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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 78e réunion du Comité permanent du commerce international.
La séance d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément au Règlement. Les députés participent en personne dans la salle et à distance à l'aide de l'application Zoom.
J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des députés.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Lorsque vous parlez, exprimez-vous lentement et clairement. J'invite les participants en ligne à se mettre en sourdine lorsqu'ils ne parlent pas. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Je demande aux députés qui sont dans la salle de lever leur main s'ils souhaitent prendre la parole. Si vous êtes en ligne, veuillez utiliser la fonction « Lever la main ».
En ce qui a trait aux services d'interprétation, ceux qui utilisent Zoom ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Les personnes présentes dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et choisir le canal souhaité. Si vous n'arrivez plus à entendre l'interprétation, veuillez m'en informer immédiatement, et nous nous assurerons de rétablir le service d'interprétation avant de poursuivre la séance.
Je demande à tous les participants de faire attention lorsqu'ils manipulent les oreillettes pour éviter tout effet Larsen, ce qui peut être dangereux pour nos interprètes et causer de graves blessures. J'invite les participants à utiliser le microphone auquel leur oreillette est connectée, et à éloigner des microphones les oreillettes qui ne sont pas utilisées. Nous devrions enregistrer ces renseignements sur une vidéo, et la regarder à chaque réunion.
Avant de passer à la motion de M. Savard-Tremblay, nous devons approuver la demande de budget. Je crois que vous avez tous un exemplaire sous les yeux. Le budget demandé pour cette étude est d'environ 8 000 $. Êtes-vous tous d'accord?
(La motion est adoptée.)
La présidente: Merci beaucoup.
Aujourd'hui, nous accueillons des témoins. Je vous remercie d'avoir pris le temps de vous présenter devant notre excellent comité. Je crois que vous constaterez que nous formons un groupe de gens formidables et que nous posons beaucoup de questions. Nous attendons vos réponses avec impatience.
Nous accueillons Mme Callie Stewart, directrice exécutive, Règlements et obstacles techniques, au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
Nous recevons aussi des représentants du ministère de la Santé: le dirigeant principal de la réglementation, Direction générale des produits de santé et des aliments, M. David Lee; la sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale des produits de santé et des aliments, Mme Celia Lourenco; et la cheffe de l'homologation et directrice générale par intérim, Direction de l'homologation, Mme Lisa Duncan.
Bienvenue à tous.
Nous allons commencer avec la déclaration préliminaire de Mme Lourenco.
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Bonjour. Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Je m'appelle Celia Lourenco. Je suis sous-ministre adjointe déléguée à la Direction générale des produits de santé et des aliments à Santé Canada. Je suis accompagnée de M. David Lee, dirigeant principal de la réglementation à la Direction générale des produits de santé et des aliments, ainsi que de collègues de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada et d'Affaires mondiales Canada.
Au Canada, les biocides sont des produits qui assainissent ou désinfectent les surfaces inertes non liquides afin de prévenir les maladies chez les humains ou les animaux. Les exemples de biocides comprennent les lingettes ou les vaporisateurs utilisés pour assainir ou désinfecter les surfaces telles que les comptoirs, les planchers ou les objets.
Selon leur utilisation ou leur objectif, les biocides sont actuellement régis par deux cadres juridiques distincts: la Loi sur les aliments et drogues ou la Loi sur les produits antiparasitaires. En tant qu'organisme fédéral de réglementation, Santé Canada supervise l'autorisation de mise en marché et la sécurité de ces produits afin de s'assurer que les Canadiens ont accès à une vaste gamme de biocides qui répondent aux normes de sécurité, d'efficacité et de qualité.
Comme les membres de ce comité le savent, Santé Canada propose de mettre en place un nouveau règlement pour les biocides en vertu de la Loi sur les aliments et drogues pour que ces produits soient régis par un cadre réglementaire unique. Le système actuel de cadres multiples entraîne une surveillance inégale, de la confusion pour certaines parties prenantes et des retards dans l'accès au marché. Les parties prenantes demandent un changement depuis un certain nombre d'années.
