexuelles. Les jeunes qui avaient fait l'objet d'un placement en famille d'accueil représentaient 27 % de tous les jeunes qui travaillaient dans le commerce du sexe et 26 % de tous les jeunes qui étaient victimes de la traite des personnes.
En 2014, la Fondation canadienne des femmes a relevé cinq facteurs qui expliquent la traite des personnes à des fins sexuelles, soit le fait d’être du sexe féminin et jeune, d’être pauvre, d’avoir des antécédents de violence ou de négligence, d’avoir des antécédents de violence sexuelle et d’avoir un faible niveau de scolarité. Parmi les autres facteurs de risque, mentionnons le manque de possibilités d’emploi au niveau local, le fait d’être un migrant ou nouvel immigrant ou d’avoir un faible niveau de soutien social, d’être autochtone, d’être sans abri, de vivre dans des foyers de soins ou de groupe ou en famille d’accueil, d’avoir des problèmes de toxicomanie ou de santé mentale, et d’avoir des antécédents de participation au système de justice pénale et d’association à des gangs.
Les refuges pour jeunes et les logements de transition ont besoin de soutien pour accroître leur capacité. En général, les programmes fédéraux de financement des refuges pour les jeunes et des logements de transition sont très faibles. Dans le cas d’Eva, nous recevons très peu de soutien fédéral direct, même si nous sommes l’un des principaux fournisseurs de refuges et de logements de transition pour les jeunes au Canada.
Les jeunes qui fuient la violence fondée sur le sexe viennent régulièrement à Eva’s. Il s’agit notamment de ceux qui sont eux-mêmes confrontés à cette violence ou qui y sont exposés à la maison. L'accès aux refuges pour femmes adultes peut être fermé aux jeunes à cause de leur âge, parce qu’elles ne sont pas accompagnées par un parent ou un tuteur, ou parce qu’elles ne savent pas qu’elles peuvent y avoir droit. De plus, d’après notre expérience, lorsque nous avons essayé d’accéder à ces lits, il n’y avait pas de place pour elles, même à Toronto, où il y a beaucoup plus de ressources.
Même si les jeunes s’adressent à des fournisseurs de services comme Eva, nous ne sommes pas souvent admissibles à des fonds fédéraux ou autres pour lutter contre la violence fondée sur le sexe. Cela constitue un obstacle important pour les jeunes femmes en particulier, parce que cela signifie que nous ne pouvons pas leur réserver une place dans un refuge ou un logement de transition, et la plupart des jours ou des nuits, nous ne pouvons pas les accueillir à Eva's, parce que nous sommes au complet.
Nous ne sommes pas certains du nombre de jeunes qui restent dans des situations de violence fondée sur le sexe par peur de la rue. Cependant, environ 2 000 jeunes sont sans abri à Toronto chaque nuit, dont 600 dans des refuges ou des maisons de transition et 123 à Eva’s. Nous savons que des jeunes femmes peuvent avoir besoin de lits dans des refuges pour jeunes ou des foyers de transition pour échapper à la violence fondée sur le sexe, mais qu’elles n’y ont pas accès.
Les refuges sont souvent les derniers endroits que les bailleurs de fonds considèrent comme des programmes utiles. Pourtant, c’est dans les refuges et à leur personnel qu’un grand nombre de jeunes divulguent la violence et les traumatismes qu'ils subissent et demandent de l’aide.
Dans le refuge, nous pouvons voir que beaucoup de jeunes ont grand besoin d'acquérir ce que nous appelons des compétences de base, mais c’est beaucoup plus que cela. Dans nos refuges, nous rencontrons les jeunes là où ils en sont, et ils commencent peu à peu à parler des années de violence qu'ils ont vécues, et nous devons souvent les transférer à quelqu’un d’autre dans la collectivité pour obtenir du soutien. Lorsque nous le faisons, il arrive souvent que cette très jeune personne se referme et replonge dans son ancien univers de honte, de peur, d’isolement et de déni.
Pour nous qui faisons ce travail, il est parfaitement évident que les organismes comme Eva’s et les autres fournisseurs de logements pour les jeunes ont besoin du financement du gouvernement, non seulement pour offrir des places afin d’aider les jeunes femmes, mais aussi pour maintenir des équipes qui ont l’expérience, les compétences et la sensibilité nécessaires pour aider les jeunes femmes qui fuient la violence fondée sur le sexe.
Merci.
Merci beaucoup.
Pour nos derniers témoins, nous allons passer à Alma et Tara. Vous avez sept minutes.
Nous allons partager notre temps.
SAVIS of Halton est le seul centre d’aide aux victimes d’agression sexuelle de la région de Halton. Nous desservons les personnes qui ont été agressées sexuellement. Nous offrons également des programmes d’éducation du public et des programmes de counselling à long terme. Nous avons aussi l’Initiative de lutte contre la traite des personnes, un programme complet de sortie et un soutien à long terme grâce auquel nous aidons les femmes qui sont prêtes à commencer à vivre, au lieu de simplement survivre.
Ce document recommande vivement que les victimes de la traite des êtres humains soient considérées comme distinctes des victimes de la violence domestique et que, au lieu de répondre aux besoins de logement des victimes de la traite des êtres humains par le biais d’un modèle de violence domestique, de violence à l’égard des femmes, les aides au logement soient fournies directement à la population, expériences uniques et multiformes des survivants de la traite des êtres humains.
Dans la région de Halton, une région géographique composée d'Oakville, de Burlington, de Milton, de Georgetown et d'Acton, il existe peu de mesures de soutien en matière de logement pour les femmes et les enfants victimes de violence domestique. En fait, il n’existe qu’un seul refuge, Halton’s Women's’s Place, réservé aux femmes et à leurs enfants qui cherchent refuge contre la violence domestique. Comme il s’agit de la seule maison d’hébergement pour femmes dans la région de Halton, de nombreuses femmes à la recherche de services d’aide au logement ne sont pas des victimes de la violence domestique, mais des victimes de la traite des êtres humains.
Les victimes de la traite des êtres humains se heurtent à des obstacles distincts lors de l’accès à des aides au logement. Le traumatisme subi par une victime de la traite des êtres humains est différent de celui d'une victime de la violence domestique. Pour cette raison, les besoins en logement des victimes de la traite des êtres humains sont différents de ceux des victimes de la violence domestique.
À l’heure actuelle, l’une des lacunes les plus criantes dans les services d’aide au logement et les modèles d’hébergement réside dans le fait que de nombreux modèles de services homogénéisent les victimes de la traite des êtres humains et les victimes de violence domestique et ne répondent finalement pas pleinement aux besoins distincts des deux groupes.
Le mémoire qui suit décrit certains des obstacles propres aux victimes de la traite des êtres humains lorsqu’elles ont besoin d’avoir accès à des services d’aide au logement.
