Je remercie le président, les vices-présidents et les membres du comité permanent de m'offrir l'occasion de témoigner aujourd'hui.
Je m'appelle Martin Luymes et je suis vice-président des Relations avec le gouvernement et les parties prenantes de l'Institut canadien du chauffage, de la climatisation et de la réfrigération du Canada, ou ICCCR. Ce dernier est une association de l'industrie canadienne du chauffage et de la réfrigération qui représente 1 300 compagnies membres, dont des fabricants de produits, des grossistes, des distributeurs et des sociétés contractantes de toutes les régions du pays.
Nos membres fournissent des produits et des services essentiels à la vie au Canada, gardant les maisons et les édifices chauds en hiver et frais en été. Nous offrons également des services essentiels de réfrigération, de ventilation et de gestion de la qualité de l'air et de l'énergie à un éventail d'entités commerciales et institutionnelles, comme des épiceries, des hôpitaux, des patinoires et des installations de fabrication de haute technologie.
L'industrie du chauffage, de la ventilation, de la climatisation et de la réfrigération génère annuellement plus de 7 milliards de dollars dans l'économie canadienne et emploie près de 50 000 personnes. À eux seuls, nos entrepreneurs membres emploient un éventail diversifié de personnes de métier, dont des spécialistes en réfrigération, des techniciens gaziers, des plombiers, des ouvriers spécialisés en tôlerie et des électriciens.
Je crois comprendre que votre comité a pour mandat d'étudier les possibilités économiques en matière d'efficacité énergétique du Canada et la contribution que cette dernière peut apporter afin de favoriser l'atteinte des engagements prévus dans l'Accord de Paris sur le climat.
Je dirai d'abord qu'à titre de membre de soutien d'Efficiency Canada, l'ICCCR appuie la position que cet organisme a énoncée lors d'une séance précédente, au cours de laquelle il a affirmé que les investissements concertés dans l'efficacité énergétique non seulement contribueront à l'atteinte d'une part substantielle des objectifs de réduction des gaz à effet de serre, mais stimuleront également la croissance économique et permettront de créer des emplois enrichissants au Canada.
Selon l'analyse d'Efficiency Canada, il se créera en moyenne 118 000 emplois chaque année d'ici 2030 en raison de l'activité économique découlant des investissements réalisés dans l'efficacité énergétique. Bon nombre de ces emplois seront créés dans le secteur du chauffage, de la ventilation, de la climatisation et de la réfrigération en raison de la mise à niveau des systèmes mécaniques des maisons et des édifices. J'ajouterais en outre qu'il s'agit principalement d'emplois hautement spécialisés et bien rémunérés qui seront créés dans toutes les régions du pays où vivent, travaillent et s'amusent les Canadiens.
À titre d'organisation, l'ICCCR et ses membres s'intéressent vivement à la promotion de l'efficacité énergétique depuis de nombreuses années. Bien entendu, le travail de nos membres consiste principalement à assurer une température ambiante intérieure confortable pour les Canadiens, mais la promotion de produits et de solutions d'efficacité énergétique est considérée de plus en plus comme une offre connexe intéressante qui se traduit par des économies financières pour les propriétaires d'édifice, par des réductions des émissions de carbone et, il appert, par une augmentation de profits de nos membres.
Contrairement à d'autres genres d'entrepreneurs en rénovation auxquels s'adressent les propriétaires d'édifice et de maison pour effectuer des mises à niveau planifiées afin d'améliorer l'efficacité ou autre chose, les entrepreneurs en chauffage, en ventilation et en climatisation ont l'occasion unique de déceler et d'exploiter des occasions d'amélioration de l'efficacité énergétique dont leurs clients n'avaient peut-être même pas conscience. Les entrepreneurs sont presque toujours appelés à corriger ce qui va mal ou ne fonctionne pas, mais en trouvant les solutions optimales afin de réparer ou de remplacer ce qui ne fonctionne pas, les entrepreneurs convenablement formés et motivés peuvent devenir des ambassadeurs de l'amélioration de l'efficacité énergétique, et les possibilités d'amélioration sont substantielles au Canada.
D'après Ressources naturelles Canada, le chauffage intérieur constitue la principale source de consommation d'énergie dans le secteur canadien du bâtiment, étant à l'origine de 64 % de la consommation d'énergie résidentielle et de 56 % de la consommation d'énergie commerciale. Selon l'analyse du ministère, si les meilleures technologies d'aujourd'hui étaient utilisées à plus grande échelle, la consommation totale d'énergie des maisons pourrait être réduite de 30 % et les émissions de gaz à effet de serre pourraient diminuer de 18 mégatonnes par année. Par ailleurs, entre 8 et 19 % de la consommation d'énergie des maisons et des édifices sont attribuables au chauffage de l'eau. Ici encore, si les meilleures technologies d'aujourd'hui étaient exploitées, la consommation totale d'énergie des maisons serait réduite de 5 % et les émissions de gaz à effet de serre diminueraient de plus de trois mégatonnes.
Que faut-il faire dans notre secteur pour concrétiser pleinement les avantages potentiels des investissements en efficacité énergétique? À l'évidence, il faut mettre l'accent sur les améliorations de l'efficacité des produits.
C'est un point auquel nos membres manufacturiers ont accordé beaucoup de temps et d'efforts. Dans le domaine de la mise à l'essai de produits et des normes de certification, l'ICCCR collabore depuis des décennies avec Ressources naturelles Canada, la plus récente collaboration visant à élaborer la modification 14 à la Loi sur l'efficacité énergétique, laquelle touche un grand nombre de produits de notre industrie. Notre organisation participe également aux échanges en vue de la prochaine intervention, soit la modification 15.
