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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 23 mars 2022

[Enregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à la 10e séance du Comité permanent du commerce international.
     La séance d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 24 novembre 2021.
    Les mesures entourant le port du masque dans l'enceinte de la Chambre des communes ont été prolongées jusqu'au 23 juin 2022. Veuillez noter que le port du masque est obligatoire dans les salles de comité, sauf lorsque les membres sont à leur place pendant les délibérations. Il est toutefois fortement recommandé de le porter même dans ce cas.
    Toutes les personnes qui se trouvent à l'intérieur de la salle de comité doivent suivre les pratiques exemplaires pour maintenir une bonne hygiène des mains en utilisant le désinfectant à mains fourni sur place.
     À titre de présidente, je veillerai au respect de ces mesures, et je vous remercie de votre collaboration.
     Afin d'assurer le bon déroulement de la séance, je vous prie de noter que vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais et le français. Si l'interprétation est interrompue, veuillez m'en informer immédiatement, et nous veillerons à ce qu'elle soit rétablie avant de poursuivre.
     Lorsque vous avez la parole, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous n'avez pas la parole, votre micro doit être éteint.
     Finalement, je vous rappelle que toutes les interventions doivent être adressées à la présidence.
    Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur la relation entre le Canada et les États-Unis et ses impacts sur les secteurs des véhicules électriques, du bois d'œuvre et autres.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 janvier, le Comité poursuit son étude sur la relation et ses impacts. Aujourd'hui, la séance porte sur le secteur du bois d'œuvre.
    Nous accueillons par vidéoconférence Mark Warner, avocat, à Pilot Law LLP, à titre personnel; Jason Krips, président-directeur général de l'Alberta Forest Products Association; Susan Yurkovich, présidente-directrice générale, de la British Columbia Council of Forest Industries; Derek Nighbor, président-directeur général, de l'Association des produits forestiers du Canada; Jean-François Samray, président-directeur général, et Michel Vincent, directeur, Économie et marchés, tous les deux du Conseil de l'industrie forestière du Québec, et Sylvain Labbé, président-directeur général, du Bureau de promotion des produits du bois du Québec.
    Je vous souhaite tous la bienvenue, et je m'excuse du retard.
    Nous allons commencer par la déclaration liminaire de M. Warner pour un maximum de cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je vous remercie, madame la présidente, de l'invitation à venir témoigner aujourd'hui.
    Comme vous le savez déjà, je m'appelle Mark Warner. Je suis avocat spécialisé en droit du commerce canadien et américain. La question du bois d'œuvre m'intéresse depuis longtemps, et c'était le cas avant même d'être étudiant en droit. J'ai travaillé à l'Université de Toronto pour le regretté professeur Alan Rugman. J'ai travaillé comme avocat aux États-Unis dans divers cabinets qui représentaient le Canada, puis comme directeur du service juridique au ministère du Développement économique, de la Création d'emplois et du Commerce de l'Ontario. J'ai examiné la question sous de multiples angles, comme professeur d'économie, comme avocat aux États-Unis et au Canada, et comme personne qui paie les factures des avocats aux États-Unis et qui est payé par les Canadiens aux États-Unis pour parler du bois d'œuvre.
     Ce qui est intéressant à propos de ce dossier, c'est qu'on en parle depuis toujours. J'examine la question depuis de très nombreuses années et j'ai l'impression que ce n'est pas le genre de différend commercial qui se prête à un règlement permanent, car il s'agit au fond d'une bataille de conception de la politique commerciale et du droit commercial. Les Américains regardent du côté des pratiques du Canada concernant le bois d'œuvre, le bois de sciage et la gestion forestière et se disent qu'il s'agit d'une économie non marchande. On peut ne pas être d'accord avec cela. Les Canadiens, quant à eux, regardent du côté des accords commerciaux qu'ils ont négociés avec les Américains et se disent qu'ils disposent de divers mécanismes de règlement des différends, que ce soit sous l'ancien ALENA — maintenant l'ACEUM — ou l'OMC, et qu'ils peuvent remporter de petites victoires techniques, basées sur des questions juridiques ou comptables, et ensuite, recommencer à se battre.
     Je ne vois pas vraiment de fin à cela, à moins que nous trouvions un moyen de faire en sorte que les producteurs américains s'avouent vaincus. Je ne crois pas qu'ils vont le faire, même si nous avons les meilleurs arguments du monde sur le coût des maisons, etc.
     Le système commercial américain — qui n'est pas différent du nôtre, car nous avons essentiellement la même base — est un système qui repose beaucoup plus sur les intérêts des producteurs que sur ceux des consommateurs. Aux États-Unis, de plus, les producteurs ont divers processus à leur disposition. Au Canada, nous considérons toujours cela comme le début d'un processus politique. Du point de vue américain, il s'agit simplement pour les producteurs de suivre la loi. Leur règle de droit le veut ainsi.
     Si on pense à la situation actuelle dans le dossier du bois d'œuvre, la question fondamentale pour le Canada semble être de savoir si cela nous convient. Voulons-nous continuer à avoir des différends que nous réglons par la voie des mécanismes internationaux dont nous disposons, ou voulons-nous trouver un moyen de négocier une sorte d'accès au marché ou de règles afin d'acheter un peu la paix? Je comprends qu'en raison de la récente situation économique des deux côtés de la frontière, ce n'est pas ce que nous voulons.
     La question que je me pose est de savoir où le dossier du bois d'œuvre s'inscrit dans le cadre plus large des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Je pense que si nous voulons un règlement politique, plutôt que juridique, il faudra compter sur la bonne volonté, dans une certaine mesure, des différents acteurs gouvernementaux aux États-Unis. Je me demande si nous n'avons pas été un peu plus belliqueux dans notre politique commerciale. C'est une attitude en partie compréhensible, en raison du dernier occupant de la Maison Blanche, mais cela s'est poursuivi sous le nouveau président Biden. J'ai l'impression que nous aimons jouer des coudes. Du moins, je pense que c'est la perception à Washington.
    La question est donc de savoir s'il est possible d'envisager une vaste entente, dans le cadre de laquelle nous pourrions dire aux Américains: « Si vous nous aidez avec le bois d'œuvre et Keystone », ou quoi que ce soit d'autre, « nous tenterons de régler des problèmes prioritaires pour vous concernant les chaînes d'approvisionnement mondiales et les minéraux critiques. »
(1550)
    Il faudra sans doute ne pas se contenter de parler de l'approvisionnement en matériaux critiques, mais en fait trouver des façons de faire comme les Australiens. Comment peut‑on amener les minéraux critiques sur le marché rapidement? C'est ce que je pense.
     J'ajouterais que, bien que le différend entre le Canada et les États-Unis sur le bois d'œuvre remonte à très loin, l'autre élément qui, je crois, est moins bien compris au Canada est que nous faisons maintenant partie d'un débat beaucoup plus large entre les États-Unis et la Chine. Comme nous le montre tout ce qui se passe dans le monde actuellement, c'est un enjeu qui est au centre de la politique étrangère et de la politique économique étrangère des Américains.
     Il se trouve que les questions au cœur du différend — le dumping, etc. — sont aussi au cœur du différend des États-Unis avec la Chine en ce qui concerne l'utilisation des droits antidumping et des droits compensateurs.
     Ce sont des pistes de réflexion. Aussi difficile que cela ait été de traiter cette question au cours des 35 dernières années, il est encore plus difficile aujourd'hui pour les Américains de trouver une solution en droit commercial qui soit particulière au Canada sans impliquer leurs différends plus larges en droit commercial avec la Chine.
    Je vous remercie, monsieur Warner. Je m'excuse de devoir vous interrompre. Je vous remercie de votre exposé.
    Monsieur Krips, vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
    Je vous remercie, et je remercie aussi tous les membres du Comité, de votre invitation. Je suis heureux d'avoir la possibilité de témoigner.
     Comme il a été mentionné, je m'appelle Jason Krips. Je suis le président-directeur général de l'Alberta Forest Products Association.
     J'aimerais tout d'abord souligner que je m'adresse à vous depuis Edmonton, qui est située sur le territoire traditionnel des peuples du Traité no 6, ainsi que sur les terres ancestrales des Métis. De plus, notre industrie mène des activités sur les territoires traditionnels des peuples des traités no 7 et no 8. Il est important de souligner le partenariat solide et riche que nous avons avec les communautés autochtones, les Premières Nations et les Métis dans le secteur forestier.
     En ce qui concerne le bois d'œuvre, nous avons pu constater que l'industrie des produits forestiers en Alberta contribue à la résilience de nos communautés. L'industrie est présente dans plus de 70 communautés dans la province. Nous avons une économie qui connaît des hauts et des bas — c'est bien connu au Canada en raison des prix de l'énergie —, mais dans les communautés où l'industrie forestière est aussi présente, la situation est nettement différente. Ces communautés sont mieux protégées grâce aux emplois bien rémunérés et stables que cette industrie leur offre. En fait, notre industrie génère plus de 40 000 emplois, dont un grand nombre dans les régions rurales, et des retombées économiques de 8 milliards de dollars dans la province.
    Le problème avec les sanctions commerciales prises par le gouvernement des États-Unis, c'est qu'elles sapent cette stabilité économique. Elles créent de l'incertitude et drainent l'argent de nos communautés.
    Il n'y a pas que l'Alberta ou le Canada qui souffre des répercussions de ces sanctions. C'est le cas également des communautés aux États-Unis. Des centaines de milliers d'emplois dans ce pays dépendent du transport et de la vente de nos produits et de leur utilisation dans la construction. Des millions d'Américains ont besoin que les prix des logements soient abordables pour pouvoir se loger.
     Ironiquement, ce sont donc les citoyens américains qui subissent le plus les contrecoups des sanctions imposées par le département du Commerce des États-Unis. Nous vivons actuellement une période de forte inflation — que nous n'avons pas connue depuis des décennies. Les coûts, tant pour l'industrie que pour les ménages, augmentent à un rythme insoutenable.
     Le conflit sur le bois d'œuvre exacerbe ce phénomène en étouffant la concurrence, en entravant les chaînes d'approvisionnement et en contribuant à des flambées massives du prix du bois.
     Pour nos membres, les tarifs douaniers ajoutent des coûts importants qui sont transférés aux consommateurs lorsque les marchés sont dynamiques. Lorsque le marché s'affaiblit, ils contribuent notamment à la réduction des activités des usines et à des pertes d'emplois.
     J'ai exposé le problème et nous voulons maintenant parler des solutions. Comme M. Warner l'a mentionné, il n'y a malheureusement pas de solution miracle ni d'argument que nous pouvons présenter au département du Commerce des États-Unis et à l'industrie américaine qui les amènerait à déposer les armes dans ce conflit.
    C'est pourquoi nous croyons qu'il demeure utile pour le Canada de recourir aux mécanismes de contestations judiciaires comme les processus d'appel de l'OMC et de l'ACEUM, dont M. Warner a parlé, pour défendre nos droits.
     Nous estimons également qu'il est utile d'informer les consommateurs américains de ce que ce différend leur coûte.
     Enfin, nous croyons qu'il est important de continuer à parler de nos forêts. Notre héritage unique de terres publiques dans une grande partie du pays témoigne du fait que nos normes très élevées de gestion des forêts sont cohérentes. Notre industrie est en mesure de récolter d'une manière qui n'entraîne aucune déforestation, car la récolte sur les terres publiques s'accompagne d'une obligation de régénération par des activités comme le reboisement. En fait, en 2021, l'industrie forestière de l'Alberta a planté plus de 100 millions d'arbres. Cela représente trois arbres pour chaque arbre récolté, et nous en sommes très fiers.
    Parler de nos méthodes contribuera à promouvoir l'accès aux marchés du monde entier et donnera aux consommateurs d'ici l'assurance que le produit qu'ils achètent est fabriqué conformément aux normes les plus rigoureuses au monde.
    Comme M. Warner l'a mentionné, il n'y a pas de solution miracle. Nous devons poursuivre nos efforts juridiques et politiques. En fin de compte, tant qu'une coalition américaine ne viendra pas s'asseoir volontairement à la table, je crois que la bataille va durer un certain temps.
     Madame la présidente, je vous remercie beaucoup de votre temps.
(1555)
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Krips. Vous terminez juste à temps.
    Madame Yurkovich, vous avez cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je vous remercie, madame la présidente, et mesdames et messieurs les membres du Comité.
    En tant que présidente du British-Columbia Council of Forest Industries et du Lumber Trade Council, j'ai le plaisir de représenter la majorité des fabricants de produits forestiers de la Colombie-Britannique.
     Ces entreprises, grandes et petites, représentent environ 50 % des exportations de bois d'œuvre et de pâte à papier de notre pays, y compris la moitié des exportations de bois d'œuvre aux États-Unis.
     Je me joins à vous depuis les territoires traditionnels du peuple salish du littoral, et nous sommes ravis de votre intérêt pour notre industrie et cette question.
    Tout comme M. Krips, j'aimerais vous parler un peu de l'industrie ici. En Colombie-Britannique, l'industrie forestière a des retombées économiques sans pareil dans l'économie provinciale. Elle contribue plus de 13 milliards de dollars au PIB et environ 4 milliards de dollars par année en taxes et en droits qui servent à financer les soins de santé, l'éducation et les services sociaux sur lesquels nous comptons tous. Il importe de mentionner également que l'industrie génère environ 100 000 emplois directs, indirects et induits en Colombie-Britannique, dans les centres urbains et ruraux.
