RNNR Réunion de comité
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Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 9 mai 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, tout le monde. Nous allons commencer. Nous sommes un peu en retard et nous avons beaucoup de travail aujourd'hui, alors nous allons respecter très scrupuleusement les horaires.
Avant de commencer, je tiens à indiquer une chose à tout le monde. Bien que, lors de la dernière réunion, nous ayons parlé d'une possibilité de voyager, je ne vais pas présenter ces projets au comité de liaison, car nous n'avons pas obtenu le consentement unanime à ce sujet.
Je propose que nous les réduisions à neuf minutes les exposés des témoins d'aujourd'hui, à moins que quelqu'un ne s'y oppose vigoureusement, ce qui nous laissera davantage de temps pour les questions.
Merci aux témoins d'être parmi nous. Nous accueillons un premier groupe qui va nous livrer trois témoignages. Je remercie tout particulièrement Young Women in Energy dont nous avons annulé l'intervention la semaine dernière. Merci de cet effort pour être avec nous aujourd'hui.
Je vais donner la parole pendant neuf minutes à chaque témoin. Vos interventions pourront être plus courtes si vous le souhaitez. Je vous encourage à utiliser les deux langues officielles, car nous pourrons vous poser des questions en français ou en anglais.
Madame Reschke, puisque vous avez eu la gentillesse de revenir, vous pouvez commencer, si vous le voulez bien.
Merci beaucoup de m'avoir invitée. Cet incident sur la ligne la semaine dernière a été malheureux. Comme j'appartiens au secteur des pipelines, je suppose que c'était un coup du destin.
Je suis reconnaissante de représenter ici Young Women in Energy et mon employeur, Keymay Industries. Je suis honorée et ravie d'avoir la possibilité de présenter mon point de vue, qui est le résultat des huit années que j'ai passées dans le secteur de l'énergie, mais aussi d'être la porte-parole d'une douzaine de chefs de file de l'industrie que j'ai consultés pour préparer cette allocution.
Je veux utiliser mon temps de parole pour évoquer deux sujets, la clarté de la définition des « technologies propres » et les plateformes qui soutiennent la commercialisation de ces technologies. Je vais d'abord vous parler de Keymay Industries, mon entreprise, qui a d'abord été une entreprise manufacturière avant de se lancer sur le marché des technologies propres.
Au sein de l'écosystème des ressources naturelles, le transport par pipelines constitue une composante très importante. La construction de pipelines pour le pétrole et le gaz est particulièrement remise en cause en ce moment à cause du contexte politique et économique, avec une faiblesse persistante des prix des marchandises et une augmentation de la complexité. Les incitations à l'innovation ont très logiquement été mises de côté alors que les entreprises ont tendance à miser sur leur survie opérationnelle.
Je crois que l'autre témoin a déjà dit beaucoup de choses au sujet de l'importance pour ce secteur de la stabilité des politiques et de la fiabilité d'un trimestre à l'autre. Nous constatons que cela est nécessaire pour l'adoption à grande échelle de technologies étant donné la longue durée des cycles de planification.
Je partage ce sentiment, mais je voudrais vous donner le point de vue des petites et moyennes entreprises: il y a d'autres facteurs qui stimulent l'innovation. Durant la crise de 2015-2016, Keymay Industries a consacré entre 1,5 % et 2 % de ses recettes annuelles à la mise au point et à la commercialisation d'une technologie de codage automatisé pour la construction de pipelines.
Ce matériel s'appelle l'AutoBond, et il se substitue à un processus de peinture manuel. Il permet à notre client de réaliser d'importantes économies grâce à une amélioration de l'efficacité et à une très forte réduction de l'utilisation de matériels à usage unique. Cela a un effet marqué sur l'environnement. Comme je l'ai dit, la réduction des déchets constitue un élément clé dans ce domaine. Nous estimons qu'au cours des deux prochaines années, environ 2 500 kilomètres de nouveaux pipelines seront construits et que cette technologie permettra d'éviter la production de 240 000 livres de déchets.
Cela me ramène à mon premier point. S'agit-il d'une technologie propre? Nombre de personnes à qui j'ai parlé en préparant cette intervention m'ont dit: « Absolument », en hochant la tête, tandis que d'autres ont répondu que le gouvernement cherchait des biocarburants, des accumulateurs et des solutions de réseau. Il y a beaucoup de travail à faire pour s'assurer que les petites, moyennes et grandes entreprises participent au développement des technologies propres.
Selon la définition fournie dans cette étude, il s'agit de tout produit, processus ou service conçus dans le but principal de contribuer à remédier à tous les types de dommages environnementaux. Les deux derniers mots sont les plus importants: « dommages environnementaux ».
À première vue, l'exemple que je vous ai donné, l'Autobond, peut sembler n'être qu'une goutte d'eau dans l'océan. Il est important de reconnaître que toutes les entreprises, des plus petites jusqu'aux plus grandes ont un rôle important à jouer dans la transition vers un écosystème énergétique plus durable.
Dans la définition des technologies propres que vous nous avez fournie, on semble surtout insister sur la réhabilitation ou sur la prévention des dommages environnementaux. Puisqu'il n'existe pas de définition des termes « technologies propres » qui soit généralement admise à l'échelle nationale ou internationale, je vois là une occasion, pour le Canada, d'assumer un rôle de chef de file dans la promotion de la mesure et de la classification des technologies propres. Il pourrait y parvenir en envisageant les répercussions de façon beaucoup plus globale, plutôt que de simplement isoler l'avantage ou le produit final. C'est ce que certains appellent la méthode WTW, soit la prise en compte globale de tous les composants qui entrent dans la fabrication du produit fini, au lieu de simplement considérer la fin de son cycle de vie.
L'impact du cycle de vie est une partie bien plus appréciable de la définition. En effet, si l'on n'évalue pas les impacts d'un produit, de sa fabrication à sa destruction, comment savoir s'il y a lieu d'adopter des mesures de prévention ou de réhabilitation?
Un exemple est la récente taxe que Singapour a imposée sur les voitures Tesla, ce qui a fait de gros titres très accrocheurs. Dans une étude, l'administration responsable des transports terrestres de Singapour a découvert que l'énergie nécessaire à la production de l'électricité pour les véhicules Tesla est supérieure à 400 watts/heure par kilomètre. Les Tesla ont été taxées parce que cette technologie n'est pas aussi efficace que d'autres formes d'énergie permettant de faire rouler une voiture.
Il en va de même pour le débat sur les biocarburants, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat des Nations unies a prévenu que l'augmentation de la culture de plantes destinées à la production de bioénergie constituait un risque pour l'écosystème et la biodiversité. Les chercheurs se fondent sur des exemples montrant que les biocarburants — en fait, certains d'entre eux, dois-je préciser — produisent davantage d'émissions globales de gaz à effet de serre que les produits dérivés du pétrole.
L'étude des technologies propres est porteuse d'occasions incroyables pour le gouvernement. D'abord, celle d'encourager les experts de l'industrie et les économistes à développer les bons instruments et les outils nécessaires à la mesure des impacts sur la durée du cycle de vie dont je viens de parler. Ensuite, celle de publier les résultats afin que toutes les parties intéressées, y compris l'industrie, les universités et les associations, aient une bonne compréhension des priorités et de ce qui permettra de vraiment changer les choses.
Les considérations environnementales et les avantages intrinsèques ne sont pas les seules motivations pour la création de technologies propres. Il y a aussi le profit. Qui dit inefficacité ou gaspillage, dit intérêt des entrepreneurs. À mon avis, les technologies et les produits propres verront le jour non pas grâce aux politiques et aux incitations gouvernementales, mais grâce au soutien conféré par ces politiques et par les incitations gouvernementales. En réalité, quand on songe aux 2 milliards de dollars déjà dépensés ces 3 dernières années en R-D pour les technologies propres, une très grande partie de cet investissement, soit presque 70 %, provient de l'industrie contre 18 % qui vient des provinces et 14 % du fédéral. Je ne crois pas que la création ou l'adoption de technologies propres soit freinée par un manque de motivations ou d'incitations. Je crois que nous devons commencer par nous intéresser au divorce entre la R-D et la commercialisation. Il y a clairement une rupture à ce niveau.
Beaucoup de choses ont déjà été écrites, par exemple dans le document Stratégie canadienne de l'énergie, publié en 2015, au sujet de la technologie et de l'innovation en tant qu'éléments prioritaires; il y est en fait surtout question de l'aspect recherche et développement. C'est là que je commence à répéter ce que disent bon nombre d'experts qui ont 20, 30 ou 40 années d'expérience de plus que moi dans cette industrie. Il est très difficile à la lecture de ces études de savoir quelle proportion de ces 2 milliards de dollars a servi à la phase développement ou à la phase commercialisation de tel ou tel produit. Est-ce que cela a davantage servi à la R-D ou à la commercialisation? Comme je l'ai dit, dans presque tous les échanges que j'ai eus avec mes homologues ou mes mentors, je me suis fait dire qu'il est essentiel de se concentrer sur la commercialisation, ce qui fait souvent défaut.
Les programmes les plus cités, puisque vous cherchez des exemples, étaient Partenariat technologique Canada, qui a été retiré en décembre 2006, et le Programme canadien pour la commercialisation des innovations, qui était un programme pilote. Ces exemples ont été cités de façon répétée parce qu'ils avaient quelque chose en commun. Ils permettaient de financer des produits ou des services avant l'étape de la commercialisation et pas la R-D. Il y a eu beaucoup d'exemples au sein de Partenariat technologique Canada pour lesquels le gouvernement a pu obtenir des rendements pouvant atteindre 1,5 fois, pour des technologies ayant eu du succès. Mais je suis sûre que vous avez davantage accès que moi aux informations liées à ces programmes.
Je voudrais répéter que j'apprécie énormément la possibilité qui m'est donnée de vous parler. Selon moi, ce que le gouvernement peut faire de mieux pour encourager les technologies propres, est d'assumer son rôle de chef de file en définissant les technologies propres d'une façon qui mette en exergue les impacts au cours du cycle de vie et en s'assurant que les dépenses qui sont liées au développement et à l'adoption des technologies propres incluent les entreprises de toutes les tailles, petites, moyennes et grandes, qu'elles soient basées ou non sur l'utilisation du carbone ou sur les énergies renouvelables. S'il y a un aspect à privilégier, c'est l'investissement dans les phases de commercialisation des technologies, et pas simplement la R-D.
Merci beaucoup de m'avoir invitée.
Merci au Comité, aux membres et au personnel, de nous avoir gentiment invités aujourd'hui. Au nom de tous les collaborateurs du Fundy Ocean Research Centre for Energy, le FORCE comme on l'appelle généralement, c'est un honneur d'être parmi vous.
J'ai le plaisir d'être accompagné de Melissa Oldreive, notre directrice des programmes environnementaux sur site, et de Jeremy Poste, qui représente l'un des principaux partenaires de FORCE, une entreprise qui s'appelle OpenHydro Technology Canada.
Nous sommes ravis de participer à un débat sur l'avenir des technologies propres dans notre économie et notre environnement. Nous sommes ici aujourd'hui pour parler du secteur des énergies marines renouvelables qui englobent les technologies d'exploitation des courants, des rivières, des marées et des vagues. Chez FORCE, nous travaillons surtout sur les dispositifs à énergie marémotrice qui trouvent des applications à la fois pour les marées et pour les rivières. Les turbines marémotrices fonctionnent en grande partie comme des moulins à vent, mais sous l'eau. Elles transforment le mouvement naturel de l'eau et du courant en électricité
FORCE, où Melissa et moi travaillons, est une installation de démonstration qui relie ces turbines au réseau électrique de Nouvelle-Écosse. FORCE a reçu le soutien du gouvernement du Canada sous la forme d'une subvention de 20 millions de dollars. Cette subvention a été un succès formidable pour nous puisqu'elle nous a permis de stimuler des activités de développement dans ce secteur à hauteur de presque 100 millions de dollars et de susciter la participation de plus de 250 entreprises canadiennes. Il est prévu que cette activité atteigne les 240 millions de dollars quand chacun de ces équipements sera installé sur notre site.
Le site de FORCE se trouve dans le passage Minas de la baie de Fundy qui recèle environ 7 000 mégawatts de puissance potentielle. C'est suffisant pour alimenter presque 2,5 millions de foyers ou l'ensemble du Canada atlantique lors des pics de consommation. C'est une ressource assez extraordinaire qui est présente partout dans le pays. Elle n'est pas limitée à la baie de Fundy, et on estime que 40 000 mégawatts d'énergie marémotrice de nos régions côtières sont en attente d'exploitation. Ce potentiel s'accroît très significativement si l'on prend en compte les rivières canadiennes où l'on estime que 340 gigawatts d'énergie potentielle sont disponibles pour tous les Canadiens.
Sur une carte du Canada, on peut prédire les endroits où l'énergie des océans et des fleuves pourra être exploitée. Tout comme l'eau s'accélère lorsque vous placez votre pouce à la sortie d'un tuyau d'arrosage, vous trouverez une source d'énergie à chaque endroit où il y a un resserrement de deux rivages. À la différence des autres formes d'énergie renouvelables, l'énergie marémotrice est prévisible. Nous pouvons prévoir sa production aujourd'hui, demain, dans un siècle, et cela facilite les prévisions et l'intégration dans le réseau.
C'est exactement ce qu'a fait l'an dernier mon collègue, M. Poste, ici présent. Il a déployé le premier équipement à énergie marémotrice à grande échelle, connecté au réseau, dans la baie de Fundy. Ce n'est certainement pas une première mondiale. Des projets à énergie marémotrice se développent au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Australie, en France, en Chine et en Corée du Sud. D'autres pays, comme le Chili, l'Inde et le Japon entreprennent les premières étapes de développement. Aujourd'hui, c'est le Royaume-Uni qui mène ce secteur avec plus de 1 800 mégawatts en phase de développement. Cette région a déployé des dizaines d'équipements, y compris le premier équipement à quatre turbines à échelle industrielle, la dernière étape avant le passage à des exploitations purement commerciales.
