RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 2 octobre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Je vous souhaite un bon lundi et vous remercie d'être revenus après le week-end.
Commençons. Nous recevons trois témoins pendant la première heure.
Nous accueillons M. Marc Brouillette, consultant principal chez Strategic Policy Economics. Je viens par ailleurs d'apprendre qu'il vit dans ma circonscription, ce que je ne savais pas, mais surtout, qu'il ne savait pas que je suis son député...
Des députés: Ah, ah!
Le président: J'ai clairement du travail à faire.
Nicholas Martin est analyste des politiques à la Canada West Foundation, et Tom Adams, directeur de Tom Adams Energy. Il se joint à nous par vidéoconférence.
Merci, messieurs, de prendre le temps d'échanger avec nous aujourd'hui.
Au cas où vous ne connaîtriez pas la procédure, nous vous accordons chacun 10 minutes pour votre exposé. Nous entendrons tous les exposés d'abord, après quoi les députés vous poseront des questions, en ciblant une personne ou à tous. Nous tenons rigoureusement compte du temps. Vous avez jusqu'à 10 minutes pour vos exposés, puis les questions sont chronométrées aussi, donc si vous me voyez vous faire signe de la main, sachez que c'est ma façon polie de vous dire: « Veuillez essayer de conclure. »
Sans plus tarder, j'invite M. Brouillette à casser la glace.
Merci, monsieur Maloney.
On m'a demandé de préparer un bref résumé écrit de ce que j'allais dire. Je ne sais pas s'il a été distribué ou non. Je l'ai intitulé « Enhancing Canada's Energy Endowments with Interties: A National Competitive Advantage in a Decarbonizing World ». J'espère vous présenter un point de vue que vous n'avez pas encore entendu.
Nous n'avons reçu que des notes d'allocution, et en anglais seulement. Comme elles ne sont pas dans les deux langues, elles n'ont pas été distribuées.
Si j'ai votre consentement unanime, nous pouvons vous distribuer la version anglaise.
Un député: Oui.
En quelques mots, si on décide d'investir dans les interconnexions, il faut surtout se demander si elles serviront bel et bien à transporter de l'électricité et quelle proportion de la capacité sera utilisée. C'est essentiellement la question de l'offre et de la demande.
Dans le cadre de cette étude, je crois que le Comité doit faire beaucoup d'hypothèses concernant l'incidence de la décarbonisation et des changements de combustible sur la demande en électricité. Côté offre, il doit se demander quelles infrastructures de génération seront ou devraient être privilégiées et surtout, pour les interconnexions, où elles seront construites. Je pense que la question des coûts est fondamentale aussi.
Je soumets au Comité l'idée que l'Est canadien, qui comprend le Manitoba selon moi, dispose de trois grandes sources d'énergie distinctes. Ces richesses pourraient procurer un avantage concurrentiel au pays. Les interconnexions pourraient accroître cet avantage concurrentiel, mais cela dépendra de trois facteurs.
Le premier est la demande et son effet sur la dynamique économique des interconnexions. Aujourd'hui, la demande en électricité a un profil quotidien et saisonnier tel que les installations de transmission sont périodiquement sous-utilisées et, par ricochet, leur potentiel économique aussi. À l'heure actuelle, il ne semble pas pertinent d'investir dans les interconnexions interprovinciales en Ontario. J'ai déjà écrit à ce sujet. Cependant, on prévoit que non seulement la demande croîtra, mais son profil quotidien et saisonnier changera, ce qui se répercutera sur la transmission et la nouvelle chaîne d'approvisionnement. C'est le facteur numéro un.
Le deuxième facteur est la nature des ressources énergétiques dont dispose l'Est canadien. Il y a l'hydroélectricité et le gaz naturel, qu'on peut stocker et qui équivaut à de l'électricité — je vais vous expliquer pourquoi dans une minute —, des ressources qui se prêtent toutes deux à l'alimentation de piles pour répondre aux besoins saisonniers du réseau. Le nucléaire, qui fait la force de l'Ontario, pourrait permettre d'alimenter ces piles et d'en optimiser la création, en combinaison avec les interconnexions.
Le troisième facteur est la demande américaine, dans le Nord-Est des États-Unis en particulier, puisqu'elle augmentera avec la réduction des émissions, comme en Ontario. Or, les États-Unis ont moins de sources d'approvisionnement que nous. Un examen global des exigences de la nouvelle chaîne d'approvisionnement et l'optimisation de notre infrastructure de transmission, conjugués aux besoins des États-Unis en énergie propre pourraient stimuler la production d'électricité à faible coût d'une source unique, tant pour un usage national que pour l'exportation d'électricité et de gaz combustible aux États-Unis, si le Canada joue bien ses cartes.
Je vais maintenant vous parler de chacun de ces facteurs un peu plus en détail. La nature de l'équilibre actuel entre la demande et l'offre peut être déterminante pour juger de la rentabilité d'un investissement dans les interconnexions. Mon étude montre qu'au bout de huit ans, en raison des surplus qu'il y aura en Ontario comme au Québec, il n'y aura plus d'avantage sur les coûts de l'énergie au Canada à développer les interconnexions ni même à élargir les accords commerciaux entre les deux provinces.
Je suis d'accord avec les climatologues pour dire que le changement de combustible mènera à l'électrification. Mon analyse montre que pour respecter ses cibles de 2030, l'Ontario aura besoin de 60 % de plus d'électricité qu'à l'heure actuelle, et ce, malgré toute l'optimisation attribuable à l'innovation. Une grande partie de la demande est concentrée en hiver.
La demande en électricité a deux caractéristiques inhérentes qui vont à l'encontre de l'optimisation des interconnexions à valeur ajoutée. Il y a d'abord le profil quotidien de la demande. Selon l'IESO, en Ontario, en raison du profil quotidien de la demande, les interconnexions ne permettent de réduire les émissions que quelques heures par jour, si bien que les interconnexions ne serviraient qu'à 25 % à réduire les émissions de GES. À un taux d'utilisation aussi bas, cela peut équivaloir à 60 $ le mégawattheure, ce qui double presque le coût de l'électricité qui sera transmis grâce aux interconnexions. C'est la première difficulté.
La deuxième difficulté est la demande saisonnière. Dans un monde électrifié, les variations saisonnières de la demande en électricité sont importantes. Au Québec, où la plupart des édifices sont chauffés à l'électricité, on constate que la demande en électricité est environ 65 % plus élevée en hiver qu'en été. La seule source d'électricité propre susceptible de répondre à la hausse de demande qui surviendra en Ontario un moment donné pour le chauffage en hiver, c'est le grand réservoir hydraulique qu'on trouve au Québec. Or, le Québec n'aura plus suffisamment de capacité pour répondre à la hausse de la demande associée au chauffage en Ontario d'ici 2030, donc tout dépendra de l'infrastructure qui sera construite. Sera-t-elle construite au Québec, où l'on aura besoin d'interconnexions, ou en Ontario, où l'on n'en a pas besoin?
Les choix qu'on fera pour assurer l'approvisionnement pourraient miner ou augmenter la pertinence des interconnexions, et l'utilité des interconnexions à l'avenir dépendra de la question de savoir si la nouvelle demande dans le réseau permettra une utilisation acceptable des installations. Si la demande est telle que les installations de transmission sont utilisées à pleine capacité, ce sera une bonne idée, faute de quoi ce pourrait être une mauvaise idée.
Deux des sources d'énergie propre dont on parle le plus ont des avantages opposés sur les interconnexions. Il y a l'éolien, puis il y a l'énergie solaire distribuée sous forme de batterie solaire, un concept dont vous avez entendu parler.
Diverses infrastructures d'approvisionnement intermittent ont été ou sont construites et compromettent l'utilisation efficace d'une interconnexion en raison de leur caractère intermittent. La production éolienne doit s'accompagner d'une capacité d'appoint. La source d'appoint peut prendre la forme d'interconnexion aussi. L'éolien, en Ontario, a fait diminuer l'utilisation des interconnexions entre l'Ontario et le Québec de 15 à 20 %, mais les deux provinces ont encore besoin de la pleine capacité des lignes de transmission.
Les ressources énergétiques distribuées modifient le profil de la demande quotidienne. C'est une bonne chose. Le plus grand avantage des ressources énergétiques distribuées, c'est qu'elles peuvent être gérées avec les automates de contrôle des sociétés de distribution locales. Cela peut limiter les fluctuations de la demande pour la rendre un peu plus constante. Cela peut simplifier les choses et faire augmenter l'utilisation de toutes les installations de transmission.
La plupart des études sur la décarbonisation prévoient une hausse de l'approvisionnement en hydroélectricité et en énergie nucléaire. Je fais référence au rapport du Canada pour le milieu du siècle. Le modèle qu'on trouvait dans le rapport Trottier proposait de cibler les coûts les plus bas. Il a été pensé dans une perspective de 20 ans, donc en tenant compte de tous les projets hydroélectriques économiquement réalisables, puis du nucléaire. Selon ce rapport, le nucléaire était un peu plus coûteux alors qu'il reste à prouver que l'hydroélectricité coûte moins cher que le nucléaire. Nous avons eu des problèmes aux barrages de Muskrat Falls, du site C et de Keeyask qui ont fait bondir les coûts.
L'acceptabilité sociale du nucléaire au Canada est un atout. Les ressources hydroélectriques et les systèmes de stockage du gaz naturel confèrent au Canada un avantage concurrentiel potentiel pour notre économie.
Il est entendu qu'on pourrait accroître davantage la production hydroélectrique dans l'Est du Canada. Le fait que les grandes centrales hydroélectriques puissent satisfaire à la fois à la demande quotidienne et aux hausses rapides de la demande lorsqu'elle atteint des sommets, en hiver, en fait une source d'énergie extrêmement avantageuse.
Pour ce qui est du nucléaire, l'avantage du Canada repose sur deux principaux facteurs. Il y a l'acceptabilité sociale, que j'ai déjà mentionnée, qui permet de construire plus rapidement des centrales au Canada qu'ailleurs, puis il y a la vaste chaîne d'approvisionnement nucléaire du Canada. L'industrie est activement engagée dans un mégaprojet. C'est une machine bien huilée de nos jours.
Il faut aussi mentionner le rôle important que le stockage du gaz naturel, dont on parle beaucoup moins, pourrait jouer dans la décarbonisation en Ontario. Les vastes cavernes de stockage accumulent le gaz naturel toute l'année. Nous l'utilisons pendant l'hiver pour le chauffage. Ces ressources permettent également d'approvisionner le Michigan, si bien que nous avons un canal d'exportation pour notre gaz naturel. Le stockage permet d'accumuler du gaz naturel ou de l'hydrogène renouvelables, dont la production nécessite de l'électricité dans les deux cas.
Ensemble, les ressources hydroélectriques, nucléaires et gazières nous confèrent une capacité unique. L'hydroélectricité assure l'approvisionnement quotidien et nous confère la marge de manoeuvre nécessaire selon la saison. Le gaz naturel peut nous aider à répondre aux besoins pendant l'hiver. L'énergie nucléaire pourrait alimenter tout cela. Une demande uniformisée, conjuguée à des ressources énergétiques distribuées, contribuerait à réduire énormément les fluctuations dans le système et à favoriser une grande utilisation des interconnexions. Ce genre de système ferait baisser les prix.
Le dernier facteur à mentionner est celui des États-Unis. Je pense que la question la plus déterminante pour l'avenir des interconnexions sera celle de la possibilité d'exporter nos produits. Les États-Unis auront de la difficulté à trouver toute l'électricité dont ils auront besoin pour respecter leurs objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à long terme.
Il y a beaucoup moins d'options dans les régions du Nord-Est des États-Unis et des Grands Lacs que dans l'Est canadien. Ces options sont surtout l'éolien, le solaire et les piles. La latitude nordique rend la production solaire bien moins économique dans le Nord-Est des États-Unis que plus au sud. Pour respecter leurs objectifs climatiques, ils devront trouver des solutions pour la production d'électricité de base. Les solutions qui permettraient d'utiliser pleinement les lignes de transmission seraient prometteuses.
L'hydroélectricité, le nucléaire et le gaz canadiens seront probablement les options les moins coûteuses, voire les seules pour ces États américains. Comment exploiterons-nous les ressources canadiennes de manière à en tirer un avantage concurrentiel pour leur exportation aux États-Unis? Voilà qui devrait être une considération de premier plan dans votre stratégie sur les interconnexions.
Pour terminer, l'Est canadien a une combinaison unique de ressources énergétiques. Si nous en planifions l'exploitation dans une perspective globale afin d'optimiser la demande dans le réseau, l'énergie pourrait procurer tout un avantage au Canada, tant pour la consommation nationale que pour l'exportation vers les États-Unis.