     Les produits forestiers représentent environ un tiers de nos exportations, 21 % de tout le trafic passant par le port de Vancouver et 11 % du trafic ferroviaire dans l'Ouest canadien.
     Pour nous, en tant qu'industrie d'exportation dans une petite économie ouverte, des relations commerciales solides et des marchés diversifiés sont essentiels au succès de notre industrie. Bien que les États-Unis aient été la principale destination des produits forestiers de la Colombie-Britannique, au cours des 20 dernières années, en collaboration avec le gouvernement, nous avons étendu nos marchés à l'Asie et réduit notre dépendance à l'égard des États-Unis, où nous continuons de faire face à ces droits de douane injustifiés, ce qui est bien sûr l'objet de notre discussion aujourd'hui.
     Comme il a été mentionné, il s'agit d'un différend qui ne date pas d'hier. Il dure depuis plus de 40 ans. Nous sommes au milieu de ce que nous appelons affectueusement le « cinquième différend ». Les « troisième » et « quatrième » différends se sont conclus en faveur du Canada, des tribunaux internationaux neutres ayant forcé le département du Commerce des États-Unis à annuler ses conclusions non fondées sur les subventions.
     Nous sommes convaincus que nous l'emporterons à nouveau, car le bois d'œuvre canadien n'est pas subventionné, et les allégations des producteurs protectionnistes américains sont sans fondement, mais jusqu'à ce qu'elle soit résolue, cette bataille interminable continue d'exiger qu'on y consacre énormément de temps, d'énergie et de ressources humaines et financières. Ce qui est vraiment frustrant et difficile à comprendre pour moi, et pour beaucoup d'autres, c'est le fait que les États-Unis ont désespérément besoin du bois d'œuvre canadien.
     En 2021, la demande américaine de bois d'œuvre était de 51,6 milliards de pieds-planche. Les producteurs américains ne pouvaient en fournir que 35,6 milliards, ce qui laissait un déficit de 16 milliards, dont 14 milliards étaient comblés par le Canada.
     La demande américaine de bois d'œuvre, comme il a été mentionné, continue d'être forte, et ce, parce que les familles américaines veulent réparer et rénover leurs maisons et, dans certains cas, en construire de nouvelles. Nous avons assisté à une demande record au cours des dernières années, car les gens passent plus de temps à la maison en raison de la pandémie, et les mises en chantier augmentent après des années de ralentissement à la suite de l'effondrement du marché en 2008.
     Nous nous attendons à ce que cette tendance se poursuive, et ce, parce qu'un groupe démographique important entre maintenant dans la tranche d'âge de formation des ménages. Il s'agit d'un groupe qui, fait intéressant, est plus important que les baby-boomers, et qui cherche à acheter ou à construire sa première maison. Ce faisant, comme M. Krips l'a mentionné, ils vont être aux prises avec des pressions inflationnistes, en grande partie causées par les perturbations de la chaîne d'approvisionnement dues à la pandémie. Ces pressions sont exacerbées par les tarifs protectionnistes qui font grimper les prix et rendent le rêve de devenir propriétaire hors de portée pour certains.
     Plus important encore, comme il a été mentionné, ce différend crée une volatilité et une incertitude énormes au Canada, ce qui se répercute sur nos travailleurs, nos familles et les communautés qui dépendent de l'exportation de bois d'œuvre.
     À l'heure actuelle, nos marchés sont solides, mais il s'agit d'une activité cyclique. Nous devons être prêts pour le prochain cycle baissier et pour les occasions qui s'offriront à nous. Nous devons investir et innover, explorer de nouveaux marchés, former la prochaine génération de travailleurs, utiliser des technologies qui améliorent la gestion durable des forêts et investir dans des partenariats avec les nations autochtones de notre pays.
     Cela nécessite des ressources et des capitaux très importants. Malheureusement, à l'heure actuelle, plus de 7 milliards de dollars des entreprises canadiennes dorment dans des dépôts en espèces. C'est de l'argent qui pourrait être utilisé pour investir dans les usines, l'équipement, les travailleurs et les communautés.
     En regardant vers l'avenir, nous voyons une occasion incroyable de contribuer à répondre à la demande croissante de produits forestiers, qui sont des matériaux de choix, renouvelables et à faible teneur en carbone. Qu'il s'agisse de charpentes en bois massif ou d'emballages à base de fibres, ces produits contribuent à la lutte contre les changements climatiques tout en soutenant l'emploi ici, au pays. Nous pouvons contribuer à cet approvisionnement à partir de forêts gérées durablement. Nous pouvons aider à répondre à la demande, et nous pouvons même aider l'administration Biden à mettre en œuvre son programme d'infrastructure verte de 1 billion de dollars.
     Comment pouvons-nous faire cela?
    Nous pouvons procéder de quelques façons. Premièrement, nous devons régler ce problème. Il faut que l'industrie et le gouvernement américains s'assoient à la table pour négocier un règlement durable de ce différend.
(1600)
    Dans le contexte des tensions géopolitiques qui s'exercent et d'un protectionnisme américain qui continue de sévir, nous ne voyons pas encore cette ouverture, comme M. Krips vient de le mentionner, mais la vigueur de la demande et les problèmes constants d'approvisionnement, qui risquent d'être exacerbés par la guerre en Ukraine, nous permettent d'entrevoir des possibilités de dialogue au cours des semaines et des mois à venir. D'ici à ce qu'une entente intervienne, nous devrons néanmoins continuer à défendre énergiquement notre industrie.
    Deuxièmement, une approche de type Équipe Canada est essentielle. C'est la manière dont nous procédons depuis des décennies. Peu importe le parti formant le gouvernement, les Canadiens ont toujours été bien servis par un front uni transcendant les allégeances politiques. Une telle étroite coopération, à la fois multipartite et intergouvernementale, est devenue possible parce que nous défendons une cause commune et parce que l'élimination des tarifs est bénéfique pour tout le monde. Nous nous réjouissons vraiment de voir la ministre Ng poursuivre avec son équipe les efforts déployés en ce sens par ses prédécesseurs.
    Troisièmement, une nation commerçante comme la nôtre a besoin d'accords commerciaux solides, efficaces et efficients et d'instances qui vont contribuer à faire en sorte que ces accords soient mis en oeuvre et respectés. Il faut notamment à ce titre assurer le maintien du mécanisme de règlement des différends de l'OMC, pouvoir compter sur un organe d'appel efficace, et disposer de mécanismes permettant de régler rapidement les différends.
    D'accord. Vous n'avez plus de temps.
    Est‑ce que je peux conclure avec un dernier élément?
    Oui, je vous en prie.
    Nous devons enfin, dans une optique tournée vers l'avenir, poursuivre nos efforts de diversification de nos marchés et de nos produits. La Colombie-Britannique a été à l'avant-garde du développement de marchés à l'étranger, et ce, en partenariat avec Ressources naturelles Canada. Je dois dire à ce sujet que le Programme de développement des marchés illustre on ne peut mieux la façon de travailler en partenariat pour obtenir des résultats concrets. C'est toutefois un exercice de longue haleine, car il faut des années pour faire connaître nos produits…
    Merci beaucoup, madame Yurkovich.
    Peut-être pourrez-vous nous faire part de vos autres observations en répondant aux questions des membres du Comité.
    Monsieur Nighbor, vous avez maintenant la parole.
    Je m'appelle Derek Nighbor et je suis président-directeur général de l'Association des produits forestiers du Canada. Je vous parle aujourd'hui depuis notre administration centrale à Ottawa, sur les territoires non cédés des Algonquins-Anishinabe.
    Le secteur canadien des produits forestiers, dont les revenus atteignent 76 milliards de dollars, exporte chaque année des produits canadiens issus de sources durables d'une valeur dépassant les 34 milliards de dollars. Nous sommes présents dans plus de 600 collectivités tributaires de la forêt et fournissons directement de l'emploi à un peu moins de 230 000 Canadiens.
    Je connais déjà un certain nombre de membres de votre comité. J'aperçois ainsi les députés Sheehan, Martel, Masse et Hoback qui savent très bien qui nous sommes, mais je dirais au bénéfice des autres que nous figurons parmi les chefs de file mondiaux grâce à notre approche de l'aménagement forestier durable qui nous permet de nous démarquer de bien des manières. J'ai eu le privilège d'être élu président du conseil regroupant nos homologues de 28 pays du monde, et je peux vous dire que notre utilisation des terres publiques est l'un des principaux éléments grâce auxquels nous nous distinguons. Plus de 90 % des terres faisant l'objet d'une exploitation forestière sont assujetties à des lois, des règlements et des politiques relevant des gouvernements provinciaux. L'exploitation de terres de la Couronne provinciale ne va pas sans son lot d'obligations et d'engagements d'importance. Il faut notamment s'en remettre à la science locale, consulter et mobiliser les communautés autochtones et allochtones, garantir l'intégration des valeurs locales et gérer des dizaines de valeurs cruciales allant de la conservation de la biodiversité jusqu'à l'atténuation des risques d'inondation et d'incendie, en passant par la protection des oiseaux, des mammifères et des poissons qui habitent la forêt. Les plans d'aménagement de l'assise territoriale sont établis suivant des horizons de 100 à 200 ans. C'est le genre de cycle de planification que l'on retrouve dans bien peu d'industries. Ces plans d'aménagement des terres publiques doivent être approuvés par les gouvernements provinciaux.
    Notre secteur souscrit dans une large mesure aux priorités du gouvernement fédéral et propose des solutions clé en main, comme mes deux collègues l'ont mentionné, pour contribuer à la décarbonisation de notre économie, favoriser une conservation efficace des ressources, créer et maintenir des emplois bien rémunérés, tout particulièrement dans les régions rurales et nordiques du Canada, et faire progresser la réconciliation avec les peuples autochtones.
    Parlons justement des Autochtones et du rôle qu'ils ont à jouer. Les communautés autochtones sont essentielles à la prospérité et à la survie de notre secteur. Non seulement les jeunes Autochtones représentent-ils pour nous un bassin important de talent pour l'avenir, mais les Autochtones contrôlent d'ores et déjà 10 % de l'approvisionnement en bois du Canada, une proportion qui s'accroît sans cesse. On voit par ailleurs se multiplier dans toutes les régions du pays les coentreprises, les ententes de congestion, les programmes d'emploi et les accords de partage des revenus avec les communautés autochtones, sans compter les quelque 12 000 travailleurs autochtones et 1 400 entreprises forestières appartenant à des Autochtones.
    Mme Yurkovich a évoqué tout à l'heure les perspectives associées à une économie carboneutre. Comme se plaisait à le dire Jim Carr lorsqu'il était ministre, la carboneutralité de l'économie canadienne doit absolument passer par notre foresterie et nos produits forestiers. Nous offrons ainsi tout au long de la chaîne de valeur des solutions qui vont de l'atténuation des risques de feux de forêt générateurs de carbone jusqu'à la conception de produits du bois capables de piéger le carbone pour les générations à venir, en passant par l'utilisation de résidus comme la sciure de bois, l'écorce et les copeaux pour produire notamment du papier, des biocarburants et des bioplastiques, ou pour alimenter des réseaux électriques et des installations de chauffage centralisé.
    Notre pays est particulièrement privilégié. Nous recensons plus de 9 000 arbres pour chaque Canadien, et notre engagement à replanter plus d'arbres que nous en récoltons — par exemple dans un ratio de 3:1 en Alberta, comme l'indiquait M. Krips — assure la pérennité des forêts canadiennes.
    Il a beaucoup été question aujourd'hui de la problématique du bois d'œuvre. Je vais vous entretenir d'un autre enjeu commercial touchant nos secteurs du bois d'œuvre et des pâtes et papiers. J'estime important que votre comité et le gouvernement du Canada comprennent bien la nature de cet enjeu ainsi que ses répercussions possibles. Je parle ici de projets de loi discriminatoires à l'encontre du secteur forestier canadien dont sont actuellement saisies les législatures des États de la Californie et de New York. Ces projets de loi visent à limiter les exportations de produits canadiens via les mécanismes d'approvisionnement de ces États. Lorsque j'ai accédé à ce poste il y a quelques années, je ne m'attendais pas à devoir me rendre à Sacramento et à Albany pour défendre les intérêts de notre industrie, mais c'est exactement là où nous en sommes. Comme je l'ai indiqué, l'adoption de ces projets de loi serait catastrophique pour les familles et les communautés canadiennes tributaires de la forêt en raison du précédent ainsi créé et des efforts qui seraient déployés par certains militants pour influencer nos clients aux États-Unis de même que les gouvernements d'autres États.
    Permettez-moi d'ajouter quelques précisions à ce sujet. Au cours de la dernière année, nous avons collaboré avec l'industrie, les syndicats et nos partenaires autochtones pour nous opposer à deux projets de loi américains. Le premier a été déposé en Californie par le député Kalra. Gavin Newsom, gouverneur de la Californie, a exercé son droit de veto, seulement pour voir le même projet de loi être présenté de nouveau il y a quelques semaines. Le second est une initiative de la sénatrice Liz Krueger de l'État de New York. Lorsque nous avons vu ces deux projets de loi se pointer l'un à la suite de l'autre avec à peu près le même libellé, nous savions qu'ils étaient le fruit d'un effort concerté, et il est devenu évident à nos yeux que le Natural Resources Defense Council, un organisme anti-canadien basé aux États-Unis, a largement contribué à leur rédaction.
(1605)
    Je tenais à vous mettre en garde contre ces projets de loi. Nous sommes vivement préoccupés par leurs répercussions possibles sur notre main-d'œuvre et notre capacité à exploiter nos ressources. Leur caractère discriminatoire a été vigoureusement dénoncé par nos partenaires de l'industrie et des milieux syndicaux, et nous avons absolument besoin de l'appui du gouvernement fédéral pour veiller à ce que nos échanges commerciaux avec nos voisins du Sud ne soient pas entravés par de nouveaux problèmes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup pour toutes ces précisions. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Monsieur Samray, vous avez cinq minutes.
(1610)