La technologie a également des applications dans les communautés isolées du Nord, où les gens dépendent souvent de génératrices diesel. Alors même qu'elle n'en est qu'aux premières étapes, la technologie marémotrice est compétitive par rapport à ces génératrices. Il y a eu des installations de petite taille en Amérique du Nord, en Colombie-Britannique, au Manitoba, dans l'État de New York, dans le Maine et ailleurs. À vrai dire, un projet d'énergie marémotrice dans un petit village de l'Alaska a déjà montré son potentiel de réduction et de stabilisation des prix de l'électricité pour les communautés isolées. Bien que le projet se situe dans une frayère sensible de saumons, il est très important de mentionner que le suivi n'a pour l'instant révélé aucune incidence marquée liée aux installations de cet équipement.
Que nous placions une turbine en Alaska, en mer du Nord ou dans la baie de Fundy, il sera essentiel d'assurer un suivi environnemental continu. Les producteurs d'énergie doivent fournir des preuves claires et convaincantes montrant que leur technologie est sûre et que les impacts sont acceptables. Cela veut dire qu'il faut aller dans l'eau et immerger du matériel, travail dans lequel le Canada excelle. Des centaines d'entreprises canadiennes ont les compétences voulues pour faire du soutien à cette industrie, et elles sont déjà mises à contribution pour le suivi et la mesure des ressources, pour le transport et l'installation des câbles électriques de remplacement, et pour la construction des composants des turbines et le lancement de nouvelles recherches.
Les scientifiques et les entrepreneurs canadiens ont fait un important travail de suivi des effets sur l'environnement. En partenariat avec eux, FORCE a construit trois plateformes scientifiques sous-marines pour récolter des données au niveau du fond marin. Ces plateformes permettent de mettre au point une nouvelle compétence canadienne de première importance: la capacité à voir et à mesurer des écoulements turbulents extrêmes situés, par exemple, dans le passage Minas. Les projets éoliens dépendent des données météorologiques pour se mettre en route, à la fois pour l'acceptation et pour la planification du projet en matière de rentabilité. Nous construisons les outils similaires pour l'énergie marémotrice. Les données produites par les plateformes rendent tout possible: la technologie, la conception, l'évaluation des ressources, le financement, l'acceptation par le public et plus encore. Ces plateformes à capteurs et l'expertise qui les entoure sont révolutionnaires. Elles constituent une formidable occasion d'exportations pour le Canada.
Pour que l'industrie se mette en mouvement, il a fallu une volonté politique considérable de la part de gouvernements provinciaux et fédéraux. Nous voudrions vous en remercier. Nous en avons toujours besoin d'ailleurs, et cela comprend des infrastructures, en particulier des infrastructures portuaires et une plus grande capacité pour permettre une adoption plus importante des énergies renouvelables; un leadership des politiques fédérales sur les objectifs en matière d'énergie renouvelable en combinaison avec votre leadership sur le carbone; ainsi que des mécanismes financiers pour soutenir la réduction des coûts.
Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas les seuls à disputer cette course. Mettre la main sur ne serait-ce que 10 % du marché mondial pourrait se traduire par 5 milliards de dollars d'exportations d'ici 2050. Les résultats sont très encourageants.
Je le répète, dans la baie de Fundy uniquement, 250 entreprises canadiennes participent à l'activité. Sur l'ensemble du pays, des entreprises canadiennes comme Rockland Scientific et Instream Energy Systems en Colombie-Britannique, New Energy Corporation en Alberta, et MilAero en Nouvelle-Écosse fournissent déjà des solutions au marché international. De petites entreprises du Canada atlantique comme EMO Marine ont été achetées par des groupes internationaux tels que MacArtney Underwater Technology Group.
À mesure que le secteur industriel se développe, il y aura de plus en plus de possibilités. Nous pensons que nos océans et nos rivières ont le potentiel de créer ces possibilités ici même au Canada.
Merci beaucoup. Je vais donner la parole à Jeremy Poste.
Merci. Je vais devoir vous demander de ne pas dépasser les deux minutes et demie pour vos remarques.
Chers membres du Comité, je suis sincèrement ravi d'être parmi vous aujourd'hui.
Comme l'a dit Tony tout à l'heure, lorsqu'il s'agit d'énergies marines renouvelables, non seulement le Canada dispose d'un immense potentiel de ressources inexploitées dans tout le pays, mais, ce qui est plus important, notre pays est riche de talents pour domestiquer cette ressource et stimuler le développement économique dans l'ensemble du pays.
Au cours des trois dernières années chez OpenHydro au Canada, j'ai consacré mon travail à démontrer que l'énergie marémotrice peut être extraite de la baie de Fundy en toute sécurité pour alimenter les foyers canadiens sans compromettre l'environnement dans lequel ces turbines marémotrices en eau vive sont placées.
Outre qu'il génère de l'électricité à partir d'une source propre et prévisible, ce projet a montré que quelques mégawatts d'énergie fournis par l'océan peuvent générer des investissements notoires au sein de la chaîne d'approvisionnement locale. En effet, plus de 33 millions de dollars ont été investis au cours de la phase de construction et d'installation qui a employé plus de 300 personnes, dont une centaine occupaient de nouveaux postes.
Les énergies marines renouvelables constituent un secteur tellement vital et leur développement est si récent qu'il faut un leadership politique et des instruments politiques adaptés pour réduire les risques liés à son développement au cours des prochaines années et pour achever son adoption au sein du bouquet des énergies renouvelables.
Quatre éléments sont essentiels au succès de la commercialisation de l'énergie marémotrice et, par extension, des énergies marines renouvelables. Ces éléments nécessiteront une attention et un leadership adaptés afin de maintenir le développement de l'énergie marine renouvelable à la hauteur de nos objectifs en matière d'énergie renouvelable. Ces éléments sont: la caractérisation détaillée des ressources et la surveillance environnementale; la disponibilité des réseaux; l'infrastructure, ainsi que la visibilité à long terme grâce au soutien et au leadership du gouvernement.
Il nous faut acquérir une bonne compréhension de notre environnement marin par le biais de la recherche appliquée et du développement afin d'optimiser la conversion sûre et durable de l'énergie marine en électricité bon marché pour les Canadiens. Tandis que l'énergie marine est hautement prévisible, il est déterminant d'acquérir une compréhension fine des caractéristiques du site. Les sites de marées et de courants fluviaux sont des environnements très difficiles et turbulents qui nécessitent des mesures et des techniques de mesure innovantes afin de supprimer le risque des modèles financiers basés sur la production d'énergie.
Je veux par ailleurs parler de la disponibilité du réseau, ce qui implique le développement d'infrastructures de réseau sur les côtes afin d'exporter l'électricité extraite des énergies marines au large. J'espère que la Banque de l'infrastructure du Canada portera un regard positif sur les projets qui promeuvent l'intégration des réseaux intelligents ainsi que le développement des infrastructures de réseau pour le transport et la distribution d'une énergie propre et renouvelable aux consommateurs.
Troisièmement, parlons de l'infrastructure et de la manière de mettre au point une infrastructure marine adaptée pour soutenir le développement commercial et créer des emplois locaux à long terme.
La France, par exemple, a décidé d'investir 50 millions d'euros, soit environ 75 millions de dollars canadiens, pour agrandir les infrastructures portuaires existantes, les quais et les appontements, dans le port de Cherbourg, en Normandie. Ce projet a immédiatement attiré des entreprises de toute l'Europe désireuses de cofinancer l'installation de sites industriels pour la construction d'éoliennes en mer, le travail de pré-assemblage des parcs éoliens en mer et l'assemblage des futures turbines d'OpenHydro.
Je vous demande pardon, monsieur Poste. Je me dois de vous interrompre. Nous avons vos notes d'allocution sous la main; les membres du Comité pourront les voir. Nous pourrons ainsi profiter de votre intervention.
Je donne la parole à M. Switzer.
Merci beaucoup. Bonjour.
Je suis ravi d'être parmi vous pour représenter le secteur des technologies propres de l'Alberta à titre de directeur général de l'Alberta Clean Technology Industry Alliance. J'ai passé le plus clair de ma carrière professionnelle dans le secteur pétrolier et, récemment, j'ai travaillé à l'Institut Pembina, le principal groupe de réflexion canadien sur l'énergie et l'environnement.
En effectuant notre premier grand sondage sur le secteur albertain des technologies propres, nous nous sommes rendu compte qu'il était principalement orienté vers le secteur des ressources naturelles, ce qui n'a rien pour surprendre étant donné que les trois quarts des entreprises de notre province font des affaires dans les domaines pétrolier, gazier ou minier.
La prospérité à long terme de l'écosystème albertain des technologies propres dépend principalement de la vigueur de ce secteur ainsi que de sa capacité d'absorption, c'est-à-dire sa capacité d'adoption et de commercialisation de nouvelles technologies. Pour plus de détails, je vous invite à consulter notre rapport à l'adresse www.actia.ca. Nous croyons que notre province deviendra un haut lieu mondial d'investissement de capital-risque dans les technologies propres et d'expansion. Nous travaillons avec des partenaires de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec dans le cadre du regroupement national Canada Cleantech.
Comme l'intervenant précédent, je dirais que notre vision des technologies propres est très large. Au coeur de notre engagement, il y a à la fois des nouveautés — des propriétés intellectuelles ou des modèles d'affaires neufs — et la recherche de rendements environnementaux qui dépassent ceux des technologies rivales. En clair, les technologies propres peuvent être utilisées non seulement dans le secteur des ressources naturelles pétrolières ou gazières, mais aussi dans des secteurs nouveaux, comme lorsque l'on augmente la capacité des puits de carbone naturels au moyen du captage et du stockage du carbone — CSC — ou lorsque l'on met en valeur le carbone présent dans le sol.
[Français]
Mesdames et messieurs, je vous remercie de nous donner l'occasion de traiter de ce sujet, qui est d'une importance capitale pour l'avenir de notre pays et pour celui de l'Alberta.
Ici, je veux mettre l'accent sur la façon dont on peut accélérer le rythme de l'innovation dans le secteur de l'extraction.
[Traduction]
Vous n'êtes pas sans savoir que le secteur pétrolier est poussé à se transformer, ce qu'il a déjà fait dans le passé. La nécessité d'accomplir des progrès en matière de rendement écologique et économique s'impose à un moment où les exploitants et leurs fournisseurs sont au plus bas. Ils vendent une bonne partie de leurs barils de pétrole à perte et ils appréhendent la perspective d'un plafonnement, voire d'une régression du marché. Cela dit, il faut se rappeler que l'origine de l'industrie des sables bitumineux est une histoire de difficultés, de faillites et de défaillances opérationnelles, sans parler du fameux incendie d'Abasand qui a conduit à la fermeture définitive du premier site de production commerciale dans les années 1940. L'industrie n'a pas disparu pour autant.
À mon avis, il ne faut pas penser que le secteur des hydrocarbures va disparaître, mais il sera certainement bien différent à l'avenir.
Tout d'abord, il faut bien comprendre que les prix élevés du pétrole et du gaz au cours des années 2000 ont préparé le terrain pour la crise actuelle. Comme les prix grimpaient, les investisseurs cherchaient à exploiter de nouvelles sources d'hydrocarbure, notamment dans l'Arctique et dans les sables bitumineux, au Brésil, dans le golfe de Guinée, etc. Tout était en place pour la réussite d'une exploitation à faible coût et à productivité élevée ici même en Amérique du Nord. En fait, des entreprises comme Encana étaient à l'avant-garde de l'approche consistant à exploiter les ressources naturelles de manière industrielle. En conséquence, c'est l'offre qui est devenue problématique et non pas la demande.
À vrai dire, McKinsey et d'autres cabinets prévoient que la demande en pétrole et en gaz atteindra un sommet au cours des 10 ou 20 prochaines années. Certains stipulent que le sommet a déjà été atteint et que, avec l'avènement des véhicules électriques et de technologies moins gourmandes, une diminution progressive est probable. Évidemment, la lutte contre les changements climatiques ne va pas de pair avec un accroissement de la combustion du pétrole et du gaz.
À mon avis, c'est grâce à l'innovation que l'on peut anticiper l'évolution des choses. Certains changements dans la technologie, dans les processus ou dans les modèles d'affaires arrivent à petits pas. Cette façon de faire très progressive ne sera pas suffisante pour assurer l'avenir du secteur. Des recherches ont montré que l'adoption des nouvelles technologies est plutôt lente: 16 ans s'écoulent en moyenne entre la naissance du concept et sa commercialisation à grande échelle. En raison de son rythme de rentabilisation très lent, le secteur des hydrocarbures est plombé par des coûts élevés en immobilisation et par le fait qu'il doit compter sur le secteur public pour accélérer la mise en valeur des projets.
Traditionnellement, le secteur des hydrocarbures a tendance à ne pas investir suffisamment dans la R-D — seulement 1 % des revenus nets, alors que c'est 4 à 12 % dans l'informatique ou l'électronique —, et cela constitue un obstacle majeur au changement technologique. Modifier le modèle technologique et perturber le cours des choses en mettant des transformations à l'essai, cela implique des coûts élevés en capitaux et un risque accru. Pour les partisans du changement, la facture peut être salée et la carrière peut s'en trouver abrégée.
Il y a aussi des risques liés à la réglementation. Le changement de modèle induit de nouvelles contraintes pour l'approbation du projet par l'organisme de réglementation.
Dans le cas des conflits en matière de propriété intellectuelle, l'industrie a tendance à produire beaucoup de paperasse pour empêcher les autres d'utiliser leurs inventions, ce qui, évidemment, ralentit l'innovation. Plus profondément, il y a un problème de culture dans l'industrie: il s'agit du frein que représente l'architecture d'entreprise. Par exemple, selon une étude sur l'Internet des objets dans le secteur pétrolier et gazier, les gestionnaires ont beau mettre les choses en marche, ils se butent à une architecture d'entreprise impossible à changer. L'organisation reste inchangée; elle continue à fonctionner de façon cloisonnée.
