Bienvenue à la troisième réunion du Comité permanent des ressources naturelles de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude du Fonds de réduction des émissions — programme côtier et infracôtier. Le Comité se réunit une seconde et dernière fois pour entendre des témoins dans le cadre de cette étude.
Le Comité siège aujourd'hui selon une formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 25 novembre 2021. Selon cette formule, des députés sont présents dans la salle et d'autres participent à la réunion par la voie de l'application Zoom. Veuillez prendre note qu'au cours de la webdiffusion, c'est toujours la personne qui a la parole qui apparaîtra à l'écran plutôt que l'ensemble du Comité. Je rappelle aussi aux participants qu'il est interdit de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de leur écran. La présente séance sera télévisée et diffusée sur le site Web de la Chambre des communes.
En raison de la pandémie en cours et suivant les recommandations des autorités de santé publique ainsi que les directives publiées par le Bureau de régie interne le 19 octobre 2021, les personnes présentes dans la salle sont priées de respecter les consignes suivantes en matière de santé et de sécurité.
Tout d'abord, les personnes qui présentent des symptômes doivent participer à la réunion par Zoom. Si vous assistez à la réunion en personne, veuillez maintenir une distance de deux mètres avec les autres, y compris quand vous êtes assis. Vous devez aussi porter un masque non médical, sauf quand vous êtes assis et que vous prenez la parole. Cela dit, il est fortement recommandé de porter le masque en tout temps, y compris quand vous êtes assis. Des masques non médicaux sont mis à votre disposition dans la salle. Parce que ces masques étouffent moins le son de la voix que les masques en tissu, ils permettent aux interprètes de mieux entendre nos échanges et nos interventions.
Les personnes dans la salle doivent se désinfecter correctement les mains avec la solution fournie à l'entrée. Les salles des comités sont désinfectées avant et après chaque réunion. Pour maintenir des conditions d'hygiène optimales, vous êtes invités à désinfecter votre bureau, votre siège et votre microphone avec les lingettes fournies quand vous prenez place ou avant de quitter la salle.
À titre de président, il m'appartiendra de faire respecter ces mesures pendant toute la réunion. Je vous remercie à l'avance de votre collaboration.
Voici maintenant quelques consignes qui assureront le bon déroulement de la réunion.
Des services d'interprétation sont offerts. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir entre le parquet, le canal anglais ou le canal français. Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Je vous rappelle de ralentir le débit pour que les interprètes puissent vous suivre.
Les députés présents dans la salle peuvent lever la main pour demander la parole. La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour respecter l'ordre d'intervention. Les députés qui participent à la réunion par Zoom peuvent utiliser la fonction « main levée » pour être inscrits sur la liste. Comme vous l'avez sûrement remarqué, c'est plus difficile quand des députés qui participent à la réunion en personne et de manière virtuelle lèvent la main en même temps, mais la greffière et moi-même allons tâcher de gérer la liste des intervenants du mieux possible. Merci de faire preuve de patience et de compréhension.
Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Si vous utilisez l'application Zoom, cliquez sur l'icône du microphone pour le désactiver. Si vous êtes présents dans la salle, votre microphone sera réglé comme à l'habitude par l'agent des délibérations et de la vérification. Quand vous n'avez pas la parole, il devrait être en mode sourdine. J'en profite pour préciser que les députés et les témoins doivent toujours s'adresser à la présidence.
Voilà pour les consignes. Je vais maintenant vous présenter le premier groupe de témoins. Je suis ravi d'accueillir le ministre et ses collaborateurs du ministère à un stade aussi précoce de notre étude.
Nous accueillons aujourd'hui l'honorable Jonathan Wilkinson, député et ministre des Ressources naturelles. Il est accompagné de plusieurs représentants du ministère, dont Mme Mollie Johnson, la sous-ministre adjointe du Secteur de l'énergie à faibles émissions de carbone; Mme Debbie Scharf, la directrice générale de la Direction des carburants propres, et M. Michael Layer, le gestionnaire du programme Recherche sur l'air propre et l'énergie.
Je souhaite la bienvenue au ministre des Ressources naturelles, l'honorable Jonathan Wilkinson, et à ses collaborateurs. Ils passeront la prochaine heure avec nous. À 16 h 30, un second groupe de témoins leur succédera pour une autre heure.
Monsieur le ministre, les cinq prochaines minutes vous appartiennent. Nous allons écouter votre déclaration préliminaire avant de passer à la période des questions et réponses.
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Merci, monsieur le président. Je remercie également le Comité de m'avoir invité à cette réunion.
[Français]
L'économie mondiale change, et elle change rapidement. Elle change en grande partie parce que le changement climatique l’exige, et les marchés réagissent.
[Traduction]
Tout comme toute entreprise doit interpréter et réagir aux changements dans l'environnement des affaires, les pays, pour maintenir et améliorer leur prospérité, doivent aussi être capables d'intervenir et d'agir de manière réfléchie. Cela signifie que nous devons accélérer nos actions pour atténuer les changements climatiques, tout en nous assurant qu'il y a de nouvelles opportunités économiques dans toutes les régions du pays.
Le programme côtier et infracôtier du Fonds de réduction des émissions, ou FRE, est une mesure de soutien liée à la COVID qui a été conçu pour aider à atteindre ces deux objectifs.
En 2020, en raison de la pandémie de COVID‑19, les prix historiquement bas dans le secteur pétrolier et gazier ont généré des pressions financières importantes et menacé des dizaines de milliers d'emplois. Le Fonds de réduction des émissions a été conçu comme un programme d'urgence ciblé lié à la COVID qui avait deux objectifs: maintenir des emplois pour les travailleurs du pétrole et du gaz au Canada à un moment où le prix du pétrole était historiquement bas et soutenir la poursuite des efforts de réduction des émissions de méthane à un moment où elle n'était pas une priorité des entreprises en grande difficulté financière.
Le programme a fait des progrès significatifs sur ces deux objectifs, et 99 % des bénéficiaires étaient des petites et moyennes entreprises. Il a été salué par les maires de communautés comme Estevan, en Saskatchewan, Brandon, au Manitoba, et Slave Lake, en Alberta, pour les emplois sauvés dans la plupart des petites et moyennes entreprises.
[Français]
Nous estimons qu'un an après leur achèvement, ces projets donneront lieu à une réduction de 4,7 mégatonnes d'équivalent de CO2, ce qui équivaut à retirer 1 million de voitures de la route.
Comme je l'ai mentionné, ce programme a été explicitement établi en tant que mesure de soutien durant la pandémie de COVID‑19. Il a été soutenu, non seulement par le secteur, mais aussi par un certain nombre d'organisations environnementales.
[Traduction]
Par exemple, l'Institut Pembina a décrit le Fonds comme l'une des rares initiatives dans le monde à s'attaquer à la crise sanitaire tout en créant des emplois et en contribuant de manière substantielle à la réduction des émissions. La Fondation David Suzuki a indiqué que le programme entraînerait des réductions supérieures aux exigences de la réglementation sur le méthane, et que 97 % de ces réductions coûteraient moins de 20 $ la tonne, ce qu'elle a qualifié de réussite notable.
[Français]
La crise économique qu'a vécue en 2020 l'industrie pétrolière et gazière est aujourd'hui derrière nous, mais la crise climatique demeure. Nous avons donc modifié le programme pour faire face à cette situation.
En révisant le programme, nous avons tenu compte des commentaires formulés par le commissaire à l'environnement et au développement durable.
[Traduction]
Pour la troisième période d'inscription, trois changements importants ont été apportés au FRE, changements qui continueront d'accélérer la réduction des émissions de méthane. Dorénavant, le FRE soutiendra uniquement les projets qui visent l'élimination entière des émissions de méthane des sources existantes des opérations pétrolières et gazières. Actuellement, la réglementation canadienne n'exige pas l'élimination de l'évacuation et du torchage du méthane de sources existantes. Ces projets permettront donc d'accélérer la réduction des émissions.
Les critères du FRE seront renforcés pour assurer un meilleur rendement de l'investissement, comme le recommande le commissaire. Nous allons établir un seuil de coût par tonne, demander une preuve qu'un projet ne pourrait pas être mis en œuvre sans l'aide financière du programme et établir le financement minimal requis.
