RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 1er novembre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie d'être des nôtres aujourd'hui.
Nous entreprenons aujourd'hui une nouvelle étude sur les produits de la chaîne d'approvisionnement secondaire dans le secteur forestier canadien. Pour la première heure, nous accueillons trois représentants du ministère des Ressources naturelles.
Merci d'être venus. J'imagine que je n'ai pas besoin de vous expliquer la procédure. Vous avez probablement tous déjà comparu à maintes reprises par le passé, n'est-ce pas? Très bien. Alors sans plus tarder, je vous cède la parole, car nous sommes déjà un peu en retard.
Vous disposez de 10 minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant le Comité.
[Français]
Mon principal message à votre intention aujourd'hui est le suivant: le secteur forestier est devenu une source de solutions face aux défis modernes.
[Traduction]
L'essentiel de mon message aujourd'hui est que le secteur forestier est devenu une source de solutions face aux défis modernes. Aujourd'hui, le Canada a manifestement la possibilité de tirer profit de son leadership mondial dans le secteur forestier pour développer des bioproduits, des produits biochimiques et de la bioénergie qui permettront de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et de stimuler la croissance économique d'un bout à l'autre du pays, en particulier dans les régions rurales.
La disponibilité de la biomasse au Canada n'a pas d'égal ailleurs dans le monde. Le Canada abrite 9 % des forêts de la planète, ce qui correspond à une superficie forestière par habitant 17 fois supérieure à la moyenne mondiale. Le Canada possède aussi une chaîne d'approvisionnement forestière bien intégrée et un leadership dans les sciences et technologies de pointe.
J'arrive de la Suède, où tant les Finlandais que les Suédois m'ont dit qu'ils souhaitaient ressembler davantage au Canada. Ils faisaient référence à notre écosystème d'innovation et à FPinnovations en particulier, une organisation publique-privée unique vouée à la recherche et au développement. Ce réseau intégré est ce qu'on appelle la bioéconomie nationale.
Mon but aujourd'hui est de vous aider à cerner l'ampleur des possibilités que présente la bioéconomie. Mais tout d'abord, j'aimerais préparer la voie en vous dressant un portrait de la situation actuelle. Au début des années 2000, la crise économique, l'effondrement du marché de l'immobilier aux États-Unis et la baisse importante de la demande pour du papier ont touché l'industrie forestière. Cependant, la crise a aussi stimulé les investissements dans l'innovation et la diversification des marchés ainsi qu'un changement dans les modèles de gestion, non seulement sur le plan des destinations géographiques, mais aussi sur le plan des utilisations finales de la fibre ligneuse canadienne.
Aujourd'hui, l'industrie forestière est beaucoup plus efficace. Elle emploie plus de 213 000 Canadiens et contribue au PIB du Canada à hauteur de plus de 23 milliards de dollars par année. En fait, le secteur forestier crée davantage d’emplois et contribue davantage à la balance commerciale pour chaque dollar de valeur ajoutée que tout autre secteur des ressources. Nous exportons une valeur de plus de 34 milliards de dollars de produits forestiers à 180 pays dans le monde.
De nos jours, les produits forestiers renforcent les pièces d'automobile en composite, allègent les véhicules, réduisent leurs émissions et remplacent les plastiques fabriqués à partir de combustibles fossiles non renouvelables. Le travailleur forestier d'aujourd'hui peut tout aussi bien porter le sarrau blanc que la chemise à carreaux rouge. Il peut s'agir d'une chercheure en génomique, qui tente d'augmenter la résistance des arbres aux maladies, ou encore d'un économiste travaillant à optimiser la distribution. C'est ce qu'on considère comme étant la bioéconomie ou, en termes plus généraux, les produits secondaires de la chaîne de valeur du secteur forestier traditionnel.
Les bioproduits, les produits biochimiques et la bioénergie peuvent réduire la demande pour des matières d'origine fossile et non renouvelables, par exemple le ciment et l'acier, en leur substituant un contenu renouvelable. Tout ce qu'on peut fabriquer à partir d'un baril de pétrole, on peut le fabriquer à partir d'un arbre. Ces produits peuvent procurer des avantages environnementaux et sociaux importants, en particulier lorsque la biomasse provient des résidus et des flux de déchets. Ainsi, la bioéconomie peut soutenir les secteurs à fortes émissions de carbone en trouvant des solutions permettant de réduire leur empreinte carbone.
Cependant, la bioéconomie ne se limite pas à la réduction des gaz à effet de serre; elle procure aussi d'autres avantages environnementaux. Elle crée des possibilités d'emplois et de développement économique pour les régions rurales et les collectivités autochtones, dont 70 % se trouvent dans des régions forestières. De plus, la bioéconomie est un élément clé d'une transition vers une économie à faibles émissions de carbone.
On ne saurait trop insister sur l'importance du développement continu de la bioéconomie pour le secteur forestier, étant donné les pressions constantes auxquelles l'industrie traditionnelle se heurte, depuis le conflit sur le bois-d'oeuvre résineux jusqu'aux autres conflits entourant l'érosion du marché du papier journal et d'autres types de papier.
Mais quelle est la portée du secteur des produits secondaires? J'aimerais vous donner une idée précise de la contribution de la bioéconomie au Canada, mais malheureusement, je ne peux pas. Seulement une partie de ces produits se retrouvent dans la catégorie de l'industrie secondaire de la fabrication forestière analysée par Statistique Canada, qui évalue leur contribution au PIB à 6,3 milliards de dollars. C'est plus du tiers de la contribution totale au PIB de l'ensemble du secteur forestier. Selon les données dont dispose Statistique Canada, ces produits ont connu une hausse de plus de 7 % l'année dernière seulement; or, ce chiffre ne comprend pas l'ébénisterie, qui a été une industrie fructueuse au Canada.
De même, les produits secondaires du papier que mesure Statistique Canada ne tiennent pas compte de certains autres produits fructueux issus des secteurs secondaire ou tertiaire de la fabrication forestière. Ils se classent souvent dans d'autres activités économiques, par exemple la chimie organique ou l'automobile.
Pour ce qui est de la bioéconomie en général, et de sa chaîne de valeur du secteur forestier, ce manque de données nous force à nous fier à des statistiques approximatives. Par exemple, lorsqu'on mesure les revenus tirés de la bioéconomie de pointe, on constate qu'ils ont connu une hausse moyenne de plus de 10 % par année au cours de la dernière décennie, ce qui est beaucoup plus rapide que le reste de l'économie. La croissance de l'emploi associée s'est montrée également plus rapide en comparaison non seulement avec le secteur privé dans son ensemble, mais aussi avec d'autres secteurs technologiques axés sur les connaissances, par exemple les finances et l'assurance, l'aérospatiale et le matériel informatique.
De plus, bon nombre de ces produits sont déjà commercialisés. Ce n'est donc pas quelque chose d'irréaliste. Dans le contexte de l'atteinte des cibles de réduction des gaz à effet de serre prévues dans l'Accord de Paris, les bioproduits et la bioénergie présentent à court terme une solution de rechange réaliste aux produits d'origine fossile et aux produits chimiques. En fait, l'OCDE estime que, d'ici 2030, les bioproduits de pointe pourraient contribuer jusqu'à 35 % du rendement des produits chimiques et autres produits industriels, et jusqu'à 80 % de la production des produits pharmaceutiques et des diagnostics. Au Canada, cela représenterait 50 000 emplois et générerait des revenus de 24 milliards de dollars.
Permettez-moi de vous donner un exemple. La biomasse forestière est l'une des options les plus prometteuses pour réduire la dépendance au diesel dans les collectivités éloignées. Dans le Nord, les deux tiers des besoins énergétiques se rattachent au chauffage, et la bioénergie peut y répondre de manière efficace et écologique. On estime qu'une collectivité éloignée qui dépend du pétrole importé voit 90 % de son revenu énergétique quitter la collectivité, mais que 75 % des revenus tirés des copeaux de bois produits localement sont réinvestis dans la collectivité.
Un dernier exemple est la construction verte et, plus généralement, la renaissance globale de la construction en bois. Origine, un immeuble de grande hauteur dont la construction est en voie d'être achevée dans l'écoquartier de la Pointe-aux-Lièvres, à Québec, est représentatif de ce développement. Il s'agit de l'immeuble d'appartements en copropriété en bois le plus haut en Amérique du Nord. Plus tôt cette année, l'édifice en bois le plus haut du monde a officiellement ouvert ses portes — Brock Commons, une nouvelle résidence pour étudiants à l'Université de la Colombie-Britannique. Cette merveille d'ingénierie et d'architecture change la donne sur le plan environnemental, car elle stocke près de 1 600 tonnes métriques de dioxyde de carbone et prévient la production de plus de 1 000 tonnes métriques de gaz à effet de serre. C'est comme si on retirait 500 voitures des routes pendant un an.
Le rythme des développements nationaux et internationaux en matière de bioéconomie s'est accéléré. Grâce au Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, le secteur forestier s'est retrouvé sous les feux de la rampe en tant que source de solutions pour faire la transition vers une économie à faibles émissions de carbone.
Le budget 2017 a marqué la première fois où un financement par programme a été accordé au Service canadien des forêts non pas précisément pour soutenir l'industrie forestière, mais plutôt pour tirer profit de ses avantages dans d'autres sphères de l'économie, telles que la construction à faibles émissions de carbone, la réduction de la dépendance au diesel dans les collectivités éloignées ou le développement économique dans les collectivités autochtones. Les gouvernements comprennent que la bioéconomie stimulera l'économie de demain. En septembre, le Conseil canadien des ministres des forêts a approuvé à l'unanimité un cadre de la bioéconomie forestière, qui vise à faire du Canada un chef de file mondial dans le domaine. Ce cadre expose une nouvelle vision pour l'avenir du secteur forestier et le rôle que jouera la biomasse dans la transition vers une économie durable et à faibles émissions de carbone.
Il y a à peine quelques semaines, le ministère des Ressources naturelles a été l'hôte de Génération Énergie, le plus grand forum sur l'énergie de l'histoire de notre pays. La biomasse et la bioénergie prédominaient dans ces discussions. Le secteur privé commence à s'organiser et à se rallier à la bioéconomie.
Plus de 25 entreprises se sont récemment regroupées pour soumettre une proposition visant à mettre sur pied et à financer officiellement une grappe canadienne de la bioéconomie, mobilisant plus de 400 millions de dollars d'investissements privés dans deux secteurs d'importance stratégique.Tout d'abord, le mode de vie durable, qui consiste à bâtir des chaînes de valeur qui génèrent des biomatériaux et des produits biochimiques de pointe. Ensuite, les transports et les infrastructures propres, qui visent à diminuer l'intensité des émissions de carbone générées par la transformation industrielle et le transport en accélérant la mise à niveau et le déploiement des biocarburants.
En conclusion, le secteur forestier a connu son lot de difficultés en 2017, notamment en raison des multiples conflits commerciaux et des graves conséquences du changement climatique, telles que les feux de forêt et les infestations de ravageurs. Le déploiement de solutions dans le secteur forestier et la mise en place d'efforts visant à relever ces défis détermineront la vitesse à laquelle la bioéconomie évoluera. Parce qu'il ne s'agit pas de savoir si cela se fera, mais plutôt quand cela se fera; et il s'agit de savoir si le Canada sera à l'avant-garde ou à la remorque des autres pays.
Aujourd'hui, les gouvernements, les collectivités autochtones, les entreprises forestières et les environnementalistes travaillent tous de concert à faire valoir la bioéconomie. Jamais auparavant le secteur forestier canadien n'a bénéficié d'une telle possibilité de prendre les devants, tant à l'échelle nationale qu'internationale.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Mason.
Nous allons maintenant amorcer notre période de questions. C'est M. Harvey qui ouvre le bal.
Merci, monsieur le président.
Au début de votre déclaration, vous avez parlé du désir des pays scandinaves de ressembler davantage au Canada. Je reviens là-dessus, car avant d'être élu, j'ai travaillé pour une entreprise qui menait un projet de biomasse, un projet de cogénération dans le secteur agroalimentaire. Nous voulions réduire les coûts de l'énergie, qui était la principale composante de nos activités. Nous nous sommes penchés sur les modèles scandinaves — pour ce qui est de la récupération de la biomasse excédentaire — parce que ces pays ont des technologies très modernes qui ne sont pas utilisées ici en Amérique du Nord. En fait, une grande proportion de notre biomasse, particulièrement les cimes et le feuillage, est laissée sur place après l'abattage des arbres. Cela dépend évidemment des provinces, mais d'après mon expérience, une grande partie de la biomasse est gaspillée, et c'est une ressource dont nous devrions tirer parti.