En outre, la pandémie de COVID‑19 a eu pour effet d'accroître la demande de biocides, ce qui a entraîné des pénuries. Par ailleurs, le ministère a reçu un tel nombre de demandes pour des biocides, qu'il y a eu des retards. Cela a mis en évidence les problèmes auxquels nous nous heurtons dans le système actuel. Des arrêtés d'urgence ont été adoptés pendant la pandémie pour accélérer l'accès aux biocides. Ils ont mis en lumière le besoin d'adopter un cadre de réglementation plus souple qui se rapporte à ces produits.
Le nouveau règlement vise à mettre à profit les leçons que nous avons tirées de la pandémie et à créer une approche plus moderne, avec des exigences fondées sur les risques, afin de limiter les perturbations du marché. Ce règlement réduira la confusion et améliorera la prévisibilité pour les intervenants de l'industrie et Santé Canada. Il permettra la commercialisation plus rapide des biocides novateurs, tout en continuant à protéger la santé et la sécurité des Canadiens.
Le projet de règlement propose des approches novatrices. Par exemple, Santé Canada pourra permettre aux demandeurs de se fonder sur la décision d'un organisme de réglementation étranger de confiance pour accélérer l'examen et l'autorisation d'un même produit au Canada. Cette voie d'examen tient compte du fait que les normes scientifiques et réglementaires utilisées dans la fabrication et la réglementation de ces produits sont harmonisées à l'échelle internationale. Cette approche améliorerait l'efficience du processus d'approbation réglementaire au Canada, sans pour autant compromettre nos normes.
Bien que l'examen réglementaire de Santé Canada soit simplifié, avant d'approuver un produit, il faudra présenter le même niveau de données probantes que pour tout autre biocide. De plus, une fois que ces biocides seront sur le marché canadien, ils feront l'objet d'une surveillance de la sécurité accrue par rapport à d'autres biocides.
[Français]
Comme c'est le cas pour toutes les propositions de réglementation, cette proposition a fait l'objet d'une vaste consultation jusqu'à présent. Nous avons suivi le processus rigoureux de la Gazette du Canada, qui comprenait une période de consultation publique de 70 jours débutant le 7 mai 2022. En outre, Santé Canada a rencontré régulièrement les intervenants, à partir de juillet 2019, afin d'éclairer l'élaboration du projet de règlement.
De nombreux intervenants nous ont fait part de leur satisfaction quant à ces mesures visant à simplifier la réglementation et à encourager l'accès au marché des biocides innovants. Toutefois, certains intervenants représentant des entreprises canadiennes ont exprimé leur inquiétude quant à la concurrence de produits étrangers entrant sur le marché. Comme nous l'avons mentionné, quelle que soit la voie d'examen, tous les biocides doivent satisfaire aux exigences scientifiques et réglementaires canadiennes avant d'être approuvés.
En conclusion, madame la présidente, la proposition de réglementation sur les biocides est un ensemble de mesures novatrices qui simplifieront le processus réglementaire et créeront un cadre plus souple sans compromettre la sécurité, l'efficacité et la qualité.
Nous nous engageons à continuer de travailler avec les intervenants et à évaluer leurs commentaires au fur et à mesure que nous progressons vers la publication finale.
Je vous remercie encore une fois de nous avoir invités, et je serai heureuse de répondre à vos questions.
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Madame la présidente, le respect des normes de sécurité est important.
Nous avons réalisé une analyse qui nous a permis de constater que les États-Unis effectuent les mêmes essais que le Canada pour évaluer l'efficacité et la sécurité des produits. C'est très précis. Comme les lois sont conçues pour être harmonisées, il n'y a pas d'écarts.
Ensuite, nous interagissons avec des organismes de réglementation dans d'autres marchés. Par exemple, les conversations que nous avons amorcées avec les pays de l'Union européenne sont importantes. Nous avons seulement ces discussions pour l'instant, mais lorsque nous gagnerons en assurance, nous ajouterons d'autres pays à la liste.