Enfin, le FRE permettra d'obtenir un bilan plus exact des réductions des émissions de gaz à effet de serre, ou GES, en prévoyant une comptabilisation plus transparente des émissions par projet. Un entrepreneur ayant la certification ISO examinera et vérifiera la méthode d'estimation des réductions des émissions de GES appliquée dans le cadre du programme. Les demandeurs devront soumettre deux plans de réduction de leurs émissions de GES qui confirmeront le caractère additif des réductions.
Ces changements permettront d'appuyer des projets de réduction des émissions de méthane qui auront un fort impact pour le Canada et qui l'aideront à atteindre son objectif de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 à 45 % d'ici à 2030.
[Français]
Encore une fois, je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également le ministre d'avoir pris le temps de se présenter devant le Comité. Je vous en suis reconnaissant.
Monsieur le ministre, vous avez parlé du programme comme d'un outil favorisant la transparence. Or, selon un rapport du commissaire à l'environnement et au développement durable, il semblerait que Ressources naturelles Canada aurait surestimé les réductions de gaz à effet de serre attendues du programme côtier et infracôtier.
J'ai une question pour vous, monsieur le ministre. Pensez-vous que cette surestimation est due à une erreur humaine ou à une fausse déclaration volontaire?
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C'est une discussion que j'ai eue avec le commissaire à plusieurs reprises. Cette discussion tourne autour des conditions limites et de la définition beaucoup plus large que leur a donnée le commissaire.
Nous nous sommes concentrés sur la source des émissions et sur les réductions qui y sont associées. Si, par exemple, un autre projet a été lancé à des kilomètres de distance durant la période d'application du programme, il n'a pas été pris en compte. Nous nous sommes concentrés sur la réduction des émissions à la source.
Dans cette optique, je peux affirmer que le programme a contribué à réduire les émissions de CO2 de 4,7 mégatonnes au cours des deux premières périodes d'inscription. De façon remarquable, le programme a fait en sorte que les entreprises du secteur pétrolier et gazier ont gardé le cap sur la réduction de leurs émissions de méthane dans une période où elles connaissaient d'importantes difficultés financières.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur le ministre. Merci de vous joindre à nous.
Lundi, nous avons eu l'occasion d'entendre différents points de vue très intéressants sur le Fonds de réduction des émissions. En tant que député de Calgary Skyview, je m'intéresse de très près à l'avenir de notre secteur énergétique. Des milliers de travailleurs, dont bon nombre vivent dans ma circonscription, ont fait carrière dans ce secteur. Les programmes comme le Fonds de réduction des émissions et d'autres ont des incidences directes sur les résidants de Calgary et son économie.
Le ministre peut‑il expliquer à mes électeurs comment le programme a bénéficié à notre économie depuis son lancement, et comment il a contribué au maintien d'emplois bien payés pour les résidants de Calgary?
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Volontiers. Le changement climatique représente une menace existentielle contre laquelle nous n'avons pas le choix de lutter, mais il faut le faire d'une manière réfléchie, en cherchant des solutions qui favoriseront la prospérité économique de toutes les régions du pays.
Notre gouvernement a établi un plan climatique qui figure probablement parmi les plus complets et les plus détaillés dans le monde. Il couvre tous les secteurs, y compris bien entendu celui du pétrole et du gaz, qui est la plus grande source d'émissions au Canada. Notamment, le plan prévoit la tarification de la pollution par le carbone, le resserrement de la réglementation sur le méthane et la mise en place d'une réglementation sur les carburants propres. Il fixe également un plafond des émissions du secteur pétrolier et gazier, mais il prévoit surtout des investissements stratégiques pour aider les entreprises de ce secteur à adopter des technologies non polluantes et à investir dans des infrastructures d'élimination des émissions.
Le programme va exactement dans ce sens en tablant sur le leadership exercé dans le secteur, le travail en collaboration et l'établissement de partenariats essentiels pour réduire les émissions d'une manière qui rendra le secteur plus concurrentiel.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d'être présent. Je sais que vous êtes sensible à la question environnementale, ce qui est assez intéressant dans le contexte du ministère des Ressources naturelles. J'accueille cela avec beaucoup d'optimisme.
J'écoutais votre présentation, tout à l'heure, et quelque chose m'a fait réfléchir. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Vous avez dit que le prochain appel d'offres du Fonds de réduction des émissions serait adapté à nos perspectives économiques et à nos objectifs environnementaux actuels, et non à ceux d'il y a deux ans. Je trouve cela intéressant, parce que le professeur Pierre‑Olivier Pineau, qui est passé nous voir lundi, nous disait que le Fonds de réduction des émissions était arrivé dans un contexte où les prix du pétrole étaient très bas, ce qui avait fait mal à l'économie albertaine, mais que, aujourd'hui, les prix du pétrole étaient beaucoup plus élevés et que l'industrie était rentable. Il disait qu'il ne voyait pas pourquoi elle aurait besoin de ce soutien financier.
Même le nom, « Fonds de réduction des émissions », est un peu pompeux. Mon collègue de a fait la démonstration, lors de la dernière rencontre, que ce fonds visait à soutenir l'industrie pétrolière alors qu'elle passait un mauvais moment pendant la crise de la COVID‑19. On en veut pour preuve, et c’est dans le rapport du commissaire, que les deux tiers des projets, soit 27 projets sur 40, supposaient qu'on allait financer l'augmentation du niveau de production.
Sachant tout cela, d'autant plus que vous avez indiqué qu'il faut nous concentrer sur nos perspectives économiques et nos objectifs environnementaux actuels et non sur ceux d'il y a deux ans, croyez-vous qu'on devrait laisser tomber la troisième période d’inscription qui va être faite par le ministère pour le Fonds de réduction des émissions?
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Je vous remercie de votre question.
J'aimerais d'abord signaler à Mme la greffière que le volume du canal d'interprétation est plus bas que celui de l'orateur, alors on a de la difficulté à comprendre. Je peux comprendre le français, mais, pour d'autres, cela peut être difficile.
Monsieur Simard, votre commentaire est utile, bien sûr. Nous avons apporté des changements au troisième volet, car, exactement comme vous l'avez dit, la situation économique de ce secteur s'est beaucoup améliorée. Nous nous attaquons maintenant aux émissions qui dépassent les limites établies par la réglementation, afin d'accélérer le travail de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de nous assurer d'atteindre la cible de 40 à 45 % de réduction d'ici 2030.
Pouvez-vous me rappeler votre deuxième question?
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Je vais vous la résumer de la façon suivante.
Lundi, j'ai terminé la rencontre en demandant à tous les témoins, le professeur Pineau, Mme Julia Levin, M. Dale Marshall et M. Tom L. Green, s'ils étaient d'accord pour dire qu'on devrait laisser tomber. On parle quand même d'une somme énorme. L'ensemble du programme totalise 750 millions de dollars.
Ne devrait-on pas laisser tomber, purement et simplement, la troisième et dernière période d’inscription que vous avez lancée et mettre ce programme de côté?
Je ne crois pas que le secteur gazier et pétrolier ait besoin de plus de soutien de la part du gouvernement.
Devant la réaction de certains spécialistes du milieu, ne devriez-vous pas tout simplement laisser tomber ce programme?
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Je veux être charmant, mais vous m'avez quand même ouvert la porte.
Je pense que le secteur le plus sous-financé et le plus prometteur pour lutter contre le changement climatique est le secteur forestier. Pourtant, c'est celui qui reçoit le moins d'investissements de la part du gouvernement fédéral. Il représente 20 milliards de dollars par année dans l'économie québécoise, alors qu'il reçoit à peine 0,3 % de soutien de la part du gouvernement fédéral. De plus, 75 % de ce pourcentage vient sous la forme de prêts.
Comparer le secteur forestier, qui est très prometteur pour réduire les gaz à effet de serre, au secteur pétrolier, c'est comparer David à Goliath. C'est sans commune mesure. Alors, si vous me disiez aujourd'hui que vous êtes prêts à redistribuer cet argent dans un secteur comme celui de la forêt, je verrais cela d'un bon œil et je ne vous enquiquinerais pas jusqu'à la fin de ce mandat. Je sais que ce ne sera pas le cas, mais je pense qu'il serait malavisé — c'est d'ailleurs le point de vue des spécialistes qu'on a reçus — de poursuivre le troisième appel d'offres qui est maintenant ouvert.
