Nous tenons aujourd'hui la 39e séance du Comité permanent du commerce international. La réunion se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Par conséquent, les membres du Comité assistent en personne à la réunion dans la salle et à distance en utilisant l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité. Tout d'abord, veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Lorsque vous parlez, veuillez le faire lentement et clairement. Pour ceux qui participent avec vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer et mettez‑le en sourdine lorsque vous ne parlez pas.
En ce qui concerne l'interprétation, les participants qui sont sur Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Veuillez sélectionner le canal qui vous convient.
Je rappelle à tout le monde que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les participants dans la salle doivent lever la main lorsqu'ils souhaitent prendre la parole. Les participants sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière et moi-même gérerons l'ordre des interventions de notre mieux.
Veuillez également noter que pendant la réunion, il est interdit de prendre des photos dans la salle ou de faire des captures d'écran. Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins qui comparaissent avec vidéoconférence, j'informe le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion et que nos interprètes sont prêts.
Si des difficultés techniques devaient survenir, veuillez me le faire savoir. Si nécessaire, nous suspendrons la séance pendant quelques minutes afin de nous assurer que tous les membres du Comité puissent participer pleinement à la réunion.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 20 septembre 2022, le Comité reprend son étude sur les répercussions commerciales potentielles de la loi de 2022 sur la réduction de l'inflation adoptée aux États-Unis sur certaines entreprises et certains travailleurs au Canada.
Nous accueillons aujourd'hui Elizabeth Kwan, chercheuse principale au Congrès du travail du Canada, qui comparaît avec vidéoconférence; John Gorman, président-directeur général de l'Association nucléaire canadienne; Mark Zacharias, directeur exécutif de Clean Energy Canada, qui comparaît avec vidéoconférence, et John Risley, directeur de World Energy GH2, qui comparaît lui aussi avec vidéoconférence.
Bienvenue à tous. Nous vous remercions de prendre le temps d'échanger avec les membres du Comité aujourd'hui.
Nous commencerons par les déclarations préliminaires, après quoi il y aura une période de questions des membres du Comité.
Madame Kwan, je vous invite à faire une déclaration préliminaire d'au plus cinq minutes. Vous avez la parole.
Bon après-midi, madame la présidente, mesdames et messieurs. Je vous suis reconnaissante de m'avoir invitée à vous parler aujourd'hui.
Je m'appelle Elizabeth Kwan. Je suis chercheuse principale au Congrès du travail du Canada et responsable des politiques en matière de commerce.
Le CTC est la plus grande centrale syndicale du Canada et s'exprime sur des questions d'importance nationale au nom de plus de trois millions de travailleurs syndiqués au Canada.
Le financement très important de la loi américaine sur la réduction de l'inflation, à hauteur de 369 milliards de dollars pour les programmes en matière d'énergie, de sécurité et de changement climatique, change la donne dans le monde en matière de politique climatique et pousse le Canada à être plus ambitieux et à accélérer ses propres mesures climatiques.
Dans l'ensemble, cette loi pourrait présenter des avantages pour le Canada. Je pense notamment à la production de véhicules électriques, de batteries pour ces véhicules et de pièces de batteries, ainsi que de matériaux de construction à faible teneur en carbone. Cette loi pourrait donner un coup de pouce aux producteurs canadiens, parce qu'ils produisent, en moyenne, de 15 % à 74 % moins de CO2 que les producteurs américains eux-mêmes. En même temps, le secteur canadien de l'acier et le secteur manufacturier en général seront confrontés à des défis en raison de l'exigence que 100 % du fer et de l'acier utilisés dans les projets énergétiques nationaux soient d'origine américaine, comme une grande partie des produits usinés.
La loi américaine pourrait ouvrir d'autres portes aux entreprises canadiennes en amont, dans le domaine de l'extraction de minéraux critiques pour les batteries des véhicules électriques, par exemple. Le Canada est l'un des rares pays à posséder la plupart des métaux et minéraux essentiels à la production de batteries pour véhicules électriques et à avoir la capacité de produire des matériaux de pointe pour la fabrication de batteries avec une faible empreinte carbone grâce à son réseau électrique propre. Toutefois, il nous faudra attendre encore de nombreuses années avant de pouvoir exploiter pleinement ce potentiel au Canada, ce qui pourrait constituer un défi pour tirer pleinement avantage de cette nouvelle loi américaine. Par conséquent, le Canada doit agir dès maintenant.
Dans l'ensemble, les mesures climatiques et énergétiques contenues dans la loi sur la réduction de l'inflation des États-Unis visent à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % d'ici 2030, comme l'espère le Canada aussi. Cette loi pourrait donc générer encore plus de bons emplois au Canada, des emplois syndiqués, espérons‑le, ce qui sera important dans la transition vers une économie à faibles émissions de carbone pour les travailleurs.
Sur la scène internationale, cette loi attire également l'attention de la Corée du Sud et de l'Union européenne. L'Union européenne a dressé une liste d'au moins neuf dispositions de la loi américaine qui, selon elle, enfreignent les règles du commerce international. L'Union européenne et les États-Unis ont mis sur pied un groupe de travail pour discuter de la façon de répondre aux préoccupations de l'Union européenne.
Divers acteurs au Canada se posent également de nombreuses questions sur l'interprétation et la mise en œuvre de divers éléments de cette loi. Il vaudrait peut-être la peine d'entreprendre une étude approfondie des effets de cette loi sur le Canada. Toutefois, ne il ne faut pas se leurrer, la loi sur la réduction de l'inflation place les États-Unis au premier plan. Il s'agit d'une mesure protectionniste destinée à favoriser les intérêts américains. Elle crée cependant de la certitude, pave clairement la voie à une stratégie industrielle ambitieuse visant à optimiser la croissance, à générer de bons emplois et à orienter les travailleurs vers une économie à faibles émissions de carbone.
Le Canada doit offrir la même certitude politique. Il doit intégrer les mesures et les engagements annoncés dans le dernier budget fédéral et l'Énoncé économique de l'automne dans un cadre stratégique global qui articule une vision claire. Les syndicats doivent pouvoir participer à toutes les discussions, d'égal à égal, dans l'élaboration de politiques et d'un cadre stratégique. Le cadre canadien doit renforcer les politiques existantes, être stratégiquement sélectif dans ses priorités et miser sur nos forces. La loi américaine permet d'investir davantage dans les Américains en leur offrant de meilleurs prix pour les médicaments sur ordonnance et un meilleur accès aux soins de santé, par exemple.
Le Canada doit tabler sur ses avantages stratégiques établis pour aider ses travailleurs et favoriser les investissements dans ses entreprises, notamment par le renforcement de nos régimes de santé publics et l'instauration d'un régime universel d'assurance-médicaments.
La loi américaine propose des mesures de soutien accru à la population, elle s'attaque avec vigueur au changement climatique, elle aide les travailleurs et crée de bons emplois syndiqués, bien rémunérés. Ainsi, le cadre canadien devra à tout le moins avoir les mêmes objectifs.
Je vous remercie beaucoup de votre attention. J'ai hâte de répondre à vos questions.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
J'aimerais commencer par souligner que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Je viens vous parler de l'importance pour notre pays de demeurer concurrentiel sur la scène internationale et face à notre principal partenaire commercial. Sans harmonisation et parité au Canada avec la loi américaine sur la réduction de l'inflation, ou IRA, nous pourrions perdre beaucoup d'occasions de créer de nouveaux emplois et de préserver ceux existants, de même que perdre des investissements et des possibilités d'exportation.