De nombreux centres de lutte contre la violence à l'égard des femmes appliquent de fortes politiques anti-travail sexuel. Ces politiques créent non seulement une autre barrière d’accès pour les victimes de la traite des êtres humains susceptibles de participer au commerce du sexe, mais elles contribuent également à stigmatiser les victimes de la traite des êtres humains. Souvent, ces politiques anti-travail sexuel sont qualifiées de « politique de non-recrutement ». Bien que ce soit compréhensible, aucune politique de recrutement ne dissimule la possibilité que certaines femmes de la maison d'hébergement choisissent de participer à du travail sexuel autonome et doivent compter sur les informations ou les relations d'un autre travailleur du sexe autonome au sein du refuge.
Ces politiques contribuent à créer un environnement hautement policé qui encourage la surveillance panoptique des victimes de la traite des êtres humains. Ces politiques ignorent également les nuances d’expérience des survivantes de la traite des êtres humains. Beaucoup de survivants de la traite des êtres humains auront recruté pour leur trafiquant comme moyen de conservation et de survie. En inscrivant au noir une femme accusée de trafic elle-même, les refuges aliènent certaines des victimes les plus vulnérables.
L'association de la violence domestique et de la violence spécifique à la traite des êtres humains, qui vise à saper les traumatismes distincts que les victimes de la traite des êtres humains doivent subir, doit naviguer. Oui, il existe de nombreuses similitudes entre la violence domestique et la traite des êtres humains, dans la mesure où les deux victimes subissent des expériences de manipulation, de sévices physiques, de contrôle financier, etc. Pour cette raison, les victimes de la traite des êtres humains doivent pouvoir accéder à un modèle de logement qui intègre et fonctionne avec un soutien et des meilleures pratiques éclairés en matière de traumatisme. Dans les refuges VAW, en raison du volume de clients et du manque de ressources disponibles, ce cadre est souvent absent.
Les femmes noires, autochtones et de couleur qui sont également survivantes de la traite des êtres humains ont moins de chances d'accéder aux abris et aux ressources de la violence contre les femmes, car elles ne sentent pas que leurs expériences et leurs besoins distincts se reflètent dans le modèle de service. Les modèles et les refuges d'aide au logement doivent fonctionner à partir d'une fondation intersectionnelle afin de mieux répondre aux besoins des victimes de la traite des êtres humains noires, autochtones et des femmes de couleur. Cette expérience est particulièrement exacerbée dans la région de Halton, car la population est en grande partie blanche.
Nous recommandons également un registre centralisé des prises en charge dans le cadre du soutien transitoire indiquant où se trouvent tous les lits et qui peut fournir aux personnes un transport sécuritaire.
Les refuges ne devraient pas être les seuls à bénéficier ou recevoir du financement pour l’aide à la transition. Les personnes qui demandent de l’aide ne sont pas toutes réputées avoir été victimes de violence familiale ou avoir demandé de l’aide dans des refuges, et parfois, l’ancienne définition de partenaire intime ou de chef de la famille traditionnelle exclut les partenaires de même sexe ou les frères et soeurs violents dans le cas de certaines victimes de la traite de personnes.
Des mesures de soutien transitoires devraient également être offertes aux organismes qui travaillent auprès des personnes les plus vulnérables, c’est-à-dire les centres d’aide en cas d’agression sexuelle, les centres de femmes, les organismes d’aide à l’établissement, les cercles d’amitié autochtones — ce que nous n’avons pas à Halton — PSN, LGBTQ2+ et le soutien transitoire, les services de soutien aux transgenres, les aînés et les organismes de défense des droits. Il faut changer la terminologie. Nous devons examiner les programmes et le financement que nous offrons dans le cadre d’une approche antiraciste, anti-oppressive et intersectionnelle.
Nous laissons encore de côté les plus vulnérables, même dans la terminologie et dans la façon dont on l’utilise. Quelle est la définition de « partenaire intime »? Est-ce quelqu’un qui a des relations sexuelles? Il faut changer cela. Qu’est-ce que la cohabitation? Est-ce quelqu’un avec qui vous devez vivre? Si nous nous limitons à l’unité familiale traditionnelle, nous laisserons pour compte les plus vulnérables de notre population.
Merci.
La Canadienne de première génération, racialisée et ayant survécu à la traite de personnes, est porteuse de quelques recommandations au sujet de la traite de personnes.
J’ai également été victime de violence familiale et, après avoir vécu la traite de personnes, j'ai abouti dans un refuge pour victimes de violence familiale. Ce fut traumatisant et stigmatisant, car je me suis sentie blâmée pour cela, ce qui arrive souvent aux victimes. Ma présence au refuge a engendré une perception de victimisation hiérarchisée, créant ainsi une situation très tendue. Les résidentes m’interrogeaient constamment sur mes liens avec les agences et sur le traitement spécial qu'elles m'imaginaient avoir reçu.
Nous recommandons que le personnel des logements de transition soit informé des traumatismes subis, qu’il applique une approche intersectionnelle axée sur la réduction des méfaits et qu’il offre aux survivants de la traite de personnes un continuum de soins fondé sur la voie non linéaire de guérison. Nous recommandons que les programmes d’entrée et de sortie n'aient pas de répercussions négatives — que les participants ne se retrouvent pas sur une liste noire — et qu'ils renvoient une image positive des relations sexuelles et ne cherchent pas à attribuer une appartenance sexuelle à qui que ce soit avant leur admission. Les survivants ont besoin de soutien en matière de logement; des initiatives en ce sens les responsabiliseraient et favoriseraient leur autonomie.
C’est tout.
Merci beaucoup.
Pour donner à tout le monde une idée de la façon dont nous allons procéder aujourd’hui, si vous êtes d'accord, nous poserons nos questions aux témoins jusqu’à 17 h 50 et nous passerons à huis clos tout de suite après pour terminer à 18 heures. Nous avons quelques questions d’ordre administratif à régler, mais comme nous avons un excellent groupe de nombreux témoins, nous allons leur donner plus de temps et réduire le temps alloué aux travaux du Comité.
Nous allons commencer par Pam Damoff qui aura sept minutes pour poser ses questions.
Merci, madame la présidente.
Merci à tous nos témoins d’être ici aujourd’hui. À celles et ceux d'entre vous qui travaillent auprès des survivants, je vous dis merci pour le travail que vous faites, que bon nombre d'entre vous faites depuis de nombreuses années. Je vous remercie du fond du coeur, parce que ce n’est pas facile et, honnêtement, je ne sais pas comment vous faites pour continuer jour après jour.