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
La politique fédérale en matière d'électricité doit être en connexion directe avec la Constitution canadienne. L'électricité est de compétence provinciale, et non fédérale. Presque toutes les fois que le gouvernement fédéral a outrepassé ses pouvoirs constitutionnels pour intervenir dans le secteur de l'électricité, c'est notre prospérité qui en a souffert. Je vous parlerai d'ailleurs dans un instant d'un exemple encore d'actualité, celui de la garantie de prêt fédérale qui subventionne le projet de Muskrat Falls au Labrador.
Il y a des mesures concrètes que le gouvernement fédéral pourrait et devrait prendre en vue d'améliorer l'efficience à long terme des services d'électricité offerts aux Canadiens. Le gouvernement fédéral doit exercer ses pouvoirs de manière à faciliter les échanges interprovinciaux de telle sorte que nous puissions bénéficier au Canada d'un régime de libre-échange de l'électricité qui serait assorti de règles équitables en matière de coûts de transmission et de libre accès. Le fédéral doit aussi mettre un terme aux effets discriminatoires actuels de ses règles fiscales qui favorisent les services publics gouvernementaux au détriment de ceux appartenant à des intérêts privés. Il faudrait pour ce faire rétablir la Loi sur le transfert de l'impôt sur le revenu des entreprises d'utilité publique qui a été abrogée par le gouvernement Chrétien dans son budget de 1995. Le gouvernement fédéral devrait en outre s'engager à rendre plus accessibles en temps utile des données économiques de meilleure qualité sur le secteur énergétique dans l'ensemble du pays. Le Canada accuse énormément de retard à ce chapitre par rapport aux États-Unis et à l'Union européenne.
Le Comité souhaitait connaître nos observations au sujet de l'autonomie régionale en matière d'électricité. On peut déjà noter une interdépendance considérable à ce niveau, surtout entre les provinces et les États avoisinants aux États-Unis, mais aussi entre les provinces elles-mêmes lorsque la situation s'y prête. Les politiques obligeant un accroissement des échanges d'électricité d'est en ouest risquent de réduire l'efficience du marché global de l'électricité. Les grandes tendances technologiques actuelles vont dans le sens d'une production d'électricité décentralisée à petite échelle. Il va de soi que l'approvisionnement en énergie est au départ une activité locale. Lorsque la transmission d'électricité entre les régions est justifiée, c'est principalement pour des raisons de fiabilité du réseau.
Le Canada a beaucoup investi dans sa capacité de transmission, mais a vécu une longue période de diminution de la consommation. Il convient donc que notre pays mette l'accent dans ce domaine sur l'optimisation des actifs en place. Il n'est pas nécessaire que le gouvernement fédéral dépense davantage pour nos infrastructures de transmission.
Qu'en est-il des gaz à effet de serre? L'intensité des émissions canadiennes du secteur de l'électricité est faible comparativement à ce que l'on peut constater ailleurs dans le monde. À ce titre, il y a une leçon à tirer du plan d'élimination progressive du charbon en Ontario dont les effets néfastes nets sur l'économie ont été bien pires que prévu. Il faut prévoir des effets punitifs semblables sur les consommateurs pour tous les grands projets d'investissement récents dans le secteur énergétique qui ont été justifiés en grande partie en fonction de leurs avantages écologiques. Je parle ici du site C en Colombie-Britannique, de la centrale de Keeyask et du projet Bipole III au Manitoba, des programmes TRG et de remise à neuf des centrales nucléaires en Ontario, du programme d'élimination du charbon en Alberta, et du projet Muskrat Falls à Terre-Neuve-et-Labrador.
Dans le cas de ce dernier projet, les torts envisageables seront difficiles à atténuer. L'ancien premier ministre Stephen Harper a surtout justifié la garantie de prêt fédérale sans laquelle ce projet n'aurait jamais pu aller de l'avant en invoquant des motifs liés à la réduction des gaz à effet de serre. Même si le projet peut être mené à terme dans les limites des coûts prévus et de l'échéancier établi, il faudra encore que le fédéral vienne à la rescousse de la province. Cela pourrait même aller jusqu'à la radiation totale de la dette découlant de la garantie de prêt fédérale, laquelle vient d'être portée à 7,9 milliards de dollars par le gouvernement Trudeau. Sans une telle aide du fédéral, le projet Muskrat Falls sera synonyme de pauvreté énergétique grave pour Terre-Neuve-et-Labrador, avec toutes les conséquences socioéconomiques qui en découlent.
En outre, le gouvernement fédéral devrait s'employer sans tarder à faciliter la conclusion d'une entente de stockage d'énergie entre Terre-Neuve-et-Labrador et le Québec. En l'absence d'une telle entente, la centrale de Muskrat Falls sera pour ainsi dire inexploitable. Plus on laisse le projet de Muskrat Falls se poursuivre sans qu'il y ait accord pour le stockage de l'énergie, plus on court le risque d'un conflit interprovincial.
Dans quelle mesure la politique fédérale peut-elle s'harmoniser à la Stratégie canadienne de l'énergie dont les premiers ministres provinciaux ont convenu? Cette stratégie recommande une intensification des efforts fédéraux en matière de recherche. Il serait effectivement avantageux de pouvoir tabler sur une recherche fondamentale bien ciblée et efficacement gérée, mais il faut aussi constater que les investissements fédéraux en recherche énergétique ne portent guère fruit, et ce, depuis de nombreuses décennies déjà. Pendant 50 ans et à la faveur de dizaines de milliards de dollars, le programme CANDU a été le principal projet de recherche fédéral dans le secteur de l'énergie. Tout ça pour une technologie qui se retrouve maintenant dans une impasse. On peut aussi penser dans une moindre mesure aux travaux de recherche sur l'énergie éolienne pour desservir les consommateurs éloignés. Après des décennies de recherche, nous ne sommes guère plus avancés à ce chapitre, si ce n'est que nous savons qu'il faut poursuivre les recherches.
Qu'en est-il des échanges d'électricité entre le Canada et les États-Unis? Le gouvernement fédéral canadien apparaît vulnérable aux poursuites intentées en vertu de l'ALENA par des propriétaires américains de centrales électriques à proximité de notre frontière. Ceux-ci doivent faire concurrence aux exportations subventionnées par les gouvernements provinciaux canadiens qui veulent à tout prix produire des surplus d'électricité. Ces poursuites mettraient le gouvernement fédéral dans la position délicate d'avoir à défendre sa cause au détriment des intérêts des consommateurs canadiens.
En conclusion, le gouvernement fédéral devrait s'en tenir à ses pouvoirs constitutionnels pour ce qui est de l'électricité. Il devrait en outre veiller à atténuer les torts qui ne manqueront pas d'être causés aux gens de Terre-Neuve-et-Labrador.
Je vous remercie.
Bonjour à tous. Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
Je suis ici à titre de représentant de la Canada West Foundation. Je suis analyste des politiques et je me spécialise dans les questions touchant l'énergie et l'électricité. La Canada West Foundation est un groupe de réflexion indépendant et sans affiliation politique qui s'intéresse aux politiques publiques façonnant l'Ouest du pays et, par le fait même, le Canada dans son ensemble. Notre PDG, Martha Hall Findlay, m'a d'ailleurs chargé de vous saluer en son nom.
Nous reconnaissons que les changements climatiques font peser une menace bien réelle sur le Canada et le reste de la planète et que le coût de l'inaction est trop élevé. Nous savons également que les mesures nécessaires doivent être prises dans un souci d'optimisation des investissements. C'est pour cette raison que nous sommes en faveur de la tarification du carbone, composante essentielle du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Selon nous, c'est la façon la plus pratique et la moins coûteuse de réduire nos émissions de gaz à effet de serre.
Nous sommes ravis de voir votre comité mener cette étude sur les interconnexions électriques stratégiques. La Canada West Foundation sait très bien que la tarification du carbone n'est pas la solution à tous les maux qui nous permettra d'atteindre nos cibles de réduction des émissions au moindre coût. Des mesures complémentaires doivent être prises pour tirer parti des possibilités de réduction des émissions à coût abordable dans les situations où on ne peut pas miser sur la tarification du carbone. Comme d'autres témoins vous l'ont fait valoir avant moi, un recours accru aux interconnexions électriques stratégiques peut nous aider grandement à tirer parti de ces possibilités de réduction en contribuant à l'intégration et à la mise en commun des vastes ressources d'énergie propre dont dispose le Canada. Comme la tarification du carbone ne se traduira pas nécessairement par la mise en place d'interconnexions, il est bon que votre comité s'intéresse de près à cet aspect.
Cela étant dit, je crois qu'il est important de souligner que l'idée d'investir en faveur d'une plus grande intégration du réseau n'est pas nouvelle au Canada, et surtout pas dans l'Ouest du pays. Il y a eu de nombreuses discussions à ce sujet au cours des 40 ou 50 dernières années, soit à peu près depuis la création de la Canada West Foundation. On estime depuis longtemps que ce serait une bonne chose, mais il convient encore aujourd'hui de se demander pourquoi l'idée ne s'est pas concrétisée. Les réseaux électriques provinciaux demeurent encore relativement indépendants les uns des autres.
Il y a bien des facteurs pouvant expliquer le fait que l'on ne soit jamais allé au bout de cette idée. J'ai toutefois appris en discutant avec des gens qui sont dans l'industrie depuis bien plus longtemps que moi que les provinces de l'Ouest n'ont cessé, au fil des dernières décennies, d'étudier cette possibilité pour systématiquement la rejeter par la suite. Bon nombre des motifs invoqués étaient liés au fait que les provinces craignaient de perdre le contrôle de leur propre réseau électrique. Certaines provinces ont parfois refusé d'aller de l'avant de peur de voir leur marché inondé d'énergie produite à bas prix par les centrales au charbon d'Alberta, ce qui aurait défavorisé leurs propres services publics. En d'autres occasions, c'est l'Alberta qui a rejeté l'idée de crainte que l'hydroélectricité bon marché n'oblige ses centrales au charbon à cesser leurs activités.
Et voilà que maintenant, ironie du sort, nous évoquons encore cette possibilité parce que nous devons réduire nos émissions et fermer progressivement les centrales au charbon. Tout cela montre bien que les impératifs liés aux changements climatiques ont donné un souffle nouveau à l'idée d'un réseau intégré. Il ne fait aucun doute que nous devons transformer en profondeur la façon dont nous produisons et consommons de l'électricité si nous voulons atteindre nos cibles de réduction.
Comme Bryson Robertson de l'Université de Victoria et bien d'autres témoins l'ont déjà indiqué, nous devons absolument améliorer la connectivité de nos réseaux provinciaux afin de tirer parti de la diversité des ressources énergétiques accessibles dans les différentes régions du pays, ce qui pourrait aussi nous aider grandement à atteindre nos cibles à un coût raisonnable. C'est particulièrement le cas dans l'Ouest du Canada, région où quelques-unes de nos sources d'énergie éolienne et solaire les plus intéressantes coexistent avec nos meilleures ressources hydroélectriques — en vous précisant que la Canada West Foundation considère que le Manitoba fait partie de l'Ouest canadien.
Nous sommes donc d'avis qu'il faudrait chercher à établir un réseau intégré pour l'Ouest, ce qui, comme l'expérience nous l'a appris, exigera une collaboration plus étroite entre les provinces. Un dialogue soutenu entre les provinces est nécessaire pour déterminer la meilleure façon de partager les avantages qu'un réseau intégré peut offrir. Il faudra apaiser les craintes qu'un tel réseau intégré ait des effets dévastateurs sur le marché de l'électricité d'une province. On devra en outre s'attacher à bien comprendre et communiquer l'ensemble des coûts et des avantages associés à des échanges accrus d'électricité.
Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer à ce chapitre. Premièrement, il peut contribuer à rendre accessibles de précieux renseignements pour l'évaluation des coûts et des avantages d'un réseau intégré. Si l'on reconnaît qu'un réseau mieux intégré peut faciliter la tâche du Canada dans ses efforts pour atteindre les cibles fixées dans le contexte des changements climatiques, il faut bien admettre que ces avantages ne sont pas garantis. La mise en place d'une infrastructure de transmission entraîne des coûts considérables qui grimpent encore lorsque les distances augmentent. On devrait investir dans des interconnexions stratégiques uniquement s'il est établi que les avantages obtenus surpassent les coûts de mise en place de l'infrastructure requise.
Ressources naturelles Canada et d'autres organisations s'emploient déjà à compiler les données qu'il nous manque à cette fin. Nous attendons avec impatience les résultats de l'Initiative de collaboration régionale en matière d'électricité et d'infrastructure stratégique de Ressources naturelles Canada qui vise à évaluer les coûts et les avantages d'un sous-ensemble de projets d'infrastructure prévoyant notamment l'amélioration des interconnexions entre les provinces de l'Ouest.