L'industrie nucléaire canadienne est un atout stratégique pour le pays sur la scène tant nationale qu'internationale. Depuis plus de 60 ans, le Canada est un chef de file mondial dans le secteur nucléaire, un secteur que nous avons bâti en nous appuyant sur une base solide, la technologie CANDU, une technologie canadienne. Les projets de remise en état des centrales de Darlington et de Bruce sont les projets d'infrastructure d'énergie propre les plus importants au pays et représentent des investissements d'une valeur de 26 milliards de dollars. Ces projets se déroulent selon les échéanciers et les budgets prévus.
Ces projets de grande envergure ont permis de mettre en place une chaîne d'approvisionnement robuste, dotée d'employés hautement qualifiés, et ont ouvert la voie à l'innovation dans le secteur des petits réacteurs modulaires, ou PRM, en permettant au Canada d'être un pionnier dans ce secteur en Ontario, au Nouveau-Brunswick et, par la suite, en Saskatchewan et en Alberta.
En 2022, le gouvernement fédéral a mentionné clairement et à maintes reprises que le secteur nucléaire a un rôle primordial à jouer pour atteindre la carboneutralité au pays. Le budget 2022 prévoyait des fonds pour poursuivre le développement des PRM. De nombreux projets d'énergie nucléaire ont été financés dans le cadre du Fonds d'innovation stratégique. De plus, la Banque de l'infrastructure du Canada a annoncé des investissements de près d'un milliard de dollars dans le secteur des PRM en Ontario.
Toutefois, ces investissements risquent d'être en vain si notre industrie ne peut pas demeurer concurrentielle, en particulier en raison de la loi sur la réduction de l'inflation. Dans le cadre de cette loi, les États-Unis vont procéder à des investissements stratégiques massifs qui, s'il n'y a pas de pendant ici au Canada, vont miner notre compétitivité en procurant des avantages importants aux entreprises d'énergie nucléaire américaines, y compris un pouvoir d'attraction sur les investissements et la main-d'œuvre.
Dans l'Énoncé économique de l'automne, le gouvernement a souligné l'importance stratégique de faire contrepoids aux initiatives prévues dans la loi sur la réduction de l'inflation. L'Énoncé était un bon début pour permettre au Canada de remédier au déséquilibre concurrentiel que crée cette loi, mais il faut faire plus pour s'assurer qu'il ne perd pas son avantage concurrentiel.
L'Énoncé comportait des mesures pour améliorer notre compétitivité, comme les crédits d'impôt à l'investissement, mais on ne sait pas encore comment ces crédits d'impôt vont s'appliquer à toute la gamme des installations nucléaires existantes et des nouvelles installations potentielles au Canada.
Nous parlons de la nécessité de demeurer concurrentiels, mais nous devons aussi continuer à travailler en étroite collaboration avec nos partenaires aux États-Unis, qui cherchent aussi la parité dans le secteur nucléaire. Nous devons rester conscients du fait que les infrastructures des réseaux énergétiques sont principalement détenues par les provinces au Canada, alors qu'aux États-Unis, elles le sont principalement par le secteur privé. Il faut donc veiller à ce que les incitatifs mis en place permettent de conserver la compétitivité transfrontalière à cet égard.
L'Association nucléaire canadienne recommande donc au Comité de se pencher sur les éléments suivants, aussi nécessaires en vue du budget fédéral 2023.
Il faut s'assurer que l'énergie nucléaire est incluse dans la taxonomie des énergies propres du gouvernement fédéral, de même que dans la définition des obligations vertes.
Il faut s'assurer que — tout comme dans le cas de la loi sur la réduction de l'inflation — les installations détenues par le gouvernement bénéficient équitablement des avantages annoncés dans l'Énoncé économique de l'automne, y compris les crédits d'impôt à l'investissement.
Il faut s'assurer que les grandes installations nucléaires existantes, remises à neuf et nouvelles sont admissibles aux crédits d'impôt à l'investissement et autres instruments financiers.
Il faut inclure, de manière équitable, les grandes installations nucléaires, existantes, remises à neuf et nouvelles, les PRM et les entreprises qui font partie de la chaîne d'approvisionnent nucléaire dans les autres politiques fiscales fédérales relatives à l'énergie propre.
Il faut soutenir l'exportation de l'uranium canadien et des technologies CANDU sur les marchés mondiaux, qui sont devenus plus importants en raison de la vulnérabilité croissante de la sécurité énergétique mondiale.
Enfin, il faut moderniser et harmoniser les régimes de réglementation — tant à l'échelle nationale et internationale — comme la Loi sur l'évaluation d'impact et la Commission canadienne de sûreté nucléaire afin de fournir des processus clairs et prévisibles pour le déploiement en temps opportun des projets et des infrastructures d'énergie nucléaire.
Au cours des semaines à venir, l'Association nucléaire canadienne, en collaboration avec ses membres, procédera à d'autres analyses sur les répercussions de la loi sur la réduction de l'inflation, de même que sur les soutiens financiers et autres dont le secteur nucléaire a besoin pour croître. Nous ferons parvenir les renseignements au Comité.
Je vous remercie. Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Bonjour, madame la présidente, et bonjour aux membres du Comité.
Je m'appelle Mark Zacharias, et je suis le directeur exécutif de Clean Energy Canada, un groupe de réflexion sur l'énergie propre et le climat à l'Université Simon Fraser.
Je vais vous parler aujourd'hui de ce que le Canada peut faire pour maintenir des emplois de haute qualité au pays et saisir les possibilités économiques dans le sillage de la loi sur la réduction de l'inflation.
Cette loi change la donne, et le Canada doit agir dès maintenant et repenser ses stratégies pour attirer et préserver les investissements et les emplois.
Avant l'adoption de la loi sur la réduction de l'inflation, Clean Energy Canada avait effectué de nombreuses études pour démontrer clairement le potentiel économique de la transition à une économie carboneutre. Selon notre modélisation, les emplois dans le secteur de l'énergie propre au Canada entre 2020 et 2030 croîtraient de près de 50 %. À titre d'exemple, d'ici 2030, la chaîne d'approvisionnement des batteries pour les véhicules électriques au Canada pourrait être la source de près de 250 000 emplois directs et indirects et générer 48 milliards de dollars par année dans l'économie canadienne.
La loi sur la réduction de l'inflation peut avoir des répercussions sur l'économie canadienne de bien des façons, mais de grandes possibilités se présentent dans trois secteurs: l'automobile, les batteries et les matériaux de construction. La loi sur la réduction de l'inflation prolonge le crédit d'impôt de 7 500 $ pour les nouveaux véhicules électriques et crée un crédit d'impôt de 4 000 $ pour les véhicules électriques usagés. Le Canada a là une occasion en or de vendre des véhicules électriques, et des pièces pour ces véhicules, sur le marché américain. Avant ce projet de loi, les crédits d'impôt prenaient fin lorsqu'un constructeur atteignait des ventes de 200 000 véhicules électriques, ce qui veut dire que des entreprises comme GM et Tesla n'ont pu en profiter depuis des années. La suppression de cette limite stimulera la vente de véhicules électriques et optimisera les récents efforts du Canada pour conclure des ententes avec Ford, GM, Stellantis, et leurs syndicats, pour que leurs véhicules électriques soient assemblés au Canada.