[Français]

    Mesdames et messieurs les députés, je m'appelle Jean‑François Samray et je suis le président-directeur général du Conseil de l'industrie forestière du Québec, ou CIFQ. Je suis accompagné aujourd'hui de notre économiste en chef, M. Michel Vincent.
    Le CIFQ est le principal porte-parole de l'industrie forestière du Québec. Le CIFQ représente les intérêts des entreprises de sciage de résineux et de feuillus, de déroulage, de pâtes et papiers, de cartons et de panneaux ainsi que des fabricants de bois d'ingénierie du Québec.
    Travaillant auprès des instances gouvernementales, des autres acteurs du secteur forestier et du grand public, le CIFQ met en valeur la contribution de ses membres au développement socioéconomique, à l'utilisation responsable des ressources naturelles, à l'aménagement durable des forêts et à la qualité écologique des produits.
    En ce qui concerne le sujet à l'étude aujourd'hui, le CIFQ représente et appuie ses membres dans les différents litiges en cours et fournit au gouvernement des approches pour assurer l'équité du commerce du bois d'œuvre résineux avec les États‑Unis.
    La contribution du bois à l'économie canadienne et québécoise est incroyable. Il est important de rappeler aux membres du Comité que les forêts et l'industrie canadienne jouent un rôle important dans l'économie. Le secteur forestier fournit des emplois directs à plus de 230 000 Canadiens provenant de 600 collectivités, et plus de 12 000 travailleurs de l'industrie sont des membres des Premières Nations. Le secteur forestier génère des revenus de près de 80 milliards de dollars par année. Au Québec, l'industrie forestière soutient plus de 140 000 emplois et génère des ventes de plus de 20 milliards de dollars.
    Chef de file mondial dans la production de nombreux produits forestiers, le Canada a, en 2019, réalisé des exportations de produits forestiers d'une valeur de 33 milliards de dollars, dont environ 10 milliards de dollars provenaient du Québec. Ce chiffre est en forte progression depuis lors, compte tenu de la forte demande pour le bois dans le secteur de la construction et de la rénovation.
    Au-delà de l'aspect économique, la forêt est aussi un puissant outil dans la lutte contre les changements climatiques. Agissant comme un gigantesque réservoir pour capter et séquestrer le CO2, elle nous permet de lutter contre le réchauffement climatique. Le gouvernement du Canada, par le truchement de ses politiques d'achat, a un rôle clé à jouer afin d'accélérer l'utilisation du bois comme matériau.
    En ce qui a trait au dossier à l'étude aujourd'hui, les exportations de bois d'œuvre vers les États‑Unis sont extrêmement importantes pour le Canada et constituent une partie stratégique des activités de notre industrie. Les différends commerciaux remontent à 1981, soit bien avant l'accord de libre-échange de 1994.
    Cédant aux demandes protectionnistes des propriétaires forestiers privés et des scieries américaines, le département américain du Commerce a méthodiquement déposé des plaintes contre le Canada lorsque les ententes commerciales sur le bois d'œuvre conclues au fil des décennies arrivaient à échéance. À ce jour, les tribunaux internationaux n'ont jamais conclu que le Canada versait des subventions à son industrie ni qu'il causait des dommages au marché américain. La récente et volumineuse décision unanime de l'Organisation mondiale du commerce d'août 2020 figure dans cette liste.
    Toutefois, force est de constater que ces mesures commerciales unilatérales américaines font actuellement mal aux citoyens américains, car elles ont pour effet d'augmenter le prix des produits qu'ils achètent. Elles font également mal aux consommateurs canadiens, qui doivent également composer avec des hausses de prix, celui-ci étant fixé sur une base continentale. Ces taxes sévissent dans un marché où la demande pour le logement et pour le bois d'œuvre est en surchauffe et où les producteurs américains peinent à répondre à 70 % de la demande locale.
    Alors, pourquoi ces mesures existent-elles? Selon ce que répond la coalition américaine dans les documents légaux, c'est pour permettre aux producteurs américains d'avoir un environnement économique propice aux investissements. Or, cette même coalition dit publiquement que ses membres n'ont pas l'intention de produire un pied de planche de plus pour répondre à la demande locale. Dans un tel contexte, comment une taxe peut-elle offrir un quelconque espoir aux consommateurs américains ou canadiens? La question se pose. La réalité est que ces droits imposés sur le bois d'œuvre canadien ne servent qu'à augmenter les profits réalisés par les producteurs de bois américains, point à la ligne. C'est ce que la National Association of Home Builders ne cesse de rappeler aux élus du Congrès.
    Ces mesures commerciales injustifiées relatives au bois résineux gonflent artificiellement son prix, ce qui alimente l'inflation de nombreux produits. En imposant des droits de douane sur les exportations canadiennes, le département américain du Commerce augmente le prix d'un morceau de deux-par-quatre de 1,20 $ en devise américaine, à l'heure actuelle. Les producteurs américains, qui ne paient pas ces droits, se contentent d'empocher cette majoration.
    L'administration américaine a beau parler de sa politique Made in America ou de son programme Build Back Better, sans le bois canadien, le secteur américain de la construction n'y arrivera pas. Sans la présence du bois canadien complètement exempt de mesures compensatoires, le président Biden ne pourra pas faire d'avancées en matière de lutte contre l'inflation.
    Les mesures de représailles à l'égard de l'économie russe appliquées par les pays occidentaux en rajoutent et auront pour effet de réduire les volumes de bois européens en Amérique du Nord. Une réduction de l'offre combinée à une demande forte poussera le prix de ce matériau de construction stratégique à la hausse. En cédant aux producteurs nationaux des États‑Unis, l'administration Biden rend les maisons moins abordables pour les Américains, alimente la hausse de l'inflation et tue tranquillement le rêve américain. Ce n'est pas ce que nous voulons pour nos voisins américains.
(1615)
    Le CIFQ et les autres associations canadiennes, comme Mme Yurkovich l'a dit, croient à une approche comme celle d'Équipe Canada. C'est la meilleure façon de régler ce différend avec les États‑Unis. L'industrie forestière ainsi que les provinces et les intervenants pertinents doivent être consultés au sujet du meilleur plan d'action pour mettre fin au différend avec notre premier partenaire commercial, les États‑Unis.
    Ensemble, nous devons dire à nos amis américains qu'il existe une meilleure approche pour le commerce du bois d'œuvre résineux. Nous devons aider l'administration américaine à repousser, petit à petit, le lobby du bois d'œuvre résineux, qui se retrouve dans quelques États...

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Samray. Je suis désolée, mais vous n'avez plus de temps.

[Français]

    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    À vous la parole, monsieur Labbé.

[Français]

    Bonjour. Je suis Sylvain Labbé, président-directeur général du Bureau de promotion des produits du bois du Québec, une association de manufacturiers qui s'occupe strictement du développement de l'exportation dans les secteurs du bois résineux et des feuillus, ainsi que dans trois autres secteurs de l'industrie.
    Je vais vous parler aujourd'hui de deux éléments qui touchent le bois d'œuvre. Tout d'abord, je vais vous expliquer les répercussions actuelles sur nos marchés causées par la guerre et les sanctions, ainsi que les répercussions que cela engendrera sur le marché américain. Par la suite, je vais vous proposer des solutions pour ce dossier.
    Vous avez tous lu les journaux: la Russie est en guerre contre l'Ukraine, et la Biélorussie est incluse avec la Russie. L'an dernier, la Russie et la Biélorussie représentaient ensemble un tiers des exportations mondiales de bois résineux, dont 50 % allaient vers la Chine et environ un tiers vers l'Europe. Tout cela s'est terminé lorsque les sanctions ont commencé. En fait, pour la Chine, il n'y a rien de changé. On a cependant analysé un peu les répercussions par groupes de marchés, par exemple l'Europe et l'Asie.
    L'Europe ne recevra plus les quelque 8 millions de mètres cubes qu'elle recevait de la Russie. Elle va donc rapatrier ce qu'elle exporte normalement aux États‑Unis, soit environ 4 millions de mètres cubes, et il va quand même y avoir un déficit européen, puisque la demande va être plus grande que l'offre.
    Quant à la Chine, on ne sait pas trop où en est son partenariat avec la Russie. En effet, la situation géopolitique est très floue. Cela dit, les Chinois vont probablement acheter le reste du bois russe. On ne sait pas à quel prix elle va l'acheter, mais il sera certainement beaucoup plus bas que la valeur marchande, et il va y avoir une période d'adaptation avant que cela arrive. Cela va réduire fortement notre compétitivité pour vendre notre bois en Chine. Nous allons donc rapatrier cela au Canada, où il y aura déjà un déficit, puisque nous allons perdre le bois de l'Europe, qui ne vendra plus de bois en Amérique du Nord.
    En fin de compte, nous allons nous retrouver avec une offre réduite d'environ 1,25 million de mètres cubes en Amérique du Nord par rapport à aujourd'hui, ce qui va exercer une pression à la hausse sur les prix dans la prochaine année, voire dans les quelques prochaines années. Cette hausse des prix sera encore plus importante que celle que nous vivons actuellement. Cela s'ajoute à la hausse du prix du pétrole et des maisons. Le coût de la vie va changer radicalement.
    L'autre question qu'on se pose pour l'avenir, c'est si la Russie va revenir dans le marché. Les Russes ont nationalisé les usines qui étaient possédées par des étrangers. Alors, je pense qu'il faudra attendre quelques dizaines d'années avant que quelqu'un réinvestisse dans les usines de bois de sciage en Russie.
    Nous vivons une période de crise et, en temps de crise, il y a deux éléments importants pour la population: la nourriture et le logement. Pour ce qui est de la nourriture, ce n'est pas un problème. Le logement, par contre, constitue actuellement un gros problème au Canada et aux États‑Unis. Il manque de logements partout, notamment de logements sociaux.
    Ma première recommandation est de rencontrer nos amis américains pour leur dire d'enlever immédiatement la taxe sur le bois d'œuvre. C'est le moment parfait pour le faire, étant donné la crise du prix des matières premières et du bois, qui va continuer à augmenter dans les prochains mois, et la crise du logement. Quand la maison est en feu, c'est le temps d'enlever la taxe sur l'eau et les pompiers, parce que cela n'aide personne. Alors, c'est le moment parfait pour négocier quelque chose, étant donné qu'il y aura un manque flagrant de bois dans les prochaines années.
    Par ailleurs, puisque nous vivons ce problème depuis 40 ans, nous devons absolument diversifier nos marchés, de manière à nous assurer de ne pas dépendre seulement du marché américain. C'est ma deuxième recommandation. Cela rejoint ce que Mme Yurkovich a mentionné tantôt. Pour ce faire, nous avons deux options: ou bien nous vendons notre produit de commodité, les planches de deux-par-quatre, ailleurs qu'aux États‑Unis, ou bien nous le transformons pour créer de la valeur, qu'il s'agisse de produits de structure ou de construction industrialisée de maisons.
    À court terme, c'est évident que l'exportation outre-mer, en Chine ou ailleurs, va être un peu difficile. Par contre, il faut absolument que nous gardions nos portes ouvertes, parce que cette situation de crise pourrait être complètement différente dans deux ans. Si Poutine partait, tout reprendrait et il faudrait reconstruire la Biélorussie. La situation pourrait avoir complètement changé. Le prix du baril de pétrole pourrait dépasser 150 $ et entraîner une récession qui changerait complètement la donne, aussi.
    Alors, nous ne pouvons pas dépendre strictement du marché américain. Il faut garder nos portes ouvertes.
    De plus, nous devons maintenir nos investissements actuels dans nos produits de deuxième transformation, faits à partir de nos deux-par-quatre, que nous vendrons certainement aux États‑Unis, à court terme, ou peut-être ailleurs. Lorsque nous transformons notre bois, nous en multiplions la valeur par quatre ou cinq, ce qui crée de la richesse au Canada.
(1620)
    Bien sûr, il faut aussi changer nos pratiques de construction, car notre système est un peu archaïque. La construction avec...