Le gouvernement peut aussi apporter sa contribution au niveau du financement. Dans les cas où les interconnexions stratégiques semblent constituer une solution logique, le gouvernement fédéral pourrait appuyer financièrement le projet de manière à faire en sorte que ces interconnexions puissent permettre de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Des projets semblables pourraient fort bien être considérés dans le cadre de la nouvelle Banque de l'infrastructure du Canada qui vient d'être créée en vue de mobiliser des capitaux privés et institutionnels pour le financement d'infrastructures vertes. D'après ce que mes collègues de la Canada West Foundation et moi-même avons pu apprendre jusqu'à maintenant, il semblerait que les interconnexions stratégiques suscitent pas mal d'intérêt chez les investisseurs privés.
En conclusion, je vous dirais que les interconnexions électriques stratégiques permettant une plus grande intégration du réseau peuvent contribuer grandement, pour autant qu'on les combine à une tarification du carbone, à l'atteinte des cibles que s'est fixées le Canada dans le contexte des changements climatiques. L'idée n'est pas nouvelle, mais les impératifs actuels en la matière font en sorte qu'il est plus que jamais important d'agir. Le gouvernement fédéral a un rôle clé à jouer à ce chapitre.
Voilà qui conclut mes observations préliminaires. Je vous remercie beaucoup de votre invitation et je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions.
Merci beaucoup, monsieur Martin, et merci à tous nos témoins.
Nous passons maintenant aux questions des membres du Comité. C'est M. Lemieux qui va commencer.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je remercie les trois témoins de leurs présentations aujourd'hui.
Tout d'abord, j'aimerais connaître l'opinion de MM. Brouillette et Martin sur ce qui suit.
Comme vous le savez, malgré l'augmentation du volume des exportations, les valeurs et les prix de l'électricité ont reculé dans la plupart des marchés d'exportation d'électricité habituels du Canada. Les prix moyens à l'exportation pondérés en fonction du volume avaient atteint un sommet de 64 $ par mégawattheure en 2008, mais ils s'établissaient en moyenne à 38 $ par mégawattheure en 2016.
Comment expliquer cette baisse de prix de 40 % sur une période de huit ans dans nos marchés d'exportation d'électricité aux États-Unis?
[Traduction]
Si le prix de l'électricité a diminué, c'est uniquement en raison du niveau de celui du gaz naturel et des hydrocarbures en général. Les marchés nord-américains — et c'est un aspect auquel nos chercheurs pourraient s'intéresser — ne sont pas conçus de manière à favoriser la capacité concurrentielle de ressources à coûts fixes notamment pour ce qui est de l'énergie propre, renouvelable et nucléaire. Dans l'état actuel des choses, ces marchés sont simplement guidés par le prix du gaz naturel.
Pour que des exportations soient possibles du Canada vers les États-Unis, il faudra discuter d'un mécanisme d'établissement des prix. Sans cela aucun échange ne sera envisageable à un prix autre que celui du gaz naturel. C'est ce qui explique la situation actuelle qui doit absolument changer. Tant que le gaz naturel ne sera pas sorti du réseau, ce qui ne sera jamais totalement le cas, il y aura en quelque sorte dysfonction sur le marché. Il faudrait faire quelque chose.
[Français]
[Traduction]
Oui, je suis d'accord. Les prix sont dictés en grande partie par celui du gaz naturel. Aux États-Unis, il est très bon marché. Chez nos voisins du Sud, il n'y a pas tarification des émissions, ce qui n'est pas sans causer quantité de problèmes. Nous pouvons notamment constater que l'État de New York a instauré d'importants programmes de subventions pour éviter une fermeture anticipée des centrales nucléaires en raison de la chute des prix attribuable au gaz naturel.
Pour ce qui est des échanges entre le Canada et les États-Unis, les prix différentiels sont nettement inférieurs, tout au moins pour l'instant. Je crois toutefois qu'il est important de ne pas perdre de vue un élément que l'on a déjà souligné aujourd'hui. Ainsi, la plupart des analyses ont indiqué que nos efforts en vue d'atteindre nos cibles dans le contexte des changements climatiques à l'échelle planétaire, et au Canada tout particulièrement, vont passer en grande partie par la conversion à l'électricité, le remplacement des hydrocarbures et différents autres changements requis sans toutefois que ces transformations n'en viennent nécessairement à dicter les prix à long terme.
Puis-je apporter un éclaircissement? La situation s'explique notamment du fait que les coûts fixes des centrales au gaz des États-Unis sont payés hors marché. C'est un peu la même chose en Ontario où ces coûts fixes sont payés hors marché en vertu de contrats, et où les échanges portent uniquement sur de l'électricité produite à partir de gaz naturel. Les gens parlent de subventions dont peuvent bénéficier les autres formes d'approvisionnement, comme le nucléaire, mais il ne s'agit pas vraiment de subventions. C'est simplement pour leur permettre de soutenir la concurrence, non seulement au titre des coûts variables du gaz naturel, mais aussi par rapport à son coût total à proprement parler.
[Français]
Cette situation étant bien établie dans le contexte des interconnexions, croyez-vous que les renégociations de l'ALENA auront un impact sur nos échanges commerciaux d'électricité avec les Américains? Si oui, de quelle façon cela pourrait-il avoir un effet sur le développement de notre énergie électrique et de nos interconnexions ici, au Canada?
Ma question s'adresse à vous deux.
[Traduction]
Je ne suis pas vraiment qualifié pour vous parler de l'ALENA. Il y a toutefois des négociations au sujet des interconnexions et des échanges d'électricité qui vont se révéler nécessaires, car les États-Unis auront des besoins à combler. Il leur faudra un apport énergétique en provenance du Canada, et un mécanisme devra être mis en place à cette fin.
Je sais que le Québec a présenté des soumissions en réponse à des demandes de propositions de la Nouvelle-Angleterre. Ce sera peut-être la façon de procéder à l'avenir. Je ne sais pas si c'est le cas, mais on aura certes besoin d'un mécanisme quelconque.
Je vais m'abstenir de faire des commentaires à ce sujet, car je ne suis pas moi non plus un expert de l'ALENA. À la lumière de certaines recherches que j'ai menées, je peux toutefois vous dire qu'un dialogue est certes nécessaire.
À l'heure actuelle, bon nombre des provinces ont des tarifs de transport libre-accès qui sont fondés sur le modèle établi aux États-Unis par la Commission fédérale de réglementation de l'énergie. Il y a encore un important travail de réflexion à faire à ce sujet, mais certains efforts de recherche ont déjà été déployés.
Je crois me souvenir d'un article publié par l'Institut C.D. Howe il y a peut-être une dizaine d'années — je vous disais que ce n'est pas une idée nouvelle — qui traitait de la nécessité de revoir ces tarifs de transport et la manière dont la commission américaine les a établis. Tout cela entrave nos possibilités de commerce interprovincial, car nous fixons nos tarifs en fonction de ce qui est requis pour nos échanges avec les États-Unis et de règles qui ne relèvent pas nécessairement de l'ALENA, mais dont on pourrait débattre à cette table.
Cela mis à part, je n'ai jamais entendu personne discuter de cette idée.
[Français]
Suggérez-vous que nous attendions le résultat des négociations de l'ALENA pour prendre position sur notre nouvelle vision des interconnexions au Canada?
[Traduction]
J'espère pour ma part que l'équipe de négociation de l'ALENA en fera un de ses sujets de discussion, et qu'on verra à confier cette tâche à des experts de ces questions.
[Français]
Ma dernière question s'adresse à M. Brouillette.
Vous avez parlé d'une augmentation de la consommation d'électricité. Comme l'électrification des transports va devenir de plus en plus populaire, je me demandais si vous aviez des chiffres à fournir au Comité sur la croissance de la consommation d'électricité prévue au cours des prochaines années au Canada.
[Traduction]
J'ai effectué cette analyse dans le cas de l'Ontario. Je peux vous dire que nous ne pourrons pas atteindre nos cibles de 2030 sans nous tourner vers l'électrification des transports, notamment pour le camionnage, le réseau ferroviaire, les véhicules personnels et à hydrogène, de même que pour le chauffage hivernal. Au total, l'Ontario aura ainsi besoin de 60 % plus d'électricité qu'actuellement. En prévision de 2050, il faut encore doubler ces quantités. C'est donc très considérable.
Cela correspond à la production de 14 nouvelles centrales nucléaires au cours 15 prochaines années si nous voulons atteindre nos cibles de 2030. On aura besoin d'autant d'électricité que cela.
Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
Monsieur Brouillette, je veux commencer avec vous. Vous avez parlé de la nécessité pour le Canada d'agir intelligemment. Que vouliez-vous dire exactement?
Il s'agit en fait d'effectuer les analyses nécessaires pour optimiser la mise en oeuvre du système en considérant notamment les coûts et la demande. Le plus difficile sera de mettre à contribution ces trois atouts dont je parlais dans le cadre d'une démarche bien coordonnée.
Le nucléaire est l'un de ces atouts du fait que le Canada peut construire ces centrales plus vite et à moindre coût que n'importe qui d'autre. L'hydroélectricité nous procure aussi un avantage qui a certaines limites, car on ne peut pas harnacher toutes les ressources hydrauliques et qu'elles ne suffisent pas de toute manière à répondre à la totalité de nos besoins en électricité. Nous profitons aussi de ressources de gaz naturel pouvant nous être très utiles pendant une assez longue période, surtout si on se met à exploiter des idées comme celle de l'ajout d'hydrogène au système.
Pour que tout cela puisse se concrétiser, ce n'est pas de l'apport des provinces dont nous avons besoin, mais bien d'interconnexions et d'une vaste réflexion à ce sujet. En tant que citoyen canadien, je voudrais que l'on s'acharne à réduire les coûts par rapport au sud de la frontière pour pouvoir devenir une superpuissance énergétique capable d'exporter de l'électricité vers l'est des États-Unis. Cette possibilité existe bel et bien. Je procède actuellement à une étude en vue d'étayer le tout. Ce serait la bonne chose à faire pour le Canada.
Considérez-vous que les interconnexions actuellement en place sont des goulots d'étranglement qui entravent nos exportations d'énergie? Est-ce que nos interconnexions sont suffisantes?
Pour l'instant, elles sont suffisantes, compte tenu de la demande actuelle. Toutefois, à long terme, si on prévoit une augmentation importante de la demande d'électricité, selon l'endroit où on va établir les nouvelles installations, il pourrait être nécessaire de construire des interconnexions.
Si on n'adopte pas une approche intelligente, on pourrait construire des interconnexions coûteuses en Ontario, alors qu'il aurait été préférable de les construire au Québec, et vice versa, et rater une occasion en or. Pourvu que tous les aspects économiques soient pris en considération et qu'on prenne des décisions concertées, on pourrait se retrouver avec quelque chose d'unique à offrir aux générations futures.
La dernière fois que le Québec et l'Ontario se sont mises ensemble pour construire une interconnexion, il y a environ huit ans, je crois que le coût s'élevait à 3,5 ou 4 milliards de dollars. C'est l'équivalent de deux centrales nucléaires d'une capacité de 1,2 gigawatt.
Je n'ai pas vraiment de chiffres en tête. Nous nous penchons davantage sur les politiques, mais nous croyons certainement qu'il faut évaluer les coûts par rapport aux avantages que procureraient ces interconnexions. Il y a une raison pour laquelle on ne parle pas d'interconnexions stratégiques avec l'Islande, par exemple. Ce serait beaucoup trop cher, même s'il pourrait être avantageux d'avoir un réseau intégré. Il faut donc tenir compte des deux éléments.
Dans votre déclaration, vous avez indiqué que nous n'avions pas un réseau intégré à l'heure actuelle.
Chose certaine, nous pourrions avoir un réseau beaucoup plus intégré. Il y a des interconnexions limitées entre les provinces. Dans l'Ouest canadien, si je ne me trompe pas, il y a une petite interconnexion entre la Saskatchewan et le Manitoba, puis une autre petite entre la Colombie-Britannique et l'Alberta, mais si on examine la carte, on constate que les interconnexions dans l’axe nord-sud, soit entre le Canada et les États-Unis, sont plus importantes que dans l’axe ouest-est, soit entre les provinces canadiennes.
Vous avez indiqué qu'il y avait des obstacles au commerce interprovincial concernant la distribution d'électricité. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
L'électricité a toujours été la chasse gardée des provinces. Lorsque des occasions se sont présentées au chapitre des interconnexions, nous avons misé sur certaines plutôt que d'autres.