Ce qui est plus important encore pour le Canada, ce sont les nouvelles règles concernant les batteries. À partir de 2024, pour avoir droit au crédit d'impôt sur les véhicules électriques, le véhicule doit non seulement être construit en Amérique du Nord, mais les minéraux utilisés dans les batteries doivent provenir au moins à 50 % de l'Amérique du Nord ou d'un partenaire commercial des États-Unis — ce qui élimine donc la Chine — et 60 % des composantes en valeur doivent être fabriquées ou assemblées en Amérique du Nord. Ces pourcentages augmentent chaque année de 10 % jusqu'à ce qu'ils atteignent 100 % en 2029.
Comme il est l'un des quelques pays qui possèdent tous les minéraux et les métaux critiques requis pour produire ces batteries, de même que la capacité de produire des matériaux raffinés pour elles en utilisant une électricité faible en carbone, le Canada profitera des exigences de contenu dans les batteries, ce qui nous aidera ainsi à gruger des parts de marché à la Chine, qui détient 79 % du marché mondial des batteries au lithium-ion.
Enfin, en février, le président Biden a annoncé la création du Buy Clean Task Force, le groupe de travail sur les achats sobres en carbone, afin de tirer profit du pouvoir d'achat du gouvernement — le plus important du monde — pour créer une demande pour les produits faibles en carbone, tout en réduisant l'accès à l'aluminium et à l'acier importés à forte intensité en carbone. La loi sur la réduction de l'inflation prévoit le financement nécessaire pour mettre en application ce décret présidentiel, y compris plus de 5 milliards de dollars américains pour l'achat de matériaux de construction faibles en carbone pour les bâtiments fédéraux, les maisons, les routes et les ponts.
La loi sur la réduction de l'inflation prévoit un autre montant de 5,8 milliards de dollars pour l'installation de technologies industrielles avancées, notamment dans les aciéries et les cimenteries.
Le Canada doit agir de manière stratégique et comprendre ses avantages concurrentiels si nous aspirons — et devrions aspirer — à ne pas nous contenter d'exporter des matières premières comme les minéraux critiques. Le Canada a le potentiel de devenir une superpuissance d'énergie propre et de méthodes de fabrication propres, mais nous ne devons pas nous contenter d'essayer d'égaler à la pièce les incitatifs fiscaux prévus dans la loi sur la réduction de l'inflation. En nous concentrant sur nos forces potentielles, nous pouvons être concurrentiels dans nombre de ces secteurs.
Pour y parvenir, nous devons procéder comme suit.
Premièrement, il faut collaborer avec l'industrie et les intervenants pour régler les détails des crédits d'impôt à l'investissement annoncés dans l'Énoncé économique de l'automne.
Deuxièmement, il faut être conscient de l'importance de notre approvisionnement en électricité faible en carbone. Avoir accès à de l'électricité propre, peu chère et fiable est une condition nécessaire aux investissements industriels, et il est essentiel aussi de finaliser la réglementation sur l'électricité propre.
Troisièmement, il faut veiller à avoir une main-d'œuvre hautement qualifiée et offrir des programmes de formation et d'éducation qui sont en phase avec l'économie.
Quatrièmement, il faut construire les infrastructures nécessaires pour exploiter les minéraux et les métaux critiques et transporter l'énergie jusqu'aux nouvelles installations.
Cinquièmement, il faut continuer à décarboner nos industries pour vendre nos produits faibles en carbone aux États-Unis et à nos autres partenaires commerciaux.
Enfin, il faut terminer les mandats de véhicules zéro émission pour mousser la demande de véhicules électriques et donc la production canadienne.
En procédant à une harmonisation stratégique avec les États-Unis, tout en misant sur les forces du Canada, nous pouvons créer un marché nord-américain florissant pour les matériaux et les technologies propres de prochaine génération et rester bien en selle pour atteindre nos objectifs de carboneutralité d'ici 2050.
Je vous remercie, et je serai heureux de répondre à vos questions.
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Je vous remercie beaucoup, madame la présidente, et je remercie tous les membres du Comité de leur invitation à venir discuter de la loi américaine sur la réduction de l'inflation, ou IRA.
Comme on l'a mentionné, je m'appelle John Risley. Je suis le directeur de World Energy GH2, qui prépare le projet Nujio'qonik, un investissement de 12 milliards de dollars américains à Terre-Neuve‑et‑Labrador.
Ce projet produira de l'énergie à partir d'un parc éolien de 3 gigawatts sur la côte Ouest de Terre-Neuve. Les électrolyseurs qui se trouvent tout près à Stephenville convertiront ensuite l'électricité en hydrogène et finalement en ammoniac. L'hydrogène et l'ammoniac sont produits de façon sécuritaire et expédiés partout dans le monde depuis des décennies.
Comme les membres du Comité le savent, le Canada a signé un protocole d'entente avec l'Allemagne pour lui fournir de l'hydrogène vert à partir de 2025. Ce projet se trouve ainsi dans une position exceptionnelle pour donner suite à cet engagement, et faire beaucoup plus, notamment créer des emplois bien rémunérés dans les communautés de Terre-Neuve‑et‑Labrador, et permettre au Canada de faire une transition réussie d'une production conventionnelle à une production faible en carbone et exporter ses produits.
World Energy a signé un protocole d'entente avec la Première Nation Qalipu, de même qu'avec toutes les autres communautés des Premières Nations qui se trouvent dans la région où se déroule notre projet. Le chef Brendan Mitchell de la nation Qalipu a mentionné que ce projet permettra d'offrir de la formation et de créer des emplois dans le secteur de l'énergie verte dans la région. La participation des communautés locales est essentielle, car sans elles, le projet ne pourrait pas avancer.
La grande question qui se pose au Comité aujourd'hui est de savoir si le Canada sera en mesure de soutenir la concurrence dans le secteur de l'énergie verte, face aux crédits d'impôt élevés prévus pour ce genre de projets dans la loi sur la réduction de l'inflation. Je suis ici aujourd'hui pour vous dire que le Canada est en bonne position pour soutenir la concurrence dans le secteur de l'énergie verte, mais pour ce faire, nous devons prendre des décisions rapidement et soutenir l'expansion accélérée de ce secteur au pays.
L'Énoncé économique de l'automne jette les premiers jalons d'une réponse à la loi sur la réduction de l'inflation. Il prévoit un crédit d'impôt pouvant atteindre 40 % pour la production d'hydrogène propre et 30 % pour les technologies propres, comme la production d'énergie à partir d'éoliennes. C'est l'endroit idéal pour entamer la discussion. Toutefois, pour les projets comme le nôtre, nous avons besoin que les détails de telles annonces soient précisés pour pouvoir aller de l'avant.
Des questions subsistent. Par exemple, le crédit d'impôt pour la production d'énergie propre s'appliquera‑t‑il au coût de l'éolienne comme telle ou inclura‑t‑il ses composantes intégrales, comme la base en ciment sur laquelle elle reposera? Qu'en sera‑t‑il de la nouvelle infrastructure routière nécessaire pour acheminer les éoliennes sur place?
Au sujet du crédit d'impôt à l'investissement pour l'hydrogène, nous présumons que cela s'appliquera au coût des électrolyseurs, mais qu'en est‑il des coûts liés au transport de l'énergie entre les éoliennes et les électrolyseurs? Qu'en est‑il des installations d'entreposage spécialisées, de la production de la vapeur et des autres infrastructures de traitement de l'eau? Tout cela est nécessaire dans le cadre d'un tel projet.