Je ferai remarquer ici que nos discussions relatives aux normes minimales en matière de rendement énergétique portent en priorité sur l'importance de l'harmonisation des règlements et des normes de mise à l'essai entre le Canada et les États-Unis. À cet égard, nous sommes satisfaits des progrès réalisés depuis 2011 sous les auspices du Conseil de coopération en matière de réglementation en ce qui concerne l'harmonisation des règlements entre Ressources naturelles Canada et le département américain de l'Énergie.
Il importe également pour nos membres manufacturiers de mieux harmoniser la réglementation et les normes entre les provinces et les territoires du pays. Il y a fort à faire dans ce domaine, mais nous sommes très encouragés par l'engagement pris récemment dans l'Accord de libre-échange canadien.
Il faudrait aussi s'employer à peaufiner et à améliorer le code du bâtiment. Cela peut se faire de bien des manières afin d'améliorer le rendement énergétique des maisons et des édifices. Ces améliorations concernent davantage l'enveloppe des bâtiments que les systèmes mécaniques, mais notre industrie entreprend des travaux novateurs en collaboration avec CanmetENERGY, par exemple, afin d'étudier les avantages des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation zonés.
Sachez toutefois que la plupart des technologies pouvant se traduire par des économies d'énergie et des réductions des émissions de gaz à effet de serre importantes sur le plan du chauffage et de la climatisation des maisons et des édifices existent déjà sur le marché, bien qu'elles ne soient pas courantes en raison de diverses formes de résistance du marché. Il faudrait donc déployer des efforts substantiels pour faciliter l'adoption de mesures clés afin de renverser ces obstacles au marché, des mesures qui figurent d'ailleurs dans la Feuille de route pour la transformation du marché de l'équipement écoénergétique dans le secteur du bâtiment. Ce document, approuvé lors de la conférence des ministres de l'Énergie et des Mines, en août dernier, est le fruit de consultations exhaustives menées auprès de Ressources naturelles Canada, des provinces, des territoires et des principales parties prenantes de l'industrie de notre secteur.
Le plan indique les domaines qui requièrent du travail au chapitre de l'investissement dans la recherche-développement et dans la formation afin de favoriser une transition harmonieuse vers une économie à faibles émissions de carbone, notamment en ce qui concerne les technologies de chauffage de l'espace et de l'eau. Parmi les initiatives énumérées dans la feuille de route figurent l'élaboration de codes, le soutien à l'adaptation de la main-d'oeuvre, la formation, les processus de démonstration de l'état de préparation des produits au marché et d'autres démarches, le tout visant à paver la route à l'acceptation des produits et services écoénergétiques à faibles émissions de carbone sur le marché.
La feuille de route pour la transformation du marché met l'accent sur des technologies précises de notre secteur qui recèlent un grand potentiel de réduction de la consommation d'énergie des édifices et de diminution considérable des émissions de carbone, du moins dans les régions du pays où les émissions du réseau de distribution d'électricité sont faibles. Il s'agit principalement de thermopompes électriques, notamment des pompes géothermiques et des thermopompes à air pour climats froids. Aucune de ces technologies n'est utilisée à grande échelle au Canada, et ce, pour un certain nombre de raisons importantes.
C'est notamment en raison des coûts en capital initiaux relativement élevés de ces systèmes, particulièrement dans le cas des pompes géothermiques, surtout en regard du prix des systèmes de chauffage dans les régions servies par le réseau de distribution de gaz naturel. Il y a aussi les préoccupations relatives au rendement des pompes à air dans les froids extrêmes et l'absence de procédures normalisées pour la mise à l'essai des thermopompes à air. En outre, les consommateurs sont peu sensibilisés aux technologies en question et les entrepreneurs, les ingénieurs concepteurs, les inspecteurs et les propriétaires d'édifice manquent de connaissances et de formation quant à ces produits.
Pour abattre les obstacles au marché, il faudra investir dans la recherche-développement et les mesures de développement de marché pour améliorer les produits et former la main-d'oeuvre nécessaire à l'installation et à l'entretien de ces produits. La recherche-développement doit notamment inclure des recherches afin de concevoir des thermopompes à air pour climats froids moins chères et des thermopompes hybrides ou biénergies, de réduire les coûts d'installation des boucles souterraines des pompes géothermiques, et d'élaborer une mise à l'essai des thermopompes à gaz en laboratoire et sur le terrain dans les climats canadiens.
Il faut également prendre un éventail de mesures sur le plan du déploiement sur le marché ou du développement de marché. Ces mesures incluent des projets de démonstration, l'élaboration de normes ou de critères de rendement canadiens afin de dresser la liste des produits autorisés en ce qui concerne les thermopompes, des plans de financement expérimentaux pour surmonter les préoccupations relatives au coût initial, et la conception de programmes de formation et de certification en matière de thermopompes destinés aux entrepreneurs et aux techniciens.
Dans ce court exposé, j'ai mis l'accent sur ces quelques technologies, car ce sont elles qui sont le plus susceptibles de devenir des technologies courantes, et donc de se traduire par des réductions supérieures de la consommation d'énergie et des émissions de carbone. D'autres solutions technologiques, comme les systèmes de réfrigérant à débit variable ou d'automatisation des bâtiments, ont de fortes chances de permettre des économies d'énergie dans les applications commerciales. Des recherches sont également en cours pour développer le marché des systèmes de microgénération de chaleur et d'électricité, et des thermopompes au gaz naturel.
En résumé, l'industrie du chauffage, de la ventilation, de la climatisation et de la réfrigération est prête à collaborer avec les gouvernements et les services publics pour contribuer à rendre le marché plus écoénergétique et à réduire les répercussions des émissions de carbone du chauffage de l'espace et de l'eau. En fait, nous nous intéressons à la question depuis longtemps.