[Traduction]

    Je suis désolée, monsieur Labbé, mais c'est tout le temps que vous aviez.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Nous passons maintenant aux questions des membres du Comité.
    Monsieur Martel, vous avez six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les intervenants.
    Ma question s'adresse à M. Samray.
    Avant que nous parlions directement des défis liés à l'exportation aux États‑Unis, j'aimerais en savoir davantage sur la situation de l'industrie forestière au Canada. Plus particulièrement, j'aimerais savoir si la politique fédérale sur le caribou forestier est une préoccupation pour les membres du CIFQ.
    Il s'agit d'une très bonne question.
    Tout d'abord, comment se porte l'industrie forestière au Canada? Vous avez entendu mes collègues à ce sujet. Je crois que l'industrie va bien. Elle a connu des défis en Colombie‑Britannique lors des inondations, mais la situation devrait revenir à la normale, maintenant que la grève du CP a été évitée. La demande est forte et nous avons besoin de prévisibilité dans les années à venir pour réaliser des investissements qui nous préparent à être encore plus compétitifs. C'est fondamental.
    Comme M. Nighbor l'a mentionné, nous sommes dans une industrie où l'on prévoit un siècle d'avance. Au sujet des plantations d'arbres, M. Krips a mentionné qu'on plantait trois arbres pour chaque arbre récolté; on le fait pour le prochain siècle.
    Les industriels ont donc besoin d'une certaine prévisibilité pour les décennies à venir, et les discussions sur le caribou forestier ont une incidence sur cette prévisibilité. Dans l'industrie, tout le monde vous dira qu'il y a de l'espace pour des zones de conservation au Canada, mais il faudra également prévoir des zones d'intensification de la production. L'important, c'est de savoir où l'on placera les unes et où l'industrie pourra travailler pour créer les autres afin de produire des retombées économiques et de répondre aux besoins des Canadiens et des Américains. Je pense que c'est fondamental. Derrière toutes les discussions, il faut qu'il y ait de la place pour de la conservation, certes, mais il en faut aussi pour la production.
    Monsieur Samray, est-ce que le caribou forestier est une préoccupation pour vos membres?
    Il est évident que les membres sont préoccupés par ce qui se passe au sujet du caribou forestier. Plusieurs ont pris des mesures très proactives pour sortir de certaines zones, qu'il s'agisse de compensations ou d'autre chose. Il s'agit d'une réalité qu'ils vivent, en tant qu'entreprises ayant obtenu la certification FSC ou la norme SFI. Elles doivent prendre des mesures afin que la cohabitation soit la meilleure possible. Il est évident que cela est une préoccupation pour nous.
    Monsieur Samray, que faudra-t-il faire pour que les Canadiens paient moins cher leurs deux-par-quatre?
    Si nous allons de l'avant en limitant l'accès à la ressource pour protéger le caribou forestier, les prix vont nécessairement augmenter. S'agit-il d'un enjeu pour notre compétitivité à l'international?
    En fait, le bois se négocie sur le marché nord-américain. La taxe sur le bois d'œuvre imposée par les Américains influence le prix que paient les Canadiens. D'une part, il faudra donc trouver une solution au conflit du bois d'œuvre, si l'on veut voir une désinflation du prix du bois sur le continent. D'autre part, il faudra trouver des moyens d'augmenter l'offre pour les consommateurs. Je reviens donc à ce que je disais: il faudra prévoir des zones de conservation, même si on le fait déjà à certains endroits, mais aussi lancer à l'industrie le signal très clair que des zones seront réservées à la production durable, conformément à la façon dont l'industrie gère la foresterie. C'est fondamental.
(1625)
    Jusqu'à maintenant, de quelle façon et à quelle fréquence le gouvernement canadien a-t-il consulté le secteur forestier du Canada et les autres intervenants touchés au sujet du différend actuel sur le bois d'œuvre? Autrement dit, quelles sont les propositions et observations des intervenants?
    Je pourrais faire appel à mes collègues qui sont en poste depuis plus longtemps que moi. Cependant, je peux vous dire que, depuis mon entrée en poste il y a 18 mois, nous avons eu quelques rencontres de travail avec la ministre et son équipe pour commencer à réfléchir sur une approche comme celle d'Équipe Canada, que nous appuyons.
    Je sais que Mme Yurkovich et M. Nighbor sont là depuis longtemps. Ils souhaitent peut-être ajouter quelques commentaires.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Labbé.
    Comment le Canada pourrait-il soutenir davantage les exportations de produits forestiers? J'aimerais, si vous le pouvez, que vous nous donniez plus de détails sur les possibles marchés de diversification, dont vous avez parlé dans votre présentation.
    Il y a deux aspects. Le Programme de développement des marchés, un programme fédéral qui doit être renouvelé bientôt, comporte deux éléments clés pour la diversification: garder l'accès aux marchés à l'exportation et développer nos produits à valeur ajoutée aux États‑Unis ou ailleurs.
     Il faut maintenir ce programme, mais il faut aussi que chaque province y participe avec son propre système. Comme je l'ai dit, nous aurons deux années éprouvantes pour ce qui est des prix, et il sera difficile d'exporter nos produits, car nous aurons tout juste la production nécessaire pour répondre aux besoins du Canada et des États‑Unis. Cependant, tout cela va changer par la suite, alors il faut maintenir nos portes ouvertes. Il est donc essentiel de poursuivre ce programme.
    Merci, monsieur Labbé.
    Je crois que mon temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Labbé.
    C'est maintenant au tour de M. Virani pour les six prochaines minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à tous nos témoins pour ces renseignements très précieux nous permettant de faire le point sur la situation.
    Pour répondre à M. Martel, je peux informer le Comité que la ministre a participé à une table ronde avec les membres de l'industrie du bois d'œuvre pas plus tard que le 13 janvier dernier.
    J'ai une question pour Mme Yurkovich. Vous avez parlé de l'importance d'une approche de type Équipe Canada. C'est absolument nécessaire pour appuyer les efforts déployés par la ministre, de concert avec le premier ministre et le ministre Wilkinson, pour soulever cette question sur autant de tribunes que possible.
    C'est ce qu'a fait la ministre Ng à Washington en décembre alors qu'elle était accompagnée de certains députés de l'opposition faisant partie du Comité. Elle a également rencontré à cette occasion les représentants de la National Association of Homebuilders, cette association américaine des constructeurs d'habitation dont plusieurs témoins nous ont parlé.
    Leministre Wilkinson a aussi eu des échanges à ce sujet avec ses homologues provinciaux et territoriaux. Lors du Sommet des leaders nord-américains tenu en novembre, le premier ministre en a parlé directement avec Joe Biden.
    Voici donc ma question pour vous, madame Yurkovich. Les États-Unis semblent faire montre d'une certaine intransigeance quant à la possibilité de rouvrir ce dossier. Auriez-vous des solutions créatives à nous proposer pour leur faire comprendre à quel point il est primordial que l'on reprenne les négociations? À l'instar de la ministre Ng, nous estimons tous qu'une solution négociée servirait au mieux les intérêts du Canada.
    L'attitude des Américains peut effectivement être qualifiée entre autres d'intransigeante.
    Je me réjouis de voir le gouvernement soulever cet enjeu, comme l'ont fait ceux qui l'ont précédé, sans égard à leurs allégeances politiques. Je crois vraiment, comme certains collègues l'ont confirmé, qu'une approche de type Équipe Canada est la seule façon pour nous d'aller de l'avant. C'est actuellement ce que fait la ministre, et c'est vraiment crucial.
    Il y a un élément qui rend les choses particulièrement difficiles dans ce dossier. Lorsque le gouvernement du Canada négocie, notre industrie peut se retrouver liée par les engagements pris. Les choses sont différentes aux États-Unis. M. Warner a parlé du recours aux lois commerciales, et elles sont effectivement mises à contribution. Aux États-Unis, l'industrie n'hésite pas à se prévaloir des lois commerciales américaines à l'encontre de ses compétiteurs.
    Les choses se compliquent du fait que, même si l'on parvient à convaincre le gouvernement américain de négocier, il n'y a pas d'accord possible sans l'assentiment de l'industrie aux États-Unis, laquelle se caractérise par son protectionnisme. La situation est vraiment difficile parce que le régime en place exige que les entreprises concernées indiquent qu'elles ne subiront pas de préjudices. C'est ce qui est arrivé lorsque nous avons conclu le dernier accord en 2006. Il faut qu'une certaine proportion de ces entreprises affirment qu'elles ne seront pas lésées. L'industrie américaine ne jouit pas d'un droit de veto à proprement parler, mais elle peut bel et bien dans les faits imposer son veto, ce qui rend les choses très difficiles.
    Je suis consciente des efforts déployés par le gouvernement, dans la foulée de ceux qui l'ont précédé, pour soulever cet enjeu, et je m'en réjouis. Il y a certains éléments qui sont vraiment importants. Nous avons parlé d'abordabilité. Nous avons aussi parlé d'écoconstruction. Ce sont des questions cruciales pour le gouvernement du Canada et, il faut bien le dire, pour les gouvernements de tout le pays. Ces questions sont également importantes pour l'administration Biden et représentent autant de leviers dont nous pourrions nous servir.
    Les agissements des Américains font en sorte que certaines choses deviennent moins abordables, et leur industrie est laissée libre d'agir en ce sens.
(1630)
    Merci, madame Yurkovich. Je suis entièrement d'accord avec vous, surtout pour ce qui est des synergies entre les deux pays en matière d'infrastructures vertes et d'écoconstruction. Comme c'est une priorité de part et d'autre de la frontière, il devrait être possible de convaincre les Américains.
    Nous savons où nous en sommes, et nous n'ignorons pas que nous avons déjà eu recours à un certain nombre d'outils dans le cadre de divers mécanismes nous permettant de contester les décisions prises. Nous avons toujours eu gain de cause. Il faut parfois du temps pour obtenir une décision, et certains dossiers sont encore en instance. C'est actuellement le cas de trois de ceux dont l'OMC a été saisie. Il y a également trois litiges non réglés en application du chapitre 19 de l'ancien ALENA, et quatre autres en instance en vertu du chapitre 10 de l'ACEUM.
     Je sais que ce n'est pas la situation idéale et que nous préférerions qu'il n'y ait aucun litige, mais je garde à l'esprit qu'à l'époque où l'ALENA a dû être renégocié pour devenir l'ACEUM, nous avons entendu de nombreux intervenants en Chambre, y compris parmi l'opposition officielle de Sa Majesté, évoquer la possibilité de renoncer à des éléments comme l'imposition de mécanismes efficaces pour le règlement des différends. On constate maintenant à quel point un tel mécanisme a un rôle important à jouer, car il n’y a pas moins de quatre différends à régler en vertu du chapitre 10 de l'ACEUM.
    Peut-être pourrais‑je poser cette question à M. Krips. Pouvez-vous nous dire où nous en serions selon vous si aucun mécanisme de règlement des différends n'était prévu dans l'ACEUM pour nous permettre de régler certains de ces litiges en instance?
    Il ne fait aucun doute que nous croyons sans réserve en l'utilité des mécanismes de règlement des différends qui ont été mis en place. Je pense qu'il importe surtout de continuer à encourager les deux parties à désigner des membres au sein des groupes spéciaux qui sont constitués. Nous voulons nous assurer que ces groupes sont utilisés à bon escient et il faut pour ce faire que les désignations se poursuivent de telle sorte également que ce travail puisse éventuellement être accompli avec une plus grande célérité.
    Je conviens donc tout à fait avec vous que ce mécanisme de règlement est un outil essentiel dans la gamme de ceux dont nous disposons, autant en vertu de l'ALENA que maintenant avec l'ACEUM, pour inciter les parties à reprendre les négociations.
    Merci.
    Je vais peut-être profiter du peu de temps qu'il me reste pour poser une question à M. Nighbor.
    Vous avez traité de la valeur économique totale de l'industrie. Vous avez aussi parlé des Autochtones qui travaillent et investissent dans ce secteur et des entreprises qui leur appartiennent. Je sais que nous finançons le secteur du bois d'oeuvre à hauteur d'environ 251 millions de dollars sur une période de trois ans, y compris 12,6 millions de dollars dans le cadre de l'Initiative de foresterie autochtone.
    Est‑ce que des mesures semblables vous facilitent les choses dans les efforts que vous déployez afin de faire progresser la réconciliation?
    Très certainement. Comme il se doit, ces fonds vont directement aux communautés et aux entreprises autochtones en question. Nous espérons que l'Initiative de foresterie autochtone sera reconduite dans le prochain budget. J'estime qu'elle s'inscrit dans une gamme de mesures de soutien très utiles pour notre secteur.
    Comme je considère le tout dans une perspective nationale, je peux voir que les choses bougent dans toutes les provinces. Il y a une autre réalité qu'il est essentiel de bien cerner selon moi. Il faut absolument que nos entreprises qui travaillent sur le terrain respectent les volontés et les valeurs des communautés autochtones locales, car certaines veulent planter des arbres, d'autres désirent prendre en charge la cour à bois, certaines souhaitent simplement un partage des revenus et d'autres encore misent sur un programme d'emploi de grande envergure.
    Il faut d'abord et avant tout comprendre qu'il n'existe pas de solution unique et qu'il faut plutôt s'en remettre à la discrétion des différentes communautés locales. C'est d'ailleurs à ce niveau que les discussions doivent être tenues et que les décisions doivent être prises.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Savard-Tremblay pour une période de six minutes.