Cela dit, selon vous, quel pourrait être le compromis entre nous et les pays scandinaves? Je me tourne vers eux pour leur leadership dans ce dossier, particulièrement en matière de biomasse et de programmes de chauffage centralisé. Ils ont des technologies très novatrices, mais d'autres qui le sont moins et qui existent depuis des centaines d'années, mais qui ne sont tout simplement pas utilisées ici. Quelles sont nos possibilités? Le Canada a-t-il la possibilité de tirer profit de la biomasse que nous gaspillons à l'heure actuelle, et si oui, quel est le meilleur moyen de le faire?
Votre question comporte trois volets, et je vais commencer par le deuxième. Je vous dirais que le Canada possède effectivement une grande quantité de biomasse qui n'est pas utilisée à l'heure actuelle. J'ai mis l'accent aujourd'hui sur les déchets et les résidus. C'est le secteur qui offre le plus de possibilités, selon nous. Nous sommes tout de même d'avis que les arbres demeurent plus utiles en bois d'oeuvre qu'en biocarburant. Par contre, il est préférable de transformer les déchets ligneux en biocarburant plutôt que de les laisser pourrir dans la forêt.
Pour revenir à votre premier point, vous avez absolument raison, c'est une solution gagnante pour tout le monde, car les pays scandinaves et le Canada disposent de technologies de pointe et ont des forêts semblables, même si on note quelques différences. Nos forêts sont semblables en ce sens que nous avons d'un côté comme de l'autre des épinettes de Norvège et des espèces d'arbres apparentées. Nous avons cependant des pratiques forestières très différentes, car l'exploitation forestière est beaucoup plus intensive dans les pays scandinaves.
En Suède, les terres forestières appartiennent pour la plupart à des intérêts privés. Les Scandinaves ont des avancées technologiques qui surpassent de loin les nôtres, notamment dans le domaine de la production de biochaleur. La majorité des solutions technologiques qui seraient appliquées au Canada proviendraient probablement des pays scandinaves ou de l'Autriche. Ce sont deux régions du monde qui ont des technologies extrêmement avancées et qui ont recours au chauffage communautaire depuis très longtemps.
De façon plus générale, les acteurs de l'industrie forestière ont beaucoup à apprendre les uns des autres. J'ai rencontré notamment les représentants de l'entreprise SweTree, qui se spécialise dans l'amélioration génétique des arbres. Plus tôt cette année, j'ai dépêché une équipe fédérale-provinciale en Suède. Des représentants de J.D. Irving étaient là et ont eu des discussions avec SweTree. Je crois que nous avons des leçons à tirer d'eux en fait d'amélioration génétique des arbres, et peut-être que nous pouvons aussi leur enseigner certaines choses.
La Suède s'intéresse particulièrement aux projets pilotes lancés par le Canada. Elle n'a pas de programme du type de celui des Investissements dans la transformation de l'industrie forestière, qui porte principalement sur la première commercialisation des technologies à risque dans le secteur, aidant ainsi les entreprises novatrices à franchir ce pas difficile. Elle souhaite donc prendre exemple sur nous à cet égard.
Dans ma circonscription du Canada atlantique, il y a une usine qui se spécialise dans la pâte pour transformation chimique en textiles et en tissus. Les représentants de cette entreprise, Aditya Birla, vont d'ailleurs aussi comparaître devant le comité. Il y a un peu partout des initiatives vraiment novatrices qu'il conviendrait de faire connaître davantage. Ces avancées technologiques ont cours ici même au Canada. Nous sommes les chefs de file pour ce qui est de changer la vocation de nos ressources forestières tout en essayant de redorer notre image, car les gens nous considèrent beaucoup moins novateurs que nous le sommes en réalité. Peut-être parvenons nous à bien mettre en valeur ces caractéristiques à l'étranger, mais je ne suis pas certain que ce soit vraiment le cas dans notre pays.
Selon vous, qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire de plus pour que les gens sachent ce qu'il en est? Quel rôle le Service canadien des forêts pourrait-il jouer à ce chapitre?
Je pense qu'il convient de collaborer avec le cabinet du ministre pour faciliter les efforts de communication. Notre ministre est d'ailleurs un excellent communicateur. Il participe notamment à toutes sortes d'activités du secteur forestier à l'occasion desquelles il prend la parole.
Un peu comme vous l'avez indiqué, nous n'avons aucun problème à nous parler entre nous au sein du secteur forestier où tout le monde se comprend bien, mais c'est peut-être plus difficile quand vient le temps de communiquer avec les Canadiens à l'extérieur de notre industrie. Je ne crois pas qu'il existe de solutions simples à ce problème. Selon moi, le Service canadien des forêts joue principalement un rôle de soutien scientifique. Nous rendons accessibles les connaissances scientifiques nécessaires à une gestion durable des forêts pour en assurer la pérennité.
Comme je vais manquer de temps, je dois vous interrompre pour poser ma prochaine question.
Pouvez-vous nous parler brièvement du rôle important que pourraient jouer les biocombustibles pour aider les communautés autochtones à s'affranchir de technologies désuètes comme la production d'électricité à partir de diesel, à devenir davantage autonomes du point de vue énergétique, et à éventuellement tirer parti de cette nouvelle source d'énergie pour développer des industries adaptées à la réalité de leur collectivité et de son emplacement géographique?
Je crois que les biocombustibles pourraient jouer un très grand rôle. Comme je l'ai indiqué, 70 % des collectivités autochtones sont entourées de forêts, ce qui permet d'envisager la biomasse comme source énergétique de remplacement quand on sait qu'environ 130 de ces collectivités ne sont pas reliées à un réseau électrique et ont recours à du diesel transporté par camion ou par bateau. Non seulement la biomasse représente-t-elle une source d'énergie efficace, mais elle crée aussi des emplois. Si vous achetez votre combustible à Montréal ou à Edmonton, c'est autant d'argent qui quitte la collectivité. Dans le cas de la biomasse, il faut des travailleurs pour l'exploiter de façon durable, sans compter les emplois en sylviculture.
Je voulais juste dire en terminant que je suis d'accord avec vous: on peut très bien harmoniser les efforts déployés pour l'exploitation à valeur ajoutée de la plus grande partie de la fibre de bois et ceux visant l'utilisation directe de la biomasse, surtout dans une situation comme celle-là.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous, monsieur Mason, ainsi qu'à vos collègues pour votre témoignage aujourd'hui. J'ai grand hâte de pouvoir prendre connaissance des compléments d'information que vous allez pouvoir nous fournir.
Le Canada est à l'origine d'environ 1,5 % des émissions de gaz carbonique à l'échelle planétaire. Vous indiquez dans votre mémoire que 9 % des forêts du monde se trouvent dans notre pays. Savez-vous à peu près quelle proportion de nos émissions de gaz carbonique sont absorbées par nos forêts?
Nous connaissons ce pourcentage, mais il varie d'une année à l'autre. Je ne saurais vous donner le chiffre exact, mais nous pourrons vous le transmettre.
Il est intéressant de noter que nos forêts agissent des deux côtés de l'équation. Elles absorbent énormément de gaz carbonique. Nous pouvons remonter jusqu'à deux années en arrière; le niveau d'absorption se situait à ce moment-là aux environs de 26 mégatonnes. C'est ce que je peux vous dire de mémoire, mais nous allons vous le confirmer. Malheureusement, nos forêts peuvent aussi émettre du gaz carbonique lorsqu'un incendie fait rage.
D'une manière plus générale, nous pouvons vous dire que le secteur forestier absorbe environ 27 % des émissions produites par l'homme au Canada. Si l'on ajoute le secteur de l'agriculture, cela donne un total de 37 % de ces émissions qui sont absorbées.
Nous nous tirons bien d'affaire? D'accord.
Certaines localités songent à interdire le chauffage au bois pour les résidences. Est-ce différent comme source énergétique de la biomasse dont vous parliez?
C'est effectivement différent. Les chaudières et les poêles à bois modernes sont extrêmement efficaces et très sécuritaires. Nous réalisons d'ailleurs un projet au Labrador qui a permis d'améliorer la santé des enfants en remplaçant par des appareils modernes les installations au bois qui polluaient l'air des maisons.
M. Ted Falk: Et cela fonctionne bien?
M. Glenn Mason: Ça fonctionne très bien. Si nous pouvions faire la même chose partout au pays, cela ferait une énorme différence .
D'accord.
En l'absence d'un nouvel ALENA ou d'un accord sur le bois d'oeuvre avec les États-Unis, quels sont nos principaux clients étrangers pour nos produits du bois?
Il est bien évident que notre marché principal se trouve chez nos riches voisins du Sud, les États-Unis. La Chine vient par la suite. Comme vous le savez sans doute, nous connaissons beaucoup de succès sur le marché chinois. Alors que nos exportations étaient quasi inexistantes au début des années 2000, elles atteignent maintenant environ 1,5 milliard de dollars.
Par ailleurs, le marché japonais -- qui est stable depuis 40 ans -- maintient sa stabilité avec des exportations d’une valeur approchant le milliard de dollars. Il y a environ quatre ans, le Conseil des industries forestières de la Colombie-Britannique a ainsi célébré 40 années de commerce avec le Japon. Nos relations avec les Japonais ne datent donc pas d'hier.
Nous cherchons aussi à développer d'autres marchés asiatiques dont celui de la Corée du Sud. Nous préparons également le terrain du côté de l'Inde que nous considérons davantage comme un débouché à moyen terme.
Dans quelle mesure nos produits sont-ils transformés avant d'être mis en marché à l'étranger? Est-ce que les autres pays importent notre bois brut ou s'intéressent-ils à nos produits de première transformation?
Il y a bien sûr des billots qui sont expédiés à l'étranger, mais le bois d'oeuvre compte pour la plus grande partie de nos exportations.
Je pose la question à la suite d'une conversation que j'ai eue cette année avec l'ambassadrice de la Guyane. Elle m'a indiqué que son pays avait conclu à un moment donné une entente permettant aux Chinois de faire de l'exploitation forestière en Guyane où l'on retrouve certaines essences de bois tout à fait uniques, le tout en échange d'une contribution à l'économie guyanaise. Les Chinois ont plutôt simplement pillé les forêts et amené le bois brut dans leur pays. Toute la transformation à valeur ajoutée s'est faite en Chine, si bien que les Guyanais se sont retrouvés essentiellement dépouillés de leurs forêts — la ressource naturelle sur laquelle ils pouvaient auparavant compter — sans qu'il n'y ait aucune retombée pour leur économie.
Croyez-vous qu'il faille craindre qu'une telle chose se produise au Canada?
Je connais assez bien la situation en Guyane, car j'y ai moi-même vécu pendant trois ans. Je peux vous dire que l'exportation de billes brutes est très controversée en Colombie-Britannique. C'est le seul endroit au Canada où des mécanismes de contrôle sont en place relativement à de telles exportations. On le fait parce qu'on estime protéger ainsi des emplois manufacturiers au pays. Reste quand même que parmi tous les secteurs d'exploitation des ressources au Canada, c'est dans l'industrie forestière qu'il se fait le plus de transformation à l'intérieur de nos frontières. La plus grande partie du bois qui sort de nos forêts est transformé au Canada. Il y a bien des billes de bois qui sont exportées, mais pas en grande quantité.
Voilà qui est bien. Quelle chance d'être tombé sur la personne la mieux placée pour répondre à ma question.
Des voix: Ah, ah!
M. Ted Falk: Très intéressant. Merci pour cette réponse.
La plupart de nos ressources se retrouvent sur des terres publiques qui sont louées à des entreprises. S'agit-il actuellement surtout d'entreprises manufacturières ou forestières appartenant à des intérêts canadiens, ou y a-t-il des entreprises d'autres pays comme la Chine qui commencent à louer des terres au Canada?
Vous parlez des droits d'exploitation des terres, un système géré par les provinces qui accordent d'une certaine façon des baux à long terme pour l'exploitation de zones forestières. En vertu de ces baux, la possibilité d'exploiter ces forêts est assortie de responsabilités relatives à leur saine gestion. Il s'agit surtout d'entreprises appartenant à des intérêts canadiens ou nord-américains, comme Weyerhaeuser, qui est en fait une entreprise américaine, ou Domtar. Ces entreprises détiennent des droits d'exploitation, lesquels sont accessibles à partir du moment où vous avez une usine ou une entreprise au Canada.
Monsieur Harvey a parlé d'Aditya Birla. Je ne sais pas si cette entreprise détient des droits d'exploitation au Nouveau-Brunswick, mais cela serait sans doute chose possible du fait qu'elle a une usine dans cette province.
Je remercie tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
Vous avez parlé de construction écologique. Comme vous le savez peut-être, j'ai présenté un projet de loi d'initiative parlementaire préconisant l'utilisation du bois pour la construction écologique. Le budget du gouvernement pour l'an prochain prévoit un programme de 40 millions de dollars sur une période de quatre ans pour la construction écologique.