Un exemple serait les discussions de longue date au sujet de l'intégration des réseaux de distribution d’électricité dans le Canada atlantique. Si je reviens aux observations de M. Martin, je dirais que ce qui a empêché les provinces maritimes d'intégrer davantage leurs réseaux d'électricité n'était qu'une notion protectionniste. Elles ont voulu éviter les pertes d'emploi, ce qui est synonyme de gains d'efficience, dans leur province respective. Par conséquent, même s'il y a des échanges d'électricité entre les provinces maritimes, ce n'est pas aussi bénéfique que cela pourrait l'être si on tenait davantage compte du point de vue du consommateur que de celui des groupes d'intérêt financés par les consommateurs.
Le gouvernement fédéral pourrait encourager les provinces, là où il est possible d'accroître l'efficacité, à faire primer les besoins des consommateurs et à favoriser le type d'intégration qui pourrait réduire les inefficacités des réseaux électriques. Je pense particulièrement au Canada atlantique et aussi à l'interconnexion entre la Colombie-Britannique et l'Alberta.
Dans le cas de l'interconnexion Ontario-Québec, le meilleur client du Québec pour l'électricité a toujours été les États-Unis, et c'est encore le cas aujourd'hui. L'Ontario a de grandes capacités d'interconnexion avec le Québec, mais la plupart d'entre elles sont sous-utilisées. On les utilise surtout pour des raisons de fiabilité.
Elles sont libres de tarifs. Nous n'avons pas de mesures fiscales ni de mesures tarifaires qui interfèrent avec ces interconnexions. Ce que nous avons, principalement, ce sont des mesures politiques. Par exemple, l'examen fédéral du commerce interprovincial mené en 1995 avait un chapitre sur l'énergie. Il est demeuré vide. Cela illustre donc le genre de choses qui ont nui à l'amélioration des interconnexions entre les provinces.
Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui.
Monsieur Brouillette, vous avez parlé brièvement des ressources énergétiques distribuées, et je crois que vous avez dit qu'à mesure que ces ressources connaîtront une croissance, elles augmenteront la valeur des interconnexions et permettront d'équilibrer le réseau. J'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.
De façon générale, l'idée des ressources énergétiques distribuées consiste à maintenir l'approvisionnement en énergie au niveau local — je pense que vous en avez parlé —, ce qui va à l'encontre de la construction d'infrastructures entre les provinces, car on essaie de trouver des solutions collectivement.
L'avantage des ressources énergétiques distribuées, c'est qu'en accumulant l'énergie solaire dans la batterie, elles permettront d'atténuer les pointes dans le système de distribution, créant ainsi, du point de vue du réseau, un profil beaucoup plus lisse. C'est un atout lorsqu'on veut commencer à optimiser l'utilisation des infrastructures de transmission et de distribution. On absorbe l'énergie solaire durant le jour, et lorsqu'on n'en a pas besoin, on la stocke dans la batterie. La batterie peut assurer l'alimentation en toutes circonstances, et on peut en quelque sorte niveler la demande. Pour l'instant, selon moi, il s'agit de l'une des façons les plus rentables de profiter des ressources énergétiques distribuées. Le fait de répartir la demande permettra à l'ensemble du système, qui aura toujours une électricité à moindre coût — à mon avis — d'être plus efficace.
Lorsque vous dites « batterie »... À l'heure actuelle, on peut dire que l'hydroélectricité et le nucléaire sont les énergies de base. Cela dit, les interconnexions vont-elles faciliter la combinaison de l'énergie éolienne et solaire et des énergies de base, si nous avons des provinces qui ont l'une, mais pas l'autre? Par exemple, certains témoins des provinces maritimes et de l'Atlantique nous ont parlé des interconnexions qui pourraient transporter de l'hydroélectricité depuis le Labrador pour compenser l'énergie éolienne produite ailleurs.
L'une des grandes difficultés en ce qui concerne les énergies renouvelables est le fait qu'au Canada, il fait froid et noir en hiver, et l'énergie solaire ne convient pas vraiment dans les climats nordiques. C'est l'une des raisons pour lesquelles je considère que le Nord-Est des États-Unis a moins d'options d'électrification, et sa proximité avec le Canada fait en sorte que nous pouvons lui acheminer de l'électricité. De plus, cela peut se faire d'est en ouest, parce que les options renouvelables seront moins efficaces ici que là-bas.
Si on essaie d'établir un système fondé sur les batteries solaires au Canada, notre électricité coûtera plus cher que celle produite par le même système en Californie. On a moins d'heures d'ensoleillement. C'est ainsi que cela fonctionne.
Monsieur Adams, vous avez parlé brièvement de l'importance d'une entente entre Terre-Neuve et le Québec. J'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.
Oui. Merci de me donner cette possibilité.
Le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador est en train de construire une centrale hydroélectrique qui n'a aucune capacité de stockage dans la partie inférieure du fleuve Churchill, à Muskrat Falls, près de Happy Valley-Goose Bay. Les lignes de transport connexes que Terre-Neuve construit du Labrador jusqu'à l'île et de l'île jusqu'au Cap-Breton ne suffisent pas à transporter la capacité de production de pointe de la centrale de Muskrat Falls. Si Terre-Neuve-et-Labrador ne parvient pas à une entente avec le Québec pour ce qui est du stockage d'énergie, le projet de Muskrat Falls va déverser presque toute sa production au printemps, soit au moment de l'année où le débit d'eau est à son maximum, permettant ainsi une pleine production.
Terre-Neuve est allée de l'avant avec la construction du projet de Muskrat Falls, malgré le fait qu'en vertu du contrat de 1969, Hydro-Québec possède et contrôle les actifs du cours supérieur du fleuve Churchill. Depuis le début, Terre-Neuve avait prévu utiliser la production extraite du cours supérieur du fleuve Churchill pour remédier au problème de débit saisonnier de Muskrat Falls, mais cette province n'a pas les droits contractuels de le faire.
Plus Terre-Neuve s'investit dans le projet, en dépensant des milliards de dollars alors qu'elle n'a pas les droits contractuels de le faire, plus la situation risque de s'aggraver dans la province. Terre-Neuve-et-Labrador doit conclure une entente de toute urgence avec Hydro-Québec. Étant donné que le gouvernement fédéral est totalement à l'origine du projet de Muskrat Falls, en raison de ses garanties de prêt, au départ par le gouvernement Harper, et maintenant, le gouvernement Trudeau, le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de courtier. Il doit réunir ces deux parties, de sorte qu'elles puissent arriver à une entente de stockage juste et raisonnable pour la production excédentaire de Muskrat Falls au printemps.
D'accord. Je vais poser une brève question à M. Martin.
Je crois que vous avez parlé d'utiliser la Banque de l'infrastructure du Canada comme source de financement possible pour les interconnexions et du fait que des sociétés de financement pourraient être intéressées. Nous avons également beaucoup entendu parler des coûts et de ce genre de choses. J'aimerais que vous nous disiez en quoi cela se compare aux coûts qu'on retrouve habituellement en Colombie-Britannique ou n'importe où ailleurs où il y a des services publics provinciaux dont les profits vont aux provinces et en quoi le recours à une banque d'infrastructure plus privée pourrait influer sur le coût.
Je ne peux pas vraiment me prononcer sur le coût de chaque service, mais il reste que ce n'est pas quelque chose que le gouvernement fédéral doit assumer en entier. Cependant, si cela en vaut la peine et s'il s'agit d'une bonne décision à prendre, à ce moment-là, il y aurait de l'argent à faire, que ce soit un investisseur privé ou un service public qui prendrait cette décision économique, selon la province. À la lumière de nos discussions, nous savons qu'il y a des investisseurs privés qui sont prêts à risquer leur capital parce qu'ils estiment que c'est une idée valable et sensée sur le plan économique. C'était le point que je voulais faire valoir ici.
À ce moment-là, il s'agit de déterminer ce que l'on veut mettre à risque. Le gouvernement prend cette décision dans de nombreux cas. Je ne dis pas que ce sont des investissements garantis à 100 %, mais on a fait preuve de diligence raisonnable. S'ils sont prêts à assumer ce risque, là où les contribuables ne le sont pas nécessairement, c'est généralement une bonne chose.
Je suis désolé, monsieur Cannings, mais je vais devoir vous arrêter ici.
Monsieur Harvey, je crois que vous êtes le suivant.
J'aimerais tous vous remercier d'être ici aujourd'hui, mais pour commencer, mes questions vont s'adresser à vous, monsieur Adams.
Dans votre déclaration, vous avez longuement parlé de la souveraineté des provinces et de leur autonomie. Vous avez dit que cette autonomie devrait être non seulement reconnue, mais aussi renforcée, et vous avez parlé de l'importance de la production locale au sein de chacune des provinces. Selon vous, quel est le meilleur moyen pour les provinces d'un bout à l'autre du pays d'acquérir cette autonomie énergétique, particulièrement pour celles qui ont un déficit énergétique? Voilà pour ma question.
Quelle est la meilleure façon de résoudre ce problème de production de base, étant donné la nature intermittente de l'énergie éolienne et solaire dans notre climat nordique?
Sur le plan constitutionnel, les 10 provinces canadiennes sont des administrations distinctes. Nous avons ici 10 scénarios différents pour l'électricité partout au pays. La situation de l'Île-du-Prince-Édouard est très différente de celle de l'Alberta ou de la Colombie-Britannique, ou même de ses provinces voisines, comme c'est le cas pour beaucoup d'États américains. Chaque province doit trouver sa propre voie, que ce soit des services publics, des sociétés privées ou des marchés hybrides.
Un facteur que nous avons tous en commun est le fait que les forces du progrès technologique dans le secteur de l'énergie se manifestent à l'échelle du globe. Elles ne se limitent pas aux diverses administrations.
Je suis très optimiste quant à l'avenir d'une petite production d'électricité distribuée à partir d'une centrale de cogénération au gaz naturel. Cette possibilité pourrait donner lieu à un approvisionnement en électricité plus local et a le potentiel économique d'empêcher une production centralisée à l'avenir.
Vous avez parlé plus particulièrement des provinces qui ont un déficit énergétique. L'Île-du-Prince-Édouard en est une. Cette province n'est pas autosuffisante en matière de production d'électricité. Il est beaucoup plus économique pour elle d'obtenir le gros de son approvisionnement en électricité auprès de ses voisins. Les interconnexions sont essentielles dans ce cas-là.
Encore une fois, quel est le rôle du gouvernement fédéral à cet égard? Réunir les parties et les encourager à trouver des gains d'efficience pour aider les consommateurs locaux est sans aucun doute un rôle qui lui revient, mais la construction des systèmes de distribution va bien au-delà de son rôle.
Dans le même ordre d'idées, en ce qui concerne la production locale, je conviens que l'Île-du-Prince-Édouard est un excellent exemple d'une province qui a un déficit énergétique et qui dépend des interconnexions et de l'énergie produite par d'autres sources. Vous avez critiqué vertement l'énergie hydroélectrique, particulièrement à Muskrat Falls, mais aussi de façon générale. Lorsqu'on pense à la cogénération au gaz naturel et aux petits réacteurs modulaires, croyez-vous que les PRM seraient une option viable si on vise une production plus locale à l'avenir?
Il y a un rapport qui a été publié récemment sur la technologie des PRM aux États-Unis. On a investi massivement dans cette technologie pendant plus de 50 ans. L'équipe de recherche en est arrivée à la conclusion qu'il y a très peu d'avenir pour ces technologies.
Il y a des initiatives privées très intéressantes dans le domaine des petits réacteurs modulaires, mais si on veut des solutions prêtes à utiliser, sachez qu'on est encore à cent lieues.
Dans les provinces où il n'y a pas d'hydroélectricité ou bien l'hydroélectricité n'est pas rentable, diriez-vous que le gaz naturel est la principale option?
Absolument. Si on regarde tous les projets hydroélectriques en cours au Canada en ce moment ou ceux des dernières années, leur coût marginal est bien supérieur à la valeur économique de cette production. Cela inclut le Québec, soit dit en passant. Le projet de la Romaine perd beaucoup d'argent. Du point de vue du coût marginal, toutes les exportations d'électricité au Canada sont déficitaires.
Je reconnais que les coûts initiaux de l'hydroélectricité sont importants, mais étant donné qu'il s'agit d'une énergie propre à long terme, je comprends pourquoi diverses administrations l'ont choisie pour en faire leur énergie de base.
Dans le contexte actuel, je conviens que ce n'est probablement pas la responsabilité du gouvernement fédéral de construire les interconnexions. En revanche, je crois qu'il incombe au gouvernement d'amorcer la conversation avec les provinces sur la façon dont elles pourraient utiliser les interconnexions en vue de protéger leur réseau énergétique et de travailler en collaboration afin de réduire les impacts économiques à long terme sur les consommateurs d'électricité. Seriez-vous d'accord avec cela?