Je vais commencer par SAVIS, parce que nous avons déjà abordé la question des survivants de la traite de personnes ensemble; nous avons parlé des survivants qui aspirent à trouver un endroit où ils pourraient vivre et sortir de la vie qu'ils ont vécue et résoudre les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Nous avons un refuge pour femmes dans notre région. Je sais que SAVIS a essayé d'obtenir des logements de transition pour les survivants de la traite de personnes dans la région et que ce fut vraiment difficile. Vous serait-il possible de nous parler de certaines de ces difficultés et nous dire pourquoi vous vous êtes heurtée à tant d'obstacles en essayant de mettre quelque chose sur pied.
Tara, voulez-vous parler? Vous travaillez directement auprès de ces personnes.
Tara travaille également auprès de victimes de la traite de personnes; l'information qu'elle peut nous transmettre provient directement de la source.
En ce qui concerne le soutien transitoire, beaucoup de nos clientes cherchent un logement, mais nous ne sommes pas en mesure de leur en fournir, car nous n’avons pas d’unité de crise. En fait, comme ces victimes doivent être relocalisées rapidement, nous les hébergeons à l'hôtel, mais cette approche n'est pas viable. Certaines n’ont pas accès aux refuges, car elles figurent sur une liste noire; nous devons donc les déplacer dans une autre région et elles se retrouvent dès lors éloignées des personnes qui pourraient leur venir en aide.
Pour ce qui est de l’accès au logement dans la région, si leur situation est considérée prioritaire, elles reçoivent une allocation de logement transférable. En fait, elles doivent se chercher un appartement, obtenir un bail et payer le premier et le dernier mois de loyer, puis la région prend le relais et commence à verser cette allocation.
Malheureusement, certaines de nos clientes ne parviennent pas à obtenir un contrat de location, parce qu'elles n'ont pas l'argent pour payer le premier et le dernier mois de loyer. Leur cote de crédit n'est pas très bonne et leur revenu est irrégulier ou trop faible pour payer la location. C'est le cercle vicieux dans lequel elles se retrouvent; elles cherchent un appartement puis constatent après en avoir trouvé un qu'elles ne sont pas admissibles.
Nous avons essayé de travailler avec les régions afin de mettre en place un processus quelconque qui permette de surmonter les obstacles associés à la recherche d'un logement et qui permettent d'espérer.
Où vont-ils entre la période où ils cherchent un logement et le moment où ils se présentent à vous? Le téléphone sonne. Ils vous appellent. Où sont-ils logés en attendant de se trouver un appartement?
Nous devons placer certaines des victimes à l’extérieur de la région. Nous sommes allés à Toronto, à Hamilton. J’ai conduit des clients jusqu’à Windsor. Il existe en outre un énorme obstacle systémique, quand même celles dont le cas est considéré prioritaire... Les centres d’aide aux victimes d’agression sexuelle ne semblent pas juger ces cas comme étant prioritaires. Le système en place ne semble pas répondre aux besoins réels des victimes.
L’un des obstacles systémiques tient à ce qu'il est difficile de démontrer que ces femmes ont vraiment été victimes de crimes odieux, ce qui retarde le traitement des demandes. Cela prend du temps. Certaines personnes ont essuyé un refus, et s'il y a processus d’appel, cela prend encore beaucoup plus de temps. Nous devons alors les placer en dehors de la région, leur trouver un refuge qui offre un soutien transitoire, ce qui les victimise encore plus.
Nous leur permettons d’avoir un logement une fois qu'elles ont franchi toutes les étapes. Le système n’est pas encore en place. Les survivantes de la traite de personnes continuent d’être victimisées et stigmatisées même une fois qu'elles en sont sorties.
Ces refuges offrent-ils des logements de transition spéciaux pour les survivants de la traite de personnes?
Le Native Women’s Centre de Hamilton est un organisme auquel nous avons eu accès et qui nous a beaucoup aidés. Il offre un programme sur la traite de personnes appelé « Healing Sisters ». C’est un endroit sur lequel nous pouvons compter pour obtenir de l'aide dans notre région.
En quoi diffère-t-il des autres modèles? S'il donne de bons résultats, comment l’appliqueriez-vous à l’échelle du pays?
Il existe différents modèles, mais notre communauté a besoin d’un modèle durable, qui n'investisse pas seulement dans des constructions et qui permette aux victimes d'avoir leur propre place, leur foyer, un petit coin bien à elles où elles pourront organiser leur vie en toute sécurité. Je ne pense pas qu’un programme officiel de soutien à la transition ou un système de refuge soit la solution pour bon nombre d'entre elles. Pour sortir complètement de leur ancienne vie et en entamer une nouvelle, elles ont besoin d'avoir leur propre place, un endroit où elles ne seront pas seulement en mode survie. Cela fait partie de l'inévitable cheminement vers la guérison.
Il faut plus de soutien, plus de coordonnateurs de transition, d'organismes comme la nôtre et comme ceux présents ici pour trouver les fonds et obtenir de l'aide de travailleurs sociaux qui sont en mesure de négocier avec les propriétaires.
Il faut en outre éliminer certains obstacles auxquels nous nous heurtons dans la région de Halton pour obtenir ces fonds qui répondent aux besoins des nombreuses personnes vulnérables. Ce genre de modèle fonctionnera, parce que beaucoup de femmes ne veulent pas vivre dans ces refuges qui sont traumatisants pour elles.
Il ne me reste qu’environ une minute, mais j'ai une question qui a été soulevée lors de notre dernière réunion, et Megan, vous avez mentionné que nous devons commencer par empêcher que cela se produise.
L’un des programmes que vous dirigez est Male Ally Network. Pouvez-vous nous en parler rapidement?
Le Male Ally Network est un programme qui vient en aide aux jeunes garçons et qui leur enseigne ce qu’est la violence fondée sur le sexe. Comment enseigne-t-on aux garçons ce qu’est la masculinité positive? Comment leur enseigner ce qu’est une masculinité toxique? Ces discussions devraient avoir lieu à un âge beaucoup moins avancé.
La première fois que nous avons demandé à bénéficier de ce programme, nous avons fait appel à Trillium; c'était en vue de répondre à des besoins au niveau de l’école secondaire. Puis nous avons constaté qu'il fallait intervenir non seulement au secondaire, mais à partir de la cinquième année, parce qu'en cinquième année — ils n’ont que 10 ans — les garçons commencent à faire des attouchements non désirés sur les petites filles. Ces discussions devraient même avoir lieu à un âge encore moins avancé.
Bien que ce programme ne soit en place que depuis trois ans, il donne d'excellents résultats. Nous avons constaté que les garçons qui sont témoins de tels actes d’intimidation les dénoncent et qu'ils ont appris à considérer les femmes et les jeunes filles avec respect. Nous avons assisté à un virage culturel complet dans certaines écoles. Dans notre collectivité, nous avons aussi les tables rondes du Male Ally Network où les chefs de file discutent de la création d'un espace sécuritaire pour les jeunes garçons. Ces chefs de file qui servent de modèle pour de nombreux garçons sont des services de police, des services d'incendie et membres de notre communauté politique.