Il est possible de simplifier la chose en décidant où tracer la ligne de partage entre les biens nécessaires pour produire l'énergie et ceux nécessaires pour produire l'hydrogène et l'ammoniac. D'un côté, c'est un crédit d'impôt pouvant atteindre 30 % qui s'applique, et de l'autre, un crédit d'impôt pouvant atteindre 40 %. Il faut que tous les biens immobilisés des deux côtés de cette ligne de partage soient inclus pour que ces crédits rendent le Canada concurrentiel face à la loi sur la réduction de l'inflation.
Pour ce qui est de savoir ce qui constitue un bien immobilisé, il faudrait s'en remettre aux principes comptables généralement reconnus ou aux normes internationales d'information financière. Le responsable de projet qui soumet une demande de crédit devrait présenter un certificat de vérification d'un cabinet comptable reconnu, afin de classer les biens d'un côté ou l'autre de la ligne de partage.
Le moment de ces décisions est crucial. À l'heure actuelle, chaque jour que l'on retarde à commander des composantes clés, comme les éoliennes ou les électrolyseurs, peut retarder grandement la livraison de l'équipement, en raison des difficultés liées à la chaîne d'approvisionnement et de la forte demande que créent des politiques comme la loi sur la réduction de l'inflation.
Le Canada doit agir rapidement et fournir des certitudes entourant l'annonce faite dans l'Énoncé économique de l'automne, en veillant à ce que les crédits d'impôt à l'investissement s'appliquent à tous les biens d'un projet qui sont nécessaires à la production de l'hydrogène vert et de l'ammoniac vert.
L'idée n'est pas de crier au loup, mais je dois vous dire que je reviens tout juste, il y a deux heures, d'un voyage en Europe où j'ai passé une semaine à visiter des fournisseurs de pièces d'équipement essentielles, et j'ai dû faire des pieds et des mains pour avoir leur attention, car ils ont les yeux rivés sur un grand nombre de projets en préparation aux États-Unis.
Je vous remercie, madame la présidente.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins de leur présence.
Une chose est certaine: jusqu'à présent, les audiences nous ont beaucoup éclairés quant à la lenteur du gouvernement canadien vis-à-vis de la nouvelle réglementation américaine. Plus important encore, elles nous ont éclairés quant à la lenteur du gouvernement à répondre aux demandes des différents secteurs canadiens pour qu'on puisse être un chef de file en matière de transition énergétique.
M. Jean Simard, président de l'Association de l'aluminium du Canada, nous a parlé de l'importance de mettre en place un amortissement accéléré, afin d'encourager de nouveaux investissements dans l'infrastructure de production. Il nous a aussi parlé d'une politique d'achat d'aluminium à faible empreinte carbone et d'investissements en innovation et dans la recherche‑développement de l'aluminium recyclé. Il a aussi mentionné qu'il fallait que l'environnement soit plus concurrentiel sur les plans fiscal et réglementaire. Ces demandes sont faites depuis plusieurs années. Or, au lieu d'être un précurseur et un facilitateur pour l'industrie, le gouvernement canadien attend toujours que les États‑Unis bougent d'abord. Le Canada réagit par la suite. À mon avis, il faut que cela arrête. Il faut manifestement prendre un nouveau virage.
Cette semaine, nous avons entendu un autre témoignage marquant, soit celui de M. Masterson, président‑directeur général de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie. Le secteur canadien de la chimie et des plastiques est le troisième secteur manufacturier en importance au Canada et les expéditions annuelles s'élèvent à environ 90 milliards de dollars. Quatre-vingts pour cent de la production annuelle sont exportés, et la majorité des exportations sont destinées aux États‑Unis.
Selon M. Masterson, la vraie valeur des mesures incitatives de l'Inflation Reduction Act, ou IRA, et le plus grand défi pour le Canada sont la transparence et la certitude offerte aux investisseurs. Il a aussi mentionné que nous payions un prix sur le carbone très élevé et en constante augmentation.
Quelques industries ont la chance de se retrouver sur la belle liste du gouvernement, et certains représentants de ces industries sont ici aujourd'hui. Triées sur le volet, elles obtiennent un accès aux subventions fédérales, à l'impôt, aux prêts et à d'autres mesures incitatives en matière de décarbonisation.
Le problème, comme l'expliquait M. Masterson, c'est que les critères auxquels on doit répondre pour figurer sur cette liste ne sont pas transparents, ils ne sont pas clairs et ils ne sont pas disponibles pour tout le monde. Cela signifie que n'importe quelle industrie ne peut faire partie d'une analyse de rentabilisation, ce qui désavantage le Canada.
En revanche, aux États‑Unis, aucune industrie ou entreprise ne figure sur une liste noire. Tout le monde est sur une belle liste. Tout le monde peut consulter l'IRA et tenir compte de ses mesures incitatives très réelles, très matérielles et très accessibles lors de l'analyse de la rentabilisation des projets de décarbonisation industrielle proposée.
Lors de sa comparution, le 18 novembre 2022, le Conseil canadien des affaires a mentionné que l'énoncé économique de l'automne 2022 contient un manque important de détails concernant les crédits d'impôt à l'investissement pour les technologies propres et l'hydrogène propre. Le Conseil canadien des affaires a ajouté que les mesures incitatives étaient plus intéressantes et les règles sont plus claires aux États‑Unis.
Prenons l'exemple d'une entreprise ayant des activités au Canada et aux États‑Unis qui veut investir pour réduire son empreinte carbone.
Monsieur Risley, du point de vue des entreprises canadiennes du secteur des technologies propres et de l'hydrogène propre, comment ce manque de détails peut-il influer sur les décisions relatives aux investissements?
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Je vous remercie, monsieur.
Eh bien, nous avons besoin de précisions pour savoir à quoi s'appliquent les crédits d'impôt, car nous devons procéder à une modélisation financière. Sans cette modélisation, nous ne pouvons pas convaincre nos consortiums de prêteurs. On parle d'investissements de milliards de dollars, alors de toute évidence, nous devons pouvoir démontrer de façon très précise en quoi consistent les politiques du gouvernement.
Je ne veux pas donner l'impression d'être trop critique. Ce n'est pas le cas. L'Énoncé économique de l'automne est très positif au sujet de l'orientation, mais sans ces détails, nous ne pouvons tout simplement pas planifier. Si nous ne pouvons pas planifier, nous ne pouvons pas commander l'équipement, et pour pouvoir commander l'équipement nécessaire pour des projets de cette taille, il faut procéder à des dépôts de centaines de millions de dollars, alors c'est du très sérieux, comme vous pouvez l'imaginer.
Nous croyons savoir que les détails seront fournis dans le budget de mars, alors nous encourageons le gouvernement à bien vouloir consulter l'industrie d'ici là afin que nous n'ayons pas de surprise en mars et que nous puissions bien faire connaître nos points de vue et nos arguments sur la bonne façon, si on veut, de concevoir ces crédits afin qu'ils puissent présenter une réponse concurrentielle significative à la loi sur la réduction de l'inflation.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Madame la présidente, la transformation de l'industrie qui est nécessaire pour prendre le virage vert à l'échelle mondiale est comparable à ce qui s'est passé lors de la révolution industrielle. On parle de pays amis et de délocalisation régionale, et quand on pense à la loi sur la réduction de l'inflation et à la CHIPS and Science Act, on voit que les États-Unis se préparent essentiellement à devenir une superpuissance dans le secteur manufacturier.
J'ai une question pour Mme Elizabeth Kwan.