Merci de votre attention.
Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir en temps opportun.
:
Ma présentation aussi sera en anglais et en français.
Je vous remercie d'avoir invité le Groupe de recherche en technologies de l'énergie et en efficacité énergétique à participer à vos travaux.
Je vais tenter d'offrir un point de vue différent sur l'efficacité énergétique, à la lumière de mes 30 années de travail dans l'industrie ainsi que, bien évidemment, dans le secteur universitaire et dans celui de la recherche.
Le sigle « t3e » est l'abréviation de l'expression « technologies de l'énergie et efficacité énergétique ». Notre groupe est rattaché à l'École de technologie supérieure.
La diapositive no 3 présente les deux documents que nous utilisons essentiellement pour parler de la situation énergétique au Canada dans les cours que nous offrons à l'École de technologie supérieure. L'un des documents provient de l'Agence internationale de l'énergie, et l'autre a été produit en 2017 par le gouvernement du Canada. L'Office de l'efficacité énergétique a récemment décidé de reprendre ces publications, et nous l'en remercions.
Comme il est indiqué à la diapositive no 4, je vais vous parler aujourd'hui des possibilités économiques en matière d'efficacité énergétique au Canada. Il s'agit d'un thème très vaste qui a nécessité un peu de réflexion.
[Traduction]
Mon exposé comprendra quatre volets: le contexte, les changements climatiques, l'efficacité énergétique et la conclusion.
[Français]
Premièrement, je dois préciser que la croissance économique s'est toujours accompagnée d'une croissance de la consommation d'énergie, comme le montre le graphique tiré des statistiques produites par la société BP en 2018. De 1992 à 2017, nous constatons que la consommation énergétique augmente. Comme on peut le voir à la diapositive no 7, la crise économique de 2008 met clairement en évidence l'association qui existe entre l'économie et la consommation d'énergie. En effet, le ralentissement économique s'est accompagné d'un ralentissement de la consommation d'énergie.
La diapositive no 8 donne un aperçu de la demande énergétique prévue en 2040. Selon le document intitulé « New Policies Scenario » de l'Agence internationale de l'énergie, la consommation d'énergie augmentera de 25 %, alors que, selon le rapport « Energy Outlook » de la société BP, cette hausse sera d'environ 33 %. Nous ne sommes donc pas sortis de l'auberge. La demande va continuer à augmenter, et ce, principalement en raison du développement de l'Inde, de la Chine et plus généralement de l'Asie, ainsi que de la croissance démographique que connaîtront ces régions.
Une augmentation de la consommation d'énergie va nécessairement de pair avec une augmentation des émissions de CO2, comme vous pouvez le constater à la diapositive no 9. Les énergies renouvelables représentent environ 10 % seulement de toute notre consommation énergétique. La consommation d'hydroélectricité est illustrée en bleu. En orange, ce sont les énergies renouvelables. Ce qui est en gris, en rouge et en vert, ce sont les trois sources d'énergies fossiles, lesquelles produisent du CO2. Or, comme c'est indiqué à la diapositive no 10, les énergies fossiles représentent plus de 80 % de la consommation d'énergie. On ne peut changer cela instantanément.
[Traduction]
Comment pourrait-on maintenir son niveau de vie avec une réduction de salaire de 80 %?
[Français]
Ce serait absolument impossible à faire.
Il s'écoulera des décennies avant que nous puissions réduire de façon considérable les émissions de CO2. Il faudra de 10 à 50 ans, d'après moi.
À la diapositive no 10, il est mentionné dans le petit tableau que le dioxyde de carbone reste une centaine d'années dans l'atmosphère après avoir été émis. Les émissions d'aujourd'hui seront toujours là au tournant du prochain siècle. Il en est de même pour les oxydes nitreux, qui ont une durée de vie de 120 ans et qui sont 300 fois plus néfastes dans le dossier du réchauffement climatique.
Je vous annonce, mais vous devez le savoir, qu'il n'y a aucune manière de prévenir une augmentation de 2 degrés Celsius de la température sur Terre, peu importe ce que nous entendons tous les jours dans les journaux, à la radio ou à la télévision.
La diapositive no 11 donne quelques chiffres qui pourraient paraître alarmants. Je suis loin d'être pessimiste, même si les chiffres ne sont pas très optimistes en soi. J'en discuterai plus tard, au besoin.
Comment prévenir une augmentation de 2 degrés Celsius? Comme il est mentionné à la diapositive no 12, on aurait dû s'occuper du problème quand on l'a créé, c'est-à-dire en 1784. En effet, c'est à cette époque que James Watt a conçu sa machine à vapeur. On aurait peut-être pu s'en préoccuper aussi quand Joseph Fourier a rédigé son mémoire sur la température du globe terrestre en 1824 ou quand John Tyndall et Claude Pouillet ont publié un document qui expliquait très clairement quel était l'effet de serre naturel attribuable à la vapeur d'eau et au dioxyde de carbone.
Qui plus est, comme il est indiqué au bas de la même diapositive, voilà plus d'une centaine d'années, le scientifique Svante Arrhenius, qui aurait pu être le premier à faire partie du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, a proposé un modèle démontrant que le réchauffement climatique atteindrait 4 degrés Celsius si la concentration de CO2 doublait dans l'air, et c'est exactement la direction que nous avons prise.
Nous voyons, à la diapositive no 13, que nous avons suffisamment de pétrole, de gaz et de charbon pour nous asphyxier. Au cours des 50 ou 100 prochaines années, nous allons probablement brûler toutes les réserves actuellement connues.