C’est excellent. Merci beaucoup.
Nous avons légèrement dépassé le temps qui nous était alloué. Passons à Kellie Leitch.
Kellie, vous avez sept minutes.
Merci, madame la présidente.
Merci à toutes les personnes qui ont pris le temps de venir nous faire un exposé.
Donna, vous avez commencé à nous parler de certaines de vos recommandations qui, à mon avis, cadrent très bien avec la transition vers de véritables foyers pour femmes. Pourriez-vous nous en parler un peu?
Comme nous le savons tous, l’actuel ministre des Finances a lancé un test de stress. Comment cela s'est-il produit, je n'en sais trop rien.
À propos des achats de plus de 750 000 $, la région du Grand Toronto, de Toronto à l’autoroute 9, à l’est de l’autoroute 412 et à l'ouest à Hamilton, à Vancouver et à Montréal, aucun test de résistance n'est requis pour un achat de moins de 750 000 $. Éliminez-le. Aucun achat de moins de 500 000 $ dans les autres secteurs en dehors de ces centres ne devrait faire l'objet d'un test de résistance.
Ce ne sont pas des voeux pieux, ce sont des besoins. Il faut parler à certains promoteurs pour connaître les coûts réels liés à la construction de logements, à l'achat de terrains offrant des services ou à l'achat d'une maison.
J’ai fait des comparaisons. En ce moment, on nous dit que ce test de résistance va aider les gens dans l’avenir. En fait, il fait du tort à plus de femmes que vous ne pouvez l’imaginer.
Je vais maintenant revenir sur la question du statut d’employé occasionnel. La plupart des gens oeuvrant dans le système de santé semblent être des femmes préposées aux services de soutien, des infirmières autorisées et des infirmières auxiliaires. Le vieillissement de la population dans ces domaines et l'absence d’équipement nécessaire pour soulever de lourdes charges à l'époque font en sorte que la condition physique de ces femmes s'est considérablement détériorée.
Pour les protéger, nous avons mis en place des règles susceptibles d'attirer de nouveaux employés dans ces secteurs — les soins de longue durée et autres domaines spécialisés —, mais ces derniers ne peuvent remplacer toute une population vieillissante de travailleurs à la santé déclinante. En fait, il y a tant de personnes en situation d'invalidité de courte durée que les employés occasionnels travaillent 40 heures par semaine toute l’année pour compenser l'absence de travailleurs qui prennent des vacances de huit semaines ou qui reçoivent des prestations d’invalidité de courte durée. Et vous savez quoi? Ces femmes ne peuvent pas s'acheter de maison. Elles doivent continuer à travailler à ce rythme pendant deux ans avant que leur revenu moyen ne leur permette d'obtenir un prêt hypothécaire.
Ma première recommandation, connaissant bien ce secteur de l'industrie, est d'exiger six mois de travail continu à raison de 40 heures par semaine pour être admissible à un prêt hypothécaire de 500 000 $ et moins, et ce, sans exiger de test de résistance.
Je vais vous interrompre encore une fois pour revenir à ce que Megan Walker et Alma Arguello ont mentionné tout à l’heure, je crois, mais aussi pour aborder un sujet que Marilyn Ruttan a mentionné.
Vous avez notamment demandé si nous avions des gens qui pouvaient aider ces femmes à faire la transition. Elles ont un refuge, mais elles veulent leur propre maison ou simplement pouvoir faire la transition, mais elles n’ont pas nécessairement les compétences et certainement pas l’aide nécessaire pour y arriver.
Marilyn, vous avez mentionné qu'il fallait vraiment sensibiliser les agents immobiliers à ces questions.
Ma question s’adresse à vous, Megan, ainsi qu’à Alma et Marilyn. Quelles professions devons-nous sensibiliser et que devraient faire les gens de cette profession pour y arriver? C’est une chose d’aller former un groupe de fonctionnaires, mais je pense en fait que si nous habilitons et encourageons le secteur à participer, il pourrait assumer une certaine partie des responsabilités et être en mesure d’aider certaines de ces femmes.
Puis-je répondre à cette question en premier?
Il ne s'agit pas de cibler une profession en particulier. Nous sommes aux prises avec une crise énorme et nous devons offrir à tous l’éducation et les possibilités de venir en aide aux femmes. Qu’il s’agisse de l’industrie hôtelière, de l’industrie du taxi, du secteur des soins de santé, du secteur immobilier ou de quelque autre secteur, nous devons nous assurer que tout le monde sait comment réagir lorsqu'une femme victime de traite se présente devant eux. C’est toujours une question de choix.
Lorsqu'une femme est victime de la traite, sous le joug de proxénètes — toute sa vie, parfois — et qu’elle décide de s’en sortir, elle ne devrait jamais se heurter à une mauvaise porte. Toutes les portes de sortie devraient lui être favorables, et elle devrait pouvoir choisir de recevoir des services dans sa collectivité d’origine, dans une autre collectivité ou en toute sécurité chez elle.
Évidemment, comme tout le monde, je suis tout à fait favorable à ce que les femmes soient propriétaires de leur maison. En revanche, je peux vous dire que parmi les quelque 6 000 femmes à qui nous avons offert des services l’an dernier, aucune n'avait les moyens d'acheter une maison de 500 000 $. En fait, la majorité des femmes que nous desservons ont de la difficulté à arriver avec 1 300 $ de loyer à verser par mois, si elles ont des enfants à charge et bien d'autres responsabilités. Je pense qu'il est important de s'arrêter, ne serait-ce qu'un moment, pour réfléchir à tout cela...
Megan, je vais vous interrompre, parce que, si je comprends bien, nous disons essentiellement la même chose.
Ce que je dis, c’est qu'aucun secteur particulier n'a besoin de formation; ce qui importe, c'est que les Canadiens et les collectivités à l'échelle nationale comprennent les enjeux.
Ce n'est certainement pas moi qui discuterai de ce point avec vous. Je pense que ce que les gens tentent d'exprimer, ici du moins, c'est que nous avons besoin de recommandations très précises qui nous permettront d'aller de l’avant. Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que tout le monde devrait être sensibilisé à ces questions et faire sa part, mais à l'impossible, nul n'est tenu. Nous devons nous concentrer sur certaines choses, et des recommandations précises en ce sens nous seraient très utiles.
Puis, d’après ce qu'ont dit Marylin et Donna, je crois... Si je leur ai demandé de venir témoigner, c’est parce que nous encourageons les femmes à aller de l'avant et à louer un appartement, et si toutes ces politiques qui les empêchent de posséder leur propre maison étaient éliminées, elles pourraient peut-être s’engager dans cette voie.