Je ne sais pas si vous pouvez m'en dire plus long à ce sujet. À quoi cet argent va-t-il servir? Qu'espérez-vous accomplir exactement? Prévoyez-vous en faire encore davantage en misant notamment sur les marchés publics pour la construction d'édifices en bois?
Ce programme particulier, CVBois, a été annoncé dans le budget précédent et il fait partie d'un cadre pancanadien sur le changement climatique. Ce programme vise à contribuer à la réduction des GES par l'entremise de la séquestration du carbone dans les édifices en bois. Ce programme vient d'être lancé par le ministre au cours des dernières semaines. Un concours sera ouvert pour les projets.
Si vous revenez en arrière, vous constaterez que nous avions organisé un concours de construction de grands bâtiments en bois. Ce concours a débouché sur la construction de deux bâtiments, le bâtiment Origine, dans la ville de Québec, et l'édifice Brock Commons, sur le campus de l'Université de la Colombie-Britannique. Un troisième édifice a presque été construit ici, sur la rue Sparks, mais au bout du compte, le marché local des condos a joué contre les facteurs économiques de ce projet. Nous pensons qu'il est possible de lancer plus d'initiatives compétitives de ce type pour faire la promotion des bâtiments en bois.
Encore une fois, nous souhaitons faire la promotion de projets qui peuvent être durables sur le plan économique. Il ne s'agit donc pas de subventionner un bâtiment seulement pour construire un bâtiment, mais plutôt pour démontrer qu'il existe des systèmes de construction qui peuvent non seulement offrir des avantages en matière de séquestration du carbone, mais qui peuvent également être concurrentiels. L'argent n'a pas servi à subventionner l'achat de bois, mais à payer, par exemple, les essais menés sur les systèmes de protection contre les incendies.
En Amérique du Nord, nous construisons 90, 95 ou 98 % de nos maisons en bois, et notre marché du logement n'offre donc pas vraiment de possibilité d'expansion, mais les bâtiments comme les centres d'achats, les hôpitaux et les écoles peuvent tous être construits avec du bois massif, en particulier, et nous aimerions beaucoup que ce secteur s'agrandisse. Nous voulons donc encourager ce type d'initiative et en particulier — je crois que le Québec est un chef de file dans ce domaine — la construction de ponts. En effet, un grand nombre de ponts en bois sont construits dans le Nord du Québec, et ce type de construction peut être étendu à plus grande échelle. Nous aimerions donc que ces idées prennent de l'ampleur dans les secteurs non traditionnels et non résidentiels.
Il faudra surtout construire des édifices de démonstration pour démontrer comment le bois peut être utilisé dans la construction. Mais une partie du programme sert également à fournir les ressources nécessaires pour mener les essais qui permettront de modifier le Code national du bâtiment pour qu'il autorise la construction de bâtiments en bois plus hauts. Actuellement, le Code autorise les bâtiments en bois de six étages. Grâce aux recherches et aux essais, nous souhaitons augmenter cette limite, afin que le Code autorise peut-être les bâtiments de 12 étages en bois massif, en bois lamellé-croisé et en bois lamellé-collé.
Troisièmement, il faut mettre au point des outils, c'est-à-dire des outils d'analyse du cycle de vie, qui donneront aux constructeurs et aux architectes les outils de conception dont ils ont besoin pour faire des choix éclairés en matière de matériaux de construction.
Je n'allais pas parler des billes brutes, mais puisque vous les avez mentionnées, je pense que je vais aborder le sujet, car c'est un enjeu important en Colombie-Britannique. On m'a dit que le gouvernement fédéral joue un rôle dans la réglementation des exportations de billes brutes, surtout lorsqu'elles sont récoltées sur des terres privées plutôt que sur des terres de la Couronne provinciale en Colombie-Britannique, par exemple.
Pourriez-vous m'en dire plus à ce sujet?
L'Avis aux exportateurs no 102, un règlement fédéral, contient une disposition qui correspond essentiellement au règlement provincial. Il s'agit d'une entente entre le gouvernement du Canada — par l'entremise d'Affaires mondiales — et le gouvernement de la Colombie-Britannique qui exige un permis pour l'exportation de billes de la côte Ouest. Il s'agit d'un enjeu strictement côtier en Colombie-Britannique. Comme vous l'avez souligné, c'est un enjeu extrêmement politique à l'échelle locale et c'est très délicat. Des gens sont en désaccord, et d'autres sont d'accord. Les facteurs économiques sont complexes et flous, mais l'entente existe pour des raisons historiques, c'est-à-dire pour protéger des emplois dans l'industrie de la fabrication en Colombie-Britannique.
J'imagine qu'à l'avenir, comme dans le passé, le gouvernement du Canada n'interviendra pas dans ce dossier sans consulter le gouvernement de la Colombie-Britannique.
D'accord.
Vous avez mentionné les incendies. Cette année, il y a eu de nombreux incendies en Colombie-Britannique et l'Alberta a aussi eu des incendies avant cela. Ils se produisent de plus en plus souvent. C'est une grande préoccupation en Colombie-Britannique, car nos étés sont de plus en plus chauds et secs. Dans les zones périurbaines comme celle où je vis, les gens sont de plus en plus inquiets pour leur sécurité.
L'une des conclusions du rapport Filmon publié en 2004 soutient qu'un bon programme de coupes d'éclaircie autour des zones périurbaines pourrait fournir des emplois et des matériaux à l'industrie des produits du bois, mais que cela rendrait également les villes plus sécuritaires. Le gouvernement provincial n'a pas très bien financé ce projet. J'aimerais savoir si le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle pour contribuer à la sécurité publique tout en aidant l'industrie forestière. Nous avons parlé des déchets du bois, c'est-à-dire des petits billots qui pourraient être utilisés pour faire de la pulpe ou un autre produit, et nous pourrions ainsi créer des emplois et rendre les collectivités plus sécuritaires.
Lorsqu'il s'agit du rapport Filmon et de la Stratégie canadienne en matière de feux de forêt de 2005, qui intègre ces recommandations — c'est une stratégie du Conseil canadien des ministres des forêts qui a été renouvelée en 2016, et elle est donc réapprouvée —, tout le monde convient que la prévention des incendies autour des collectivités est l'un des meilleurs investissements que nous pouvons effectuer. Honnêtement, personne n'a suffisamment investi dans ce dossier au cours des 10 dernières années. Pour être juste, il faut préciser qu'une récession mondiale et un effondrement financier ont immédiatement suivi ces événements, et les gens avaient donc moins d'argent qu'au moment de l'élaboration de cette stratégie.
Le Service canadien des forêts déploie de grands efforts dans la modélisation et la prévention des incendies. C'est l'un des domaines de recherche auxquels nous accordons une grande importance, car cela nous permet de fournir des données et des outils aux décideurs sur le terrain et d'accroître notre collaboration avec l'industrie de la défense, afin d'avoir accès à leur technologie en altitude pour améliorer notre capacité de surveiller les incendies pendant qu'ils font rage. Il est aussi nécessaire d'accroître la sécurité autour des collectivités. Je peux dire que des discussions sur cet enjeu sont en cours, et que ce dossier est probablement la priorité du gouvernement provincial. J'espère que nous observerons certains progrès à cet égard.
Merci, monsieur le président.
[Français]
Je remercie les témoins de leurs présentations.
Dans votre mémoire, vous indiquez qu'il y a 50 000 employés dans le secteur des bioproduits et que celui-ci génère des revenus d'environ 24 milliards de dollars.
Auriez-vous des statistiques sur la participation des femmes à ce secteur? Auriez-vous des recommandations à faire pour augmenter leur participation au travail?
[Traduction]
Nos renseignements sont un peu dépassés. Je crois que dans quelques semaines, nous obtiendrons des renseignements provenant du dernier recensement. Mais ce recensement n'a pas conclu que les femmes représentaient une grande proportion de la main-d'oeuvre.
Toutefois, leur nombre est à la hausse. Je présume que c'est la tendance historique, mais c'est encore un très petit nombre. Il est un peu plus élevé dans l'industrie de la fabrication secondaire.
[Français]
Plus tôt, vous avez mentionné que, dans le budget de 2017, pour la première fois, des fonds assez importants avaient été alloués à ce secteur.
Pourriez-vous nous parler davantage des bénéfices de cet investissement?
[Traduction]
Je crois qu'il y avait plusieurs choses dans le budget. Je tiens à mentionner le Plan d'action sur le bois d'oeuvre, qui a été approuvé deux mois après le budget; il représente 867 millions de dollars en financement hors cycle. Si on combine cela aux fonds prévus dans le budget fédéral de cette année, je dirais que c'est l'une des années — ou l'année — où le gouvernement fédéral a investi le plus dans notre secteur forestier. Cela équivaut certainement au PEPP, le Programme d'écologisation des pâtes et papiers, qui a été exécuté il y a quelques années et qui a coûté environ un milliard de dollars.
Cette année en particulier, les fonds provenaient de CVBois, comme il a été mentionné, donc par l'entremise du cadre pancanadien sur le changement climatique — à savoir environ 40 millions de dollars. De plus, des fonds sont prévus pour les technologies vertes. En effet, on investira de 40 à 50 millions de dollars dans les technologies vertes dans le secteur forestier. On a également prévu environ 55 millions de dollars pour mettre fin à l'alimentation au diésel des collectivités hors réseaux, surtout les collectivités éloignées.
Je crois que c'est un bon résumé du budget. Ces fonds sont bien distribués et si on les combine au Plan d'action sur le bois d'oeuvre, qui a permis de renouveler tous nos programmes d'exportation et nos programmes axés sur l'innovation, on peut compter sur plus ou moins un milliard de dollars cette année.
Cela m'amène à ma prochaine question. Pouvez-vous nous donner une idée des possibilités d'accroître l'exportation des bioproduits, des produits biochimiques et de la bioénergie? Comment le gouvernement fédéral peut-il collaborer avec le secteur privé pour trouver une façon d'élargir ces secteurs? Quel est le potentiel d'exportation?
Oui.
À mon avis, il y a un bon potentiel. Je pense que certains des changements les plus récents et des développements notables qui se sont produits sont dans le domaine de la construction — je vous laisserai parler de la Chine — et dans le secteur de l'énergie. Nous disions justement que les Canadiens réussissent très bien dans les technologies de pointe liées aux biocombustibles, par exemple. En effet, ces produits se vendent très bien au sud de la frontière.
Pour préparer un grand nombre des nouveaux produits dans le secteur de la fabrication secondaire ou de la fabrication de pointe — les produits novateurs en général — à la vente et à l'exportation, il faut les soumettre à un processus de contrôle de la qualité et d'évaluation environnementale. C'est donc dans ce domaine que nous déployons des efforts — encore une fois, je demanderais à Bob d'en parler — ou que nous utilisons la norme ISO pour définir certains de ces nouveaux produits.
Selon moi, nous déployons de grands efforts à cet égard, non seulement au sein du gouvernement, mais également dans le secteur privé, car dès la mise en oeuvre de normes appropriées en matière de contrôle de la qualité, on peut vendre les produits.
Vous avez mentionné Génération Énergie et vous avez indiqué que 25 entreprises s'étaient rassemblées pour former ce groupe. Vous avez donc parlé de ce regroupement. J'aimerais me faire une meilleure idée de la situation géographique. Qu'avez-vous fait pour appuyer ce regroupement en ce qui concerne la R-D et le milieu universitaire, l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, les lacunes et les efforts pour commercialiser ces produits? Et que pouvons-nous faire pour élargir ce regroupement?
J'ai mentionné le regroupement pour démontrer les progrès réalisés par l'industrie et pour prouver que nous ne parlons pas seulement d'une vision utopique proposée par des analystes du gouvernement. Les intervenants de l'industrie se sont regroupés pour être en mesure d'investir 400 millions de dollars.
Mais ce ne sont pas les finalistes du concours, n'est-ce pas? Il en reste neuf et ce nombre sera ensuite réduit à cinq finalistes. Ma mission personnelle est de découvrir comment les aider à demeurer en activité, afin de préserver l'élan que cela donnera au secteur. Il y a de tout, de Canfor qui investit dans de nouvelles installations de bioénergie à Prince George à d'autres possibilités en Ontario, surtout dans le domaine des produits chimiques. Il y a « l'autoroute maritime » de Thunder Bay à Sarnia, si l'on peut dire, où l'on tente de transformer certains déchets de la région de Thunder Bay en produits chimiques — par exemple des sucres, des lignines, etc. — qui pourraient être utilisés dans l'industrie chimique de la région de Sarnia.