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Nous avons eu quelques conversations sur le sujet du secteur forestier et je suis d'accord avec vous qu'il est très important pour l'économie du Canada et du Québec.
Le Fonds de réduction des émissions a été créé avec un objectif précis pour un secteur précis. Cela dit, le milieu forestier a également accès aux programmes d'aide comme le Programme d'innovation forestière, qui bénéficie actuellement d'un financement fédéral de presque 100 millions de dollars sur trois ans. Il y a aussi quelques autres programmes.
Bien sûr, le secteur forestier est très important, et nous savons qu'il est aussi une source de réduction des émissions. C'est pourquoi nous avons mis sur pied un programme visant à planter 2 milliards d'arbres au cours des 10 prochaines années.
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Merci, monsieur le président.
Merci infiniment, monsieur le ministre, de vous joindre à nous dans le cadre de notre étude sur le méthane.
J'aimerais parler de la question fondamentale de la confiance. Nous nous trouvons en plein cœur d'une catastrophe climatique. Après avoir entendu les déclarations très percutantes du sur la scène internationale, nous nous attendons à ce qu'un fonds qui vise une substance aussi nocive pour la planète que le méthane donne des résultats. Je dois avouer que j'ai eu un véritable choc en lisant dans le rapport du commissaire à l'environnement que votre ministère ne prenait pas la peine de vérifier la situation réelle des émissions. Il a lancé 134 millions de dollars par la fenêtre, mais il n'a jamais vérifié s'il y a véritablement eu une réduction des émissions de méthane, alors qui c'est l'objectif premier du fonds.
C'est assez irresponsable, ne pensez-vous pas?
Bien que j'adore vous entendre parler de préservation des emplois et de développement économique, le fait est qu'au moment où le ministère a établi le Fonds, la préservation des emplois ne faisait pas partie des critères d'évaluation. Je vous demande, une fois de plus, de le dire clairement si l'intention était de donner 134 millions de dollars aux grandes pétrolières. Pourquoi ne pas dire que c'était une subvention? Quand le commissaire à l'environnement a demandé une explication à vos fonctionnaires, ils ont répondu que les besoins économiques des sociétés pétrolières étaient leur priorité. C'est assez clair.
Pourquoi refusez-vous de dire les choses clairement? Nous étions en pleine pandémie, le député libéral de Calgary voulait préserver des emplois et nous voulions engager des gens dans le secteur pétrolier. C'est simple, non? Pourquoi venir ici pour vous vanter qu'il y a eu des réductions des émissions de méthane alors que vous n'avez aucune preuve que vous avez obtenu ce résultat puisque vous n'avez pas fait de suivi? C'est ce que nous a dit le commissaire à l'environnement. Il a affirmé que vous n'avez fait aucun suivi à ce sujet.
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Il ne me reste pas beaucoup de temps.
C'est en effet ce que vous avez dit, mais le commissaire à l'environnement a dit le contraire. Il s'est dit très préoccupé par l'attitude de vos fonctionnaires. Selon lui, ils ne comprenaient pas la nécessité d'utiliser des valeurs de référence des émissions. Ne trouvez-vous pas cela très important? J'imagine que c'est très commode de prétendre qu'un million de voitures ont été retirées de la route en l'absence de valeurs de référence des émissions.
Le commissaire s'est dit inquiet par rapport aux réponses de vos fonctionnaires. Il s'est aussi dit déçu de votre ministère, en ajoutant que l'attitude de vos fonctionnaires ne présageait rien de bon.
Vous devriez avoir le courage d'avouer que vous avez commis une erreur, mais que vous allez la réparer parce que c'est primordial pour la planète. C'est ça, un lien de confiance. De [inaudible] ce n'est pas crédible.
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Le temps alloué est écoulé. Merci.
Nous avons des débats, et c'est important, mais je vous demanderais de faire attention à ne pas parler quand une autre personne a la parole... Les interprètes ont beaucoup de difficulté à suivre quand deux personnes parlent en même temps. Je vais essayer de donner la chance à la personne à qui c'est le tour de poser des questions d'aller au bout de son intervention mais, en même temps, nous devons penser aux interprètes.
Nous passons maintenant à la deuxième série de questions. Les deux premiers intervenants auront chacun cinq minutes.
Madame Rempel Garner, vous serez la première.
Merci, monsieur le ministre, de vous joindre à nous.
Depuis la fin du XIXe siècle, l'industrie minière de ma circonscription de Sudbury, dont je saisirai toutes les occasions de parler et de faire la promotion, a produit plus de huit millions de tonnes de métaux de base. Malheureusement, comme nous le savons maintenant, les anciennes méthodes d'exploitation minière ont balafré le territoire et acidifié les lacs. Malgré les gains économiques découlant d'une industrie minière dynamique, nous avons dû agir et changer les façons de faire. Aujourd'hui, comme nous le savons tous, le succès de notre remise en état de l'environnement dans le cadre du reverdissement de Sudbury a été reconnu dans le monde entier.
À ce sujet, j'ai quelques questions à vous poser, monsieur le ministre. Je vous demanderai d'abord d'expliquer comment le programme du Fonds de réduction des émissions, le FRE, jouera un rôle et s'harmonisera avec le plan de notre gouvernement visant à plafonner les émissions du secteur pétrolier et gazier. La deuxième partie de ma question est la suivante: pourriez-vous nous parler aussi de certaines retombées à long terme que nous pouvons attendre de ce programme?
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Bien sûr. Merci beaucoup pour cette question.
Lorsque nous avons conçu le Fonds de réduction des émissions, nous l'avons vu comme un moyen non seulement de protéger les emplois, mais aussi d'aider l'industrie à continuer à réduire les émissions de méthane et d'autres gaz à effet de serre nocifs. Nous avons mis l'accent sur le méthane parce que ce gaz à effet de serre est beaucoup plus puissant que le CO2, par exemple. Son potentiel de réchauffement est beaucoup plus grand. On lui impute environ 30 % de l'augmentation de la température mondiale et il représente 13 % des émissions de gaz à effet de serre du Canada.
Cela étant, le fait de cibler les émissions de méthane et d'en limiter les rejets est l'un des moyens les plus rapides de lutter contre les changements climatiques. [Difficultés techniques] De toute évidence, le plafond s'applique au secteur pétrolier et gazier dans son ensemble, mais c'est l'un des éléments clés. La réglementation sur le méthane est assurément un autre élément clé.
Maintenant que la crise économique dans le secteur est derrière nous, nous recentrons le programme afin d'augmenter les réductions des émissions pour nous assurer de dépasser les prescriptions de la réglementation pour 2025 et pour garantir la réalisation de notre objectif climatique pour 2030.
À Sudbury, la dévastation causée par les premiers procédés d'exploitation minière est indéniable. Prendre des mesures pour remédier à la situation était coûteux, exigeait beaucoup de travail et nécessitait une volonté politique et de l'innovation. Cela dit, les preuves étaient claires et les changements requis étaient irréfutablement nécessaires.
Il est évident qu'il y aura de graves conséquences si le Canada n'agit pas de façon urgente et rapide pour limiter les dommages environnementaux causés par l'augmentation de nos émissions de GES.
Pourriez-vous parler des conséquences de l'inaction dans 15 ou 25 ans et nous expliquer comment le Fonds de réduction des émissions fera que cela ne deviendra pas une réalité?
Le Canada peut choisir d'être un chef de file sur le plan de la transition énergétique mondiale ou il pourrait décider de ne rien faire et se contenter d'espérer le meilleur.
Dans ma propre province, la Colombie‑Britannique, nous avons vu l'impact des changements climatiques. Si nous choisissons de ne rien faire, les coûts seront importants. Très récemment, la Banque du Canada a publié un rapport démontrant que le coût pour notre économie pourrait représenter un dixième de notre PIB ou plus. Telle serait la conséquence de notre inaction.
Le Fonds de réduction des émissions est l'un des nombreux outils à notre disposition pour lutter contre l'augmentation des émissions. Nous prévoyons que, au fil des ans, ces projets permettront de supprimer environ 30 mégatonnes de CO2.
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Merci, c'est une très bonne question.