Nous en sommes aux balbutiements. Encore une fois, les normes sont bien connues. Nous travaillons assez souvent avec l'EPA, soit l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis, et nous connaissons ses protocoles. L'EPA nous inspire suffisamment confiance pour que nous l'inscrivions sur notre liste, que nous allons sûrement étoffer ultérieurement.
Depuis la pandémie de COVID‑19, nous enregistrons une augmentation de la demande pour une variété de produits novateurs, dont certains sont visés par le règlement sur les biocides, tels que les additifs à lessive. Il y a aussi une demande accrue pour les assainisseurs utilisés sur les textiles, les vêtements et les surfaces.
Un autre sous-ensemble de produits pourrait se tailler une place avantageuse dans le marché canadien encore assujetti à la Loi sur les produits antiparasitaires. Pensons à certains dispositifs raccordés comme les dispositifs émettant un rayonnement ultraviolet ou générant de l'ozone.
Un processus de commercialisation différent est encore en place pour ces catégories de produits, car leurs possibilités d'exposition élevées nécessitent un examen rigoureux distinct. En revanche, la surveillance de types similaires de biocides sera simplifiée et harmonisée avec celle de nos homologues aux États-Unis.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais remercier les témoins d'être des nôtres aujourd'hui. Merci de nous fournir cette occasion d'apprentissage en nous donnant davantage de détails sur les biocides et en nous expliquant les raisons pour lesquelles la réglementation est nécessaire.
Selon ce que mes collègues ont indiqué, un consensus a été dégagé sur la nécessité de mettre à jour les règlements de la Loi sur les aliments et drogues et les règlements de la Loi sur les produits parasitaires et de les regrouper en un seul système. Je pense que tout le monde s'entend sur ce point.
Vous avez mentionné que les préoccupations soulevées par les parties prenantes portaient sur la voie d'autorisation fondée sur des décisions d'organismes de réglementation étrangers.
Les inquiétudes exprimées par les entreprises canadiennes sont-elles seulement liées au fait que certaines multinationales qui mènent leurs activités au Canada trouveront plus facile, grâce au règlement, de faire entrer au pays leurs produits fabriqués aux États-Unis? Craignent-elles que les produits, au lieu d'être fabriqués et conçus par des entreprises au Canada, soient désormais tout simplement importés des États-Unis?
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Merci de la question, madame la présidente.
Au sujet du processus fondé sur les décisions d'organismes étrangers, il faut préciser deux choses.
Tout d'abord, les entreprises aux États-Unis n'auraient pas à oblitérer des étapes. Elles feraient les essais habituels. Dès le stade de développement d'un nouveau produit, elles procéderaient à des essais normaux, similaires à ceux qu'elles auraient à faire au Canada. Ces exigences sont prévues au règlement. Bien franchement, ce sont ces éléments qui rendent le processus équitable, à commencer par l'obligation de faire suivre ce parcours aux produits, qui devront être approuvés par l'EPA avant d'accéder à la voie d'autorisation au Canada.
Je le répète, les entreprises devront mener des essais et attendre d'obtenir une première approbation avant d'amorcer le processus au Canada. Tout ce que nous n'examinons pas, ce sont les données scientifiques brutes qui permettent de démontrer l'efficacité et la sécurité. Nous nous fions à l'EPA, car nous travaillons avec eux et nous savons que leurs essais sont similaires aux nôtres.
Ils devront toutefois tenir des dossiers de manière à ce que nous puissions accéder à ces informations très rapidement au besoin.
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Ces changements sont attendus depuis longtemps. Ce n'est pas d'hier que les intervenants de l'industrie expriment des préoccupations par rapport au fait que différents produits sont assujettis à des cadres réglementaires distincts même si leurs risques, leurs utilisations et leurs bienfaits supposés sont similaires. L'industrie nous demande depuis longtemps de corriger le tir pour faire en sorte que les entreprises puissent déposer une seule demande, en fonction de leur produit. C'est une des raisons principales, et elle existe depuis longtemps.