Nous avons donc un regroupement en Ontario et je pense que l'autre regroupement principal se trouve en Colombie-Britannique. Ensuite, on ne peut pas passer sous silence le regroupement qui se trouve à Montréal et celui qui se trouve dans la ville de Québec.
Certains jours, ce n'est pas facile d'être le président.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Madame Stubbs, vous avez cinq minutes.
Dans un esprit de collaboration, je vous invite, monsieur Mason, à répondre à la question de mon collègue.
La réponse n'est pas simple, mais je peux vous dire qu'en 2011, un ministre de la Colombie-Britannique, Pat Bell, a envoyé un courriel au personnel dans lequel il disait que 22 scieries de la Colombie-Britannique étaient en activité grâce au marché chinois. Que ce nombre soit exact ou non, il ne fait aucun doute qu'au moins 10 scieries envoient leurs produits uniquement en Chine.
La Chine a servi à plusieurs fins. Tout d'abord, soyons clairs, ce pays a sorti de l'Amérique du Nord une grande quantité de bois de qualité inférieure qui avait été ravagé par des coléoptères. Sans la Chine, le prix du bois aurait certainement diminué. Ensuite, cela a permis à d'autres régions du Canada d'avoir un meilleur accès aux États-Unis en raison du volume qui devait être extrait du terrain. Mais le marché chinois est en évolution, et il ne s'agit pas seulement du coffrage à béton. En effet, il se produit de nombreuses choses intéressantes en Chine, surtout dans le domaine des bâtiments écologiques. Le gouvernement chinois sait qu'il doit écologiser ses villes et c'est un domaine dans lequel le bois pourrait servir.
Lorsque je me suis rendu dans ce pays en juin dernier, le ministre Carr, qui m'accompagnait, a ouvert l'écoquartier sino-canadien à Tianjin. Il s'agit d'une nouvelle zone de croissance située à environ deux heures de Beijing et où l'on construit de nombreuses maisons en rangée et d'autres bâtiments en bois. J'ai d'ailleurs publié, sur Twitter, une photo de panneaux OSB fabriqués à Maniwaki et utilisés dans un bâtiment là-bas.
Il existe de nombreuses possibilités et elles ne sont pas liées aux maisons unifamiliales. Il faut préciser qu'en Chine, l'avenir appartient aux bâtiments à plusieurs étages et aux bâtiments multiples. Nous observons qu'il y a d'excellentes possibilités pour les murs de remplissage de bois, car lorsqu'on achète un condo en Chine, on n'achète pas un logement fini comme nous le faisons ici. On achète plutôt un bloc carré en ciment et on embauche ensuite des décorateurs avant de le terminer. C'est la raison pour laquelle on entend beaucoup de marteaux-piqueurs en Chine, même après la fin de la construction des bâtiments. Mais il y a énormément de possibilités dans ce secteur.
Merci, monsieur Mason. Je vais manquer de temps, mais je vous suis reconnaissante de votre réponse complète.
Je suis sûre que vous savez que lors de sa dernière comparution devant notre Comité, le ministre des Ressources naturelles du Canada a affirmé que dans le cadre de ses fonctions, il devait réagir aux mesures compensatoires, afin de protéger les travailleurs, les collectivités et les producteurs. Je crois qu'il s'agit d'un sentiment avec lequel nous sommes tous d'accord.
L'un de nos collègues, Todd Doherty, a demandé au ministre, lors de sa comparution devant notre Comité, si les entreprises canadiennes de transformation secondaire seraient incluses ou non. Malheureusement, le ministre n'était pas en mesure de répondre à cette question pendant la réunion. Il a dit que cela avait apparemment rendu tout un ministère perplexe. Le ministère a-t-il fourni une mise à jour sur l'aide offerte aux entreprises de transformation secondaire? Comment le ministère évalue-t-il les possibilités, les menaces et les risques auxquels font face les entreprises de transformation secondaires au Canada?
L'industrie de la fabrication secondaire est très importante et elle emploie des milliers de Canadiens. Il ne fait donc aucun doute que c'est une industrie importante. Les droits de douane qui représentent une injustice pour l'ensemble du secteur représentent, en ce moment, une double injustice pour ces entreprises. Il faut certainement le préciser. Les membres de mon personnel ont rencontré les représentants des entreprises de transformation secondaire ce matin et nous connaissons donc très bien leurs préoccupations. Elles sont bien réelles.
En ce qui concerne l'avenir, je ne peux pas en dire plus, car nous ne savons pas ce que fera le département du Commerce des États-Unis. Nous nous attendons à ce qu'il fasse une annonce très bientôt, et nous apprendrons plusieurs choses à ce moment-là. Y aura-t-il des exemptions maritimes? Y aura-t-il d'autres exemptions pour les scieries à la frontière? Y aura-t-il des exemptions pour les entreprises de fabrication secondaire ou un traitement comme la dernière fois, qui était plus ou moins la juste valeur? Y aura-t-il un traitement pour les producteurs à haute valeur ajoutée comme l'industrie du cèdre sur la côte Ouest? En ce moment, nous ne savons rien de tout cela.
Je dirais simplement que nous sommes très conscients de la situation. Nous ne sommes pas perplexes. Nous sommes très conscients des problèmes auxquels fait face le secteur. Ils sont bien réels, et en ce moment, ils sont très injustes.
Je vous suis reconnaissante de votre réponse. À cet égard, le ministère ou un autre ministère du gouvernement a-t-il mené une analyse sur les répercussions économiques actuelles sur l'industrie canadienne de la fabrication secondaire et a-t-on estimé les pertes potentielles d'emplois — comme nous l'avons dit, des milliers de Canadiens dépendent de cette industrie pour gagner leur vie — en vue d'être prêts si les droits compensateurs continuent de s'appliquer?
D'accord.
J'allais vous demander de nous donner d'autres exemples intéressants des méthodes d'exploitation des ressources naturelles de classe mondiale du Canada, partout, pour savoir si vous aviez des exemples de réalisations responsables en approvisionnement secondaire dans le secteur de la foresterie. Ce sera peut-être d'autres collègues qui le feront.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais poursuivre avec une question sur l'énorme marché que constitue la Chine pour nos produits forestiers. L'an dernier, au cours d'un voyage parlementaire en Chine, j'ai visité une foire internationale à Beijing. Le Canada y avait un pavillon organisé par notre conseil du bois et quelques entreprises du secteur des produits du bois. Les entreprises étaient sur place pour promouvoir leurs produits sur le marché de l'habitation chinois. Elles m'ont dit que pendant plusieurs années, le gouvernement n'a pas déployé d'efforts suffisants pour les aider à percer cet énorme marché. Elles ont donc dû se débrouiller par elles-mêmes. À l'heure actuelle, c'est de plus en plus difficile. La situation n'est sans rappeler ce qui s'est passé avec notre industrie nucléaire, notre technologie CANDU.
Pouvez-vous nous parler des changements que vous ou vos collègues, ou encore le ministère, avez faits pour favoriser l'ouverture de nouveaux marchés mondiaux — en Asie ou en Chine, par exemple? Selon vous, qu'est-ce qui serait le plus utile pour aider l'industrie? Devrions-nous améliorer la politique, ou offrir des incitatifs, ou faire plus de promotion? Quel soutien pouvons-nous offrir à l'industrie pour qu'elle obtienne les meilleurs résultats possible?
Certainement.
Comme vous le savez et y avez probablement fait référence, nous avons depuis quelques années un programme baptisé Produits du bois canadiens, qui vise à rassembler les associations qui représentent de nombreuses entreprises du secteur des produits du bois partout au pays afin de promouvoir ces produits dans un marché donné. La Chine se trouve à être notre principal objectif cette année. Le gouvernement fédéral investira environ 2,5 millions de dollars pour développer ce marché, auxquels viendront probablement s'ajouter 2,5 millions supplémentaires puisqu'il s'agit d'un programme à frais partagés avec les provinces et l'industrie forestière.
Toute une gamme d'activités sont menées en Chine: soutien aux associations pendant les foires commerciales pour promouvoir les produits canadiens, collaboration avec les représentants gouvernementaux pour changer les codes et les rendre plus ouverts au bois, envoi de spécialistes sur les sites de construction pour aider les constructeurs et les promoteurs chinois à savoir comment utiliser le bois, etc. La construction de maisons en bois est un concept relativement nouveau en Chine, alors nous consacrons beaucoup de temps à renseigner les constructeurs sur la façon de construire des maisons de façon sécuritaire en se conformant au code du bâtiment.
Vous avez demandé quels sont les plus grands enjeux. La Chine est un immense pays, et je crois que la première chose à faire, c'est de montrer aux consommateurs que le bois est un produit durable et très chaleureux pour une maison. Ensuite, et j'en ai déjà parlé, il faut montrer aux constructeurs comment construire des maisons en bois de manière sécuritaire. Et enfin, grâce aux nouveaux fonds qui ont été alloués au Plan d'action sur le bois d'oeuvre, nous avons augmenté les ressources allouées à la construction de bâtiments de démonstration. On peut ériger des bâtiments et les gens peuvent voir par eux-mêmes qu'ils sont sécuritaires. Ils sont très aimables.
J'étais en Chine la semaine dernière, et j'ai été surpris du nombre de gens qui m'ont dit qu'ils adoraient vivre dans une maison en bois; on peut voir les lambris de bois et les planchers en bois. Nous devons diffuser ce message auprès des consommateurs chinois, car comme vous en êtes probablement conscients, la classe moyenne est en croissance et de plus en plus de gens voudront et pourront s'acheter une maison, qui ne sera pas nécessairement unifamiliale. On pense aussi aux maisons à plusieurs étages.
Nous avons un programme. M. Mason a donné quelques exemples de réussite. Quand on demande aux gens de l'industrie où se trouve le prochain grand marché du bois pour nous, ils répondent simplement « la Chine, toujours la Chine ». Nous nous sommes concentrés sur la côte est, mais maintenant nous explorons l'intérieur du pays.
Je ne peux pas modifier l'heure, malheureusement. Désolé, mais c'est tout le temps que nous avons.
Merci beaucoup d'avoir été avec nous aujourd'hui et d'avoir assuré un bon départ à notre nouvelle étude. Nous vous remercions de votre participation.
Nous allons suspendre quelques minutes, puis nous allons passer à la deuxième heure.
Reprenons maintenant. Nous allons devoir terminer un peu plus tôt et prendre environ cinq minutes, ou un peu moins, pour nous occuper des affaires du Comité.
Nous accueillons maintenant, en personne, les représentants de l'Association of Lumber Remanufacturers of Ontario — merci, messieurs, d'être avec nous —, et par vidéoconférence, deux représentants de la société J.D. Irving, Limited; nous vous remercions d'être avec nous par vidéoconférence et de vous être libérés pour témoigner conformément à notre horaire.
Chaque groupe aura dix minutes pour faire son exposé dans l'une ou l'autre des langues officielles. Vous devriez avoir des écouteurs pour l'audition de l'interprétation, et j'espère que c'est le cas pour vous également au Nouveau-Brunswick. Nous passerons ensuite aux questions.
Messieurs, comme vous êtes sur place, pourquoi ne pas commencer?
Monsieur le président, j'aimerais commencer par vous remercier, ainsi que les membres du Comité, de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Je m'appelle Rick Ekstein, et je suis l'un des fondateurs de l'ALRO, l'Association of Lumber Remanufacturers of Ontario. Je suis accompagné de Steven Rustja, le président actuel.
Nous avons également deux directeurs dans la salle, Morgan Wellens et Marty Simhoni, qui m'a aidé à démarrer l'association il y a très longtemps — lorsqu'il avait encore des cheveux.
Je m'attire des ennuis.
Des voix: Oh, oh!
M. Rick Ekstein: Brièvement, nous allons vous parler de cinq éléments aujourd'hui: nous allons vous dire qui nous sommes, ce que nous faisons, pourquoi nous avons vraiment, vraiment besoin que vous vous intéressiez à nous, ce que nous avons besoin que vous fassiez pour que nous puissions continuer d'exister, puis, bien sûr, nous allons répondre à vos questions sur nous ou notre secteur.
Premièrement, qui sommes-nous? L'Association est le fruit direct du différend sur le bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis. Comme vous êtes sans doute nombreux à le savoir, le différend couve depuis la fin des années 1800. Ses versions les plus récentes ont repris en 1982, et la première a été baptisée Bois d'oeuvre I. Le différend qui nous occupe en ce moment est appelé Bois d'oeuvre V. Je me fais vieux et je ne veux vraiment pas voir Bois d'oeuvre VI.