Absolument. Vous l'avez dit plus éloquemment que j'aurais pu le faire, mais je suis parfaitement d'accord.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Monsieur Brouillette, vous avez dit que les interconnexions entre les provinces ne seraient pas nécessaires au cours des huit prochaines années du fait qu'il y a un surplus présentement. Par contre, vous dites qu'il faut se soucier de l'avenir. J'ai donc un peu de difficulté à comprendre votre raisonnement voulant qu'on n'ait pas à se préoccuper des interconnexions.
Il est question d'exportation d'électricité vers les États-Unis. Le rapport d'Hydro-Québec que j'ai cité compare les prix de l'électricité par kilowattheure. En Ontario, le prix varie de 16 ¢ à 17 ¢, mais il est de 27 ¢ à Boston. On parle de 29 ¢ pour New York, de 31 ¢ pour San Francisco et de 20 ¢ pour Detroit. Comme les prix sont beaucoup plus élevés aux États-Unis qu'au Canada, je me demande pourquoi vous ne recommandez pas que nous investissions dans les interconnexions, que ce soit présentement ou dans l'avenir.
[Traduction]
Il y a deux choses: le présent et l'avenir. Dans le moment présent, la raison pour laquelle les interconnexions entre l'Ontario et le Québec n'ont pas besoin de travail supplémentaire, c'est qu'il y a tellement d'électricité des deux côtés qu'ils ne peuvent pas s'en débarrasser. Pourquoi y consacrer de l'argent? Nous avons trop d'électricité et nous ne pouvons pas nous en débarrasser. En ce moment, ils essaient de s'en débarrasser. L'Ontario le fait beaucoup, et le Québec essaie d'en débarrasser beaucoup aussi. La situation des prix aux États-Unis a très peu à voir avec la trop grande quantité d'électricité que nous avons ici.
Entre les provinces, c'est une chose. L'axe nord-sud des États-Unis en est une autre. Nous avons des interconnexions en construction au lac Érié, et nous avons des soumissions au Québec sur beaucoup de projets visant la transmission d'électricité en Nouvelle-Angleterre. Ce sont toutes de bonnes idées.
Je vais devoir vous arrêter.
Messieurs, merci à vous trois de nous avoir aidés aujourd'hui à mener cette importante étude. Nous allons interrompre la séance, puis nous passerons à notre groupe de témoins suivants. Je vous remercie du temps que vous nous avez consacré aujourd'hui.
Silence. Nous reprenons. Nous avons trois témoins, tous les trois par vidéoconférence.
Messieurs, merci d'être là avec nous aujourd'hui. Chacun de vous aura un maximum de 10 minutes pour nous présenter un exposé. Une fois que vous aurez tous les trois terminé, nous allons passer aux questions des membres du Comité.
Commençons par M. Shaffer, professeur à l'Université Simon Fraser.
J'aimerais d'abord vous remercier de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui. Je m'intéresse depuis longtemps à une meilleure intégration, comme celle des marchés provinciaux de l'électricité.
Je suis professeur affilié à l'école de politique publique de l'Université Simon Fraser, et je suis conseiller depuis de nombreuses années. L'une de mes premières affectations a été de participer à une étude approfondie des aspects techniques, économiques et contractuels d'un réseau électrique de l'Ouest. L'étude avait été entreprise conformément à une entente conclue en 1980 entre les trois provinces des Prairies et visait la faisabilité et le bien-fondé de la vente par le Manitoba de 1 000 mégawatts d'énergie garantie à l'Alberta, et de 500 mégawatts à la Saskatchewan.
Cette étude a servi à cerner et évaluer des options de configurations d'interconnexions. Elle a fait l'analyse des incidences économiques, des avantages et des coûts, des prix et des modalités de propriété. Elle a fait ressortir un lien à haute tension avec la Colombie-Britannique. Elle a porté sur les retombées économiques de la région et a estimé les avantages et les coûts. Dans l'ensemble, l'étude a permis de conclure qu'il y aurait des économies de coûts sur les services publics, et qu'il y aurait, sur le plan des avantages et des coûts sociaux, des avantages nets pour l'ensemble de la région.
Malgré les avantages nets prévus en général, comme vous le savez, le réseau électrique de l'Ouest ne s'est pas réalisé. Les différentes provinces ne pouvaient passer outre certains aspects d'ordre provincial. Manitoba Hydro était manifestement concentré sur le commerce nord-sud, et l'Alberta et la Saskatchewan se concentraient sur leurs propres ressources et leur propre potentiel de production. Il y a 35 ans de cela, et je n'ai pas l'impression que les choses n'ont pas beaucoup changé. Des liens interprovinciaux plus fermes offrent des possibilités d'avantages nets considérables, mais selon ce que nous avons appris du réseau électrique de l'Ouest qui ne s'est pas matérialisé, cela ne suffit pas à cerner les possibilités qui offrent des avantages économiques et environnementaux. Il est essentiel d'harmoniser les facteurs proprement provinciaux aux plus vastes intérêts régionaux et nationaux.
Je suis à Vancouver, à l'Université Simon Fraser, et je connais très bien les circonstances actuelles en Colombie-Britannique et en Alberta, étant donné qu'il y a assez longtemps que j'ai quitté les Prairies. Il y a toujours eu des synergies et des possibilités de relations commerciales mutuellement avantageuses entre le système principalement hydroélectrique de la Colombie-Britannique et le système thermique de l'Alberta. Ces possibilités ont été explorées dans une certaine mesure, mais pas entièrement, en raison des contraintes de la capacité d'interconnexion, des critères de planification — le critère d'autonomie de la Colombie-Britannique ressort particulièrement — et la dominance des perspectives provinciales, qui suscitent des préoccupations controversées concernant l'accès équitable aux marchés et la transmission sur le territoire des uns et des autres.
Avec les développements qui ont eu lieu et ceux qui sont prévus en Colombie-Britannique et l'élimination graduelle du charbon et l'accent qui est mis sur l'énergie éolienne et les énergies renouvelables en Alberta, les possibilités, le cas échéant, sont nettement meilleures aujourd'hui.
En raison de la réduction de la croissance des besoins liés à l'industrie qui consomme le plus d'électricité, conjuguée à la réalisation possible du projet hydroélectrique du site C, B.C. Hydro aura beaucoup d'électricité excédentaire à court et à moyen terme, et cette électricité pourrait servir à remplacer le charbon et toute autre production fédérale en Alberta. Surtout, à long terme, avec le développement possible du site C, l'ajout d'une capacité de production à Revelstoke et la réfection et l'amélioration des installations existantes, B.C. Hydro aura une capacité flexible qui pourrait soutenir et favoriser l'expansion rapide de l'énergie éolienne en Alberta. Cela pourrait être la réserve que l'Alberta serait très vraisemblablement obligée d'obtenir à partir de turbines à gaz monocycle, avec les coûts économiques et les émissions de GES que cela comporterait.
Le remplacement de la production d'énergie thermique et le recours à l'hydroélectricité en guise de réserve à l'appui d'une plus grande production d'énergie éolienne représentent deux possibilités évidentes qui pourraient être réalisées grâce à des liens plus solides et à de la coordination. Il existe aussi d'autres possibilités. Les ressources thermiques et autres ressources de l'Alberta pourraient fournir la capacité de réserve qu'il faut au système hydroélectrique de la Colombie-Britannique au cours des années de faibles niveaux d'eau, et elles pourraient généralement permettre à la Colombie-Britannique de garantir un approvisionnement sûr sans le coûteux critère d'autonomie qui est en ce moment en vigueur.
Si la capacité d'interconnexion était supérieure et que la production éolienne excédentaire de l'Alberta passait par la Colombie-Britannique pour ainsi avoir un meilleur accès aux marchés des États-Unis, cela pourrait améliorer les retombées économiques et encourager le développement de l'énergie éolienne dans cette province. Cela pourrait atténuer les chutes de prix qui peuvent se produire lors d'épisodes de grands vents.
Il ne manque pas de possibilités. Pour mieux comprendre toutes les possibilités, posez-vous la question suivante: comment les réseaux se développeraient-ils s'il n'y avait pas de frontière et qu'il s'agissait d'un unique territoire, si le réseau était intégré ou combiné? Une vision apolitique de ce réseau hypothétiquement combiné ferait ressortir les possibilités, et une analyse permettrait de déterminer le coût de renonciation, ou ce à quoi ils renoncent en ne cherchant pas à réaliser ces possibilités. L'enjeu serait alors de voir comment y arriver de façon institutionnelle, avec un réseau planifié en Colombie-Britannique, et politiquement, avec la nécessité que les deux provinces perçoivent un juste partage des bénéfices d'une meilleure capacité d'interconnexion et de coordination.
D'après moi, le gouvernement fédéral peut jouer un rôle important pour ce qui est de rassembler les parties afin qu'elles analysent les possibilités dans le contexte d'un réseau intégré, déterminent de quoi cela aurait l'air et s'attaquent aux contraintes institutionnelles et politiques. Le gouvernement a aussi d'importants intérêts en jeu. Une plus grande efficacité sur les plans du développement et de l'exploitation des réseaux électriques sera de plus en plus importante pour la compétitivité et l'efficacité de l'économie nationale, alors qu'on délaissera la production thermique pour plutôt opter pour l'électrification des transports et d'autres secteurs, comme on peut s'y attendre à court terme et, certainement, à plus long terme. Il sera important de délaisser plus rapidement la production thermique et de miser moins sur la capacité de réserve de la production thermique pour les énergies renouvelables afin d'atteindre les cibles de réduction de GES de la façon la plus économique possible.
Enfin — et c'est un fait important, je pense —, raffermir le commerce d'électricité dans l'axe est-ouest peut réduire la dépendance aux marchés américains et les excédents du commerce de l'énergie qui, pour des raisons politiques aux États-Unis, peuvent servir à limiter le commerce dans les secteurs manufacturiers et autres.
Merci.
Merci, monsieur le président.
J'ai quelques petites choses à dire rapidement pour commencer. Est-ce qu'on vous a distribué une carte qui ressemble à celle-ci?
Excellent. Je vais parler de cela. Et deuxièmement, je vais vous transmettre un message d'intérêt public. Les diverses organisations avec lesquelles j'ai passé du temps m'ont demandé de veiller à ce que vous compreniez que ce sont mes opinions, et pas nécessairement les opinions d'Hydro One ou de la Société indépendante d'exploitation du réseau électrique de l'Ontario.
Cela étant dit, je n'ai que deux points à vous présenter.
Le premier est lié à la carte. Quand vous demandez à une personne du secteur de l'électricité comment elle voit le monde, cette carte vous le montre. Il y a trois gros morceaux: l'interconnexion dans l'Est, qui englobe le Québec, le Texas, et l'interconnexion dans l'Ouest. C'est ainsi que nous voyons l'Amérique du Nord. Cela peut vous paraître étrange, car en réalité, notre réseau est interconnecté à l'interconnexion de l'Est entre Attawapiskat, dans le nord, et Key West dans le sud. Étant donné que les électrons voyagent à la vitesse de la lumière, tout ce qui se produit en chemin — un écureuil qui entre dans une génératrice à Miami ou une chute de neige dans le Grand Nord canadien — sera immédiatement vu par de nombreux opérateurs de salle de commande, et ce, à l'instant où l'événement se produit. Ils pourraient ne pas savoir ce qui s'est passé avant trois autres mois. C'est vraiment une merveille d'ingénierie.
Compte tenu de cette vision du monde — l'interconnexion de l'Est, l'interconnexion de l'Ouest et le Texas —, vous remarquerez les limites géographiques que vous voyez habituellement en géographie politique, soit les États, les provinces et tout cela. L'électricité est transportée au-delà de ces limites au moyen d'interconnexions. Il y a un principe fondamental, et c'est que la plupart de ces réseaux sont construits pour être autonomes à l'intérieur d'une entité souveraine, mais qu'ils sont reliés au moyen d'interconnexions.
Je pensais que vous souhaitez aujourd'hui discuter en partie de la valeur des interconnexions. Je ne vais pas m'étirer en longueur, car il semble y avoir beaucoup de sujets différents, et beaucoup de manifestations sur cela. Je vais cependant vous signaler deux choses manifestes à propos de cette carte. La première, c'est que l'interconnexion de l'Est n'est pas interconnectée à l'interconnexion de l'Ouest — ni aux États-Unis ni au Canada. C'est flagrant. Marvin en a parlé un peu, mais nous n'avons jamais envisagé sérieusement, en tant que pays, d'interconnecter notre propre pays.
Cela comporterait des avantages pour le Canada. Cela donnerait lieu à un marché intéressant, car si le Canada était interconnecté, il s'agirait de la seule route d'interconnexion entre l'Est et l'Ouest des États-Unis. Le Texas fait en ce moment sa propre petite affaire pour diverses raisons historiques intéressantes et amusantes — et nous pourrions en parler pendant la période des questions si cela vous intéresse —, mais c'est flagrant. Je vais arrêter de parler de cette carte pour le moment, et si des gens ont des questions, nous pourrons en parler.