Il y a deux façons de changer cela. D'abord, il s'agit de repenser notre industrie. Ensuite, il s'agit de revoir le rôle du secteur public dans le soutien à l'innovation.
Je vais commencer par la question de l'industrie.
À la source, une approche orientée vers l'avenir devrait envisager des investissements dans les technologies d'extraction qui permettent de récupérer les électrons, l'hydrogène et des éléments de terre rare tout en laissant le carbone dans le sol. Plusieurs chercheurs travaillent là-dessus en Alberta et ailleurs. Toutefois, comme c'était le cas pour les sables bitumineux avant leur commercialisation, ces technologies ne sont pas dans le domaine de rentabilité que visent les sociétés pétrolières cotées en bourse. Il faut des investissements publics de toute urgence. On pourrait aussi penser à un prix de la technologie, une récompense qui frappe l'imaginaire. Si un tel prix est créé, vous pouvez compter sur la participation d'Alberta Clean Technology Industry Alliance.
Pour ce qui est du raffinage, je connais un groupe d'ingénieurs et de technologues d'expérience provenant de plusieurs sociétés importantes qui travaille au Centre Bowman à Sarnia et explore la possibilité de transformer les asphaltènes à longue chaîne — le noyau des sables bitumineux — en fibre de graphène et de carbone. Imaginez l'avenir du secteur automobile et du secteur de la construction si l'Ontario devenait le producteur de fibre de carbone qui a les coûts d'exploitation les plus bas du monde. Même Warren Buffett saluerait ce type d'avantage concurrentiel.
Si nous étions prêts à repenser de manière profonde le marché d'un produit en aval, nous pourrions forger une histoire qui serait unique à l'échelle de la planète.
Pour accélérer la rentabilisation dans l'industrie des hydrocarbures, plusieurs types d'intervention publique sont requis. Il faut repenser la propriété intellectuelle, les mesures incitatives pour le déploiement technologique et le modèle d'industrie. Par exemple, l'Alberta, en réévaluant son régime de redevances en matière de sables bitumineux, a innové en établissant un incitatif basé sur les redevances pour les usages non combustibles du bitume. Je crois que ce modèle aurait aussi son importance dans d'autres domaines.
Il y a quelques autres éléments à considérer, comme les mesures incitatives basées sur la réglementation et les dispositifs qui offrent une flexibilité pour le déploiement des technologies novatrices. Comme je l'ai dit, en changeant de modèle, on s'expose à l'égard de l'organisme de régulation. Aux États-Unis, l'Agence de protection de l'environnement offre des exonérations en matière de performance environnementale en vertu de la Loi sur la qualité de l'air et de la Loi sur la qualité de l'eau. À la certitude d'un bon rendement environnemental, les autorités peuvent ainsi préférer la possibilité d'une meilleure performance à moindre coût.
On pourrait aussi penser à un traitement rapide des examens réglementaires dans le cas de projets supérieurs à la moyenne ou meilleurs que le projet examiné juste avant. Ainsi, les entreprises chercheraient à s'insérer dans la file d'attente de l'Office national de l'énergie sur la base de leur performance environnementale et non selon le principe du premier arrivé, premier servi.
Il faut aussi accorder beaucoup plus d'attention aux « bacs à sable » technologiques en amont de la commercialisation. Un bon exemple de cela réside dans le partenariat entre Ressources naturelles Canada et le gouvernement de l'Alberta pour la création de l'Alberta Carbon Conversion Technology Centre en appui du Carbon Xprize ici même en Alberta. Les bacs à sable technologiques favorisent l'émergence de nouveaux écosystèmes. Sur le modèle du CERN à Genève où vont ceux qui étudient la physique des particules pour faire s'entrechoquer les atomes et pour explorer les fondements de l'univers, nous devons créer ce genre de lieu phare dans d'autres domaines, ici même au Canada. Comme le centre pour la conversion du carbone...
Je crains de devoir vous interrompre, monsieur Switzer. Nous venons de dépasser le délai qui nous était imparti. Merci.
Monsieur Tan, la parole vous revient en premier. Vous partagerez votre temps de parole avec M. Arseneault, si j'ai bien compris.
Oui. Je partagerai mon temps avec mon collègue.
Monsieur Switzer, l'industrie des hydrocarbures a toujours été de première importance en Alberta. Aussi, je suis convaincu que vous souhaitez vraiment utiliser les technologies propres pour réduire l'empreinte carbonique de l'industrie et accroître son efficacité.
L'industrie, pour sa part, est-elle encline à adopter ce que vous appelez les technologies propres et à les mettre en application? Combien de temps faudra-t-il avant que l'industrie soit convaincue que ces technologies en valent la peine? Quel est l'échéancier?
Historiquement, la capacité d'absorption de l'industrie est limitée. C'est pourquoi, selon moi, il faut absolument se focaliser sur les mesures incitatives au déploiement technologique — il peut s'agir de dispositifs financiers — et sur les bacs à sable technologiques. Pour réussir à traverser le désert de la commercialisation, dans lequel le déploiement des nouvelles technologies peut coûter des dizaines ou des centaines de millions de dollars, il faut somme toute du prêt à l'emploi. L'infrastructure doit être en place afin que les entreprises aient devant elles des exemples concrets qui leur permettent d'accélérer les choses.
Merci.
Monsieur Poste ou monsieur Wright, quand des turbines sont utilisées près des côtes — c'est aussi vrai pour la technologie solaire —, les turbines marémotrices peuvent se corroder. Un dépôt peut même se former sur les lames, voire sur la voie de transmission, réduisant d'autant la capacité et la durabilité de la turbine. Quel est votre avis sur la technologie marémotrice en regard des autres technologies, qu'elles soient éoliennes ou solaires?
Pour l'heure, il n'y a pas encore de convergence des technologies marémotrices. Il existe différentes technologies, par exemple des turbines à trois lames, des turbines de type éolien et d'autres concepts encore, comme le nôtre, dépourvu d'axe central. C'est différent d'une technologie à l'autre.
Les défis technologiques sont grands dans cette industrie. Comme vous l'avez fait remarquer, nous nous trouvons dans l'océan, un milieu où il y a non seulement de la corrosion, mais aussi un débit élevé, un encrassement biologique et bien d'autres difficultés technologiques que nous tentons d'aborder dans notre premier projet au centre d'essai FORCE. Nous avons posé des capteurs sur les technologies elles-mêmes pour voir comment elles réagissent aux aléas. D'où l'importance des projets pilotes qui nous permettent d'observer cela sur toutes les amplitudes de marée pendant plus de 15 ans et de vérifier nos prédictions de changement à tous les 6 mois, 5 ans, 10 ans.
[Français]
Merci, monsieur Tan.
Ma question s'adresse à M. Wright ou à M. Poste et porte sur l'énergie créée à partir des marées.
Je viens du Nouveau-Brunswick. Pour ceux qui ne le savent pas, c'est dans la baie de Fundy qu'on trouve les plus grandes marées du monde. C'est donc, sur la planète Terre, un endroit idéal pour réaliser des tests et des recherches.
Dans ce domaine, les recherches effectuées et les technologies utilisées dans des baies où les marées sont beaucoup moins imposantes sont-elles aussi profitables que dans la baie de Fundy?
Je pense que la baie de Fundy, de par sa situation topologique et géographique, est très particulière. Elle engendre les marées les plus hautes au monde. En matière d'énergie marémotrice, la beauté de la chose est qu'on trouve également des courants très forts à la baie de Fundy. Elle offre donc à la fois une différence d'élévation entre les marées basses et hautes ainsi que des courants très forts.
On estime aujourd'hui que la puissance extractible de la baie de Fundy se situe entre deux et trois gigawatts. Le marché total de l'énergie marémotrice, autour du monde, se situe pour sa part entre 100 et 120 gigawatts. C'est donc dire que le marché international a une portée bien plus large que celui de la baie de Fundy. Bien sûr, la baie de Fundy possède une ressource exceptionnelle. Toutefois, en Europe, en Asie ou partout ailleurs où OpenHydro déploie ses activités, les vitesses de courant des ressources sont parfois comparables à celles de la baie de Fundy.
Une fois qu'on obtient des résultats concluants, on peut tout à fait installer ce genre de turbines, qui, soit dit en passant, ressemblent à des vaisseaux spatiaux. C'est de toute beauté, du moins d'après ce qu'on peut en voir. On peut les installer dans des baies beaucoup moins imposantes.
Effectivement. Il y a plusieurs années, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse ainsi que les fournisseurs et les promoteurs qui étaient venus dans la baie de Fundy ont décidé de prouver que, dans l'un des endroits les plus extrêmes du monde en matière de marées, cette technologie serait viable technologiquement et financièrement.
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
J'ai une question pour Mme Reschke.
Vous avez indiqué que les produits ou les technologies propres verront le jour non pas en raison des politiques ou des mesures incitatives gouvernementales, mais bien avec l'appui des politiques et des mesures incitatives gouvernementales. Certains diront: en dépit des politiques et des mesures incitatives gouvernementales.
Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par là? Quelle est la différence entre être la cause des changements et appuyer ces changements? Qu'est-ce que cela implique pour les programmes que le gouvernement élabore? Sur quoi devraient-ils se focaliser?
Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il faut élargir les politiques et éviter de faire en sorte que le gouvernement décide de qui gagne et qui perd.
L'ennui tient à ce que, dans la plupart des cas, c'est le marché qui décide. Comme je l'ai indiqué dans mon rapport sommaire, pour l'instant, le gros de l'investissement provient de l'industrie et cet investissement est bien antérieur à cette étude sur les technologies propres et à toute participation éventuelle du gouvernement.
Selon moi, nous devrions envisager d'élargir nos horizons pour prendre en compte à la fois les petites, les moyennes et les grandes entreprises. Je suis consciente qu'il reste beaucoup à faire pour soutenir les grandes entreprises en raison de leur complexité et de l'étendue de l'échéancier. Le gouvernement jouera sans doute un rôle important à l'égard de la grande entreprise parce que, dans ce cas, on peut faire montre de patience.
Je crois que vous avez posé une question à M. Switzer au sujet de l'échéancier. À mon avis, le gouvernement, s'il veut agir, devrait faire montre de patience et envisager la définition dans son sens élargi et non pas dans son sens restreint. Si vous adoptez une définition restreinte, vous limiterez dès le départ la possibilité que des idées émanent naturellement d'entrepreneurs et de gens novateurs qui sont capables d'anticiper les mouvements du marché et les besoins de l'industrie au cours de la transition.
Nous sommes conscients qu'il s'agit d'une transition. Je vis en Alberta. J'ai grandi au milieu des hydrocarbures. Ma mère travaillait dans la filtration. Je travaille dans le domaine de la corrosion et des enduits protecteurs pour les pipelines. Nous voyons ce qui se passe, mais cela n'arrivera pas du jour au lendemain. Alors, élargissons notre définition du concept et rendons-le plus englobant pendant que la transition a lieu.
En effet.
J'allais vous poser une question sur la nature floue du concept de technologie propre notamment. Par exemple, des gens de l'industrie des hydrocarbures ont parlé ici des améliorations apportées aux technologies de forage, comme le fait d'exploiter le gaz naturel là où il existe déjà d'autres installations, à la source. De l'avis de certains membres du Comité, il ne s'agit pas là d'une technologie propre.
Vous avez effleuré le sujet. Aussi, Pierre Desrochers a dit ceci des technologies vertes: « À mon avis, elles causent souvent plus de problèmes qu'elles n'en résolvent. Le fait qu'elles reposent sur une énergie renouvelable ne les rend pas forcément plus durables. »
Vous avez évoqué l'initiative pour des carburants renouvelables dont j'ai souvenir de l'élaboration. Certains demandaient à ce que le gouvernement de l'époque introduise un certain pourcentage de carburants renouvelables dans le système. On disait que de retarder cette mesure serait inacceptable. Au bout de cinq ans, cette politique a été rejetée. Elle avait causé une flambée des prix de la nourriture et une pénurie des réserves mondiales de nourriture. On s'était aussi rendu compte, comme vous l'avez dit, que ces carburants ou leur production produisaient autant d'émissions de gaz à effet de serre que les hydrocarbures traditionnels.
Pouvez-vous nous expliquer les raisons pour lesquelles, selon vous, nous devons adopter une vision à long terme et ce qui fait que, sans un examen approfondi des impacts sur le cycle de vie, nous mettons en péril et notre économie, et notre environnement?
J'en suis venue à envisager de faire une maîtrise en économie. C'est le genre de personnes qu'il vous faut, c'est-à-dire des experts capables de mesurer les rendements. Ce n'est pas ma spécialité.
Voici d'abord un exemple tiré du domaine des biocarburants.
Je me suis entretenue avec Jeff Golinowski de Tier 1 Energy. Il s'est lancé dans une longue diatribe au sujet des biocarburants, parce qu'ils abîment les sols de manière permanente. S'ils avaient mené une étude de faisabilité en amont et s'ils avaient parlé de toute l'énergie qui doit être consommée pour produire les biocarburants et des conséquences à long terme sur les sols, ils en seraient probablement restés là.
Pour revenir sur ce que vous disiez, les économistes que vous pouvez sans doute consulter évalueraient les coûts d'extraction associés à la production de batteries par exemple, ainsi que la quantité de carbone libérée par l'industrie minière lourde pour extraire x tonnes du sol. On mettrait un chiffre là-dessus et on le reporterait sur l'écosystème. C'est un peu comme les minuscules perles de plastique présentes dans les produits cosmétiques qui finissent par s'accumuler dans l'océan.
J'essaie d'expliquer une réalité qui est très complexe au moyen d'un concept très concret. Vous avez un budget très important. Si vous échafaudez quelque chose, je vous encouragerais à faire de cette définition le centre de votre étude.