À la diapositive no 14, on pose la question suivante: est-ce que cela signifie qu'on ne devrait rien faire? Pas du tout. Or, on n'arrêtera pas les changements climatiques pour des raisons environnementales; on va le faire pour des raisons économiques. Je suis heureux que vous posiez la question. Il y a des coûts directs, imputables aux ouragans, aux tempêtes et aux incendies, comme on a pu le voir en Californie très récemment, mais il y a aussi des coûts indirects. En effet, à un moment donné au cours de ce siècle, des lois étrangères vont nous forcer à adopter des modes de fabrication propres ou des processus propres pour créer les produits et services que nous allons exporter. Un de ces jours, qu'on le veuille ou non, même si certains gouvernements sont un peu réfractaires à tout cela, nous allons faire partie d'un grand marché du carbone. Ce sera de plus en plus un problème pour tout le monde. Si nous ne pouvons pas l'arrêter, nous pouvons au moins le ralentir pour des raisons économiques.
Je vais vous parler un peu de l'efficacité énergétique, avant de conclure.
D'abord, l'efficacité énergétique améliore la productivité des entreprises. Plus celles-ci consomment, à la base, plus la différence sera grande. Je trouve très intéressant d'entrer dans une fonderie ou une aluminerie, par exemple, et de suggérer des solutions lorsque celles-ci sont possibles. Quand les entreprises consomment moins d'énergie, elles disposent de plus d'argent. Elles peuvent alors l'investir dans la recherche-développement ou dans les ressources humaines, et ce, localement. C'est important.
Pourquoi les entreprises préfèrent-elles investir dans le marketing pour augmenter leurs ventes annuelles plutôt que dans des mesures visant à réduire leur consommation d'énergie? Eh bien, c'est parce que les femmes et les hommes d'affaires connaissent beaucoup mieux le marketing et les ventes que l'énergie. C'est très clair, à mon avis. Comme l'a mentionné M. Luymes un peu plus tôt, les gens ne connaissent pas beaucoup l'énergie. Il est beaucoup plus facile de compter des ventes que de compter de l'énergie. Pour ma part, je fais cela depuis plusieurs années, mais cela demeure un concept un peu mystérieux ou étrange.
Par ailleurs, avoir une période de récupération de cinq ans, c'est comme avoir un taux d'intérêt de 20 %. Lorsqu'on investit dans l'efficacité énergétique, le bilan annuel n'est pas très bon la première année. C'est pourquoi les gens préfèrent ne pas le faire.
En outre, l'efficacité énergétique met de l'argent dans les poches des consommateurs.
[Traduction]
Moins ils consomment d'énergie, plus ils dépenseront à l'occasion du vendredi fou.
[Français]
Ce sera très bon en ce qui a trait à la TPS et à toutes les taxes perçues. Les gens préfèrent dépenser pour se procurer des biens et services plutôt que de payer des factures pour leur consommation d'énergie. Cependant, comme l'a mentionné M. Luymes, ils ne savent pas très bien comment cela fonctionne. On parlait plus précisément de la géothermie, tout à l'heure. Ils ont besoin d'aide pour évaluer leurs options et savoir quoi faire. Ils ont besoin d'information.
Pour les gens aussi, avoir une période de récupération de cinq ans, c'est comme avoir un taux d'intérêt de 20 %. Par contre, la plupart d'entre eux préfèrent avoir un rabais,
[Traduction]
un remboursement ou une subvention instantanément plutôt qu'une récupération adéquate.
[Français]
Cela se trouve à la diapositive no 18.
Je passe maintenant à la diapositive no 19.
[Traduction]
Où devrions-nous stimuler les efforts en matière d'efficacité énergétique?
[Français]
Je commencerais par l'industrie, parce que c'est le plus grand consommateur au Canada et qu'elle a des compétiteurs internationaux. Si elle diminue ses coûts de production, elle sera plus concurrentielle.
Le transport arrive au deuxième rang pour ce qui est de la consommation énergétique au Canada. Comme presque 100 % de ce secteur émet du C02, on fait d'une pierre deux coups en travaillant à cela.
De plus, comme l'a mentionné M. Luymes, dans les domaines résidentiel, commercial et institutionnel, qu'il s'agisse de la réfection de bâtiments ou de la création de nouveaux bâtiments, il y a une foule d'économies à faire, des centaines de milliers d'emplois à créer et des milliards de dollars à dépenser.
Enfin, en agriculture, je pourrais prendre comme exemple l'Accord États-Unis—Mexique—Canada, qui vient d'être signé. Nos agriculteurs doivent dépenser moins d'énergie pour créer leurs produits, puisqu'ils sont maintenant plus directement en concurrence avec les Américains.
Comment stimuler les efforts en matière d'efficacité énergétique? Je vais vous poser quelques questions, que vous pouvez trouver à la diapositive no 20.
[Traduction]
Pourquoi les Danois n'achètent-ils pas de voitures? Pourquoi les Français achètent-ils de plus petites automobiles? Pourquoi les Allemands utilisent-ils l'énergie solaire alors que l'ensoleillement est moins important à Berlin qu'à St. John's, à Terre-Neuve, ou que dans toute autre capitale provinciale du Canada? Comment l'Ontario a-t-il tourné le dos à la production d'électricité au moyen du charbon?
[Français]
C'est parce que l'argent est le seul langage que les gens comprennent. Des subventions ont été données aux Danois. En France, des taxes sur l'essence sont imposées, ce qui fait que le coût du litre est deux fois plus élevé qu'ici ou presque. Pour leur part, les Allemands ont décidé de faire un
[Traduction]
investissements substantiels dans les tarifs d'incitation
[Français]
pour l'énergie solaire, et ils ont aujourd'hui dans ce domaine une puissance comparable à celle de l'Ontario, qui a pris de telles mesures il y a quelques années. Je ne vais pas m'étendre davantage là-dessus.