Madame Kwan, vous avez parlé des problèmes pour l'industrie de l'acier au Canada. Quand on regarde la loi sur la réduction de l'inflation et la CHIPS and Science Act, on se rend compte que les États-Unis veulent se doter d'une nouvelle capacité de fabrication et de production dans leur pays. Leur production d'acier, comme l'aluminium ici, stagne depuis 20 ans. Au Canada, la production de l'acier a, en fait, passé d'environ 17 millions de tonnes en 2000 à environ 12,5 millions de tonnes l'an dernier, en 2021, si je ne me trompe pas, et il n'y a pas eu d'augmentation de la capacité existante au cours des 20 dernières années.
Quatre-vingt-quatorze pour cent des exportations d'acier prennent la route des États-Unis. Nous avons signé des accords de libre-échange avec l'Union européenne, des pays de l'Asie-Pacifique et environ 50 ou 60 pays dans le monde, mais nos producteurs d'acier n'exportent qu'aux États-Unis, et ils n'augmentent pas leur capacité de production pour tirer parti de nos ressources nationales disponibles et produire de la valeur ajoutée ou de la valeur dans l'économie canadienne.
Lorsque leurs exportations aux États-Unis se heurtent à un petit problème, c'est un puissant lobby qui vient demander des fonds au gouvernement pour les protéger, mais je ne vois pas leur engagement. C'est peut-être parce que ces entreprises sont presque toutes détenues par des intérêts étrangers, sans propriété canadienne, et qu'elles considèrent le Canada simplement comme une succursale pour leurs exportations aux États-Unis ou pour le marché canadien et qu'elles ne souhaitent pas exporter vers l'Union européenne ou les pays de l'Asie-Pacifique. Qu'en pensez-vous?
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C'est une très bonne question.
En guise de préambule, je dirais qu'au cours des deux dernières années, il y a eu au Canada 17 annonces au sujet des batteries, dont certaines concernant la production de cathodes et d'anodes. Or, si ces annonces se concrétisent, on verra 15,2 milliards de dollars de nouveaux investissements au Canada.
Pour répondre à votre question, je pense que la production de cathodes et d'anodes est en train de prendre forme. Pour l'instant, nous devons aligner les minéraux essentiels et la production de matériaux destinés aux batteries. Ces éléments doivent être en place pour pouvoir passer au volet suivant, qui est l'assemblage des cellules et la production de cathodes et d'anodes. L'annonce faite la semaine dernière par Vale et GM concernant une usine de fabrication de sulfure de nickel à Bécancour est un bon début.
Je pense que l'autre raison pour laquelle ils viendront, c'est que nous avons de l'énergie propre. Nous avons un réseau électrique très propre. Nous avons une main-d'œuvre qualifiée. Notre main-d'œuvre est bien formée. Le Canada se rapproche de l'assemblage des véhicules électriques, surtout depuis que les trois grands constructeurs ont décidé de se passer à la fabrication de ces véhicules au cours des deux prochaines années.
Je serai heureux de faire un suivi à ce sujet.
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Merci, madame la présidente.
C'est pour moi un plaisir d'être parmi vous. Je tiens à saluer votre présence et celle de tous mes collègues. Je tiens à remercier tous les employés, notamment les interprètes, qui contribuent aux travaux de ce comité.
Je tiens aussi à saluer les quatre témoins. Je les remercie de leur présence et de leurs présentations.
Ma première question s'adresse à tous les témoins. Si vous voulez, vous pouvez répondre dans l'ordre de présentation initial.
J'ai beaucoup entendu parler des demandes que chaque organisme présente au gouvernement canadien. Ma question tend plutôt vers une analyse de la loi américaine sur la réduction de l'inflation, l'IRA. D'après vous, que voudrait-on voir apporter comme modification à la version actuelle de la loi? Quelle pression le gouvernement canadien devrait-il exercer auprès de ses alliés américains en ce sens?
Mme Kwan peut peut-être commencer à répondre.
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Je suis heureux d'être de retour, madame la présidente. Ma première question s'adresse à Mme Kwan.
Si nous revenons à l'automne 2021, les crédits d'impôt pour la fabrication de véhicules électriques ont suscité beaucoup d'inquiétude, notamment la possibilité que le Canada soit exclu de l'industrie en raison des conditions liées à ces crédits d'impôt.
J'ai participé à un effort de lobbying à Washington pour faire en sorte que le Canada ne soit pas exclu de ces dispositions. Les syndicats canadiens ont joué un rôle très important, en particulier certains des syndicats internationaux qui ont des sections frères et sœurs aux États-Unis. Je pense au Syndicat des Métallos, à mon propre syndicat, la Fraternité internationale des ouvriers en électricité, et aux Teamsters.
Je sais que vous avez parlé plus tôt de l'importance de la présence des syndicats à la table des négociations. Pourriez-vous nous parler un peu de cet exemple précis et nous dire aussi comment faire en sorte que les syndicats soient à la table des discussions sur les investissements de la loi sur la réduction de l'inflation et les équivalents canadiens, et sur la collaboration entre le Canada et les États-Unis dans ce nouveau chapitre économique axé sur la lutte contre les changements climatiques? Si vous pouviez parler un peu de ce que les syndicats ont à offrir lorsqu'ils sont à la table, je pense que ce serait une bonne chose.
Je pense qu'il était très clair que la Build Back Better Act aurait nui à l'industrie automobile, par exemple. C'est pourquoi vous et nous étions là à nous battre pour faire adopter quelques modifications.
Cependant, ce qui est vraiment intéressant avec la loi sur la réduction de l'inflation, c'est la façon dont elle a présenté le fait que la création d'emplois dans une économie à faibles émissions de carbone encourage les bons emplois aujourd'hui et ouvre par conséquent la porte à de très bons emplois syndiqués dans le futur grâce à sa formation en apprentissage.
Puisque certaines études indiquent que la loi sur la réduction de l'inflation créera neuf millions d'emplois sur dix ans, nous devons nous assurer que les travailleurs canadiens seront en mesure de prendre part à ce nouveau développement lié à l'augmentation et à l'expansion de la fabrication. Nous devons travailler à la création de nouveaux bons emplois — des emplois syndiqués, je l'espère — dans une économie à faibles émissions de carbone.
Nous avons tous dit qu'il y avait beaucoup de lacunes et un manque de détails, même avec les choses qui ont été mises de l'avant dans l'Énoncé économique de l'automne. Je pense que les syndicats doivent être résolument mis à contribution, et ce de deux manières. D'une part, nous pouvons apporter une contribution importante à l'ensemble de la discussion sur le type de formation, ainsi que sur la manière d'améliorer les types d'emplois qui seront créés.
Je pense que cela servirait bien le Canada d'avoir une présence syndicale très forte à la table des nouvelles politiques pour ce cadre dont j'ai parlé. C'est quelque chose qui serait un avantage pour les Canadiens, certes, mais qui permettrait aussi de travailler en étroite collaboration avec l'administration Biden, qui est très favorable aux travailleurs et aux syndicats. Je pense que c'est à ces égards que nous pourrons contribuer à toute cette entreprise, maintenant et pour la suite des choses.
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Merci, madame la présidente.
Merci à tous les témoins d'être présents avec nous cet après-midi.
Au cours des dernières audiences que nous avons tenues, il y a eu un consensus parmi presque tous les témoins sur le fait que nous avons besoin d'éclaircissements et que nous devons répondre rapidement à l'Inflation Reduction Act des États-Unis.