C'est devenu d'autant plus pressant durant la pandémie de COVID‑19. Certaines voies antérieures ralentissaient la mise en marché des produits. La pandémie de COVID‑19 a mis en évidence le besoin d'assouplir les différentes voies utilisées pour commercialiser cette catégorie de produits. Voilà une autre des raisons principales.
La troisième raison principale, c'est que la réglementation actuelle — celle qui précède le règlement sur les biocides — comprend des normes qui ne sont pas vraiment fondées sur les risques. Elle ne répond pas tout à fait aux besoins liés à cette catégorie de produits. Il était vraiment nécessaire de mettre en place une nouvelle réglementation qui corrigerait toutes ces failles.
Par ailleurs, c'est vrai que la pandémie a provoqué un afflux important de produits. Normalement, nous recevons entre 200 et 300 demandes par année pour cette catégorie de produits. Durant la pandémie, nous en avons reçu 900 par année. Cet afflux a mis en évidence le besoin d'accroître l'efficacité du processus.
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Merci, madame la présidente.
Bonjour à tous.
Je remercie les témoins d'être avec nous.
Madame Lourenco, pendant presque deux ans, j'ai eu le privilège d'apprendre à connaître les processus réglementaires dans le cadre de mon rôle de présidente du Conseil du Trésor. Je sais donc que vous et vos collègues travaillez très fort. Mes questions porteront plutôt sur le processus, et non sur la façon dont vous vous engagez dans le processus.
Selon ce que j'ai compris, des représentants d'entreprises canadiennes ont participé aux consultations menées avant la publication du projet de règlement sur les biocides dans la Partie 1 de la Gazette du Canada.
Pouvez-vous nous parler un peu des menaces ou des défis liés au marché des biocides dont les représentants de l'industrie vous ont fait part lors de ces consultations?
J'essaie de comprendre les pressions exercées sur les entreprises canadiennes, notamment les PME, qui veulent évoluer dans ce secteur. Quelles pressions subissent-elles?
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Nous n'avons pas pris cela en considération pour ce qui est de cette réglementation.
Si vous le permettez, je vais poursuivre en anglais, car je serai plus à l'aise pour m'exprimer.
[Traduction]
Quand nous parlons de fonder notre réglementation sur les normes internationales et d'encourager nos partenaires commerciaux à faire de même, nous nous demandons toujours si c'est la meilleure façon de soutenir nos exportateurs, ainsi que les Canadiens qui reçoivent les produits importés.
En l'occurrence, je ne peux pas dire que nous avons tenté de déterminer si le projet élargirait l'accès au secteur des biocides ou s'il offrirait de nouvelles possibilités de croissance. Toutefois, de façon générale, il est tout à fait conforme à ce que nous considérons comme un bon moyen de développer le commerce.
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Nous reprenons nos travaux.
Rebienvenue à tous.
Pour la deuxième heure de notre réunion d'aujourd'hui, nous accueillons maintenant André Côté, qui est membre du conseil d'administration de l'Association pour le développement et l'innovation en chimie au Québec, par vidéoconférence, Stéphane Lévesque, qui est le directeur général du Groupement provincial de l'industrie du médicament et Shannon Coombs, qui est la présidente de l'Association canadienne de produits de consommation spécialisés.
Je vous souhaite la bienvenue dans le cadre de cette étude importante.
Je vous demanderais maintenant de livrer vos remarques liminaires.
Je cède maintenant la parole à MM. Côté et Lévesque. Vous disposez de cinq minutes pour vos remarques liminaires.
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Bonjour, madame la présidente et membres du Comité. Je suis heureuse d'être parmi vous afin de participer à votre étude portant sur la réglementation des biocides.
Je m'appelle Shannon Coombs, et je suis la présidente de l'Association canadienne de produits de consommation spécialisés. Je suis fière de représenter les nombreux succès de cette industrie proactive et responsable depuis 25 ans.