Comment stimuler les efforts en matière d'efficacité énergétique, alors? Toutes les solutions proposées à la diapositive no 21 ont trait à l'argent. Il faut augmenter le coût de l'énergie. Avoir un plan stratégique, c'est bien, mais il faut un plan de mise en oeuvre et un plan de mesures pour vérifier que cela fonctionne. Il faut des politiques restrictives en matière d'intensité et d'efficacité énergétiques. On doit participer à un marché du carbone. On pourrait augmenter la taxe d'accise sur les carburants ou instaurer une taxe sur la valeur ajoutée particulière sur les produits énergétiques, comme cela se fait dans certains pays, ou implanter un système de tarifs de rachat garantis. La diapositive no 22 énumère d'autres possibilités, par exemple investir en recherche-développement ou encore avoir du capital de risque qui fonctionne.
Je passe tout de suite à la diapositive no 23 pour ne pas prendre trop de temps.
Je vais vous donner un exemple. De Newark, il faut payer deux fois 6 $ pour se rendre au tunnel Lincoln et 15 $ pour le traverser et avoir accès à Manhattan. Implanter des péages sur les ponts, dans les tunnels et sur les autoroutes et retourner cet argent dans le transport en commun est une solution pratique, et pas seulement pour les extraterrestres; nos voisins le font. Cela créerait beaucoup d'emplois pendant des décennies. Ce serait beaucoup mieux que de donner 8 000 $ à chaque personne qui achète une Leaf au Québec, par exemple.
Proposer...
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je craignais de venir à Ottawa après que Calgary a remporté la Coupe Grey contre Ottawa dimanche; je vous remercie donc de m'avoir invité et de ne pas m'avoir mis à la porte de l'édifice. C'était une belle partie, et il était temps. Je suis donc ravi pour les Stampeders.
Je m'appelle Allan Fogwill et je suis président-directeur général du Canadian Energy Research Institute, ou CERI. Mon exposé s'appuie sur l'expérience que j'ai acquise au sein du CERI, de mes travaux d'élaboration et de mise en oeuvre de programmes d'efficacité énergétique du gaz naturel en Ontario, de mon rôle de président-directeur général de l'Alliance de l'Efficacité Énergétique du Canada et de ma participation au Conseil consultatif national sur l'efficacité énergétique. Je m'occupe de questions relatives à l'efficacité énergétique depuis plus de 25 ans.
À titre d'analyste, j'étudie les activités d'efficacité énergétique sous deux angles, soit ceux du développement économique et de la planification des systèmes énergétiques. Ce double point de vue me permet aujourd'hui de constater que les objectifs initiaux de l'efficacité énergétique ont été oblitérés par la multiplication des intervenants, chacun utilisant les programmes d'efficacité énergétique pour se faire valoir auprès de la population canadienne. Par exemple, pensez aux thermopompes électriques à air à Terre-Neuve quand la centrale de Muskrat Falls produira un surplus d'électricité, ou au programme de promotion des surplus d'électricité de l'Ontario, qui accorde un rabais minimal en fonction des économies réalisées grâce aux activités d'efficacité énergétique. Du point de vue de la planification des systèmes, ces deux initiatives ne tiennent pas compte du contexte sous-jacent, c'est-à-dire du fait qu'il y a un surplus d'électricité. Dans le deuxième cas, une étude de l'Université de la Californie à Berkeley a permis de découvrir qu'un programme semblable mis en oeuvre aux États-Unis avait un rendement financier négatif de 2,2 %.
Au chapitre du développement économique, de nombreuses études réalisées au cours des trois dernières décennies donnent à penser que les solutions les plus rentables aux fins d'amélioration de l'efficacité énergétique résident dans le secteur industriel. Les grandes industries consomment, en effet, des quantités considérables de gaz naturel et d'électricité. D'un point de vue très concret, les entreprises se font concurrence pour obtenir des investissements en capital, et leurs hauts dirigeants sont mal informés quant aux avantages de ce genre d'activités. Les études montrent habituellement que le potentiel des améliorations de l'efficacité dans l'industrie est supérieur à celui des applications commerciales et résidentielles, et que ces démarches ont presque toujours une plus grande valeur économique. Pourtant, un grand nombre d'organisations mettant en oeuvre un large éventail de programmes ciblent les trois secteurs. Ainsi, au chapitre de l'efficacité économique, nous dispersons les effets des rares fonds dont nous disposons pour nous assurer que les parrains des programmes obtiennent le mérite.
Le bassin de financement destiné aux programmes d'efficacité énergétique devrait-il être soumis au triage pour cibler le plein potentiel des programmes les plus économiques? Gardez à l'esprit que les bénéfices de la productivité et de la compétitivité concernent presque tous le secteur industriel. À l'échelle nationale, il faudrait considérer que la compétitivité est une concurrence entre pays. Les gouvernements fédéral et provinciaux devraient-ils s'inquiéter si un édifice commercial ou un bâtiment sis au centre-ville d'une communauté est plus concurrentiel que son voisin?
Le développement économique concerne également la création d'emplois. Par dollar investi, les programmes d'efficacité énergétique permettent de créer plus d'emplois à l'échelle locale que les projets d'approvisionnement en énergie ou les infrastructures complexes, et ce, parce qu'un grand nombre des tâches peuvent être accomplies par les services d'énergie, les techniciens en chauffage, en ventilation et en climatisation et les compagnies d'amélioration de l'enveloppe des bâtiments locaux. De nombreux grands projets, qu'ils concernent l'énergie ou autre chose, font souvent appel à des travailleurs spécialisés de l'extérieur possédant certaines compétences. Dans le cas présent, un employé de l'extérieur pourrait venir d'une autre ville canadienne ou d'un pays étranger.