Madame Kwan, vous avez dit vous-même que cette loi changeait la donne. Elle redéfinit le monde du climat. Bob Masterson, le PDG de l'Association canadienne de l'industrie de la chimie, a récemment déclaré que l'Inflation Reduction Act était l'instrument de politique publique le plus audacieux jamais créé pour décarboniser l'une des principales économies du monde. Il a ajouté que les Américains avaient libéré le pouvoir du capital privé pour décarboniser leur économie, alors que le Canada était toujours prisonnier des débats sur les stratégies et les plans. Nous devons réagir et nous devons réellement avancer.
Monsieur Gorman, je viens de lire un article que vous avez rédigé en mai pour Policy Options. Vous y parliez à nouveau du gouvernement et de l'énergie nucléaire. L'article s'intitulait « Time for Canada to commit to nuclear power », et vous y mentionnez que le gouvernement du Canada se fait le champion du nucléaire un jour, mais le laisse de côté le lendemain. Vous êtes au fait des récents investissements de 970 millions de dollars consentis par la Banque de l’infrastructure du Canada. Certaines dispositions sont apparues dans le budget fédéral de 2022. Toutefois, le nucléaire a été exclu de la politique de crédit d'impôt propre en 2020. Il n'a pas non plus été inclus dans les déductions pour amortissement accéléré et, bien sûr, dans le cadre des obligations vertes du Canada.
À mesure que nous avançons, nous devons également examiner certaines de vos cinq recommandations. Vous avez dit que le gouvernement peut prendre des mesures pour s'adapter, en particulier en Ontario. Dans cette province seule, 60 % du réseau est alimenté par l'énergie nucléaire. Je viens de la circonscription de Niagara Falls, qui fournit 2 200 mégawatts d'énergie hydroélectrique propre. Cependant, 60 %...
Dans le passé, j'ai eu le plaisir de travailler pour Bruce Power et de gérer les relations communautaires pour cette entreprise lorsqu'elle s'est établie à Kincardine. Vous pouvez constater l'incidence du déménagement de British Energy au Canada. L'implantation de cette entreprise a permis non seulement de sauver la collectivité et de produire de l'électricité, mais aussi d'améliorer les chaînes d'approvisionnement. Dans ma seule circonscription, vous avez E.S. Fox, qui compte des milliers d'emplois — des travailleurs — non seulement dans le secteur nucléaire, mais aussi maintenant dans la centrale de Darlington, puisqu'ils vont y travailler.
Quelles sont les mesures que nous devons prendre, en particulier dans le cadre de notre progression vers la décarbonisation? Nous allons avoir besoin de plus d'énergie. À l'heure actuelle, 60 % du réseau de l'Ontario est alimenté par l'énergie nucléaire. En ce qui concerne votre point sur les services publics et les grands producteurs d'électricité, comme le nucléaire, comment pouvons-nous amener le gouvernement à changer la façon dont il envisage cette question et à l'inclure dans les obligations vertes pour que nous puissions avancer?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je sais que la propreté du réseau canadien a été évoquée à plusieurs reprises dans les observations liminaires. D'après ce que je comprends, notre réseau est propre à 85 % et, à mesure que nous nous débarrassons du charbon dans l'ensemble du pays pour arriver à un réseau propre à 100 %, nous obtiendrons un avantage concurrentiel encore plus important à l'échelle nationale et internationale.
Je vais évidemment poursuivre sur ce qu'a dit M. Baldinelli, à savoir que l'élimination progressive du charbon dans la province de l'Ontario, la province que lui et moi partageons, a été déterminante, tout comme le développement de l'énergie nucléaire en Ontario.
Monsieur Gorman, je suis heureux de vous revoir. Je voulais vous poser une question sur le passage de l'énoncé économique de l'automne relatif à l'énergie nucléaire et, comme vous l'avez mentionné, au crédit d'impôt à l'investissement disponible pour les petits réacteurs modulaires. Il y a ensuite un autre passage qui parle de la façon dont l'admissibilité sera examinée pour ce qui est de l'énergie nucléaire à grande échelle.
Compte tenu de la division que vous avez mentionnée entre les secteurs public et privé au Canada, pouvez-vous nous parler des réacteurs nucléaires à grande échelle et de la place qu'occupe le réacteur CANDU dans le régime de crédit d'impôt qui doit être mis en place le plus rapidement possible? Quel est le rôle des réacteurs CANDU à grande échelle dans ce contexte?
C'est à vous, monsieur Gorman.
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Je pense que l'on reconnaît de plus en plus, ici au Canada et dans le monde, que nous allons devoir augmenter considérablement la quantité d'électricité propre que nous produisons afin de pouvoir changer les combustibles utilisés dans divers secteurs pour les décarboniser. La plupart des experts estiment qu'il faudra doubler, tripler ou même quadrupler la quantité d'électricité propre que nous produisons.
Le nucléaire est, et ce depuis des décennies, une source très importante d'électricité propre ici au Canada. Il est de plus en plus évident que nous pouvons tirer parti de ces petits réacteurs modulaires pour répondre à une grande partie de nos besoins, mais il est aussi de plus en plus clair que nous aurons également besoin de grands réacteurs nucléaires.
Alors que nous cherchons à définir les modalités des crédits d'impôt à l'investissement, nous devons absolument nous assurer que ceux‑ci s'appliquent aux grands réacteurs nucléaires, comme c'est le cas aux États-Unis. Nous devons être conscients du fait qu'ici, au Canada, la plupart de nos grands projets d'électricité propre sont menés par des sociétés d'État, des sociétés de services publics qui sont des organismes sans but lucratif. Les crédits d'impôt à l'investissement doivent non seulement être élargis pour inclure les grands réacteurs nucléaires, comme c'est le cas aux États-Unis, mais ils doivent aussi être modifiés de manière à tenir compte de la nature non lucrative des sociétés d'État qui mènent cette révolution de l'énergie propre.
Je pense également que les éléments que vous avez énumérés sont des programmes utiles qui ont été introduits dans l'énoncé économique de l'automne. Je précise aussi que c'est ce que j'ai indiqué en préambule de mes observations. Le budget de 2022 contient certains éléments et l'énoncé économique de l'automne en contient d'autres. Dans l'énoncé économique de l'automne, le gouvernement du Canada a essayé de répondre un peu à l'Inflation Reduction Act. Ces éléments doivent être rassemblés dans une stratégie du type « Le Canada d'abord » pour donner un sens à ce que nous voulons vraiment accomplir avec tout cela.
Je pense que la formation aux emplois syndiqués est une très bonne chose, bien sûr, mais comme je l'ai déjà dit, ce que tente de faire l'Inflation Reduction Act est très agressif. À bien des égards, nous ne sommes pas seulement en concurrence pour les affaires; pour être honnête, nous le sommes aussi pour les personnes, pour les travailleurs. Nous devons être en mesure de soutenir les travailleurs en leur offrant davantage de formation et en veillant à ce que les exigences en matière d'apprentissage soient aussi agressives que celles énoncées dans l'Inflation Reduction Act, si ce n'est plus, afin de ne pas nous contenter de bâtir le présent, mais aussi l'avenir de tous ces types d'emplois et domaines de l'économie à faible émission de carbone.
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Merci, madame la présidente.
J'aurais aimé que les quatre témoins répondent à ma prochaine question, mais ce sera impossible en deux minutes et demie. Je vais l'adresser à Mme Kwan, et, si les autres témoins souhaitent y répondre, je les invite à envoyer leur réponse par écrit à la greffière, qui pourra la transmettre à tous les membres du Comité.