Le Fonds de réduction des émissions a été conçu pour aider à préserver les emplois et à améliorer la compétitivité économique tout en réduisant les émissions de méthane dans le secteur. Le programme a certainement incité des entreprises à chercher des travailleurs plus qualifiés et d'autres entreprises à se spécialiser en génie professionnel, en services environnementaux, en construction et en technologie. Il a aussi engendré des retombées technologiques qui, comme je l'ai dit, en viendront à être exportées dans des pays du monde entier.
En ce qui concerne les collectivités, vous pouvez parler aux maires de certaines collectivités que j'ai mentionnées, dont Estevan, Brandon et Slave Lake, qui ont tous dit que ce programme était extrêmement important d'un point de vue économique pour aider les familles et les travailleurs, ainsi que les collectivités, afin qu'ils puissent bien traverser cette période très difficile.
Comme je l'ai déjà dit, ce programme est un élément parmi d'autres et nous continuons à travailler à une transition durable. Nous allons collaborer avec les provinces et les territoires, l'industrie, le milieu universitaire, les partenaires autochtones et, bien sûr, les travailleurs pour faire en sorte d'obtenir une rétroaction suffisante et de travailler à un avenir qui sera positif pour tout le monde, un avenir où nous jouirons d'un environnement et d'une économie durables.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le ministre, en tant qu'ancien ministre de l'Environnement, vous n'êtes pas sans savoir que, en matière d'environnement, le principe du pollueur-payeur est un principe premier. Il s'agit, somme toute, d'un principe assez simple: on demande aux grands pollueurs de payer la facture des coûts engendrés par les effets négatifs qu'ils ont sur les gaz à effet de serre. Or j'ai l'impression qu'une nouvelle tendance se dessine au Canada, celle du « pollueur payé ».
Au cours des deux dernières années, j'ai essayé de faire ressortir tout le soutien économique offert par le Canada au secteur gazier et pétrolier. On s'y perd totalement. D'abord, vous ne vous entendez pas sur ce que représente une subvention, ce qui est déjà problématique. Certaines personnes disent que, de 2017 à 2020, il s'agissait d'environ 24 milliards de dollars par année. C'est une somme considérable. Plusieurs affirment même que le Canada est le pays du G20 qui soutient avec le plus de vigueur le secteur gazier et pétrolier.
Le problème que je vois dans les programmes comme le Fonds de réduction des émissions, c'est qu'il s'agit d'une tentative d'écoblanchiment. On essaie de rendre le secteur gazier et pétrolier plus sexy aux yeux des environnementalistes. Cela nous coûte épouvantablement cher. De plus, tout le monde sait que, plus on soutient les énergies fossiles, plus on retarde l'arrivée d'énergies propres de nouvelles technologies.
En ce sens, je vais réitérer la question que je vous ai posée plus tôt: selon vous, la meilleure chose à faire est-elle de faire une croix sur le Fonds de réduction des émissions?
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Je vous remercie de votre question.
Je suis d'accord avec vous sur le fait que les entreprises émettrices doivent payer la note. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons fixé un prix sur la pollution, et ce, partout au Canada. Cela est très important. Il s'agit d'un incitatif qui permet d'assurer que les entreprises prennent des mesures pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
Bien sûr, nous devons aussi faire des investissements afin d'accélérer le travail de réduction des gaz à effet de serre. Nous faisons des investissements dans tous les secteurs du Canada. Nous avons évidemment investi dans le secteur automobile, afin d'accélérer le déploiement de véhicules zéro émission. Nous avons également investi dans le secteur de l'acier, en Ontario, et le secteur de l'aluminium, au Québec. Nous devons maintenant accélérer le travail dans le secteur pétrolier et gazier. Enfin, nous devons aussi protéger les emplois des travailleurs; ils sont dans une position très difficile depuis le début de la crise de la COVID‑19.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je veux revenir en arrière. Je suis resté fixé sur le rapport du commissaire à l'environnement sur ce fonds. Il a averti que votre gouvernement devait cesser d'aller « d'échec en échec ». À quel point les résultats ont-ils été mauvais? Depuis Paris, nos émissions ont augmenté et les autres pays du G7 s'en tirent mieux que nous. Le commissaire dit que les émissions augmentent même si vous avez conçu ces différents programmes qui sont censés les réduire.
La raison en est que le programme a été conçu comme une subvention aux combustibles fossiles. Selon le commissaire, le ministère n'a pas conçu ce programme « de manière à permettre des réductions crédibles et durables des émissions de gaz à effet de serre ». Ce qui m'a vraiment frappé, c'est qu'il a dit que les entreprises bénéficiaires avaient déclaré qu'elles allaient utiliser ces fonds pour augmenter leur production. Encore une fois, si votre intention était de verser une autre subvention au secteur pétrolier, vous auriez dû être honnête à ce sujet.
Voici ma question: Si vous dites au monde — et votre a dit au monde — que le Canada allait plafonner ses émissions, et si le Canada va augmenter sa production, comment allez-vous être crédibles quand vous dites que vous allez vraiment réaliser vos objectifs de réduction de gaz à effet de serre? Si vous utilisez les cibles du méthane pour augmenter la production, comment pouvons-nous vous faire confiance sur quoi que ce soit d'autre?
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Désolé, je dois vous interrompre. Le temps qui nous est imparti est écoulé.
Comme je l'ai dit, la tâche des interprètes se complique lorsque plusieurs personnes parlent en même temps.
Nous avons atteint la fin des deux minutes et demie, nous allons donc conclure avec ce groupe de témoins, malheureusement.
Monsieur Maguire, je sais que vous avez dit que vous aviez une question brève, mais nous avons deux intervenants qui...
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C'est excellent. Merci à tous d'avoir été patients pendant nos préparatifs.
Nous allons maintenant passer à notre deuxième groupe de témoins. Je ne sais pas si tout le monde était là au début.
Voici brièvement comment nous fonctionnerons: je lèverai un carton jaune lorsqu'il vous restera 30 secondes, soit lors de vos déclarations liminaires ou lorsque le temps imparti à chaque député pour les questions est écoulé. C'est un simple avertissement. Avec le carton rouge, une fois le temps écoulé, ne vous arrêtez pas au milieu d'une phrase, mais terminez votre propos et nous pourrons passer à la personne suivante afin que chacun ait l'occasion de participer.
Pour ce groupe de témoins, nous accueillons Aaron Cosbey, associé principal de l'Institut international du développement durable. Nous accueillons aussi Chris Severson-Baker, directeur régional pour l'Alberta, et Jan Gorski, directeur, Pétrole et Gaz, du Pembina Institute. De Whitecap Resources, nous accueillons aussi Patrick Kitchin, directeur de la viabilité de la réglementation et de la durabilité de l'environnement.
Merci à tous de prendre le temps de contribuer à notre étude. Nous allons passer aux déclarations liminaires. Chacun d'entre vous disposera de cinq minutes, puis nous passerons à la période de questions.
Monsieur Cosbey, nous allons commencer par votre déclaration liminaire. Vous disposez de cinq minutes.
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Merci beaucoup, monsieur le président, et merci de m'offrir la chance de présenter la position de l'IIDD aux audiences du Comité sur le FRE.
En général, l'IIDD est préoccupé par les subventions aux secteurs pétrolier et gazier, que ce soit aux fins de la décarbonisation ou à d'autres fins. Ils ont un long passé d'activité dans ce domaine, tant au Canada qu'à l'étranger, et le Canada a malheureusement un long passé d'engagements non respectés.
Pour être clair, nous sommes favorables à des subventions bien conçues qui facilitent la transformation à venir de l'industrie. Il est évident que le gouvernement a un rôle important à jouer pour aider l'industrie lourde canadienne à se décarboniser sur la voie de la carboneutralité, qu'il s'agisse de l'acier, de l'aluminium, du ciment ou des pâtes et papiers, mais le secteur du pétrole et du gaz diffère de ces autres secteurs industriels, et ce, sur trois plans importants.