Nous devons donc nous demander quels sont nos objectifs économiques: le PIB et la compétitivité, ou la création d'emplois? J'ai souvent vu des programmes ayant ces deux objectifs. En pareil cas, la répartition des fonds est logique entre les programmes industriels moins onéreux qui ont des effets moindres sur la main-d'oeuvre locale et les programmes résidentiels plus chers qui sont plus avantageux sur le plan de la main-d'oeuvre.
En ce qui concerne la planification énergétique, il faut prendre en compte deux éléments. Le premier est la gestion du coût global du service à la clientèle. Il revient parfois moins cher d'économiser de l'énergie que d'accroître l'offre pour satisfaire la demande croissante. Il s'agit de gestion axée sur la demande. Le second élément est la gestion des émissions de gaz à effet de serre. Une diminution de la consommation d'énergie se traduira par une réduction des émissions.
Pour ce qui est du coût total pour les consommateurs, particulièrement dans le cadre de programmes ne concernant pas les services publics qui n'ont pas fait l'objet d'un examen réglementaire rigoureux, je ne suis pas certain qu'il existe un rapport entre le coût d'un programme d'efficacité énergétique et le coût de l'offre supplémentaire. Les coûts de l'électricité et du gaz naturel ont considérablement diminué ces dernières années, sauf dans le cas de l'électricité en Ontario.
Voilà qui signifie que les nouvelles options d'approvisionnement sont moins chères qu'avant; pourtant, nous semblons élargir nos programmes d'efficacité énergétique sans preuve montrant qu'ils sont moins chers que l'option d'approvisionnement. Sachez que nous parlons ici de nouvel approvisionnement ou d'efficacité énergétique. Nous n'évitons donc pas les coûts d'infrastructure nécessaires à l'acheminement de l'énergie; la vaste majorité de ces infrastructures sont en place et on les paiera quand même. C'est donc le remplacement de l'option des produits, qui constitue habituellement du tiers à la moitié de la facture.
Je proposerais de demander aux gestionnaires de programme de montrer qu'ils dépensent moins d'argent au chapitre de l'efficacité énergétique que pour l'option des produits plus chère.
Au chapitre des émissions de gaz à effet de serre, nous devrions aussi savoir que les réseaux électriques affichent un taux de non-émission de près de 85 %, et qu'avec l'abandon du charbon prévu en 2030, ce taux s'élèvera à plus de 90 %. Ainsi, si les parties prenantes veulent utiliser les programmes d'efficacité énergétique pour réduire les émissions, elles feraient mieux de mettre l'accent sur les programmes ciblant l'efficacité de la consommation d'hydrocarbures, c'est-à-dire principalement le gaz naturel, le pétrole et le diesel. Ici encore, il semble que l'on n'effectue pas ce genre d'analyse quand on étudie les programmes qu'on parrainera.
Voilà qui m'amène à proposer d'envisager l'élaboration d'un cadre clair quant aux objectifs stratégiques et d'effectuer un ensemble solide d'analyses pour veiller à ce que les programmes ciblent le bon secteur concernant le bon service d'énergie pour les bons motifs. En outre, la transparence s'en trouverait améliorée si les résultats des tests étaient publiés dans le cadre des communications du programme.
Enfin, je voudrais traiter de la fragmentation des efforts au pays. Des programmes sont offerts par les gouvernements fédéral et provinciaux, ou parrainés par des associations, des municipalités et des services publics, sans que l'on tienne suffisamment compte des mécanismes de prestation existants mis en oeuvre par des compagnies de service de détail ou commercial. Chaque gestionnaire de programme adopte son propre système de prestation et sa propre image de marque.
S'il existait un ensemble commun d'initiatives parrainées par tous les organismes de financement, comme le programme ENERGY STAR, avec une seule stratégie de prestation et d'image de marque, il serait bien plus facile pour les clients industriels, commerciaux et résidentiels de comprendre le besoin, les bénéfices et les processus. Nous devons admettre que les entreprises et les citoyens ne sont plus captifs des marchés locaux.
Les activités d'efficacité énergétique peuvent constituer un important outil de développement économique et de planification des systèmes. Elles ne sont pas toujours la meilleure solution par défaut, mais il importe d'en tenir compte. Leur valeur dépend du contexte, et c'est quelque chose que nous devons intégrer beaucoup plus à l'élaboration de nos programmes d'efficacité énergétique.
Merci.
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Je vous remercie de votre invitation. Je m'appelle Pierre Langlois et je suis président de l'Institut canadien de formation en énergie, aussi appelé CIET. Je suis accompagné par Olivier Cappon, qui est gestionnaire sénior, Développement des affaires et affaires gouvernementales, au sein de notre organisation.
CIET est une filiale à part entière d'Econoler, un bureau de consultants canadien qui travaille dans le domaine de l'efficacité énergétique depuis 35 ans dans plus de 160 pays. Nous collaborons avec toutes les institutions financières internationales et des organisations bilatérales concernant les questions de croissance économique et les changements climatiques dans le monde.
Au Canada, nous travaillons également avec le gouvernement fédéral et d'autres organismes gouvernementaux dans le domaine de l'efficacité énergétique depuis 25 ans. Nous sommes convaincus, bien sûr, que l'efficacité énergétique est la solution optimale pour le pays au chapitre de l'approvisionnement, de l'énergie, de la croissance et des changements climatiques.