Je vais vous faire une recommandation précise, à savoir qu'il faut changer la culture en sensibilisant les jeunes — nous le faisons dans notre collectivité dès la maternelle — à l'importance des femmes et en leur enseignant que les hommes ont le devoir de les soutenir.
Avec tout le respect que je vous dois, je ne vais pas faire changer d’avis une personne adulte qui a tout un vécu derrière elle, mais j’ai la possibilité d'amener les jeunes à changer d'avis. Franchement, je ne veux pas parler de biens immobiliers et de maisons à 500 000 $. Je veux investir dans l’éducation pour que tous les enfants du pays apprennent les mêmes choses en même temps, à partir de l’âge de cinq ans, et ces investissements concernent également la traite de personnes, la violence entre partenaires intimes, et tout le reste.
Merci, madame la présidente.
Il y a beaucoup de sagesse dans vos propos et nous nous inspirerons de vos témoignages.
Ma première question s’adresse au London Abused Women’s Centre. Lors de notre dernière rencontre, nous avons entendu le témoignage du Centre de ressources et de crises familiales Beauséjour. On nous a dit au bout du compte, que les intervenants ne peuvent pas faire leur travail efficacement s'ils n'ont pas un financement de base.
Pouvez-vous me dire si votre groupe, qui est très efficace, ressent aussi cet obstacle? En ce qui concerne le financement actuel de Condition féminine Canada, plus précisément, on nous dit qu’il demeure concurrentiel et spéculatif, et que les groupes de femmes consacrent beaucoup de temps à faire des demandes et qu’elles se font peut-être concurrence les unes les autres, et que la situation devient précaire. Pouvez-vous nous dire comment cela fonctionne pour vous?
Nous avons beaucoup de chance à London, et en Ontario en général, je crois, car de nombreux organismes y sont établis... Je dis cela avec tout le respect que je dois à Jayce, parce que son organisme ne compte pas sur un financement de base, contrairement au nôtre, même si nos fonds ne proviennent pas entièrement de sources gouvernementales. En fait, environ 35 % de notre financement provient de dons effectués par des résidents de London, mais nous savons que nous sommes très chanceux et que la plupart des organismes n’ont pas cet avantage. Pour moi, c'est simple comme bonjour: quand le sort des femmes vous tient à coeur, vous vous arrangez pour financer adéquatement les organismes qui les servent et qui pourraient leur sauver la vie.
Ensuite, vous avez parlé de Condition féminine Canada. Je peux vous dire que notre organisme, qui existe depuis 35 ans, est très déçu de ce qui se passe à Condition féminine, surtout compte tenu des fonds supplémentaires qui lui ont été accordés. La plupart des appels d'offres portent sur des sujets comme l’élaboration de politiques ou la collaboration avec des organismes d’un bout à l’autre du pays sur la meilleure façon d’offrir des services. Franchement, je ne veux pas réinventer la roue. Nous savons déjà ce qui fonctionne le mieux. Je pense que si vous interrogiez l’un quelconque des organismes ici présents au sujet des politiques et des pratiques exemplaires, vous verriez que nous les connaissons déjà. Nous n’avons pas besoin d’autres études. Franchement, ce qu'il nous faut, c'est de l’argent.
Nous sensibilisons davantage le public à ces problèmes importants qui touchent les femmes, et chaque fois que nous le faisons, nous recevons plus d’appels. Nous devons nous assurer que toutes les femmes ont accès aux services sur-le-champ, car elles ont le droit de vivre et de vivre à l’abri de la violence et des mauvais traitements. Nous laissons tomber ces femmes si nous ne pouvons pas les servir.
Merci beaucoup. C’est ce que nous entendons souvent. Plus on sensibilise les gens, plus les gens demandent de l’aide. Ce qui est tragique, c'est lorsque les femmes se font dire qu’elles sont sur une liste d’attente et que l'on communiquera avec elles plus tard.
En fait, les femmes ne peuvent pas attendre, parce que leur vie change d’heure en heure. Elles ne peuvent pas attendre trois mois pour qu'on les rappelle. Elles ignorent où elles seront dans trois mois.
Ma prochaine question s’adresse à Windsor-Essex Transgender and Allied Support. Nous avons pris des engagements très audacieux lors de la dernière campagne électorale. Le gouvernement avait promis d'offrir « un plus grand soutien aux victimes de violence conjugale, d’agression sexuelle et de harcèlement sexuel, » et de veiller « à ce que davantage d’agresseurs soient traduits en justice ». Ce que vous nous dites, c’est que les femmes trans ont été exclues de la donne. Pouvez-vous préciser?
Il s'agit des personnes trans en général. L'industrie du sexe est l’une des principales formes de travail dans le milieu trans, alors ce que nous constatons, c’est que les personnes trans vivent avec un revenu annuel inférieur à 15 000 $. Elles ne peuvent même pas rêver d'avoir une maison. Le rêve, c'est simplement d'avoir un endroit où dormir ce soir.
Bien souvent, la violence sexuelle n’est pas du tout signalée dans notre milieu, parce que l'on sait que ce sera un agent de sexe masculin qui répondra à l'appel. De plus, où vais-je rencontrer cet agent? Probablement dans mon centre communautaire, parce que c’est le seul endroit où on ne craint pas de divulguer sa véritable identité sexuelle. J'ai subi un traumatisme sexuel au début de ma transition, lorsque je travaillais dans l’industrie du sexe. Je me souviens d’avoir rencontré l’agent et de me faire dire que ce n'était pas tellement mon corps, mais plutôt mon amour-propre qui avait été meurtri. C'est ce genre de message que l'on réserve habituellement à la communauté trans.
Il ne faut pas oublier que les chirurgies trans ne sont toujours pas financées par le gouvernement et sont considérées comme des opérations esthétiques. Beaucoup se voient obligés de travailler dans l'industrie du sexe pour pouvoir payer pour ces chirurgies afin de vivre selon leur véritable identité et sans dysphorie, surtout dans une ville de cols bleus comme Windsor-Essex. C’est le seul moyen de s'en sortir. On ne peut pas obtenir un emploi chez Tim Hortons et être une personne trans à moins d’avoir quelqu’un pour défendre ses intérêts.
Des promesses ont-elles été faites? Oui. Est-ce que les grandes villes en profitent? Oui.
Nous gérons le seul centre transsexuel au Canada. Nous faisons des promesses que nous ne pouvons pas tenir quand les gens viennent nous demander ces services. Que pouvons-nous leur offrir d'autre que de travailler au sein d'un système qui nous laisse tomber au départ?
Merci.
Ma question s’adresse à Eva’s Initiatives for Homeless Youth. La recommandation unanime du Comité, il y a un an et demi, était la suivante:
Que le gouvernement du Canada assure un meilleur accès aux refuges (notamment par le financement, l’augmentation du nombre de places et de l’accessibilité) et aux ressources juridiques pour les jeunes femmes et les filles sans-abri ou risquant de le devenir et qui sont des survivantes de violences sexistes.