[Français]

    J'aimerais saluer l'ensemble de mes collègues et remercier les témoins de leur présence.
    Monsieur Samray, vous nous avez bien expliqué le potentiel écologique de la forêt en elle-même, pour ce qui est du captage de carbone, notamment. Ce n'est plus un secret. D'ailleurs, on dit souvent que l'Amazonie est le poumon de la planète, pour cette même raison.
    Pourriez-vous nous parler aussi du potentiel écologique du bois comme matériau de construction?
    Je vous demanderais de répondre assez brièvement, parce que j'aurai d'autres questions pour vous par la suite.
(1635)
    Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, dans ses derniers rapports, nous dit qu'il faudra planter plus d'arbres et cultiver davantage la forêt de façon durable, deux choses que nous faisons déjà au Canada, et qu'il faudra utiliser beaucoup plus d'arbres et de produits forestiers dans le secteur de la construction. Chaque mètre cube de bois emprisonne une tonne de GES. C'est vraiment un matériau important. Nous en avons au Canada. Le bois dans le secteur de la construction est un incontournable pour atteindre nos cibles.
    Je vous remercie de cette précision. C'est donc un matériau écologique. Il est évident que, lorsqu'on parle d'arbres, on parle d'oxygène. Des études démontrent même qu'il y a plus de bonheur dans les quartiers où il y a plus d'arbres. Tout est dans tout, comme on dit chez nous.
    J'aimerais aussi connaître vos commentaires sur le fait que l'aide au secteur pétrolier se chiffre à plusieurs milliards de dollars, tandis que la forêt reçoit une aide d'à peine quelques millions de dollars.
    Encore une fois, je vous demanderais de répondre rapidement, s'il vous plaît.
    Je ne veux pas parler pour le secteur pétrolier. Ce que mes collègues mentionnent, c'est que des programmes sont essentiels à la modernisation de l'industrie pour en assurer la compétitivité.
    Dans le cas, par exemple, de la conversion du secteur des pâtes et papiers afin de trouver de nouveaux produits pour lutter contre le plastique à usage unique, il y a le programme Investissements dans la transformation de l'industrie forestière, ou ITIF. Ce programme a permis des investissements de 50 millions de dollars sur deux ans. Toutefois, il aurait fallu non pas 50 millions de dollars, mais plutôt 500 millions de dollars, voire 1 milliard de dollars, ou même plus, étant donné l'importante demande de l'industrie. De nouveaux produits doivent être mis au point pour répondre à la demande. Un programme d'une telle ampleur permettrait au Canada de devenir un chef de file en la matière.
    Nous avons le bois, mais il manque maintenant des investissements pour faciliter la conversion. Comme M. Labbé et Mme Yurkovich l'ont mentionné, les programmes en lien avec l'exportation sont également essentiels.
    Je vous remercie de cette autre précision.
    J'ai une autre brève question à vous poser, et je vous demanderais d'y répondre par oui ou non.
    Est-ce vrai que, dans le régime forestier québécois, le régime des prix fixés par vente aux enchères, où le prix est fixé par le marché, a bel et bien été pensé et modifié précisément pour être conforme aux accords commerciaux?
    Oui. Le jugement de l'OMC a reconnu que c'était tout à fait conforme.
    Tout à l'heure, mon collègue le secrétaire parlementaire abordait la possibilité de renégocier un jour l'ALENA. Croyez-vous que nous devrions inscrire cette spécificité dans cet accord?
    Si c'est la seule chose qui manque pour en venir à une entente, je pense que les industriels québécois sont prêts à discuter. Au lieu d'avoir un régime dans un système commercial où il y a des taxes et un accès restreint aux marchés, l'industrie préfère avoir un accord qui permet le libre commerce des matériaux.
    Récemment, il y a eu une levée des tarifs dans d'autres secteurs. C'était le cas pour certaines productions étrangères qui exportaient aux États‑Unis. Ce n'est donc pas impossible que les tarifs soient levés de notre côté aussi.
    Généralement, au bout du compte, les tribunaux commerciaux donnent tort aux États‑Unis. Cela finit cependant par coûter cher, car, pendant tout le temps que dure le litige, il y a des pertes d'emploi et de revenus.
    Finalement, il faut qu'il y ait un dialogue.
    Ai-je bien résumé vos propos d'aujourd'hui?
    D'un côté, il faut qu'il y ait un dialogue, comme M. Warner et Mme Yurkovich l'ont mentionné. De l'autre, la coalition américaine a un droit de veto quant à la décision définitive. Chose certaine, l'administration américaine, si elle le désire, peut réduire de façon considérable le taux de taxation sur le bois. Il n'y a rien qui l'oblige à fixer ce taux à 18, 22 ou 33 %. Elle pourrait tout aussi bien le fixer à 0,5 ou 1 %. Il y a évidemment une part du travail qui doit être faite par le bureau du président américain et par le département américain du Commerce.
    Chacun a un travail à faire. Comme vous l'avez si bien dit, au-delà de l'industrie américaine du bois, tout le monde y trouverait son compte, si l'accès au bois québécois et canadien était garanti à un prix raisonnable aux États‑Unis. Par exemple, cela profiterait autant aux consommateurs qu'aux jeunes familles qui veulent avoir accès à la propriété ou à ceux qui sont en manque de logements. En effet, la crise du logement est carrément un problème occidental, voire international.
(1640)
    En effet, tout le monde y trouverait son compte. L'enjeu de la discussion, c'est de trouver une façon pour que la coalition y trouve également un certain intérêt, parce que, sans cette dispense, le gouvernement américain ne pourra pas finir cette négociation avec le Canada.
    Bref, en arriver à une entente serait à l'avantage du Canada et des États‑Unis ainsi que de leur population respective.
    Je vous remercie de la réponse.
    Je sens que la présidente va me dire que mon temps de parole est écoulé.

[Traduction]