Le deuxième point que je veux soulever, c'est que les électrons en soi qui se déplacent à la vitesse de la lumière et qui nous permettent d'allumer nos lumières et d'utiliser tout ce que nous avons sont en fait neutres sur le plan de la technologie. La technologie n'est pas un facteur. Il leur importe peu d'avoir été produits par un réacteur nucléaire, une cellule photovoltaïque ou une interaction chimique à l'intérieur d'une pile. C'est un produit tout à fait fongible. Je ne connais aucun autre produit qui peut être fait de tant de manières différentes. L'acier ne peut être fabriqué d'autant de manières différentes. C'est vraiment remarquable.
Donc, les électrons sont en soi neutres sur le plan technologique. Les fonds de dotation de nos divers territoires sont tous différents. Nous avons tous des partis pris divers en matière de politique publique, concernant la façon dont les électrons sont produits. Une fois que cela se produit, les interconnexions et le réseau se fichent de la façon dont ils ont été fabriqués. Ils se déplacent à la vitesse de la lumière sur des fils de cuivre et aboutissent là où ils sont censés aboutir.
La tension entre les compétences politiques et les pays exportateurs d'électricité où se trouvent ces compétences politiques, du point de vue des politiques, qu'il s'agisse d'énergie propre, d'énergie éolienne, d'énergie solaire, d'énergie thermique, du charbon, du gaz, de l'énergie de la biomasse, de l'énergie hydraulique — peu importe la technologie employée —, cette tension se sent majoritairement dans les territoires souverains comme, souvent, les provinces et les États. Aux États-Unis, la compétence fédérale prend plus de place qu'au Canada, mais toutes ces choses ajoutent à cela. Les combustibles utilisés sont vraiment très divers, même à l'intérieur de ces territoires, mais une fois qu'un électron est produit, il se déplace au moyen des interconnexions.
Monsieur le président, puisque j'ai présenté mes deux points, je vais attendre les questions.
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je vous remercie de m'avoir invité à vous parler à titre de particulier canadien, de Canadien qui a quand même passé 40 ans dans le secteur de l'électricité, non seulement en Ontario, mais à l'échelle du Canada, de l'Amérique du Nord et du monde.
Pour moi, la discussion d'aujourd'hui se situe dans le contexte global des cibles à long terme du Canada concernant l'atténuation des changements climatiques, précisément 2050. Ces dernières années, de nombreux rapports et études ont été rendus publics, et tous ont souligné la nécessité de remplacer la combustion des combustibles fossiles par l'électricité et les biocarburants. La modélisation la plus rigoureuse dont je suis au courant a été faite dans le cadre du Projet Trottier pour l'avenir énergétique, dont le rapport a été publié en avril 2016. D'après moi, c'est le rapport qui a le mieux reconnu la nécessité d'un réseau d'électricité fiable — qui garantit au client que la lumière s'allumera dès qu'il touche à l'interrupteur, peu importe les conditions climatiques à l'extérieur.
Une des principales constatations de Trottier est la croissance de la demande d'électricité découlant d'une grande variété d'options de décarbonisation. En ce moment, l'électricité répond à environ 22 % des besoins de consommation domestique. On s'attend à ce que cela augmente à 60 %, ce qui veut dire qu'il faudra presque tripler l'infrastructure de production d'électricité actuelle sur les 30 à 40 prochaines années. Nous ne parlons pas que de petits réglages mineurs, mais bien d'une transformation majeure du secteur canadien et mondial de l'énergie, et ce, compte tenu de résultats robustes en matière de conservation de l'énergie.
Pour la discussion d'aujourd'hui sur les interconnexions électriques stratégiques, j'aimerais reculer un peu dans le temps. Il y a plus de 100 ans, nous n'avons pas établi au début un réseau électrique intégré. Nous avons commencé par des microréseaux dans chaque grande ville. Au fil du temps, nous nous sommes mis à relier ces microréseaux afin d'en améliorer aussi bien la fiabilité que les aspects économiques.
Aujourd'hui, nous avons un réseau nord-américain solide, comportant l'interconnexion de l'Est, l'interconnexion de l'Ouest et le Texas. L'orientation de ces marchés et interconnexions est plutôt sur un axe nord-sud qu'un axe est-ouest, mais l'impulsion de ces interconnexions a toujours été la fiabilité et les aspects économiques, ce qui signifie qu'ils sont fonction de l'intérêt du consommateur.
Chaque province a développé son secteur de l'électricité selon les ressources dont elle dispose, qu'il s'agisse du charbon et du gaz, de l'hydroélectricité, du nucléaire ou d'une combinaison de ressources. Récemment, on constate une expansion de l'hydroélectricité et d'autres ressources renouvelables, comme l'énergie éolienne et solaire. Les possibilités diffèrent d'une province à l'autre, dans une grande mesure parce que les ressources sont là où elles se trouvent. Les décisions prises tiennent aussi compte de l'autonomie, de la nécessité de ne pas devoir compter sur d'autres provinces, sauf en cas d'urgence. Étant donné qu'il est nécessaire d'améliorer le réseau électrique au moyen d'une production utilisant des sources qui n'émettent pas de GES, il faut jeter un regard critique sur le principe de l'autonomie afin de pouvoir décarboniser l'économie avec le temps, et ce, au coût le plus bas, tout en assurant la continuité des services.
Il existe un exemple récent de deux provinces qui ont adopté une approche différente par l'intermédiaire de leurs services publics. Je parle de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse, et du développement de Muskrat Falls et du projet de construction de la ligne de transport électrique sous-marine, qui reliera les deux provinces. Une fois que ce lien sera terminé, il va non seulement faciliter d'importantes réductions des émissions de GES en Nouvelle-Écosse, mais il va aussi améliorer la fiabilité des services à Terre-Neuve-et-Labrador en connectant cette province au réseau nord-américain. Ce qui est différent de cette approche, c'est qu'elle s'est fondée sur un partenariat plutôt que sur une relation acheteur-vendeur traditionnelle, les deux parties ayant assumé une part du risque. Ce projet a aussi reçu une aide du fédéral sous la forme d'une garantie de prêt réduisant les coûts d'emprunt, et ces économies profiteront au consommateur.
D'après moi, cette collaboration entre provinces qui s'associent et qui assument ensemble les risques financiers est essentielle. Ce n'est ni simple ni facile à faire, mais il faut emprunter cette voie.
Il faut aussi discuter de la question de savoir qui paie et de la façon dont l'infrastructure est financée. L'ancien modèle réglementé des services publics était simple. Le service public, peu importe qui en était propriétaire, obtenait l'approbation d'un organisme de réglementation économique, et fort de cette approbation, trouvait du financement, habituellement par emprunt et par capitaux propres. Des lignes de transport marchandes ont aussi récemment été proposées et construites, par exemple la ligne de transport d'électricité entre le Montana et l'Alberta. Dans ce contexte, des expéditeurs qui veulent accéder au marché signent des contrats avec le transporteur, lequel va chercher du financement — encore là, par emprunt et capitaux propres — en se fondant sur la force du libellé des contrats. Ce sont deux modèles valables, mais le modèle marchand n'a été utilisé que sur des territoires reliés ayant des marchés d'électricité ouverts.
Outre la question du financement de la construction de l'infrastructure, il y a la question de savoir qui va payer au bout du compte. Dans le secteur de l'électricité, c'est pratiquement toujours le client qui paie, selon le principe de l'utilisateur-payeur. Autrement dit, le consommateur paie en fonction de son utilisation.
Bien sûr, il est également possible d'appliquer un modèle mettant le contribuable à contribution, soit directement — autrement dit, le gouvernement financerait les infrastructures jusqu'à un certain niveau —, soit au moyen de subventions.
Le client et le contribuable ne font habituellement qu'un. C'est surtout en Ontario que la distinction entre les deux commence à se gommer et qu'on s'éloigne d'un système purement payé par le consommateur. L'Ontario offre aussi un autre contre-exemple, pour l'avenir. Le secteur de l'électricité est très capitalistique, et les actifs sont très durables, mais le calcul est très simple. De lourds investissements en temps assez court font s'élever rapidement, à mesure, les prix de l'électricité, et on commence à refiler les coûts au consommateur. Il faut le comprendre pour chaque décision capitale qu'on prend. Toutes ces décisions auront aussi des répercussions locales, qu'il s'agisse de gros projets hydroélectriques, de projets éoliens, de centrales solaires, de transport, de densification urbaine, de transports en commun et ainsi de suite.
Enfin, il y a les échanges canado-américains. Même si, au cours de l'année, le transport s'effectue généralement du Canada vers les États-Unis, il arrive qu'il s'inverse vers le nord. Les relations commerciales ont été positives et bénéfiques pour les deux parties. Malgré la position actuelle de l'administration Trump sur les mesures à prendre pour lutter contre les changements climatiques, nous continuons de recevoir des signaux très encourageants de beaucoup d'États américains pour intensifier les échanges, particulièrement de produits dont la fabrication n'émet pas de gaz à effet de serre.
J'ai parlé, plus tôt, de nouer des partenariats interprovinciaux pour les infrastructures. La vente accrue d'électricité propre sur le marché américain multiplie les occasions de partenariats entre les provinces.
Voilà qui conclut mes remarques. J'ai hâte de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, messieurs, d'être ici et de nous faire connaître vos points de vue.
Monsieur Burpee, ma première question est pour vous.
Pouvez-vous nous donner votre opinion? Notre pays devra choisir la priorité à accorder à l'augmentation de l'offre, si vous voulez. Quelle est votre opinion sur l'ampleur de notre tâche pour moderniser ou mettre à niveau notre réseau électrique, par rapport aux investissements que nous devrions consacrer aux interconnexions interprovinciales. Où ces choix stratégiques seraient-ils les plus avantageux?
Quel que soit le scénario de décarbonisation, il est absolument certain, dans mon esprit, que le réseau modernisé de distribution sera beaucoup plus complexe qu'aujourd'hui. Le consommateur y sera beaucoup plus présent, grâce à la demande variable, au mode de recharge des véhicules électriques et que sais-je. Le réseau de transport, qui se superpose à ce réseau et qui doit s'y brancher sera lui aussi beaucoup plus complexe qu'aujourd'hui. Il faut faire entrer en ligne de compte le moment du renouvellement et de la mise à niveau et l'évolution ultérieure des choses.
En ce qui concerne les interconnexions stratégiques, chaque fois que je déroule la carte du Canada, j'entends parler du réseau est-ouest. J'ai vécu quelque temps dans le Nord-Ouest de l'Ontario et je m'y suis souvent rendu par avion. Il n'y a pas beaucoup de vides là-bas, mais, compte tenu des occasions à saisir, je me représente toujours l'Ontario comme tourné vers l'est et le Manitoba vers l'ouest. Il y a été fait allusion. Le Manitoba et la Colombie-Britannique ont encore des ressources hydroélectriques à mettre en valeur et, manifestement, il y a des besoins pour réduire la consommation de charbon et de combustibles fossiles en Saskatchewan et en Alberta.
En Ontario, c'est un peu différent, puisqu'il n'y a pas autant de déplacement à faire maintenant que le charbon est affaire du passé. Il reste du gaz, mais si nous envisageons de recourir à l'électricité pour remplacer les carburants et le chauffage des locaux, nous constatons que nous aurons besoin de plus. Il s'agit de savoir comment l'Ontario et le Québec réussiront à mieux collaborer, si... Je ne suis pas certain si le terme « concurrence » convient, mais c'est une relation différente en ce qui concerne l'objet et les modalités des investissements. C'est différent du passé, mais j'aime toujours dire que les belles occasions à saisir sont de l'Ontario vers l'est et du Manitoba vers l'ouest.
Merci.
Ma prochaine question, je la pose à M. Hinds, que je remercie, en passant, pour la carte.
J'ai une question semblable pour vous sur les occasions qu'offrent les interconnexions interprovinciales et sur les endroits où, d'après vous, nous aurions de bons avantages à saisir, si on le faisait ici, au Canada.
Cette interconnexion a souvent été examinée, et je pense que le retour le plus récent sur une pleine connexion entre l'Est et l'Ouest remonte à 2005. TransCanada avait effectué une étude et essayait d'obtenir de l'appui pour une connexion entièrement transcanadienne. Nous n'en sommes pas loin.