En 1991, pendant Bois d'oeuvre III, le gouvernement fédéral tentait de s'entendre avec les États-Unis sur un quota pour donner accès aux scieries au marché américain. Ce que le gouvernement n'a pas pris en considération, et ne savait probablement pas à l'époque, c'est qu'en plus d'un secteur du sciage très dynamique, nous avions aussi un secteur secondaire ou à valeur ajoutée dynamique et florissant. J'ai été ravi d'entendre le témoin précédent parler un peu de ce secteur et de son importance.
L'ALRO, l'Association of Lumber Remanufacturers of Ontario, a donc été fondée à cette époque pour sensibiliser le gouvernement. Nous sommes indépendants, ce qui veut dire que nous n'appartenons pas à une scierie; nous ne sommes pas une filiale. Nous sommes pour la plupart des petites et moyennes entreprises familiales, et comme je l'ai mentionné, nous n'avons pas de propriété commune avec les scieries. Aujourd'hui, nous représentons environ 4 400 emplois en Ontario seulement; il y a 20 ans, c'était probablement le double, mais la moitié ont été sacrifiés à l'aune des Bois d'oeuvre I à IV.
Deuxièment, que faisons-nous? Nous ne travaillons pas en forêt à couper des arbres ronds sur les terres de la Couronne pour ensuite en faire du bois carré. C'est le travail des scieries. Les entreprises de seconde transformation achètent le bois des scieries aux conditions du marché, habituellement leurs produits de moindre qualité, et l'acheminent dans leurs usines pour en faire des produits à valeur ajoutée. Lorsque les scieries coupent une bille de bois, elles tentent d'obtenir le bois d'oeuvre de la meilleure qualité possible pour le marché de la construction. Comme chaque arbre est différent, certains donnent du bois d'oeuvre de haute qualité, et d'autres, de piètre qualité. Toutes les parties de « piètre » qualité, faute d'un meilleur terme, doivent être transformées en quelque chose d'autre pour pouvoir servir.
Très brièvement — et mes partenaires pourraient montrer quelques exemples —, vous pouvez voir sur une pièce de piètre qualité comme celle-ci ce qu'on appelle une « flache » sur les côtés. On ne pourrait pas la vendre dans un Home Depot ou à un constructeur. Nous la scions donc pour en faire des morceaux de différentes tailles. Nous ne voulions pas apporter une pièce de 20 pieds de long ici, mais nous pouvons la couper comme ceci, et comme cela. Vous pouvez voir que certaines pièces au milieu ici sont de beaux produits à valeur ajoutée. Nous ajoutons de la valeur à ces produits. Des exemples circulent pendant que je parle.
Quatrièmement, pourquoi devriez-vous vous intéresser à nous? Vous devriez le faire pour une raison très simple: nous créons beaucoup d'emplois, comme vous pouvez l'imaginer, pour fabriquer ces petites pièces de bois. Les scieries sont souvent, comme quelqu'un me l'a dit un peu plus tôt aujourd'hui, des usines à spaghetti. Elles sont très automatisées, fonctionnent très rapidement, et elles peuvent augmenter leur production essentiellement sans ajouter d'employés, car elles ont beaucoup investi dans la technologie, ce qui est excellent. Nous, par contre, mettons la main à chaque pièce que nous fabriquons, et plus nous produisons, plus nous embauchons. Il y existe un lien direct entre l'augmentation de notre volume de production et de notre nombre d'employés. Nous créons des emplois stables, dans le sud de l'Ontario, dans notre cas, tout près de la frontière, et comme je l'ai dit, nous offrons des emplois très bien rémunérés et stables.
Nous sommes très respectueux de l'environnement. Au lieu d'expédier ces déchets à des milliers de milles d'ici pour une seconde transformation ailleurs, nous le faisons en Ontario, en réduisant ainsi l'empreinte carbone de la province tout en créant des emplois. Nous ne produisons aucun déchet. Les parties que nous ne pouvons utiliser, nous en faisons de plus petites pièces qui serviront à des usages industriels, à créer des boîtes, des palettes, et d'autres articles. Le reste est réduit en paillis ou en copeaux, qui servent de litières pour les chevaux, et finissent tôt ou tard comme engrais à jardin. Nous fabriquons du paillis à jardin et bien d'autres choses. Nous avons un fort potentiel de croissance, un fort potentiel de création d'emplois, et si on ajoute la technologie, nous pourrons tirer encore davantage de chaque pièce de bois.
Toutefois, mesdames et messieurs, nous avons un problème, et c'est moins avec le gouvernement des États-Unis qu'avec celui du Canada. Au cours des 20 dernières années du conflit du bois d'oeuvre, les ministères des ressources naturelles fédéral et provinciaux ont beaucoup influencé la réglementation sur qui peut, ou non, expédier aux États-Unis. Les ministères des ressources naturelles provinciaux, qui sont propriétaires des arbres, travaillent en étroite collaboration avec les Canfor, West Fraser, Tembec — les grandes scieries cotées en bourse, les Irving, etc. — qui récoltent les arbres. Ce sont leurs commettants, et ils travaillent en étroite collaboration avec eux. Ils ont un poids énorme auprès d'eux que nous n'avons pas.
Ainsi, les entreprises de seconde transformation ont traversé des périodes où ils pouvaient expédier aux États-Unis, et d'autres où ils ne pouvaient littéralement pas le faire. Garder nos clients contents quand le gouvernement adopte soudain des règlements qui nous empêchent d'expédier nos produits n'est pas facile. Nous avons traversé des périodes où la politique du gouvernement canadien incitait les scieries, nos fournisseurs, à vendre leurs produits à des entreprises de seconde transformation aux États-Unis à prix moindre, plutôt qu'à nous, exportant ainsi les emplois.
Nous avons traversé des périodes, comme entre le 28 avril et le 26 août de cette année, où les droits variaient entre 10 % et 30 % pour certaines entreprises, mais dépassaient les 50 % pour les entreprises de seconde transformation en Ontario. L'homme qui a parlé avant moi a mentionné que nous avons été frappés doublement, et il a tout à fait raison. Les droits qu'on nous imposait dépassaient les 50 %. La frontière nous était littéralement fermée, tandis que les scieries continuaient leurs expéditions à mesure que les prix augmentaient. C'était très réjouissant.
J'ai participé à une réunion vendredi dernier avec la ministre des Affaires étrangères, la ministre Freeland. Elle a convoqué une rencontre avec 10 ou 12 représentants des plus importantes scieries au Canada, et j'étais le seul pur représentant des entreprises de seconde transformation dans la salle. Elle nous a dit qu'elle travaillait avec acharnement pour conclure un accord, peut-être même cette semaine. C'est pourquoi la rencontre d'aujourd'hui est cruciale, et pourquoi nous sommes heureux de pouvoir vous parler.
La ministre Freeland nous a dit qu'il y avait deux dénouements possibles: un accord sur des quotas ou une bataille judiciaire qui pourrait durer jusqu'à cinq ans. Dans l'éventualité d'une bataille judiciaire et de l'imposition des mêmes règles que nous avons connues plus tôt cette année, nous nous verrions imposer des droits de 50 % ou plus, selon le chiffre qu'ils décideront, ce qui veut dire que nous fermerions nos portes. Certains prendront leur retraite, d'autres déménageront leurs usines aux États-Unis. Dans les deux cas, le même résultat, des pertes d'emplois au Canada.
Pour que nous puissions poursuivre nos activités, si on nous impose encore des droits, et si ces droits s'élèvent encore une fois à 50 % et plus, il faudrait que le ministre des Ressources naturelles, suivant vos bons conseils, décide de payer ces droits et nous aide à demeurer en affaires, un point c'est tout. Sans cette aide, nous fermons nos portes.
La ministre Freeland nous a dit qu'advenant un accord sur les quotas, il reviendrait au ministre Carr et à son ministère — sur votre conseil, j'espère que vous êtes au courant — de s'occuper de l'allocation des quotas. C'est pourquoi il est si important pour nous d'être ici aujourd'hui pour vous parler, à vous qui avez l'avenir de nos entreprises entre vos mains.
Dans l'éventualité d'un accord sur les quotas, suivant ce que nous en comprenons et les renseignements que nous avons jusqu'à maintenant, ce sera un accord où le Canada ne pourra expédier aux États-Unis qu'une quantité limitée de bois d'oeuvre. Il n'y aura pas de dispositions, comme il pouvait y en avoir par le passé, prévoyant des droits pour en expédier davantage. La quantité sera limitée. Nous avons besoin de votre aide pour nous assurer de garder nos entreprises ouvertes, de les voir croître, ainsi que les emplois, et de pouvoir investir dans nos gens et dans l'outillage.
Voici ce que nous avons besoin que vous fassiez. Si vous croyez qu'il est important d'ajouter de la valeur à nos ressources naturelles, il faut que vous nous aidiez à informer le ministre Carr de ce que je vais dire maintenant. Advenant un accord sur les quotas, il nous faut un bassin national de quotas. Contrairement aux scieries qui achètent des arbres d'une région géographique précise — on peut seulement transporter ces arbres par camion pour l'instant —, nous achetons du bois d'oeuvre de chaque province du Canada et nous l'amenons dans nos usines en Ontario. Il faut que le ministre des Ressources naturelles alloue un pourcentage du bassin — je ne propose pas un pourcentage ici, mais je vais simplement prendre 15 % comme exemple — ou deux milliards de pieds de bois pouvant être expédiés aux États-Unis par des entreprises de seconde transformation. Une telle chose — et encore une fois, je n'utilise une donnée que pour illustrer mon point — ferait en sorte que des milliers d'emplois dans le secteur de la transformation au Canada seraient préservés, que les déchets resteraient ici, et également que le Canada pourrait utiliser son quota de façon plus efficace. Surtout, cela nous permettrait de savoir que nous ne pouvons pas expédier ce mois-ci, qu'il est possible de le faire le mois prochain et qu'il se peut qu'on ne soit pas en mesure de le faire dans six mois: on nous informe que nous avons la capacité nous permettant d'expédier des produits, et nous investirons et des emplois à valeur ajoutée seront créés au point où vous ne pouvez vous l'imaginer.
Nous recommandons également que pour ce bassin de quotas, le ministre fasse les calculs en fonction d'un pourcentage plutôt que d'un nombre déterminé. Encore une fois, selon les renseignements que nous avons, nous aurons un quota du marché américain. À cet égard, ce qui a été lancé, c'est 28 %. Autrement dit, à mesure que le marché du logement aux États-Unis prendra de l'ampleur, nous serons en mesure d'expédier plus de bois parce qu'il s'agira de 28 % d'un marché en pleine croissance. Il nous faut savoir que nous faisons également partie d'un marché en expansion.
L'autre chose, c'est que ce bassin ne doit être réservé qu'à des entreprises de seconde transformation indépendantes et certifiées. On l'avait clairement défini dans l'accord précédent. Les Américains n'y voient aucun problème. Nous ne proposons aucun changement à cet égard, car nous ne voulons pas susciter des préoccupations.
Si nous faisons ces trois demandes, c'est surtout pour maintenir les emplois au Canada. Si vous devez retenir une chose de cette séance, une seule chose, j'espère que c'est qu'il faut que tout le bois d'oeuvre de qualité inférieure comme celui-là, qui provient d'une scierie, soit transformé. Veut-on exporter du pétrole brut pour le raffinage, ou veut-on plutôt ajouter de la valeur et faire en sorte qu'il y ait des emplois à valeur ajoutée au Canada? Veut-on exporter les billes de bois dont nous parlions, ou veut-on exporter des produits à valeur ajoutée? Veut-on expédier des tomates ou du ketchup? Dans notre cas, veut-on plutôt exporter ceci ou du bois d'oeuvre à valeur ajoutée de grande qualité?
Mes collègues et moi avons apporté un document pour vous tous. Il contient toutes sortes d'information, car je ne pouvais pas tout dire en 10 minutes.
Nous pourrons le distribuer plus tard. Je vais devoir mettre fin à votre déclaration préliminaire maintenant.
D'accord.
Nous avons également un autre produit de seconde transformation à vous montrer. Si vous le souhaitez, nous pouvons attendre jusqu'à la fin.
Nous allons entendre nos autres témoins, puis nous poserons des questions aux deux groupes en même temps.
Certainement. S'ils peuvent le faire pendant que nous écoutons les autres témoins et sans les déranger, ce serait parfait.
Je m'appelle Jerome Pelletier, et je suis vice-président de la division des scieries chez J.D. Irving, Limited. Je suis accompagné aujourd'hui par Mark Mosher, vice-président de notre division pâte et papier.
Nous avons une présentation aujourd'hui et nous aimerions discuter de trois principaux éléments. Nous aimerions vous expliquer qui nous sommes à J.D. Irving, et nous aimerions parler de la chaîne de valeur intégrée des produits forestiers. Enfin, nous aimerions proposer certaines stratégies pour stimuler la croissance du secteur des produits forestiers au Canada.