    Oui, merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Zarrillo pour les six prochaines minutes.
    Bienvenue à notre comité.
    Merci, madame la présidente. Je remplace aujourd'hui Brian Masse. Je tiens à souligner que ma circonscription de Port Moody-Coquitlam est située sur le territoire ancestral non cédé de la Première Nation Kwikwetlem. Je vais d'abord me permettre un bref rappel historique, notamment à l'intention des Canadiens français ou des Québécois ici présents. Fraser Mills, un quartier résidentiel et industriel aujourd'hui en plein réaménagement, accueillait au début des années 1900 la plus grande scierie au Canada, qui était aussi la deuxième plus grande au monde. On y retrouvait des travailleurs en provenance du Québec, mais aussi des Indes, de la Chine et du Japon. Voilà pour ce clin d'oeil à l'histoire de ma circonscription.
    Ma première question est pour Mme Yurkovich. J'aimerais que nous traitions de ces éléments qui restent à régler d'après ce que vous nous avez indiqué.
    Étant donné que nous n'avons toujours pas d'entente, pouvez-vous nous dire s'il y a des cibles ou des chiffres qui sont pris en considération par ailleurs dans la poursuite des négociations?
    Je ne suis pas vraiment sûre des chiffres proprement dits. Chose certaine, nos voisins du Sud examinent la part de marché, et ils cherchent à savoir si la quantité de bois canadien qu'ils importent est en train d'augmenter ou non.
     Je dirais que la demande américaine a augmenté de façon assez considérable au cours des dernières années. L'industrie américaine a produit cinq milliards de pieds-planche de plus. Le problème, c'est qu'elle n'arrive pas à rattraper son retard. Il y a toujours eu un écart d'environ 14 à 15 milliards de pieds-planche. L'année dernière, l'écart était de 16 milliards, car la demande de bois d'œuvre était très forte. En tout cas, nous suivons la situation.
    Pour ce qui est des chiffres en prévision des prochaines négociations, je ne pense pas qu'il y en ait, mais il y a quelques éléments à prendre en considération. Je travaille dans ce secteur depuis environ 25 ans. Je n'en suis pas à mon tout premier rodéo. J'étais là lors des négociations d'autres accords. Nous comptons à notre actif un certain nombre de litiges, et nous avons généralement eu gain de cause. D'ailleurs, l'année dernière, nous avons remporté une victoire extraordinaire auprès de l'OMC. Le hic, c'est qu'on ne peut pas interjeter appel, car les États-Unis refusent de nommer des représentants à l'organe d'appel.
    Par conséquent, en matière de litiges, il faut habituellement laisser couler un peu d'eau sous les ponts. En général, il y a une certaine somme d'argent qui est retenue en dépôt. La dernière fois, cela s'élevait à 5 milliards de dollars. Cette fois‑ci, on est déjà rendu à 7 milliards de dollars. Voilà donc une question qui, d'après mon expérience, nous ramène certainement à la table des négociations.
    Ce n'est pas tout. Quelqu'un a dit que le bois d'œuvre n'était pas vraiment la priorité des États-Unis. C'est sûr qu'en ce moment, dans le monde de l'après-pandémie et en raison de l'instabilité géopolitique, ce dossier ne figurera pas en haut de leur liste, mais ils voudront autre chose, et cela devient donc matière à négociation.
    Voilà, d'après mon expérience, les trois éléments qui doivent être présents. Au bout du compte, lorsque nous obtiendrons un accord — comme ce fut le cas dans le passé —, le premier ministre du Canada et le président des États-Unis se réuniront et s'engageront à résoudre ce problème. Nous n'en sommes tout simplement pas encore là.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Warner. Je vais mettre à profit un peu de connaissances historiques, si vous me le permettez.
    Je voulais simplement demander si, du point de vue historique, les Premières Nations ont participé à la création des accords commerciaux. Ont-elles pris part à des négociations en vue de régler les différends actuels?
    Je ne sais pas et, pour être honnête avec vous, je ne le pense pas.
    Je crois qu'il y a eu des consultations dans le cadre du processus. Lors du dernier cycle, si je ne me trompe pas, il y a eu des consultations avec les Premières Nations. Mais si l'on remonte à l'accord initial, soit l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis conclu en 1987, ou peu importe, ou à l'ALENA en 1993, je ne peux pas affirmer que des consultations officielles ont été menées auprès des communautés autochtones.
     Selon moi, nous n'étions pas encore rendus à cette étape, compte tenu des politiques entourant les divers accords commerciaux. Bref, je vous répondrai que ces consultations n'ont probablement pas eu lieu.
(1645)
    À l'avenir, monsieur Warner, pensez-vous qu'il soit possible d'adopter une approche différente pour faire participer les Premières Nations à la table des négociations ou même à une partie de ces négociations?
    Je vous dirai ceci. J'ai porté plusieurs chapeaux au cours de ma vie dans le domaine des échanges commerciaux. J'ai travaillé entre autres à l'OCDE, à Paris, et j'ai suivi les négociations du Canada là‑bas et à l'OMC.
     Je regrette de devoir le dire, mais voici la vérité: la plupart des partenaires commerciaux considèrent que le Canada est un pays avec lequel il est embêtant de négocier, car ils ont déjà assez de mal à négocier avec les provinces et le gouvernement fédéral. Chaque fois que quelqu'un s'assoit avec les représentants du gouvernement du Canada pour parler d'un projet, ces derniers commencent par dire que la question relève de la compétence provinciale. Voilà le problème. Si l'on ajoute les communautés autochtones, je pense bien franchement qu'on ne fera que compliquer les choses encore davantage. C'est déjà assez difficile comme c'est là.
    Toutefois, je suis convaincu qu'il existe des solutions créatives pour prévoir plus de mécanismes de consultation. Sauf que je ne sais pas comment le tout se déroulerait, et j'ignore si cela rendrait les choses plus faciles ou non.
    Le problème en l'occurrence s'explique, me semble‑t‑il, de deux façons: d'une part, la présence de grandes entreprises américaines qui ont intérêt à négocier, d'une certaine manière, des lois commerciales qui leur conviennent et, d'autre part, des membres du Congrès américain qui sont élus tous les deux ans et qui doivent rendre des comptes à leurs électeurs. Par conséquent, selon moi, la situation ne changera pas de sitôt.
    Merci.
    Monsieur Krips, je voulais vous poser une question sur la stabilité pour les travailleurs. Je me demande s'il y a quelque chose que le gouvernement pourrait dire et faire différemment à ce stade‑ci pour défendre les travailleurs et apporter une certaine stabilité à vos collectivités en ces temps difficiles?
    Il faut peut-être aborder la question à l'échelle macroscopique et encourager les travailleurs à reconnaître le secteur forestier comme un important moteur sur le plan économique et environnemental. Il s'agit, en fait, d'une industrie fantastique. C'est une industrie durable. C'est l'industrie renouvelable par excellence. J'encourage les travailleurs à envisager une carrière dans le secteur forestier. La foresterie incarne tout ce à quoi notre pays aspire dans le domaine des énergies renouvelables.
    Merci beaucoup.
    Madame Gray, vous avez cinq minutes, je vous prie.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins d'être des nôtres.
    Madame Yurkovich, c'est un plaisir de vous revoir. Mes premières questions s'adresseront à vous.
    Vous avez dit dans votre témoignage que vous étiez là lors des négociations qui se sont déroulées tout au long de ces 25 dernières années, notamment celles sur le bois d'œuvre en 2006, puis celles sur la prolongation en 2012, et ce, jusqu'en 2015. D'après vous, quelles leçons peut‑on appliquer à la situation actuelle?
    C'est une très bonne question. Vous savez, nous avons essayé toutes sortes de choses au fil des ans. Je ne me souviens plus qui a soulevé ce point, mais le problème tient vraiment au fait que les producteurs aux États-Unis ont beaucoup de pouvoir. Les consommateurs ne semblent pas faire le poids dans ces discussions, alors que ce sont eux qui en font les frais.
    Je dirais qu'au début des années 2000, nous avons vraiment essayé de nouer le dialogue avec les consommateurs aux États-Unis. C'était très difficile, car à l'époque, le prix du bois ne représentait qu'une part relativement faible du coût de construction d'une maison. Les prix étaient très bas. Aujourd'hui, c'est différent. Selon moi, nous devrions réfléchir à la manière d'établir un dialogue plus large avec le lobby des consommateurs aux États-Unis et les consommateurs pour leur faire savoir comment les mesures prises par les producteurs — leurs amis et voisins américains — empêchent un grand nombre d'entre eux d'accéder à la propriété.
     Le gouvernement fédéral a mené cette initiative à l'époque, en collaboration avec l'industrie. C'est une des leçons que j'ai apprises et que nous devrions peut-être examiner. Je pense également que nous devons chercher des domaines qui ne sont peut-être pas directement liés au bois et qui pourraient servir de leviers dans ces discussions avec l'administration Biden.
    Très bien. Merci.
    Madame Yurkovich, diriez-vous que l'absence d'un accord sur le bois d'œuvre contribue à l'inflation?
    C'est sûr, parce que lorsqu'on paie des tarifs douaniers, cela se répercute sur le prix du bois d'œuvre. Il s'agit d'un marché de produits de base. C'est un marché nord-américain. L'absence d'accord a un effet inflationniste.
    Bien entendu, dans le contexte du premier examen administratif, nous payions des tarifs douaniers d'environ 20 %. Les taux actuels sont un peu plus bas, mais nous en sommes déjà au quatrième examen administratif, ce qui signifie que les taux changeront une fois de plus. En effet, nous aurons un nouveau taux en août.
    Cela augmente assurément le prix du bois. Il y a beaucoup de pressions sur les prix à l'heure actuelle, en grande partie à cause des problèmes de chaîne d'approvisionnement, problèmes qui ne sont pas propres à notre industrie. Chose certaine, il s'agit d'un facteur qui aggrave la situation et qui est tout à fait inutile.
(1650)
    Je vous remercie.
    Justement, à ce sujet, avez-vous entendu parler de problèmes de chaîne d'approvisionnement ou d'expédition qui pourraient être liés aux obligations vaccinales qui sont en vigueur à la frontière américaine et auxquelles sont soumis les camionneurs?
    Eh bien, il est certain que pendant que toute l'action se passait et que les frontières étaient fermées à la circulation... C'est une situation qui n'apporte rien de bon. Vous savez quel genre d'année nous avons vécue: feux de forêt, inondations, perturbations énormes de notre chaîne d'approvisionnement. Notre industrie en est une d'exportation, dans une province axée sur l'exportation, et il est donc essentiel que nous acheminions nos produits vers le marché. L'acheminement de ces produits de l'autre côté de la frontière par camion, par train et par conteneur est essentiel.
    Ce n'est pas ce qui a causé la plus importante interruption. Les interruptions les plus importantes ont été causées, tout d'abord, par les catastrophes naturelles, mais aussi par les perturbations de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement et l'impossibilité de trouver des conteneurs pour acheminer nos produits vers le marché.
    Très bien. Merci.
    Nous savons à quel point l'industrie du bois d'œuvre est importante pour nous, en Colombie-Britannique, et pour tous les emplois qui en dépendent. Pourriez-vous parler des répercussions que l'absence d'un accord sur le bois d'œuvre depuis la fin de 2015, soit depuis sept ans, a sur vos membres? La situation a‑t‑elle entraîné des pertes quant aux possibilités d'expansion de notre industrie du bois d'œuvre et des pertes d'emplois en Colombie-Britannique?
     Eh bien, c'est certainement le cas. Puisque les prix sont très élevés présentement, l'industrie s'en tire bien, mais nous n'avons pas à regarder bien loin en arrière.
     En 2019, il y a eu 144 annonces de réduction dans la seule province de la Colombie-Britannique, car c'est un environnement à coûts élevés, et il y a eu de grandes répercussions. Notre approvisionnement en fibre diminue en raison des problèmes liés au dendroctone du pin d'il y a 20 ans, ce qui a créé plein de perturbations. Si l'on ajoute à cela l'instabilité créée par l'absence d'un accord, il est très difficile de planifier. Les droits peuvent être de 10, 15 ou 20 %. Dans certains cas, les entreprises paient plus de 30 %. Ce genre d'instabilité nuit à la planification.
    L'autre chose, c'est le montant de plus de 7 milliards de dollars. Plus de 7 milliards de dollars ne sont pas utilisés, et c'est de l'argent qui pourrait être dépensé en Colombie-Britannique et, en fait, partout au pays, pour investir dans les travailleurs et les communautés, transformer l'industrie et appliquer des technologies. C'est une véritable perte pour notre pays.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Miao, qui dispose de cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Avant de poser ma question, j'aimerais dire quelque chose. Notre gouvernement a inclus les groupes autochtones dans le cadre de la renégociation qui a mené à l'ACEUM.
    Selon Statistique Canada, en 2021, la Colombie-Britannique, le Québec, l'Alberta et l'Ontario ont exporté la plus grande valeur de produits de bois d'œuvre vers les États-Unis. On parle d'une hausse de plus de 30 % depuis la même période en 2020.
    Ma question s'adresse à Mme Yurkovich. Étant donné qu'en 2021, bon nombre des plus grands marchés de bois d'œuvre du Canada ont enregistré des exportations record vers les États-Unis, à quoi peut‑on attribuer la valeur élevée des échanges?
    Il y a une différence entre le volume et la valeur.
    Les volumes réels qui ont traversé la frontière ont légèrement augmenté entre 2020 et 2021, mais c'est la valeur.
     Bien sûr, nous avons vu des prix qui, en 25 ans... Je dirais que toute personne qui évolue dans le secteur n'a jamais vu des prix comme ceux que nous voyons en ce moment, et c'est parce qu'il y a eu une énorme perturbation en 2020. Le monde entier s'est arrêté. Tout le monde restait à la maison. Soudainement, les gens ont voulu se lancer dans des projets et déménager plus loin. Maintenant, avec le télétravail, les gens peuvent vivre plus loin de leur lieu de travail. Nous avons eu une demande énorme, ce qui a fait augmenter la valeur de façon considérable, mais le volume n'a augmenté que légèrement.
    J'ai ces données, que je serai heureuse de fournir à la greffière du Comité. Je peux vous envoyer le tableau qui inclut à la fois le volume et la valeur des échanges des dernières années.
(1655)
    Merci. Ce sera très apprécié.
     Jusqu'à présent, quelles ont été, au pays, les répercussions de l'imposition par les États-Unis de tarifs sur certains produits canadiens de bois d'œuvre? Dans quelle mesure ces répercussions varient-elles en fonction des provinces et des collectivités?
    Je pense que Mme Gray a posé la même question.
     Cette situation crée de l'incertitude et prive l'industrie d'argent qui pourrait être dépensé pour des usines et de l'équipement. C'est déstabilisant. Les taux des droits de douane fluctuent en raison du processus d'examen administratif, et il est donc très difficile de planifier. Bien sûr, dans différentes régions du pays, je dirais que — et vous voudrez peut-être en parler, monsieur Samray — les droits sont plus élevés pour certaines des entreprises qui sont des répondantes obligatoires qu'ils ne le sont pour d'autres. C'est déstabilisant pour tout le pays. Il y a beaucoup de répercussions. De plus, cela entraîne l'inflation des prix, non seulement pour les consommateurs américains, mais aussi, parce qu'il s'agit d'un marché nord-américain, pour les consommateurs canadiens.
    Monsieur Samray, je ne sais pas si vous voulez intervenir.
    Madame la présidente, je vais demander à notre économiste en chef de répondre à la question.
    Mme Yurkovich a raison. Les répondants obligatoires ont leur propre taux, après chaque examen administratif.
    Il y a une entreprise ici, dans l'est du Canada, qui a un taux énorme. Les deux autres répondants sont en Colombie-Britannique. Ils ont également leur propre taux. L'ensemble de l'industrie, le reste de l'industrie, c'est‑à‑dire la grande majorité des entreprises, a ce que nous appelons le taux qui s'applique à tous les autres.
    C'est essentiellement de cette façon que les choses fonctionnent.
    Dans le même ordre d'idées, étant donné que les importations américaines de bois d'œuvre canadien atteignent un niveau record, dans quelle mesure les tarifs imposés par les États-Unis ont-ils eu des répercussions sur l'industrie américaine du bois d'œuvre?
    N'importe quel témoin peut répondre à la question.
    La demande est forte aux États-Unis et nous pensons qu'elle le restera. On constate que les producteurs américains augmentent leur capacité. Ils construisent plus de scieries, mais cela prend du temps.
     Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, il y avait un déficit d'environ 16 milliards de pieds-planche en 2021. Cela signifie qu'il y a une sous-production. Ils ne sont pas en mesure de répondre à la demande de leurs propres clients aux États-Unis, alors ils se tournent vers nous. Ils augmentent leur offre, c'est sûr, mais pas assez vite.
     En maintenant ces tarifs, ils en retirent un avantage, car ils obtiennent bien sûr des prix plus élevés et ils augmentent lentement leur production. C'est la loi de l'offre et de la demande. Si l'offre n'est pas suffisante, il y a une pression sur les prix.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Savard-Tremblay, qui dispose de deux minutes et demie.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à M. Vincent, économiste au Conseil de l'industrie forestière du Québec.
    Avez-vous évalué si, dans un scénario où il y aurait des investissements accrus qu'on pourrait qualifier de suffisants en matière de transformation, cela aiderait l'industrie à respirer beaucoup mieux en ce contexte de guerre commerciale?
    Oui, il est évident que cela aiderait l'industrie, ne serait-ce que pour diminuer la dépendance du Canada à l'industrie de la première transformation du bois d'œuvre aux États‑Unis et pour se prémunir contre le protectionnisme américain. Investir dans la deuxième transformation serait certainement une façon de se prémunir contre cette dépendance.