Je vous encouragerais à inviter de grands experts de l'industrie et des économistes capables de mesurer les quantités... Il faudra peut-être mesurer le carbone qui est libéré à chaque étape, puisque c'est là le coeur du problème. Mettez un chiffre là-dessus, suivez-le à la trace et additionnez le tout avant de vous lancer dans les biocarburants ou dans toute autre forme de nouvelle technologie.
Je suis navrée de ne pouvoir être plus précise ici.
Vous avez dit auparavant que vous croyez que le gouvernement devrait investir en priorité dans la commercialisation des nouvelles technologies plutôt que dans la R-D au sens strict. Pouvez-vous nous en dire plus? Nous n'avons pas beaucoup de temps.
Ce que j'ai entendu au sujet de la R-D, c'est que nous devons la concevoir comme une pyramide. Au sommet de la pyramide, l’étape de la R-D coûte probablement le moins cher parce qu’elle concerne la science, plutôt que l'application.
Le processus de l'application, ou le fait d’appliquer une découverte scientifique en prenant un brevet et en rendant son objet commercialement disponible, se situe au bas de la pyramide, puisqu’il prend plus de temps et qu’il coûte plus cher.
Je ne suis pas non plus experte en finances, mais pour amener un produit à cette étape, il faut mettre davantage l'accent sur la R-D en tout temps, avec un grand nombre de programmes à l’échelon provincial. Il existe des subventions, en général d'environ 50 000 $. Cela est insuffisant pour commercialiser un produit ou un service. Le gouvernement pourrait peut-être consacrer à la R-D une moins grande part, comme 15 % des fonds de l'étude, et davantage, comme 40 %, aux dernières étapes de la commercialisation.
Le problème, selon moi, sans vouloir offenser qui que ce soit, consiste à déterminer dans lesquels vous allez investir. Vous devez parler à des représentants de chez GE et 3M, des personnes qui ont développé des technologies et qui sont des experts de cette approche progressive. Ils annulent un processus dès qu’il n’avance plus, et ils affichent les meilleurs bilans au monde.
Je vous remercie.
Je vais commencer par M. Switzer. Vous avez mentionné que l'avenir de l'industrie, et je suppose que vous parliez de l'industrie du pétrole et du gaz, allait être très différent. Vous avez dit, pour utiliser une analogie de hockey, que nous devons aller là où la rondelle ira, et non là où elle se trouve déjà.
Ensuite, vous avez abordé rapidement, pour moi du moins, certaines de ces possibilités. Pourriez-vous développer votre vision de l’avenir, vers où nous devons nous diriger, et ce que nous pouvons faire aujourd'hui pour y parvenir?
Puisque cette discussion sur ce qu’il est possible de faire d’autre avec les compétences et la ressource sera extrêmement importante à l'avenir, j'ai développé un scénario sur ce que l’on peut libérer, outre les carburants pour les transports, des sables bitumineux ou des vastes ressources du bassin sédimentaire de l'Ouest canadien. Il est certainement possible de mobiliser les électrons comme tels, afin de créer ainsi de l'électricité au moyen de technologies comme l'acidification à l’acide citrique. Il y a la libération de l'hydrogène. Il y a aussi la voie biotechnologique, c’est-à-dire des bactéries qui consomment de l'hydrocarbure et créent de l'hydrogène à titre de sous-produit. En outre, des expériences ont actuellement cours sur la façon de récupérer les métaux lourds des sables bitumineux, plutôt que de produire des carburants pour les transports.
Il faut d’abord réfléchir aux marchés qui seront en demande dans le monde. La demande de lithium sera-t-elle plus grande si les parcs de véhicules sont électrifiés? Assurément. Le Canada pourrait-il être un important producteur de lithium? Très certainement. Comme nous avons déjà une énorme industrie bâtie autour de l'extraction de ressources de notre secteur du pétrole et du gaz, nous devons réfléchir à tout cela.
Nous devons également réfléchir à ce qu'il faut faire avec les asphaltènes, un élément unique des sables bitumineux. Les pipelines qui relient l'Alberta, d’où viennent les ressources, à l'Ontario, qui est l’un des principaux pôles de fabrication au monde, sont déjà là. Il reste à savoir ce qu’il serait possible de faire avec la source de fibres de carbone la plus économique au monde, et combien d'industries il serait possible de perturber si l'Ontario était le lieu de production le moins cher? C'est une question importante qui mérite, selon moi, d'être étudiée.
Quelqu’un a demandé si les industries en place en ce moment étaient capables de créer ce type d'innovation. La réponse à cette question, c’est qu'elles sont actuellement menacées de disparaître et, en tant que sociétés canadiennes, elles n'ont nulle part ailleurs où aller. Elles ont à plusieurs égards doublé la mise, en achetant les sables bitumineux de leurs homologues internationaux, de sorte qu’elles ont une forte incitation à expérimenter et à essayer de nouvelles choses.
L'expérience d'AOSTRA, le Bureau de recherche et de technologie des sables bitumineux de l'Alberta, avec 1 milliard de dollars investis par le secteur public sur 10 ans, illustre bien l'opposition parfois affichée par le secteur international du pétrole et du gaz. Les entreprises ne voulaient pas procéder de la sorte. Leur horizon de rendement des investissements en R-D est beaucoup plus court que celui auquel ils ont été tenus par le secteur public dans la poursuite des possibilités que représentaient les sables bitumineux.
Cette vision sur 10 ans, un horizon à long terme qu'aucune entreprise ne peut viser seule, est nécessaire, mais ses répercussions sont assez importantes. Un seul investissement de 1 milliard de dollars du secteur public dans les sables bitumineux s'est traduit par un investissement supplémentaire de plus de 100 milliards de dollars du secteur privé en une seule année. Nous devons agir dans cette mesure, et il faut pour cela choisir des gagnants. C'est ce que le gouvernement doit faire. Il doit se concentrer. Il doit choisir des gagnants.
Je vous remercie.
J'aimerais maintenant me tourner vers M. Poste et M. Wright et parler de l'énergie marémotrice. En particulier, monsieur Poste, je vois sur le site Web de votre entreprise que vous avez de l'expérience au Royaume-Uni, en France et dans d'autres pays. Pourriez-vous nous dire en quoi vos opérations dans ces administrations diffèrent de vos opérations canadiennes, et en quoi votre expérience pourrait éclairer l'industrie canadienne?
Comme vous venez de le dire, notre société opère au Canada, en France, au Japon et au Royaume-Uni, et personne n’adopte la même approche. Pour ce qui est du cadre des règlements et des politiques, ces administrations utilisent des instruments différents, et accordent parfois plus d'importance à la commercialisation. J'ai parlé du modèle français, où d’importants investissements ont été effectués dans des infrastructures portuaires qui permettent non seulement à l'industrie de l’énergie marémotrice de faire avancer des projets, mais aussi à l'industrie éolienne en eaux littorales d’y investir aussi. C'est l'un des modèles que l'on peut observer en France.
Au Royaume-Uni, certains mécanismes de financement sont assez comparables à ce qui se fait dans le domaine de l’énergie marémotrice en Nouvelle-Écosse. La Nouvelle-Écosse applique un tarif incitatif pour le développement des projets d’énergie marémotrice à ce stade précoce. La légère différence qu’il y a entre le Canada et le Royaume-Uni réside peut-être dans le fait que les Britanniques ont misé sur l'émission de baux à long terme pour le développement de tarifs pré-commerciaux ou commerciaux. Un promoteur peut se faire consentir jusqu'à 100 à 200 mégawatts pour faire progresser son développement tout au long de l'année. C'est le genre de visibilité qui est accordé aux promoteurs, aux fournisseurs de technologie ou aux locataires.
En ce qui concerne le Japon, c'est un peu différent. Les projets de démonstration relèvent uniquement de l’initiative gouvernementale, sont assez isolés à ce stade et sont financés par le gouvernement. C'est un modèle différent qui en est à un stade très précoce pour l’instant.
J'espère que cela répond à votre question.
Vous n’aurez pas le temps, puisqu’il ne vous reste que 15 secondes. Merci.
Il nous reste environ une minute et demie.
Madame Ng, vous aviez une question?
Messieurs Poste et Wright, je suis très heureuse d’apprendre que le travail de vos deux organisations a mené à la création de 250 entreprises en démarrage dans la région de la baie de Fundy. Pouvez-vous me dire comment les investissements réalisés grâce à RNCan et d’autres ont aidé, et comment, de notre point de vue, ils contribuent à favoriser d'autres investissements du secteur privé et à produire non seulement des résultats, mais aussi des emplois locaux?
Ce ne sont pas uniquement les investissements qui ont contribué à stimuler l’activité universitaire dans le secteur de l’énergie marémotrice. Tout d'abord, il faut des ressources, et le Canada en possède, qu’il s’agisse des marées ou des courants fluviaux. Le Canada a la possibilité manifeste d'investir dans l'énergie renouvelable.
Avant de répondre directement à votre question, le contexte réglementaire, surtout en Nouvelle-Écosse, a donné au public et aux promoteurs une idée de l'orientation qui sera donnée au secteur des énergies marines renouvelables. C'est un contexte unique qui n'existe dans aucune autre administration au Canada. Il a certainement servi d’incitation à l'investissement, puisque des promoteurs comme Jeremy savent qu'il est possible de passer de l’étape de la démonstration à un développement commercial à plus grande échelle si tout fonctionne bien. Ils ont besoin de cette certitude pour faire les investissements importants qui sont nécessaires dans cette industrie qui en est actuellement à ses premiers balbutiements.
Je vous remercie.
Sauf si vous voulez conclure rapidement un dernier point, je vais devoir vous interrompre maintenant.
L'investissement réalisé en 2009 par le Fonds pour l'énergie propre de RNCan a été primordial pour créer l'infrastructure qui permet de relier les turbines au réseau des transports. Sans cet investissement, des entreprises comme celle de Jeremy auraient dû dépenser ces 20 millions de dollars seulement pour accéder à l'eau. Le Fonds pour l'énergie propre a permis de payer cette infrastructure habilitante.
Merci beaucoup.
Je suis désolé, c’est mon travail d’interrompre les témoins.
Je tiens à remercier tous les témoins d’avoir participé aujourd'hui, en particulier ceux qui ont fait l'effort de revenir une deuxième fois. Votre témoignage nous a été d'une grande utilité, mais nous devons tout de même passer à la deuxième heure.
Nous allons suspendre nos travaux quelques instants. Je préférerais que personne ne quitte la salle, à l'exception de nos témoins.
Nous reprenons maintenant nos travaux.
Deux témoins sont avec nous par vidéoconférence. Comme ils ne sont pas tout à fait prêts, nous allons commencer par les deux groupes qui se trouvent dans la salle. Nous accueillons l’Ontario Cleantech Materials Group, et nous recevons ensuite MM. Wissing et Won.
Messieurs Bowes ou St. Louis, pourquoi ne commencerions-nous pas avec vous? Nous donnons à chaque groupe jusqu'à neuf minutes pour présenter son exposé. Vous n’êtes pas obligés d’utiliser les neuf minutes. Une fois votre exposé terminé, vous répondrez aux questions.
La parole est à vous.
Je vous remercie.
Bon après-midi monsieur le président, députés, membres du Comité et autres témoins. Nous tenons à remercier le Comité de nous accueillir aujourd'hui et de nous permettre de contribuer à son étude sur les technologies propres dans les secteurs des ressources naturelles du Canada.
Je m'appelle Brian St. Louis, directeur des affaires gouvernementales pour Avalon Advanced Materials. Je suis accompagné par mon collègue Gregory Bowes, PDG de Northern Graphite. Ensemble, nous représentons l’Ontario Cleantech Materials Group, ou OCMG.
Aujourd'hui, mes observations porteront surtout sur la possibilité immédiate pour le Canada de tirer parti de sa grande richesse en ressources naturelles pour adhérer à des chaînes d'approvisionnement en technologies propres à croissance rapide. Pour cela, il peut produire les matériaux essentiels et les produits manufacturiers de pointe à valeur ajoutée qu’exigent des méthodes durables. Le gouvernement peut mettre en place des instruments stratégiques qui soutiendront des projets pilotes et de démonstration, et lancer des travaux de développement des processus qui lui permettront de profiter de ces possibilités primordiales pour passer à une économie à faible émission de carbone et, au bout du compte, créer des emplois et des débouchés économiques, y compris dans les collectivités nordiques et autochtones.
En guise d’introduction, disons brièvement que la mise sur pied de l'OCMG a été déclenchée par le ministère du Développement du Nord et des Mines de l'Ontario, qui a organisé en octobre dernier une table ronde sur la chaîne d'approvisionnement en piles. Deux semaines plus tard, lors du Sommet sur l'innovation minière tenu à Sudbury, une discussion entre experts portait sur le thème « Produits de base recherchés: nouveaux matériaux et nouveaux débouchés pour une économie sobre en carbone ».
L'OCMG vise avant tout à stimuler la production de matériaux de technologie propre à valeur ajoutée et à profiter de cet avantage stratégique canadien pour arrimer la fabrication nationale de produits finaux et de composants de technologies propres en aval. Pour cela, il faut intensifier la sensibilisation, la mobilisation, les partenariats et la collaboration afin d’établir des pôles de production et d'innovation de matériaux de pointe, et reconnaître que de nombreux matériaux, comme les formes raffinées de graphite, de lithium, de terres rares, de cobalt, de vanadium et autres, sont absolument essentiels à l’adoption de masse des technologies d'énergie propre, y compris les véhicules électriques, l'énergie éolienne et solaire, les piles à combustible et d'autres sources d'énergie propres.