Premièrement, les subventions accordées au pétrole et au gaz peuvent accroître la viabilité d'industries dont les produits doivent, à terme, être moins nombreux, et non plus nombreux, si nous voulons nous attaquer à la crise des changements climatiques. Deuxièmement, cela signifie que chaque dollar dépensé pour aider le secteur du pétrole et du gaz est un dollar qui n'est pas dépensé pour aider les secteurs de l'avenir, ceux qui assureront la croissance à long terme pour les travailleurs et les familles canadiennes. Troisièmement, l'aide au secteur du pétrole et du gaz risque de donner l'impression qu'il n'est pas nécessaire de se préparer à une époque où la demande pour ses produits ne sera plus aussi forte qu'aujourd'hui. Cela risque de rendre l'éventuelle transition plus douloureuse pour les travailleurs et les communautés qui en dépendent, et cela risque de contribuer à la crise financière liée à d'importants actifs délaissés.
Ces problèmes sont importants pour les subventions dans le secteur du pétrole et du gaz, mais ils s'ajoutent aux risques et aux pièges inhérents à toute subvention à l'industrie. La liste est longue, mais voici certaines des principales préoccupations qu'elles suscitent: elles peuvent créer des intérêts directs qui plaideront pour leur maintien une fois que la subvention ne sera plus nécessaire. Elles peuvent émousser les encouragements à la transition énergétique et, bien sûr, elles peuvent violer le principe du « pollueur-payeur ».
Pour aider à garantir que l'argent des contribuables canadiens ne produit pas ce genre de résultats indésirables, l'IIDD a établi quelques principes fondamentaux, dont certains sont très pertinents pour le FRE. Ils sont dérivés et adaptés en partie d'un ensemble de principes directeurs et de recommandations sur les dépenses vertes dans le plan de relance post-COVID, notre rapport intitulé « Green Strings » qui expose des « conditions vertes ». Ce rapport a été soumis au gouvernement en 2021 avec l'appui de 12 autres organismes environnementaux canadiens.
Le principe selon lequel aucune aide ne devrait être offerte pour réduire le coût de production des exploitations gazières et pétrolières est particulièrement pertinent ici. Aucune aide ne devrait être offerte pour se conformer à la réglementation existante ou éventuelle. Des aides ne doivent être accordées qu'aux demandeurs qui disposent de plans crédibles pour atteindre la carboneutralité d'ici 2050. Enfin, l'aide doit être accompagnée d'un message clair à propos des visions du Canada pour l'avenir du secteur et d'un engagement concret envers une transition équitable pour les travailleurs et les collectivités touchés.
Compte tenu des pièges inhérents aux subventions, que nous connaissons assez bien, notre préférence irait clairement à une réglementation solide et efficace qui réduirait les émissions de méthane dans le secteur du pétrole et du gaz. Toutefois, une telle réglementation n'existe pas et il faudra peut-être des années pour l'obtenir. Par conséquent, nous estimons que des programmes comme le FRE ont un rôle à jouer à titre de solution de rechange.
Nous sommes heureux de constater les améliorations apportées au FRE en vue de la troisième période d'inscription. Certaines améliorations sont compatibles avec les principes que je viens d'exposer. Nous sommes particulièrement satisfaits des principes selon lesquels les projets doivent éliminer intégralement les sources continues de mise à l'air et de torchage de routine intentionnels, que les projets doivent dépasser les prescriptions de la réglementation, existantes ou éventuelles, et que les projets doivent présenter un dossier financier détaillé pour les réductions des émissions additionnelles qu'ils prétendent financer. Tout cela est bien.
Malheureusement, nous prévoyons que la rigueur accrue se traduira par un très faible nombre de demandeurs, de sorte que les réductions de méthane seront très faibles lors de la troisième période d'inscription, ce qui pose un problème. D'autres témoins ont insisté sur l'urgence de réduire les émissions de méthane. Il existe des réductions immédiates et peu coûteuses. Nous le savons grâce à l'expérience du FRE en la matière, et nous le savons grâce à d'autres expériences internationales. Que devons-nous en conclure? J'y reviens. Il nous reste une réglementation solide et efficace en matière de méthane, avec deux objectifs principaux: éliminer intégralement la mise à l'air et le torchage intentionnels; et mieux comptabiliser et réduire les fuites.
Il existe des substituts technologiques aux contrôleurs pneumatiques à gaz, principale source d'émissions intentionnelles, et ils sont bon marché. Ces contrôleurs devraient être supprimés par voie réglementaire. Toutes les autres sources d'émissions intentionnelles connues devraient être mesurées. En l'état actuel des choses, nous ne connaissons pas l'ampleur du problème, alors comment pouvons-nous nous y attaquer? Comment pouvons-nous prendre des engagements crédibles? Nous avons besoin de relevés obligatoires plus fréquents pour détecter et réparer les fuites. Ces émissions non intentionnelles constituent une grande partie de l'écart que nous constatons encore et encore entre les émissions mesurées et les émissions déclarées.
En conclusion, la meilleure option est une réglementation solide dans ce secteur. La deuxième option, jusqu'à ce que cette première option se concrétise, est de ménager une place au type de réglementation rigoureuse qui réduira les émissions de méthane, mais il s'agit strictement de la deuxième option. Pour contrer les problèmes liés à ce deuxième choix, référez-vous à nos principes sur l'administration des subventions et de l'aide aux secteurs comme le pétrole et le gaz.
Je vous remercie de votre attention.
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Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je suis Jan Gorski, le directeur du programme Pétrole et Gaz au Pembina Institute. Mon collègue Chris Severson-Baker est le directeur régional pour l'Alberta.
Le Pembina Institute est un groupe de réflexion à but non lucratif qui défend des politiques solides et efficaces pour favoriser la transition vers une énergie propre au Canada. Nous avons plaidé pour une réglementation sur le méthane à l'échelle provinciale et fédérale depuis avant 2015, et nous avons guidé son élaboration et sa mise en œuvre depuis lors. Nous avons aussi présenté des recommandations à Ressources naturelles Canada sur la conception du Fonds de réduction des émissions, qui ont été retenues. Pembina travaille depuis longtemps sur les enjeux environnementaux dans le secteur du pétrole et du gaz, depuis près de quatre décennies.
En 2021, nous avons constaté un élan grandissant pour la réduction des émissions de méthane, tant au Canada que dans le monde entier. Les rapports de l'Agence internationale de l'énergie, du Programme des Nations unies pour l'environnement et du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat ont tous souligné le besoin urgent de s'attaquer aux émissions de méthane en 2021. Plus de 100 pays, dont le Canada, ont signé l'engagement mondial sur le méthane lors de la COP26. C'était un signal clair de l'imminence d'une intervention mondiale.
Des recherches récentes confirment que nous devons agir sans tarder sur le méthane. La réduction de moitié d'ici 2030 des émissions mondiales de méthane provenant de toutes les sources humaines, y compris le pétrole et le gaz, l'agriculture, les déchets et autres, permettrait d'éviter une augmentation supplémentaire d'un demi-degré des températures mondiales d'ici 2100. Cela équivaut à ralentir le réchauffement de la planète de près de [difficultés techniques]. C'est considérable.
La nécessité d'agir maintenant est d'autant plus urgente que les émissions réelles de méthane sont beaucoup plus élevées que les estimations officielles actuelles. Des études menées au Canada et aux États-Unis montrent régulièrement que les émissions de méthane provenant du pétrole et du gaz pourraient être deux fois plus élevées que les chiffres officiels actuels.
Le Canada doit se rapprocher le plus possible de l'élimination des émissions de méthane du secteur du pétrole et du gaz d'ici la fin de la décennie. Une étude menée en 2019 par le Canadian Energy Research Institute a examiné la quantité de méthane provenant du pétrole et du gaz que nous pourrions éliminer en utilisant les technologies disponibles. L'étude a révélé que les émissions de méthane en 2017 pourraient être réduites de 33 mégatonnes. D'après notre analyse de ce rapport, cela se traduit par une réduction de près de 90 % par rapport aux niveaux de 2012, pour un coût inférieur à 25 $ la tonne. C'est très peu coûteux par rapport au prix du carbone, qui passera à 170 $ la tonne.
Cela montre que nous disposons des technologies nécessaires pour réduire radicalement les émissions de méthane, que ces technologies sont disponibles sur le marché et qu'elles sont financièrement viables.