J.D. Irving a été fondé en 1882 au Nouveau-Brunswick, et notre siège social est situé à Saint John, au Nouveau-Brunswick. Nous comptons actuellement 15 000 employés. Nos activités sont très variées. Nous sommes actifs dans les secteurs de l'agriculture, de la construction et de l'équipement. Nous avons une forte présence dans les produits de consommation, et nous fabriquons des mouchoirs, du papier hygiénique et des couches dans l'Est canadien.
Nous sommes également très actifs dans le secteur des aliments; nous produisons des légumes et des frites congelées. Nous sommes évidemment aussi présents dans le secteur forestier et les produits forestiers. Dans les secteurs de la vente au détail et de la distribution, nous exploitons 50 quincailleries Kent dans les maritimes, qui s'apparentent à des Home Depot. Nous sommes également actifs dans la construction de navires, le transport et la logistique. Nous sommes la cinquième entreprise de camionnage en importance au Canada, et nous avons aussi notre propre chemin de fer et nos propres avitailleurs.
Si nous mettons maintenant l'accent sur le secteur forestier, nous sommes l'un des cinq plus grands propriétaires fonciers en Amérique du Nord; nous détenons 3,2 millions d'acres de biens-fonds en tenure franche. Nous possédons environ 2 millions d'acres au Canada et 1,2 million d'acres au Maine. Nous avons planté 960 millions d'arbres depuis 1957 — c'est un record national — qui nous appartiennent ici à at J.D. Irving. Nous avons les certifications SFI et FSC et nous avons également des recherches et des brevets reconnus à l'échelle internationale ayant trait à notre programme d'amélioration des arbres.
En ce qui concerne les retombées économiques, J.D. Irving crée environ 9 400 emplois dans l'ensemble au Canada dans le secteur forestier. Ce sont des emplois directs et indirects qui représentent 620 millions de dollars en salaire direct et indirect versé annuellement à des Canadiens. Depuis cinq ans, nous avons investi 664 millions de dollars dans divers projets d'immobilisations, des usines de pâtes et papiers et des scieries et nous dépensons annuellement 700 millions de dollars dans diverses industries canadiennes.
Voilà les divers produits que nous fabriquons. Nous vous expliquerons un peu plus en détail dans un instant la façon dont tout cela est intégré.
En ce qui concerne nos activités de sciage, nous exploitons 10 scieries et nous avons 1 600 employés. Notre division des scieries est divisée en quatre sous-divisions qui se spécialisent dans la transformation ou la fabrication de produits à partir d'essences précises. Nous avons une division pour le pin blanc, le bois d'oeuvre de feuillus, le cèdre et l'épinette. Dans l'ensemble, nous fabriquons un peu plus d'un milliard de pieds de planches. En 2016, en ayant davantage recours à la bioénergie, nous avons été en mesure de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 17 %. Actuellement, 17 % de notre énergie est de l'énergie renouvelable.
En ce qui a trait à la valeur ajoutée, nous sommes de plus en plus actifs dans des programmes axés sur la décoration. Nous avons mis en marché du bois franc scié sur plot. Nous avons créé un programme axé sur la décoration pour mettre en valeur les planches de pin. Nous fabriquons aussi des composantes d'armoires de cuisine et nous fabriquons également des clôtures en bois de cèdre ici au Nouveau-Brunswick.
Je cède maintenant la parole à Mark.
Je m'occupe de la division pâte et papier. Nous avons quatre installations au Nouveau-Brunswick qui produisent un peu plus de 1,2 million de tonnes de produits divers: de l'utilisation résiduelle primaire des copeaux de bois provenant de nos usines de pâtes kraft jusqu'à du papier de spécialité. Nous avons l'usine de papier de spécialité la plus moderne au Canada aujourd'hui. Nous détenons un peu plus de 25 % du marché américain pour les diverses catégories de papier. Nous fabriquons du papier à canneler que nous expédions à notre société soeur qui fabrique des boîtes en carton ondulé et des boîtes pour usages spéciaux pour des pièces et des mouchoirs de toute catégorie jusqu'à l'un de nos produits à plus forte valeur ajoutée, soit la catégorie de mouchoirs qu'utilisent nos principaux consommateurs à la maison. Nous produisons environ 220 000 tonnes réparties également entre le Canada et les États-Unis. Bref, environ 50 % de nos produits sont fabriqués et vendus au Canada et environ 50 % de nos produits sont fabriqués et vendus aux États-Unis.
Sur le plan environnemental, grâce à de nombreux programmes au cours des dernières années, à Efficacité Nouveau-Brunswick, à certains programmes de lutte contre les changements climatiques du gouvernement fédéral, principalement le Programme d'écologisation des pâtes et papiers, ainsi qu'à d'autres programmes, nous avons investi un peu moins de 120 millions de dollars dans nos installations, et nous avons réduit nos émissions de gaz à effet de serre de plus de 50 %. Nous avons en fait atteint aujourd'hui dans nos installations ce que nous croyons être les objectifs en matière de changements climatiques pour au moins 2030. Nous avons été en mesure d'y arriver en mettant l'accent sur l'efficacité énergétique, le changement de carburant, les réductions d'énergie interne, etc.
Nous avons en fait annoncé que l'investissement dans notre usine de pâte à papier était l'un des plus importants investissements dans une usine de pâtes et papiers en Amérique du Nord depuis 1993. Nous avons investi 550 millions de dollars dans notre usine de pâte à papier. Nous sommes rendus à mi-chemin de cette modernisation qui se concentre principalement sur l'efficacité de la production et l'efficacité énergétique. Aujourd'hui, le carburant qui alimente notre usine provient à environ 90 % de la biomasse de nos installations. En fait, nous pouvons, au besoin, devenir entièrement autonomes et ne plus dépendre de fournisseurs externes pour l'énergie.
En ce qui a trait à la valeur ajoutée, J.D. Irving est aujourd'hui la société de produits forestiers la plus intégrée en Amérique du Nord. Il y a quelques années, la majorité des sociétés de produits forestiers ont commencé à délaisser certaines activités et à mettre l'accent sur des secteurs très précis. À J.D. Irving, nous touchons à tout en commençant par les semis. Nous avons une pépinière pour les semis. Nous cultivons nos semis et nous nous occupons de la récolte dans nos régions boisées. Nos entreprises de transport acheminent le bois à nos installations de transformation primaire, dont Jerome a parlé. Il y a la scierie et le transport des produits de première transformation, puis nous passons à l'étape de la seconde transformation, soit notre usine de pâtes et papiers et notre production de matériel d'emballage. Enfin, cela se rend jusqu'à la fabrication de mouchoirs qui continue d'utiliser les résidus tout au long de la chaîne.
C'est par cette entremise que nous générons tout le... ou nous commençons par un semis dans la forêt. Nous avons environ 9 500 employés, voire près de 10 000 employés. Si nous prenons la valeur en dollar du bois d'un arbre sur pied, lorsque l'arbre arrive à la fin de la chaîne et que nous produisons des mouchoirs, l'ensemble du processus nous a permis de multiplier par 35 la valeur de ce bois, et c'est majoritairement fait au Nouveau-Brunswick. Pour ce qui est de la valeur ajoutée, nous croyons certainement que le Canada doit continuer d'investir et s'intéresser de nouveau et encore plus au secteur des produits secondaires et tertiaires à valeur ajoutée. La fabrication de mouchoirs et de boîtes a majoritairement été transférée aux États-Unis. À notre avis, pour vraiment créer de la valeur à partir des arbres sur pied, il faut conserver tous ces emplois au Canada et utiliser l'ensemble de la chaîne de valeur.
En ce qui a trait aux occasions d'affaires pour stimuler l'essor du secteur des produits forestiers, le premier produit que nous aimerions vous présenter ici aujourd'hui est le bois lamellé-croisé qui a principalement été conçu en Europe au cours des 15 dernières années. Pour ceux qui ne connaissent peut-être pas ce produit, vous pouvez voir une photo en bas à droite de la diapositive. Le bois lamellé-croisé vous permet de prendre de plus petits morceaux de bois d'oeuvre, comme des deux par quatre ou des deux par six, et de les laminer ou de les coller ensemble en exerçant une pression pour créer des panneaux d'une très grande résistance structurale. Ce produit vous permet de construire un bâtiment comme celui que vous pouvez voir ici sur la diapositive. Il s'agit d'un immeuble de 18 étages. C'est un exemple d'un édifice construit à Vancouver l'an dernier.
Cela nous permet d'utiliser plus de bois dans les grands immeubles et d'utiliser moins de béton et d'acier. D'un point de vue environnemental, cela nous permet aussi d'accroître la séquestration du dioxyde de carbone. Si vous prenez cet exemple en particulier, huit fois moins de carbone a été nécessaire pour construire cet immeuble à Vancouver que si de l'acier ou du béton avait été utilisé.
Par ailleurs, si nous pouvions reproduire ce projet au Canada, cela réduirait aussi notre dépendance envers le marché américain concernant le bois d'oeuvre de dimensions normales. Nous considérons comme intéressant d'investir du temps dans ce produit et faire de la recherche pour accroître la consommation de bois d'oeuvre dans le marché intérieur canadien.
Le dernier élément est le chauffage urbain en Europe. Pratiquement toutes les usines de pâte à papier fournissent la majorité de l'énergie nécessaire pour le chauffage dans les municipalités autour d'elles. Ce principe n'a pas réussi à s'implanter au Canada. Cela nécessiterait une grande intervention du gouvernement fédéral, parce que c'est un programme d'infrastructure très dispendieux. Selon nous, c'est une occasion qui apporterait vraiment une valeur ajoutée aux fabricants primaires et tout le long de la chaîne de valeur.
J'aimerais très brièvement vous parler des deux dernières occasions que nous voyons ici. La première est la croissance dans le marché des granulés de bois. La demande pour les granulés de bois industriels et résidentiels a augmenté de 2 à 5 % par année depuis cinq ans. Nous voyons cela comme une belle occasion. Enfin, l'utilisation accrue de l'automatisation pour les composantes d'armoires de cuisine en bois franc serait un secteur qui pourrait connaître une croissance considérable au Canada.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier Jerome et Mark de leur présence devant le Comité aujourd'hui. Je vous remercie d'avoir pris le temps de témoigner, et nous sommes heureux de vous accueillir au Comité.
Pour débuter, vous avez grandement insisté durant votre exposé sur la diversité des produits de seconde transformation que vous offrez, ce qui montre bien la structure de J.D. Irving et son intégration verticale.
Si nous convenons qu'actuellement au Nouveau-Brunswick la majorité de notre bois est exporté vers les États-Unis, selon vous, quelles seront les perspectives d'avenir pour les produits de seconde transformation fabriqués au Nouveau-Brunswick, que ce soit la poursuite des exportations vers le marché américain ou l'exportation vers d'autres marchés étrangers ou notre propre marché intérieur?
En ce qui concerne la croissance ailleurs qu'aux États-Unis, étant donné que nous sommes dans l'Est canadien, nos options sont limitées. Si nous prenons l'exemple de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, nous avons assisté à une forte croissance dans les marchés chinois et japonais depuis cinq ans. Nous avons exploré ce marché, et nous le faisons chaque année. Malheureusement, en raison de notre situation géographique, c'est un peu plus difficile.
L'Europe est encore une option, mais les pays scandinaves ont réussi au fil des ans à stimuler la croissance de leur secteur des produits forestiers. Bref, le marché européen est très concurrentiel. Pour cette raison, nous continuons naturellement de croire que les États-Unis sont encore notre meilleur marché en raison de sa proximité.
Croyez-vous que les panneaux de bois lamellé-croisé, comme ce que vous nous avez montré, seront un produit pour lequel il est possible de nous attendre à une croissance dans le marché immobilier américain?
Je le crois. Je crois que cette croissance a déjà débuté. Il y a déjà des exemples dans divers endroits et surtout sur la côte ouest. Si vous allez en Oregon ou dans l'État de Washington, vous pouvez voir des exemples semblables à l'immeuble que nous vous avons montré à Vancouver. Je crois que c'est une tendance qui connaîtra un essor d'ici 5 à 10 ans. J'espère voir la même tendance au Canada.
Vous avez parlé de la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre que JDI a entreprise au cours des dernières années. Comment croyez-vous que cela contribue à votre avantage concurrentiel à titre de producteur secondaire, étant donné que vous êtes en mesure d'en tirer une valeur ajoutée et d'aller voir les détaillants et d'autres intervenants de l'industrie pour le dire que c'est ce que vous faites et que vous le faites d'une manière qui reconnaît l'occasion que présente une réduction globale des émissions de gaz à effet de serre?