Je ne m'attarderai pas aux changements climatiques, car de nombreux autres témoins, dont Daniel, ont déjà traité de la question. Mon exposé portera essentiellement sur le fait que l'efficacité énergétique constitue la meilleure option au chapitre de la croissance économique et de la création d'emplois.
Sachez que nous collaborons actuellement avec Ressources naturelles Canada afin de rendre les actifs du gouvernement plus verts grâce à l'efficacité énergétique. Nous formons un grand nombre de fonctionnaires quant au fait que le recours à l'efficacité énergétique est l'une des meilleures options pour le gouvernement lui-même.
Dernier fait, mais non le moindre, nous offrons de la formation, et notre marché a pris de l'expansion au cours des cinq dernières années. Nous formons trois fois plus de gens au Canada que nous le faisions il y a cinq ans, ce qui prouve sans contredit qu'il existe une tendance et un intérêt dans le domaine de l'efficacité énergétique.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que l'efficacité énergétique est le carburant le plus économique. C'est un fait qui a été prouvé à maintes reprises, et je ne pense pas devoir vous inonder de chiffres à ce sujet. Il est probablement évident que quelque chose que l'on ne consomme pas est moins cher que quelque chose que l'on consomme.
En outre, nous parlons beaucoup de l'énergie verte lorsqu'il est question des énergies renouvelables. Ces énergies ne forment toutefois qu'une partie de la solution. Nous devons comprendre également que les énergies renouvelables coûteront toujours plus cher que l'efficacité énergétique. C'est très simple à comprendre.
Si les planificateurs qui ont construit des centrales au cours des 50 dernières années avaient essentiellement commencé avec la solution la plus chère pour graduellement adopter des solutions moins onéreuses, nous aurions constamment ajouté des énergies moins chères au réseau d'approvisionnement et le coût global pour les utilisateurs finaux aurait diminué. Cependant, vous comprendrez que, de toute évidence, ce n'est jamais ce qui s'est passé. Quand nous avons construit ces centrales, nous sommes passés de la source d'énergie la moins chère à la plus onéreuse. Ainsi, l'augmentation de l'offre coûtera toujours plus. Le contraire est impossible.
L'efficacité énergétique coûtera toujours moins, car on ne paie pas pour ce qu'on ne consomme pas. Qui plus est, elle ne subira jamais les effets de l'inflation comme c'est le cas pour les autres sources d'énergie. L'efficacité énergétique a non seulement l'avantage de coûter moins cher, mais son coût n'augmentera jamais au fil du temps. Or, ce ne sera pas le cas de l'approvisionnement en énergie.
Ce qui est intéressant, c'est qu'il existe déjà un mouvement d'envergure dans ce domaine au Canada. J'ai apporté un livre récent — en plusieurs exemplaires, si certains souhaitent en obtenir une copie — que j'ai écrit avec un de mes collègues au sujet des perspectives de l'efficacité énergétique au Canada. Ce livre démontre essentiellement que chaque province et territoire agit différemment sur le plan de l'efficacité énergétique.
J'avais déjà observé la même tendance à l'échelle internationale quand on m'a demandé d'étudier le marché de l'efficacité énergétique au Canada. Il n'y a pas un seul marché au pays; le marché diffère selon la province. Chaque province agit différemment.
À titre d'exemple, la Colombie-Britannique s'est dotée d'un plan à long terme de 20 ans dans le domaine des ressources, ainsi que d'un plan à court terme concernant la gestion de la demande. L'Ontario, pour sa part, dispose d'un cadre misant avant tout sur l'économie, une variante de la loi sur l'économie d'énergie. Quant à la Nouvelle-Écosse, elle a adopté la loi sur la restructuration de la conservation et de l'efficacité énergétique en 2014, et le Québec a un plan très dynamique en matière d'efficacité énergétique, même si toute sa production d'électricité repose sur une source renouvelable.
En outre, même si j'étais capable de vous convaincre que l'efficacité énergétique est la source d'énergie la meilleure, la moins chère et la plus propre, vous devriez vous demander pourquoi elle n'est pas aussi exploitée que le côté de l'offre. C'est parce qu'il existe de nombreux obstacles sur le marché, comme Daniel et d'autres témoins l'ont brièvement expliqué.
Cependant, nous savons avec certitude que si nous continuons d'agir comme nous le faisons, au moins les deux tiers du potentiel du Canada en matière d'efficacité énergétique ne seront pas exploités, même si les secteurs public et privé ont un grand nombre de programmes et d'initiatives.
Je vais essayer de vous exposer les avantages économiques liés à l'efficacité énergétique en m'appuyant sur trois piliers. Il s'agit des répercussions, de la capacité concurrentielle et des possibilités d'exportation pouvant découler de notre situation particulière.
Selon l'Agence internationale de l'énergie, entre autres sources, des investissements de l'ordre de 1,5 million de dollars dans des mesures d'efficacité énergétique peuvent mener à la création de 8 à 27 emplois. Des chercheurs de partout dans le monde s'intéressent à la question. À titre d'exemple, l'Alberta fait valoir que ses investissements en matière d'efficacité énergétique sont à l'origine d'une croissance économique de l'ordre de 475 millions de dollars grâce à une intensification de l'activité économique qui a permis la création de 2 300 emplois.
Il peut être également intéressant pour vous de noter que les emplois créés grâce aux mesures d'efficacité énergétique ne sont pas nécessairement réservés aux professionnels très spécialisés. Ils sont en fait accessibles à tous. Il va de soi que la situation est différente du côté de l'approvisionnement énergétique, un secteur qui exige beaucoup plus de compétences spécialisées.