Les trois dernières années ont été difficiles mais gratifiantes pour l'industrie et le gouvernement. Nous avons travaillé de concert pour pallier les pénuries de produits et contrer les obstacles à la chaîne d'approvisionnement découlant de la pandémie.
En plus de soutenir l'augmentation de l'offre de désinfectants, l'ACPCS est un membre fondateur du Réseau pour la production de désinfectant pour les mains, qui a aidé des entreprises à s'approvisionner en matériaux, en ingrédients et en emballages pour fabriquer du désinfectant pendant la pandémie. Avec notre mémoire, j'ai fourni à la greffière notre document d'une page intitulé « Que serait la vie sans nous? », qui illustre le genre de produits que l'ACPCS représente.
Qu'est‑ce que l'ACPCS? Nous sommes une association commerciale nationale. Nous représentons 40 entreprises membres, qui génèrent collectivement 20 milliards de dollars. Nous employons 12 000 personnes dans plus de 82 établissements au pays. Nos membres sont des entreprises canadiennes, notamment des PME, des fabricants québécois et des entreprises mondiales ayant des installations au Canada.
Avec les cinq minutes qui me sont accordées, je vais vous expliquer pourquoi cette réglementation est importante pour le Canada.
Que sont les biocides et comment sont-ils réglementés? Les biocides comprennent les désinfectants, les assainissants et les produits d'assainissement utilisés sur les surfaces qui entrent en contact avec les aliments. On utilise ces produits à la maison, dans les hôpitaux, dans les écoles, au travail, dans les établissements alimentaires et dans les établissements de soins de longue durée. Ils préviennent les maladies chez les humains et les animaux.
Les désinfectants et les assainissants sont présentement réglementés par deux lois fédérales: la Loi sur les aliments et drogues et la Loi sur les produits antiparasitaires. Bien que les désinfectants et les assainissants soient similaires, ils sont réglementés dans deux cadres distincts, ce qui crée une duplication des examens et deux ensembles de frais d'utilisation.
Pourquoi la réglementation est-elle importante?
Pour répondre à ces défis permanents des 20 dernières années, et plus particulièrement de la pandémie, l'ACPCS préconise un cadre unique fondé sur le risque pour les désinfectants dans le cadre de la Loi sur les aliments et drogues.
La réglementation sur les biocides répond directement à ce besoin en établissant un cadre unique pour l'examen de ces produits par Santé Canada. Ce cadre comprend des exigences réglementaires adaptées aux biocides, un modèle de licence moderne et de nouvelles options d'enregistrement, dont une option d'autorisation qui tient compte des décisions prises par des pays comparables.
Le moment choisi pour l'adoption de cette réglementation ne pourrait être plus crucial, car nous nous efforçons de répondre directement aux défis économiques durables et à l'importance accrue accordée par les Canadiens à la prévention et au contrôle des infections au sortir de la pandémie de la COVID‑19.
Je pourrais certes parler de l'importance de toutes les composantes de la réglementation, mais je tiens à aborder les répercussions potentielles du recours aux décisions provenant de l'étranger sur l'industrie manufacturière canadienne dans le cadre de votre étude.
Qu'entend‑on par recours aux décisions provenant de l'étranger? À quoi cela sert‑il? Il s'agit d'une voie d'examen supplémentaire de Santé Canada qui permet à une entreprise de tirer parti de la décision d'une autorité réglementaire étrangère de confiance d'approuver un produit lorsqu'elle demande la commercialisation d'un nouveau produit au Canada. L'examen est alors condensé et les frais d'enregistrement sont proportionnels à la durée de l'examen.
Je tiens à être claire. Les fabricants et les importateurs ont beaucoup d'autres options d'enregistrement pour l'autorisation de leurs produits biocides innovants, certaines offrant des échéanciers et des frais similaires. Le recours aux décisions provenant de l'étranger ne compromet pas la capacité des fabricants canadiens de compétitionner sur le marché canadien.