L'OCMG est un réseau de collaboration entre l'industrie et le milieu universitaire. Aucune cotisation n’est exigée pour y adhérer. Il ne compte aucun employé rémunéré ou permanent. Nous ne demandons pas d’aide pour le groupe comme tel. Nous savons toutefois que toutes les sociétés de fabrication de matériaux de technologies propres ont des besoins à combler et des défis à relever qui sont communs à l’ensemble des sociétés, mais qui sont à la fois complexes et uniques. Le fait de travailler au sein de réseaux de collaboration plus petits et moins formels, comme le montre l’expérience de l'OCMG, procure une souplesse et une singularité accrues. Même si les entreprises ne doivent pas être laissées à elles-mêmes, notre groupe comprend et accepte entièrement le fait que ce sont les PME comme telles, et non les groupes ou les associations, qui ont besoin d’investissements pour commercialiser et produire des résultats réels.
L'OCMG compte actuellement 17 membres, comme précisé dans le document de présentation que nous avons remis au Comité. Ces membres couvrent la totalité de la chaîne d'approvisionnement, de la production et de la fabrication à la recherche et au développement, et englobent des laboratoires commerciaux, des fabricants de piles et des entreprises de recyclage des piles. Cette chaîne d'approvisionnement complète est soutenue par des membres des principaux fournisseurs de services, d'universités et d'associations. L'OCMG est un réseau et un effort axé sur l’ouverture et la collaboration, ainsi que sur la défense des intérêts de l'industrie, et non de ceux d’entreprises ou de projets individuels. Il est ouvert à tous ceux qui font partie de ces chaînes d'approvisionnement. Ce groupe réunit les intervenants nécessaires pour créer des chaînes d'approvisionnement en matériaux de technologies propres ici même au Canada.
En quoi consiste cette collaboration? Par exemple, des entreprises de fabrication de matériaux collaborent avec des laboratoires commerciaux ou des universités pour d’abord optimiser leurs propres processus innovateurs en vue d’améliorer la rentabilité et la qualité des produits, ensuite optimiser l'efficacité des ressources et alléger leur empreinte environnementale en réduisant les besoins en énergie, en eau, en chaleur, et en réactifs dans les technologies d'extraction et de traitement, et en recyclant ces ressources, puis extraire des matières qui permettent de fabriquer des produits spécialisés qui n'ont peut-être jamais été produits sans un processus innovateur, et enfin extraire et recycler les matériaux de technologies propres des produits mis au rebut.
Les établissements universitaires ont également un rôle central à jouer à l’appui de deux autres aspects. Le premier est l'identification, la formation et le perfectionnement d’un personnel hautement qualifié dont l'industrie a et aura besoin. Le deuxième aspect consiste à aider les entreprises de fabrication de matériaux de technologies propres à se préparer non seulement à répondre aux besoins actuels en produits propres et de haute technologie, mais aussi à la prochaine génération de technologies et aux besoins en matériaux qu’elle entraînera.
Dans l'ensemble, les matériaux de technologies propres sont et demeureront des intrants cruciaux des produits qui permettent de réduire et de prévenir les effets nuisibles à l’environnement et d’en arriver en fin de compte à une économie sobre en carbone. En outre, pour des raisons à la fois environnementales et économiques, créer ou recycler ces produits le plus efficacement possible pour l'environnement est nécessaire, voire exigé par les consommateurs et les clients.
Le Comité a demandé quels types de mesures le gouvernement fédéral pourrait adopter afin de réduire les risques associés à l'adoption de technologies propres dans les secteurs des ressources naturelles.
Comme nous l’avons indiqué, ce sont les processus innovateurs mis au point par des entreprises canadiennes et par leurs partenaires qui permettent de produire ces matériaux de technologies propres spécialement conçus. Comme pour tout processus innovateur, la recherche et le développement exigent beaucoup de travail et, en fin de compte, de financement, et il s’agit ensuite de faire progresser ces technologies et ces processus. Le développement constitue un risque élevé et coûte cher, et il n'a pas les effets immédiats que recherchent les investisseurs traditionnels.
Comme l'a signalé le sous-ministre adjoint Frank Des Rosiers dans son témoignage devant le Comité, cette situation entraîne de nombreuses PME canadiennes dans la « vallée de la mort » ou, pour utiliser une expression moins macabre, vers « l'écart préalable à la commercialisation ». Le Comité a entendu des témoignages de grande valeur à ce sujet. Je tiens tout simplement à souligner que c'est un énorme défi pour le secteur des matériaux de technologies propres, et il faudra le relever si nous voulons que le Canada réussisse dans ce domaine et puisse être concurrentiel à l'échelle mondiale.
Les défis associés à la transformation dans les industries des métaux de base et des métaux précieux sont bien connus, et la commercialisation est simple. Il en va de même pour le lithium, le cobalt, le graphite, les terres rares et bien d'autres métaux et minéraux spéciaux. En conséquence, quels sont les instruments stratégiques de pratiques exemplaires qui permettraient de réduire les risques associés au secteur des matériaux de technologies propres?
Premièrement, le gouvernement doit appuyer les PME canadiennes de technologies propres innovatrices pour faire l’essai pilote ou de démonstration de leurs processus innovateurs, puisque le financement requis pour faire progresser la technologie constitue souvent le principal obstacle pour ces entreprises. Cela ne veut pas dire que le gouvernement doit agir seul. L’entreprise privée, les partenaires et les investisseurs doivent au contraire avoir la volonté d'y participer directement.
Deuxièmement, le Comité a appris, dans le cadre d’une étude antérieure, à quel point le programme des actions accréditives avait été efficace pour permettre aux entreprises débutantes d'intensifier l'exploration grâce à certaines formes de financement de développement de projets. Les nouvelles réalités de la production de matériaux pour le secteur des technologies propres ne sont toutefois pas les mêmes que dans le secteur de l’exploitation minière traditionnelle. La commercialisation exige d’intenses efforts de recherche, de développement de processus et d’essais pilotes en usine pour démontrer que ces processus peuvent être améliorés et que des produits à valeur commerciale peuvent être fabriqués tout en atténuant les répercussions environnementales.
Certains de ces travaux de développement de processus ne sont actuellement pas intégrés au cadre des actions accréditives. L'OCMG recommande de modifier le programme des actions accréditives afin d’englober ces aspects cruciaux de la commercialisation de la production de matériaux de technologies propres, et des produits à valeur ajoutée dérivés de ceux-ci. Il faut garder à l'esprit que cet aspect est financé par des investisseurs privés, des sociétés financières privées et d'autres sources de fonds d'investissement, essentiellement en partenariat avec le gouvernement, qui peuvent injecter dans l’industrie certains des capitaux fort nécessaires.
L'OCMG sait que les intérêts en concurrence qui sont solides et valides sont nombreux, et notre organisme est prêt et apte à collaborer avec le gouvernement afin de déterminer quels aspects des processus de développement et de démonstration sont admissibles, et de contribuer à l’établissement de lignes directrices, par projet et par entreprise, qui auraient un impact, sans toutefois constituer un lourd fardeau pour le gouvernement. Cela permettrait aux entreprises de matériaux de technologies propres et aux innovateurs de processus en aval d'amasser le capital-risque dont ils ont besoin aux fins de l’innovation et du développement de processus à petite échelle aux premières étapes, et d’améliorer les technologies et la commercialisation de ces résultats.
Technologies du développement durable Canada est un organisme qui soutient des projets pilotes et de démonstration, et qui a réussi à aider des PME canadiennes innovatrices et en pleine croissance au moyen d’investissements. TDDC opère cependant dans un carcan un peu rigide qui peut limiter sa capacité d’intégrer certains des objectifs stratégiques qui sont au coeur des priorités du gouvernement.
Il y a aussi un autre exemple, et il s’agit du gouvernement du Québec, qui investit déjà avec succès dans le secteur des technologies propres, tout en offrant un soutien complémentaire aux bailleurs de fonds et aux partenaires privés par l’intermédiaire de Ressources Québec, une filiale d'Investissement Québec, et qui investit directement par l'entremise d'autres ministères.
Pour conclure, quelles sont les recommandations au gouvernement fédéral dont le Comité devrait tenir compte dans son rapport final? L'OCMG recommande premièrement que le gouvernement appuie les projets de commercialisation dans le secteur des matériaux de technologies propres au moyen d’instruments, en matière de politique de développement, qui sont axés sur le développement de la chaîne d'approvisionnement en technologies propres, l'innovation et l'efficacité des ressources. Deuxièmement, il recommande que soit modifié l’actuel programme des actions accréditives de manière à mieux soutenir l'innovation, le développement et, au bout du compte, la commercialisation des processus de fabrication des matériaux de technologies propres.
Nous remercions le Comité d'avoir invité l’Ontario Cleantech Materials Group à témoigner aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Bienvenue à nos deux témoins qui se joignent à nous par vidéoconférence, messieurs Rand et MacGregor.
MM. Wissing et Won peuvent prendre la parole pour un maximum de neuf minutes, ensuite de quoi ce sera à vous messieurs.
Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Ray Won et je suis accompagné aujourd’hui par Wayne Wissing. Nous avons le privilège de témoigner devant votre comité pour discuter d'un sujet très important, à savoir la possibilité de réduire les émissions de CO2 tout en créant un produit recherché par les marchés de l'Union européenne et de l'Extrême-Orient. Avant de commencer notre exposé, j'aimerais faire un rapide préambule sur la raison pour laquelle nous sommes ici en tant que témoins.
Au cours des six dernières années, Wayne et moi avons eu de nombreuses discussions sur les solutions en énergie renouvelable pour le Canada. Bon nombre de ces discussions ont été le résultat des observations de Wayne et de ses expériences vécues dans le cadre de visites annuelles en Europe. Grâce à ces visites, il a vu de ses propres yeux comment l'Europe adoptait et, dans de nombreux cas, dirigeait le mouvement de l'énergie de remplacement. Les antécédents professionnels de Wayne en ingénierie lui ont permis d'analyser bon nombre d'aspects techniques des solutions observées et d'imaginer comment ces solutions pourraient être adoptées par le Canada.
Le Canada a adopté un certain nombre de solutions en énergie renouvelable à l’échelle du pays. La première consistait à brûler les arbres abattus, en utilisant le bois pour le chauffage et pour la cuisson. Aujourd'hui, nous utilisons également les déchets de bois et le gaz méthane. La combustion de matériaux de biomasse peut être utilisée pour obtenir une chaleur directe, comme dans les poêles à bois et les fournaises, ou pour faire bouillir l'eau, et ainsi produire la vapeur requise pour alimenter les turbines qui produisent de l'électricité. En 2014, le Canada a produit 2 043 mégawatts d'électricité grâce aux technologies de la biomasse.
Pendant des décennies, le Canada a pu profiter de centaines de lacs et de cours d'eau qui lui ont fourni de l'énergie hydroélectrique. La Colombie-Britannique, le Manitoba, l'Ontario, le Québec et Terre-Neuve sont les principaux producteurs d'hydroélectricité. Le Canada est ainsi le deuxième producteur mondial d'énergie renouvelable grâce à l’utilisation de l'énergie cinétique de l’hydroélectricité. Sa production équivaut à 378,8 térawatts.
Même si l'adoption de l'énergie éolienne et de l'énergie solaire est plus lente au Canada que dans d'autres pays industrialisés, nous avons observé une forte croissance dans ces secteurs. En 2014, le Canada a produit 9 694 mégawatts d'énergie éolienne, et 1 843 mégawatts d'énergie solaire. À cette liste, il faut ajouter la géothermie et bientôt l’énergie marémotrice et l’énergie houlomotrice.
Il est maintenant admis que le véritable enjeu n'est pas l'énergie renouvelable, mais bien la façon dont nous transportons et stockons l'électricité produite en l’absence de vent ou de soleil. Cela nous amène à discuter de la pile et des nombreuses formes qu'elle peut prendre.
L’exposé d'aujourd'hui sera axé sur un certain nombre de points importants. Nous espérons que nos discussions répondront aux questions que le Comité nous a fait parvenir au préalable.
J'aimerais maintenant céder la parole à Wayne. Mon travail consiste parfois à prendre certaines de ses réflexions et à essayer de les rendre un peu plus faciles à comprendre. Si vous me voyez l’encourager discrètement, c’est que j’essaie simplement de l’amener à conclure sa pensée.
Merci beaucoup.
Oui. Comme j'ai été un scientifique pendant la majeure partie de ma vie, mes pensées ont donc tendance à s’éparpiller.
Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne le Canada, j’observe que nous nous concentrons sur les voitures électriques et que nous nous dirigerons éventuellement vers les pompes géothermiques si nous voulons atteindre un objectif de zéro émission. Peu importe le scénario, cela signifie que nous allons utiliser l'électricité.
Je me suis rendu compte très rapidement qu'il est irréaliste de ne se fier qu’à l’électricité. C'est impossible. Déjà que la climatisation nous cause beaucoup de difficulté en été, en surchargeant les circuits un peu partout. Or, chauffer une maison avec une pompe géothermique exige de deux à trois fois plus de capacité qu’un climatiseur qui la refroidit en été.
Cela signifie que vous utilisez deux à trois fois plus d'électricité pour chauffer la maison. Dans le cas de la climatisation, ce n’est pas tout le monde qui profite de ce luxe, mais si nous adoptons la géothermie, toutes les maisons seront équipées d’une pompe géothermique. Nous allons manquer d’électricité, sans même parler de la voiture électrique qui va être branchée dans l’entrée.
J'ai consulté le site Web de Tesla, et leur plus petit chargeur a une puissance de 40 ampères. Si vous parcourez chaque jour de longues distances, comme dans le cas d’un vendeur ou autre, vous devrez recharger votre véhicule. Cela se traduit par une demande de 80 ampères, à 17 heures, au moment où le thermostat fait démarrer automatiquement la pompe géothermique et où tout le monde commence à cuisiner. Nous allons très certainement manquer d’électricité.