C'est une question que nos clients posent de plus en plus. Nous avons un partenariat à long terme avec Home Depot USA. Nous lui envoyons chaque année notre rapport sur la durabilité. Notre partenaire aime voir cette information, parce qu'il aime être partenaire d'entreprises écoresponsables.
Cela fait partie de notre stratégie. À mon avis, si nous voulons continuer d'établir des partenariats à long terme avec de grandes sociétés, nous devons le faire.
Le chauffage urbain m'a toujours fasciné, mais nous avons décidé de délaisser le chauffage urbain en Amérique du Nord, tandis que les pays européens continuent d'investir dans le chauffage urbain et d'aller dans cette direction. Quel rôle croyez-vous que les gouvernements provinciaux et fédéral pourraient jouer en vue de contribuer à faire progresser les discussions à ce sujet et de nous aider à voir cela comme une occasion? Vous avez absolument raison; c'est une occasion formidable, en particulier dans les régions où se trouve une importante usine de pâtes et papiers qui a déjà de la vapeur excédentaire.
Il y a quelques années, nous avons examiné la question avec la Ville de Saint John. Une usine de pâte à papier de notre taille a suffisamment de chaleur résiduaire pour alimenter pratiquement chaque édifice résidentiel et commercial du centre-ville. Chaque collectivité scandinave qui a une usine de pâte à papier a des concepts bien développés pour le chauffage urbain. Le problème, c'est qu'il faut d'énormes investissements pour mettre au point et lancer un tel projet et que cela nécessite généralement un certain intermédiaire indépendant entre l'exploitant de l'usine de pâte à papier et le distributeur. C'est généralement ainsi que cela fonctionne.
Chaque fois que nous avons discuté avec une administration municipale de cette possibilité, l'argent était le problème. Lorsque l'équipement est enfoui dans le sol, c'est l'un des domaines où les investissements deviennent seulement rentables à très long terme. Si le gouvernement fédéral veut vraiment s'y mettre, il devra tout d'abord établir une stratégie et devra investir dans l'infrastructure pour aider les municipalités à emboîter le pas.
Merci.
Ma dernière question porte sur la diversité de vos produits de seconde transformation; vous fabriquez de tout: des couches, du papier cannelé, des clôtures de bois de cèdre, des montants de bois, des armoires de cuisine. Vous avez des produits très diversifiés. Si vous convenez que l'Amérique du Nord est votre principal marché, selon vous, lequel parmi tous vos produits a la meilleure possibilité de croissance?
Dans le secteur des pâtes et papier, le papier pour les arts graphiques est au point mort, mais la demande de pâte à papier augmente de 3 à 5 % par année. Le secteur de l'emballage croît de 4 à 5 % par année — c'est ce que j'appelle l'« effet Amazon ». C'est très bien. La majeure partie de la croissance dans le secteur de l'emballage se fait par l'intermédiaire de produits recyclés, mais toutes les fois qu'ils recyclent, ils ont besoin d'une bonne fibre vierge, et ce sont les forêts boréales qui fournissent les meilleures fibres pour ces usages. Alors, le secteur de l'emballage est en croissance et il continue de croître à un très bon rythme. Les produits dits de papiers minces sont aussi en croissance. Le rythme de consommation de toutes les économies en développement du Moyen-Orient à l'Asie est en deçà du dixième de ce qu'il est habituellement en Amérique du Nord, et les revenus disponibles sont en augmentation dans ces régions. C'est un marché gigantesque qui n'a pas encore été exploité.
Je crois sincèrement que l'emballage, la pâte de papier et les papiers minces ont un avenir extrêmement prometteur.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'avoir pris de leur temps pour être ici.
Rick, étant donné qu'une partie de l'étude que nous amorçons est d'examiner l'incidence que les produits de la chaîne d'approvisionnement secondaire ont sur l'emploi et l'économie, et compte tenu des résultats des plus inquiétants que vous avez rapportés concernant vos sociétés membres et leurs employés relativement aux négociations de l'accord sur le bois d'oeuvre, j'aimerais clarifier certaines choses. Vous avez parlé d'une rencontre avec la ministre des Affaires étrangères. Pourriez-vous nous dire quel était le contexte de cette rencontre? Savez-vous si on vous a réunis en tant que représentants de l'industrie parce qu'il y avait ou était sur le point d'y avoir une proposition d'accord sur la table, et que la ministre espérait savoir ce que vous en pensiez? Y a-t-il des choses que vous pouvez nous dire là-dessus?
Oui. Je ne crois pas que ce soit quelque chose de privé, car plusieurs personnes nous en ont parlé à l'extérieur de cette salle. La ministre Freeland s'est vu proposer un marché par Wilbur Ross, des États-Unis, et elle a convoqué 10 ou 12 d'entre nous pour nous demander notre avis et pour savoir si nous croyions que le Canada devrait accepter ce marché. Selon elle, il y avait un marché ou une offre sur la table.
Étant donné que le ministère a reconnu plus tôt la double imposition pour votre partie du secteur, et compte tenu des conséquences que cette double imposition pourrait selon vous avoir sur les emplois, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les répercussions que cette double imposition aura sur l'emploi et les débouchés? Pouvez-vous nous décrire ce qu'il arrivera à vos sociétés membres et à leurs employés si ce scénario se matérialise?
Malheureusement, la réponse à cela est très courte: s'il y a double imposition, nous fermons. Il n'y a pas d'alternative à cela. Les gens nous disent souvent: « Mais vous ne faites pas seulement affaire avec les États-Unis. Il vous reste le marché canadien. » Nous faisons rentrer le bois et nous le coupons; nous le débitons et nous le transformons en toutes sortes de produits. Une partie reste au Canada et une partie prend le chemin des États-Unis. Si nous perdons le marché américain, nous perdons aussi la possibilité d'écouler nos produits sur le marché canadien. Ce n'est pas comme si nous n'allions perdre qu'une partie de notre clientèle; c'est la vaste majorité qui va y passer.
C'est quelque chose d'un peu émotionnel pour moi, mais je ne saurais trop insister sur l'effet délétère qu'une double imposition aura sur nos entreprises. Certaines d'entre elles sont plus diversifiées que d'autres et elles ont plusieurs cordes à leur arc. Certaines sont carrément des entreprises familiales avec 20 ou 30 employés en toile de fond. C'est leur seul secteur d'activité: transformer le bois afin de le vendre aux États-Unis. Celles-là devront mettre la clé sous la porte, point à la ligne.
Je trouve cela très préoccupant, alors je m'attends à ce que cet enjeu devienne hautement prioritaire pour tous les membres de notre comité. Je vous signale que j'ai demandé au ministère s'il avait fait une analyse économique de l'ampleur potentielle des pertes d'emplois dans le secteur de la deuxième transformation, et qu'il a répondu qu'il allait nous revenir là-dessus. Je n'ai aucun doute que nous allons faire le suivi nécessaire à cet égard.
Afin que nous ayons une meilleure idée de la deuxième transformation dans le contexte de la chaîne d'approvisionnement secondaire pour les produits forestiers, pouvez-vous nous donner plus d'exemples au sujet de la création d'emplois dans votre secteur et faire des comparaisons avec le nombre d'emplois dans d'autres secteurs de la foresterie au Canada? J'aimerais en savoir plus à ce sujet.
C'est une bonne question. Comme je l'ai dit, les scieries sont très automatisées. Les entreprises ont investi énormément d'argent. Irving affirme qu'il est parmi les meilleurs pour ce qu'il a été en mesure de faire, et ce qu'il a été en mesure de faire est formidable. L'entreprise produit beaucoup avec un très petit nombre d'employés. Dans les scieries les plus modernes, vous ne trouverez guère plus que sept employés. Tout est informatisé. Dans notre usine, chaque pièce est touchée par une personne, alors il y a une corrélation directe entre notre volume de production et le nombre de personnes que nous employons.
Je ne sais pas s'il y a un chiffre précis. Le chiffre qui circule est fonction du volume. Nous avons sept emplois pour chaque emploi qu'a une scierie. Nous pourrions discuter afin de déterminer s'il s'agit de six emplois ou de sept emplois, mais c'est dans ces eaux-là. Autrement dit, sur une base annuelle, un camion plein de bois occupera une personne dans une scierie et environ sept à l'usine de deuxième transformation.
Merci de cette information.
Dans l'éventualité où le gouvernement fédéral arrivait à négocier un nouvel accord sur le bois d'oeuvre, que recommanderiez-vous au nom de vos sociétés membres quant à la façon de répartir équitablement ce quota dans l'ensemble de l'industrie? Avez-vous des idées là-dessus? C'est quelque chose que vous avez évoqué dans votre déclaration liminaire.
Oui, je l'ai effectivement mentionné. Je crois que tout cela revient à... Si nous nous retrouvons avec un bassin limité — je veux dire, si c'est ce que l'accord prévoit, mais nous ne sommes vraiment fixés à ce propos —, je pense que le gouvernement devra faire très attention à répartir la ressource de manière à optimiser les retombées économiques, la création d'emplois, etc.
Au fil des ans, il y a eu toutes sortes de façons de répartir les quotas. Dans le cas qui nous intéresse, je crois que nous devrions mettre tout cela de côté et chercher à savoir où se créent tous les emplois. Si une entreprise, que ce soit nous ou Irving, peut prouver que c'est elle qui crée le plus d'emplois, alors elle devrait obtenir la part du lion.
Pouvez-vous informer les membres du Comité de ce que vous considérez comme étant les principaux problèmes qui plombent la compétitivité du Canada dans votre secteur? Pourriez-vous en outre parler de la concurrence internationale et des principaux marchés auxquels vous souhaiteriez accéder?
Vous avez également mentionné l'importance du rôle que jouent les cadres stratégiques et fiscaux pour vos opérations. Si vous pensez à certains éléments stratégiques ou réglementaires sur lesquels le gouvernement pourrait se pencher, je vous invite à nous donner des exemples.
C'est une très bonne question. Les entreprises de deuxième transformation sont probablement les membres les plus dynamiques de la communauté des produits forestiers. Nous sommes constamment en train d'acheter les restes des autres pour les transformer en quelque chose. La situation change sans arrêt. Donnez-nous des règles du jeu équitables et nous saurons nous montrer très innovateurs et très inventifs. Nous pouvons soutenir la concurrence.
Le problème que nous avons depuis les 20 dernières années en raison du conflit sur le bois d'oeuvre, c'est qu'il y a toutes sortes d'interférences provenant de facteurs qui ne sont pas normaux. Il y a les mois où vous pouvez expédier vos produits et les mois où vous ne le pouvez pas; il se pourrait qu'il y ait une entente conçue par le gouvernement aux termes de laquelle une scierie sera encouragée à expédier aux États-Unis plutôt qu'au Canada. Nous sommes passés par là, et c'est ce qui est très difficile. Si vous vous enlevez de notre chemin, que vous nous dites en quoi consisteront les règles pour les 10 prochaines années et que vous supprimez toutes les barrières commerciales non naturelles, nous allons très bien nous tirer d'affaire. Nous sommes très inventifs et nous allons créer beaucoup d'emplois.
Merci à vous tous d'être venus témoigner. C'est très intéressant.
Monsieur Pelletier, je crois que c'est à vous que nous devons le bois lamellé-croisé. C'est quelque chose qui a un intérêt particulier pour moi, parce que dans ma ville natale de Penticton, il y a une entreprise, la Structurlam, qui travaille beaucoup avec ce type de produit et qui fabrique des poutres en lamellé-collé. L'entreprise a eu un grand rôle à jouer dans la construction de l'immeuble Brock Commons que vous avez utilisé comme exemple. Je voudrais simplement savoir quels sont les plans d'Irving à cet égard et comment nous pourrions populariser cette partie de l'industrie dans le reste du Canada. Je présume que vous utilisez le produit du bois épinette-pin-sapin pour fabriquer ces panneaux ou ces poutres en bois lamellé-croisé. Fabriquez-vous des panneaux ou des poutres? Quoi qu'il en soit, qu'utilisez-vous comme matériau?
Pour l'instant, les usines de J.D. Irving ne produisent aucun bois lamellé-collé. Nous croyons que c'est un moyen d'augmenter la consommation de bois au Canada et, à long terme, d'alléger notre dépendance à l'égard du marché américain. Nous sommes en train d'examiner différentes technologies pour produire du bois lamellé-collé. Je crois que les Européens sont les meneurs mondiaux dans ce marché. Nous avons visité des usines afin de déterminer quelle serait la meilleure technologie pour produire du bois lamellé-collé à partir des essences que l'on trouve dans l'est du Canada.
Nous ne produisons rien pour l'instant. Nous sommes en train d'examiner cela très sérieusement. Nous croyons que c'est un débouché formidable pour les producteurs de bois d'oeuvre du Canada.