Avez-vous constaté des améliorations sur le terrain dans l'année et demie qui s'est écoulée depuis que cette recommandation a été formulée?
D’après notre expérience, nous n’avons pas vu ces avantages. Sans aller plus loin, ces six derniers mois nous avons dû faire appel à des bénévoles pour nous prévaloir de services juridiques. Nous avons présenté plusieurs demandes de financement, sans résultat. L’accès au financement fédéral continue de nous échapper, et Eva’s Initiatives n'est pas le seul organisme dans cette situation; il y a d’autres refuges pour jeunes.
On parle de prévention et d’éducation. Nous avons entendu plus tôt que la prévention doit commencer à un âge beaucoup plus précoce. Je parle d’éducation, et je parle d'insister sur celle des garçons, les hommes de demain. J’ai des jeunes des deux sexes, de 16 à 24 ans, qui vivent à Eva’s. Ils interagissent. Nous voulons leur offrir les services et le soutien dont ils ont besoin pour les rééduquer, changer leur cadre de référence et leur façon de voir les choses; changer le registre et les expériences à venir, comme on l’a dit tout à l'heure, mais nous ne sommes tout simplement pas équipés pour le faire. Nous continuons de lutter pour obtenir le financement nécessaire.
Je tiens également à souligner que lorsque nous avons eu la chance, parfois, de travailler avec la police lorsqu'une jeune femme décide de porter des accusations d’agression, ça a été loin d'être évident. Essayer de s’asseoir avec une jeune femme qui est passée par ce processus et qui n’obtient pas ce dont elle a besoin, ce qui est très simple, à savoir que sa cause soit reconnue et...
[Français]
Merci, madame la présidente.
Je vais poser quelques questions en français.
Tout d'abord, je vous remercie beaucoup de votre témoignage, car il nous aidera grandement dans la rédaction de notre rapport.
On a parlé de logement temporaire ou de transition pour une journée ou pour une semaine, ce sur quoi porte notre étude. J'aimerais que vous formuliez des recommandations sur les deux éléments suivants.
Premièrement, il semble y avoir une crise. On a dit qu'il devait y avoir plus de logements de ce genre, ce qui signifie qu'il faut plus de capital. Comment pourrait-on construire, en partenariat avec le secteur privé, d'autres logements de transition ou temporaires?
Deuxièmement, Condition féminine Canada a annoncé une somme de 100 millions de dollars additionnels pour des programmes. Dans quels programmes devrait-on investir en priorité cette somme additionnelle de 100 millions de dollars?
Je demanderais aux témoins des trois organisations de formuler des recommandations sur ces deux éléments, soit le capital et les programmes.
[Traduction]
Le gouvernement a déjà reconnu que les foyers d’accueil et les foyers de groupe peuvent poser des risques pour les personnes qui y vivent.
L’un des éléments de notre programme à Halton, c’est que nous voulons créer un centre de crise et des maisons de transition pour que nos clientes puissent déménager si jamais elles sont retrouvées. Étant donné que Halton est en plein essor, nous recommandons que chaque fois qu’il y a une nouvelle construction, la ville s'arrange pour obtenir un certain nombre de loyers à l’intérieur de cet immeuble afin de les attribuer à des locaux de transition. À l’heure actuelle, nous constatons qu’on ne veut pas louer des logements à des tiers. C’est l’un de nos principaux obstacles.
Si les gens construisent, nous recommandons que des places soient réservées aux logements de transition.
Une autre recommandation serait... Il y a eu des fonds pour améliorer la capacité. On les a eus de part et d'autre, garanties comprises, mais les petits organismes ont été exclus. Nous sommes le seul organisme de la région de Halton qui aura un centre de crise. Cela signifie que nous n’avons qu’un seul lit entre Peel et Hamilton, un seul.
Un organisme comme le mien n'a pas les moyens d'augmenter la capacité. Nous n’avons pas les capitaux nécessaires, ce qui nous ramène à la nature systémique de la situation: il y a le système et il y a le blocage. Nous ne pouvons pas aller de l’avant, alors nous devons miser sur les partenariats avec les organismes plus importants. Parfait, nous le faisons, mais nous devons dès lors nous en tenir aux modalités, politiques et procédures de l’autre organisme, qui excluent les gens et ne suivent pas nécessairement un modèle féministe intersectionnel. Ça fait mal.
Nous en sommes au point où nous essayons de travailler avec la région pour voir si nous pouvons présenter une proposition et obtenir de l’aide de ce côté-là, mais nous devons songer à l’intégrité des gens que nous essayons d’aider. Nous croyons qu’un programme éparpillé est préférable, parce qu’il est offert dans la collectivité et reçoit tout de même le soutien.
Madame Costa, avez-vous quelque chose de précis à dire sur les priorités en matière d’immobilisations et de fonctionnement?
Absolument.
Pour nous, c’est le logement supervisé qui compte. Nous n’avons pas accès à ces fonds. Notre centre de 50 lits, qui est un modèle de maison en rangée, est un logement supervisé. Nous pouvons leur offrir du soutien dans une certaine mesure, mais c'est loin de suffire aux besoins des jeunes femmes qui vivent ces expériences.
Aussi, comme on dirait que les maisons d’hébergement pour les jeunes ne figurent même pas sur la carte, il est rare qu'on nous donne l'occasion d'ajouter un lit pour ce genre de clientèle.
Par ailleurs, si une jeune femme se présente à Satellite, qui est un refuge pour la réduction des méfaits, et qu’elle est en crise et que son petit ami ou son partenaire sait qu’elle y est venue, je n’ai nulle part d’autre où envoyer cette jeune femme. Non seulement je la mets en danger, mais j’y expose aussi les autres jeunes qui se trouvent dans ce refuge.
C’est une bataille perdue d’avance. C’est un peu comme si je faisais de la redistribution... J’appelle des endroits pour essayer de voir s’ils peuvent faire venir un de leurs jeunes chez nous afin que je puisse y envoyer une de nos jeunes femmes à la place.
Voilà le genre d’expériences que nous avons vécues.
Nous établissons régulièrement des partenariats avec le secteur privé. Nous utilisons l’argent du secteur privé pour que les femmes et les enfants aient accès aux services sur-le-champ.
Les entreprises de nos villes partout au pays sont très généreuses, mais elles veulent souvent obtenir des fonds de contrepartie. En fait, la plupart de celles avec lesquelles nous travaillons veulent que le gouvernement contribue au moins 60 % des fonds pour les dépenses en capital, ce qui n’est pas toujours le cas.