L'Ontario est relié au Manitoba par une ligne de 115 kilovolts, et je crois que l'Alberta est connectée, dans le Nord, avec la Saskatchewan. En principe, il n'est pas difficile de créer un lien. La question est de savoir quelle en sera la puissance, si on le veut transcanadien. Je pense que pour vraiment influer sur les débits d'électricité, elle devrait être très forte. L'opinion de mes confrères vaut la mienne. Je lance à tout hasard le chiffre de 4 000 mégawatts. Il s'agit, pour une interconnexion interprovinciale, plutôt que du nord vers le sud, comme nous l'avons fait jusqu'ici, de la synchroniser avec la charge de pointe, qui se déplace dans le pays, et qui coïncide avec l'heure du souper.
Je suppose que tous les systèmes sont à peu près semblables, mais, en réalité, ils fluctuent selon la période de la journée. Par exemple, le système ontarien, que je connais le mieux, consomme, la nuit, environ 10 000 mégawatts. Cet été, par journée de canicule et de climatisation, c'était 21 000 mégawatts. Cette variation quotidienne du simple au double persiste pendant les saisons. Au Québec, c'est encore plus tranché, parce que, au plus fort de l'hiver, la plupart des foyers recourent à des plinthes chauffantes, ce qui maximise beaucoup la pointe de consommation d'électricité. Je connais imparfaitement les caractéristiques du système de l'Ouest. Marvin pourrait certainement nous dire ce qui se passe en Colombie-Britannique.
Je pense que l'occasion à saisir est celle de l'alimentation est-ouest. Nous savons que notre interconnexion est nord-sud, dans l'Ouest du pays ainsi que dans l'Est, qui sont de gros producteurs, et nous savons que nous trouvons généralement un marché généralement prêt à accepter nos électrons aux États-Unis. Vaut-il la peine d'instaurer une interconnexion notable dans le sens est-ouest? Voilà la question.
Il y a beaucoup de calculs et beaucoup d'électricité, et il faut tenir compte de beaucoup de facteurs, notamment le choix de l'emplacement, problème de taille pour le transport. Chaque fois qu'on construit du neuf, il faut une éternité pour faire approuver le transport. Ça peut prendre des décennies.
Le meilleur coup des urbanistes de l'Ontario a été de prévoir des corridors de transport, il y a 25 et 30 ans, qui ne répondaient pas à toutes les questions, mais devenaient des solutions viables de rechange pour la construction de lignes pour transporter l'électricité produite d'un bout à l'autre de la province. Encore une fois, c'est un sujet d'étude. Mon instinct d'entrepreneur me dit que dans la prochaine... Il y a aussi des immobilisations qui ont une très longue durée de vie, aussi.
Permettez-moi de sortir du cycle politique, dont la durée est de trois ou de quatre ans. Ces biens d'actifs sont éternels. Les corridors de transport aussi. Les actifs de production ont souvent une durée de vie de 50 ou 100 ans, dans le cas de l'hydroélectricité et, certainement de 50 ans dans le cas du nucléaire, et, dans la filière gazière, facilement de 20 ans, mais nous pouvons la prolonger, avec un changement de vocation, d'encore 10 ans. Ces actifs sont très durables. Cette longévité de plusieurs décennies permet des hypothèses d'affaires intéressantes.
Est-ce que cette proposition d'affaires, si elle est bien formulée et si elle s'insère stratégiquement dans des régions stratégiques permet aussi une interconnexion meilleure entre le Nord et le Sud qui est avantageuse économiquement pour le Canada?
En ce moment, nous établissons nos interconnexions nord-sud plus ou moins bilatéralement. L'Ontario continue d'augmenter ses interconnexions avec les États-Unis. Je sais que le Québec projette une ligne de transport par le Vermont et le New Hampshire. Je sais que l'interconnexion entre Muskrat Falls et la Nouvelle-Écosse sera liée aux interconnexions du Nouveau-Brunswick. Je pense que ce sera bonifié. Bilatéralement, les provinces tendent à appliquer beaucoup d'options d'interconnexions différentes en un moment donné. Actuellement, et corrigez-moi si je me trompe, Marvin, je pense qu'on jumelle l'interconnexion entre l'Alberta et la Colombie-Britannique par Banff.
Ces choses ont toujours...
Merci, monsieur le président.
Merci, chers collègues, messieurs. C'est très intéressant.
Monsieur Hinds...
... votre diagramme m'a beaucoup intéressé, particulièrement parce que je viens du Québec. Comme vous le savez, le Québec est le premier producteur d'hydroélectricité, c'est le moins qu'on puisse dire. Nous voyons maintenant que ça peut servir à quelque chose. D'après les questions de tous mes collègues, avez-vous une idée des débours à faire pour, un jour, avoir le même lien, d'un océan à l'autre, pour l'électricité et l'hydroélectricité?
À propos, nous respectons tout à fait le Québec — et ce n'est pas ma carte. C'est la perception des Américains. D'après un collègue à moi, l'interconnexion du Québec avec l'interconnexion de l'Est est fluide. Je pense que la limite de compétence figurant sur la carte provient uniquement de la différence entre le réseau électrique du Québec et celui du reste du pays, c'est-à-dire le courant direct plutôt qu'alternatif.
Est-ce la raison pour laquelle nous ne pouvons pas vendre directement notre électricité québécoise aux autres provinces et aux États-Unis et pourquoi nous devons construire notre propre ligne de transport d'électricité?
Ce n'est pas tout à fait vrai. Vous vendez beaucoup aux Américains grâce à notre système de transport. Vous vendez en tout temps de l'électricité à l'Ontario et vous passez par son entremise pour en vendre sur le réseau des États-Unis. Actuellement, et je viens de vérifier, nous transportons environ 400 mégawatts d'électricité du Québec vers New York pour votre compte.
Vous payez pour le privilège, et le système de transport est ouvert. Le service de marketing d'Hydro-Québec s'occupe de tous les détails techniques de la vente d'électricité par l'interconnexion la plus rentable au coût minimal pour l'acheteur. Donc, tout baigne dans l'huile.
Le seul problème est que nous devons nous charger de votre électricité en courant continu et la modifier en route vers les interconnexions, mais nous avons investi gros pour pouvoir le faire, aux interconnexions. Effectivement, ça accroît le coût un peu pour le Québec, d'exporter son électricité, mais, en même temps, le Québec empoche beaucoup d'argent. On ne m'a jamais dit combien, mais je pense qu'Hydro-Québec réussit très bien, Dieu merci, à vendre de l'électricité à tout le reste d'entre nous.
Des députés: Oh, oh!
Jamais assez.
Avez-vous une idée combien il en coûterait d'unifier d'un océan à l'autre le système pour vendre de l'hydroélectricité?
Je ne sais pas combien un tel système coûterait. Si vous souhaitez obtenir une réponse, vous pourriez téléphoner aux représentants de TransCanada Energy Ltd et leur demander le résultat des calculs qu'ils ont effectués en 2005. Je crois qu'ils ont tenté de mettre sur pied un consortium pour réaliser ce projet, mais ils ont conclu que cela ne fonctionnait pas sur le plan économique. Un grand nombre de choses ont changé depuis 2005, surtout les éléments liés au changement climatique, et le coût du carbone dans les combustibles de remplacement a soudainement augmenté relativement au coût de l'électricité. Il s'ensuit que les variables économiques sont peut-être différentes.
Merci beaucoup.
Ma prochaine question s'adresse à quiconque souhaite y répondre.
En vous fondant sur ce que nous venons d'entendre dans les dernières questions, et en tenant compte des connexions actuelles, de la consommation provinciale actuelle, de la production et de ce qu'on nous a dit sur les interconnexions et la complexité de ce dossier, à votre avis — vous pouvez tous répondre —, où devrions-nous concentrer nos efforts, en présumant que nous ne pouvons pas construire ou mettre le système à niveau partout à la fois?
J'aimerais répondre en premier. Je me fonde sur une question posée plus tôt et sur le titre de cette étude sur les interconnexions électriques stratégiques. Je crois qu'il serait trop ambitieux de déterminer ce qu'il faudrait faire pour relier le pays d'un bout à l'autre, mais d'excellentes occasions à cet égard s'offrent à l'échelle régionale.
Je crois que M. Burpee a également soulevé la question, mais lorsqu'on s'efforce de remplacer l'énergie thermique par l'énergie renouvelable près d'une région qui utilise l'hydroélectricité et qui a la capacité d'avoir des surplus énergétiques à court terme, il serait extrêmement avantageux de veiller à ce qu'une capacité suffisante existe pour permettre d'échanger l'hydroélectricité efficacement — surtout la capacité d'entreposage qui peut appuyer les sources d'énergie renouvelable et l'énergie excédentaire qu'elle peut fournir pour remplacer plus rapidement l'énergie thermique. Je remarque qu'il existe, entre la Colombie-Britannique et l'Alberta, des occasions importantes de renforcer les liens. Je ne suis pas certain que le jumelage dont a parlé M. Hinds se produit. Quelqu'un a mentionné plus tôt qu'on avait établi un lien du Montana à l'Alberta, mais cela a en fait réduit la capacité de transmission de la Colombie-Britannique. Il existe donc des limites importantes en ce moment.
Je crois que c'est la même chose entre le Manitoba et la Saskatchewan, car le potentiel hydroélectrique et la ressource hydroélectrique sont situés près d'un système principalement thermique. Nous ne parlons pas des synergies traditionnelles entre l'énergie thermique et l'hydroélectricité. Nous parlons de nouvelles synergies qui font intervenir les sources d'énergie renouvelables, et l'énergie éolienne nécessite un appui toutes les heures et à plus long terme. Je ne peux pas parler de l'Est du Canada, mais je crois qu'il reste beaucoup de travail à faire pour couvrir des régions plus vastes au pays et installer des systèmes plus étendus qui sont pleinement intégrés et optimisés dans ces régions.
J'aimerais revenir sur ce que j'ai dit plus tôt, lorsque je parlais du Manitoba jusqu'à la Colombie-Britannique. Du point de vue de l'approvisionnement en électricité, nous avons déjà l'un des systèmes les plus propres en raison de nos faibles émissions de carbone, mais si on pense à 2030 et aux années suivantes, l'Alberta et la Saskatchewan n'ont pas vraiment de plan complet à ce jour pour accroître l'énergie propre — à l'exception de la fermeture d'autres centrales alimentées au charbon.
La Saskatchewan et l'Alberta offrent des occasions de développement à la Colombie-Britannique ou au Manitoba ou aux deux provinces à la fois. Je dirais surtout en Alberta, car en plus du système électrique actuel, les représentants de cette province tentent de réduire davantage l'intensité carbonique des exploitations de sables bitumineux en utilisant plus d'électricité.
Il ne s'agit pas seulement de remplacer les structures existantes. Il pourrait également s'agir d'envoyer davantage d'électricité dans cette région, afin de réduire l'intensité carbonique du combustible produit pour qu'il ressemble davantage à d'autres formes de pétrole et de gaz.
Je remercie tous les témoins d'être ici. J'aimerais d'abord m'adresser à M. Shaffer.
Pourriez-vous nous parler davantage des échéances qui, à votre avis, devraient s'appliquer aux projets d'interconnexions stratégiques? Si on tient compte du surplus actuel dont profite la Colombie-Britannique — c'est une région que vous connaissez bien, et je viens également de cette province —, quand devrions-nous envisager de construire ces interconnexions? Devrions-nous attendre que le surplus soit moins important ou devrions-nous commencer à penser à construire ces interconnexions entre les provinces dès maintenant?
En ce qui concerne la Colombie-Britannique et sa connexion avec l'Alberta, nous devrions tout d'abord penser à optimiser la capacité de transmission existante, car sa limite actuelle pourrait être réduite sans investissement majeur. Je crois aussi que nous devrions lancer le processus de renforcement de la capacité à court terme pour plusieurs raisons.
Présentement, la Colombie-Britannique produit un surplus qu'on pourrait l'utiliser pour remplacer l'énergie thermique. À long terme, on utilisera la synergie entre les ressources hydroélectriques et les ressources éoliennes. Ce n'est pas comme si vous disiez qu'il faut déplacer le développement en Colombie-Britannique. Je crois que cela pourrait aussi améliorer le développement des sources d'énergie renouvelable en Alberta. Je crois que les deux provinces pourraient réaliser des gains, mais il faut une interconnexion solide et, comme je l'ai dit plus tôt, certaines dispositions institutionnelles pour rendre cela possible. C'est un dossier complexe. Il existe un système de marché en Alberta. Le système hydroélectrique de la Colombie-Britannique est centralisé. Ce n'est pas comme s'il s'agissait d'une entente de services publics bilatérale dans ce cas-ci. C'est beaucoup plus complexe. Pour répondre à votre question, je crois que nous devons commencer dès maintenant.
J'aimerais faire valoir un autre point lié aux échéances et aux prévisions pour l'avenir. Vous avez mentionné brièvement que la Colombie-Britannique a parfois besoin d'énergie pendant les années où les niveaux d'eau sont peu élevés.