Il faut aussi tenir compte du fait que des emplois sont créés localement. Ainsi, le gros des investissements à consentir pour une éolienne va à l'achat d'une turbine, laquelle sera la plupart du temps produite à l'extérieur du Canada. Lorsque l'on mise plutôt sur l'efficacité énergétique, la plupart des nouveaux emplois sont créés localement. Vous n'allez pas embaucher quelqu'un à l'étranger si vous voulez faire isoler votre résidence, changer votre éclairage ou même accroître l'efficacité énergétique de votre usine. Des emplois sont créés non seulement à l'échelle planétaire, mais aussi au niveau local.
Il y a aussi des emplois indirects qui s'ajoutent à l'équation. Toutes les sommes économisées grâce aux gains d'efficacité énergétique vont être à la disposition des gouvernements, des industries et des particuliers qui pourront les dépenser par ailleurs. Il va de soi que la capacité financière ainsi libérée va favoriser la création d'emplois indirects.
Je crois que l'on a déjà abordé la question de la capacité concurrentielle accrue. Rappelons tout de même qu'un secteur industriel capable de réduire ses frais d'exploitation sera beaucoup mieux à même de soutenir la concurrence, et ce, aussi bien au Canada qu'à l'étranger.
Il n'est pas question ici d'efficience en matière d'argent, de temps ou de tout autre facteur économique, mais bien d'efficacité énergétique, un objectif dont les avantages sont peut-être un peu plus difficiles à saisir. L'efficience est toutefois une vertu dans tous les aspects de la vie économique, et il devrait en aller de même pour la consommation énergétique.
Dans le secteur public, tous les gouvernements, y compris à l'échelon fédéral, doivent composer avec des besoins financiers qui ne cessent d'augmenter. Les exigences se multiplient au Canada comme ailleurs dans le monde, y compris à l'échelle des provinces et des municipalités. Si vous parvenez à réduire vos coûts énergétiques, c'est autant d'argent que vous pourrez utiliser à meilleur escient, plutôt que de le consacrer simplement à l'approvisionnement énergétique sans pouvoir l'investir au bénéfice de votre collectivité.
Pour ce qui est des exportations, j'ai travaillé en Arabie saoudite, l'un des plus grands pays producteurs. L'Arabie saoudite a maintenant adopté une politique accordant la priorité à l'efficacité énergétique. Les Saoudiens se sont dit qu'il était nettement préférable pour eux de vendre leur pétrole à l'étranger, plutôt que de le consommer au pays. Du point de vue économique, c'est on ne peut plus logique.
Nous sommes un peu dans la même position. Le Canada est un exportateur net. Nous pouvons vendre notre électricité, notre pétrole et notre gaz naturel. Ne serait-il pas merveilleux de pouvoir en vendre davantage à l'étranger, surtout pour ce qui est de notre énergie verte, plutôt que de simplement l'utiliser en pure perte au Canada?
Le dernier avantage, mais non le moindre, réside dans le renforcement de nos compétences et de nos capacités. L'efficacité énergétique est un domaine complexe, sans doute bien davantage que celui de l'approvisionnement en énergie. Je ne suis pas en train de dire que la question de l'approvisionnement n'est pas complexe en elle-même, mais il y a toute une diversité de mesures possibles pour accroître l'efficacité énergétique. On ne se limite pas à une seule chose; il y a de multiples facettes. Les mesures que l'on utilise dans le secteur résidentiel ne conviennent pas pour l'industrie. Le bagage de compétences nécessaire est donc très varié. Il est primordial que nous parvenions à développer ces compétences au sein de l'économie canadienne. Si nous pouvons favoriser l'acquisition de telles compétences dans la collectivité, des emplois ne manqueront pas d'être créés, car la demande existe bel et bien.
J'ajouterais que lorsqu'une organisation investit dans un système écoénergétique pour son immeuble, les coûts ne vont pas disparaître d'eux-mêmes. Il faut qu'elle puisse compter sur des gens capables de faire fonctionner ces systèmes, un peu comme c'est le cas pour chacun de nous à la maison. Peu importe les investissements qui sont consentis, nous avons besoin de techniciens, d'ingénieurs et d'opérateurs compétents. Grâce au renforcement de ces capacités, nous allons générer énormément de richesse au Canada. En plus des emplois créés, chaque utilisateur bénéficiera de gains d'efficience, ce qui se traduira par une économie globalement plus efficiente.
En conclusion, j'espère que les différents témoignages que vous entendrez vous permettront de vous faire une meilleure idée des avantages de l'efficacité énergétique, non seulement du point de vue environnemental — je crois que tout le monde comprend bien que la diminution de la consommation d'énergie entraînera une baisse de la pollution et aura un effet positif sur les changements climatiques — mais aussi comme moteur de croissance économique. Nous n'avons pas à opposer protection de l'environnement et croissance de l'économie. Les deux peuvent très bien aller de pair.
Des avantages semblables se feront ressentir dans tous les secteurs de l'économie. Nous avons parlé un peu de la situation dans l'industrie, et je suis tout à fait d'accord, mais il y aura aussi des bénéfices au niveau gouvernemental, au niveau commercial et au niveau résidentiel, soit pour les électeurs eux-mêmes.
En outre, le nombre d'emplois créés par dollar injecté va être plus élevé que si vous continuiez à investir ou à favoriser les investissements du côté de l'approvisionnement, simplement du fait que la prochaine option d'approvisionnement sera toujours plus coûteuse que la précédente.
En conclusion, pour d'excellentes raisons touchant aussi bien l'économie que l'environnement, j'estime que les mesures visant l'efficacité énergétique doivent primer dans le cadre de toute politique en la matière. L'efficacité énergétique n'est pas seulement l'une des solutions que l'on peut envisager; elle doit en fait être la première à laquelle on songe.