    En 2006, quand une grosse partie des dépôts accumulés a été remboursée aux compagnies, on a vu une vague d'investissements importants partout au Canada. Cet argent est présentement gelé à la frontière et n'est pas disponible pour des investissements dont on aurait pourtant grandement besoin dans le secteur du sciage de bois résineux. C'est le cas notamment au Québec, mais c'est probablement la même chose un peu partout au Canada. Ce sont des sommes d'argent qui seraient nécessaires. Dans le contexte actuel, l'environnement d'affaires est peu propice à l'investissement.
(1700)
    Actuellement, vous pensez donc que des investissements publics dans cette filière pourraient constituer un environnement d'affaires plus attrayant.
    En fait, je faisais allusion à des investissements privés. Il est évident que les programmes qui existent présentement et qui servent à stimuler l'investissement sont très utiles. Comme le président du CIFQ l'a dit tantôt, un programme d'aide de 50 millions de dollars, par exemple, peut se transformer en investissements totaux de 500 millions de dollars, ou même de 1 milliard de dollars. Il est évident que ces programmes sont intéressants, mais le gros des investissements dans le secteur forestier provient du secteur privé.
    C'est parfait, je vous remercie.
    Je n'ai plus de questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Madame Zarrillo, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Nighbor, je vais vous poser une question sur la main-d'œuvre.
    Nous parlons aujourd'hui d'une réponse de type Équipe Canada, mais on dit qu'il y a des différences régionales. Quelle est l'incidence de ces différences sur la rémunération, la stabilité des travailleurs et leur capacité à se déplacer, à vivre et à trouver du travail partout au Canada?
    Il y a deux ou trois choses. Sur le plan de la main-d'œuvre, les pressions les plus fortes sont liées à la pénurie de camionneurs. Il y a environ 23 000 postes de camionneur à pourvoir. La situation est extrêmement difficile, surtout en ce qui a trait aux craintes suscitées par l'arrêt de travail au CP et au fait qu'un certain nombre d'usines ne fonctionnent pas en ce moment parce qu'elles n'ont pas accès à des wagons du CN. Les pressions qui s'exercent dans la chaîne d'approvisionnement du transport sont bien réelles.
     Il y a beaucoup de différences entre les régions. Nous avons constaté que, dans des endroits comme le nord de l'Alberta, lorsque le secteur pétrolier et gazier connaissait une période difficile, certains travailleurs sont venus travailler dans notre industrie. Comme ils étaient dans une collectivité adjacente, ils ont pu venir. Je pense à d'autres collectivités où les mines peuvent être en plein essor et où, à ce moment‑là, c'est plus profitable. Il y a des besoins pressants quant à la perte de personnel.
     Dans la plupart des régions du pays, notre industrie mène ses activités surtout au nord et en milieu rural. Il peut être difficile de recruter des gens dans ces régions rurales et éloignées. Je peux envoyer à la greffière certaines des données relatives aux salaires moyens dans l'ensemble du secteur, mais notre secteur comprend des emplois supérieurs à la moyenne, qui permettent de bien subvenir aux besoins d'une famille et qui sont multigénérationnels. L'un de nos plus grands problèmes, c'est la capacité à faire venir ces gens dans les régions rurales et nordiques du Canada.
     Merci, monsieur Nighbor.
    Je vais poser une question similaire à M. Labbé au sujet de la main-d'œuvre et de la mobilité et de la capacité de se déplacer d'une province à l'autre. Est‑ce possible dans l'état actuel de l'industrie forestière?
    Je pense qu'au Canada, le problème n'est pas nécessairement la mobilité, mais le manque de travailleurs. C'est un gros problème auquel nous sommes confrontés actuellement, et pour les produits qui sont loin des centres urbains, c'est encore plus difficile.
    Je ne sais pas à quel programme nous pouvons faire appel en ce qui concerne les travailleurs étrangers. Il s'agirait peut-être de faire venir des Ukrainiens — ce serait le bon moment. Par ailleurs, une solution plus durable consiste à robotiser davantage les usines, à produire davantage avec moins de travailleurs. C'est ce que à quoi nous travaillons dans cette industrie à valeur ajoutée. C'est la seule façon aujourd'hui que nous pouvons accroître notre capacité avec la même main-d'œuvre.
    Merci beaucoup, monsieur Labbé.
    Nous passons maintenant à M. Baldinelli, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je remercie tous les témoins de leur présence.
     Je veux poursuivre avec M. Nighbor et revenir sur certaines des observations qu'il a faites tout à l'heure lorsqu'il a dit que, quand il est entré en fonction, il ne pensait jamais qu'il serait dans une situation où il devrait exercer des pressions auprès d'assemblées législatives d'États comme la Californie et New York concernant des projets de loi.
    Vous avez même indiqué que vous pensiez que c'était le fruit d'un effort concerté... et dans un sens, certains d'entre eux sont très similaires.
    Un aspect me préoccupe, et peut-être pouvez-vous me répondre. Grâce au processus d'arbitrage, nous avons obtenu des résultats à l'OMC, dans le cadre de l'ALENA, etc., mais dans le cas de ces mesures prises par les États, le gouvernement fédéral est‑il capable d'agir contre ces projets de loi préjudiciables?
     Par ailleurs, pensez-vous que d'autres États prendront de telles mesures? Si c'est le cas, envisagez-vous maintenant de faire une analyse quelconque de nos secteurs d'emploi et des répercussions que cette situation aurait sur les emplois et notre industrie dans son ensemble?
(1705)
    Je vous remercie beaucoup de la question, car la situation est très frustrante. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, je préside un groupe composé de 28 pays. Je sais quelle est notre position au Canada.
     Il s'agit de savoir avec quels types de produits ou de matériaux nous voulons construire et où nous voulons nous procurer ces matériaux. Veut‑on qu'ils proviennent de Thunder Bay, de Prince George ou de Whitecourt, ou bien de l'Amazonie ou d'un endroit situé à huit heures de Moscou? Voilà où nous en sommes... et ce sont les questions que nous posons aux législateurs.
    Ce que nous aimerions voir, et ce qui devrait se produire, c'est qu'on reconnaisse que tout produit forestier provenant du Canada... Plus de 90 % des terres relèvent de la compétence provinciale; l'approbation est faite par les gouvernements provinciaux. De plus, nous avons ici au Canada 40 % des forêts certifiées par des tiers dans le monde. Il s'agit d'un autre seuil.
    Pour ce qui est de la question de savoir comment le gouvernement fédéral peut nous aider, c'est par la voie diplomatique. Les bureaux commerciaux des provinces sont très actifs dans des provinces comme la Colombie-Britannique, l'Alberta, l'Ontario et le Québec, qui sont les quatre provinces les plus à risque dans les deux États en question. Nos fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada sont actifs sur le terrain, mais nous aimerions voir deux ou trois autres initiatives. J'aimerais qu'Affaires mondiales Canada nous aide en effectuant un examen juridique des projets de loi. Jusqu'à présent, le ministère a refusé de faire un examen juridique des projets de loi pour en comprendre clairement les répercussions. Nous aimerions également qu'il y ait un engagement plus important sur le plan politique et diplomatique pour mettre fin à cette absurdité.
    Pour ce qui est de l'effet domino, oui, très certainement lorsqu'on pense aux États de l'Oregon, de Washington... Cependant, le plus grand risque est qu'un État adopte un de ces projets de loi rhétoriques et sensationnels, et que les voix derrière ce projet de loi aillent voir ensuite Home Depot ou Procter & Gambles, certains de nos gros clients basés aux États-Unis, pour essayer de causer une sorte de dispersion. Les groupes qui sont à l'origine de ce projet de loi mènent des campagnes trompeuses très similaires ciblant certains de nos plus gros clients. Il s'agit assurément d'une menace existentielle et il est absolument essentiel que dans deux des plus grands États, le gouvernement du Canada et nos gouvernements provinciaux défendent les travailleurs forestiers canadiens.
    Excellent. Vous voulez donc que le gouvernement fédéral et nos bureaux des délégués commerciaux vous aident en exerçant des pressions auprès des assemblées législatives des États?
     C'est exact. Dans les États de la Californie et de New York, nous avons eu un soutien consulaire sur le terrain. Les gouvernements provinciaux nous ont également apporté un soutien considérable. Nous arrivons à un point où... Le gouverneur Newsom a opposé son veto au premier projet de loi en Californie parce qu'il a dit que c'était complètement ingérable et infaisable pour une petite entreprise en Californie si l'on veut se lancer dans le jeu de l'approvisionnement.
    Deux ou trois mois plus tard, le même membre de l'assemblée a ramené le même projet de loi. C'est une année électorale en Californie, c'est une année électorale dans l'État de New York, et nous aimerions donc voir un peu plus d'engagement politique de haut niveau dans ce dossier.
    Concernant la question que j'ai posée plus tôt, et j'aimerais obtenir votre avis, encore une fois, concernant ce qui se passe à l'échelle fédérale, lorsqu'on collabore avec les États-Unis dans le cadre du processus d'arbitrage — nous sommes passés par l'OMC, l'ALENA et l'ACEUM. Parce que ces actions sont menées à l'échelle des États, y a‑t‑il quelque chose que nous pouvons faire pour interjeter appel à une échelle nationale, ou parle‑t‑on seulement d'actions sur le terrain?
    Les actions diplomatiques sur le terrain constituent la première étape pour régler le problème. Si cela ne fonctionne pas, nous évaluons que si ces projets de loi sont adoptés, ils violeront les accords commerciaux. Je ne suis pas avocat en droit commercial — M. Warner pourrait peut-être vous éclairer à ce propos —, mais il existe des mécanismes permettant aux gouvernements de prendre des mesures.
    Nous préférerions ne pas en arriver là, et nous croyons que grâce à des discussions diplomatiques de haut niveau avec nos gouvernements provinciaux et fédéral, nous pourrons mettre fin à cette absurdité.
    Je vous remercie.
    Je suis désolée, monsieur Baldinelli. Votre temps est écoulé.
    Passons à M. Sheehan pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à tous nos intervenants.
    Nous sommes aux prises avec ce différend sur le bois d'œuvre depuis de nombreuses années. Je suis de Sault Ste. Marie. Le ministère provincial du Développement du Nord, des Mines, des Ressources naturelles et des Forêts a ses bureaux dans l'édifice Roberta Bondar, où j'ai travaillé au ministère du Travail, de la Formation et du Développement des compétences, et au ministère du Développement du Nord et des Mines, donc j'ai pris pas mal de cafés avec des gens travaillant pour la province dans ce différend qui n'en finit plus. Ils m'ont expliqué, de façon simpliste, qu'en Ontario, et probablement ailleurs au Canada, certaines des grumes qui sont exploitées proviennent de propriétés de la Couronne, contrairement à celles des barons du bois américains, comme ils les appellent, qui représentent un petit groupe de personnes détenant un monopole. Ils semblent vraiment influencer les décisions politiques, quel que soit le gouvernement en place, grâce à leurs efforts.
    Ce qui est vraiment injuste, c'est que tout cela ne fait... La demande semble être élevée, les Américains continuent à construire, ils ont besoin de grumes, de bois, et ils continuent d'en acheter aux tarifs américains, ce qui se traduit par une taxe. Ils se taxent eux-mêmes. Ils taxent la classe moyenne, comme on l'appelle, et les gens qui ont le plus de peine à joindre les deux bouts sont les plus durement touchés.
    L'un d'entre vous aurait‑il des données sur le montant exact, en dollars, que ces tarifs douaniers représentent pour une maison construite aux États-Unis? Je ne sais pas si M. Nighbor ou quelqu'un d'autre aurait ce genre de données sous la main, mais sinon, peut-être pourriez-vous nous les communiquer ultérieurement?
(1710)
    Je peux peut-être demander à Mme Yurkovich de vous parler des données sur les constructeurs de maisons aux États-Unis.
    Madame Yurkovich, cela vous aiderait‑il?
    Oui, il y a une très bonne analyse qui a été réalisée par la National Association of Home Builders, qui travaille en partenariat avec le Canada depuis des années. Je vous l'enverrai après la séance du Comité. Ces tarifs représentaient autrefois une somme relativement modeste pour une maison, soit entre 5 000 et 8 000 $, monsieur Vincent, plus ou moins.
    Ils s'élèvent maintenant à environ 30 000 $, donc c'est un gros changement et, bien sûr, cela empêche certaines personnes d'acheter une maison.
    Mme Gray a demandé ce que nous pouvons faire, quelles sont les leçons que nous en tirons. Nous pourrions nous concentrer davantage sur ce point. Cela ne fait pas partie du programme de Biden... L'administration Biden veut pourtant que l'accessibilité financière soit une priorité, mais cela a l'effet inverse.
    Tout ce que nous pourrons faire pour appuyer le travail de la NAHB et nous assurer que les gens comprennent ce que cela leur coûte directement sera très utile.
    Ces données nous seraient très utiles parce que le comité du commerce s'est déjà rendu à Washington et aux États-Unis. Nous sommes en train de discuter de ce que nous ferons en tant que comité. Habituellement, quand nous nous rendons à Washington, nous avons un certain nombre de réunions organisées par l'intermédiaire de l'ambassade, et ce genre de données serait très utile parce qu'il est vraiment important d'entrer en contact avec les législateurs américains pour leur dire tout cela. Souvent, quand nous y sommes allées pour parler de l'acier, ils étaient surpris, ils n'étaient pas au courant. Cette information serait donc très utile.
    Pour continuer sur cette lancée, avec quels autres groupes aux États-Unis travaillez-vous? Travaillez-vous avec les chambres de commerce ou les syndicats, ou d'autres personnes également, pour les conscientiser aux dommages qu'ils causent à leur propre classe moyenne avec ces tarifs punitifs?
    Je vais commencer, puis peut-être passer le relais à M. Nighbor.
     Nous travaillons en étroite collaboration avec les Métallurgistes unis, qui représentent une grande partie de notre industrie. Ils sont très actifs dans ce dossier, à nos côtés. Il y a la chambre de commerce. Il y a des groupes d'affaires canado-américains avec qui nous travaillons de temps à autre. Nous essayons de raconter ce qui se passe exactement, mais c'est très difficile.
    Le marché est très concurrentiel, et il est très difficile d'obtenir des résultats sur n'importe quelle question autour de Washington. Franchement, quand on essaie d'organiser du lobbying concerté, comme l'industrie et le gouvernement ont essayé de le faire au début des années 2000, c'est très coûteux. Cela représente des millions et des millions de dollars.
    Monsieur Nighbor, vous voulez peut-être ajouter quelque chose.
    En ce qui concerne ces projets de loi, je parlais de la Californie et de New York. C'est la même chose. Les Métallurgistes unis et Unifor sont formidables — ce sont de très bons partenaires pour nous — ainsi que l'Indigenous Resource Network. Aux États-Unis, les associations forestières de la Californie et de New York sont très préoccupées par le précédent que pourraient créer certaines revendications et certains termes douteux qui sont utilisés. Il en va de même des constructeurs de maisons dans ces États, ainsi que de nos frères et sœurs syndiqués dans ces États.
    Nous ne manquons pas d'alliés, ce qui est bien.
    Nous allons passer à M. Martel pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à M. Labbé.
    J'aimerais que nous parlions de nouveau du caribou forestier. Croyez-vous qu'on va trop loin, dans la stratégie de protection du caribou forestier, en attribuant entièrement la faute à l'industrie forestière?
(1715)
    Je ne suis pas un spécialiste du caribou, mais je suis passablement au courant des dossiers qui concernent les changements climatiques et leurs conséquences. Il y a aux Nations unies un comité sur la forêt boréale. Le Canada en fait partie. Ce comité analyse un peu les incidences, y compris sur le caribou. Je pense que l'on impute tous les torts à l'industrie forestière parce que les changements climatiques touchent l'entièreté des forêts. Or, je crois que le vrai problème, ce sont les changements climatiques. Même si l'on recouvre d'une cloche de verre l'ensemble du territoire, dans 40 ans, le caribou n'y sera pas adapté. Il faudra donc le déplacer à 1 000 kilomètres au nord.
    Je pense que l'on confond un peu les choses. On devrait s'attaquer aux changements climatiques, ce qui aiderait le caribou. Il y a aussi de petites solutions qu'on peut appliquer à l'échelle régionale. À l'heure actuelle, on impute toute la faute à l'industrie, mais je ne crois pas que cela corresponde à la réalité.
    Monsieur Labbé, vous parlez de diversification, mais, si l'on n'a pas accès à la matière première, il est quasiment impossible d'ajouter de nouveaux produits. Comment fera-t-on pour ajouter de nouveaux produits?
    C'est tout à fait exact. Notre première transformation est vraiment importante pour le développement de notre deuxième. Entre vous et moi, il est évident que, dans l'avenir, compte tenu des règles de conservation de la biodiversité, nous n'aurons pas plus de bois disponible pour la coupe au Canada, malgré la demande. Nous allons maintenir ce que nous avons présentement, et la croissance se fera par l'ajout d'une valeur à ce que nous avons. C'est la seule option, à moins que nous fassions de la plantation intensive, mais ce bois ne serait disponible que dans 40 ans. Alors, c'est la seule solution à court terme.
    Si notre territoire est vraiment limité, cela va inévitablement nuire à la croissance de nos PME.
    Oui. Si la première transformation est forte, la deuxième sera très forte.
    Merci beaucoup, monsieur Labbé.