En quoi le recours aux décisions provenant de l'étranger améliore‑t‑il le cadre et lui est‑il bénéfique? Il facilite l'augmentation de l'offre de désinfectants et d'assainissants pour les Canadiens. Il soutient aussi le commerce international et fait progresser la coopération réglementaire. Il favorise un environnement commercial concurrentiel, réduit les formalités administratives et rejoint nos objectifs en matière de préparation aux situations d'urgence en codifiant les mesures temporaires évoquées plus tôt par Santé Canada qui ont été mises en place pendant la pandémie. Je pense que cette réglementation est un excellent exemple de l'application des leçons tirées lors de la COVID. En les appliquant, on soutient l'agilité réglementaire en prévision d'une future crise mondiale.
En quoi le cadre et le recours aux décisions provenant de l'étranger profitent-ils aux PME canadiennes? La réponse est en deux volets. Le recours aux décisions provenant de l'étranger est une option importante pour les entreprises canadiennes qui veulent enregistrer des technologies plus nouvelles et plus spécialisées grâce aux sous-licences. Cela permet à des entreprises canadiennes opérant au pays de mettre sur le marché des produits dont le coût serait autrement prohibitif.
Les entreprises canadiennes obtiennent également du soutien grâce à des mesures politiques complémentaires. Le Conseil national de recherches leur offre notamment des données d'efficacité gratuitement et une monographie, qui est une autre option d'enregistrement prévue dans la réglementation offrant des délais d'examen réduits et une atténuation des frais pour les petites entreprises.
En conclusion, je tiens à dire que la réglementation sur les biocides soutient une bonne politique publique. L'offre de produits augmentera grâce à cette réglementation. Il y aura de l'innovation. On promouvra un marché concurrentiel. Elle fait progresser nos objectifs collectifs de modernisation et d'agilité réglementaires et complète les objectifs gouvernementaux concernant la pénurie de médicaments, les perturbations de la chaîne d'approvisionnement et les leçons tirées de la COVID.
Nous appuyons cette réglementation et vous remercions de l'intérêt que vous portez à cet enjeu important aujourd'hui. Nous croyons que l'étude et les diverses recommandations soutiendront et renforceront davantage la réglementation proposée.
Compte tenu de l'importance de cette réglementation pour notre industrie, nous estimons qu'elle devrait être publiée dans la partie II de la Gazette du Canada sans tarder, accompagnée, bien sûr, des ressources appropriées de Santé Canada pour sa mise en œuvre.
J'ai hâte de répondre à vos questions.
Merci, madame la présidente.
Je m'appelle Stéphane Lévesque et je suis directeur général du Groupement provincial de l'industrie du médicament, lequel regroupe des PME travaillant au Québec à la production et à la commercialisation de médicaments et de produits de santé naturels, dont les désinfectants ou les biocides.
J'ai une formation scientifique et j'ai acquis plus de 29 ans d'expérience dans le domaine pharmaceutique. Je connais bien le rôle des désinfectants, notamment dans la lutte contre la bactérie C. difficile, source d'infections dans les milieux hospitaliers.
Le projet de règlement actuel de Santé Canada ne résoudra pas les problèmes décelés et il créera même une surcharge de travail pour les fonctionnaires au cours des prochaines années.
Il y a lieu de se questionner sur les intentions réelles de ce nouveau cadre réglementaire. Les produits approuvés aux États‑Unis ne seront pas réglementés de façon aussi rigoureuse que ceux fabriqués au Canada, ce qui crée ainsi une situation qui aura deux poids, deux mesures, au détriment des PME canadiennes. Ce cadre n'améliorera pas la productivité de l'équipe de révision de Santé Canada; il entraînera plutôt des délais supplémentaires pour nos fabricants quant au processus d'approbation.
La Direction des produits de santé naturels et sans ordonnance de Santé Canada peine depuis plusieurs années à respecter ses propres normes d'approbation liées aux désinfectants. En effet, seule une portion des demandes de licences canadiennes de mise en marché serait acceptée au premier tour, comparativement à celles demandées pour des désinfectants américains, qui seraient plutôt approuvées de facto.