Oui, il y a quelques producteurs, dont une entreprise d'une certaine importance qui s'appelle Nordic, et qui est située dans le nord du Québec. Nordic produit des poutres laminées. Je ne pense pas qu'ils ont produit du bois lamellé-collé, mais c'est un produit similaire. C'est probablement le producteur le plus important de l'est du Canada pour ce type de produit.
D'accord.
Monsieur Mosher, vous avez formulé certaines observations sur la santé de l'industrie des pâtes et papiers, du moins, en ce qui concerne vos usines. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la santé de cette industrie dans le contexte plus large du Canada? Les deux dernières décennies semblent avoir été plutôt difficiles. Pouvez-vous nous parler de ceux qui se débrouillent bien et de ceux qui sont en difficulté? J'ai l'impression que c'est une partie très importante de la chaîne de valeur. L'usine de pâtes et papiers de ma circonscription utilise beaucoup de matériaux que les scieries produisent et pour lesquels il n'y a pas d'autres marchés.
Eh bien, c'est un problème. Les usines de pâtes et papiers consomment en général une énorme portion des résidus des scieries ou des usines de copeaux. L'industrie des pâtes et papiers est en déclin. La consommation nord-américaine de papier a connu son apogée en 1999 ou 2000, mais elle périclite rapidement depuis. À l'heure actuelle, la demande est à 45 ou 50 % de ce qu'elle était en 2000, voire moins. Dans certains marchés, comme celui du papier journal ordinaire, la consommation est à moins du quart de ce qu'elle était, et les gens ont eu à trouver d'autres façons d'arriver.
J.D. Irving s'intéresse aux conversions vers d'autres classes qui gagnent en popularité. À vrai dire, ce n'est qu'une question de temps avant que beaucoup d'entreprises papetières au Canada se retrouvent confrontées au même problème: se réorienter ou fermer. Il y a cependant un certain nombre de marchés qui sont en expansion. Le marché des papiers minces en est un. Les usines peuvent par conséquent être réorientées en ce sens, ou pour les produits d'emballage, qui semblent eux aussi connaître une croissance importante au moment où l'on se parle. Voilà certaines des possibilités que nous envisageons.
Il y a des débouchés pour les papiers minces; vous avez parlé de l'Asie. Doit-on craindre une concurrence des zones tropicales de l'Asie, où la fibre pousse très rapidement et où l'activité en matière de pâtes et papiers semble s'intensifier?
Absolument. D'ailleurs, ce sur quoi notre entreprise se concentre, c'est que dans n'importe quelle catégorie de papiers minces, environ 60 % des fibres proviennent de bois dur. Il serait donc question de l'Indonésie et de certaines régions de la Chine. Le Brésil est probablement le principal fournisseur à l'heure actuelle. Personne au Canada ne sera capable de concurrencer cela. Là-bas, un arbre pousse de 60 pieds en 6 ans, alors qu'ici, il lui faut 60 ans pour arriver au même résultat. Nous avons en quelque sorte renoncé à cela, sauf que, pour donner de la résistance à la plupart des papiers minces — et éviter qu'ils ne se déchirent lors de leur utilisation —, il faut les fibres robustes des essences du Nord. Cela correspond à environ 40 % de la consommation de papiers minces, laquelle s'accroît de 5 à 7 % par année. Je suis convaincu qu'il y aura une demande importante pour les fibres issues d'essences scandinaves et canadiennes. Il importe cependant d'avoir les bons outils.
D'accord.
Monsieur Ekstein, pouvez-vous m'expliquer cette affaire de double imposition et décrire les problèmes auxquels vous faites face? Je ne m'y retrouve pas tout à fait. Pouvez-vous me l'expliquer en une minute?
Oui, je vais vous l'expliquer en une minute. Je vais tâcher d'y aller rondement et simplement.
Les scieries paient le droit, la taxe, sur leur bois lorsqu'elles l'expédient aux États-Unis. À titre d'exemple, disons que nous achetons le bois à 300 $. À cela, nous ajoutons 200 $ en main-d'oeuvre, puis les pertes, puis les profits, etc. Ensuite, nous devons payer le droit pour lui faire traverser la frontière.
Donc, au lieu de payer le droit sur 300 $, comme c'était le cas auparavant, nous le payons désormais sur 600 $, c'est-à-dire sur la valeur qu'a le produit lorsqu'il traverse la frontière, ce qui est le double de ce que nous payons pour le bois. Voilà ce qui est en train de nous tuer à l'heure actuelle.
Dans le dernier accord, il y avait quelque chose qui était... Les droits s'appliquaient à ce que l'on appelait « la valeur de premier sciage », donc aux 300 $ que nous avions payé pour le bois à son arrivée à l'usine.
J'ai une courte question à vous poser.
Dans votre dernière réponse, vous avez parlé de l'« accord », mais il n'y a pas d'accord. Voulez-vous dire en l'absence d'un accord, comme c'est le cas présentement? Parlez-vous des produits du bois que vous faites venir pour une seconde transformation? Et de quel endroit ce bois provient-il?
Nous apportons dans nos usines de l’Ontario du bois provenant des quatre coins du pays. Compte tenu de ce scénario, si nous ne concluons pas une entente, nos produits feront l’objet de droits de douane. Il nous faudra alors les contester. Si les droits de douane sont les mêmes…
Il y a des droits de douane en ce moment, mais ils sont moins élevés qu’ils l’étaient il y a quatre mois. Il y a quatre mois, ils représentaient pour nous l’équivalent d’environ 50 % et, maintenant, ils représentent l’équivalent d’environ 14 %. Les Américains changent constamment les choses. Selon l’annonce qui sera faite aujourd’hui aux États-Unis, nous nous attendons — et l'attente est la seule chose que nous pouvons faire — à ce que les droits de douane augmentent de nouveau. Auparavant, ils étaient fondés sur la valeur de premier sciage.
D’accord. Je comprends. Merci.
Jerome, si le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial pouvait faire une seule chose pour venir en aide aux entreprises de seconde transformation ou à l’industrie en général, non seulement au Nouveau-Brunswick, mais aussi dans le Canada atlantique, pourriez-vous me dire très brièvement ce que serait cette chose? Je crois comprendre que vous exercez également des activités en Nouvelle-Écosse. Quel est le plus grand service que le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial pourrait vous rendre, ou à quoi ces gouvernements devraient-ils travailler collectivement afin de tâcher d’aider l’industrie?
Je pense qu’outre l’accord sur le bois d’œuvre, ce qui menace le plus notre industrie de nos jours, c’est la tordeuse des bourgeons de l’épinette. Lorsque l’on constate le nombre d’acres de forêt détruits dans la province du Québec, cela semble irréel. Nous étudions le problème très sérieusement au Nouveau-Brunswick. Nous prenons des mesures préventives en pulvérisant des insecticides dans certaines zones afin d’arrêter les ravageurs, mais nous devons consacrer plus de temps, d’énergie et d’argent à la lutte contre la tordeuse des bourgeons de l’épinette. Sinon, nous pourrions assister à la destruction de notre ressource naturelle dans très peu de temps.
Cette initiative mixte de lutte contre la tordeuse des bourgeons de l’épinette découle-t-elle d’une démarche publique-privée ou d’une démarche pangouvernementale?
Le secteur privé travaille avec le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Je sais qu’une pétition a été organisée il y a quelques semaines afin de demander au gouvernement fédéral de participer plus activement à l’initiative. Nous n’avons pas eu de nouvelles du gouvernement, mais c’est un projet qui compte beaucoup pour nous.
Je remercie tous nos invités d’être venus témoigner aujourd’hui.
J’aimerais simplement poser quelques questions de base à propos de la formation professionnelle et des mesures de ce genre.
J’adresse ma prochaine question aux représentants de J.D. Irving. Pouvez-vous m’aider à comprendre comment les emplois liés à la seconde transformation se comparent à ceux liés à la première transformation?
Eh bien, à plusieurs points de vue. J’ai lu qu’un plus grand nombre d’emplois existaient dans le marché de la seconde transformation que dans le marché de la première transformation. J’aimerais simplement que vous me donniez une idée des perspectives d’emploi dans votre industrie. Ensuite, je vous interrogerai à propos de la formation professionnelle.
Je peux peut-être parler au nom des scieries. Dans notre division, nous exploitons des scieries, mais nous gérons également deux installations à valeur ajoutée. Lorsque nous comparons les salaires de leurs employés, nous constatons qu’ils sont très semblables. Les travailleurs de la plupart de nos usines sont syndiqués. Les salaires des ouvriers, des opérateurs ou des conducteurs de chargeuse sont essentiellement les mêmes, qu’ils travaillent dans les scieries, dans les entreprises de première transformation ou dans les entreprises de seconde transformation.
En ce qui concerne les emplois créés, oui, il est vrai que la seconde transformation nécessite plus de main-d’œuvre. C’est une bonne chose à court terme. Toutefois, à mon humble avis, si nous souhaitons que le secteur de seconde transformation des produits forestiers demeure concurrentiel, nous devons, à long terme, automatiser nos usines de seconde transformation afin d’accroître leur productivité et de réduire leurs coûts. Sinon, nous aurons beaucoup de mal à exporter nos produits parce que nos coûts de production liée à la main-d’œuvre seront trop élevés.
D’accord.
J’ai une question d'un genre différent à vous poser. J’ai examiné certains des efforts que J. D. Irving a déployés par rapport à Pathways to Shipbuilding. J’ai trouvé cela vraiment intéressant parce qu’il s’agit d’un excellent programme qui favorise la collaboration avec des partenaires des Premières Nations, de l’industrie et du gouvernement. Je me demande si l’industrie forestière met en oeuvre des programmes qui aident les jeunes et, en particulier, les collectivités autochtones. Je crois que vous faites quelque chose de bien, et vous pourriez peut-être nous dire si vous menez des initiatives semblables dans le secteur forestier.
Dans le secteur forestier, nous examinons — de façon très active — la possibilité de recruter du personnel à l’étranger, par exemple. Nous travaillons avec différentes organisations provinciales et internationales afin de déterminer si nous pouvons recruter des opérateurs qualifiés pour les exploitations forestières de notre division des terres boisées.
Je vais poser une question semblable à l’ALRO. Je vous remercie de votre témoignage. En ce qui concerne, entre autres, le perfectionnement des compétences, entreprenez-vous des initiatives de ce genre, ou le groupe d’entreprises que vous représentez le font-elles?
Oui. Je vais parler en particulier de notre entreprise. Nous croyons très sincèrement que nous devons investir dans nos employés. Nos effectifs comprennent des formateurs à temps plein, et nous croyons qu’il convient d’offrir des promotions à l’interne. Notre président actuel a commencé à travailler dans notre entreprise il y a 30 ans. Il empilait du bois dans notre usine de seconde transformation. Cela illustre clairement ce qui peut survenir. La formation revêt une énorme importance à nos yeux.
J’aimerais formuler une observation à propos d’une des remarques que le représentant de J.D. Irving a exprimées. En ce qui concerne la valeur ajoutée, leur entreprise est probablement la mieux intégrée de haut en bas au Canada, et leurs dirigeants ont beaucoup de mérite à cet égard. Mais il y a certains produits — comme celui-ci — que nous achetons auprès d’eux également… à un certain point, ils doivent passer leurs produits aux suivants. Ils sont l’exemple parfait, si je peux me permettre d’utiliser cette expression, d’un système à valeur ajoutée complètement intégré.
Si vous pouviez m’accorder encore deux secondes, j’aimerais mentionner une dernière chose. Il y a des années, je parlais au président de l’organisation mère de l’industrie du bois de sciage aux États-Unis. Il a déclaré que nous, les entreprises de seconde transformation, étions comme les victimes innocentes d’une fusillade au volant. Il m’a dit: « Rick, vous n’êtes pas les cibles que nous cherchons à atteindre. Nous ciblons les scieries, et vous n’êtes que des dommages collatéraux accidentels ».
Aujourd’hui, vous m’avez entendu parler avec passion des emplois. Mais, si le ministre Carr a vraiment l’intention de demander aux gens assis à cette table de l’aider à déterminer ce qui doit être fait dans l’éventualité d’une entente de contingentement, je vous prie de nous aider à ne pas jouer de nouveau le rôle de victimes innocentes.
Je crois que le Comité souhaite prendre connaissance des débouchés qui existent dans cette industrie secondaire à valeur ajoutée, afin que nous puissions réfléchir…
Malheureusement, il ne nous reste plus aucun temps. Nous allons devoir nous arrêter ici.
Je remercie infiniment les intervenants des deux groupes de s’être joints à nous aujourd’hui. Nous vous savons gré de vos commentaires.
Nous allons suspendre nos travaux afin de permettre aux témoins de quitter la salle, puis nous passerons quelques minutes à discuter de certains travaux du Comité. La séance est suspendue.
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