J'aimerais savoir dans quelle mesure on a étudié ou modélisé la diminution des débits d'eau liée au changement climatique des 30, 50 ou 100 prochaines années, surtout les eaux provenant des Rocheuses — en raison du recul des glaciers. J'entends beaucoup parler de la réduction du débit d'eau.
Je ne suis pas du tout un expert — et des représentants de B.C. Hydro comparaîtront peut-être devant votre comité —, mais on s'inquiète au sujet du manteau neigeux. Il y aura de l'eau, mais il se peut qu'elle ne soit pas emmagasinée de la même façon qu'elle l'est maintenant dans le manteau neigeux. Cela peut causer des problèmes à la future capacité hydroélectrique des installations existantes.
Vous avez brièvement mentionné une chose que j'aimerais vous demander d'approfondir, car il s'agissait d'une chose qui limite la production. Cela concernait le commerce américain et l'électricité.
Par exemple, les surplus hydroélectriques que produisent habituellement le Manitoba et la Colombie-Britannique — même s'ils ne sont pas prévisibles en raison des conditions liées à l'eau — se déplacent surtout du nord au sud. Cela crée des surplus énergétiques importants, du moins dans le cadre des échanges commerciaux de ces deux provinces.
Pour des raisons économiques sans fondement, les Américains croient qu'il ne devrait exister aucun déséquilibre commercial entre deux pays et que manifestement, si vous avez des surplus commerciaux dans le secteur de l'énergie, vous aurez moins de place pour les échanges dans d'autres secteurs. C'est la raison pour laquelle je crois que l'amélioration de notre capacité commerciale entre l'Est et l'Ouest présente une valeur stratégique, car on n'est plus forcé de vendre ces surplus seulement du nord au sud.
J'aimerais maintenant m'adresser à M. Burpee.
Vous avez mentionné Muskrat Falls et la façon dont ce projet fonctionnera. Un témoin précédent nous a parlé de la nécessité de conclure une entente de stockage entre Terre-Neuve et le Québec, car Muskrat Falls n'a pas d'espace de stockage comme tel, et il y aurait une grosse période de pointe au printemps.
Pourriez-vous formuler des commentaires à cet égard?
Non, je ne le peux pas. Je ne sais pas si le stockage aura des répercussions sur la capacité d'écoulement.
Selon ce que je comprends, le surplus de Terre-Neuve, à l'exception de ce qui appartient à la Société hydroélectrique de la Nouvelle-Écosse et à Emera, se retrouvera probablement sur le marché américain. Mais je ne sais pas si, à un certain moment, l'approvisionnement à Muskrat Falls pourrait excéder la capacité du lien maritime qui, je pense, est de 500 mégawatts.
Je crois que la gestion de la ressource de l'eau, qui est presque commune entre Terre-Neuve-et-Labrador et le Québec, présente certains points délicats. Si vous êtes à Terre-Neuve-et-Labrador, je crois que cela sera résolu en 2041.
Toutefois, pour répondre à l'une de vos questions précédentes, une chose qui n'a pas encore été mentionnée, mais sur laquelle je dois insister, c'est que si nous envisageons réellement d'améliorer les liens entre les provinces et si nous tenons compte des endroits où ces liens se trouveront probablement, il faut obtenir sans tarder la participation des Premières Nations et des collectivités autochtones. En effet, qu'il s'agisse du développement des ressources hydroélectriques ou de la transmission de l'énergie, cela concerne leurs territoires. Ce sont des conversations qui doivent être entamées avec les Canadiens dès maintenant.
Je ne crois pas que les gens comprennent tout à fait ce que cela signifie. Tout le monde peut appuyer l'idée d'améliorer le commerce entre l'Est et l'Ouest, mais lorsqu'ils pensent qu'il pourrait y avoir des tours de transmission dans leur cour, les gens sont contrariés. Il faut commencer dès maintenant à parler de la façon dont on intégrera nos objectifs climatiques à long terme, car comme je l'ai dit au début, c'est l'objectif global.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins de leurs exposés. Ils étaient très bons et très informatifs. Je vous remercie beaucoup du travail que vous effectuez.
Ma première question s'adresse à M. Burpee.
Vous avez indiqué que nous devrions trouver une meilleure façon d'élargir les ententes entre l'Ontario et le Québec. Pourriez-vous nous en dire plus et nous donner quelques exemples?
Je peux formuler des commentaires sur une partie de la question. Mes commentaires sont liés à ce que j'ai lu dans les médias, à ce qui a été diffusé et aux ententes qui circulent. Les choses sont complexes en ce moment, car l'Ontario tente de déterminer ses besoins futurs — le plan énergétique à long terme doit être publié ce mois-ci, n'est-ce pas, Jim? —, et la province commence également ses activités liées à l'approvisionnement en ressources renouvelables et d'autres ressources aux États-Unis — ou elle tente de soutenir la concurrence dans ce domaine.
Il se passe beaucoup de choses sur le plan commercial, mais il me semble qu'il y a la question du Québec et de l'Ontario, c'est-à-dire qu'une province tente de vendre sa production à l'autre. Lorsqu'on établit une relation d'achat et de vente, on cherche à savoir qui tente de conclure la meilleure affaire, plutôt que de déterminer s'il existe une occasion d'établir un partenariat. À mon avis, l'établissement d'un partenariat signifie que si nous nous tournons vers le Québec pour répondre en partie aux besoins à long terme de l'Ontario en matière d'électricité, l'Ontario devra potentiellement investir dans l'énergie éolienne et il faudra exploiter des ressources de façon conjointe.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'idée que nous devrions seulement nous concentrer sur le commerce entre l'Est et l'Ouest. Je crois toujours qu'à long terme, nous pouvons réussir à atteindre les objectifs liés au climat si nous collaborons et si nous nous concentrons sur le déplacement du carbone vers le sud, car dans l'ensemble, nous souhaitons réduire les émissions de carbone au moindre coût.
Merci.
Ma prochaine question s'adresse à M. Hinds. Je vous remercie beaucoup d'avoir fourni le diagramme. En passant, votre père serait très fier du travail que vous faites actuellement dans le dossier de l'électricité.
Des voix: Oh, oh!
M. Marc Serré: Le dossier de l'électricité le passionnait. Je voulais seulement m'assurer de vous le dire.
Il y a peut-être 10 personnes dans le monde qui connaissent cela au sujet de mon père, et je vous suis donc reconnaissant.
Et voilà.
Monsieur Hinds, en ce qui concerne la priorité du gouvernement fédéral du Canada, croyez-vous que nous devrions nous concentrer davantage sur l'augmentation des exportations en électricité propre aux États-Unis ou devrions-nous nous concentrer davantage sur les interconnexions entre les provinces? Pourriez-vous formuler des commentaires?
C'est une très bonne question. Dans le cadre de mes fonctions — et peut-être contrairement à Jim —, je dois faire preuve de neutralité à l'égard de la technologie, car mon travail consiste à veiller à ce que l'approvisionnement énergétique demeure constant. Je ne peux pas préférer une façon de produire l'énergie à une autre. J'adopte un point de vue d'exploitant d'un système technique sur les différentes sources. La réponse que je vous donnerai est tout à fait vague, mais c'est vrai. Chaque type de production d'énergie présente des avantages, et chaque type de production d'énergie présente des inconvénients.
Je vais m'arrêter ici, mais peut-être pas pour le reste de la réunion, car j'aimerais revenir sur certains points.
J'aimerais d'abord parler de la question du Québec. L'Ontario et le Québec s'entendent extrêmement bien. Nous sommes très interconnectés. Le Québec est généralement un exportateur d'électrons et utilise son propre système de transmission pour exporter vers les États-Unis. La province utilise aussi notre système de transmission. Il est ouvert. Elle peut faire cela. Nous avons plusieurs ententes bilatérales avec le Québec sur des questions liées à l'utilisation de l'énergie. Par exemple, nous faisons des échanges avec cette province pendant sa période de pointe de l'hiver et elle fait des échanges avec nous pendant notre période de pointe de l'été. Nos deux provinces ont des arrangements d'urgence pour appuyer chaque système en période de mauvais temps, etc. L'Ontario et le Québec sont peut-être les cas les moins préoccupants. En effet, nous échangeons énormément et les systèmes sont très interconnectés.
J'aimerais revenir sur la question posée plus tôt, car elle concerne peut-être aussi ce sujet.
Actuellement, on observe trois lacunes flagrantes sur la carte.
La première lacune flagrante sur la carte, c'est l'Ouest. En effet, l'Alberta n'est pas directement connectée aux interconnexions dans l'Ouest. Si l'Alberta souhaite se connecter aux interconnexions dans l'Ouest, elle doit passer par la Colombie-Britannique, et votre comité pourrait probablement consacrer une demi-heure de son temps à la question pour comprendre les enjeux électriques et les frictions qui se posent dans ce cas. Cela signifie que dans une certaine mesure, la capacité de l'Alberta d'obtenir des électrons à partir des interconnexions dans l'Ouest dépend de ce que fait la Colombie-Britannique.
De nombreuses autres initiatives sont en cours. Je ne formulerai pas de commentaire à leur égard, mais l'autre lacune flagrante, c'est que l'Ontario et le Manitoba ne sont pas très bien interconnectés. Le Manitoba a un énorme potentiel hydraulique. Cette province dépense énormément d'argent pour améliorer la transmission de chaque côté du lac Winnipeg, afin de permettre le raccordement de la nouvelle production d'énergie, et il existe en quelque sorte une grande rallonge électrique entre l'ancienne région de Jim dans le Nord-Ouest et le Manitoba. C'est une ligne de jonction de 115 kilovolts. Dans le plan énergétique à long terme que nous sommes sur le point de publier, l'Ontario a graduellement renforcé sa capacité dans le système de transmission vers Thunder Bay et l'Ouest. Je m'attends à ce que les améliorations soient apportées dans quelques semaines, lorsque le plan sera publié.
La troisième lacune flagrante sur la carte, c'est qu'en réalité, la Saskatchewan n'est pas réellement interconnectée avec qui que ce soit. Encore une fois, ma troisième grande observation, c'est qu'à l'exception des travaux en cours, il n'y a aucune interconnexion importante entre la Saskatchewan et une autre province.
En ce qui concerne la question de savoir comment votre comité et le gouvernement fédéral peuvent faire une différence, je me concentrerais sur les trois régions où il n'y a pas de travaux, et ce sont ces trois régions.
Monsieur Hinds, vous avez parlé de l'importance du lien qui existe entre l'Ontario et le Québec. En quoi le secteur nucléaire joue-t-il un rôle à cet égard et, à votre avis, les PRM ont-ils un rôle quelconque à jouer dans le Nord-Ouest de l'Ontario en ce qui concerne l'expansion du réseau?
Le Nord-Ouest de l'Ontario constitue notre dossier actuel en raison de l'exploitation potentielle du Cercle de feu, et également de l'électrification de certaines collectivités qui utilisent le diesel. On parle de longues discussions.
Pour ce qui est du Québec et du nucléaire, essentiellement, le coût marginal d'un électron produit par un réacteur nucléaire est presque nul. Le coût marginal d'un électron produit par le réseau hydroélectrique du Québec est presque nul. Les deux se livrent bataille dans le marché. Je crois que le Québec a fait des expériences avec le réacteur CANDU. Je ne crois pas qu'il ait déjà été synchronisé avec le réseau. Je pense qu'on a décidé de mettre le projet lié au réacteur en veilleuse et de ne pas aller de l'avant sur le plan de la technologie, et compte tenu de l'hydrologie, je peux tout à fait le comprendre. Je doute qu'il y ait un avenir pour la production d'énergie nucléaire au Québec.
En Ontario nous remettons à neuf nos réacteurs, un projet qui s'étend sur cinq décennies, et nous essayons de les maintenir en activité. La centrale de Pickering sera arrêtée, mais les centrales de Darlington et de Bruce seront remises à neuf, et je pense que la réfection de la centrale de Point Lepreau, au Nouveau-Brunswick, est enfin terminée. Je pense que cela fonctionne plutôt bien. Or, je ne crois pas que beaucoup de gens pensent qu'à court terme, on verra de nouvelles capacités au Canada dans le secteur nucléaire.
Nous allons devoir nous arrêter ici. Vous n'avez pas à vous presser étant donné que des travaux du Comité nous attendent et que nous devrons poursuivre la séance à huis clos pendant deux ou trois minutes.
Messieurs, je vous remercie tous les trois d'être venus comparaître devant nous. Vos témoignages ont été très utiles pour l'objectif que nous essayons d'accomplir. Au nom des membres du Comité, je vous remercie sincèrement et vous souhaite une belle fin de journée. Nous allons vous laisser partir et nous continuerons nos travaux par la suite.
Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes et nous reprendrons une fois que les gens auront quitté la salle.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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