Madame Kwan, plusieurs témoins que nous avons entendus jusqu'ici ont dit craindre que les mesures de financement prévues dans la loi américaine déclenchent une sortie des investissements du Canada vers les États‑Unis et entraînent une perte d'emplois dans le secteur manufacturier du Canada.
Partagez-vous cette crainte? Comment le Canada pourrait-il éviter cette sortie d'investissements?
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Merci beaucoup pour votre question.
Je pense que l'ampleur de l'Inflation Reduction Act et la quantité d'argent investie dans celle‑ci sont assez stupéfiantes. Très franchement, il ne s'agit pas seulement du Canada. Le monde entier y prête attention. Je pense que nous devons savoir ce à quoi nous avons à faire, et c'est ce que j'ai dit précédemment. Nous devons étudier et examiner les répercussions sur le Canada et sur les travailleurs canadiens.
Il serait très logique de dire que nous ne pouvons pas égaler, dollar pour dollar, les mesures prises par les Américains, et que nous devons donc agir de manière stratégique. Nous devons vraiment investir dans les gens et dans les travailleurs et nous assurer de créer de bons emplois au Canada.
L'un des avantages du Canada est que — je sais qu'on pourrait penser que cela n'a pas d'incidence directe — nous avons tout ce qu'il faut pour créer de bonnes collectivités à mesure que nous avançons. Nous avons des atouts, comme les soins de santé publics et les lois sur l'équité et l'inclusion. Ce sont des atouts que nous laissons en quelque sorte sur la table ou que nous négligeons. Nous nous disons: « Oh oui, bien sûr, nous avons ces atouts », mais je pense que nous pourrions les intégrer à notre cadre stratégique. Nous pouvons réellement développer la population du Canada, et créer de bons emplois, du bon travail et de bons emplois syndiqués à mesure que nous avançons.
Merci.
Ce que j'entends très clairement, c'est que nos concurrents s'engagent dans une planification industrielle assez dynamique et que le Canada ne le fait pas. Nous avons une longue tradition de ne pas le faire, qui remonte à au moins 30 ans. Le Canada essaie de trouver une façon de le faire afin de répondre à ses concurrents qui sont nettement plus sérieux lorsqu'il s'agit d'adopter une approche coordonnée du développement industriel dans des secteurs qui semblent être, et devraient être, l'avenir de notre économie.
M. Risley a dit plus tôt qu'il espérait que l'on tiendrait des consultations empreintes d'un sentiment d'urgence sur certains des éléments que le gouvernement a déjà annoncés dans l'énoncé économique de l'automne. Lorsque nous parlons de cet effort et de la nécessité de réunir les syndicats et l'industrie à la table du gouvernement, ces tables existent-elles déjà? Si oui, où sont-elles? Quel nom leur a‑t‑on donné? Qui y siège? À quelle fréquence cette consultation régulière a‑t‑elle lieu, de sorte que nous ayons un processus de planification industrielle continu, ou nos témoins ici présents estiment‑ils, au nom de leurs industries respectives, qu'il n'existe pas vraiment d'infrastructure?
J'aimerais commencer par M. Risley, puis les autres témoins pourront intervenir dans le temps qui restera.
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Je vous remercie de votre question, monsieur Blaikie.
L'infrastructure n'existe pas au sens classique du terme. Cependant, des éléments de cette infrastructure existent. De toute évidence, l'industrie parle aux syndicats et ceux‑ci parlent au gouvernement. L'industrie a la responsabilité de s'organiser pour agir à l'unisson en ce qui concerne sa position à l'égard du gouvernement, mais il n'existe pas d'infrastructure officielle de consultation concernant des programmes tels que la réponse à l'énoncé économique de l'automne.
Je ne veux pas donner l'impression de défendre le gouvernement, mais d'un autre côté, l'IRA est vraiment sortie de nulle part. Personne ne s'y attendait et puis, tout à coup, il y avait cette incroyable mesure législative. Elle a pris tout le monde par surprise, et nous devons agir rapidement.
L'industrie est prête à intervenir rapidement. Je dirais que les emplois qui vont être créés par la révolution de l'énergie propre et la transition vers l'énergie propre au Canada seront d'excellents emplois. Il n'y a aucun doute là‑dessus. Nous devons simplement aller de l'avant pour saisir cette occasion, car si nous ne le faisons pas, nous allons manquer le bateau. Nous ne serons pas en deuxième position; nous serons en septième ou huitième position.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je tiens à remercier les témoins d'être ici aujourd'hui. Je suis toutefois très préoccupé par les témoignages que nous entendons.
Avant la mise à jour économique de l'automne, d'autres témoins nous avaient dit que l'IRA était censée être la solution au plan des États-Unis pour reconstruire en mieux. Il semble que le gouvernement canadien n'ait pas entamé un dialogue à ce sujet. La loi a été adoptée le 16 août, et bon nombre des personnes qui ont témoigné devant nous avant la mise à jour économique de l'automne souhaitaient que des mesures soient prises de toute urgence. Il n'est pas acceptable d'attendre jusqu'en mars ou avril.
Je pense que, juste au cours de notre dernière réunion, M. Masterson a déclaré que la période pour étudier et débattre la question était terminée. Le Conseil canadien des affaires a fait valoir que la ministre ne peut pas se permettre d'attendre, et il l'a exhortée à prévoir la date du budget en février, au lieu de mars ou avril.
Monsieur Risley, Mme Vera-Perez, la représentante de l'Association canadienne de l'hydrogène et des piles à combustible, a déclaré qu'en raison de notre manque d'action, « le Canada prend du retard » et que nous devons « regagner notre position de chef de file ».
C'est extrêmement urgent. Même l'énoncé économique de l'automne concluait: « Sans nouvelles mesures pour suivre le rythme de l'IRA, le Canada risque d’être laissé pour compte ».
Je suis extrêmement inquiet parce que les choses qu'on nous demande semblent... Vous savez, c'est mentionné dans la mise à jour, mais rien n'est concret dans cette mise à jour. Rien n'est certain. Avec l'incertitude américaine, nous voyons des entreprises qui s'inquiètent de savoir si elles doivent déménager là‑bas tout de suite, avant que les changements n'entrent en vigueur aux États-Unis.
Monsieur Gorman, à Oshawa, je suis entouré par l'industrie de l'énergie nucléaire et par le secteur automobile. Vous avez mentionné certaines choses qui pourraient contribuer à la compétitivité des industries. Vous avez mentionné les obligations vertes, je crois, pour permettre aux entreprises appartenant au gouvernement d'avoir accès à des crédits d'impôt et des fonds pour moderniser les entreprises. Pourriez-vous dire au Comité si le gouvernement est en mesure de faire quelque chose avant mars ou avril, quel que soit le moment où il présentera son prochain budget, pour apporter une certaine certitude au marché? Nous aimerions que ces entreprises soient attirées ici, au Canada, au lieu que nous les perdions au profit des États-Unis.
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Le grand potentiel des petits réacteurs modulaires est lié à leur adaptabilité. Ils peuvent être si petits qu'ils peuvent tenir à l'arrière d'un camion et être livrés à une collectivité du Nord, une collectivité des Premières Nations, ou ils peuvent être grands et fournir de l'électricité.
Leurs utilisations au Canada, si je peux les résumer succinctement, sont vraiment axées sur leur adaptabilité et leur application à des marchés plus restreints. Même la Saskatchewan, par exemple, qui doit éliminer progressivement le charbon, ne pourrait pas accommoder un réacteur conventionnel complet sur son réseau électrique. De très petits réacteurs modulaires pourraient être fournis aux collectivités autochtones du Nord, afin de leur permettre de se passer du diesel.