Je recommande expressément à Condition féminine Canada de débloquer des fonds, et pas seulement pour les dépenses en capital. Inutile de construire le plus beau bâtiment au monde si ensuite on n'a pas les fonds nécessaires pour embaucher du personnel. Les dépenses de fonctionnement doivent être financées, tout comme les dépenses en capital.
En ce qui concerne la traite des personnes, les femmes qui en sont victimes subissent un traumatisme inqualifiable. Bon nombre de ces femmes et de ces filles vont et viennent. Elles nous quittent pour revenir. Elles ont besoin de services différents à différents moments. Or, un aspect que nous constatons invariablement, c’est que même si personne ne veut vivre dans un établissement, ces femmes et ces filles tiennent à avoir un endroit sûr où vivre pendant qu’elles s'efforcent de guérir. Cela signifie vivre avec d’autres femmes et filles qui ont vécu des expériences semblables tout en ayant accès à des programmes.
Enfin, très rapidement, je pense que le gouvernement doit cesser de travailler en vase clos. Les questions dont nous parlons aujourd’hui ne concernent pas seulement Condition féminine Canada. Il ne s’agit pas seulement de la santé et de la sécurité des collectivités, et tant que nous n’aurons pas réussi à amener ces ministères à s’entendre sur une solution, nous en serons toujours au même point d'ici 10 ou 20 ans.
Je veux simplement dire qu’il faut qu’il y ait de l’espoir pour les hommes dans la quarantaine et la cinquantaine, alors n’importe quelle recommandation...
Je ne pourrais pas faire ce travail si je n’avais pas d’espoir, mais je peux vous dire qu’il est beaucoup plus facile d’éduquer les enfants que les hommes dans la quarantaine ou la cinquantaine.
[Français]
[Traduction]
C’est très bien.
Nous allons maintenant passer à notre deuxième tour.
Nous commencerons par Rachael Harder, pour cinq minutes.
C’est formidable. Merci beaucoup.
Tant de questions, si peu de temps. Allons-y.
Donna et Marilyn, vous pouvez décider laquelle d’entre vous veut répondre à cette question. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit qu’il fallait un programme expressément conçu pour les femmes. Pouvez-vous nous dire à quel point il est important pour les femmes d'avoir une maison, comme vous y faisiez allusion dans vos commentaires.
C’est un sujet que de nombreux témoins ont touché aujourd’hui, c'est-à-dire que les refuges jouent très certainement un rôle, et ce sont eux qui sont les premiers à accueillir les femmes et à assurer leur sécurité, mais au bout du compte, nous voulons qu'elles s'arrangent pour devenir complètement indépendantes, que ce soit sur le marché locatif ou sur le marché de l’achat.
Nous avons essayé de trouver des programmes auxquels on n’a pas accès. Ces femmes ne les connaissent pas.
Il y en a un actuellement avec la SCHL qui donne la mise de fonds pour une maison. Si on vend la maison dans les 20 premières années où on est propriétaire, il faut rembourser la mise de fonds. Si on la garde plus de 20 ans, on est dispensé de rembourser la mise de fonds.
Il y a tellement de programmes que ces femmes qui sortent de la phase deux au refuge ne sont probablement même pas au courant. Si on pouvait offrir un programme de mentorat pour former les agents et courtiers immobiliers et les sensibiliser aux besoins de ces femmes, ceux qui choisiraient de le suivre pourraient leur venir en aide. Ce n’est peut-être que 20 % des femmes qui concluraient la deuxième phase de la sorte, mais cela voudrait dire qu'elles laisseront la place à 20 % qui pourront dès lors passer de la première à la deuxième phase.
Cela ne pourra pas se faire partout. Il y a évidemment des régions où les abus sont beaucoup plus graves que dans le comté de Simcoe.
Le comté de Simcoe a mis sur pied de nombreux programmes pour aider une femme à s’y retrouver si elle veut acheter une maison. En même temps, la SCHL lui donne quelque chose d'une main et elle le lui enlève de l'autre en disant qu’il y a des restrictions à l’obtention d'une hypothèque. Nous ne pouvions même pas aborder la question. Donna a proposé la suppression de certaines restrictions pour que ces femmes soient admissibles à une hypothèque avant qu’elles se présentent à ma porte et que je commence à leur montrer des propriétés.
Sans vouloir manquer de respect pour quiconque voudrait une maison de 500 000 $, nous devons tenir compte de la réalité et des coûts de loyer auxquels ces femmes sont confrontées lorsqu’elles quittent la deuxième phase de la transition.
Si nous voulons qu’elles réussissent, nous devons leur donner les moyens de payer leurs propres factures. C’est le gage de l'autonomisation des femmes aujourd’hui. Elles veulent payer leurs frais, acheter leur propre nourriture et pouvoir subvenir aux besoins de leurs enfants. C'est ce qui donnera à la femme le plus grand sentiment de sécurité possible dans le monde d’aujourd’hui.
Si les loyers sont semblables à ce que serait le paiement hypothécaire, quelle meilleure façon d’autonomiser une femme que si elle n’a pas à craindre de devoir déménager tous les deux ans parce qu’un propriétaire veut vendre? La maison peut également lui apporter des profits si elle la vend, compte tenu de la façon dont l’immobilier a pris de la valeur. Nous cherchons à assurer cette sécurité. Les politiques en place à l’heure actuelle sont tellement contradictoires que les femmes hochent la tête et se demandent quoi faire.
Pour ce qui est de construire plus de centres, oui, nous avons certainement besoin de plus d’espaces de transition de première phase. Nous ne pourrions jamais en construire assez pour répondre aux besoins actuels. Nous devons commencer à mettre en place des programmes qui relient les femmes et les aident à sortir du statut de transition à la phase deux, des programmes qui leur assurent la sécurité dans leur propre maison.
Nous avons la Société canadienne d’hypothèques et de logement, dont le mandat est de loger tous les Canadiens. Les femmes sont les victimes de discrimination numéro un.
Je reviens au statut d’employé occasionnel. J’ai inclus des exemples concrets dans notre rapport que nous voulons déposer. Ils sont là pour que vous puissiez en prendre connaissance.
Je sais qu’on va me couper la parole avant que je puisse finir de vous donner toute cette information.
J’ai fait le calcul. Le Canada a beau être un pays endetté... je suis très contrariée par ce que vous faites aux femmes. Nous avons un gouverneur de la Banque du Canada qui dit que nous ne pouvons pas tous gérer nos chéquiers, et notre ministre des Finances pense que nous ne pouvons pas sortir avec un chéquier parce que nous ne savons pas où dépenser notre argent.
Imaginez une femme qui a une limite d’approbation de 5 000 $ et qui s’est servie de sa seule carte Visa pour payer son premier et dernier mois de loyer afin de pouvoir quitter une relation de violence, mais qui a dépassé sa limite de 100 $ sur sa carte de crédit. Tout ce qu’elle entend, c’est que tout le monde est stupide au Canada et ne peut pas gérer son argent. Va-t-elle se sentir à l’aise à l'heure de devoir poser des questions à son institution financière? Pas du tout.