Si nous voulons changer cela, nous devons songer à changer non seulement le coeur de la maison, à savoir le panneau électrique, mais également le câblage dans les rues. Nous devons ajouter des transformateurs, et tout ce qui alimente ces transformateurs doit être plus lourd et ainsi de suite, partout jusqu’aux centrales électriques. Il faudrait donc remplacer des millions de kilomètres de câblage dans tout le pays, et nous n'en avons pas les moyens.
Après avoir examiné tout cela, je me suis rendu compte, quand on observe l'alimentation en énergie d'un ménage, que nous utilisons actuellement différentes sources d’énergie. Nous utilisons l'électricité à la maison pour l'ordinateur, les lumières, la télévision, et peut-être la cuisinière électrique, mais nous avons une deuxième source d'énergie, le gaz naturel, et une troisième source, à savoir le carburant pour la voiture, soit de l'essence ou du carburant diesel. Nous utilisons donc à l’heure actuelle trois sources d’énergie, et pour faire un grand ménage dans tout cela, nous voulons tout miser sur l’électricité. C’est absolument impossible et irréaliste.
Ce que j'essaie de dire, c'est qu’il faut voir notre façon de faire les choses sous un angle différent. Je parle ici d’une technologie qui a fait ses preuves, à savoir le processus P2G, pour conversion de l’électricité en gaz. Cette solution a été développée il y a une dizaine d’années en Allemagne, et elle fonctionne selon un principe très simple. J’ai cru comprendre que vous avez reçu des documents d’information.
Examinons d’abord cette image, et ce sont les composantes requises pour faire de l’eau que l’on observe en premier. Vous voyez ici une molécule d'oxygène et deux molécules d'hydrogène, et l’image suivante est celle du dioxyde de carbone. Sur le premier modèle, celui de l'eau, au moyen de l'électricité, on rejette l'oxygène pour garder l'hydrogène. Ensuite, sur la deuxième molécule, qui est celle du dioxyde de carbone, on rejette de nouveau l'oxygène pour conserver le carbone. Ensuite, on fusionne les deux résultats dans ce modèle, pour obtenir du gaz méthane ou gaz naturel.
Ce gaz a l'avantage d’être naturel à 100 %. Il ne renferme aucun oligo-élément de pétrole ou de gaz. Il ne contient pas de mercure. C'est un gaz naturel pur. Cela signifie que lorsque vous le brûlez, évidemment il n'y a pas d'oxygène, mais pour créer une combustion, vous utilisez de l'oxygène, alors vous reprenez essentiellement l'oxygène et vous le fusionnez avec de l'hydrogène, et vous obtenez de l'eau. C'est votre produit résiduaire. Le carbone est fusionné avec de l'oxygène lors du processus de combustion, et vous obtenez de nouveau du dioxyde de carbone.
Vous venez essentiellement de boucler la boucle du cycle, en commençant avec du CO2, avant de le combiner, puis de le relâcher dans l'atmosphère. Il en résulte ce que l’on appelle un gaz naturel neutre en carbone. J’ai indiqué dans le document le processus qui peut être utilisé avec le gaz naturel neutre en carbone.
Le document suivant représente ce qui s'est passé en Allemagne, où ils affichent en réalité une surproduction d'électricité en raison de l'énergie renouvelable. On peut voir au bas du document que même en réduisant la production d'énergie conventionnelle, ils réduisent cette production tous les jours, et de plus en plus, mais ils demeurent en surproduction puisque ce que nous voyons sous la ligne zéro correspond à la surproduction. Le débat sur le gaz naturel neutre en carbone devient de plus en plus animé là-bas, étant donné qu’ils considèrent ce qu'ils font en ce moment comme un gaspillage d'énergie. Lorsque nous produisons une plus grande quantité de ce gaz naturel neutre en carbone, nous pouvons alors diriger notre approvisionnement en énergie vers une source neutre en carbone, au lieu de tout miser sur l'électricité.
Dans cette optique, pour recueillir toute l’énergie excédentaire au Canada... En vérité, l’énergie produite par les centrales nucléaires, les éoliennes, etc., doit être recueillie. En conséquence, il nous faut un réseau électrique d’est en ouest. Ingénieurs Canada et la Chambre de commerce militent déjà en faveur d’un tel réseau. Le Parti libéral, le NPD et le Parti vert en ont parlé, tout comme la Chambre de commerce. Je parle maintenant pour les progressistes-conservateurs. Je pense qu'ils ont également eu la même discussion, puisqu'ils examinent souvent les politiques de la Chambre de commerce.
Je vous remercie. Le moment pourrait être bien choisi pour s’arrêter.
Je vous remercie.
Monsieur Rand, je vais vous céder la parole en premier, mais j’aimerais d'abord simplement vous remercier d'être revenu ici une deuxième fois, parce que je sais que vous deviez venir mardi dernier, mais que votre présence a été annulée.
Je vous remercie de me recevoir.
Je m’appelle Tom Rand. Je suis conseiller principal chez MaRS au sein du groupe des technologies propres, et je suis également l’associé principal chez ArcTern Ventures, un fonds de capital-risque privé qui investit directement dans des entreprises de technologies d'énergies propres.
Je mettrai beaucoup l’accent dans mon exposé sur l’aspect de l'adoption. Je remarque que l’accent n’est pas tellement sur le développement des technologies, mais plutôt sur leur adoption. Je vais également mettre bon nombre de commentaires entre parenthèses.
Comme le savent sûrement les membres du Comité, le groupe de travail provincial sur les technologies propres a accompli un travail remarquable dans les 12 à 18 derniers mois. Ce groupe a effectué un travail très solide. Les résultats sont très probants selon moi. En conséquence, je vais axer mes commentaires principalement sur les recommandations concernant le suivi de la façon de définir le mandat qui est récemment ressorti d’une partie du budget fédéral. Une somme d’environ 1,8 milliard de dollars sera dirigée vers EDC et la BDC. Il s’agit selon moi de la bonne façon d'aborder certains des risques fondamentaux liés à l'adoption des technologies propres dans les secteurs des ressources naturelles, entre autres.
Les technologies propres exigent beaucoup de capital. Nous avons une excellente équipe de relève ici au Canada. Vous demandez notamment ce que nous faisons de bien. Il est possible de modifier légèrement Technologies du développement durable Canada, mais globalement, cet organisme est bien dirigé. Pour ce qui est de doubler le financement de TDDC, c’est déjà fait.
Il reste à déterminer comment faire pour assurer l’adoption par les principales installations commerciales. C’est à ce niveau que le marché est bloqué. C’est là que se situe l’embâcle. Il existe probablement au Canada une dizaine d'entreprises capables de construire de grandes installations commerciales de technologie de pointe de la prochaine génération assurant une réduction plus que différentielle de la consommation d'énergie et une augmentation plus que différentielle de l'efficacité énergétique. Par exemple, l'éthanol cellulosique de nouvelle génération illustre parfaitement cet écart préalable à la commercialisation dont j’ai parlé plus tôt. Comme le sujet a été abordé dans le plus récent budget, je ne vais pas plaider pour qu’il en soit question. C’est déjà fait.
Je parlerai un peu du risque que toute cette volonté politique soit gaspillée si EDC et la BDC ne disposent pas d'un mandat assez circonscrit pour leur permettre de faire avancer le marché et de modifier le risque pour le secteur privé afin qu'il puisse participer et accéder à cet espace.
Il existe un risque qu’EDC et que la BDC agissent comme des suiveurs, et non comme des leaders sur le marché. Ce sont des banques. Leur principal objectif consiste à produire des dividendes pour leurs actionnaires. Les fonds qui sont alloués à EDC et à la BDC peuvent être très efficaces s'ils sont protégés, si ces groupes ont la capacité et l’autorisation d'utiliser ce capital d'une manière différente, et si des indicateurs de réussite sont associés à l'utilisation de ce capital d'une manière différente.
J'ai ici un document d’une page. Je peux vous en distribuer une copie papier pour vous aider à suivre, mais je vais le parcourir très rapidement.
Ce que je veux dire, c'est qu'EDC et la BDC doivent avoir le mandat très circonscrit d’assurer le suivi de ce budget pour faire avancer le marché. Mes commentaires porteront principalement sur EDC, qui dispose de 450 millions de dollars pour financer des projets commerciaux innovateurs. Je pense que RNCan a des programmes en place qui peuvent bien s'intégrer à ce que fait EDC, en particulier si RNCan se concentre sur certains fonds habilitants qui permettent à une entreprise de se rendre à EDC. Les dessins FEL-3 sont des dessins propres à un site utilisés pour la construction de ces premières usines commerciales. Si RNCan approuve certains de ces points dans le mandat d’EDC, c'est le mieux que nous puissions faire. Cette politique a nécessité beaucoup de travail, et je ne pense pas que nous puissions faire mieux.
Premièrement, les projets doivent être de très grande envergure. Si les dépenses en immobilisations de ces projets n'oscillent pas au moins entre 50 et 100 millions de dollars, vous ne vous éloignez pas suffisamment du mandat de TDDC et vous ne faites pas avancer le marché. Les projets doivent être de très grande envergure.
Deuxièmement, le risque technique doit correspondre à celui d’un grand projet commercial innovateur. S’il s’agit d’une deuxième ou d’une troisième occurrence, le secteur privé devrait y être, dans une grande mesure, par opposition à un premier projet en son genre.
En ce qui concerne l’état de préparation à la commercialisation, ces projets doivent avoir conclu des contrats d’écoulement avec des partenaires mondiaux, des sociétés d'ingénierie de premier ordre, qui s’engagent à construire l’usine en question et qui peuvent fournir une solide analyse des coûts et affichent un grand potentiel. Il faut procéder de la sorte pour que, lorsque nous construirons au Manitoba cette usine unique en son genre qui produit de l'éthanol cellulosique, un éventail de possibilités puisse se profiler derrière cette usine, sur le plan de la réduction des GES mais aussi, bien entendu, pour le bénéfice économique du pays. Cela devrait couvrir une grande partie de ce premier projet. S'ils adhèrent au projet à hauteur de 10 % ou de 15 % comme ils le feraient normalement, cela ne vaut pas la peine. Ils doivent contribuer jusqu’à concurrence de 50 % de ces premiers projets.
Tout le processus doit être assorti de jalons, de manière à soutenir une entreprise jusqu’à la mobilisation du génie et aux dessins FEL-3, un genre de dessins d'ingénierie avancés servant à définir le plan. Il faut ensuite établir des jalons jusqu’à la première pelletée de terre, à l’obtention des permis et à la mise en service. Nous avons actuellement des projets en préparation. Il ne faut pas plus de 12 à 18 mois pour franchir ces étapes.
Les projets construits au Canada avec des partenaires ayant un vaste pipeline d'activités à l'étranger sont également très utiles. Ce que j’entends par là, c'est que nous avons une énorme capacité de faire progresser la réduction des émissions de gaz à effet de serre ici au Canada, mais nous ferons les plus grands progrès si nous faisons en sorte que ces entreprises canadiennes de technologies propres exportent des solutions dans le reste du monde.
Woodland Biofuels constitue le meilleur exemple de ce que j’avance. Cette société peut construire une usine d'éthanol cellulosique au Canada avec un partenaire chinois. Des partenaires chinois sont prêts à payer la moitié de cette usine. Le même partenaire peut construire de 30 à 40 usines en Chine. Cela reviendrait à peu près à retirer la totalité des véhicules automobiles de la circulation au Canada. C'est en se tournant vers les marchés mondiaux que de très importantes réductions des GES peuvent être obtenues. Il y a d’autres aspects à considérer, mais je ne veux pas trop entrer dans les détails pour l’instant.
Ce que je veux surtout dire, c'est qu'il y a beaucoup de travail important qui a été fait. J'appuie les résultats de ce groupe de travail. Le risque maintenant, si nous ne réussissons pas à circonscrire ce mandat, et RNCan est l'un des groupes qui peut le faire, c’est que cet argent pourrait disparaître dans les limbes comme si rien n’était arrivé. C'est le risque. Il y a des publics réceptifs chez EDC et à la BDC. Il y a des personnes qui comprennent tout cela. Comme les divisions bancaires ont toutefois de la difficulté à bien saisir cet enjeu, il serait utile de peaufiner ce mandat.
Enfin, RNCan fait de l’excellent travail. D’importantes sommes d’argent ont été très utiles au moment où des entreprises cherchent à opérer des usines de démonstration à grande échelle. S’il était possible d’établir un continuum vers EDC, des efforts peuvent être déployés pour établir un centre des technologies propres ici à Ottawa. Cela serait très utile, et RNCan a des programmes qui s’y intégreraient bien au moment de la coordination de ces activités.
Je termine là-dessus. J’aimerais vous offrir ce document d’une page. Il n'est pas très long, mais je suis heureux de le distribuer aux membres du Comité si vous le jugez opportun.
Évidemment, je suis vieux et probablement pas aussi ferré que les autres dans le domaine des technologies propres.
J'aimerais vous féliciter pour votre capacité à écouter tout cela. Merci de le faire.
Je crée actuellement le plus grand projet industriel en Amérique du Nord. C'est une raffinerie de 25 milliards de dollars que nous construisons à 45 kilomètres au nord-est d'Edmonton. Nous construisons la phase un maintenant. Nous avons dépensé environ 8 milliards de dollars. Nous aurons dépensé 8,5 ou 9 milliards de dollars quand nous aurons terminé. Nous avons autour de 5 000 personnes qui y travaillent. On démarrera à la fin de l'automne ou à la fin de cette année.
À ce projet se rattache le plus grand système de gestion du CO2 au monde. Nous construisons un système de pipeline pour transporter le CO2 de l'opération de raffinage vers le centre de l'Alberta, où il sera utilisé pour améliorer la récupération du pétrole. Le système est conçu pour acheminer environ 40 000 tonnes de CO2 par jour, à peu près autant que n’en produisent toutes les voitures en Alberta. Nous pensons que le bilan écologique du diesel que nous fabriquons dans la raffinerie est bien meilleur du point de vue du CO2. Notre diesel est le seul diesel dérivé des sables bitumineux qui pourra dépasser toutes les normes applicables aux carburants relatives à la teneur en carbone, et nous pensons que c'est un avantage concurrentiel important.