Il ne faut donc pas accroître la bureaucratie. Notre opposition au projet de règlement actuel s'est conclue par une demande de moratoire visant à mieux cerner les répercussions sur l'industrie canadienne.
Si le cadre réglementaire proposé était adopté dans sa forme actuelle, Santé Canada privilégierait les entreprises américaines au détriment des entreprises canadiennes, qui sont majoritairement des PME.
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Ces dernières années, la Direction des produits de santé naturels et sans ordonnance de Santé Canada a sollicité la participation de représentants de l'industrie chimique à des discussions confidentielles sur un cadre réglementaire portant sur les biocides.
L'ADICQ est un organisme sans but lucratif, ou OBNL, qui a les objectifs suivants: promouvoir, développer et encourager l'industrie chimique au Québec, en accordant une attention particulière aux PME; regrouper les entreprises du secteur industriel de la chimie, en particulier les fabricants et les formulateurs, afin de représenter leurs intérêts communs; favoriser le développement de marchés extérieurs, les échanges commerciaux ainsi que les alliances stratégiques et technologiques; et, finalement, assurer une veille réglementaire et informer les membres sur toutes les questions relatives à leurs activités industrielles.
Malgré les représentations de l'ADICQ, Santé Canada fait politiquement la sourde oreille à nos demandes, continue de menacer l'industrie canadienne de la chimie et particulièrement les PME, notamment au Québec. En effet, à notre avis, la reconnaissance d'homologations étrangères sur les désinfectants ou les biocides va désavantager les fabricants canadiens. Le projet de règlement sur les biocides de Santé Canada prévoit la reconnaissance exclusive des homologations américaines au Canada, soit l'équivalent d'un protectionnisme américain qui serait imposé aux entreprises canadiennes par le gouvernement du Canada. De plus, le projet de règlement prévoit des frais réduits et un délai d'homologation plus court pour les produits étrangers, ce qui profiterait aux multinationales américaines, qui pourraient ainsi devancer les fabricants canadiens.
De surcroît, en allégeant l'examen lors de l'homologation, Santé Canada ne pourra pas assurer la protection de la population ni garantir la qualité des produits. Le projet de règlement prévoit, en effet, d'alléger le contenu des demandes pour les produits américains. Ainsi, les produits canadiens subiraient, pour être homologués, un fardeau plus important, le projet ne leur imposant pas les mêmes critères qu'aux produits américains. Jusqu'à maintenant, Santé Canada refuse de définir comment sera assurée la sécurité de la population quant aux produits étrangers.
La création d'une nouvelle catégorie de produits réglementés va congestionner le processus d'examen des dossiers, notamment celui des produits d'assainissement de surface en contact avec les aliments. En 2004, la mise en œuvre, par Santé Canada, du Règlement sur les produits de santé naturels a nécessité sept ans. La mise en œuvre du Règlement sur la salubrité des aliments au Canada n'est pas encore terminée en 2023, soit cinq ans après l'annonce du processus en 2018. L'expérience montre donc que le projet de règlement actuel va générer des lourdeurs administratives qui dureront au moins deux ans ainsi que des coûts estimés à quelque 20 000 $ par produit pour les fabricants canadiens.
Pendant ce temps, les produits étrangers pourraient être reconnus et homologués sans examen, et ce, plus rapidement et à moindre coût. Santé Canada allègue que le projet s'inscrit dans une démarche d'équité et de transparence, mais, contrairement aux allégations de Santé Canada, il n'y a pas de consensus dans l'industrie canadienne.
Depuis 2018, l'ADICQ participe à toutes les rencontres et signifie, au nom des entreprises du Québec, son opposition au projet de règlement. Nous avons même demandé un moratoire. Le gouvernement canadien doit rappeler à Santé Canada qu'on ne peut pas déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les PME de l'industrie canadienne et particulièrement de l'industrie québécoise subiraient une attaque frontale au profit de l'industrie américaine. Dans un contexte de libre-échange international, on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures.