Le gouvernement fédéral a récemment fixé un nouvel objectif de réduction des émissions de méthane provenant du pétrole et du gaz d'au moins 75 % d'ici à 2030 et est bien placé pour devenir un chef de file dans la lutte contre le méthane, mais il doit maintenant agir sans délai pour mettre en œuvre une politique permettant de réaliser et de dépasser cet objectif. Ces mesures doivent inclure une réglementation stricte, mais aussi relever les défis liés aux données sur le méthane et aplanir les obstacles liés aux infrastructures. Comme je l'ai dit, il y a beaucoup d'incertitude quant aux émissions de méthane des exploitations pétrolières et gazières. Nous devons donc améliorer les données sur le méthane et continuer à nous attaquer au type d'obstacles liés aux infrastructures auxquels le Fonds de réduction des émissions s'est attaqué.
Ce fonds a été mis en place pendant la pandémie pour créer de l'emploi et des retombées économiques dans le secteur du pétrole et du gaz, tout en réduisant les émissions. À l'époque, la propre modélisation du gouvernement montrait que la réglementation canadienne n'atteignait pas l'objectif de réduire de 40 % d'ici à 2025 les émissions de méthane. Le fonds devait aussi aider à combler le fossé qui nous sépare de notre objectif pour 2025.
Comme Pembina l'a recommandé, le fonds a été conçu pour dépasser les réductions progressives et favoriser l'élimination intégrale des émissions de méthane, ce que la réglementation en vigueur n'exige pas. L'établissement de cet objectif ambitieux était la seule façon pour le fonds d'obtenir des réductions supérieures à la réglementation en vigueur. À cet égard, le fonds a été un succès, puisque 97 % des fonds sont allés à des projets qui ont éliminé le méthane.
Étant donné l'urgence de la crise climatique et la nécessité d'agir rapidement à propos du méthane, le fonds devrait être maintenu jusqu'à la fin de l'année 2022 afin d'éliminer autant de méthane que possible.
Nous ne savons toujours rien des progrès accomplis vers l'objectif de réduction du méthane du Canada d'ici à 2025, car le récent rapport d'étape du gouvernement fédéral n'a pas inclus les mises à jour promises de l'inventaire national ni les données les plus récentes sur les émissions réelles de méthane. Il faut calculer les réductions obtenues grâce au fonds en complément de l'effet de la réglementation, c'est‑à‑dire celles qui dépassent les exigences de la réglementation. Cette information est essentielle pour évaluer les progrès du Canada vers l'objectif de 2025.
Le gouvernement fédéral doit également publier des renseignements plus détaillés sur le FRE qui décrivent les types de projets, les coûts et les réductions d'émissions qui ont été financés. Ces données guideront la conception des politiques futures.
En conclusion, le Canada a l'occasion d'être un chef de file dans la lutte contre le méthane. Il est essentiel de le faire pour réduire les émissions du secteur du pétrole et du gaz. Le gouvernement ne doit pas perdre de temps et il doit agir rapidement pour mettre en oeuvre une politique visant à dépasser notre objectif de 2030 en matière de réduction des émissions de méthane.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président, de m'offrir l'occasion de m'adresser à votre comité au sujet du Fonds de réduction des émissions de Ressources naturelles Canada.
Comme vous l'avez dit, je suis le directeur de la viabilité de la réglementation et de la durabilité de l'environnement chez Whitecap Resources, un producteur de pétrole et de gaz qui détient des actifs dans les quatre provinces de l'Ouest. Nous sommes l'exploitant et le propriétaire majoritaire du plus grand projet de séquestration de dioxyde de carbone au Canada, l'unité Weyburn, qui a séquestré en permanence environ 38 millions de tonnes de dioxyde de carbone à ce jour.
Notre entreprise figure parmi les chefs de file de notre secteur en matière d'intensité carbonique et de réduction des émissions. Au cours des dernières années, nous avons regroupé nos installations, étendu nos réseaux de pipelines, mis à niveau plus de 1 000 dispositifs de mise à l'air et installé des capteurs de gaz dissous, pour ne citer que quelques exemples des moyens que nous prenons pour réduire l'empreinte carbone de nos actifs.
Au début de 2021, Ressources naturelles Canada a approuvé un projet d'élimination d'émissions que Highrock Resources, une société acquise par Whitecap en juillet, avait soumis dans le cadre de ce programme. Ce projet a permis d'éliminer la plus grande source d'émissions de l'entreprise grâce à la construction d'un pipeline de 10 kilomètres destiné à transporter le gaz dissous qui était auparavant brûlé à la torche pour le traiter et le vendre.
La portée du projet approuvé ne comportait pas d'aménagement supplémentaire ni de mise à niveau des installations et il a été achevé au début de décembre 2021 pour environ 1,4 million de dollars. On estime qu'il a permis d'éliminer 36 500 tonnes d'équivalent en dioxyde de carbone au cours des 12 premiers mois. Il faut préciser qu'il n'aurait pas été exécuté à ce moment‑là sans aide financière, car les paramètres économiques étaient inférieurs à nos taux de rendement internes.
L'exécution de ce projet, situé dans le Sud-Est de la Saskatchewan, a directement profité à 19 entreprises de services tierces que nous avons recrutées pour mener à bien des travaux d'ingénierie, de la conception à la construction. Le projet a aussi profité directement à de nombreux propriétaires fonciers locaux qui ont reçu une compensation financière pour l'accès à l'emprise de surface pendant la construction. Les 1,4 million de dollars engagés par Whitecap ont contribué à maintenir des emplois pendant une période d'activité réduite pour notre secteur, ce qui a soutenu directement ces entreprises et la population locale.
Highrock a présenté cette demande de financement parce qu'elle offrait une occasion d'exécuter un grand projet de réduction des émissions dépassant les exigences minimales de la réglementation provinciale sur le méthane, à un coût moindre pour l'entreprise pendant une période où les marchés de l'énergie étaient nettement déprimés.
Lors de la troisième période d'inscription, nous avons commencé à préparer des demandes pour plusieurs projets à la fin de 2021. Suite aux modifications du programme apportées en réaction aux conclusions de l'audit mené par le Bureau de la vérificatrice générale du Canada, nous poursuivons la préparation de nos demandes pour ces projets.
Actuellement, il s'agit tous des projets de conservation du gaz dissous et les réductions des émissions connexes sont estimées à plus de 250 000 tonnes d'équivalent en dioxyde de carbone au cours de la première année. Ces réductions seraient directement attribuables au Fonds de réduction des émissions, car les actifs visés respectent actuellement la réglementation provinciale sur le méthane.
Le Fonds de réduction des émissions a été mis en œuvre à une époque où l'industrie pétrolière et gazière éprouvait des difficultés en raison des baisses marquées et soutenues des prix des produits de base. Les entreprises de services ont dû supporter un lourd fardeau, car les producteurs en amont ont fait preuve de prudence en réduisant leurs programmes d'immobilisations afin de protéger leur bilan pendant le ralentissement.
L'exécution des projets approuvés a permis de soutenir directement de nombreuses entreprises de services, des entrepreneurs, des collectivités et des propriétaires fonciers pendant une période d'incertitude et de besoin. En général, ces projets engendreront aussi du travail continu pour des entrepreneurs tiers qui fourniront des services tels que l'entretien et la réparation de l'équipement.
Dans l'ensemble, je crois que ce programme a été efficace pour favoriser des progrès vers nos objectifs nationaux de réduction des émissions et, surtout dans le cas des deux premières périodes d'inscription, à soutenir un secteur qui était en proie à de graves difficultés financières.
Comme le révèlent les conclusions de l'audit, le taux de participation aux deux premières périodes d'inscription a été plus faible que prévu, probablement en raison du court délai de dépôt des demandes, que la plupart des entreprises ont eu beaucoup de mal à respecter. Avec un délai beaucoup plus long pour la troisième période d'inscription, je m'attends à ce que beaucoup plus de projets soient soumis et que le gouvernement fédéral ait l'occasion de continuer à progresser vers ses objectifs climatiques et de dépasser les réductions attribuées aux cadres stratégiques en vigueur.
Comme l'économie se redresse et les prix des produits de base se relèvent, le Fonds de réduction des émissions peut encore apporter un avantage substantiel aux Canadiens en permettant des réductions d'émissions encore plus importantes, plus tôt qu'elles n'auraient été réalisées autrement.