Voilà qui nous ramène à la question de la sensibilité. Les courtiers hypothécaires se formeront pour cette spécialité ou en feront partie. Je suis prête à faire le tour du Canada pour que les femmes sachent qu’il y a un endroit où aller et qu’elles ne se sentent pas intimidées ou moins dignes que la moyenne, pour poser des questions et obtenir des renseignements cohérents qui leur permettront de prendre une décision financière éclairée.
Excellent. Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à notre dernière série de questions, avec Bob. Bob, vous avez cinq minutes.
Merci beaucoup.
On a dit que les ministères travaillent en vase clos, et c’est vrai, mais il en est tout autant entre les divers ordres de gouvernement.
Lors d’une réunion précédente, j’ai parlé des logements municipaux. Ma première expérience à titre de conseiller municipal a été de faire du porte-à-porte dans des logements appartenant à la ville, de regarder par les portes et de voir comment les gens vivaient, ce qui a immédiatement élevé ma priorité, même si j’avais 60 ans à l’époque, aux femmes célibataires, âgées et vulnérables.
De plus, dans ces logements subventionnés par les villes, des femmes étaient victimes de trafic et de la drogue était vendue. Il s'y passait toutes sortes de choses. La sécurité des immeubles était ridicule. Il y en avait un de 200 logements — je pourrais vous donner l’adresse —, où il suffisait de placer son pouce dans la serrure et le tourner pour ouvrir la porte. Les gens allaient et venaient toute la nuit. Cela m’a vraiment bouleversé.
Nous avions aussi un refuge confessionnel, ce qui était vraiment terrible. Quelqu’un m’a arrêté pour demander des changements. J’ai dit: « Pourquoi n’y allez-vous pas personnellement? » Il a dit: « Vous plaisantez? Aller là-dedans, c'est se faire tuer. » La ville a fini par régler le problème en supprimant les lits, en fermant ce refuge, et en trouvant un logement salubre, sûr et durable pour tout le monde. C’était tout un projet à Hamilton. Joe-Anne Priel était à la tête de ce projet. Vous voudrez peut-être en parler avec elle.
Madame Walker, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
Tout d’abord, j’ai aussi été conseillère municipale et j’ai été élue pour la première fois en 1994. J’ai fait campagne sur le thème du logement abordable et des droits des femmes à l’égalité. Vingt-cinq ans plus tard, je défends toujours les mêmes causes.
Il est facile de dire qu’il faut une plus grande collaboration entre tous les ordres de gouvernement. C’est beaucoup plus difficile à faire, parce que chaque ordre a ses propres politiques et règles en matière de gouvernance et de législation. Il est beaucoup plus facile pour nous de travailler au sein du système fédéral et d’éliminer le cloisonnement afin de comprendre l’impact des investissements financiers sur la vie des femmes qui vivent dans la pauvreté.
Quand je travaille avec des femmes et qu’elles vont dans un refuge, c’est la meilleure chose qu’elles puissent faire pendant les six ou huit premières semaines, car cela leur donne suffisamment de sécurité et de temps pour obtenir un soutien juridique et familial et pour aller chercher un appartement à louer ou trouver une stratégie de logement, mais quand nous mettons tous les logements subventionnés dans un seul endroit, nous stigmatisons quiconque y vit, et nous laissons tomber les femmes. C’est l'approche que notre pays a toujours suivie.
Ce que je dis, c’est que nous avons besoin de logements abordables. Il faut légiférer pour que chaque promoteur qui construit un immeuble mette de côté un certain nombre de logements abordables afin que toutes les femmes puissent avoir accès à des services partout au pays et que leurs enfants puissent aller à l’école et vivre leur vie, en servant d'exemples à d’autres enfants.
Nous ne faisons que ghettoïser les femmes en ce moment, et quand vous nous demandez ce que nous allons faire et comment nous comptons nous y prendre, nous devons vraiment établir une loi du point de vue de la femme d’abord — quelque chose qui ne concerne pas le patriarcat, qui ne vise pas à avantager les hommes, mais qui profitera vraiment aux femmes, quelle que soit la façon dont elles s’identifient comme telles.
D'accord.
Madame Beaudin-Carver, une autre expérience que j’ai eue, c’est que j’ai siégé comme représentant du conseil à notre sous-comité sur la communauté LGBTQ. Cela m’a également ouvert les yeux. Je pense que beaucoup d’entre nous avons besoin de mieux comprendre les enjeux dont vous parlez. J’ai découvert que de nombreux enfants vivent dans la rue parce que leurs parents les mettent à la porte pour des motifs sexospécifiques.
Ce que je sais, c’est qu’on nous a offert la possibilité de travailler avec la ville de Windsor dans le cadre d’un protocole d’entente pour faire partie de la liste des priorités par nom, qui, dans notre collectivité, est le seul point d’accès pour les personnes sans-abri.
Le premier jour où nous nous sommes produits en direct, 10 jeunes sont venus nous consulter à ce sujet. C’est le premier jour où nous sommes entrés en service. La majorité des services que nous offrons sont destinés aux jeunes transgenres, mais nous considérons l’itinérance comme un problème qui ne les touche pas exclusivement. Les gens qui, disons, ont dépassé l’âge de la retraite et qui commencent à faire la transition, qui sont mariés depuis longtemps, sont maintenant déplacés en raison d’une transition plus tardive et voient leur mariage se dissoudre. Ils se retrouvent sans emploi, à faible revenu et sans accès à un logement abordable.
Ce n’est pas seulement une question qui concerne les jeunes, mais quatre fois plus de jeunes aujourd’hui sont susceptibles de s’identifier comme faisant partie des personnes trans plutôt que comme des lesbiennes, des gais ou des bisexuels. Les problèmes liés aux transgenres sont beaucoup plus fréquents aujourd’hui que les gens n'imaginent.
C’est fantastique.
Tout d’abord, je m’excuse de tous les retards que nous avons eus aujourd’hui. J’ai essayé d’être un peu plus accommodante parce que la conversation a été si incroyable avec tous les témoins aujourd’hui. Au nom du Comité, j’aimerais vous remercier Megan, Jayce, Donna, Marilyn, Grace, Alma et Tara de l’excellent travail que vous faites dans notre collectivité.
Je m'en veux de vous faire cela, mais nous allons devoir quitter la salle très rapidement. Les membres doivent consacrer environ huit minutes aux travaux du Comité.
Pourrions-nous avoir un adjoint par député et un membre de chaque parti, au besoin? Tous les autres peuvent quitter la salle. Nous allons sortir sous peu. Je suis sûre que beaucoup de députés aimeraient vous parler.
Merci encore une fois.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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