Il s'agit de la première nouvelle raffinerie construite au Canada depuis 1984 et la première nouvelle aux États-Unis depuis 1977. Nous avons eu beaucoup d'occasions de réduire nos coûts environnementaux.
Je vous dirai quelques mots sur moi-même et je vous dirai pourquoi je suis ici. J'ai commencé par être la première personne de ma famille à aller à l'université. Je suis ingénieur en mécanique, et cela parce que ma mère savait réparer les voitures et qu’elle croyait que c'était ce que faisaient les ingénieurs alors elle m'a inscrit en ingénierie mécanique. Quand je suis sorti de l'université, je pouvais faire 900 $ par mois comme soudeur, et 600 $ comme ingénieur, alors j'ai loué un atelier, acheté une machine à souder et j’ai commencé à souder. Je n'ai jamais travaillé pour personne d'autre. Je mène ma barque comme je l’entends et j'essaie de trouver comment créer des entreprises de taille décente en tant qu'ingénieur. Je suis passé par tous les secteurs de l'industrie de l'énergie, de la production d'électricité aux gaz naturels liquides, au forage en mer, au raffinage maintenant et à la gestion du CO2.
Je suis entrepreneur depuis toujours, je n'ai toujours fait que lancer des entreprises et j'en suis venu à la conclusion qu'au Canada on accorde trop d'attention à ce concept et pas assez à la façon de transformer un concepteur ingénieux en un entrepreneur prospère. Nous n’avons pas l'infrastructure pour aider quelqu'un qui se lance, c’est pourquoi tous les gamins que je vois arriver... À Calgary, beaucoup de jeunes ont été licenciés parce qu'ils travaillaient dans le secteur de l'énergie. Ce sont des experts en la matière. On les a laissé partir maintenant. Ce qu'ils veulent faire en réalité, c'est démarrer leurs propres entreprises, et ils savent ce qu'ils font. Ils sont au fait de la technologie et ils ont une foule d'idées de technologies propres, mais ils ne savent pas vraiment comment démarrer une entreprise.
Ce qu'il nous faut faire, c'est dépenser notre argent sur l'infrastructure pour aider les gens à démarrer dans de bonnes conditions et à survivre jusqu'à ce qu'ils se fassent leur place sur le marché. Nous passons tout notre temps à parler d'excellentes idées et de grandes technologies, mais on voit bien avec le recul que tout l'argent qu’on a mis là-dedans a été très mal dépensé. Pour autant que je sache, comme tout cet argent dépensé n'a pas permis de créer de grandes entreprises de pointe, moi, je me concentre sur les projets de moins grande envergure.
Je travaille à la mise en place de l’infrastructure qui permettra aux jeunes d'aller de l'avant. Je siège au comité d'investissement à TDDC. Il s’y fait un excellent travail, mais il faut des aides pour les jeunes qui ont de bonnes idées. Il nous faut un endroit où ils puissent se retrouver. Y rencontrer des mentors. Il nous faut les soutenir et les aider à réduire leurs frais généraux pour qu'ils puissent avancer. Il nous faut leur faciliter la tâche, et cela partout où le bassin de population le justifie.
Je pense qu’il faut les implanter à proximité du marché. À Calgary, nous avons un marché de capitaux du pétrole et du gaz de 40 milliards de dollars par an. C'est un bon endroit pour faire des choses liées à l'énergie, car il est facile d’y introduire les idées de technologies propres, où elles ont un débouché immédiat sur le marché. Je ne pense pas qu’il nous faille essayer de faire des choses où il n'y a pas de marché parce que, en fin de compte, ça ne marchera pas. Il faut l’effet d’entraînement du marché pour tester les nouvelles idées et fonctionner à l'échelle.
C'est à peu près tout ce que je voulais vous dire, il me semble.
Je vous remercie.
Merci.
Merci pour votre brièveté et votre exubérance juvénile.
Monsieur Serré, vous êtes le premier sur la liste.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je vais partager mon temps de parole avec mon collègue M. Fragiskatos.
J'aimerais d'abord remercier les témoins des connaissances dont ils nous font profiter et de ce qu'ils ont préparé pour leur présentation d'aujourd'hui.
M. Rand a parlé plus tôt des investissements de notre gouvernement en matière d'énergies propres et de développement durable. Nos investissements ont été assez significatifs dans le domaine de l'énergie.
Je vais maintenant passer à ma première question.
[Traduction]
Je vais passer à MM. St. Louis et Bowes.
Nous parlons d'investissements que nous avons réalisés dans le cadre de notre budget, mais vous avez également signalé votre deuxième priorité, les actions accréditives. Nous avons cela dans l'industrie minière, avec le crédit d'impôt de 15 % pour l'exploration minière. Si nous devions élargir cela, pouvez-vous nous donner d'autres exemples de ce qui n'était pas couvert par le crédit d'exploration minière? Vous avez mentionné les actions accréditives. Comment pouvons-nous élargir cela pour aider l'industrie — pour vous aider — à grandir, avec des emplois bien rémunérés?
Le champ d’application du crédit d'impôt au titre des actions accréditives est assez étroit. Il concerne essentiellement l’exploration préliminaire, de sorte qu'il ne s'étend pas aux activités de pré-développement, de développement ou de construction. Ce que soulignait Brian, c’est que ces minéraux de spécialité sont très différents des métaux ordinaires et des métaux précieux. Leur métallurgie et traitement sont souvent complexes. Un effort de recherche et de développement est nécessaire pour trouver le meilleur moyen d'extraire ces minéraux et mettre au point des procédés commerciaux. Des choses comme le prélèvement d'un grand échantillon en vrac, la réalisation d'un test de la technologie en usine pilote, puis de tests supplémentaires pour le passage à l’échelle et démontrer sa viabilité commerciale — rien de tout cela n'est actuellement couvert par le programme d’actions accréditives.
Ce que nous suggérons vise essentiellement les minéraux de technologies propres. Nous pouvons définir quels sont les minéraux et quelles activités spécifiques liées à leur transformation et à leur commercialisation sont incluses. Nous ne parlons pas ici de centaines de millions ou de milliards de dollars. Dans notre cas, ce serait probablement quelques millions pour des échantillonnages en vrac et ainsi de suite. Nous disposons d'une technologie de purification très prometteuse, qui concerne la fabrication d'un matériau de l’anode des batteries au lithium-ion, ainsi que des plaques bipolaires pour les piles à combustible. Nous devons faire un test pilote de ce processus. Nous dépendons entièrement des marchés financiers pour cela. Ce n'est pas admissible au programme d’actions accréditives. À l'heure actuelle, les marchés des capitaux ne sont pas reluisants, alors on est un peu au point mort, ce qui est malheureux, évidemment.
Merci.
Ma deuxième question s'adresse à M. Rand.
Vous avez parlé des investissements et de l'approche guichet unique que nous développons, et vous avez mentionné EDC et la BDC. De toute évidence, lorsqu’on se penche sur les prêteurs et les capitaux... Je veux savoir si vous avez des recommandations spécifiques à faire pour que le gouvernement fédéral encourage, favorise et soutienne l’action d’EDC et de la BDC en faveur des investissements dans le secteur des technologies propres?
L’investissement de leurs capitaux dans les technologies propres entre dans le cadre de leur mandat, et je pense que l’apport financier va de pair avec une définition assez robuste de « technologie propre ». Le défi est, encore une fois, qu'ils ne suivent pas le marché. Ils doivent faire le marché, ce qui signifie qu'ils doivent être disposés à perdre une partie de cet argent et capables de le faire. Cela ne veut pas dire que ce sera le cas, mais s'ils l’inscrivent dans leurs feuilles de calcul de risque et comptent l'utiliser comme leur base de capital existante, ils ne feront pas bouger le marché parce qu'ils agiront comme le ferait n’importe quelle banque privée.
Prenez la BDC par exemple. Elle souhaite intervenir au stade avancé, ce qui est bon, c'est du capital de croissance, du capital à l'échelle, mais elle se demande si elle sera capable de monter des opérations, c'est-à-dire d’être l'investisseur principal pour en définir les termes. Si elle intervient au stade avancé et se contente de suivre, elle ne fait rien. Si je monte une opération qui intervient à un stade avancé, je n'ai aucun mal à trouver d'autres investisseurs pour se joindre à moi. C'est un exemple.
Il y a deux choses. Tout d'abord, il faut être disposé à perdre de l'argent, et deuxièmement, à prendre la direction des opérations, si vous intervenez au stade avancé. J'ai d'autres recommandations spécifiques à faire, mais ce sont les deux principales.
Merci beaucoup.
Il est toujours formidable de rejoindre ce comité. Je n’en suis pas membre, mais je ne rate jamais une occasion d’y participer, parce qu’il est si intéressant.
Monsieur Rand, je sais que vous vous êtes concentré sur les problèmes de définition, mais je me demande si vous pourriez commenter la situation du capital-risque en matière de technologie propre au Canada. Je sais que l’on fait grand cas des entreprises de capital-risque axées sur les technologies propres aux États-Unis et en Europe, mais quelle est la situation au Canada? Un tableau d’ensemble nous suffira.
Très rapidement, voici quelques antécédents. En 2006, on pouvait compter les entreprises de capital-risque en Amérique du Nord qui investissaient dans les technologies propres. Il y en avait probablement 300. Si je fais le compte aujourd’hui, il y en a six sans doute en Amérique du Nord qui se concentrent sur les technologies propres. Au Canada, il y en a deux ou trois et, le plus souvent, on définit les technologies propres de manière à exclure les grands projets. Elles investissent dans l'énergie, dans les TI ou dans les sondes. Il s'agit d'une nouvelle version des TIC appliquées au domaine de l'énergie que ces investisseurs appellent l'Internet des objets industriel consistant à faire des machines de plus en plus intelligentes.
Je suis d'accord, c'est une technologie propre en ce sens que c'est efficace, mais on ne parle pas ici de projets à grande échelle de fabrication et de transport d'énergie. Il n’y a probablement que deux ou trois fonds qui s’y intéressent. Nous mettons en place un deuxième fonds de 150 millions de dollars. Nous espérons boucler cela bientôt, mais nous ne sommes pas bien nombreux. ArcTern Ventures s’est principalement tournée vers les acteurs stratégiques, comme on les appelle, dans notre recherche de partenaires d'investissement parce qu'il y a très peu d’investisseurs dans les technologies propres: 3M, GE, Siemens, le Fonds souverain du Koweït, Enbridge, Iberdrola. Ce sont de grosses sociétés.
Il y a des limites à ce qu’on peut faire. Si les investisseurs en capital-risque se détournent des technologies propres, on n’y pourra rien, mais on peut construire un écosystème où les risques et les raisons pour lesquelles les investisseurs se sont cassé la figure au début des années 2000, ce qu'ils ont fait à Silicon Valley... Nous avons appris la leçon et nous sommes plus futés, mais on peut également créer un écosystème qui élimine certains des risques grâce, par exemple à la Fondation TDDC au Canada et à un grand soutien commercial pour les grands projets à vocation commerciale.
La situation du capital-risque pour les technologies propres n'est pas saine. Je ne pense pas que ce soit un secret, mais pour nous c'est un marché d'acheteurs. Ce n'est pas une mauvaise chose pour nous, mais pour l'industrie, ce n'est pas bon.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins. Je sais que la journée a été longue, et j'apprécie votre patience.
Un commentaire très rapide à l’intention de mon collègue, M. Serré. J'apprécie votre plaidoyer en faveur des actions accréditives. C'est un programme très important, mais avant que le gouvernement libéral ne le développe dans l'exploitation minière, je l’encouragerais à le réintroduire dans le secteur du pétrole et du gaz. Vous avez éliminé le programme d’actions accréditives pour les puits exploratoires, et en Alberta, cela a eu des effets assez importants.
Ian, c’est bon de vous revoir et je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps d'être ici avec nous aujourd'hui. Vous avez parlé de ce que nous faisons dans la technologie de capture du carbone avec l'usine de valorisation du nord-ouest. On parle beaucoup du pétrole sale de l'Alberta et du fait que rien n’est fait en Alberta pour essayer de changer la perception de ce qui se passe en Alberta. Je pense que ce que vous faites est un excellent exemple de l'innovation et des progrès technologiques enregistrés en Alberta.
Quels sont les principaux obstacles auxquels vous vous heurtez dans la mise en place opérationnelle de la technologie de piégeage du carbone? Je sais que cela a été un long processus pour vous.
Nous essayons de bâtir l'infrastructure de base. Nous essayons de mettre en place un système pour le CO2 et j'ai parfois l'impression d'être dans la peau d'un camionneur participant à des travaux de construction de l'autoroute 1. Nous voulons nous doter d'une infrastructure qui sera encore là dans 100 ans. Ce sera l'équivalent, en CO2, d'une autoroute. À terme, nous allons retirer le CO2 non seulement de notre usine mais aussi de toutes les usines de la région d'Edmonton. Nous allons capter tout ce CO2 pour l'envoyer au centre de la province..
Nous produisons du pétrole en Alberta depuis 1914 en quantité, et la plupart des endroits d’où le pétrole est sorti sont des endroits où l’on peut réintroduire le CO2. Quand vous mettez du CO2 dans la plupart de ces endroits, vous obtenez plus de pétrole, alors cela couvre les coûts de gestion du CO2.
Je suis sûr que vous connaissez tous le projet Weyburn. Mon partenaire et moi en détenions 11 %. C'est l'un des plus grands projets au monde qui utilise le CO2 d’origine anthropique comme matière première pour une industrie en aval. Les quantités sont vraiment incroyables. Nous pensons qu'il y a suffisamment d'endroits dans le centre de l'Alberta où mettre du CO2. On pourrait injecter environ deux milliards de tonnes, ce qui représente à peu près le montant total des émissions annuelles de l'industrie des sables bitumineux en Alberta pendant 25 ans. Nous pensons pouvoir prendre l'équivalent de ces émissions de CO2 et les valoriser en nous en servant de matières premières avec le système que nous construisons. Il y a d'autres endroits en Alberta où cela pourrait se faire, pensons-nous, mais on cherche à commencer là où cela nous semble relativement simple.