Je vous remercie encore une fois, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à votre comité et de vous faire part de notre expérience avec le Fonds de réduction des émissions de Ressources naturelles Canada.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous nos intervenants pour leurs excellents exposés dans le cadre de notre étude sur le Fonds de réduction des émissions et son efficacité.
Merci, monsieur Cosbey, pour votre exposé. Je tiens à préciser que j'ai été le porte-parole en matière d'environnement au Manitoba. J'ai beaucoup travaillé avec l'IIDD. J'apprécie aussi votre présentation d'aujourd'hui.
Monsieur Kitchin, votre entreprise, comme vous venez de le décrire, a montré qu'il est possible de réduire les émissions de méthane fugitives et intentionnelles, les torchères et autres grâce aux fonds que vous avez reçus. Pouvez-vous résumer ce que votre entreprise a fait exactement pour réduire les émissions de méthane? Vous avez évoqué Highrock Resources et d'autres aussi.
En fait, j'aimerais reprendre là où M. Maguire a laissé, à propos de l'importance de l'innovation, de la mise en valeur des technologies canadiennes et de la possibilité de les exporter.
Je dis cela parce que je crois que l'un des témoins a parlé des fuites de méthane. Au cours des dernières semaines, nous avons eu de très bons exemples de l'avant-gardisme de la technologie canadienne pour tenter de régler ce problème. Une liste des 100 meilleures industries de technologie propre au monde a été dressée. Le Canada compte 13 de ces entreprises, dont GHGSat.
Je tenais à le mentionner, car je pense que c'est vraiment important. L'entreprise possède les seuls satellites au monde dont la résolution est assez fine pour isoler les fuites mineures par plateformes individuelles afin qu'elles puissent être rapidement colmatées. En fait, chaque semaine, l'entreprise repère ces fuites, ce qui nous permet de réagir et de nous attaquer à cette source d'émission de méthane.
Je m'écarte du sujet. Je sais que nous parlons aujourd'hui de la mise à l'air intentionnelle, mais je pense qu'il est toujours important de dire que nous sommes toujours à l'avant-garde de certaines innovations fascinantes ici dans notre pays. C'est une partie du puzzle. Il y a des pièces plus importantes du puzzle, dont le Fonds de réduction des émissions.
Je veux en venir au sujet de la mise à l'air intentionnelle. Je vais peut-être commencer par le témoin du Pembina Institute, M. Baker.
Je crois que vous avez mentionné que 97 % des projets portaient sur la mise à l'air intentionnelle. Est‑ce exact? Ai‑je le bon chiffre?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je poserai une brève question à M. Cosbey. J'espère qu'il m'entend bien et que l'interprétation fonctionne. On me fait signe que oui.
Monsieur Cosbey, lors de votre présentation, vous avez parlé d'une réforme du soutien financier aux énergies fossiles et vous avez évoqué quelques principes de base. Si je vous comprends bien, on ne devrait pas offrir de soutien à des projets qui visent à réduire le coût de production, pas plus qu'il ne devrait y avoir de soutien à des projets qui visent à rendre l'industrie conforme aux réglementations.
J'ai l'impression que le Fonds de réduction des émissions s'inscrit directement dans ce que vous voyez comme étant de mauvaises pratiques en matière de financement des énergies fossiles. Est-ce votre vision?
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Je vais essayer d'être plus clair.
Il y a un principe de base en économie, et c'est celui de la concurrence. Pour être concurrentiel, il faut que ses coûts de production soient inférieurs au prix de vente des produits qu'on fabrique. Si je comprends bien, vous n'êtes pas capables de répondre seuls à la réglementation environnementale, et vous avez besoin du soutien du gouvernement. C'est ce à quoi ressemble le Fonds de réduction des émissions, et c'est ce que soulevait mon collègue, tout à l'heure, quand il disait qu'il devait y avoir une réduction d'impôt pour la captation du carbone. Cela signifie que, du point de vue du marché, vous n'êtes pas capables de réduire l'empreinte environnementale du secteur gazier et pétrolier sans avoir recours à des financements de l'État.
Je vous demanderais de me répondre par oui ou non, ce sera plus simple.
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Pour moi, la frustration vient du fait que nous nous entendons tous pour dire que le méthane menace la planète, que nous pouvons régler le problème...
Le premier ministre a pris des engagements très fermes à Paris, et plus fermes encore à la COP26. Comme l’a déclaré le commissaire à l’environnement, à quoi sert‑il de faire des promesses plus ambitieuses si l’on n’arrive pas à atteindre les cibles?
Quant aux cibles établies, est‑il possible par le biais de la réglementation de dire: « voici la cible à respecter, il faut l’atteindre dans 5, 6 ou 10 ans »? Que pouvons-nous réaliser au moyen de la réglementation?
Je pose cette question parce que je viens d'une ville minière. À cinq minutes de chez moi se trouve le plus beau lac que vous ayez jamais vu. J'y vais tous les jours. Il a été complètement contaminé au point qu’il faudra peut-être encore une centaine d'années avant qu'il soit propre, simplement parce que les rejets de cyanure et de mercure étaient autrefois acceptables. Nous avons des règlements pour mettre fin à ces pratiques. Je sais que les compagnies minières ont crié leur indignation d’avoir à le faire, mais notre eau et nos lacs sont maintenant protégés.
Je m’adresserai maintenant à M. Cosbey pour la question du soutien financier parce que le commissaire à l'environnement s’est dit très inquiet que ce programme ait constitué une subvention aux combustibles fossiles. Selon lui, le fait d’instituer des programmes dont on ne peut vérifier s’ils nous mènent effectivement vers nos cibles nous engage dans le mauvais sens.
Comment répondez-vous à cela? On nous a dit que sous le gouvernement libéral, des subventions totalisant 100 milliards de dollars ont été accordées au secteur pétrolier et gazier dans les cinq dernières années et que les émissions, elles, ont augmenté. Allons-nous dans le bon sens en donnant plus d’argent sans y rattacher de conditions?
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En réponse à la question du député, oui, les subventions au secteur pétrolier et gazier nous entraînent généralement dans le mauvais sens. Ils appuient sur l’accélérateur au lieu des freins alors que nous nous approchons du précipice.
De façon plus nuancée, quand on pense à ce que cela signifie d’avoir donné 100 milliards de dollars, il faut se demander quel était l’objectif de ce financement. Pour juger de l’efficacité, s’il s’agit de créer des emplois, examinons l’efficacité de cette création d’emplois. Toutefois, si nous disons vouloir — et c’est au cœur de nos principes — « trouver une façon de soutenir des secteurs sans augmenter la production ni réduire les coûts de production pour rendre plus viable une industrie dont nous savons qu’elle n’a pas d’avenir au Canada au‑delà de 2030 », plus nous soutenons ce secteur plus nous risquons de mettre en danger des actifs et plus nous risquons de toucher durement les travailleurs et les collectivités qui dépendent de ces secteurs.
Des subventions qui maintiennent la viabilité de ces secteurs et augmentent leur production nous mènent certainement dans le mauvais sens.
Je vais conclure ici. Pour moi, il est très important que nous investissions dans les régions de notre pays qui produisent de l'énergie, car, encore une fois, je viens d'une région minière et j'ai été témoin de transitions injustes et des brutalités qui en découlent. Nous avons une énorme expertise. Nous avons d'énormes compétences techniques et nous avons devant nous une superbe occasion à saisir. Pourtant, il semble que si nous continuons à donner de l'argent sans mécanisme d'imputabilité et sans normes, nous plaçons notre main-d’œuvre et nos entreprises dans une position très difficile alors même que l’Agence internationale de l’énergie souligne la menace d’actifs bloqués si nous ne commençons pas cette transition.
Seriez-vous pour des investissements qui nous permettraient réellement d’affirmer que « nous allons travailler avec le secteur de l’énergie; nous allons travailler avec l’Ouest et nous allons veiller à créer une nouvelle économie »?
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Merci, monsieur le président.
C'est avec beaucoup de fierté que je représente la circonscription de Fort McMurray-Cold Lake, qui se situe, comme vous le savez, dans une région pétrolifère.