Enfin, ces petits réacteurs modulaires produisent de la chaleur à très haute température, et cette chaleur peut être utilisée pour remplacer la chaleur industrielle nécessaire pour produire de l'acier et du ciment. Cette chaleur peut être utilisée pour exercer des activités minières liées à l'extraction et au traitement du pétrole et du gaz, d'une manière que l'électricité ne peut alimenter à elle seule.
Grâce à la chaleur à haute température que les petits réacteurs modulaires génèrent, leur capacité à décarboniser l'industrie lourde du Canada de manière très adaptable nous permettra de relever le principal défi du Canada. Nous avons un réseau électrique propre, mais nous avons du mal à décarboniser l'industrie lourde. Les petits réacteurs modulaires peuvent nous y aider.
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Merci, madame la présidente.
Encore une fois, ma question s'adresse à l'ensemble des témoins. Étant donné le peu de temps mis à notre disposition, je vais la poser à Mme Kwan. J'invite les autres témoins à transmettre leurs réponses par écrit à la greffière du Comité, qui nous les transmettra par la suite.
Madame Kwan, quand le représentant de Toyota Motor Manufacturing Canada Inc. est venu témoigner devant le Comité, il a soulevé le problème de l'incertitude causée par la loi américaine et le risque qu'elle entraîne une suspension des activités prévues tant que l'incidence réelle de la nouvelle loi ne sera pas bien comprise. Cet élément a souvent été soulevé par les témoins aujourd'hui. Ainsi, tant que l'incidence réelle ne sera pas bien comprise, cela aura des répercussions sur les décisions d'investissement des entreprises au Canada.
Quels seraient vos commentaires à cet égard? Quelles répercussions l'incertitude causée par la loi américaine aura-t-elle sur les décisions que prendront les entreprises canadiennes en matière d'investissements au Canada?
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Merci beaucoup pour la question.
J'ai mentionné l'importance de favoriser les politiques axées sur la certitude dans ma déclaration liminaire. Dans le secteur de l'automobile, le milieu syndical a bien accueilli les possibilités que renferme la loi américaine de 2022 sur la réduction de l'inflation concernant notamment les véhicules électriques et les piles. Nous sommes en bien meilleure posture avec la loi de 2022 qu'avec la Build Back Better Act. La nouvelle loi ouvre davantage de portes.
Globalement, même les voix en faveur de la suspension des activités se sont tues avec le passage de la Build Back Better à la loi de 2022. Les appels en ce sens sont probablement moins marqués aujourd'hui que dans le passé.
En ce moment, l'intégration des marchés permet à bon nombre d'activités de se poursuivre. Nous devons étudier les répercussions de la loi américaine de 2022 et savoir quelles normes y sont prévues. Nous devons également établir si nos normes sont équivalentes, acceptables ou supérieures. Nous devons commencer par là.
Nous n'avons pas le choix. Les véhicules et les piles doivent être construits, et tout de suite.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Cette intervention me permet de soulever un point que je voulais placer dans la discussion.
Je vais commencer par M. Zacharias.
Je viens de Sault Ste. Marie, dans le Nord de l'Ontario. Lorsque j'étais conseiller municipal, un autre conseiller, qui était aussi un ancien député néo-démocrate, et moi-même avons déposé une résolution pour désigner Sault Ste. Marie capitale nord-américaine des énergies de remplacement. Notre déclaration était audacieuse. Nous parlions beaucoup de ce qui se passait dans le Nord de l'Ontario.
Il y a deux ans, lorsque j'étais secrétaire parlementaire pour l'Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l'Ontario, FedNor, j'ai fait une annonce portant sur un investissement effectué par FedNor et son organisme cousin, la Société de gestion du Fonds du patrimoine du Nord de l'Ontario, dans le sulfate de cobalt dans cette région.
L'exploitation des minéraux critiques va bon train dans le Nord de l'Ontario. Il y a de quoi démontrer aux Américains que nous sommes prêts à travailler avec eux à la décarbonation et à l'électrification complète de nos économies respectives.
Monsieur Zacharias, selon vous, comment le gouvernement pourrait‑il attirer plus d'investissements dans des secteurs comme le cobalt, entre autres? Nous parlons souvent du Cercle de feu dans le Nord de l'Ontario et de son potentiel pour la production de nombreux minéraux critiques. L'expression « from mine to road » revient souvent; on veut faire passer les minéraux des mines à la route.
Quelles stratégies le gouvernement devrait‑il privilégier pour attirer ce type d'investissement et d'innovation dans le Nord de l'Ontario?
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C'est une excellente question.
Il y a un certain nombre de facteurs à considérer.
Premièrement, mentionnons les investissements de 3,8 milliards de dollars dans les minéraux critiques, auxquels il faut donner suite rapidement.
Deuxièmement, les processus réglementaires des gouvernements fédéral et provincial pour les projets miniers sont excessivement fastidieux. Il faut une décennie pour construire une mine au pays. Ces processus doivent changer.
Troisièmement, il y a l'offre de main-d'œuvre et la formation professionnelle. Le Canada détient un avantage par rapport aux États-Unis pour ce qui est des compétences de la main-d'œuvre et de la population active au pays, mais encore une fois, nous avons besoin de plus de travailleurs.
Quatrièmement, nous devons bâtir des infrastructures pour électrifier les mines et transporter les minéraux au sud, dans des installations de raffinage et de transformation permettant de produire des matériaux précurseurs de piles, et ultérieurement, des piles pour automobiles.
Cinquièmement, en deux secondes, nous devons conditionner la demande au pays. Un mandat pour les véhicules à émission zéro doit être mis en place pour obliger les Canadiens à acheter des véhicules qui sont construits au Canada avec des métaux et des minéraux canadiens et qui fonctionnent au moyen de piles canadiennes. Nous devons arrimer le tout à la chaîne d'approvisionnement.
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Je vais donner un exemple.
Nous avons regroupé une douzaine ou une quinzaine d'industries impliquées dans la chaîne d'approvisionnement des piles, allant de l'exploitation des métaux et des minéraux jusqu'au recyclage à la fin du cycle de vie. Nous avons formulé plusieurs recommandations au gouvernement.
D'abord et avant tout, des efforts judicieux sont déployés pour certains maillons de la chaîne d'approvisionnement et de la chaîne de valeur, tandis que d'autres maillons sont complètement négligés. Ressources naturelles Canada et Innovation, Sciences et développement économique Canada font partie des acteurs. Le a signé des accords sur les piles en Ontario et au Québec. C'est excellent, mais nous constatons que sans approche holistique en place, nous risquons de manquer le bateau. L'approche en question doit prévoir l'offre de main-d'œuvre, la formation professionnelle, la construction d'infrastructures permettant d'extraire les minéraux critiques et d'alimenter en électricité les nouvelles usines, puis à un certain point, le passage à un réseau propre.
Tous les aspects que nous avons soulevés sont importants, mais rien ne bouge de ce côté‑là pour l'instant. Il y a aussi la question de savoir si les crédits d'impôt à la production doivent être augmentés et si cette mesure doit être instaurée rapidement. Cet immense vacuum doit être rempli et son existence doit être reconnue et comprise.
Le Canada est capable de remplir ce vide. Il faut seulement réunir les personnes qui feront avancer les choses.