[Traduction]

    Il vous reste deux minutes et quart.
    J'aimerais partager mon temps avec Mme Gray.
    Il me semblait bien que quelqu'un voudrait profiter des deux minutes qui restent.
    Merci, madame la présidente. Je ne rate jamais une occasion, alors je vous remercie beaucoup.
    J'ai quelques questions à poser à M. Warner. Malgré ce que nous dit notre ministre du Commerce, il ne semble pas y avoir de progrès dans la négociation d'un accord sur le bois d'œuvre avec les États-Unis. La représentante américaine au Commerce a dit l'été dernier que le Canada ne semblait pas enclin à s'engager dans le dossier du bois d'œuvre, alors que la ministre Ng répète que le bois d'œuvre est une priorité absolue pour le gouvernement canadien.
    À votre avis, est‑ce que le Canada a pour priorité absolue de s'engager dans les négociations sur le bois d'œuvre?
    Le problème que je vois, c'est que nous devons décider comment aborder les États-Unis en général dans ce genre de différends commerciaux. D'après ce que je peux voir, le gouvernement actuel a opté pour une approche très conflictuelle dès le départ, sur tout. Le conflit dégénère et s'intensifie très rapidement.
    Comme je l'ai déjà dit, je ne pense pas que le litige soit une bonne solution. Je ne suis même pas sûr que la plupart de ces victoires dont nous parlons dans le domaine du bois d'œuvre soient vraiment des victoires complètes comme on les présente au Canada. Ce sont des victoires juridiques à l'arraché, et c'est pour cela qu'elles ne tiennent pas et qu'elles sont difficiles à faire respecter.
    Je crois, pour ma part, que si nous avions une approche plus cohérente dans nos négociations commerciales avec les États-Unis, nous serions en meilleure posture pour négocier sur une question comme celle du bois d'œuvre, mais si l'on va aux États-Unis pour faire du lobbying contre l'initiative d'un président américain et qu'on s'attend à ce que ce même président américain dise à sa secrétaire au Commerce de nous lâcher du lest sur le bois d'œuvre, c'est peine perdue.
    À un moment ou à un autre, nous devons décider si nous voulons emprunter la voie du litige, si nous voulons monter aux barricades ou si nous voulons trouver le moyen de nous asseoir et de déterminer s'il y a des avantages qui dépasseront les limites de cette industrie pour s'étendre à d'autres secteurs et qui nous permettront... Je pense que Mme Yurkovich a parlé de la façon dont cela aurait pu nous aider à régler d'autres dossiers.
    Je pense que c'est ce qui manque ici. Pour être très honnête avec vous, je ne pense pas que les Américains soient très sensibles au fait que les politiciens canadiens pensent que leur classe moyenne en souffre. Nous pourrions faire pression en ce sens. Vous avez raison, cela coûterait cher car ce serait difficile à vendre. Nous aurions probablement plutôt intérêt à nous asseoir à la table ensemble pour trouver un moyen de régler le problème, mais ce n'est pas possible tant qu'on montre les poings, à mon avis.
(1720)
    Merci beaucoup. Ce sont des commentaires intéressants, monsieur Warner. Chaque fois que vous venez ici, vous nous faites des commentaires intéressants.
    Nous allons passer à Mme Dhillon.
    Allez‑y, s'il vous plaît, pour cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Mes questions s'adresseront à M. Samray.
    Je vais poursuivre dans la même veine de questions que le député M. Sheehan.
    En considérant que le gouvernement du Canada s'est engagé à travailler avec le secteur pour défendre les intérêts canadiens, le secteur forestier du Canada croit-il que le différend actuel sur le bois d'œuvre peut être résolu par une solution négociée? Le secteur estime-t-il que le différend devrait être résolu de cette façon?
    Comme tous mes collègues l'ont déjà mentionné, tôt ou tard, il y aura une négociation qui portera uniquement sur le bois d'œuvre ou qui touchera d'autres enjeux également.
    Les différends commerciaux se règlent par des ententes. C'est la seule façon de le faire à long terme. Il faut donc commencer le dialogue, bâtir quelque chose sur des points communs et essayer de trouver des voies de passage. C'est fondamental.
    Comme le disait Raymond Aron, le diplomate et le soldat sont deux fonctionnaires qui ont un besoin mutuel de l'autre pour travailler. Dans le cas présent, il y a les avocats d'un côté et, de l'autre, l'industrie avec le gouvernement. Les deux ont un besoin mutuel de l'autre pour avancer, car il faut trouver des voies de passage pour convenir d'une solution.
    À votre connaissance, est-ce que ce raisonnement correspond à une conviction partagée?
    Je crois que oui. D'ailleurs, Mme Yurkovich, M. Krips, M. Nighbor, M. Vincent, M. Labbé et M. Warner en ont tous parlé. Je pense que tous les témoins vous disent aujourd'hui qu'il va falloir se mettre à table et adopter une approche comme celle d'Équipe Canada, qui est la plus souhaitable et qui doit être privilégiée le plus tôt que possible, selon l'industrie. Nous sommes prêts à jouer pour Équipe Canada.
    D'après vous, comment les fluctuations des taux de droits de douane appliqués aux exportations de bois d'œuvre canadien vers les États‑Unis touchent-elles les entreprises canadiennes?
     Le taux varie annuellement au gré d'une espèce de boîte noire qui est au Département américain du commerce. On ne sait pas pourquoi cela monte ou descend d'une année à l'autre. Ces taux amènent une grande incertitude. La seule chose que les entreprises sont capables de contrôler du mieux qu'elles peuvent, ce sont leurs coûts.
    Cela dit, le coût est un élément de la compétitivité, mais il y a aussi un autre facteur, soit le taux de taxation. Celui-ci a des effets sur la prévisibilité des marchés ainsi que sur la capacité de l'industrie à répondre à la demande, à faire des investissements et à s'engager à acheter du bois.
    Le fait de ne pas avoir de prévisibilité à long terme compromet la capacité de l'industrie à prévoir son avenir, à faire des investissements, à faire de la transformation, à concevoir de nouveaux produits et à répondre aux besoins pour les prochaines décennies.
    D'après vous, les entreprises et les travailleurs canadiens de ce secteur subissent-ils les répercussions de la situation?
    Il est évident que les entreprises subissent des répercussions. Comme on l'a dit, plus de 6 milliards de dollars attendent dans un compte en fiducie à la frontière, et ce montant sera bientôt de 7 milliards de dollars. Cet argent ne peut pas être investi dans l'équipement et dans les nouvelles technologies. Or, cet équipement et ces nouvelles technologies sont essentiels pour assurer non seulement la compétitivité des entreprises, mais également le développement de nouvelles forces de travail et l'attraction de nouveaux travailleurs dans l'industrie.
    Il est donc évident que les travailleurs subissent les répercussions de cette situation, et il faut trouver une solution pour que cet argent serve à la relance économique.
(1725)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Passons à M. Savard-Tremblay, pour deux minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Nighbor, vous pourrez me corriger si j'ai mal interprété vos propos. Tout à l'heure, vous disiez qu'il y avait eu beaucoup d'initiatives venant des provinces, mais que, du côté d'Affaires mondiales Canada, il manquait un petit soutien, un petit appui de plus, notamment de la part des délégués commerciaux.
    Concrètement, quelles seraient vos attentes?

[Traduction]

    La première chose que j'aimerais, c'est qu'Affaires mondiales Canada fasse l'analyse juridique des deux projets de loi actuellement soumis à l'étude des assemblées législatives d'Albany et de Sacramento. C'est la première chose, qui viendrait confirmer notre conviction que ces projets de loi violeraient nos accords commerciaux.
    Deuxièmement, par la voie de la diplomatie et de la collaboration avec les gouvernements d'États, nos partenaires aux États-Unis et nos clients aux États-Unis, nous devons poursuivre le dialogue et tenir des réunions pour parler de la façon dont nos forêts sont réellement gérées ici, au Canada. Il y a beaucoup de désinformation. Je pense que beaucoup de gens oublient que plus de la moitié des zones forestières au Canada restent non aménagées. Elles peuvent être gérées par des communautés locales du Grand Nord, mais 48 % de nos forêts sont aménagées. De plus, la moitié des forêts aménagées font l'objet de mesures de conservation quelconques, car la foresterie au Canada est intrinsèquement liée à la conservation, aux valeurs locales, à la gestion de valeurs multiples et des espèces en péril et à l'atténuation des risques d'inondation et d'incendie.
    La planification forestière exige beaucoup de travail au Canada. Elle ne peut pas être simplifiée, comme le laisse entendre la terminologie utilisée aux États-Unis.
    Vous avez 50 secondes.

[Français]

    Je ne crois pas que je pourrai aborder un autre sujet en 50 secondes.
    J'en profite donc pour remercier les témoins.

[Traduction]

    Madame Zarrillo, vous avez deux minutes, s'il vous plaît.
    Merci. Je vais prendre vos 50 secondes.
    Je voulais simplement remercier tous les témoins d'aujourd'hui pour ce regard sur l'avenir et toutes nos discussions sur la transformation et sur la valeur ajoutée dont pourrait bénéficier plus fortement le Canada. C'est très intéressant.
     Il y a également eu un certain nombre de commentaires sur l'évolution de la dynamique mondiale, seulement à la lumière de ce qui se passe concernant le vaccin contre la COVID et en Ukraine.
    Cette question s'adresse à M. Krips.
    En y réfléchissant, je me demandais s'il y avait eu des changements dans le langage et dans la façon de penser la planification future, ne serait‑ce qu'en ce qui concerne le manque de conteneurs et de conducteurs dans l'industrie. Le cas échéant, s'il y a eu un changement dans le langage, dans la planification future et dans la façon dont vos groupes conçoivent tout cela, qu'est‑ce que le gouvernement canadien doit savoir et prendre en compte pour soutenir les travailleurs de l'industrie maintenant et dans une perspective d'avenir?
    Je rappellerai simplement certaines des choses que mes collègues ont signalées, comme les problèmes bien réels qui s'observent dans la chaîne d'approvisionnement, les coûts et la structure des coûts. Nous constatons un énorme problème dans les services ferroviaires dans le Nord de l'Alberta, en particulier, et par ricochet, dans d'autres provinces. Je sais que Mme Yurkovich a beaucoup de problèmes dans sa province à cause des inondations, des incendies et d'autres choses du genre.
    Le gouvernement canadien pourrait vraiment se pencher sur l'infrastructure d'un point de vue logistique et du point de vue des sociétés ferroviaires, pour s'assurer que ces dernières fournissent les services qu'elles sont, selon moi, fiduciairement tenues de fournir aux collectivités du Nord. La plupart de nos membres, en Alberta, ne sont en fait desservis que par l'une des sociétés ferroviaires. Leurs coûts ont grimpé en raison du manque de services ferroviaires cette année. Il semble que ce soit un problème annuel.
     Je pense qu'il serait vraiment utile d'examiner attentivement nos besoins en matière de logistique et d'infrastructure au Canada, dans le secteur ferroviaire en particulier. Ce n'est pas directement lié au bois d'œuvre, mais c'est directement lié aux coûts que doit absorber l'industrie. Une diminution des coûts aidera en fait les entreprises forestières viables à poursuivre leurs activités.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Fast, vous serez le dernier intervenant de ce côté aujourd'hui.
    Merci beaucoup.
    Mes questions s'adressent à M. Nighbor et à Mme Yurkovich. Je suis heureux de vous revoir tous les deux. Cela fait longtemps.
    J'ai écouté attentivement vos témoignages et je voudrais simplement vous citer à nouveau. Madame Yurkovich, vous avez dit qu'en cas de différend de ce genre, « le premier ministre du Canada et le président des États-Unis se réuniront » et régleront le problème. Vous avez dit ensuite: « Nous n'en sommes tout simplement pas encore là. »
    Monsieur Nighbor, vous avez dit à peu près la même chose. Vous avez dit que « des discussions diplomatiques de haut niveau » mettraient fin à cette folie.
    Suggérez-vous tous les deux qu'il n'y a pas eu de discussions diplomatiques de haut niveau ces dernières années, depuis l'expiration de l'accord sur le bois d'œuvre?
(1730)
    Je peux peut-être commencer.
    Je pense que ce que je disais concernait les conditions que nous avons connues dans le passé et effectivement, quand le dernier accord a expiré. Un certain nombre de conditions étaient en place: j'ai parlé des litiges en filigrane, de fonds retenus que l'industrie américaine a à l'oeil et ensuite de certains leviers, d'autres choses qui ne sont pas liées au bois d'oeuvre.
    Dans de telles conditions, il doit y avoir des conversations entre dirigeants pour essayer de faire bouger les choses. L'industrie américaine doit avoir son mot à dire, mais seul le président des États-Unis peut lui faire une place à la table.
    C'est le contexte dont je parlais. Certes, il faudra absolument que le premier ministre et le président se parlent, mais le président doit inviter la coalition américaine à s'asseoir à la table et à participer à la conversation, faute de quoi nous ne pourrons rien faire pour résoudre le problème, compte tenu de la manière dont les lois commerciales fonctionnent aux États-Unis.
    Monsieur Fast, pouvez-vous imaginer que l'une de nos provinces affirme qu'elle ne veut plus de vin américain sur son territoire, parce qu'elle craint que ce ne soit pas viable? Pensez‑y.
    Dans notre cas, nous avons l'engagement du gouvernement provincial. Nous avons des partenaires syndicaux, autochtones et d'autres partenaires qui sont mobilisés. Nos fonctionnaires des Affaires étrangères et notre noyau diplomatique aux États-Unis sont mobilisés. Je pense qu'étant donné la gravité de la situation — c'est un problème de plusieurs milliards de dollars qui se dresse à l'horizon —, nous aurons besoin d'un soutien politique accru dans les semaines et les mois à venir.
    Dans la période qui a précédé les négociations en vue de l'ACEUM, votre industrie a‑t‑elle été sollicitée pour voir si le bois d'oeuvre pourrait être inclus dans les négociations? Bien franchement, j'aurais aimé que ce soit le cas, en raison du levier supplémentaire qu'auraient fourni ces négociations plus larges.
    N’en a‑t‑il jamais été question?
    Il y a eu des conversations en ce sens. De par votre expérience, je pense que vous savez mieux que la plupart des gens autour de cette table à quel point ce dossier est difficile, litigieux et politique.
    Du point de vue de la Colombie-Britannique, la seule chose qui nous tenait absolument à coeur était d'avoir un mécanisme de règlement des différends. Nous l'avons obtenu. C'est essentiellement le même que celui que nous avions en vertu de l'accord précédent. C'est d'une importance capitale, car dans tout accord commercial, comme dans toute relation, il y aura toujours des différends. S'il y a une chose à laquelle nous tenions absolument, c'est cela, et nous l'avons obtenue.
    Merci beaucoup aux témoins pour toute l'information très précieuse fournie au Comité. Je vous en suis reconnaissante.
    Pour les membres du Comité, nous avons besoin de propositions de témoins pour l'étude Canada-Ukraine, s'il vous plaît. S'il y a d'autres témoins que vous souhaiteriez entendre sur les technologies propres, veuillez soumettre leurs coordonnées le plus tôt possible à la greffière.
    Je remercie encore une fois mes collègues ainsi que les témoins.
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