Pour commencer, j'aimerais poser une question à M. Kitchin. Comme votre entreprise est également basée en Alberta — un peu plus au sud que mon comté —, je me demande à quel point vous connaissez le programme d'innovation technologique et de réduction des émissions du gouvernement de l'Alberta, aussi connu sous son acronyme anglais, le programme TIER.
Le projet que nous avons réalisé afin de transporter, pour traitement et vers le marché, du gaz naturel précédemment torché [difficultés techniques] un peu au‑dessus de la limite d'émissions imposée par la réglementation de la Saskatchewan sur le méthane. Cette réglementation est axée à la fois sur la dispersion dans l'atmosphère et sur le torchage, ce qui est assez unique dans ce domaine. Les règlements sur le méthane de l'Alberta et du gouvernement fédéral, tout comme ceux de la Colombie-Britannique, ciblent explicitement la dispersion dans l'atmosphère.
Dans le cas de Highrock Resources, il y avait très peu de dispersion dans l'atmosphère. Ce sont les volumes de gaz torchés qui causaient un léger dépassement de la limite. Sur le total estimatif des réductions, je crois, à la lumière des données dont j'ai pu prendre connaissance — je le répète, nous avons acquis cette entreprise il y a quelques mois à peine —, qu'environ le quart des réductions observées placerait l'entreprise sous les limites provinciales, le reste étant attribuable à l'argent du FRE.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous les participants. Je vous remercie de vos exposés d'aujourd'hui, que j'ai trouvés fort instructifs.
Je viens de l'est du Canada. Ma circonscription est située à Terre-Neuve-et-Labrador, et son économie est très fortement tributaire des ressources naturelles. Comme tous les autres Canadiens, nous souhaitons passer à la transition climatique, et nous voulons, à l'instar de la population de l'Alberta et de la Saskatchewan, le faire en atténuant le plus possible les répercussions sur les emplois et l'économie de notre province. Je peux donc certainement comprendre la perspective de mes collègues.
Comme l'a dit le ministre dans sa déclaration liminaire, nous devons accélérer les mesures qui s'imposent pour atténuer les changements climatiques. Bien sûr, nous savons que ces mesures ne se limitent pas à la réglementation et au seul processus réglementaire. Elles englobent également les programmes incitatifs. Elles englobent de nouvelles technologies et de nouveaux investissements. Elles englobent l'innovation. C'est ce que j'entends aujourd'hui de chacun d'entre vous, et comment ce programme de réduction d'émissions vous a aidés à opérer une partie de la transition dans votre coin de pays et dans vos entreprises.
Le rapport du commissaire à l'environnement et au développement durable contenait plusieurs très bonnes recommandations. J'aurais simplement souhaité que ce rapport aille un peu plus loin et s'intéresse aux entreprises qui ont reçu du financement, aux efforts que vous déployez ainsi qu'à la contribution plus globale de ces efforts non seulement à la réduction des émissions canadiennes de méthane mais aussi à l'émergence d'une main-d’œuvre très innovante et d'entreprises très techniquement spécialisées dans un domaine où la poursuite de notre parcours de transition s'accompagnera d'un besoin criant de main-d’œuvre.
J'ai beaucoup de questions, mais je vais essayer de me restreindre à celle‑ci, parce que je crois vraiment à la nécessité du FRE. Même s'il y a grandement place à l'amélioration, ce sont les incitatifs, et non seulement les règlements, qui aideront les Canadiens à opérer la transition sans qu'il soit nécessaire d'imposer de sévères mesures d'atténuation, et nous devons également en être conscients au gouvernement.
Monsieur Kitchin, je vais commencer par vous. J'ai écouté avec grand intérêt vos propos concernant le fait que vous avez pu aider les propriétaires fonciers et 19 entreprises tierces, même avec le projet dont vous avez hérité lors du rachat de Highrock Resources. Non seulement vous avez pu conserver des emplois locaux qui auraient disparu, mais aussi vous avez abaissé de plusieurs millions de tonnes les émissions de méthane.
Pouvez-vous me parler de ces travailleurs? Comment avez-vous fait pour maintenir ces emplois? Pour soutenir ces 19 entreprises? C'est ce qui m'intéresse vraiment. Aussi, quel volume de méthane le programme a‑t‑il permis de séquestrer? Allons-nous actuellement dans la bonne direction, durant la troisième phase? S'agit‑il d'un programme qu'on pourrait retoucher pour vraiment aider le secteur pétrolier et gazier à faire la transition d'une manière différente, en tablant sur le savoir-faire et l'innovation tout en continuant de réduire les émissions de méthane?
Vous m'avez posé plusieurs questions. Je ferai de mon mieux pour répondre à chacune.
Effectivement, c'était un projet de 1,4 million de dollars. Malheureusement, je n'ai pas devant moi l'information nécessaire pour connaître la totalité des 19 entreprises de services qui ont été directement soutenues. Dans le cas de ces 1,4 million de dollars et de la portion provenant du FRE, tout cet argent a directement abouti chez les entreprises de services et les propriétaires fonciers en transitant par notre entreprise. Rien n'a servi à payer les salaires des employés de Whitecap, à verser des primes ou quoi que ce soit du genre, et tout l'argent est allé aux collectivités, aux particuliers et aux entreprises de la région.
Globalement, le projet a permis d'éliminer quelque 36 500 tonnes d'émissions. Nous mesurons sur place ces réductions avec des compteurs de transfert pour pouvoir déterminer avec précision le volume d'émissions captées et réduites grâce à ce programme. Nous avons l'obligation de déclarer ces données à Ressources naturelles Canada, de manière que ce ministère puisse, à l'issue des 12 mois, quantifier exactement la réduction par rapport à l'estimation initiale.
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Je poserai une question très brève pour laisser la chance à M. Angus de s'exprimer.
Monsieur Gorski, vous avez dit que vous aviez fait des recommandations à Ressources naturelles Canada et que, selon vous, le programme du Fonds de réduction des émissions avait atteint certains de ses objectifs.
Or cela ne cadre pas nécessairement avec ce que nous a dit le commissaire à l'environnement et au développement durable pour une raison bien simple: j'ai l'impression que, si on veut réduire les émissions de méthane, la première chose qu'on doit faire, c'est de ne pas accroître la production de gaz et de pétrole.
Selon le rapport du commissaire, plus des deux tiers des projets qui ont été acceptés, soit 27 projets sur 40, entraîneraient une augmentation de la production. Je ne vois donc pas comment les objectifs du programme ont pu être atteints s'il y a eu une augmentation de la production de gaz et de pétrole, laquelle va de pair avec une augmentation des émissions de méthane. Pourriez-vous m'expliquer cette subtilité?
Ma question s'adresse à M. Cosbey, et touche plus précisément l'additionnalité prônée par le commissaire dans son rapport. Si on souhaite parler de réduire les émissions de méthane, il doit s'agir de nouvelles émissions nettes qui viennent s'ajouter aux quantités qui auraient déjà été rejetées.
Monsieur Cosbey, pourriez-vous reformuler vos propos pour le compte rendu? Comparer l'investissement d'argent supplémentaire — qui, la dernière fois, ne s'est pas avéré être en sus de ce qui se serait déjà produit — au resserrement de la réglementation, qui est un moyen plus efficace de réduire les émissions de méthane?
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Après la réunion de lundi, nous prévoyons tenir une réunion d'une heure en sous-comité pour vraiment discuter et voir la direction que nous souhaitons prendre. Je compte également envoyer un courriel à tous les membres du sous-comité, pour leur demander de nous faire part de leurs réflexions à cette réunion. Nous en parlerons lundi.
Avant de conclure, j'aimerais ajouter qu'à notre prochaine réunion, lundi, nous allons commencer notre prochaine étude, qui porte sur le plafonnement des émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier. La présence de tous les témoins a été confirmée. L'avis de convocation a été publié, et chacun d'entre vous devrait en avoir pris connaissance.
J'aimerais remercier les témoins entendus d'aujourd'hui: M. Cosbey de l'Institut international du développement durable, M. Severson-Baker et M. Gorski du Pembina Institute, et M. Kitchin de Whitecap Resources. Tous vos témoignages ont été très intéressants et utiles.
Sur ce, je remercie tous les membres pour les excellentes questions qu'ils ont posées aujourd'hui.
Prenez soin de vous, et je vous souhaite un bon restant de semaine. À lundi.