La condition de départ, c’est qu’il faut posséder les réservoirs, disposer de l'infrastructure et des sources de CO2. Nous avons pris la décision au début que nous allions simplement le faire nous-mêmes, et réunir tous ces éléments. C'est ce que nous avons fait.
Lorsque nous aurons fini, le diesel qui sortira de notre usine sera le diesel à plus faible teneur en carbone fabriqué aujourd'hui dans le monde. Nous pensons que c'est un grand succès, parce qu’en partant du diesel extrait des sables bitumineux, on a un désavantage de l’ordre de 20 % par rapport au brut léger moyen. Les coûts de CO2 intégrés dans le diesel que vous produisez à partir de sables bitumineux, sont supérieurs d’environ 20 % à celui de la gamme moyenne des bruts des États-Unis. En fin de cycle, nous sommes à environ 7 % de moins. Cela peut contribuer à rendre le Canada concurrentiel selon nous, mais cela n’exclut pas des projets de technologie propre visant à faire vraiment la différence.
Pour moi, ou l’on fait ces choses sur une échelle énorme ou ce n'est pas très intéressant. On vise à tirer du sous-sol 100 000 barils par jour de pétrole léger en utilisant le CO2. Ce serait comme faire disparaître la totalité des émissions dues au trafic automobile en Alberta.
J'aimerais l’exprimer en termes d'équivalence d’énergie éolienne. Cela fait 30 ans que l’on installe des éoliennes en Alberta. Au cours de cette période, on en a installé quelque 900. Notre pipeline de CO2 équivaut à 3 200 éoliennes. Notre petit bout de tuyau représente environ trois fois plus que tout ce qui s’est fait en Alberta dans le domaine de l'énergie éolienne au cours des 30 dernières années. Si l'on veut que le Canada soit présent sur la carte, j'estime que c’est à cette échelle qu’il nous faut faire les choses. On ne peut pas passer son temps à glandouiller sur de petites choses. Pardon.
C'est bon. J'apprécie parfois les libertés que vous prenez avec le politiquement correct. C'est très bien.
Merci, monsieur MacGregor.
Très rapidement — je n'ai pas beaucoup de temps — que devons-nous faire? Est-ce que cette technologie peut être copiée et réalisée ailleurs? Je sais que vous avez, en quelque sorte essuyé les plâtres, mais la Saskatchewan y est aussi passée. Comment promouvoir cette technologie pour montrer que c'est ce que nous faisons au Canada, et que nous ne restons pas ici à nous tourner les pouces?
Pour travailler à l'échelle, on ne peut faire que de petites améliorations progressives. On doit se contenter d’avancer à petits pas. C'est ce que nous faisons. Tout cela a été fait avant.
La principale innovation que nous apportons, c’est l’emploi du CO2 d’origine anthropique. Aux États-Unis, il y a une grande industrie, mais ils utilisent du CO2 qui sort du sol. Nous faisons un petit pas pour collecter le CO2 produit par l’activité humaine, le purifier, le liquéfier, puis le mettre dans un pipeline. C'est un petit pas sur le plan technique, mais notre projet coûte environ 1 milliard de dollars. Les marchés des capitaux ne vous financeront pas pour un projet de 1 milliard de dollars, à moins que ce ne soit qu'un petit pas.
Je suis désolé, je ne connais pas le nom de l'autre participant, mais ce qu'il disait sur le même sujet à peu près, me semblait logique. Quelqu'un doit être le premier, alors poussez-le et arrivez à quelque chose qui soit à l'échelle industrielle, dès la première tentative. Cela nous rendrait service à tous, je pense.
Ce qui nous fait vraiment défaut, il me semble, c'est l'infrastructure indispensable pour aider les jeunes à démarrer. La plupart des idées appelées à transformer le monde viendront d'un jeune homme. Il veut louer un bureau et il ne sait pas comment démarrer une entreprise. Si vous prenez certaines de nos ressources... Nous dépensons toutes nos ressources à choisir des idées et sur 100 de ces idées 99 sont des échecs. Nous devons construire une infrastructure qui améliore ce ratio de succès de 1 sur 100 à 10 sur 100. Nous devons le faire en apportant aux jeunes qui ont des idées nouvelles un soutien bien pensé. J'ai des idées à ce sujet, mais ce n'est pas le bon endroit pour en parler.
Merci.
Monsieur Rand, j'ai une brève question à laquelle vous devrez peut-être répondre à un autre moment. Vous avez évoqué le manque d'investisseurs en capital de risque — je remercie mon collègue d'avoir soulevé la question —, mais quel est le lien dans votre raisonnement? Les témoins demandent aux contribuables, au gouvernement, de s'aventurer là où les spécialistes du capital-risque, le secteur privé, n'iront pas. Je me vois mal dire à mes électeurs: « Nous vous demandons de payer pour quelque chose que le secteur privé ne fera pas. » Quel est le chaînon manquant?
Le lien, c'est le financement de projets. Une grande partie des infrastructures est financée par des emprunts plutôt que par des avoirs propres. Quant aux capitaux de risque, ils ne sont pas accessibles pour des opérations d'une telle envergure. On ne construit pas une installation de production de biocarburants de 250 millions de dollars avec des capitaux de risque. Il doit s'agir d'un projet financé. Le capital-risque n'est tout simplement pas la catégorie d'actif appropriée pour investir dans le développement de la technologie d'abord puis dans la construction de la première usine. Ce sont des catégories d'actif différentes.
Je vous remercie.
Merci à tous de votre présence ici aujourd'hui.
Je commencerai avec MM. St. Louis et Bowes. Vous avez parlé des minéraux rares pouvant soutenir l'application de technologies propres, soit le graphite, le lithium et le cobalt. Je ne sais pas à quel point ils sont rares, mais ce n'est pas comme le plomb, l'or ou l'argent. Quelle est la capacité du Canada à produire ces minéraux? Je sais que la Chine a accaparé le marché de certains métaux du groupe des terres rares et je sais que dans ma circonscription, la fonderie Teck produit de l'indium, du germanium et du cadmium. En donnant au Canada l'élan nécessaire pour accroître cette production, quelle est notre capacité de production à l'échelle mondiale?
La réponse est très simple. Le Canada a une grande capacité. Notre force vient de l'abondance de nos ressources naturelles. Un peu partout au pays, différents projets de bonne qualité ont été entrepris dans le secteur des métaux dont nous avons parlé, et vous en avez mentionné quelques autres qui utilisent l'indium et le germanium. Sans trop entrer dans les détails, le Canada a tout ce qu'il faut ou presque pour soutenir les applications de haute technologie et d'énergie propre en plein essor.
Je voulais juste préciser que nous avons des projets ciblant le graphite, le lithium et le cobalt. Nous rivalisons avec une foule d'autres projets dans le monde, qui visent aussi à se développer et à devenir fournisseurs de ces matériaux déterminants pour l'énergie propre. Pour faire avancer les choses, il faut accroître la mobilisation du gouvernement, des Premières Nations et des marchés financiers. Comme je l'ai dit, il s'agit d'une compétition. Vient ensuite la deuxième phase, celle de la R-D qui sera investie dans le traitement à valeur ajoutée de ces minéraux et dans la création de nouveaux produits.
Merci.
Nous allons maintenant passer à MM. Wissing et Won. Je suis curieux d'en savoir un peu plus sur le gaz naturel neutre en carbone et ses intrants énergétiques. Comment est-ce que cela fonctionne? Quelle est votre source d'approvisionnement en dioxyde de carbone? Faites-vous simplement extraire le CO2 de l'air puis le rejeter dans l'atmosphère? Est-ce ainsi que le cycle fonctionne?
C'est une façon de procéder. Il existe plusieurs manières d'extraire ou de séparer le CO2 de l'atmosphère. Idéalement, le processus se fait sur le même site que celui où vous fusionnez les deux composantes pour en faire un gaz neutre, mais lorsque les ressources sont limitées, il existe une façon de faire encore plus simple. Je vous donne un exemple des Pays-Bas, celui d'une tour d'habitations où des panneaux solaires installés sur le toit transforment et stockent l'énergie solaire en hydrogène à longueur d'année. Lorsqu'arrive la saison du chauffage, il suffit de mélanger l'hydrogène à une bouteille de CO2 liquide pour chauffer l'immeuble. C'est un processus très simple. Toutefois, l'idéal est de disposer de sources d'approvisionnement et d'extraire le CO2 de l'air.
Je pense à une entreprise de Calgary, la Carbon Engineering, qui compte des investisseurs comme Bill Gates et Google. Leur but est de trouver le moyen le moins coûteux d'extraire le CO2 de l'air. En ce moment, ils sont arrivés à l'étape où ils ont réussi à l'extraire, mais sous forme liquide. La prochaine étape est de séparer le CO2 du liquide, à meilleur marché. S'ils y parviennent, ils seront les champions dans le domaine de la séparation du CO2 de l'air ambiant. Des installations de ce genre peuvent exister partout dans le monde en étant alimentées à l'énergie solaire ou éolienne. Essentiellement, c'est l'équivalent de milliers d'arbres.
Très bien. Merci.
Pour terminer, monsieur Rand, vous avez à maintes reprises mentionné l'exemple des biocarburants, et plus tôt aujourd'hui, nous avons entendu parler de certains risques associés à certains types de biocarburants et à leurs impacts sur le cycle de vie, selon qu'ils proviennent de l'agriculture, et ainsi de suite.
Pourriez-vous nous faire part de vos observations sur les biocarburants et nous dire si, selon vous, ils font partie de la solution et non pas du problème?
C'est une bonne question. Je me concentre sur ce que l'on appelle la prochaine génération de biocarburants, qui utilise des matières cellulosiques, c'est-à-dire des résidus de l'agriculture, de la foresterie, de la construction — des sources non alimentaires — converties en éthanol. C'est la raison pour laquelle je ne me suis jamais penché sur les carburants issus de sources alimentaires.
Et si l'on pense au dioxyde de carbone, qui est un gaz à effet de serre, que feriez-vous si vous aviez des déchets ligneux? Serait-il préférable de les brûler en les utilisant comme biocarburant?
On peut utiliser les déchets de bois pour produire de l'électricité, si l'on veut, mais il est plus profitable d'en faire un combustible liquide. Du point de vue technologique, les combustibles liquides sont difficiles à remplacer; la valeur économique d'un combustible liquide est supérieure à la quantité équivalente d'énergie sous forme d'électricité.
La production de CO2 — les forêts en sont l'exemple patent — représente une réduction de 92 % des émissions de dioxyde de carbone comparativement à la consommation d'essence qu'il remplace, et cela tient compte du cycle de vie complet.
Oh, vraiment? Et moi qui essayais d'aller à toute vitesse. Quel sujet devrais-je aborder maintenant?
Je reviens à vous, monsieur Wissing, et au réseau électrique est-ouest. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le sujet, pendant une minute?
Je vous remercie de m'en donner l'occasion. Vous avez une carte dans vos documents. C'est la carte que nous regardions lorsque j'ai parlé du fonctionnement du réseau. Vous pouvez constater que ce réseau est situé très au nord. En observant bien la carte des vents, on peut voir la partie rougeâtre indiquant la région où il y a le plus de vent.
À l'heure actuelle, la majorité des éoliennes de l'Ontario sont situées à la même latitude que la ville de Rome, le long du 45e parallèle. On peut se demander pourquoi on a choisi cet emplacement, Rome n'étant pas connue pour ses éoliennes ou ses moulins à vent. Par contre, si elles étaient installées à la hauteur de Moosonee dans le nord de l'Ontario, à la même latitude que les Pays-Bas, les vents y seraient assurément plus abondants. Prenons la Terre: plus on remonte vers le nord, plus il y a de vent, et la même chose est vraie à partir de l'équateur, plus on descend vers le sud. En fait, l'Antarctique est le continent le plus venteux au monde.
Notre façon de rivaliser avec l'Europe embrasse plusieurs aspects. La masse continentale de l'Union européenne, qui abrite 500 millions de personnes, représente la moitié de celle du Canada. C'est dire que l'installation d'un parc éolien y coûte très cher, parce que la valeur des terres est très élevée et que vous aurez une longue série de batailles à livrer. La situation est différente chez nous, où les terres relativement bon marché nous donnent la possibilité de convertir le vent en gaz naturel neutre en carbone et d'en faire un produit d'exportation. L'Europe n'a pas l'espace suffisant pour produire de l'énergie renouvelable, mais nous qui bénéficions d'un positionnement unique en raison de nos vastes étendues de terres et de notre population relativement faible — contrairement à l'Europe —, pourrions très bien y exporter du gaz naturel neutre en carbone.
Il existe un autre produit appelé la torréfaction, qui consiste à transformer le bois en charbon de biomasse. Le principe est le même. Nous pourrions fournir à l'Europe ce charbon de biomasse pour alimenter les centrales thermiques actuellement alimentées au charbon. Elles auraient ainsi un bilan neutre en carbone, sans devoir recourir à un changement de technologie. Voilà la situation. Si nous voulons économiser de l'argent tout en permettant au reste du monde d'améliorer son bilan carbone, c'est le temps ou jamais. Le coût des infrastructures nécessaires au changement est tellement élevé que tout le monde a intérêt à utiliser des sources d'énergie neutres en carbone.
Merci beaucoup. La minute s'est étirée.
Merci beaucoup à tous nos témoins. M. McGregor a dû partir un peu plus tôt, mais nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous avez accordé.
Monsieur Rand, encore une fois merci de vous être joint à nous pour une deuxième fois.
La séance est levée.
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