L'ADICQ n'est aucunement en désaccord sur les politiques de libre-échange, particulièrement avec les États‑Unis. Il en est de même pour la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, partenaire associatif de l'ADICQ. Nous demeurons ouverts à tout cadre réglementaire dont l'objectif est de protéger la santé des Canadiens et la santé économique des entreprises canadiennes.
Merci.
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On a beaucoup évoqué la pandémie de COVID‑19 jusqu'à maintenant pour soutenir le projet de réglementation.
Est-ce que je me trompe ou les États‑Unis ont dit à un certain moment qu'ils n'exportaient plus de produits assainissants et qu'ils les gardaient pour eux? Je me souviens d'une période où les étagères étaient vides dans les pharmacies.
Ce sont alors des PME d'ici, qui n'avaient aucune expertise dans ce domaine, qui ont dû virer sur un 10 ¢, pour parler en bon québécois, et mettre au point des produits assainissants.
Autrement dit, les entreprises américaines et canadiennes ne se battaient pas du tout à armes égales. Encore aujourd'hui, certaines multinationales basées aux États‑Unis et qui travaillent là-bas depuis l'époque de Mathusalem ne se battent pas non plus à armes égales avec des PME qui fonctionnent depuis à peu près deux ou trois ans dans ce domaine.
Un règlement comme celui qui est proposé pourrait-il contribuer à accroître encore plus cet écart?
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Nous allons maintenant passer à M. Sheehan pour cinq minutes, s'il vous plaît.
Monsieur Sheehan, je pense que votre micro est en sourdine.
Une voix: Oh, non, nous éprouvons encore des difficultés techniques.
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Que se passe‑t‑il?
Nous avons... Encore une fois, c'est...
D'accord, monsieur Sheehan, nous ne vous entendons pas. Pouvez-vous débrancher votre casque d'écoute et le rebrancher, s'il vous plaît?
Vous voyez, monsieur Côté? Cela arrive même à d'autres, pas seulement à vous.
Essayez de nouveau, s'il vous plaît, monsieur Sheehan.
:
Allô? M'entendez-vous maintenant?
La présidente: Oui. Allez‑y, s'il vous plaît.
M. Terry Sheehan: Merci beaucoup.
Je suis désolé. Je pensais à toutes ces excellentes questions et réponses que nous avons entendues, parce qu'on a déjà répondu à beaucoup de questions que je voulais poser.
C'est un sujet très intéressant. Avant de devenir député, je travaillais pour la Société de développement économique à aider les entrepreneurs à se lancer en affaires et à accroître leurs exportations et leurs importations.
Ma question s'adresse peut-être à Mme Coombs.
Pendant la pandémie de COVID‑19, on s'est mis à manquer de désinfectants partout, les États-Unis se sont mis à accumuler les réserves, et bien des gens ont été humiliés publiquement, avec raison. De toute évidence, les Américains comme les Canadiens essayaient de mettre la main sur pratiquement tout, n'est‑ce pas? Aujourd'hui, il semble, à entendre les témoignages d'entrepreneurs canadiens, qu'il y ait toutes sortes d'obstacles.
De quoi s'agit‑il? Il y a les petites et moyennes entreprises et il y a les grandes entreprises... Vous savez, j'ai des appréhensions, parce que bien souvent, on voit de grandes entreprises essayer d'accaparer les marchés au moyen de brevets, de droits de propriété intellectuelle, de demandes de brevets en instance ou de droits d'auteur sur divers éléments du procédé de fabrication ou du produit final. Y a‑t‑il de grandes entreprises aux États-Unis qui procèdent de cette façon? Je pense à cela, et la raison pour laquelle je pose la question, c'est que je pense aux sociétés pharmaceutiques qui essaient d'obtenir un brevet pour la taille, la forme ou la couleur d'une pilule.
Madame Coombs, savez-vous s'il y a des tactiques de ce genre de personnes qui essaient d'accaparer le marché dans ce secteur?